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1087. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Le comte de Ségur »

Ce succès fut, en quelque sorte, personnel à M. de Ségur, qui, dans ses Mémoires et dans ses divers écrits, a pu s’en montrer fier à bon droit. […] Mais ce nous est un vif regret que l’auteur, eût-il dû courir sur certains intervalles, n’ait pu mener son œuvre jusqu’à travers le xviiie  siècle ; nul n’était plus désigné que lui pour retracer la suite et l’ensemble politique de ce temps encore neuf à peindre par cet aspect ; il s’y fût montré original en restant lui-même. […] Vous m’exhortâtes à pardonner, à rendre le bien pour le mal, à montrer à ceux qui me haïssaient leur injustice, en leur prouvant mes vertus, à les forcer ainsi à l’admiration, à la reconnaissance, et vous m’assurâtes du plus beau triomphe qu’une âme généreuse pût souhaiter… J’eus le bonheur de pleurer et bientôt le courage de combattre.

1088. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre IV. Le patriarche de Ferney »

On pouvait railler ses prétentions de propriétaire, la fierté avec laquelle il montrait son haras, son troupeau, ses taureaux, ses charrues : mais on était saisi de son ardeur de réformes, de sa fièvre d’améliorations, de sa bienfaisance épandue largement. […] Intéressé comme il s’est montré souvent, il abandonnait sans cesse à ses amis, à ses libraires, à ses comédiens, à quelque pauvre hère, le produit de ses œuvres. […] Si l’on voulait se représenter ce que notre vieille littérature, purement française, aurait pu donner sans la Renaissance, à quelle perfection originale elle aurait pu parvenir sans le secours et les modèles de l’art antique, je crois que le xviiie  siècle peut nous le montrer, et, dans le xviiie  siècle, Voltaire.

1089. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Octave Feuillet »

montrez-nous une héroïne qui ne soit pas splendidement belle et mirifiquement intelligente ! Montrez-nous un amoureux qui ne soit pas un homme supérieur ! Montrez-nous en un au moins qui ne sache pas monter à cheval !

1090. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « La jeunesse du grand Condé d’après M. le duc d’Aumale »

Ici, écoutez le narrateur : … Du point où le duc d’Anguien avait fait halte pour rallier derrière la ligne espagnole ses escadrons victorieux, il ne pouvait saisir les détails de ce tableau ; mais la direction de la fumée, la plaine couverte de fuyards, la marche de la cavalerie d’Alsace, l’attitude de l’infanterie ennemie, tout lui montrait, en traits terribles, la défaite d’une grande partie de son armée. […] Au reste, en dépit des panégyristes officiels, et si nous en croyons Gui Patin, le bruit courut, à Paris, dans les salons, que le duc d’Anguien avait montré trop de jeunesse et que, si le combat s’était terminé à notre avantage, l’honneur en revenait uniquement à M. de Gassion. […] On se représente ordinairement le grand Condé comme un capitaine d’un génie tout spontané et qui devait plus à l’inspiration qu’à la science : M. le duc d’Aumale s’applique à nous montrer qu’il fut aussi un excellent tacticien, un ingénieur habile et savant, et nous le croyons sans peine.

1091. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre quatrième »

Mais ils auraient craint, en le disant, de paraître trop peu soucieux de la gloire de la nation, et, pour rester bons Français, ils se montraient juges faciles. […] Dès qu’il descend des hauteurs de l’épopée dans des genres où non seulement il ne messied pas à la personne de se montrer, mais dont la grâce est dans la naïveté même de l’exhibition, il réussit, il est bon écrivain en vers, il est souvent poète. […] C’est à l’école des élégiaques anciens qu’il apprit l’art si difficile d’idéaliser la passion et de ne montrer de son cœur que ce qui peut toucher le nôtre.

1092. (1911) La valeur de la science « Troisième partie : La valeur objective de la science — Chapitre X. La Science est-elle artificielle ? »

Il en est de même, comme je crois l’avoir montré ailleurs, quand il s’agit par exemple du postulatum d’Euclide. […] Des expériences antérieures très nombreuses ne m’ont jamais montré cette loi en défaut et alors je me suis rendu compte que je pourrais exprimer par le même énoncé deux faits aussi invariablement liés l’un à l’autre. […] Les exemples cités plus haut le montrent assez bien.

1093. (1900) Poètes d’aujourd’hui et poésie de demain (Mercure de France) pp. 321-350

Il montra un très louable souci du métier poétique. […] Il faudrait maintenant vous montrer ce que chacun en a réalisé dans son œuvre. […] J’aurais voulu le faire plus clairement et plus explicitement, mais je serais heureux d’avoir réussi à vous montrer sur le mur de l’histoire littéraire la treille poétique d’aujourd’hui.

1094. (1887) Discours et conférences « Rapport sur les prix de vertu lu dans la séance publique annuelle de l’Académie française »

L’esclavage antique fut aboli virtuellement quand une pauvre esclave de Lyon se fut montrée dans l’amphithéâtre aussi héroïque que sa maîtresse. […] À son arrivée à Château-l’Évêque, ce monsieur, qui est médecin, demande immédiatement des renseignements sur cette jeune fille qui l’a frappée, et, après qu’on lui a dit ce qu’elle est, ce qu’elle fait : — Mais cette jeune fille, dit-il, mérite le prix Montyon ; je la signalerai à l’Académie. » Je ne sais si la signature de cet admirateur d’Emmeline figure parmi les innombrables attestations qui montrent l’estimé que l’on professe pour elle à Chancelade et à Château-l’Évêque ; mais ce qui est bien honorable pour cette jeune fille, c’est la notice qu’a faite sur elle M. le curé de Château-l’Évêque, notice composée avec un sentiment des plus justes, un tact parfait, et une pleine inconscience littéraire. […] Il y a, vous disais-je, beaucoup de vertu dans notre monde ; il n’y en a pas tant cependant que l’on puisse impunément se montrer difficile et faire passer à chacun un examen sur les motifs pour lesquels il est vertueux.

