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385. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre onzième. La littérature des décadents et des déséquilibrés ; son caractère généralement insociable. Rôle moral et social de l’art. »

Il ne faut voir en soi qu’un coin de la nature à observer, le seul qui ait été mis d’une façon constante à notre portée. […] Qui ne connaît les vers tant cités sur Une charogne : Rappelez-vous l’objet que nous vîmes, mon âme,     Ce beau matin d’été si doux : Au détour d’un sentier une charogne infâme,     Sur un lit semé de cailloux, Les jambes en l’air, comme une femme lubrique,     Brûlante et suant les poisons, Ouvrait d’une façon nonchalante et cynique     Son ventre plein d’exhalaisons. […] Une telle façon d’entendre la poésie est suffisante, peut-être, pour le poète lui-même, en qui ses propres vers éveillent une foule d’idées complémentaires, explicatives surtout ; mais pour le lecteur il n’en est point ainsi. […] Au loin un matou frileux et discret Miaulait d’étrange et grêle façon. […] la nuance seule fiance Le rêve au rêve et la flûte au cor… Paul Verlaine semble oublier que la musique, au moyen, des tonalités, des rythmes et du mouvement, détermine d’une façon marquée et précise, autant que le pourrait faire une couleur et pas seulement une simple nuance, le caractère général du morceau.

386. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre premier. Les signes — Chapitre II. Des idées générales et de la substitution simple » pp. 33-54

. — De cette façon, il est son représentant mental et se trouve le substitut d’une expérience qui nous est interdite. […] L’une et l’autre sont limitées à cela ; la tendance consécutive à la première aboutit aux mots a bule ; la tendance consécutive à la seconde aboutit au mot coucou. — Un pareil état diffère beaucoup du nôtre, et néanmoins il n’y a là que des tendances analogues aux nôtres, éveillées de la même façon que les nôtres, correspondantes à des caractères généraux comme chez nous, mais à des caractères moins généraux que chez nous, bref aboutissant à des noms semblables de son et différents de sens7. […] Le lecteur voit tout de suite qu’au lieu du nom de chat on pourrait mettre celui de chien, singe, crabe, et d’un animal quelconque, ou d’une plante quelconque, et aussi d’un groupe quelconque, animal ou végétal, aussi large ou aussi étroit qu’on voudra, et, en général, d’un groupe quelconque, moral ou physique ; l’opération serait pareille ; tous les noms généraux se remplissent de la même façon. — Ordonnés les uns par rapport aux autres, chacun avec son escorte de tendances, ils composent l’ameublement principal d’une tête pensante.

387. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Jean Richepin »

Le ton même de cette déclaration nous montre que la Chanson des Gueux (et j’en suis bien aise) n’est point une oeuvre de pitié humanitaire et révolutionnaire, à la façon des Misérables, si vous voulez. […] Il y a tant de façons d’y croire ! […] L’ode sur les Algues, qui s’ouvre de façon grandiose et somptueuse, finit, si je puis dire, en queue oratoire, par la figure que les professeurs nomment prétérition. « Comment dire tout cela, ô poète ?

388. (1890) L’avenir de la science « V »

D’un autre côté, niez l’immortalité d’une façon absolue, et aussitôt le monde devient pâle et triste. […] Il faut donc admettre que tout ce qui aura été sacrifié pour le progrès se retrouvera au bout de l’infini, par une façon d’immortalité que la science morale découvrira un jour 56 et qui sera à l’immortalité fantastique du passé ce que le palais de Versailles est au château de cartes d’un enfant. […] J’ai souvent fait réflexion qu’un Européen habile, sachant l’arabe, présentant une légende par laquelle il se rattacherait de façon ou d’autre à une branche de la famille du Prophète et prêchant avec cela les doctrines d’égalité ou de fraternité, si susceptibles d’être bien comprises par les Arabes, pourrait, avec huit ou dix mille hommes, faire la conquête de l’Orient musulman et y exciter un mouvement comparable à celui de l’islamisme.

389. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre VI. Pour clientèle catholique »

Or les catholiques ont plusieurs façons de démontrer que Dieu leur a réservé le singulier privilège de penser. […] Par ces façons d’escamoter la victoire, le pamphlétaire catholique ressemble à tous les pamphlétaires. […] Or le seul crime est de se préoccuper de la loi ; mais il y a deux façons de le commettre : obéir aux conventions ou les violer pour le plaisir enfantin de les violer.

390. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres inédites de la duchesse de Bourgogne, précédées d’une notice sur sa vie. (1850.) » pp. 85-102

On vient avertir que la viande est portée ; on soupe ; ce ne sont qu’éloges de la part du roi sur l’air noble de la petite princesse, sur la façon dont elle mangeait. […] Au départ de l’abbé pour Rome (1706), on remarqua beaucoup « que Mme la duchesse de Bourgogne lui souhaita un heureux voyage d’une tout autre façon qu’elle n’avait coutume de congédier ceux qui prenaient congé d’elle ». […] Enfin, cette véridique et terrible Madame que j’ai déjà citée sur l’article du vin, celle même qui avait trouvé les deux vers dans le jardin de Versailles, venant ici à l’appui du propos de Saint-Simon, nous dit sans plus de façon dans ses Mémoires : « À Marly, la Dauphine courait la nuit avec tous les jeunes gens dans le jardin jusqu’à trois ou quatre heures du matin.

391. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Patru. Éloge d’Olivier Patru, par M. P. Péronne, avocat. (1851.) » pp. 275-293

Pellisson, le plus laid des gens d’esprit, récite des vers brûlants de Catulle à Lesbie, traduits de sa façon. […] Mézeray, qui faisait l’office de secrétaire, lut le mot Jeu ; mais le hasard est souvent malin ; parmi les façons de dire proverbiales qui étaient citées, il y avait : Jeux de prince, qui ne plaisent qu’à ceux qui les font, « pour signifier une malignité ou une violence, faite par quelqu’un qui est en puissance ». […] Les dernières années de Patru furent marquées par une notoire indigence et par la façon honorable dont il la porta, et elles achèvent l’idée de son caractère mieux que n’aurait fait une fin plus adoucie.

392. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Regnard. » pp. 1-19

Hector, le valet du Joueur, dira dans son rêve de fortune : J’aurais un bon carrosse à ressorts bien liants ; De ma rotondité j’emplirais le dedans… Et le fat marquis, s’étalant aussi tout à l’aise, lâchera ce couplet que chacun achève de mémoire, mais que nous ne pouvons nous empêcher de rappeler : Moi, j’aime à pourchasser des beautés mitoyennes ; L’hiver, dans un fauteuil, avec des citoyennes, Les pieds sur les chenets étendus sans façons, Je pousse la fleurette et conte mes raisons… J’ai rendu toute justice et tout hommage à Boileau ; mais ici, dans cette large et copieuse façon de dire, Regnard remontait par-delà Boileau, et dérivait en droite ligne de Régnier. […] Bredouille réplique par la grande raison de tous les poètes heureux : « Pour moi, je n’y entends pas tant de façon ; quand une chose me plaît, je ne vais point m’alambiquer l’esprit pour savoir pourquoi elle me plaît. » Regnard aurait pu se dispenser de cette petite pièce ; Le Légataire se défendait tout seul avec les rires qu’il provoquait.

393. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre III. Zoïle aussi éternel qu’Homère »

Et en toute chose une façon de faire immodérée. […] C’est notre façon de nous délivrer. […] Cette façon de raisonner est triomphante, y adhérer est sage.

394. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Michelet »

III Le ridicule, — le ridicule sauveur, — comme on disait anciennement de Jupiter, voilà, en effet, la dernière ressource qui reste contre des livres contagieux à la façon de l’Amour de Michelet ! […] Pour l’acquit de sa conscience et de son titre, Michelet n’a pu se dispenser de nous donner une tempête de sa façon, la tempête de rigueur, qui, par parenthèse, n’est pas, au point de vue du talent, ce que j’aime le mieux dans son livre. […] Il a des façons diplomatiques et discrètes de s’exprimer qui ne semblent rien, et qui sont tout ; car elles n’éconduisent pas seulement Dieu, elles le font oublier.

395. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre premier. Le problème des genres littéraires et la loi de leur évolution » pp. 1-33

Pourrais-je me mettre d’accord avec lui sur la façon de concevoir les genres littéraires ? […] Quand je parle de « genre » lyrique, ou épique, ou dramatique, c’est, à mon sens, une façon pratique et très élastique de désigner trois modes essentiels de concevoir la vie et l’univers ; ces conceptions répondent à des tempéraments divers ou à des âges divers ; elles se succèdent le plus souvent chez le même homme ; elles peuvent même exceptionnellement cohabiter en lui. […] Mais à côté de ces trois états d’esprit, essentiels, qui se succèdent l’un à l’autre, étant provoqués et nourris par le changement des choses, il y a d’autres façons de voir et de sentir, d’une importance secondaire mais d’un caractère permanent, parce qu’elles sont provoquées par une qualité durable des choses ; nous touchons ici à un problème important de méthode.

396. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XIV : De la méthode (Suite) »

De là suit une certaine forme du condyle, pour que les deux mâchoires s’engrènent en façon de ciseaux, un certain volume dans le muscle crotaphite, une certaine étendue dans la fosse qui le reçoit, une certaine convexité de l’arcade zygomatique sous laquelle il passe, et une foule de propriétés qu’un anatomiste prédit. […] Vérifions de la même façon que la première cette seconde hypothèse formée de la même façon que la première, et nous arriverons à la même conclusion.

397. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article »

Il s’est attaché au genre Lyrique sacré, & plusieurs Bréviaires ont adopté des Hymnes de sa façon.

398. (1902) Le critique mort jeune

Pour les mêmes raisons et à peu près de la même façon que Nietzsche, il est profondément ennemi du christianisme. […] Il y a une thèse et un roman dans le « Pays natal » : l’un et l’autre se pénètrent de la plus heureuse façon. […] Voici d’ailleurs, selon lui-même, quelle est sa façon de penser. […] Écoutez cette façon de discours indirect, empruntée aux ratiocinations d’un vieux jurisconsulte. […] Le faux goût n’y est pas rare ni les élégances et la recherche à la façon de M. 

399. (1878) Nos gens de lettres : leur caractère et leurs œuvres pp. -316

C’est une façon d’implorer pour soi l’indulgence des autres, et c’est même à ce prix seul qu’ils peuvent l’espérer. […] Est-ce qu’il n’y a pas cent mille façons d’être un homme de forme comme d’être un homme du monde ? […] Géronte, d’aucune façon, ne lui donnerait Isabelle, l’ayant promise au gentilhomme Adraste. […] J’ai déjeuné de façon exquise, en compagnie d’un musicien lettré, d’un peintre instruit et d’un sculpteur spirituel. […] Féval, c’est la façon dont il apparente les talents et dont il les groupe.

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