Or ces facultés résident en lui d’une façon stable ; par elles, il sent, il se souvient, il perçoit, il conçoit, il combine des images et des idées, il est donc une cause efficiente et productrice. » — On arrive ainsi à considérer le moi comme un sujet ou substance ayant pour qualités distinctives certaines facultés, et, au-dessous de nos événements, on pose deux sortes d’êtres explicatifs, d’abord les puissances ou facultés qui les éprouvent ou les produisent, en suite le sujet, substance ou âme qui possède les facultés162. […] « À un crochet peint sur le mur, dit un philosophe anglais, on ne peut suspendre qu’une chaîne peinte sur le mur. » Laissons là les mots, étudions les événements, seuls réels, leurs conditions, leurs dépendances, et certainement, en reprenant le sentier ouvert par Condillac, rouvert par James Mill et ses successeurs anglais, nous arriverons par degrés à faire une science de choses et de faits. […] Car ils arrivent à se figurer les atomes, non pas, selon l’imagination grossière de la foule, comme de petites masses solides, mais comme de purs centres géométriques par rapport auxquels les attractions, puis les répulsions croissent avec la proximité croissante. […] En somme, la république de centres nerveux, tous égaux et presque indépendants, que l’on rencontre chez les animaux inférieurs, se change peu à peu, à mesure que l’on arrive aux animaux supérieurs, en une monarchie de centres inégaux en développement, étroitement liés, et soumis à un centre principal. — Mais cette organisation et cette centralisation plus avancées ne suppriment point la pluralité originelle de l’être ainsi construit.
Arrivés à l’hémisphère qui répond au nôtre, ils découvrent un nouveau ciel et d’autres étoiles. […] L’imagination passe toujours de la surprise que lui cause la description d’une cause incroyable à l’effroi que lui donne nécessairement la vérité du tableau : il arrive de là que ce monde visible ayant fourni au poëte autant d’images pour peindre son monde idéal, il conduit et ramène sans cesse le lecteur de l’un à l’autre ; et ce mélange d’événements si invraisemblables et de couleurs si vraies fait toute la magie de son poëme. […] Si jamais, ce qu’il n’est pas permis de croire, notre théologie devenait une langue morte, et s’il arrivait qu’elle obtînt, comme la mythologie, les honneurs de l’antique ; alors Dante inspirerait une autre espèce d’intérêt : son poëme s’élèverait comme un grand monument au milieu des ruines des littératures et des religions : il serait plus facile à cette postérité reculée de s’accommoder des peintures sérieuses du poëte7, et de se pénétrer de la véritable terreur de son Enfer ; on se ferait chrétien avec Dante, comme on se fait païen avec Homère. […] Il arrivait quelquefois qu’un homme voyait son génie avant de mourir ; mais le cas était rare, et on ne compte guère que Dion, Socrate et Brutus qui aient eu cet avantage.
Elle a raconté l’histoire de sa captivité et des événements arrivés au Temple depuis le jour où elle y entra jusqu’au jour où y mourut son frère, et elle l’a fait d’un style simple, correct, précis, sans un mot de trop, sans une phrase, comme il sied à un cœur profond et à un esprit juste parlant en toute sincérité des douleurs vraies, de ces douleurs véritablement ineffables et qui surpassent tout ce qu’on en peut dire. […] Un jour (20 avril 1793) le misérable Hébert, avec quelques municipaux, arriva dans la prison à dix heures du soir ; les prisonniers venaient de se coucher : Nous nous levâmes précipitamment, dit Madame Royale. […] Lorsqu’aux jours de fête il lui arrivait de faire représenter des pièces pour son spectacle, elle ne choisissait pas les plus sérieuses. Même à travers l’habitude des peines, une sorte de joie enfin surnageait comme il arrive aux âmes austères et éprouvées que la religion a guidées et consolées dans tous les temps.
Il n’y a pas de jour où je ne pense à lui ; et, quand je ne suis pas trop mécontent de moi-même, il m’arrive quelquefois de lui dire : Es-tu content, mon père ? […] Puis quand les émissaires du duc de Cornouailles arrivent, on essaie de le cacher, et Oswald, le chef de cette troupe, ne l’ayant point trouvé d’abord, dit au vieillard qui habite la caverne : « Si Léar vient te demander asile et un lit, refuse » ; ce qui dans le style de Ducis se traduit en ces incroyables vers : Si Léar, par ses pleurs, sous cette horrible voûte, Vient implorer tremblant, la nuit, saisi d’effroi, La grâce d’y fouler ces roseaux près de toi, Sois sourd à sa prière et demeure inflexible. […] Quand le tyran, le duc de Cornouailles, interroge la fille pieuse de Léar, la Cordelia de Shakespeare devenue ici la sensible Helmonde, et lui demande comment le vieux roi est arrivé jusqu’à elle dans la caverne : « Qui l’a guidé vers vous ? […] Quand Voltaire, quittant Ferney, était arrivé à Paris pour y triompher et y mourir, Ducis n’avait point fait comme tous les gens de lettres qui étaient allés lui rendre hommage, et, n’étant pas connu de lui, il n’avait pas cru devoir le visiter.