1095. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « V »

Ce peu d’autorité qu’a pu acquérir la Revue, le droit qu’après ces deux ans et demi on m’accordera d’avoir et d’exprimer une opinion, la confiance personnelle que mes amis veulent bien me montrer, je demande aujourd’hui, en une très grave circonstance, d’y faire appel. […] Lamoureux ne la défendaient qu’au nom du théâtre en préparation : il était peu aisé de montrer de grandes sympathies artistiques pour le directeur des concerts. […] L’orchestre sous la direction du Kappelmeister Mahleraa a montré qu’il « comprenait » la signification de l’œuvre : il y a plusieurs manières d’interpréter les drames wagnériens : soit d’une manière incorrecte, mais en indiquant le mouvement, comme le fait M. 

1096. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXVII et dernier » pp. 442-475

J’ai voulu seulement montrer, dans le plus grand événement de sa vie, le triomphe d’une des plus illustres personnes de la société polie, et de cette société elle-même dont elle fut l’ornement et la gloire. […] entre l’art d’amuser et celui d’intéresser ; entre le frivole avantage de montrer de l’esprit, et le talent d’en donner ! […] Plus de cent vaisseaux de ligne se montrèrent dans ces ports.

1097. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Chansons de Béranger. (Édition nouvelle.) » pp. 286-308

Aujourd’hui je n’y mets rien, je l’avoue, qu’un sincère désir de voir et de montrer les choses et les personnes telles qu’elles sont, telles du moins qu’en ce moment elles me paraissent. […] Dans La Bonne Vieille, le troisième couplet est d’un geste bien déclamatoire encore et bien académique : D’un trait méchant se montra-t-il capable ? […] J’y verrais le texte de tout un commentaire moral à l’adresse de ceux qui se font une idole de la popularité, et qui s’en montrent les grands prêtres obéissants, fussent-ils d’ailleurs les plus honnêtes gens du monde, et s’appelassent-ils Béranger ou La Fayette : « Ainsi, leur dirait-on, vous poussez sans cesse à ce dont vous ne voulez pas en définitive, ou à ce que vous ne voulez que très peu. » « Le peuple, c’est ma muse », a dit Béranger.

1098. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Gil Blas, par Lesage. (Collection Lefèvre.) » pp. 353-375

Le juge le plus compétent en pareille matière, Walter Scott, a très bien caractérisé l’espèce de critique vive, facile, spirituelle, indulgente encore et bienveillante, qui est celle de Gil Blas : « Cet ouvrage, dit-il, laisse le lecteur content de lui-même et du genre humain. » Certes, voilà un résultat qui semblait difficile à obtenir de la part d’un satirique qui ne prétend pas embellir l’humanité ; mais Lesage ne veut pas non plus la calomnier ni l’enlaidir ; il se contente de la montrer telle qu’elle est, et toujours avec un air naturel et un tour divertissant. […] Il rit pour rire, pour montrer la nature à nu ; il ne se moque jamais du présent au profit d’une idée ni d’un système futur. […] Quand Laure le fait passer pour son frère et qu’elle le présente sur ce pied à toute la troupe, le respect avec lequel il est reçu par tous, depuis les premiers sujets jusqu’au souffleur, la curiosité et la civilité avec lesquelles on le considère, touchent de près à l’une des prétentions les plus sensibles de ce monde des comédiens d’autrefois : « Il semblait, dit-il, que tous ces gens-là fussent des enfants trouvés qui n’avaient jamais vu de frère. » C’est qu’en effet les comédiens (je parle toujours de ceux d’autrefois), précisément parce qu’ils étaient le plus souvent peu pourvus du côté de la famille, étaient d’autant plus fiers et attentifs quand ils en pouvaient montrer quelques membres comme échantillon.

1099. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Mme de Caylus et de ce qu’on appelle Urbanité. » pp. 56-77

Aujourd’hui, je voudrais montrer ce moment parfait dans une personne agréable et distincte qui nous le peignît avec vivacité et avec grâce, et qui ne peignît que cela. […] Louis XIV est peint par des traits justes et nets qui le montrent sans exagération et avec tous ses avantages dans la vie habituelle : on y sent bien le roi digne de cette grande époque où l’on pensait et où l’on parlait si bien. […] Je pourrais faire, si je voulais, un relevé des gaillardises de Mme de Caylus, et qui nous la montrerait, dans un genre plus adouci, une vraie fille pourtant de Mme de Sévigné.

1100. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Biographie de Camille Desmoulins, par M. Éd. Fleury. (1850.) » pp. 98-122

J’avais eu l’idée, après avoir montré le parfait langage du siècle de Louis XIV dans sa fleur et son élégance dernière chez la plus charmante élève de Mme de Maintenon, après avoir considéré le style du xviiie  siècle dans sa plénitude de vigueur et d’éclat chez Jean-Jacques Rousseau, d’aborder aussitôt la langue révolutionnaire chez l’homme qui passe pour l’avoir maniée avec le plus de verve et de talent, chez Camille Desmoulins. […] Le dimanche 12 juillet 1789, deux jours avant la prise de la Bastille, ce fut Desmoulins qui, au Palais-Royal, monta sur une table, annonça aux Parisiens le renvoi de Necker, et fit cette scène, si souvent racontée, où il tira Pépée, montra des pistolets et arbora une cocarde verte comme signe d’émancipation et d’espérance. […] Toujours chez Camille le même genre de plaisanterie qui frise la guillotine ; toujours ce même geste de singe malin et cruel qui se plaît à montrer de loin le tranchant de la hache !

1101. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « La duchesse du Maine. » pp. 206-228

Un jour que ce prince montrait un chant traduit à la duchesse, elle s’impatienta pourtant et lui dit : « Vous verrez qu’un beau matin, en vous éveillant, vous serez de l’Académie française, et que M. d’Orléans sera régent du royaume. » L’ambition couvait, en effet, sous cette vie de jeux et de comédies ; il y avait dans ce corps de myrmidon, dans cet extrait du Grand Condé, des étincelles de cette même fureur civile. […] L’auteur du portrait continue de nous montrer ainsi tous les vices naïfs de sa princesse, toutes ses qualités sans âme et sans lien, sa religion sans piété, sa profusion sans générosité, beaucoup de connaissances sans aucun vrai savoir, « tous les empressements de l’amitié sans en avoir les sentiments », pas le moindre soupçon de la réciprocité et de la sympathie humaine : « On n’a point de conversation avec elle ; elle ne se soucie pas d’être entendue, il lui suffit d’être écoutée. » Et à la voir ainsi se montrer à nu non par franchise, mais parce qu’elle n’a en elle aucun principe d’égards et d’attention pour autrui, Mlle de Launay conclut en citant ce mot qui exprime le résultat de toute son étude, et qu’elle aurait bien trouvé d’elle-même : Elle (la duchesse du Maine) a fait dire à une personne de beaucoup d’esprit que les princes étaient en morale ce que les monstres sont dans la physique ; on voit en eux à découvert la plupart des vices qui sont imperceptibles dans les autres hommes.

