Dès l’âge de dix ans, il marquait du penchant pour la boisson, et on avait peine à l’empêcher de se griser à table. […] Elle ne ressemblait pas à Frédéric qui se passait de lecture allemande et ne lisait que des ouvrages français ; elle en lisait aussi en russe et trouvait à cette langue adoptive, qu’elle s’appliquait à parler et à prononcer en perfection, « bien de la richesse et des expressions fortes. » Les Annales de Tacite qu’elle lut en 1754 seulement, c’est-à-dire à l’âge de vingt-cinq ans, opérèrent, dans sa tête une singulière révolution, « à laquelle peut-être la disposition chagrine de mon esprit à cette époque, nous dit-elle, ne contribua pas peu : je commençais à voir plus de choses en noir, et à chercher des causes plus profondes et plus calquées sur les intérêts divers, dans les choses qui se présentaient à ma vue. » Elle était alors dans des épreuves et des crises de cœur et de politique d’où elle sortit haute et fière, avec l’âme d’un homme et le caractère d’un empereur déjà. […] Je n’en fis pas secret à Mr Tchoglokoff qui le redit à l’oreille de deux ou trois personnes, et de bouche en bouche, au bout d’un quart d’heure à peu près, tout le monde le sut. » Avec une galanterie des ce genre et moyennant cette adroite flatterie pour un caprice souverain, la grande-duchesse réparait pour quelque temps, dans l’esprit futile d’Élisabeth, bien des préventions contre elle, qu’on lui avait inspirées. — Mais voici le mieux, et je ne crois pas qu’un peintre de femmes, fût-il un Hamilton, eût jamais pu mieux faire ni mieux dire, s’il s’était proposé de nous donner le portrait de Catherine, à l’âge de vingt et un ans : « Aux bals de la Cour, où le public n’assistait pas, je me mettais le plus simplement que je pouvais, et en cela je ne faisais pas mal ma cour à l’Impératrice, qui n’aimait pas beaucoup qu’on y parut fort parée.
Mais du jour où, dans une province de Judée éloignée de Jérusalem, sur une colline verdoyante, non loin de la mer de Galilée, au milieu d’une population de pauvres, de pêcheurs, de femmes et d’enfants, le Nazaréen, âgé de trente ans environ, simple particulier, sans autorité visible, nullement conducteur de nation, ne puisant qu’en lui-même le sentiment de la mission divine dont il se faisait l’organe inspiré comme un fils l’est par son père, se mit à parler en cette sorte, de cette manière pleine à la fois de douceur et de force, de tendresse et de hardiesse, « d’innocence et de vaillance », un nouvel âge moral commençait. […] Bien longtemps, et quand l’âge de sa prédominance la plus ferme et la plus altière n’était déjà plus, les luttes elles-mêmes et les déchirements partiels n’entamèrent en rien sa végétation luxueuse et sa majesté. […] Qu’est-ce à dire aujourd’hui que le cours des saisons et des âges a de plus en plus marché, que le sourd travail des ans et le ralentissement de la sève ont fait de l’arbre un tronc antique, noueux, moussu, à demi creusé et ne se soutenant plus en quelques-unes de ses parties qu’à l’aide de supports ?
Si je voulais chercher quelques traces ou indices du talent de Veyrat à cet âge de vingt-deux ans, je les trouverais plutôt dans ses Italiennes, poésies politiques dont il ne se donnait que comme l’éditeur52. […] A cet âge d’enthousiasme, de colère, d’espérance illimitée, Veyrat, semblable à bien des hommes de sa génération et de celles qui ont succédé, rêvait l’émancipation universelle des peuples et leur délivrance par la révolution ; il s’irritait des retards et prenait ses impatiences pour des prophéties. […] J’ai vu la société à un âge où il est dangereux de la voir ; j’ai épousé ses passions les plus orageuses avant même d’en soupçonner les premières conséquences.
