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1040. (1856) Réalisme, numéros 1-2 pp. 1-32

Cette espèce n’est pas aimée dans les rangs. […] Certes, j’aimerais mieux qu’il y eût cent écrivains de cœur, au lieu de quatre ou cinq, de même que j’aime à sentir autour de moi beaucoup d’amis. […] Alors on les aimerait ; tout ce qui n’a pas l’esprit corrompu, tout ce qui est sain et naïf les aimerait. […] About ce jeune homme que n’aime pas M.  […] Silvestre sur Horace Vernet, il y a à peu près cette phrase : « Je méprise les jugements de la foule, et je ne veux pas aimer ce qu’elle aime.

1041. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Correspondance de Voltaire avec la duchesse de Saxe-Golha et autres lettres de lui inédites, publiées par MM. Évariste, Bavoux et Alphonse François. Œuvres et correspondance inédites de J-J. Rousseau, publiées par M. G. Streckeisen-Moultou. — I » pp. 219-230

Il en a bien un peu conscience, et au moment de lâcher les volumes dont il s’est acquitté comme d’une tâche, il écrit à la princesse : « Tout est fini et j’ai environ dix siècles à mettre à vos pieds ; j’aimerais mieux y être moi-même. […] Suivent quatre lettres (que l’on connaissait déjà) sur la vertu et le bonheur adressées par Jean-Jacques à Sophie, c’est-à-dire à Mme d’Houdetot ; il fait de la philosophie avec celle qu’il aime, et dont la vertu, dit-il, l’a ramené à la raison ; il s’en console et même il s’en félicite avec elle : « Si nous avions été, moi plus aimable ou vous plus faible, le souvenir de nos plaisirs ne pourrait jamais être, ainsi que celui de votre innocence, si doux à mon cœur… Non, Sophie, il n’y a pas un de mes jours où vos discours ne viennent encore émouvoir mon cœur et m’arracher des larmes délicieuses. […] Mme d’Houdetot, cette Sophie avec laquelle il aimait à renouer des entretiens d’un ordre si élevé, avait une belle-fille du même nom. […] Elle n’admettait que ce qui lui paraissait évidemment prouvé, aimait à disputer, parce qu’elle avait presque toujours une opinion à elle, et ne cédait qu’à la conviction ou enfin à la convenance. » Et lorsqu’il en vient à raconter la dernière maladie de cette jeune femme : « Elle craignait la mort parce qu’elle devait la séparer de tout ce qui lui était cher.

1042. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Dübner »

Heureux après tout, heureux homme, pourrions-nous dire, qui a consacré toute sa vie à d’innocents travaux, payés par de si intimes jouissances ; qui a approfondi ces belles choses que d’autres effleurent ; qui n’a pas été comme ceux (et j’en ai connu) qui se sentent privés et sevrés de ce qu’ils aiment et qu’ils admirent le plus : car, ainsi que la dit Pindare, « c’est la plus grande amertume à qui apprécie les belles choses d’avoir le pied dehors par nécessité. » Lui, l’heureux Dübner, il était dedans, il avait les deux pieds dans la double Antiquité ; il y habitait nuit et jour ; il savait le sens et la nuance et l’âge de chaque mot, l’histoire du goût lui-même ; il était comme le secrétaire des plus beaux génies, des plus purs écrivains ; il a comme assisté à la naissance, à l’expression de leurs pensées dans les plus belles des langues ; il a récrit sous leur dictée leurs plus parfaits ouvrages ; il avait la douce et secrète satisfaction de sentir qu’il leur rendait à tout instant, par sa fidélité et sa sagacité à les comprendre, d’humbles et obscurs services, bien essentiels pourtant ; qu’il les engageait sans bruit de bien des injures ; qu’il réparait à leur égard de longs affronts. […]  » Il aimait la guerre, il la faisait et on le lui rendait. — Si par là l’on entend diviser le procès, mettre les parties dos à dos et partager jusqu’à un certain point les torts, je ne demande pas mieux et je n’ai rien à opposer. […] « Mais, après cela, je maintiens que notre Université (que je suis honoré et fier d’avoir un moment traversée, et dont je respecte et j’aime en particulier tant de membres), est infiniment trop contente d’elle-même. […] J’estime et j’aime beaucoup de ces académiciens gréco-latins ; mais comment pas un, du vivant de Dübner, n’a-t-il élevé hautement la voix dans cette Académie pour la rappeler à la justice ?