1102. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « La Grande Mademoiselle. » pp. 503-525

Il semblait qu’elle n’eût qu’à choisir, et l’on ne peut montrer son travers altier avec plus de naïveté qu’elle ne le fait elle-même à propos d’une grande fête qui eut lieu au Palais-Royal sur la fin de l’hiver de 1646, et pour laquelle la reine mère voulut la parer : L’on fut trois jours entiers à accommoder ma parure ; ma robe était toute chamarrée de diamants avec des houppes incarnat, blanc et noir ; j’avais sur moi toutes les pierreries de la Couronne et de la reine d’Angleterre, qui en avait encore en ce temps-là quelques-unes de reste. […] Cette idée de mariage, qui jouait toujours en perspective devant ses yeux, lui montrait alors une union possible, soit avec le prince de Condé dans le cas où il deviendrait veuf (elle ne répugnait point à ces sortes de suppositions), soit même avec le roi, si elle se rendait nécessaire et redoutable. […] Mademoiselle fit tirer ce jour-là quelques volées de canon de la Bastille qui achevèrent de manifester l’attitude de Paris, et de montrer aux troupes du roi que l’heure n’était pas venue encore d’y entrer.

1103. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mirabeau et Sophie. — II. (Lettres écrites du donjon de Vincennes.) » pp. 29-50

puissiez-vous, à votre dernier jour, trouver tous deux plus de miséricorde que vous n’en avez montré ! […] Ce Mémoire est plus que suffisant pour te mettre en état de montrer toi-même le français par principes à ta fille. […] Les jugements que Mirabeau portait sur les écrivains de son temps tendraient également à montrer qu’il n’était point précisément des leurs, et que sa supériorité aspirait à une autre sphère pour s’y déployer.

1104. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Hégésippe Moreau. (Le Myosotis, nouvelle édition, 1 vol., Masgana.) — Pierre Dupont. (Chants et poésies, 1 vol., Garnier frères.) » pp. 51-75

Il nous siérait peu à nous qui parlons, de nous montrer trop sévère, l’ayant ressentie à notre jour et même décrite autrefois dans notre jeunesse. […] Le talent qu’il y montra ne put sauver une telle publication partout très aventurée, et qui l’était surtout au milieu des rivalités et des susceptibilités d’une petite ville. […] Oui, l’on pouvait se montrer plus voisin de la nature encore, de la réalité simple, modeste et sensible, que ne l’avaient été nos illustres poètes classiques, sans tomber pour cela dans ce style lourd, plaqué et technique, qui prévaut presque partout aujourd’hui.

1105. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Lettres et opuscules inédits du comte Joseph de Maistre. (1851, 2 vol. in-8º.) » pp. 192-216

Un des derniers poètes de l’Antiquité, Claudien, dans une pièce célèbre, a montré comment le triomphe d’un méchant et d’un scélérat peut jeter le trouble dans le cœur d’un homme de bien et le faire douter qu’il y ait des dieux. […] » et faisant allusion au mot des mères de Sparte qui montraient à leurs fils le bouclier, en leur disant de revenir avec ou dessus : Cependant, mon cher ami, ou avec cela, ou sur cela. […] Dieu rirait bien si Dieu pouvait rire , dit-il quelque part, en faisant je ne sais quelle supposition ; et ailleurs, il nous montrera les esprits célestes riant comme des fous de je ne sais quelle bévue des hommes.

1106. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — II. (Suite.) » pp. 220-241

Les lettres qu’on a de lui à cette date (1774-1775) nous le montrent émerveillé lui-même de sa destinée, se retournant, se regardant de profil pour se dire combien elle est étrange et bizarre, courant le monde, l’Angleterre, l’Allemagne, faisant sept cent quatre-vingts lieues en six semaines, et plus de dix-huit cents lieues en huit mois, et s’en vantant, attentif dans ses absences à ne point se laisser oublier, à se remettre de temps en temps sur le tapis par des récits de périls et d’aventures qui n’arrivaient qu’à lui seul. […] Au second sapin que j’ai tourné, me voyant presque dans ma route, je me suis trouvé si insolent, que, si j’avais eu une troisième main, je lui aurais montré ma bourse comme le prix de sa valeur, s’il était assez osé pour la venir chercher. […] C’était le prince de Conti qui, après Le Barbier de Séville, avait porté à l’auteur le défi de reprendre ainsi son Figaro et de le montrer une seconde fois dans des circonstances plus développées, plus fortement nouées et agrandies.

1107. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Rollin. » pp. 261-282

Pourtant ce fut lui qui, à la fin, rencontra cette mesure si délicate et si rare, qui l’introduisit, qui la montra possible par ses écrits, qui l’offrit vivante dans sa personne, et qui, sur la pente nouvelle où l’Université, bon gré mal gré, se trouvait conduite, l’inclina doucement aux réformes utiles, lui ménageant un dernier âge fécond encore et prospère. […] Fixé sur la paroisse de Saint-Étienne-du-Mont, les relations jansénistes nous le montrent qui assistait en surplis aux offices d’une manière bien édifiante (Rollin était clerc tonsuré) ; il essaya même de faire alors des conférences sur l’Écriture sainte ; mais un avertissement amical de l’archevêque, M. de Noailles, les lui fit interrompre. […] Dans la relation d’un Voyage littéraire que fit en France, en 1733, un Français réfugié de Berlin, Jordan, il est parlé de Rollin en des termes qui nous le montrent assez au naturel et sans exagération : Je rendis visite à l’illustre M. 