Il est à la Cour pour obtenir une pension du roi pour lui et pour aider à élever les enfants qui sont encore en bas âge, et à mieux pourvoir ceux qui en sont en état. […] Je n’étais arrivé là qu’environ une heure après le corps, avec le fils qui avait eu à s’arrêter à Versailles. » Dans cette même lettre, les bontés de Louis XIV pour la famille Racine nous sont confirmées par le menu : « Depuis quelques jours le roi a accordé au fils une pension de mille francs (sic) et autant à la veuve pour elle et ses enfants encore en bas âge. […] Le Peletier aussi louable que je dois être honteux de n’avoir pas, à mon âge, le courage de l’imiter. » Racine était de cette famille d’esprits distingués et de cœurs tendres, que se disputaient, on l’a dit, l’amour du roi et l’amour de Dieu ; il se le reprochait lui-même.
Charles-Hubert Millevoye est né à Abbeville le 24 décembre 1782, et par conséquent, s’il vivait aujourd’hui, il aurait à peu près le même âge (un peu moins) que Béranger. […] Le jeune Millevoye perdit son père à l’âge de treize ans ; dix ans après, il célébrait cette douleur, encore sensible, dans l’élégie qui a pour titre l’Anniversaire. […] rien qu’un denier d’or marqué à mon nom, et qui s’ajouterait à cette richesse des âges, à ce trésor accumulé qui déjà comble la mesure !
Tout change, tout meurt ou se renouvelle ; les races les plus antiques et les plus révérées ont leur fin ; les nations elles-mêmes, avant de tomber et de finir, ont leurs manières d’être successives et revêtent des formes diverses de gouvernement dans leurs divers âges ; ce qui était religion et fidélité dans un temps n’est plus que monument et commémoration du passé dans un autre ; mais à travers tout, tant que la dépravation n’est pas venue, il y a quelque chose qui reste : l’humanité et les sentiments naturels qui la distinguent, le respect pour la vertu, pour le malheur, surtout immérité et innocent, la pitié qui elle-même n’est que le nom de la piété envers Dieu en tant qu’elle se retourne vers les infortunes humaines. […] À cet âge, elle n’avait pas encore dans les traits du visage ces formes prononcées et un peu fortes sous lesquelles nous l’avons vue. […] Mme la duchesse d’Angoulême est morte à Frohsdorf le 19 octobre 1851, à l’âge de soixante-treize ans moins deux mois, et dans la vingt et unième année de son dernier exil.
Pour s’expliquer qu’au milieu de ces pièges et de ces périls où elle se jouait, Madame n’ait point failli, pour qu’elle ait pu dire sincèrement à Monsieur, à l’article de la mort : « Monsieur, je ne vous ai jamais manqué », il faut se rappeler et les difficultés de sa situation si observée, et aussi son âge avec cette sorte d’innocence qui accompagne les imprudences de la première jeunesse. […] Quand le comte de Guiche fut exilé en 1664, Madame, qui avait vingt ans, était déjà devenue plus prudente : « Madame, nous dit Mme de La Fayette, ne voulait pas qu’il lui dît adieu, parce qu’elle savait qu’on l’observait, et qu’elle n’était plus dans cet âge où ce qui était périlleux lui paraissait plus agréable. » Tous ces aimables engagements, ces hasards, ces entrecroisements de désirs et d’intrigues de cœur se rapportent donc surtout à sa jeunesse d’avant vingt ans. […] Il n’y avait point de cabale ; mais Madame, parmi les personnes attachées au prince son mari, avait distingué un homme capable, un ambitieux généreux et de mérite, et elle se l’était acquis, elle avait voulu le faire servir à l’accomplissement de ses propres vues, qui devenaient plus sérieuses avec l’âge.
Mais le maître en ce genre, maître incomparable, du moins à considérer tous les auteurs français, et pour les autres je sens mon incompétence, c’est Molière, qui trace un caractère par le style même du personnage dès les premières répliques qu’il prononce, qui met des nuances de style sensibles entre des personnages à peu près semblables, et par exemple entre Philaminte, Armande et Bélise, peut-être et je le crois, entre Mademoiselle Cathos et Mademoiselle Madelon ; qui indique par des styles différents les différents âges, même, d’un même personnage ; car on sait parfaitement que Don Juan n’a pas le même âge au cinquième acte qu’au premier, malgré l’apparente observation de la règle des vingt-quatre heures, et qu’il change de caractère du commencement à la fin de la pièce ; or, observez le style, et vous verrez que de ces différences dans le caractère et de ces différences d’âge, le style même vous avertit.
