/ 2006
770. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre II. Les formes d’art — Chapitre IV. Le roman »

Manon Lescaut est une contemporaine de Marianne et de Jacob. […] Et tandis que Florian dévie vers la fade idylle505 le goût des tableaux rustiques éveillé par Rousseau, Bernardin de Saint-Pierre offre une nature inconnue et lointaine à la curiosité de ses contemporains : avec Paul et Virginie, nous le verrons, commence à s’opérer une révolution esthétique.

771. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre quatrième »

On l’a vu plus haut pour les chroniqueurs : les événements contemporains sont l’unique matière de leurs récits. […] Les mœurs locales défrayent tous les genres, depuis les romans qui en mêlent la peinture satirique à leurs fictions, jusqu’aux petits poèmes qui ne sont que des anecdotes de la vie contemporaine.

772. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre premier. La contradiction de l’homme » pp. 1-27

Il est ses ancêtres, et il est aussi ses contemporains, et même il représente en quelque sorte les gens de l’avenir. […] Tous les autres : nos ancêtres et nos contemporains, et nos descendants, ceux que nous aimons, ceux que nous croyons indifférents, et ceux que nous haïssons, notre patrie et toutes les patries, tous les groupes sociaux, et l’humanité entière, ou du moins le germe de l’humanité.

773. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres inédites de la duchesse de Bourgogne, précédées d’une notice sur sa vie. (1850.) » pp. 85-102

Elle a passé dans le monde comme une de ces vives et rapides apparitions que l’imagination des contemporains se plaît à embellir. […] Le spirituel auteur de la Notice, essayant sur ce point de contredire Saint-Simon et tous les contemporains, nous dit : « Pourquoi cette charmante princesse n’aurait-elle pas eu des amis, des admirateurs, et point d’amants ? 

774. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mémoires et correspondance de Mallet du Pan, recueillis et mis en ordre par M. A. Sayous. (2 vol. in-8º, Amyot et Cherbuliez, 1851.) — II. » pp. 494-514

Bien fou, selon lui, qui proposerait des conjectures : «  Les conjectures sont à pure perte, et les prédictions des folies. » Les contemporains pourtant veulent à tout prix des solutions, et se plaignent qu’on les en laisse manquer. […] Les curieux trouveraient dans le tome XV du Spectateur du Nord des articles sur Mallet du Pan, qui résument bien l’opinion des contemporains éclairés, au moment de sa mort : on y promet à sa mémoire la justice lente et sûre qui lui est rendue aujourd’hui.

775. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « La reine Marguerite. Ses mémoires et ses lettres. » pp. 182-200

Vers la fin de sa vie, Marguerite, devenue à son tour une antique, n’avait plus du tout de cheveux bruns et faisait une grande dépense de perruques blondes : « Pour cela elle avait de grands valets de pied blonds que l’on tondait de temps en temps. » Mais dans sa jeunesse, quand elle osait être brune, au naturel, cela ne la déparait point, car elle n’en avait pas moins un teint d’un vif éclat, « un beau visage blanc qui ressemblait un ciel en sa plus grande et blanche sérénité », — « un beau front d’ivoire blanchissant », disent les contemporains et les poètes, qui en ceci paraissent n’avoir point menti. […] Au milieu de cela, elle était aimée : « Le 27 du mois de mars (1615), dit un contemporain, mourut à Paris la reine Marguerite, le seul reste de la race de Valois, princesse pleine de bonté et de bonnes intentions au bien et repos de l’État, qui ne faisait mal qu’à elle-même.

776. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Regnard. » pp. 1-19

Sa vie fut pleine de singularités pour son temps ; c’est aux journaux qu’il a laissés qu’on doit d’en connaître les plus curieuses circonstances : il est à regretter que d’autres contemporains ne nous aient rien dit de plus particulier sur son compte, et n’aient pas joint leurs renseignements aux siens. […] Deux demoiselles de ses amies, des plus belles, dit un contemporain, et des plus spirituelles, « qui ont fait longtemps l’ornement des spectacles et des promenades de Paris », Mlles Loyson, — de plus, bonnes musiciennes, — allaient y passer les beaux jours et faisaient les honneurs du lieu ; il les a célébrées dans plus d’une chanson gaillarde et fine, qui s’est conservée.

777. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Les Faux Démétrius. Épisode de l’histoire de Russie, par M. Mérimée » pp. 371-388

Il a vécu en lion, régné eu renard, il meurt comme un chien. » Tel fut le souvenir que laissait à ses contemporains cet homme dont l’administration et le règne contribuèrent puissamment à préparer la grandeur de la Russie. […] Aujourd’hui on peut se demander si son amour de l’ordre, et sa ferme volonté d’introduire d’utiles réformes dans son pays, ne furent pas les motifs réels de la haine que lui vouèrent ses contemporains.

778. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « La Fontaine. » pp. 518-536

Le premier ouvrage qu’il publia fut la traduction en vers de L’Eunuque de Térence en 1654 ; il avait trente-trois ans ; cette traduction est contemporaine des premières pièces de Molière. […] On n’aurait même pas de peine à découvrir chez lui un certain goût sensuel que l’on pourrait dire innocent et primitif, contemporain des patriarches, mais qui l’empêche de se perdre dans le raffiné des sentiments.

779. (1912) Le vers libre pp. 5-41

Bref, pour l’historien littéraire qui considère un mouvement littéraire du passé, l’optique n’est pas la même que pour le contemporain. Que dit à propos des novateurs le contemporain s’il est sérieux, vaste, pondéré, décoré, employé dans le régime, ou ce qui revient au même, quelque chose dans la haute opposition ?

780. (1912) L’art de lire « Chapitre III. Les livres de sentiment »

Il y a des chances, je crois, pour qu’on en trouve, non pas beaucoup plus, mais un peu plus, dans les générations de demain et d’après-demain, parce que les professeurs actuels de l’enseignement secondaire n’enseignent plus du tout les auteurs classiques ; ils ne s’occupent que de sociologie et de littérature contemporaine — C’en est donc fait de l’humanisme ! […] Il goûte ce que quelques-uns parmi les jeunes et parmi les vieux goûtaient déjà dans sa jeunesse et ce que quelques-uns parmi ses contemporains et aussi parmi les jeunes goûtent encore.

781. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Fervaques et Bachaumont(1) » pp. 219-245

Tout seul dans un genre bien à lui, introduit par lui dans le journalisme contemporain, qui l’a tout de suite accepté. […] Conte ou chronique, histoire ou roman (et le roman, c’est de l’histoire encore), ont, l’un et l’autre, pour visée d’exprimer la réalité, et ici c’est la réalité contemporaine.

782. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Michelet »

les cafetiers n’en fermeraient probablement pas une seconde fois leurs boutiques, et certaines maisons connues n’en seraient pas abandonnées pour le domicile conjugal, mais il serait lu et il aurait son influence, et il infiltrerait d’un poison de plus les esprits déjà infiltrés de tant de corruptions contemporaines ! […] Je ne sais rien de plus triste que cela dans la littérature contemporaine.

783. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Alfred de Vigny »

On peut dire, sans craindre de se tromper et d’être démenti par l’histoire du xixe  siècle en Europe, que tous les grands poètes contemporains ont été de grands prosateurs. […] Mais l’insouciance de l’idéal, la grossièreté du procédé et l’abaissement de l’observation, ces trois caractères de la littérature contemporaine, ont fait monter de dégoût la muse de Vigny dans cette rêverie où elle ne plane plus qu’à l’œil seul du poète… Ce cygne de la famille de celui de Mantoue qui nous est venu par l’Ile des Cygnes de Shakespeare, et qui s’y est attardé, ne nous a pas dit son dernier chant, heureusement !

784. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XII : Pourquoi l’éclectisme a-t-il réussi ? »

Elle est notre contemporaine ; au temps de Voltaire, on l’entrevoyait à peine ; au temps de Bossuet, elle n’était pas. […] On oublia d’autres paroles très-expressives, trop expressives, qu’on avait autrefois jetées contre le christianisme, que les critiques n’osent citer, et dont tous les contemporains se souviennent.

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