1043. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Réception de M. Vitet à l’Académie française. »

C’était là une difficulté de plus dans la disposition d’un public en éveil, qui n’aime rien tant qu’à voir la politesse relevée de malice, et qui s’accoutumerait volontiers à en aller chercher des exemples à l’Académie, sauf à doubler la dose et à faire l’étonné en sortant245. Mais ce même public, s’il aime un grain ou deux de malice, goûte encore plus la diversité ; et pour lui, l’accord, quand il est juste, peut aussi avoir son piquant. […] Il était de ceux enfin qu’il ne siérait pas, même pour être vrai, de vouloir trop dépouiller de ce manteau aux plis flottants dont il aimait à draper ses figures et dont lui-même on l’a vu marcher enveloppé. […] Soumet, en les connaissant mieux, on ne les en aimerait que davantage246.

1044. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre III. De l’émulation » pp. 443-462

L’un sauva sa patrie par son éloquence oratoire et ses talents consulaires ; l’autre, dans ses commentaires, écrivit ce qu’il avait fait ; l’autre enfin, par le charme de son style, l’élévation philosophique dont ses lettres portent le caractère, se fit aimer comme un homme rempli de l’humanité la plus douce, malgré l’énergique horreur de l’assassinat qu’il commit. […] Il faut, pour le bonheur du genre humain, que les grands hommes chargés de sa destinée possèdent presque également un certain nombre de qualités très différentes ; un seul genre de supériorité ne suffit pas pour captiver les diverses classes d’opinions et d’estime ; un seul genre de supériorité ne personnifie point assez, si je puis m’exprimer ainsi, l’idée qu’on aime à se faire d’un homme célèbre. […] On croit assurer davantage l’indépendance d’un peuple, en s’efforçant de l’intéresser uniquement à des principes abstraits ; mais la multitude ne saisit les idées que par les événements ; elle exerce sa justice par des haines et des affections : il faut la dépraver pour l’empêcher d’aimer ; et c’est par l’estime de ses magistrats qu’elle arrive à l’amour de son gouvernement. […] Les vainqueurs redoutent les soldats qui ont conquis leur empire avec eux ; les prêtres ont peur du fanatisme même d’où dépend tout leur pouvoir ; les ambitieux se défient de leurs instruments : mais les hommes éclairés, parvenus aux premières places de l’état, ne cessent point d’aimer et de propager les lumières.

1045. (1888) Demain : questions d’esthétique pp. 5-30

Car rien n’est doux comme d’aimer la jeunesse et d’en être aimé. […] Ils admirent et ils aiment comme il faut qu’on admire et qu’on aime : trop. il n’y a qu’eux pour jeter généreusement des couronnes.

1046. (1864) William Shakespeare « Conclusion — Livre II. Le dix-neuvième siècle »

Sur ce, faites-lui son procès, à cette littérature, ou son triomphe, haïssez-la ou aimez-la, selon la quantité d’avenir que vous avez en vous, outragez-la ou saluez-la ; peu lui importent les animosités et les fureurs ! […] La fonction des penseurs aujourd’hui est complexe : penser ne suffit plus, il faut aimer ; penser et aimer ne suffit plus, il faut agir ; penser, aimer et agir ne suffit plus, il faut souffrir.

1047. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — La déclamation. » pp. 421-441

Ils aiment mieux croire qu’on a mal pris le sens du passage que de supposer les Romains capables de se plaire à un spectacle bisarre, puérile & du genre de Brioché. […] « On les voit marcher, parler tout autrement que nous, & avoir une contenance tout-à-fait extraordinaire. » Il rapporte qu’il se trouve à Paris des personnes si révoltées d’une pareille déclamation, qu’elles aiment mieux renoncer au spectacle que d’y aller entendre déclamer à contre sens. […] Celui-ci lui dit : Si vous l’aimez, renvoyez-lui son billet, & vous le verrez, dans deux heures, à vos genoux. Si vous ne l’aimez pas, garder cet effet, & vous n’entendrez jamais parler de celui qui vous l’envoie.

1048. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre septième. »

Le figuier dit qu’il aimait mieux ses figues que l’embarras du pouvoir suprême. […] Mais dans cette fable-ci, il y a un des deux amis qui est un avare ou un ambitieux ; et ces gens-là sont aimés froidement et aiment encore moins. […] Je n’aime pas ces petits vers, V. 8.

