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221. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Réponse à M. Dubout. » pp. 305-316

Seulement le désir de me nuire auprès de ces messieurs (chose impossible, je l’en préviens) l’entraîne un peu plus loin à de regrettables inadvertances. […] Dubout, comme l’ont insinué quelques médisants, ait obéi à un autre sentiment qu’au zèle pur de la vérité ; pas un instant je n’ai cru qu’il cédait, dans sa poursuite grotesquement acharnée, à un dépit cuisant d’auteur tombé, à une rage de vanité déçue, à une démangeaison de réclame, à une humeur processive et hargneuse d’homme d’affaires et de chicanou provincial, ou encore au désir têtu de montrer aux habitants de sa petite ville, témoins de son retour humilié, que ces gens de Paris ne lui faisaient pas peur et qu’ils n’auraient pas avec lui le dernier mot. » Qu’auriez-vous à dire ?

222. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Régnier, Henri de (1864-1936) »

Charles Morice Henri de Régnier reflète en des grâces lyriques, en des gestes de jeunesse puissante et qui, parfois, se veut laisser croire lasse, tous les désirs d’art de ce temps, les reflète sans tous expressément les réaliser. […] Stéphane Mallarmé, M. de Régnier n’a voulu borner à la forme ses désirs ; il est, pour penser ainsi, trop poète.

223. (1894) Propos de littérature « Chapitre Ier » pp. 11-22

Vielé-Griffin manquent d’une direction certaine, on les sent agités de sourds bouillonnements qui hésitent et retombent ; le poète y est inférieur à lui-même par la beauté réalisée, mais il y révèle de plus larges désirs qui longtemps cherchent leur forme définitive et s’illuminent, plus tard, dans la Vie et le Rythme. […] Quelques pages de vers écrites à l’instant du doute, nous révèlent le drame de son cœur et de son cerveau, et ce drame a été joué en chacun de nous par des acteurs muets qui sont la Crainte et l’Espoir, le généreux désir qui veut, la lâcheté qui hésite devant la vie, et notre faiblesse qui écoute et regarde.

224. (1888) Poètes et romanciers

La seule et innocente vanité dont il ait laissé trace après lui, c’est le désir qu’on rendit les honneurs militaires à son cercueil. […] Il faut chercher autre chose sous cette puissante allégorie : c’est l’âme humaine, touchée des immortels désirs. […] La Charité, plus forte que le Désir, va donner à l’homme la mesure du sacrifice divin. […] C’est le désir qui parle plus que la passion, et le désir égrillard, éveillé par l’occasion, ce qu’il y a de moins touchant au monde. […] Vain désir !

225. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — T — Tory, André »

Edmond Haraucourt C’est l’éternel refrain d’amour, mais qui, dans sa forme, apparaît moderne en ceci, qu’il constitue un type de cette condensation, de cette synthèse qui sont devenues le besoin moderne… Toi, c’est l’éternelle fiancée, celle qui meurt avec chacun de nos baisers, et qui revit avec chacun de nos désirs, le mirage consolant vers lequel nous marchons sans lassitude, qui fait notre désert moins nu et notre solitude presque aimée.

226. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » p. 465

Ce défaut se fait moins sentir dans sa Lettre sur les avantages & l’origine de la gaieté Françoise, & dans son Discours sur l’origine du désir général de transmettre son nom à la postérité.

227. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » p. 62

On y remarque, en général, un esprit nourri de la lecture des Livres saints, quelquefois, de l’onction, & presque toujours des règles de conduite utiles & propres à éclairer ceux qui auroient un vrai désir de pratiquer les devoirs de la Religion.

228. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le prince de Ligne. — II. (Fin.) » pp. 254-272

On se doute aisément de tout ce que mon désir de faire plaisir et de faire la guerre m’inspira dans l’instant. […] il a beau nourrir de nobles désirs et des ambitions généreuses, il ne sera plus que le vétéran des élégances, le dernier des chevaliers d’autrefois37. […] « Tout cela est très joli, disait-il des incrédulités fanfaronnes, quand on n’entend pas la cloche des agonisants. » Personne n’a mieux parlé que lui du principe de l’irréligion chez Voltaire, « de ce désir d’être neuf, piquant et cité, de rire et de faire rire, d’être ce qu’on appelait alors un écrivain hardi », toutes choses qui, selon lui, avaient plus animé Voltaire qu’aucune conviction positive.

229. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Maucroix, l’ami de La Fontaine. Ses Œuvres diverses publiées par M. Louis Paris. » pp. 217-234

C’est là tout mon désir ; car enfin si je l’aime, C’est seulement pour elle, et non pas pour moi-même. […] On conçoit qu’il ait dit de Virgile : « Virgile est ma folie, et je soutiendrai jusqu’à la mort que ses Géorgiques sont le plus bel ouvrage qui soit jamais sorti de la main des Muses. » On le conçoit surtout en lisant la pièce suivante, où respire avec l’amour des champs une sagesse tranquille, et dont j’interromprai à peine la citation complète par une ou deux remarques : Heureux qui sans souci d’augmenter son domaine Erre, sans y penser, où son désir le mène,             Loin des lieux fréquentés ! […] Mais c’est à Reims, sa dernière et véritable patrie, c’est au benoît préau qu’il en revient toujours, à la jolie maison qu’il se fait arranger et qu’on lui prépare (« Car j’aime la jeunesse, dit-il, aussi bien en maison qu’en autre chose ») ; c’est à son jardin, à ces allées qu’il y veut « toujours propres, toujours nettes et sablées comme celles de Versailles pour le moins » ; c’est à tout cela que va de lui-même son désir et son vœu : « La contrainte n’est pas mon fait, je n’aime que la liberté ; je ne l’ai pas haïe jusques ici, je l’aimerai à l’avenir encore davantage. » Il le redit de mille agréables façons : Somme toute, notre cher, les honneurs sont beaux, mais la liberté est admirable.

230. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Préface pour les Maximes de La Rochefoucauld, (Édition elzévirienne de P. Jannet) 1853. » pp. 404-421

Masséna, dans son héroïque défense d’Essling, obéissait moins au désir d’être prince qu’au noble orgueil de rester lui-même, l’homme de Gênes, l’opiniâtre et l’invincible, celui qui était fait pour justifier et surpasser encore la confiance que son empereur mettait en lui. […] ne m’approchez pas moi-même, lorsque, considérant d’un humble désir ce petit tableau hollandais, ce paysage de Winants, cette cabane de bûcheron à l’entrée d’un bois, Pauperis et tugurî congestum cespite culmen, une émotion dont je ne sais pas bien la cause me gagne et me tient là devant à rêver de paix, de silence, de condition innocente et obscure. […] L’inconvénient du système de La Rochefoucauld est de donner pour tous les ordres d’action une explication uniforme et jusqu’à un certain point abstraite, quand la nature, au contraire, a multiplié les instincts, les goûts, les talents divers, et qu’elle a coloré en mille sens cette poursuite entrecroisée de tous, cette course impétueuse et savante de chacun vers l’objet de son désir.

231. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Mémoire de Foucault. Intendant sous Louis XIV »

Dans un voyage et séjour de cinq mois à Paris, pendant lequel il alla prendre souvent l’air de Versailles, il commença par se bien pénétrer des intentions du roi et de ses désirs ; il exposa à Louis XIV, dans une audience particulière, et lui fit agréer toute la partie ostensible et séduisante de son plan ; il ne parla que de l’amour, de la vénération des Béarnais pour la mémoire de Henri IV, sentiments qui avaient passé à son petit-fils. […] Mais l’on comprend très-bien, après cette merveilleuse campagne et cette sorte de pêche miraculeuse à laquelle on vient d’assister, et qui faisait de Foucault l’intendant modèle, celui qui était proposé à l’émulation de tous les autres, que Louis XIV, trop bien servi et trompé dans le sens même de ses désirs, ait cru pouvoir changer de système ; qu’il ait renoncé à l’emploi et au maintien des Édits gradués, précédemment rendus dans la supposition que les conversions traîneraient en longueur, et que, persuadé qu’il n’y avait plus à donner, comme on dit vulgairement, que le coup de pouce (tant pis pour le grand roi, s’il n’est pas content de l’expression, mais je n’en sais pas de plus juste), il se soit déterminé à révoquer formellement l’Édit de Nantes. […] Foucault, tout en vieillissant dans cette douce intendance, avait un secret désir et quelque vague espoir de devenir ministre, surtout quand il vit son ami Chamillart contrôleur général, M. de Ponchartrain, un autre ami, étant chancelier.

232. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Méditations sur l’essence de la religion chrétienne, par M. Guizot. »

Il tient donc ces réponses pour de simples reflets de désirs, des répercussions et des réflexions du même au même, qui ne prouvent autre chose que le foyer intérieur d’où elles sont parties, et qui peuvent rester stériles comme tant de désirs. […] Aussi le répéterai-je encore, il vit pour le mieux en dehors des liens, exempt et affranchi de ce qu’entraînent à leur suite les relations de famille, les devoirs de société, les convenances publiques et oratoires : dès qu’on entre dans cet ordre mixte, le point de vue change ; il y a lieu de payer tribut, plus ou moins, au décorum de l’humanité, à ses désirs, à ses préjugés et à ses conventions honorables, aux bienfaits immédiats et à l’utilité pratique qui en découlent.

233. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DIX ANS APRÈS EN LITTÉRATURE. » pp. 472-494

1840 Et comme notre poil, blanchissent nos désirs. […] Cet accord s’essaye et subsiste plus ou moins déjà ; c’est la pensée et le vœu de cette Revue même, et c’est parce que la chose est en train de se faire qu’elle devient possible, et qu’il y a lieu d’insister, d’achever et de s’exhorter. — Un coup d’œil sur l’ensemble de la littérature et sur les phases de ses principaux personnages depuis dix ans éclairera encore mieux notre idée et la modération de notre désir. […] Dans ces hautes influences philosophiques qu’il ne se refuse pas, il est, par rapport à tous, une simple précaution à garder : c’est de songer parfois à ceux qui sondent à d’autres points la sphère infinie, ou qui même, lassés, ne la sondent plus, et de se rappeler aussi que l’actuel espoir, l’impétueux désir des fortes âmes n’est pas le but trouvé.

234. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre II. Distinction des principaux courants (1535-1550) — Chapitre I. François Rabelais »

Ceux qui ne veulent être rigoureusement ni protestants ni catholiques, les libres esprits qui repoussent tous les jougs et se sentent à la gêne dans toutes les Églises, les doux amis de la tolérance, qui mettent l’essence du christianisme dans la charité, les fougueux partisans de la bonne vie instinctive et naturelle, qui ne veulent point resserrer leurs désirs ni leurs jouissances, tous ceux-là désormais seront malheureux, s’ils ne sont bien habiles. […] Aux mêmes idées se rattache la pédagogie de Rabelais : et par là s’explique qu’il ait si vigoureusement exprimé dans ses programmes encyclopédiques les plus profonds désirs et les plus effrénées espérances de son temps. […] Il lui a fallu croire et professer la nature toute bonne, parce qu’il aimait toutes les manifestations de cette nature ; et son jugement moral s’est refusé à supprimer, même en désir et en pensée, aucune des formes de la vie.

235. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Pierre Loti »

Pour parler, si je puis, avec plus de précision, ces deux mille pages m’ont, suggéré, m’ont fait imaginer un trop grand nombre de perceptions inattendues ; et ces perceptions étaient accompagnées de trop de plaisir et en même temps de trop de peine, de trop de pitié, de trop de désirs indéfinis et irréalisables… Mon âme est comme un instrument qui aurait trop vibré et à qui le prolongement muet des vibrations passées serait douloureux. […] Elles flattent d’abord le désir de nouveauté que nous portons en nous. […] Mais ce qui lui est particulier, c’est que sensations et sentiments se résolvent d’ordinaire en je ne sais quelle langueur de volupté et de désir, comme si le trouble qu’éveille en lui la figure de la Terre était un peu semblable à un autre trouble, à celui qui nous vient de la femme, et y disposait l’âme et le corps… Tout cela est bien difficile à dire clairement.

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