Elle n’est pas assujettie à puiser éternellement l’existence dans le sein maternel de la sensation ; après l’allaitement quotidien des premières années, elle persiste à vivre dans des conditions nouvelles ; on la dirait douée, comme un animal adulte, d’une vitalité qui lui est propre. […] La première opération est rendue facile par les simultanéités de la sensation ; les animaux eux-mêmes la font de bonne heure, comme tous les hommes ; elle consiste à rattacher méthodiquement aux visa-tacta, c’est-à-dire au monde extérieur, au monde étendu, tous les sons qui sont des états forts.
Ils mirent la morale en action, & choisirent communément des animaux pour acteurs. […] Ils croyoient qu’à force de méditations, certaines filles Druidesses avoient pénétré dans les secrets de la Nature ; que par le bien qu’elles avoient fait dans le monde elles avoient mérité de ne point mourir ; qu’elles habitoient au fond des puits, au bord des torrents, ou dans les cavernes ; qu’elles avoient le pouvoir d’accorder aux hommes le don de se métamorphoser en loups & en toutes sortes d’animaux, & que leur haine ou leur amitié décidoit du bonheur ou du malheur des familles.
L’homme est remis dans la nature, soumis à ses lois ; c’est avant tout un animal, ayant des sens et des sensations ; et la sensation est la source visible d’où tout est sorti, les idées de l’individu, et par suite les institutions de la société.
Et l’homme n’a pas besoin qu’on lui en fournisse des causes : il est par lui-même un animal suffisamment féroce et indisciplinable.
Le nez un peu fort, aux arêtes accentuées, aurait occupé Grandville, qui, à toute force, voulait trouver dans chaque homme la ressemblance d’un animal, car il aurait évoqué dans son cerveau l’idée d’un svelte et fringant cheval arabe.
Le système de Platon a prévalu dans le monde, et il devait y prévaloir ; mais soyons persuadés que, sans le petit nombre de pythagoriciens qui sont restés fidèles à la doctrine des épreuves et des ménagements ; qui savent que le pain des forts ne peut pas être distribué à tous ; que tous ne peuvent pas être nourris de la moelle du lion ; que le lait doit être donné à l’enfant jusqu’à ce qu’il puisse manger les fruits de la terre ou la chair des animaux ; soyons persuadés, dis-je, que sans le petit nombre de pythagoriciens fidèles, les vérités seraient encore plus-gaspillées qu’elles ne le sont, et déshonorées par plus de discussions intempestives : heureusement il en est resté en réserve.
Avec cette différence, pourtant, que le sanglier n’est pas un animal très gai, et que Grenier, ce gaulois, ce fils de Montaigne, est plein de rondeur et de bonhomie et de bonne humeur, alors même qu’il vous expédie !
La philosophie, la négation, l’incrédulité, après s’être beaucoup remuées dans les limites des facultés humaines, auxquelles elles tiennent comme le rayon de la roue tient à son moyeu, sont revenues à leur point de départ en faisant un circuit immense, s’imaginant avoir progressé, comme l’animal qui paît l’herbe croit s’être avancé pour avoir péniblement tendu la corde du grossier piquet qui l’attache au sol.
Ce n’est pas un Toussaint Louverture, qui, du moins, avait les grands instincts de ruse et de force d’un animal puissamment développé, ni un Christophe, doué de tant de persistance et de tenue dans ses facultés imitatrices, ni un Richer, qui réalisa un moment, dit d’Alaux, l’idéal du gouvernement Haïtien, en maîtrisant l’élément barbare sans écraser sous la même pression l’élément éclairé.
je n’ignore pas que nous sommes des animaux naturellement curieux, qu’il y a en nous quelque chose d’essentiellement commère, — disons le mot cruel, — quelque chose d’éternellement portier, et qui, à toute époque, a été friand de ce qui se trouvait, dans les conceptions du génie, d’inférieur et de pauvrement personnel.
