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645. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Notes et éclaircissements. [Œuvres complètes, tome XIII] »

Représentons-nous Massillon dans la chaire, prêt à faire l’oraison funèbre de Louis XIV, jetant d’abord les yeux autour de lui, les fixant quelque temps sur cette pompe lugubre et imposante qui suit les rois jusque dans ces asiles de mort où il n’y a que des cercueils et des cendres, les baissant ensuite un moment avec l’air de la méditation, puis les relevant vers le ciel, et prononçant ces mots d’une voix ferme et grave : Dieu seul est grand, mes frères ! […] Un tas de polissons, soit par air ou par mode, se comptent parmi leurs disciples ; ils affectent de les copier, et s’érigent en sous-précepteurs du genre humain ; et, comme il est plus facile de dire des injures que d’alléguer des raisons, le ton de leurs élèves est de se déchaîner indécemment en toute occasion contre les militaires. […] Quels souvenirs surtout rappelle à ma pensée Cette cloche jadis dans les airs balancée ! […] Son regard suit encor ces pieux Solitaires Errant sous les arceaux de leurs noirs monastères ; Dans la brise du soir elle entend leurs soupirs ; En silence elle écoute, immobile, rêveuse, De l’orgue qui gémit la plainte harmonieuse : — Il lui semble qu’au loin d’invisibles concerts > S’élèvent, emportés dans le vague des airs, Et, de l’autel brisé relevant l’édifice, À l’Éternel encore elle offre un sacrifice.

646. (1913) La Fontaine « VI. Ses petits poèmes  son théâtre. »

Aussitôt les mortels Virent courir sur eux avecque violence, Pestes, fièvres, poisons répandus dans les airs. […] » se dit Gnaton, et comme celui-ci ignore le bel air des choses ! […] Pour jouir en chemin de votre air amiable, J’ai voulu remonter à cheval ; c’est le diable ! […] Toutefois, prenant cœur pour cet exploit guerrier, J’ai vaillamment porté mon pied à l’étrier ; D’une main empoignant le pommeau de la selle, Pour porter l’autre jambe en l’autre part d’icelle, Je me guindais en l’air quand la selle a tourné.

647. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 105-106

On rapporte que ce Comédien s’étant un jour trouvé mal dans l’appartement du Roi, à cause de la chaleur extrême, occasionnée par un grand feu, le Monarque prit lui-même la peine d’ouvrir une fenêtre pour lui procurer de l’air.

648. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 142-143

Cependant, ennemi du cruel fanatisme, Secrétement blessé d’un trop grand despotisme, Je n’ai point l’air esclave au milieu de mes fers.

649. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — I. » pp. 413-433

» Et il estime que l’abbé Colin, pour donner à sa traduction cet air facile qui séduit au premier abord, a négligé d’affronter toutes les difficultés qui s’offraient ; il a franchi plus d’obstacles qu’il n’en a surmonté. […] Sans doute, si l’on prend chaque pièce en particulier, si l’on oppose l’original à la traduction, on trouvera aisément à triompher et à se donner l’air d’un connaisseur très expert et très supérieur en poésie. […] Quelquefois, entendant parler de vous, il m’est arrivé de dire avec un air de satisfaction : “J’ai vu naître ces talents-là, et j’en conserve précieusement les premières ébauches.”

650. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — II » pp. 316-336

Henri IV était le seul homme qui eût pu calmer, et il y arrivait par son habileté, par sa justice, par sa force si bien tempérée d’adresse ; il mourut trop tôt, et, après lui, il était bien difficile que les ferments mal apaisés, et qu’excitait derechef l’air du dehors, ne se renflammassent pas. […] Il prétend, à travers tout, être resté un bon Français ; il a toujours l’air de ne prendre les armes que malgré lui, à son corps défendant, et parce qu’il ne peut en honneur s’en empêcher sans manquer à son devoir et au bien des Églises. […] Gardons-nous d’oublier que ceux qui n’ont pas réussi ont contre eux bien des apparences et des commencements équivoques qui auraient un tout autre air moyennant une autre issue : un rayon de soleil tombant à propos change bien les aspects. « Mais pour ce que les histoires, dit quelque part Rohan, ne se font que par les victorieux, nous ne voyons ordinairement d’estimes que les enfants de la fortune. » Tout cela est vrai ; et toutefois c’est bien Richelieu qui dans cette lutte a raison, et qui a la conscience de la grande cause qu’il sert, de la noble monarchie qu’il continue, et de la France incomparable qu’il achève.

651. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Mémoires ou journal de l’abbé Le Dieu sur la vie et les ouvrages de Bossuet, publiés pour la première fois par M. l’abbé Guetté. Tomes iii et iv· » pp. 285-303

Ainsi la sœur Cornuau a un recueil de toutes les lettres de Bossuet à elle adressées, mais elle y a mis un certain ordre de matières qui n’est pas du tout l’ordre des dates : « Ainsi moi qui ai pris l’ordre des dates, écrit l’abbé Le Dieu d’un air triomphant, j’en serai encore mieux instruit qu’elle et ceux à qui elle communiquera ce volume. » Tel est l’homme auquel, pendant vingt ans qu’il l’eut près de lui, Bossuet ne parvint à rien communiquer de sa religion puissante et sincère, de sa bonté ni de ses vertus. […] Il n’y a rien dans tout cela de scandaleux, mais seulement un salon de haute compagnie, et l’on voit que le cardinal de Noailles, qui passait pour un peu janséniste, mais qui n’en était pas moins grand seigneur, n’avait rien rabattu du ton ni de l’air de grandeur de son prédécesseur M. de Harlay. […] Les jeunes neveux ne parlaient pas : l’abbé de Beaumont soutenait la conversation, qui roula fort sur le voyage de M. de Cambrai ; mais cet abbé était très honnête, et je n’aperçus rien, ni envers personne de ces airs hautains et méprisants que j’ai tant de fois éprouvés ailleurs47 : j’y ai trouvé en vérité plus de modestie et de pudeur qu’ailleurs, tant dans la personne du maître que dans les neveux et autres.

652. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — II — Vauvenargues et le marquis de Mirabeau » pp. 17-37

Si la réponse était non pas de Mirabeau, mais de tout autre, on dirait qu’elle était bien du genre alors à la mode, genre Maurepas, genre Cléon, genre méchant, auquel Gresset bientôt attachera l’étiquette ; mais avec le marquis de Mirabeau, l’humeur du personnage suffit pour expliquer le trait, sans invoquer le bon air. […] Un Mirabeau n’y va pas de main morte ; les demi-aveux, les faux-fuyants de Vauvenargues, ses airs de paresse, ne satisfont pas le marquis ; il continue son obsession obligeante ; il y emploie le reproche, il y emploie la louange ; il se sert de toutes les clefs pour ouvrir ce cœur qu’un respect humain enchaîne, et il le tire tant qu’il peut du côté de ses propres penchants : Quand vous auriez plus de santé et de goût pour la gloire, vous ne sauriez faire naître la guerre, et ne seriez pas capable des bassesses qu’il faut pour s’avancer à la Cour. […] Dans la jeunesse, quand le brillant y était encore, et avant que ces humeurs impétueuses et ces fougues eussent acquis au caractère toutes ses aspérités, il pouvait y avoir sinon du charme, du moins bien de l’intérêt dans le commerce d’un tel homme : un air de grandeur revêtait les défauts.

653. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers (suite et fin.) »

Mme du Deffand elle-même qui la visita à Auteuil, où elle s’était retirée dans les premiers jours de son deuil, est obligée de rendre justice à l’air de vérité qui régnait dans toute sa personne : « (4 août 1776.) […] C’était une enfant gâtée qui, sous un air doux et ingénu, cachait de la finesse, même de la ruse, et se permettait tous ses caprices. […] s’écria la comtesse Amélie d’un air de vivacité charmante et en se jetant à son cou, excusez-moi !

654. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier (suite et fin.) »

. — « Vous sentez bien, Mesdames, disait-il un jour d’un air mystérieux à deux dames qu’il avait accompagnées jusque-là, que je me dois à moi-même de ne pas traverser ce jardin. » Pour lui, traverser les Tuileries, c’eût été sanctionner l’usurpation et reconnaître l’intrus qui logeait au château. […] Ce troisième mari avait plus l’air de complaisant que de mari et ne paraissait que rarement. » On sent bien que ce mot de mari ne vient ici qu’en manière d’épigramme. […] Je suis fâché que ce cœur, fortifié et soutenu par Alfieri, ait eu besoin d’un autre appui. » M. de Chateaubriand ne tient aucun compte, dans ce portrait dénigrant, d’un certain « air majestueux » que d’autres ont reconnu jusqu’à la fin à Mme d’Albany.

655. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat (suite et fin.) »

Nous ne finirions jamais si la vigueur de l’esprit et du corps était égale dans tous les âges : joignez à cela que j’ai une infirmité qui ne laisse pas de me rendre dures et pénibles les grandes fatigues à cheval. » Il continua donc de servir, en évitant tout air de plainte. […] Ses habits, ses équipages, ses meubles, sa maison, tout était de la dernière simplicité ; son air l’était aussi, et tout son maintien. Il était grand, brun, maigre, un air pensif et assez lent, assez bas, de beaux yeux et fort spirituels.

656. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Réminiscences, par M. Coulmann. Ancien Maître des requêtes, ancien Député. »

Coulmann s’étaient querellés en promenade, s’étaient arraché les cheveux, « mais qu’on avait peine, tant la couleur était la même, à savoir à qui appartenaient les uns et les autres. » Voilà donc un jeune homme de très bon air, fort bien accueilli ; fort goûté en tout lieu, et qui dut être, en effet, parfaitement aimable. […] Elle aimait tout de lui, disait-elle dans des vers passionnés : J’aime tout dans celui qui règne sur mon cœur… Elle aimait son talent, ce qu’elle appelait son génie, ses défauts même, son air vaurien ou lutin, et jusqu’à ses infidélités et ses inconstances : comment n’aurait-elle pas aimé sa manière correcte et digne ? […] Heureusement elle ne s’égare point dans les Alpes ; elle est tout bonnement à Montrouge, parce que les médecins ont décidé qu’elle avait besoin de l’air des champs.

657. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXIIIe entretien. Chateaubriand, (suite) »

Cela mérite seul d’être conservé, air et paroles. L’Auvergne avait produit l’air, le génie du jeune homme la tristesse amoureuse des paroles. […] Joubert avant de mourir, comme une harpe éolienne qui rend quelques beaux sons, et qui n’exécute aucun air. » C’était triste et vrai.

658. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Herbert Spencer — Chapitre I : La loi d’évolution »

Mais c’est là une opinion très incomplète, car il y a eu de plus un son produit ; des vibrations imprimées à l’air, non-seulement par le son, mais par le mouvement des corps ; il y a eu dérangement dans la position des molécules au point de collision ; par suite, condensation et dégagement de chaleur, quelquefois même étincelle, c’est-à-dire production de lumière. […] On allume une chandelle, c’est là un fait simple ; mais il en résulte une production de lumière, une production de chaleur, une colonne ascendante de gaz chauds, des courants établis dans l’air environnant, une formation continue d’acide carbonique, d’eau, etc. […] L’eau modifiera l’état hygrométrique de l’air environnant, etc.

659. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre IX, les mythes de Prométhée »

Mais l’astre était inaccessible, l’éclair était insaisissable, le volcan s’éteignait après avoir débordé, la forêt brûlait sur place et se résolvait en monceau de cendres ; la chaleur dont l’air était imprégné s’évaporait dans l’espace. […] Chez Hésiode, comme dans le Rig-Véda, le Soleil et l’Air, le Feu et l’Eau, la Foudre et les Vents transparaissent sous les noms sacrés qui les désignent, sans les personnifier tout à fait. […] Les Argonautes, traversant le Pont-Euxin, entrevoyaient de loin sa silhouette colossale à demi couverte par l’oiseau vorace ; ils entendaient ses cris qui déchiraient l’air.

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