1108. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Bernardin de Saint-Pierre. — I. » pp. 414-435

Aujourd’hui, après tout ce qu’on a écrit déjà sur Bernardin de Saint-Pierre et ce que j’en ai écrit autrefois moi-même, j’aimerais à revoir d’un peu près cette double part qu’il faut faire en lui, et à le montrer en réalité et au naturel ce qu’il était. […] Mais l’homme sensé ajoute ces paroles qui montrent que chez Bernardin le romanesque n’étouffait pas le positif : Toutes ces fêtes-là, écrit-il, ne m’amusent pas tant que vous croyez bien. […] En sortant de ces soirées brillantes, il lui faut rentrer dans une petite chambre qu’il a louée cinq ducats ; ces détails matériels, qui ont été supprimés dans les débuts de la correspondance, montrent le côté faible de cette situation précaire, et c’est un côté que Bernardin ne perdait jamais de vue.

1109. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Voltaire et le président de Brosses, ou Une intrigue académique au XVIIIe siècle. » pp. 105-126

Je suppose, pour ne pas être injuste, qu’on a présent à l’esprit Le Siècle de Louis XIV, l’Histoire de Charles XII, ce qu’il y a d’inspiration chevaleresque dans la tragédie de Tancrède, l’Épître à Horace, Les Tu et les Vous, Le Mondain, Les Systèmes, les jolies stances : Si vous voulez que j’aime encore… ; je suppose qu’on a relu, il n’y a pas longtemps, bon nombre de ces jugements littéraires exquis et naturels, rapides et définitifs, qui sont partout semés dans la correspondance de Voltaire et dans toutes ses œuvres, et, bien assuré alors qu’il ne saurait y avoir d’incertitude sur l’admiration si due au plus vif esprit et au plus merveilleux talent, je serai moins embarrassé à parler de l’homme et à le montrer dans ses misères. […] Pour en finir avec les impressions que fait naître cette affaire, je dirai que peut-être, à certains moments, le président fut un peu strict, et se montra plus juste que généreux. […] Le président de Brosses, pour n’avoir pas voulu faire cadeau à Voltaire des quatorze moules de bois livrés par Charlot Baudy, ne put jamais être de l’Académie française ; et (ce qui est plus grave) sa mémoire, a l’heure qu’il est, resterait encore entachée de ces odieuses imputations de dol, insinuées avec tant d’impudeur par Voltaire, si la correspondance mise au jour ne montrait nettement de quel côté est l’honnête homme, de quel côté le calomniateur et le menteur.

1110. (1889) L’art au point de vue sociologique « Introduction »

Après avoir montré l’idée sociologique sous l’idée religieuse, Guyau a voulu faire voir qu’elle se retrouve aussi au fond même de l’art ; que l’émotion esthétique la plus complète et la plus élevée est une émotion d’un caractère social ; que l’art, tout en conservant son indépendance, se trouve ainsi relié par son essence même à la vraie religion, à la métaphysique, et à la morale. […] Guyau, pour le montrer, passe en revue les grands poètes de notre temps, Lamartine, Vigny, Musset ; il insiste de préférence sur celui qui a vécu le plus longtemps parmi nous, et qui a ainsi le plus longtemps représenté en sa personne le dix-neuvième siècle : Victor Hugo. […] C’est la première étude approfondie qu’on ait faite de l’art au point de vue sociologique, — nous ne disons pas seulement social, car ce n’est pas simplement l’influence réciproque de l’art et du milieu social que Guyau a étudiée : il a proposé une conception proprement sociologique de l’essence même de l’art, et il a montré l’application de cette idée sous ses principales formes.

1111. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Le Prince » pp. 206-220

Montrez-moi une vieille rusée qui attache l’attention d’une jeune innocente enchantée, tandis qu’une autre vieille lui vide ou lui coupe ses poches ; et si chacune de ces figures a son expression, vous aurez fait un tableau… non pas, s’il vous plaît, il y faudra encore bien d’autres choses. […] Il y a de la chair, des passages de tons à cet enfant, il est très-joliment peint ; mais, Monsieur Le Prince, puisque vous en savez jusque-là, pourquoi ne pas le montrer plus souvent ? […] L’art de lever un pan du voile et de montrer aux hommes un coin ignoré ou plutôt oublié du monde qu’ils habitent.

1112. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 35, de la mécanique de la poësie qui ne regarde les mots que comme de simples sons. Avantages des poetes qui ont composé en latin sur ceux qui composent en françois » pp. 296-339

Ce que je pourrois avoir à dire de nouveau sur la mécanique des vers françois se trouvera dans le paralelle que je vais faire de la langue latine avec la nôtre, pour montrer l’avantage que les poetes latins ont eu sur les poetes françois en cette partie de l’art poetique. […] Ainsi, après avoir fait voir que le latin est plus propre à faire des images que le françois, à cause de sa brieveté et de l’inversion, je montrerai encore par plusieurs raisons que celui qui compose des vers en langue latine a des facilitez pour faire des vers nombreux et harmonieux, que n’a point celui qui compose des vers en langue françoise. […] Je vais montrer que l’observation des regles de la poësie françoise ne produit ni l’un ni l’autre effet.

1113. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « X. M. Nettement » pp. 239-265

dire pourquoi il en fut ainsi de la Restauration, montrer les causes de la fragilité de tout ce qu’elle pensa, voulut et entreprit, et par le mot de Restauration, qu’on nous comprenne bien ! […] Nous n’en citerons qu’un exemple, mais il suffira pour montrer comment M.  […] Elle avait seulement à montrer dans quelle inspiration ces jugements prenaient leur source, ce qu’ils prouvaient de force intellectuelle ou de conséquence d’opinion, et ce que valait enfin toute cette monnaie de jugements qui n’appartiennent pas plus à M. 

1114. (1923) Les dates et les œuvres. Symbolisme et poésie scientifique

D’autres, pour d’autres raisons, se montrèrent de même avis. […] Et l’on conclut : « Après cela, peut-être est-ce montrer de la naïveté que de vous prendre au sérieux. […] Sarcey de nous avoir donné cette occasion de montrer ce que l’on doit penser des éminents critiques. […] Jamais s’exhorta-t-on à montrer davantage, avec l’insouci parfait savoir où, comment, et quelles trouver ! […] Désormais, qui ne sait pas naturellement évoquer ou suggérer au lieu de dire et montrer, n’est pas un poète.

