/ 2227
704. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre premier. Beaux-arts. — Chapitre V. Sculpture. »

Un guerrier expirant au champ d’honneur, dans la force de l’âge, peut être superbe, mais un corps usé de maladies est une image que les arts repoussent, à moins qu’il ne s’y mêle un miracle, comme dans le tableau de saint Charles Borromée138.

705. (1759) Salon de 1759 « Salon de 1759 — Carle Van Loo » pp. 92-93

La draperie qui touche au corps a le mat et les reflets d’une cuirasse ; on dirait d’une plaque de cuivre jaune.

706. (1891) Impressions de théâtre. Cinquième série

C’est : « Nous mourons tous inconnus », et : « Quelles solitudes que ces corps humains !  […] Nous y voyons Zénocrate mourir de maladie et Tamerlan se lamenter interminablement sur son corps. […] C’est un « vibrion », c’est-à-dire un « ouvrier de la mort… qui fait inconsciemment ce qu’il peut pour corrompre, dissoudre et détruire le reste du corps social… » Peste ! […] La souplesse d’homme-serpent que Vénus veut au corps de ses prêtres, il l’a dans l’esprit. […] Les amoureux se regardent… Ils ont vieilli tous deux d’esprit et de corps ; ils ne sont gais ni l’un ni l’autre, oh !

707. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Rivoire, André (1872-1930) »

Ma main, qui tremble encor de t’avoir caressée, Parfois sent vivre en elle un contour frissonnant ; Et dans le grand lit sombre et vide maintenant La forme de tout corps est à peine effacée.

708. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 200-202

Nous ne dirons pas que ce fut, sans doute, la difficulté de trouver quarante Sujets, qui le fit admettre dans ce Corps ; Malleville pouvoit figurer parmi les Beaux-Esprits de son Siecle.

709. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Le Chevalier de Méré ou De l’honnête homme au dix-septième siècle. »

Quantité de choses sont nécessaires pour être heureux, mais une seule suffit pour être à plaindre ; et ce sont les plaisirs de l’esprit et du corps qui rendent la vie douce et plaisante, comme les douleurs de l’un et de l’autre la font trouver dure et fâcheuse. […] Les plus grands de l’esprit, autant que j’en puis juger, c’est la véritable gloire et les belles connoissances, et je prends garde que ces gens-là ne les ont que bien peu, qui s’attachent beaucoup aux plaisirs du corps. […] Et comme les plaisirs de l’esprit surpassent de bien loin ceux du corps, il me semble aussi que les extrêmes douleurs corporelles sont beaucoup plus insupportables que celles de l’esprit. […] Il avait été gros joueur et s’était mis sur le corps force dettes, il en convient, et une foule de créanciers, quoiqu’il n’ait point fait entrer cette condition dans sa définition de l’honnête homme57. […] Ces maîtres me disoient que, si une fois on a le corps fait, le reste ne coûte plus guère.

710. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre I. Principe des mœurs sous l’Ancien Régime. »

Dans tous les corps, les officiers, les trompettes, les musiciens, chamarrés de passementeries d’or et d’argent, sont éblouissants à voir ; la timbale pendue à l’arçon de la selle, toute brodée et surchargée d’ornements peints et dorés, est une pièce à mettre dans un garde-meuble ; le cymbalier nègre des gardes françaises ressemble à un soudan de féerie. — Derrière le carrosse et sur les flancs courent les gardes du corps, avec l’épée et la carabine, en culottes rouges, grandes bottes noires, habit bleu couturé de broderies blanches, tous gentilshommes vérifiés ; il y en a 1 200, choisis à la noblesse et à la taille ; parmi eux sont les gardes de la manche, plus intimes encore, qui, à l’église, aux cérémonies, en hoqueton blanc étoilé de papillotes d’argent et d’or, ayant en main leur pertuisane damasquinée, sont toujours debout et tournés vers le roi « pour avoir de toutes parts l’œil sur sa personne ». […]  » Le vrai courtisan suivait le prince comme l’ombre suit le corps ; tel fut sous Louis XIV le duc de La Rochefoucauld, grand veneur. « Le lever, le coucher, les deux autres changements d’habit tous les jours, les chasses et les promenades du roi tous les jours aussi, il n’en manquait jamais, quelquefois dix ans de suite sans découcher d’où était le roi, et sur pied de demander un congé, non pour découcher, car en plus de quarante ans il n’a jamais couché vingt fois hors de Paris, mais pour aller dîner hors de la cour et ne pas être de la promenade. » — Si plus tard, sous des maîtres moins exigeants et dans le relâchement général du dix-huitième siècle, cette discipline se détend, l’institution subsiste170, à défaut de l’obéissance, la tradition, l’intérêt et l’amour-propre suffiraient pour peupler la cour. […] Pour soutenir ce fardeau et travailler d’ailleurs, il a fallu le tempérament de Louis XIV, la vigueur de son corps, la résistance extraordinaire de ses nerfs, la puissance de son estomac, la régularité de ses habitudes ; après lui, sous la même charge, ses successeurs se lassent ou défaillent. […] « Nous vînmes à l’audience, M. de Beaufort et moi, avec un corps de noblesse qui pouvait faire 300 gentilshommes ; MM. les princes avaient près de 1 000 gentilshommes avec eux. » — Tous les Mémoires du temps montrent à chaque instant ces escortes qui étaient nécessaires pour faire ou repousser un coup de main. […] Le nombre des chevau-légers et des gendarmes a été réduit en 1775 et 1776 ; les deux corps sont supprimés en 1787.

711. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre III. Ben Jonson. » pp. 98-162

Il contait à Drummond qu’il était demeuré une nuit entière, « s’imaginant qu’il voyait les Carthaginois et les Romains combattre sur son orteil110. » Non que de fond il soit mélancolique ; au contraire, il aime à sortir de lui-même par la large et bruyante gaieté débridée, par la conversation abondante et variée, avec l’aide du bon vin des Canaries, dont il s’abreuve, et qui a fini par devenir pour lui une nécessité ; ces gros corps de bouchers flegmatiques ont besoin de la généreuse liqueur qui leur rend du ton, et leur tient lieu du soleil qui leur manque. […] Ainsi traîne et finit presque toujours lugubrement et misérablement le dernier acte de la comédie humaine ; au bout de tant d’années, après tant d’efforts soutenus, parmi tant de gloire et de génie, on aperçoit un pauvre corps affaibli qui radote et agonise entre une servante et un curé. […] le laquais qu’il charge de ses commissions, qui, de sa langue bien pendue, va chuchoter des messages d’amour aux oreilles des filles libres de leurs corps ? […] De même que les révolutions compliquées des corps célestes ne deviennent intelligibles qu’au contact du calcul supérieur, de même que les délicates métamorphoses de la végétation et de la vie exigent pour être expliquées l’intervention des plus difficiles formules chimiques, ainsi les grandes œuvres de l’art ne se laissent interpréter que par les plus hautes doctrines de la psychologie, et c’est la plus profonde de ces théories qu’il faut connaître pour pénétrer jusqu’au fond de Shakspeare, de son siècle et de son œuvre, de son génie et de son art. […] À proprement parler, l’homme est fou, comme le corps est malade, par nature ; la raison comme la santé n’est en nous qu’une réussite momentanée et un bel accident172.

712. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVe entretien. Alfred de Vigny (2e partie) » pp. 321-411

« Je sentis dans son accent amer, en désignant ainsi les quatre Compagnies-Rouges, combien de préventions haineuses avaient données à l’armée le luxe et les grades de ces corps d’officiers. […] Ses petits pieds blancs étaient croisés et élevés au niveau de sa tête, et tout son corps enveloppé de sa longue chemise blanche. […] — Séparez-les… La pauvre République est un corps mort ! […] Les longues charrettes picardes portaient les Cent-Suisses et leurs bagages ; les canons des Gardes du Corps courant aux remparts, les voitures des princes, les escadrons des Compagnies-Rouges se formant, encombraient la ville. […] Le besoin d’une circulation impossible ne cesse de tourmenter le sang de ce grand corps, ce sang qui ne se répand pas et bouillonne sans cesse.

713. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 octobre 1885. »

Lefêbre Il ne reviendra qu’avec le corps de ballet. […] Le travail rustique, l’absence de vains désirs, longtemps, à son corps donnera la santé comme la paix sereine à son âme. […] Il nous invite à livrer nos corps, à nous faire les serviteurs de l’Humanité : il n’exige pas le dévouement des âmes. […] Notre corps, enlevé par nous au Monde extérieur dont il est une partie, a limité notre Ame ; nous devons rendre au Monde notre corps, le fondre dans l’Unité idéale de l’Univers, afin que nous rendions l’infinie liberté à notre Ame. […] Abandonnons au monde des Apparences nos corps qui sont apparence.

714. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre V : Lois de la variabilité »

Il se peut que le progéniteur du genre Autruche ait eu des habitudes analogues à celle de l’Outarde, et que, la sélection naturelle ayant accru pendant une longue suite de générations la taille et le poids de son corps, il ait fait un plus fréquent usage de ses pieds et moins d’usage de ses ailes, jusqu’à ce qu’elles devinssent ainsi incapables de vol.  […] Ainsi, le côté droit et le côté gauche du corps varient de la même manière ; les membres antérieurs et postérieurs varient simultanément ; le même lien existe encore entre les membres et la mâchoire, et l’on considère en effet la mâchoire inférieure comme étant homologue avec les membres. […] De plus, les parties dures semblent influencer la forme des parties molles dont elles sont voisines : ainsi plusieurs auteurs pensent que la diversité remarquable qu’on observe dans la forme des reins des oiseaux provient de la diversité de forme de leur pelvis ; d’autres croient que, chez la femme, la forme du bassin influence par la pression la forme de la tête de l’enfant ; chez les Serpents, d’après Schlegel, la forme du corps et le mode de déglutition déterminent la position de plusieurs des plus importants viscères. […] Le Couagga, quoique aussi bien rayé que le Zèbre sur le corps, ne l’est point sur les jambes. […] Dans les quatre dessins coloriés d’hybrides produits par l’Âne et le Zèbre que j’ai vus, les rayures étaient plus prononcées sur les jambes que sur le reste du corps, et l’un d’eux offrait une double raie scapulaire.

715. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Quelques documents inédits sur André Chénier »

Ils passent de corps en corps, s’alambiquent, s’élaborent, se travaillent, fermentent, se subtilisent dans leur rapport avec le vase où ils sont actuellement contenus. […] Alors d’autres corps organisés (car les organes vivants secrets meuvent les végétaux, minéraux 50 et tout) héritèrent de la quantité d’atomes de vie qui étaient entrés dans la composition de celles qui s’étaient détruites, et se formèrent de leurs débris. » Qu’une élégie à Camille ou l’ode à la Jeune Captive soient plus flatteuses que ces plans de poésie physique, je le crois bien ; mais il ne faut pas moins en reconnaître et en constater la profondeur, la portée poétique aussi. […] Voilà pour les préliminaires ; mais le principal, ce qui devrait former le corps même de l’édition désirée, ce qui, par la difficulté d’exécution, la fera, je le crains, longtemps attendre, je veux dire le commentaire courant qui y serait nécessaire, l’indication complète des diverses et multiples imitations, qui donc l’exécutera ?

716. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVIIe entretien. Poésie lyrique » pp. 161-223

XXII Le petit Didier, surpris et effrayé de cette clameur inattendue dans la solitude et dans la nuit, et des éclats de rire qui suivirent cette exclamation, s’arrêta suspendu sur le flanc de la roche, les deux mains crispées sur des touffes de bruyère qui portaient le poids de son corps. […] Jamais je ne vis rien de si pathétiquement beau que cette Niobé de chaumière sur le corps de son fiancé, au clair de la lune. […] Ce corps de douze ou quinze cents hommes était composé de Génois, de Liguriens, de Corses, de Piémontais expatriés et recrutés pour un coup de main décisif sur toutes les rives de la Méditerranée, la plupart matelots ou soldats aguerris au feu, quelques-uns scélérats aguerris au crime. […] La femme du baron de Dietrich et ses jeunes amies partageaient l’enthousiasme du patriotisme et de la Révolution, qui palpitait surtout aux frontières, comme les crispations du corps sont plus sensibles aux extrémités.

717. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIVe entretien. Littérature politique. Machiavel (3e partie) » pp. 415-477

Or, cette responsabilité réelle, ce gage saisissable, ce corps palpable, qui répondent aux rois de la mesure et de l’inoffensivité du tribun sacré appelé pape, qu’est-ce autre chose que sa souveraineté temporelle ? […] Non, le corps national, comme le corps humain, est pétri de ces diversités qui n’ôtent rien à l’unité de l’être physique ou de l’être politique. […] On vous respectera d’autant plus que vous aurez plus de noms, plus de corps, plus de droits nationaux, plus d’alliances traditionnelles et défensives en Europe.

718. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXIIe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (3e partie) » pp. 369-430

C’est donc, selon la logique, le moment où il faut dire au lecteur : Voilà quel était ce personnage, voilà d’où il venait, voilà comment il était sorti de l’obscurité, voilà dans quelles dispositions de famille, de corps, d’esprit, de passion il arrivait pour participer à l’événement. […] Elle commence par nous montrer la place où cet événement va se passer, un site, un paysage, une ville, une maison, un palais, un temple, un champ de bataille, une assemblée publique, un peuple en ébullition ou en silence, mêlé ou attentif à un événement : puis elle nous montre un personnage qui arrive sur cette scène pour y figurer au premier plan, son visage, son attitude, sa démarche, sa physionomie calme ou convulsive, son costume même et jusqu’à l’ombre que son corps projette à côté ou derrière lui sur la place ou sur la foule au milieu de laquelle il apparaît. […] « Ce dernier parti, dont Brissot était le publiciste, Pétion la popularité, Vergniaud le génie, les Girondins le corps, entrait en scène avec l’audace et l’unité d’une conjuration. […] À une action soudaine, irrésistible, convulsive du corps social, il faut les bras et la volonté de tous.

/ 2227