Figurez-vous cette langue, plus plastique encore que poétique, maniée et taillée comme le bronze et la pierre, et où la phrase a des enroulements et des cannelures ; figurez-vous quelque chose du gothique fleuri ou de l’architecture moresque appliqué à cette simple construction qui a un sujet, un régime et un verbe ; puis, dans ces enroulements et ces cannelures d’une phrase qui prend les formes les plus variées comme les prendrait un cristal, supposez tous les piments, tous les alcools, tous les poisons, minéraux, végétaux, animaux ; et ceux-là les plus riches et les plus abondants, si on pouvait les voir, qui se tirent du cœur de l’homme, et vous avez la poésie de M.
Mais les Mémoires d’une femme de chambre, c’est-à-dire de la femelle de ce genre d’animal dont on a dit le mot resté proverbe : « Pour un valet de chambre, il n’y a pas de héros » (et, vous le savez, la femelle de toutes les espèces est, en fait d’observation, de finesse et de tact, bien au-dessus de tous les mâles de la terre, même dans cette espèce supérieure de messieurs les valets !)
Cet homme de meurtres et d’incestes, incarné dans l’animal des hécatombes et des bestialités antiques, en évoque les monstrueuses images. […] Regardez les paysages, les intérieurs elles animaux de Decamps, et, à côté de lui, ceux de tant d’autres ; à mon gré, cette branche de l’art est la plus vivace et la plus originale de notre temps. […] Vie muette, animale, pleine d’étranges rêves, féconde en légendes. […] Pour s’affiner, il s’est détraqué ; il a opposé le surnaturel à la nature, et l’épuration de la conscience humaine au développement de l’animal humain. […] Quand on dit qu’un individu, animal ou homme, reçoit tous ses caractères physiques et moraux par héritage, on ne veut point dire qu’il n’hérite que de son père ou de sa mère, ou de tous les deux réunis.
Il ne nous a pas dit non plus s’il croyait que les animaux eussent de la volonté. […] Les animaux agissent, donc ils veulent. […] Une lente évolution a produit les plantes et les animaux. […] La Genèse nous dit qu’il nomma d’abord les animaux par leur nom. […] C’est un animal, il est hideux, mais il est robuste.
« Ne me parlez pas, disait d’Alembert, ne me parlez pas de votre Buffon, ce comte de Tuffières, qui, au lieu de nommer simplement le cheval, s’écrie : La plus noble conquête que l’homme ait jamais faite est celle de ce fier animal qui… » Et Rivarol lui répondait : « Oui, c’est comme ce sot de Jean-Baptiste Rousseau, quand il dit : Des bords heureux où naît l’Aurore Aux bords enflammés du couchant ; au lieu de dire de l’est à l’ouest » ; — mais il aurait pu bien mieux répondre encore. […] Les animaux y sont classés d’après les rapports d’utilité ou de familiarité qu’ils ont avec l’homme. « Nous donnerons la préférence au cheval, au chien, au bœuf… ensuite, nous nous occuperons de ceux qui, sans être familiers, ne laissent pas d’habiter les mêmes lieux, les mêmes climats, comme les cerfs, les lièvres et tous les animaux sauvages… et ce ne sera qu’après toutes ces connaissances acquises que nous rechercherons ce que peuvent être les animaux étrangers, comme les éléphans, les dromadaires, etc. » On ne peut guère concevoir de classification plus artificielle, quoique d’ailleurs elle n’ait pas laissé de contribuer, en ne dépaysant pas d’abord les lecteurs de Buffon., au succès de l’Histoire naturelle. […] Combien de temps, par exemple, la science de l’homme lui-même a-t-elle vu son progrès uniquement retardé parce que l’on persistait à faire de l’homme un être à part dans la nature, et que l’on ne voulait pas, selon l’expression de Buffon, « le ranger dans la classe des animaux, auxquels il ressemble par tout ce qu’il a de matériel, dont l’instinct est peut-être plus sûr que sa raison et l’industrie plus admirable que ses arts » ?