1115. (1880) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Première série pp. 1-336

L’italien date du jour où, dans les rues de Ravenne, tout un peuple montra du doigt celui qui revenait de l’enfer. […] Il n’importait ici que de montrer, dans les vastes eaux de l’épopée, le courant gaulois qui se mêle au courant germanique. […] Cette fois, les États montrèrent moins de générosité qu’ils n’avaient fait à Pézenas et à Montpellier. […] Il a très bien vu que d’autres causes avaient préparé la décadence, il l’a dit, et il l’a montré. […] Les qualités dont nous sommes le plus fiers et les défauts dont nous nous montrons le plus orgueilleux, c’est d’héritage que nous les tenons.

1116. (1882) Autour de la table (nouv. éd.) pp. 1-376

… Personne n’a voulu se montrer. […] Or, montrez-moi celle de votre poète ? […] Montrez-nous votre lettre ! […] S’il crée l’intéressante figure de Marguerite, il se gardera pourtant de nous la montrer sous une forme trop angélique. […] Il écrivit et montra à son père une tragédie qui fut soumise au jugement de M. 

1117. (1891) Enquête sur l’évolution littéraire

— comme disait la grand’mère de Mme Séverine, — un homme bien fait de sa personne ne saurait-il pas montrer du talent ? […] — Je vous montrerai nos maisons qui baignent dans le canal, nos architectures du moyen-âge. […] La Beauté étant la forme de Dieu, il appert que la chercher induit à chercher Dieu, que la montrer c’est le montrer. […] Il a montré au Théâtre-Libre, avec un bonheur qui n’a pas été égalé, du dramatique suggestif : La mort du duc d’Enghien. […] Je connais, à un kilomètre d’ici, là sur la gauche, un endroit extraordinaire que je voudrais vous montrer.

1118. (1859) Moralistes des seizième et dix-septième siècles

Que de fois nous suspectons la sincérité de ceux qui en montrent plus que nous ! […] Mais ici, comme ailleurs et peut-être plus qu’ailleurs, il s’est tout simplement montré homme sensible et non pas philosophe. […] Et l’on ne monte à Dieu que par l’amour ; et l’on n’aime le Dieu vivant et saint qu’autant qu’on le connaît, et nous ne le connaissons qu’autant qu’il nous a été montré, et lui seul peut se montrer à nous. […] Vous me montrez, il est vrai, des gens qui repoussent la louange ; montrez-moi des gens qui l’évitent. […] Vous me montrerez tant que vous voudrez des actes de reconnaissance ; je ne me contente pas de cela : je remonte au principe.

1119. (1903) Légendes du Moyen Âge pp. -291

Nous y avons déjeuné en compagnie de rouliers et de muletiers basques, d’un beau type vigoureux et svelte, qui se sont montrés d’une politesse accomplie envers les étrangers. […] Ces grandes affaires, où Giovanni montra mieux encore son omniscience, sont les affaires de Bologne. […] Morpurgo d’après un manuscrit, et qui nous montrent la même locution familière qu’emploie Philippe de Novare. […] La traduction de Garcin de Tassy porte « quelques » ; mais la suite, aussi bien que la comparaison des autres versions, montrent qu’il faut « trois ». […] Cette addition inepte est visiblement postiche et contribue à montrer combien la version arménienne est altérée.

1120. (1908) Promenades philosophiques. Deuxième série

Les premiers temps de l’âge du bronze se sont également montrés fort avares d’objets artistiques. […] L’instinct analysé montrerait presque toujours au moins des traces d’intelligence. […] N’a-t-on pas voulu aussi montrer la folie de Mahomet ? […] Il faut lui plaire, et pour cela montrer beaucoup de docilité, beaucoup de patience. […] Des observations nouvelles ont montré que, s’il se produit parfois, il n’est pas général.

1121. (1898) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Deuxième série

Il hasardera même de montrer une opinion, ne fût-ce que pour l’abandonner ensuite à propos. […] Nicole montré la faiblesse et l’inconséquence de l’homme, et personne ne fut jamais plus inconséquent. […] Cela ramène l’attention vers les efforts ou les inquiétudes du même genre qui se sont montrés il y a quatre-vingts ans sous diverses formes. […] L’être abaissé travaille pour expier, s’il est bon ; il travaille pour montrer sa force et s’en targuer en face de Dieu, s’il est orgueilleux et mauvais. […] Mieux que Ballanche, Quinet a montré, par exemple, le caractère foncièrement égalitaire, malgré-tout, et comme malgré elle, de l’Église chrétienne.

1122. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XX » pp. 84-86

de l’élément même qui la fit la première fois, du cœur et du sang de l’homme, des libres mouvements de l’âme qui ont remué ces pierres, et sous ces masses où l’autorité pèse impérieusement sur nous, je montrai quelque chose de plus ancien, de plus vivant, qui nia l’autorité même, je veux dire la liberté… » J'ai suivi la même marche, porté la même préoccupation des causes morales, du libre génie humain dans la littérature, dans le droit, dans toutes les formes de l’activité.

1123. (1874) Premiers lundis. Tome II « De l’expédition d’Afrique en 1830. Par M. E. d’Ault-Dumesnil, ex-officier d’ordonnance de M. de Bourmont. »

Nous eussions désiré peut-être que l’auteur s’y montrât parfois moins sobre de détails personnels et des particularités épisodiques dont sa mémoire abonde, et que ceux qui l’ont entendu trouvent avec un charme infini dans sa conversation ; mais son but dans ce récit a été plus grave, plus circonscrit aux points essentiels et aux questions qui peuvent concerner l’histoire.

1124. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — F — Faramond, Maurice de (1862-1923) »

Lo poète nous les montra dans leurs occupations quotidiennes, dans leurs ordinaires joies, dans leurs naturelles douleurs.

1125. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Guérin, Maurice de (1810-1839) »

Ses lettres confidentielles, intimes et sublimes révélations à son ami le plus cher, montrent une résignation portée jusqu’à l’indifférence, en tout ce qui touche à la gloire éphémère des lettres… C’était une de ces âmes froissées par la réalité commune, tendrement éprises du beau et du vrai, douloureusement indignées contre leur propre insuffisance à le découvrir, vouées, en un mot, à ces mystérieuses souffrances dont René, Oberman et Werther offrent, sous des faces différentes, le résumé poétique.