1049. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XV. Mme la Mise de Blocqueville »

Dans son livre, Montaigne, qu’elle aime à l’adoration, cette ogresse de lectures, qui aime tant de choses ! […] J’ai toujours aimé passionnément les dévotes. […] Telle est la délicieuse théologie au jasmin, plus parfumée et plus sentimentale qu’orthodoxe, d’une femme qui ne s’est pas faite dévote de peur de n’être rien, comme dit Voltaire, car elle était quelque chose, et qui aurait pu rester charmante, sans se compromettre, en n’écrivant pas « que la femme pense plus loin que l’homme », par la plaisante raison « qu’elle aime davantage » !

1050. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Joubert » pp. 185-199

L’oubli s’obstinait comme un créancier, quand enfin Chateaubriand, l’éternel Chateaubriand, qui ne s’aimait plus et qui avait raison, se dégourdit de son égoïsme pour faire une édition des Obscurités de Joubert, et y attacha dans une préface l’approbation et le privilège d’un Roi comme lui. […] Tous, tant ils l’aimaient, ne cessèrent de craindre qu’il ne se brisât tout à fait à la chaleur continue de cette petite flamme de génie, laquelle était sa vie aussi, et menaçait à chaque instant de s’exhaler comme la lumière du flambeau épuisé s’exhale, haletante et palpitante, sur la bobèche en cristal qu’elle finit par faire éclater ! […] Avant tout, il aime la lumière, il en a soif, il la boit et aussi il la verse. […] Et il l’aime au point d’en être injuste, lui, le sage, l’équilibré, l’exquis !

1051. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « L’Angleterre depuis l’avènement de Jacques II »

Malheureusement, des faits opposés à ceux-là, des faits qu’il ne s’agit ici ni de justifier ni de défendre, s’étaient produits aussi dans cette histoire troublée, féconde en contradictions politiques, et à travers lesquelles chaque parti peut voir ce qu’il aime ou désire le plus. […] On ne sait pas assez combien les peuples chicanent peu avec les races qu’ils aiment, et quelle puissance de fautes de toute espèce ces races prédestinées peuvent porter dans leur tête ou en faire sortir, sans en mourir ! […] que les peuples qui n’aiment pas ou qui n’aiment plus ont d’incoercibles défiances à opposer à la plus splendide et magnifique bonne foi ; que, fût-il allé jusqu’à l’apostasie pour garder son trône, ils n’auraient pas cru à l’apostasie, et que, dans leurs terreurs haineuses, ils auraient toujours vu le front menaçant du relaps brisant le masque de l’apostat !

1052. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « IV. M. Henri Martin. Histoire de France » pp. 97-110

Augustin Thierry, pour ne pas être immédiatement méprisées de cette nation qui a toujours aimé l’insolence et la force. […] Augustin Thierry, mais qui s’est entièrement perdu dans un pays qui aime à rire, et qui respecte le sérieux, — qui le respecte jusqu’à l’ennui, — M.  […] Henri Martin, qui aime l’égalité civile et politique, doit aimer toutes les égalités, car il ne peut dominer rien.

1053. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. H. Wallon » pp. 51-66

… On aime parfois à être étonné. […] Comme elle croyait en Dieu et qu’elle l’aimait, elle crut au Roi et elle l’aima. […] Il respecte son caractère et il l’aime.

1054. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Auguste Vacquerie » pp. 73-89

Nous sommes juste, et d’ailleurs nous aimons l’imprévu. […] » C’est un philosophe, mais débraillé et rudement cynique, qui aime l’indécence comme une audace et ne trouve jamais le mot assez vert. […] nous aussi, nous disons — s’écrie-t-il — que personne n’est la propriété de personne, que l’amour n’est pas l’esclavage, et que tout homme et toute femme ont le droit de se reprendre à la femme et à l’homme qu’ils n’aiment plus. Nous sommes pour la liberté de cœur. » — « Nous estimons par-dessus tout — dit-il ailleurs — les natures dévouées qui s’oublient dès qu’elles aiment, et qui paieraient de leur honneur et de leur paradis les joies de l’amant. » Parmi toutes les passions que Vacquerie respecte et couronne, il n’y en a qu’une seule qu’il ne comprend pas plus que les passions de la tragédie de Racine : c’est la passion de la décence, de la chasteté et du devoir !

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