Quoi qu’il en soit, il n’en admirait pas le désordre sublime, et il faisait tout son possible pour empêcher les tonnerres de Moïse d’arriver jusqu’à nous, absolument comme pour l’autre tonnerre. […] Il la considérait comme une navigation dont la traversée est obscure et dont le terme est certain, ou encore comme un sommeil d’une nuit, aussi naturel et aussi nécessaire à la constitution humaine que l’autre sommeil : « Nous nous en lèverons plus frais le matin. » Arrivé en Amérique, salué de ses compatriotes et ressaisi par le courant des affaires publiques, Franklin porte souvent un regard de souvenir vers ces années si bien employées, et où l’amitié et la science avaient tant de part. […] Il s’est plu à remarquer qu’un an, jour pour jour, après cette avanie, le dimanche 29 janvier 1775, il reçut chez lui à Londres la visite de lord Chatham qui avait fait une motion à la Chambre des lords sur les affaires d’Amérique : La visite d’un si grand homme et pour un objet si important, dit-il, ne flatta pas peu ma vanité, et cet honneur me fit d’autant plus de plaisir que cette circonstance arriva, jour pour jour, un an après que le ministère s’était donné tant de peine pour me faire affront devant le Conseil privé. […] Il part en octobre 1776 sur un sloop de guerre, n’oublie pas durant la traversée de faire, selon son usage, des observations physiques sur la température marine, et arrive sur la côte de Bretagne, dans la baie de Quiberon, d’où il se rend par terre à Nantes, puis à Paris (fin de décembre).
Pourvu que l’on ait été quelquefois au théâtre, on s’habitue vite à lire ainsi, et, si l’on s’y habitue, on arrive, assez vite aussi, à ne pouvoir plus lire autrement. […] On arrive par cette méthode, et c’est un petit excès, à voir, à travers le couplet d’un acteur, surtout la figure de celui qui ne parle pas et à qui le couplet est adressé, et c’est surtout Suréna qu’on suit des yeux pendant que Pompée a la parole, et la figure d’Orgon que l’on compose et que l’on contemple en la composant quand Dorine le raille ou quand Cléonte le chapitre. […] La tragédie française n’en est pas un ; mais parce qu’elle ne laisse pas d’être inspirée de la tragédie grecque, et surtout parce qu’elle a en elle l’esprit même de la tragédie, il lui arrive, du moins par le souci des groupements à la fois savants et naturels, aussi par les morceaux lyriques qu’elle admet, d’avoir avec l’opéra des analogies qui ne sont pas douteuses et qui sont très loin d’être une dégradation ou de marquer une déchéance. […] C’est qu’il arrive, et c’est cela que précisément il faut comprendre, qu’il y a pour un auteur et qu’il y a réellement, plusieurs vérités, vérité d’enthousiasme, vérité d’amour, vérité de raison, et que, par ainsi, plusieurs personnages peuvent discuter, disputer et se torturer dans le sein même de la vérité.
Les axiomes sont des propositions nécessaires, par exemple : Toute qualité suppose une substance ; tout corps est situé dans l’espace ; tout changement arrive dans le temps, etc. […] Vous imposez aux termes une conséquence qui ne s’applique qu’au rapport, et vous arrivez à une conséquence fausse par un faux raisonnement. […] Or, arrivé à sa limite, vous apercevez une autre partie qui la continue. […] Si, comme on vient de le montrer, la vérité est dans les choses, il suffit pour la trouver de décomposer les choses, de les résoudre par l’analyse en leurs éléments, de noter ces éléments par des signes précis, d’assembler ces signes en formules exactes, de convertir ces formules les unes dans les autres, et d’arriver par des équations à l’équation finale qui est la vérité cherchée.
Faire une édition est un accident qui peut arriver à tout le monde ; on a eu besoin d’argent, ou bien l’on voulait publier les matériaux d’une histoire qu’on préparait. […] Au moment où la douce figure de Mme de Longueville commence à se reformer sous les yeux du lecteur, il entend un fracas d’in-folio qui tombent ; c’est une dissertation qui arrive et efface la charmante image sous son appareil démonstratif. […] Arrivé au bon manuscrit, il montre par des raisons logiques que toutes ses parties se tiennent, qu’elles forment un cours complet de dialectique, que des ressemblances de style et diverses autres probabilités indiquent que cette dialectique est celle d’Abailard, citée dans la Théologie chrétienne par Abailard lui-même. […] Lorsque, après avoir compté les livres et les connaissances que possédait Abailard, il arrive à la phrase de Porphyre qui contient le problème des genres et des espèces, et qu’il y voit en germe la scolastique entière, il ne peut se contenir.