1126. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Meurice, Paul (1818-1905) »

Fondateur de l’Événement de 1848, il a payé de neuf mois de prison cette audace, et pendant toute la durée du second Empire il s’est montré au premier rang parmi les inflexibles défenseurs du droit violé.

1127. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre premier. La question de fait et la question de goût » pp. 30-31

Mais avant tout il doit s’occuper de la première ; et, s’il ne peut éviter la seconde, nous tâcherons de montrer commentai doit, en y touchant, réduire autant qu’il est possible la part de ses préférences personnelles.

1128. (1913) Le bovarysme « Quatrième partie : Le Réel — I »

On va montrer au cours de cette dernière partie qu’elle est, avec l’ensemble de ces conceptions, le procédé d’invention du réel.

1129. (1824) Préface d’Adolphe

Il est vrai qu’à travers les regrets qu’ils montraient de toutes les douleurs qu’ils avaient causées, perçait je ne sais quelle satisfaction de fatuité ; ils aimaient à se peindre comme ayant, de même qu’Adolphe, été poursuivis par les opiniâtres affections qu’ils avaient inspirées, et victimes de l’amour immense qu’on avait conçu pour eux.

1130. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Réponse à une lettre de M. Grimm » pp. 205-206

Malgré ces observations qui peuvent être très justes, je persiste à croire que les tableaux que ce peintre nous a montrés cette année sont d’une grande beauté et méritent mon éloge.

1131. (1767) Salon de 1767 « Sculpture — Vassé » pp. 323-324

C’est la contrainte qu’on te fait souffrir, pour te montrer comme tu n’es pas, qui gâte tout.

1132. (1898) Ceux qu’on lit : 1896 pp. 3-361

Blessé au fond du cœur, il reprend le chemin de la Cour, décidé à montrer qu’il est prince et homme. […] Quand on a déclaré que le bouquet est exquis de nuance et de parfum, on n’a renseigné personne ; le mieux est de le montrer si on le peut, d’en détacher au moins une fleur. […] « Cette nuit-là, l’égoïsme de Marcelin Marbot se montra à nu et m’inspira, à son égard, un sentiment qui ne s’est jamais effacé. […] Ceux-ci se montraient peu disposés à perdre la moindre part de ces rayons vivifiants, et les nouveaux venus restaient debout derrière les autres. […] Alors les hommes ne sortent que la nuit ; s’ils s’avisaient de se montrer pendant le jour, des balles, parties des âzoua voisines de la leur, les arrêteraient promptement dans leur course.

1133. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXIXe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 129-192

En m’écoutant, le vieux docteur en jurisprudence fronçait le sourcil et se pinçait les lèvres avec un sourire d’incrédulité et de mépris qui montrait assez ce qui se passait dans son âme. […] CCXXIII Alors je lui montrai la lime de la sposa du galérien cachée entre ma veste et ma chemise ; je lui indiquai du doigt la petite porte basse encore fermée, qui menait du fond de son cachot dans le couloir de la chapelle. […] J’avais eu soin de ne pas me montrer, de peur qu’une exclamation du bon frère quêteur ne révélât involontairement ma ruse et ma personne au bargello. […] Alors je lui ai tout dit, juste comme tu m’avais dit toi-même, et je me suis montré incapable de pardonner jamais dans le fond du cœur, ni dans ce monde, ni dans l’autre, à ceux qui m’avaient séparé de toi et toi de moi, à moins d’avoir la certitude en mourant que tu ne serais jamais à un autre sur la terre et que je serais éternellement ton fiancé dans le paradis.

1134. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIIe entretien. Madame de Staël »

Chacun, en s’approchant de madame Necker, disait un mot à sa fille, lui faisait un compliment ou une plaisanterie… Elle répondait à tout avec aisance et avec grâce ; on se plaisait à l’attaquer, à l’embarrasser, à exciter cette petite imagination qui se montrait déjà si brillante. […] Son orgueil ne souffrit pas moins que sa prévoyance maternelle : elle fut la première éclipsée par le chef-d’œuvre qu’elle avait voulu montrer aux mères. […] Tout porte à croire néanmoins que, s’il eût fallu devenir le Malesherbes des femmes et offrir sa tête aux juges pour sauver celle de la reine, madame de Staël n’aurait pas hésité à se nommer et à se montrer. […] XXVII Il est curieux d’étudier, dans les confidences intimes de madame de Staël à cette époque, l’étonnement et l’irritation dont elle fut saisie en s’apercevant de l’éloignement que le premier consul montrait en toute occasion pour elle.

1135. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « De l’influence récente des littératures du nord »

Ai-je besoin de faire remarquer que Victor Hugo et les romantiques n’avaient point attendu Dostoïewsky ni Tolstoï pour nous montrer des prostituées qui sont des saintes, ou des mendiants et des misérables qui possèdent le secret de la sagesse et de la charité parfaite ? […] Enfin, il y a, dans les romans de Tolstoï, les commencements et les approches d’une sorte de mysticisme dont ses derniers ouvrages nous ont montré l’achèvement, dont nous n’avons peut-être pas chez nous l’équivalent exact, et qu’on pourrait appeler le nihilisme évangélique. […] Ils peuvent bien nous montrer le monde infiniment triste et pitoyable : ils hésitent à le montrer simplement dégoûtant, ce qu’il est pourtant aussi, ne le pensez-vous pas ?

1136. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XVII, l’Orestie. — les Euménides. »

Les potiers lui doivent le tour qui façonne la forme des vases : quelques monnaies athéniennes montrent son hibou familier perché sur une amphore renversée. […] Eschyle intervint par cette noble scène où il montrait l’Aréopage fondé par Pallas, comme la pierre angulaire de sa ville sainte. […] C’est ainsi que les vases et les bas-reliefs nous les montrent ; sveltes sans maigreur, l’œil pensif et l’allure agile, sérieuses encore, mais non plus farouches, pareilles à des chasseresses au repos. […] La cité les conservait précieusement dans les arcanes de ses sanctuaires, un prêtre était attaché à leur garde ; mais on ne les montrait plus qu’aux grands jours.

