… Voilà donc le fond de mon chagrin ! […] Cette doctrine, suivant lui, transforme l’Art tout entier : les genres divers seront modifiés jusque dans leur fond. […] Ces grandes figures mystérieuses, le fossoyeur, le forgeron, le cordier, les pêcheurs, s’esquissent sur un fond de pluies, de neiges, et des rafales de vent, soudaines, rendent plus tragique cette image de désolation. […] Ses lumières extravagantes et ses fumées sont un prestige auquel cèdent irrésistiblement les volontés, et son appel retentit au fond des horizons. […] On dirait qu’elle s’accoude au balcon de sa rêverie et se voit, silhouette grave ou souriante suivant l’heure, emblème surgi du fond obscur d’elle-même, figure de tristesse ou de joie.
Mais sur un fond banal de vers quelconques et de négligences de langage, un essaim de vers bien frappés et bien placés pointent et s’épanouissent comme des roses de mai sur les broussailles.
Dupuy n’est, ni pour la forme, sans mérite, ni, pour le fond, sans portée.
La plupart des Ouvrages de ses Confreres, sont des déclamations pleines d’emportemens & de mensonges ; le langage en est aussi dégoûtant, par sa barbarie, que le fond des sentimens en est révoltant.
Au 9 thermidor, la dictature républicaine a cessé, et pour la seconde fois l’anarchie recommence, non plus cette anarchie vive, confiante, aventureuse, animée au fond d’une seule pensée et d’une seule espérance, telle qu’on la vit du 14 juillet au 10 août, dans les luttes du peuple avec le trône ; mais une anarchie plus triste et parfois même Hideuse, plus en proie aux petites intrigues qu’aux grandes passions, pleine de peurs et de remords, de mécomptes et de rancunes, de découragement et de désespoir, espèce d’acharnement misérable entre des vaincus et des blessés sur un champ de bataille tout sanglant. […] D’abord, les héros du jour, les thermidoriens, Tallien à leur tête, la plupart anciens amis de Danton, gens sans principes, sans considération personnelle, voulant au fond la république, mais capables de trop d’indulgence par faiblesse, de trop de rigueur par mauvaises passions ; en face d’eux, les Montagnards décidés, la plupart républicains convaincus, austères et fanatiques, les uns croyant encore à la vertu de Robespierre, les autres n’y croyant plus, mais n’en tenant pas moins au système qu’il avait fondé ; enfin, entre ces deux côtés ennemis, les hommes du Marais, qui commençaient à lever la tête, à demander des garanties et des amnisties, gens longtemps inertes et muets par peur, mais qu’on allait voir se ranimer, grandir de jour en jour, et expier leur nullité coupable par des services éminents, par du génie et même par de l’héroïsme : Sieyès et Boissy d’Anglas en étaient.
Il voulait que les lumières fussent de bon ton, que la philosophie fût à la mode ; mais il ne soulevait point les sensations fortes de la nature ; il n’appelait pas du fond des forêts, comme Rousseau, la tempête des passions primitives, pour ébranler le gouvernement sur ses antiques bases. […] M. de Buffon s’est complu dans l’art d’écrire, et l’a porté très loin ; mais quoiqu’il fût du dix-huitième siècle, il n’a point dépassé le cercle des succès littéraires : il ne veut faire, avec de beaux mots, qu’un bel ouvrage ; il ne demande aux hommes que leur approbation : il ne cherche point à les influencer, à les remuer jusqu’au fond de leur âme ; la parole est son but autant que son instrument ; il n’atteint donc pas au plus haut point de l’éloquence.
Et ce n’est point là, comme vous le pourriez croire, un simple accès de fièvre : car, d’abord, il appelle couramment son père dans le reste du journal : « mon bâtard de père » ; puis, relisant vingt ans après la page que j’ai citée, il ajoute en marge : « Ne rougis-tu point, au fond du cœur, en lisant ceci en 1835 ? […] A aller au fond des choses, Fabrice del Dongo représente assez exactement ce que Stendhal aurait souhaité d’être, et Julien Sorel (dans la première partie du Rouge et du Noir) ce qu’il a été.
Peut-être les deux hommes n’en font-ils qu’un au fond, mais je n’ai pas le loisir de le chercher aujourd’hui et je m’en tiens aux superficies. […] Voilà bien longtemps que je dis qu’au théâtre, le Français n’aime au fond que le drame en vers et le vaudeville !
Il me semble souvent que j’ai au fond du cœur une ville d’Is qui sonne encore des cloches obstinées à convoquer aux offices sacrés des fidèles qui n’entendent plus. […] Poursuis, comme l’astérie sourde et aveugle qui végète au fond de l’océan, ton obscur travail de vie ; obstine-toi ; répare pour la millionième fois la maille de filet qui se casse, relais la tarière qui creuse, aux dernières limites de l’attingible, le puits d’où l’eau vive jaillira.