C’était un jeune homme qui, dès l’âge de dix-huit ans, se trouva le plus grand poète de son temps, distingué par son poème de Henri IV, qu’il avait composé dans ses premiers voyages à la Bastille, et par plusieurs pièces de théâtre fort applaudies. […] Mais un désaccord s’étant prononcé entre le roi de Sardaigne et lui, et la fatigue de l’âge se faisant sentir, il dut retourner à Turin, où la maladie le prit et où il mourut le 17 juin.
Un grand bon sens, joint à des convictions religieuses très-sincères et à des affections monarchiques très-profondes ; beaucoup d’études, beaucoup de modération, quoique dans la première et fervente jeunesse, une probité pleine de désintéressement et même d’esprit de sacrifice, à un âge et dans des situations facilement accessibles aux vues ambitieuses : tels étaient les mérites et la physionomie bien rare de cette école du Correspondant, qui poursuit encore aujourd’hui ses honorables travaux dans la Revue européenne. […] Je le reproduis ici pour montrer que nous n’étions pas seulement attentifs alors aux poëtes, aux peintres, aux artistes, mais aussi aux politiques de notre âge et de notre génération, et que nous avions les yeux ouverts de plus d’un côté.
Les caprices, les passions de quelques-uns avaient de temps à autre dérangé les lois ou même avaient paru les faire : maladie d’enfance, convulsions du bas âge ! […] Tout est bien, tout est mieux, me disais-je ; mais à force de mieux et par la vertu même de ce progrès continu que rien désormais ne saurait enrayer, ne serait-il pas possible que l’équivalent de cette grande catastrophe et de ce grand naufrage d’oubli se retrouvât un jour pour nous aussi, pour nos âges si superbes ?
Vingt héros, divers de caractère et de talent, pareils seulement par l’âge et le courage, conduisaient ses soldats à la victoire. […] On pesait leurs mérites divers ; mais aucun œil encore, si perçant qu’il pût être, ne voyait dans cette génération de héros les malheureux ou les coupables : aucun œil ne voyait celui qui allait expirer à la fleur de l’âge, atteint d’un mal inconnu, celui qui mourrait sous le poignard musulman ou sous le feu ennemi, celui qui opprimerait la liberté, celui qui trahirait sa patrie ; tous paraissaient grands, purs, heureux, pleins d’avenir !
Puis se déroulent le double sommet qui domine Mageddo, les montagnes du pays de Sichem avec leurs lieux saints de l’âge patriarcal, les monts Gelboé, le petit groupe pittoresque auquel se rattachent les souvenirs gracieux ou terribles de Sulem et d’Endor, le Thabor avec sa belle forme arrondie, que l’antiquité comparait à un sein. […] Si jamais le monde resté chrétien, mais arrivé à une notion meilleure de ce qui constitue le respect des origines, veut remplacer par d’authentiques lieux saints les sanctuaires apocryphes et mesquins où s’attachait la piété des âges grossiers, c’est sur cette hauteur de Nazareth qu’il bâtira son temple.
pourquoi lui donner cette mauvaise opinion des enfans de son âge ? […] Passe encor de bâtir ; mais planter à cet âge !
Qu’un peintre se serve donc de l’Apollon de Belveder pour representer Persée ou quelque autre heros de l’âge de Persée, pourvû qu’il anime cette statuë, et qu’il ne se contente pas de la dessiner correctement pour la placer dans un tableau telle qu’elle est dans sa niche. […] Il seroit inutile cependant de vouloir engager de jeunes gens, pressez par l’émulation, excitez par l’activité de l’âge, et entraînez par un génie impatient de s’annoncer au public, d’attendre à se produire qu’ils eussent connu l’espece dont est leur talent, et qu’ils l’eussent perfectionné.