1137. (1772) Éloge de Racine pp. -

Il puisa dans son génie les beautés tragiques des Horaces , les détails imposans de Pompée et de Sertorius , le cinquième acte de Rodogune , l’un des plus grands tableaux qu’on ait jamais montrés sur la scène. […] Les moeurs, nouvelles pour nous, d’une nation avec qui nous avions eu long-temps aussi peu de commerce que si la nature l’eût placée à l’extrémité du globe ; la politique sanglante du sérail, la servile existence d’un peuple innombrable enfermé dans cette prison du despotisme ; les passions des sultanes qui s’expliquent le poignard à la main, et qui sont toujours près du crime et du meurtre, parce qu’elles sont toujours près du danger ; le caractère et les intérêts des visirs qui se hâtent d’être les instrumens d’une révolution, de peur d’en être les victimes ; l’inconstance ordinaire des orientaux, et cette servitude menaçante qui rampe aux pieds d’un despote, et s’élève tout à coup des marches du trône pour le frapper et le renverser : voilà le tableau absolument neuf qui s’offrait au pinceau de Racine, à ce même pinceau qui avait si supérieurement crayonné la cour de Néron ; qui dans Monime et dans Iphigénie traça depuis avec tant de vérité la modestie, la retenue, le respect filial que l’éducation inspirait aux filles grecques ; qui dans Athalie nous montra les effets de la théocratie sur ce peuple fanatique, toujours conduit par des prodiges, ou égaré par des superstitions. […] C’est là qu’à l’exemple de Sophocle qui se montra dans les choeurs l’égal de Pindare, Racine passe avec tant de facilité et de bonheur à un genre de composition qui dans notre langue surtout est infiniment éloigné du style de la scène ; c’est dans les choeurs d’ Athalie , ainsi que dans ceux d’ Esther , qu’il donne à notre idiome poétique plus de pompe, d’harmonie, d’onction, de douceur et de variété qu’il n’en eut jamais, et que, fait pour être en tout un modèle, il nous laisse les monumens les plus beaux de la vraie poésie lyrique. […] On l’accuse de faiblesse, pour s’être montré sensible aux critiques injustes et au mécontentement de son maître.

1138. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Agrippa d’Aubigné. — II. (Fin.) » pp. 330-342

Un jour d’Aubigné brûla ces papiers de peur d’être jamais tenté d’en faire usage, surtout à l’égard de L’Hôpital qui avait depuis désavoué le parti : « J’ai brûlé ces pièces, disait-il, de peur qu’elle ne me brûlassent. » Mais il les avait montrées auparavant à plusieurs personnes de marque. […] Sa passion ne l’empêche pas de rendre justice aux ennemis et adversaires quand ils tombent ; et celui qui s’est montré pamphlétaire envenimé dans la Confession de Sancy, implacable insulteur dans Les Tragiques, parle de Charles IX et de Henri III dans son Histoire en des termes qui ne sont que modérés : Voilà la fin de Henri troisième, dit-il après l’assassinat de Saint-Cloud, prince d’agréable conversation avec les siens, amateur des lettres, libéral par-delà tous les rois, courageux en jeunesse, et lors désiré de tous ; en vieillesse, aimé de peu ; qui avait de grandes parties de roi, souhaité pour l’être avant qu’il le fût, et digne du royaume s’il n’eût point régné : c’est ce qu’en peut dire un bon Français.

1139. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Poésies complètes de Théodore de Banville » pp. 69-85

Et comment oublier, à ce propos, celui qui, dans le groupe dont il s’agit, s’est détaché à son tour en maître et qui est aujourd’hui ce que j’appelle un chef de branche, Théophile Gautier, arrivé à la perfection de son faire, excellant à montrer tout ce dont il parle, tant sa plume est fidèle et ressemble à un pinceau ? […] Rendre à la poésie française de la vérité, du naturel, de la familiarité même, et en même temps lui redonner de la consistance de style et de l’éclat ; lui rapprendre à dire bien des choses qu’elle avait oubliées depuis plus d’un siècle, lui en apprendre d’autres qu’on ne lui avait pas dites encore ; lui faire exprimer les troubles de l’âme et les nuances des moindres pensées ; lui faire réfléchir la nature extérieure non seulement par des couleurs et des images, mais quelquefois par un simple et heureux concours de syllabes ; la montrer, dans les fantaisies légères, découpée à plaisir et revêtue des plus sveltes délicatesses ; lui imprimer, dans les vastes sujets, le mouvement et la marche des groupes et des ensembles, faire voguer des trains et des appareils de strophes comme des flottes, ou les enlever dans l’espace comme si elles avaient des ailes ; faire songer dans une ode, et sans trop de désavantage, à la grande musique contemporaine ou à la gothique architecture, — n’était-ce rien ?

1140. (1874) Premiers lundis. Tome II « Mémoires de Casanova de Seingalt. Écrits par lui-même. »

Le grand a Frédéric l’a conservé jusqu’à sa mort. » Nous avons voulu citer la peinture de cet iris, pour montrer avec quelle facilité lumineuse écrit notre Vénitien, et comme je ne sais quelle grâce des Sévigné, des Choisy et des Bussy a passé par là et voltige sous cette plume d’au-delà des monts. […] C’est certainement ton génie et le mien. » Et elle lui montrait un petit serpent qui passait à côté sur le gazon.

1141. (1874) Premiers lundis. Tome II « Hippolyte Fortoul. Grandeur de la vie privée. »

A défaut du cadre en lui-même, on peut du moins en montrer les impressions dans l’âme des amants et y suivre, par le sentiment ému, les belles ombres plus flottantes. […] La compagnie, devant laquelle il a lu son premier roman, lui reproche d’avoir fait l’apothéose de l’égoïsme, et il tient à montrer, par un nouvel exemple, que le foyer domestique n’a pas moins son inspiration, sa flamme active, que son renoncement et son sacrifice.

1142. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre III. L’écrivain »

Sa gaieté et sa galanterie percent à travers le masque antique, mais timidement, sans oser se montrer, avec toutes sortes d’incertitudes et de disparates. […] De temps en temps, surtout dans les épîtres, dans les élégies, deux ou trois vers naturels se détachent ; c’est un geste vrai qui s’est montré en dépit des broderies roides et des longues manches.