Il y a au pied de cette colonne deux autres pharisiens à terre, l’un prêtant l’oreille, et l’autre vérifiant dans le livre saint les citations du petit quaker. à gauche, un groupe de prêtres assis, et au-dessus de ceux-ci, sur le fond, une femme, et peut-être Anne, la diseuse de bonne aventure, avec un pharisien debout. […] Ce vieux pharisien noir, à droite, a été peint avec du charbon pilé ; j’en dis autant de ces autres prêtres enfumés sur le fond.
., Fénelon aurait expressément voulu signifier ceci : Ce vieillard était noble et majestueux et non pas sordide et vulgaire ; ce teint était frais et vermeil, et non pas fané et pâle ; la demeure de Pluton est sombre, et non pas claire ; sa démarche est douce et légère, et non pas insolente et lourde, Quand il dit : « Ce secret s’échappa du fond de son cœur », ce serait pour donner plus de force que s’il eût dit : « Ce secret s’échappa de son cœur », Quand il remplace « troupeaux » par « tendres agneaux », c’est pour mieux accentuer l’innocence des victimes ; quand il dit : « Comme un serpent sous les fleurs », c’est pour peindre l’astuce et le danger, et lorsqu’il répète six fois par page (voir nos citations) le mot doux, c’est probablement encore pour souligner l’idée de douceur. […] Il est évident, en effet, que les pires auteurs ont toujours l’intention de signifier quelque chose, quand ils ajoutent une épithète qui ne signifie rien, et il est non moins évident que même les mots qui ne signifient rien signifient au fond toujours quelque chose.
Lui pourtant, qui accepte avec Spencer, contre Guyau, la théorie de l’art fin en soi, désintéressé, il sent bien que l’art doit avoir sa marque propre, que l’émotion esthétique se distingue en quelque chose des émotions ordinaires, et il recourt, pour se tirer d’embarras, à une hypothèse ingénieuse : « Nous croyons, écrit-il (p. 36), qu’il faudra à l’avenir distinguer dans l’émotion ordinaire (non plus esthétique) : d’une part, l’excitation, l’exaltation neutre qui la constitue, qui est son caractère propre et constant ; de l’autre, un phénomène cérébral additionnel, qui est l’éveil d’un certain nombre d’images de plaisir ou de douleur, venant s’associer au fond originel, le colorer ou le timbrer, pour ainsi dire, et produire la peine ou la joie proprement dites, quand elles comprennent le moi comme sujet souffrant et joyeux. » L’émotion esthétique aurait alors ceci de particulier, que, « tout en conservant intact l’élément excitation », elle « laisse à son minimum d’intensité l’élément éveil des images, etc. ». […] Il fallait, pour toucher le fond du plaisir du beau, remonter aux perceptions mêmes, aux états perceptifs de la vue ou de l’ouïe, lesquels sont agréables ou désagréables selon la nature et le degré de l’excitation.
Nous avons commencé par le poëte, parce que le poëte c’était le fond de sa nature, qu’elle a faussée, mais qui a toujours protesté ; — parce qu’où le poëte existe il est toujours l’axe du talent quelconque, qui roule, en brillant, par-dessus ! […] C’est un caprice de toilette que j’ai vu bien souvent réussir, de mettre un diamant ou une perle dans le fond d’une rose.
De gaîté, cette qualité vulgaire et toujours bien venue en France, il n’en a point, quoique le fond de beaucoup de ses historiettes soit comique. […] Grâce à cet homme, qui pêche des anecdotes comme on pêche des anguilles, jusque dans la vase, un esprit politique n’aurait-il pas, au moins, indiqué le mal de ce temps qu’on prend pour une époque de force et de virilité, et qui n’offre aux yeux fascinés que la ruine suspendue d’une société dont la tête va tout à l’heure porter contre le fond de l’abîme, mais qui, jusque-là, trouve doux de tomber ?
Mais cette vue, qui lui communiquerait de sa grandeur et l’envelopperait d’innocence, cette vue qui, du moins, serait une excuse à balbutier pour lui devant l’Histoire, on est obligé d’y renoncer dès qu’on étudie sérieusement le règne de ce malheureux prince, dont le pouvoir était construit sur la plus forte et la plus pure notion que les hommes aient eue jamais d’un roi, et qui aurait tout pu, jusqu’au dernier moment, s’il n’avait pas eu, dans le fond du cœur même, le honteux petit grain de sable qui, placé ailleurs, tua Cromwell. […] Il y a la reine en pied et de face, éclairée comme elle ne l’avait jamais été jusque-là, la reine, éblouissante et suave, restituée à ce fond d’éther qu’on avait trouvé le moyen affreux de salir, et sur la lumière bleue duquel ressort bien sa pure et grande physionomie.