« Lamartine l’a caractérisée énergiquement quand il a dit C’est la révolution du mépris. » « — Lamartine appelait l’orage afin d’y briller héroïquement sous l’éclair. » « — Lamartine, dans son ambition même, ne prévoyait pas ce qui est arrivé. […] Même dans le discours de réception de Lamartine à l’Académie, en 1830, on trouve un grand parallèle établi entre la poésie et l’action, entre la vie du littérateur en temps régulier et cette même existence dans les siècles d’orage, en « ces époques funestes au monde, glorieuses pour l’individu. » Dans les temps calmes, chacun est classé, chacun suit sa voie ; avec plus ou moins de distinction, selon nos forces ou nos faiblesses, « nous arrivons au terme. […] J’évitai les quais et la Grève, qui devaient être encombrés de peuple ; je pris la Cité, Notre-Dame, l’île Saint-Louis, et j’arrivai à la place Royale, où la garde nationale du quartier s’assemblait.
Il vous arrive pourtant de travailler sans conscience et de déclarer, étourdi : « Nous sommes nés originairement… » Il vous arrive aussi, stendhalien infidèle, de vous égarer vers des métaphores où nul guide ne vous conduit. […] Mais il leur arrive aussi, pauvres fils de soldat, d’écrire des énormités telles : « Comme aux tirs de foires autrefois, sur le mail, avec un plaisir d’enfant, fouetté d’un âpre vertige, il charge, épaule, tire.
Tout changement raisonnable qui peut arriver dans une langue dès que sa syntaxe est devenuë reguliere, ne sçauroit plus tomber que sur des mots. […] Je ne parle ici que des traductions qu’on donne pour ce qu’elles sont, car il arrive souvent que les traducteurs anglois nient de l’être, et qu’ils veulent donner leur copie pour un original. […] Mais, dira-t-on, ne pourra-t-il pas arriver que les critiques à venir fassent remarquer dans les écrits que vous admirez des fautes si grossieres, que ces écrits deviennent des ouvrages méprisez par la posterité ?
Combien de fois n’est-il pas arrivé qu’une musique qui nous avait d’abord déplu, nous a ravis ensuite lorsque l’oreille à force de l’entendre est parvenue à en démêler toute l’expression et la finesse ? […] La logique froide et lente des esprits tranquilles n’est pas celle des âmes vivement agitées : comme elles dédaignent de s’arrêter sur des sentiments vulgaires, elles sous-entendent plus qu’elles n’expriment, elles s’élancent tout d’un coup aux sentiments extrêmes ; semblables à ce dieu d’Homère, qui fait trois pas et qui arrive au quatrième. […] Mais le contraire est malheureusement arrivé ; ceux qui possèdent et qui connaissent le moins l’esprit philosophique, en sont parmi nous les plus ardents détracteurs, comme la poésie est décriée par ceux qui n’ont pu y réussir, les hautes sciences par ceux qui en ignorent les premiers principes, et notre siècle par les écrivains qui lui font le moins d’honneur.
Louis XVI et sa cour37 I Par un hasard qu’il a certainement le droit d’appeler heureux, Amédée Renée eut, dit-il, l’honneur inespéré d’être choisi pour finir, par un dernier volume, cette histoire de Sismondi que son auteur devait conduire jusqu’à la Révolution française, quand, arrivé au règne de Louis XVI, il fut emporté par la mort. […] Louis XVI arrivait dans les plus heureuses circonstances, car c’est toujours une chance favorable et charmante que de succéder à un mauvais roi. […] Toute âme, elle, comme Louis XVI était tout physique, toute àme, mais non pas toute intelligence ; car, lorsque son tour arriva de gouverner sous ce roi, qui n’était pas roi et dont le néant tuait la France, elle prit Brienne, croyant tenir le Kaunitz de sa mère !
Arrivé à cet âge de la vie qui n’est, certes ! […] IV Mais Arlequin et Pierrot, ces deux types adorés de M. de Banville, qui les unit dans sa personne poétique, Arlequin et Pierrot, ces deux innocents, doux et étincelants gouailleurs, vont disparaître de ce volume, et nous arrivons enfin au magnifique et poignant avatar du poète, nous arrivons à ces Idylles prussiennes que j’ai annoncées dès le commencement de ce chapitre, et qui ont fait tout à coup surgir du Banville connu un Banville qu’on ne connaissait pas.
Cette grande Inconnue à nos pères a versé, en ces derniers temps, tant de notions dans la connaissance humaine, qu’elle est certainement une formidable acquisition et un magnifique enrichissement pour toutes les facultés de l’esprit ; et l’imagination, comme les autres, a le droit, et je dirais presque le devoir, de se servir de ces notions qui tantôt ont leur certitude et tantôt leur mystère pour arriver à des effets de pathétique absolument nouveaux. […] Mais voyez avec quelle sobriété pleine et forte Shakespeare use de ce moyen physiologique à outrance pour arriver à des effets de terreur écrasants ! […] si Balzac enfin a échoué, mais échoué avec prestige, — comme l’homme qu’il était pouvait échouer, — que ne doit-il pas arriver aux romanciers moins opulemment doués que lui ?