1143. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre IV. Le théâtre des Gelosi » pp. 59-79

Cinthio, entrant dans les vues de son ami, parla du capitaine à sa sœur qui montra des sentiments favorables. […] Ces exemples, non choisis parmi les pires, suffisent à montrer qu’une grande licence régnait sur le théâtre des Gelosi, et pourtant il est certain que cette troupe était en progrès sensible sous ce rapport et qu’elle frappait, au contraire, les contemporains par une décence inaccoutumée.

1144. (1890) L’avenir de la science « Préface »

Si des critiques soutiennent un jour que la Revue des Deux Mondes et Le journal des Débats me gâtèrent en m’apprenant à écrire, c’est-à-dire à me borner, à émousser sans cesse ma pensée, à surveiller mes défauts, ils aimeront peut-être ces pages, pour lesquelles on ne réclame qu’un mérite, celui de montrer, dans son naturel, atteint d’une forte encéphalite, un jeune homme vivant uniquement dans sa tête et croyant frénétiquement à la vérité. […] Mais des signes évidents de la fatigue causée par les charges nationales se montrent à l’horizon.

1145. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre IV. La littérature et le milieu psycho-physiologique » pp. 126-137

Il est convenu en notre siècle que le peuple de France est mutin, remuant, indocile, incapable du calme et de la sagesse pratique que montrent ses voisins d’outre-Manche. […] Mirabeau, « Monsieur de l’Ouragan », comme on l’appelait dans sa famille, nous montrerait la passion fougueuse, effrénée, indomptable, arrivant enfin à l’action, qui en est l’aboutissant et l’assouvissement naturel.

1146. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Cours de littérature dramatique, par M. Saint-Marc Girardin. (2 vol.) Essais de littérature et de morale, par le même. (2 vol.) » pp. 7-19

S’il en montrait moins, il me laisserait respirer et me ferait plus de plaisir : il me tient trop tendu ; la lecture de ses vers me devient une étude. […] Il fait dans son sujet des coupes heureuses ; il l’entame par des biais hardis et neufs, qui en montrent les veines prolongées.

1147. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Police générale d’une Université et police, particulière d’un collège. » pp. 521-532

Au lieu d’affecter une supériorité de savoir, il vaudrait mieux avoir l’air d’étudier et, de travailler avec eux ; c’est ainsi qu’en apprenant on les familiariserait avec l’art de montrer. […] On propose tant, à celui qui se rendra à Moscou ou à Pétersbourg avec une connaissance suffisante de la langue russe pour montrer la géométrie ; tant, à celui qui, pourvu de la même langue, sera en état de professer ou la médecine, ou la jurisprudence, ou les beaux-arts ; et tenez pour certain que si ces invitations sont constamment réitérées et ces promesses fidèlement tenues, elles produiront leur effet.

1148. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Beaufort » pp. 308-316

Il ne s’agit pas dans ces morceaux de montrer au peuple comment Persée vainquit le dragon et lui ravit Andromède, mais de fixer ce point de religion dans sa mémoire. […] Je ne puis permettre la métamorphose d’Apollon en st Jean, sans permettre de montrer la vierge avec des lèvres rebordées, des yeux languissants de luxure, une gorge charmante, le cou, les bras, les pieds, les mains, les épaules et les cuisses de Vénus ; la vierge Marie Vénus aux belles fesses, cela ne me convient pas.

1149. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 12, des masques des comédiens de l’antiquité » pp. 185-210

Si le pere des interêts duquel il s’agit principalement dans la comédie, doit être quelquefois content et quelquefois fâché, il a un des sourcils de son masque froncé, et l’autre rabatu, et il a une grande attention à montrer aux spectateurs celui des côtez de son masque lequel convient à sa situation presente. C’est ainsi que Monsieur Boindin explique les dernieres lignes du passage de Quintilien, en supposant que le comedien qui portoit ce masque, se tournoit tantôt d’un côté, tantôt d’un autre, pour montrer toujours le côté du visage qui convenoit à sa situation actuelle, quand on joüoit les scénes où il devoit changer d’affection sans qu’il pût aller changer de masque derriere le théatre.

1150. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre I : Qu’est-ce qu’un fait social ? »

Il est quelque chose de tout autre, comme nous l’avons montré. […] Sans doute, tout fait social est imité, il a, comme nous venons de le montrer, une tendance à se généraliser, mais c’est parce qu’il est social, c’est-à-dire obligatoire.

1151. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre IV : Règles relatives à la constitution des types sociaux »

Il est vrai qu’il n’existe peut-être pas de société historique qui réponde exactement à ce signalement ; mais, ainsi que nous l’avons montré dans le livre déjà cité, nous en connaissons une multitude qui sont formées, immédiatement et sans autre intermédiaire, par une répétition de hordes. […] Nous avons seulement voulu, par quelques exemples, préciser les idées et montrer comment doit être appliqué le principe de la méthode.

1152. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre IV. Des changements survenus dans notre manière d’apprécier et de juger notre littérature nationale » pp. 86-105

Qui ne sait tout ce que Voltaire montra de mauvaise humeur contre le projet d’une traduction complète de Shakespeare ? […] Cette économie des desseins de la Providence, dévoilée avec la prévision d’un prophète ; cette pensée divine gouvernant les hommes depuis le commencement jusqu’à la fin ; toutes les annales des peuples, renfermées dans le cadre magnifique d’une imposante unité ; ces royaumes de la terre, qui relèvent de Dieu ; ces trônes des rois, qui ne sont que de la poussière ; et ensuite ces grandes vicissitudes dans les rangs les plus élevés de la société ; ces leçons terribles données aux nations, et aux chefs des nations ; ces royales douleurs ; ces gémissements dans les palais des maîtres du monde ; ces derniers soupirs de héros, plus grands sur le lit de mort du chrétien, qu’au milieu des triomphes du champ de bataille ; enfin l’illustre orateur, interprète de tant d’éclatantes misères, osant parler de ses propres amertumes, osant montrer ses cheveux blancs, signe vénérable d’une longue carrière honorée par de si nobles travaux, et laissant tomber du haut de la chaire de vérité des larmes plus éloquentes encore que ses discours : tel est le Bossuet de nos habitudes classiques, de notre admiration traditionnelle.

1153. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Le capitaine d’Arpentigny »

… Mais, s’il perd encore la partie, il faut au moins que la Critique, qui aime le talent partout où il est et qui doit le montrer aux autres, sous peine de n’être qu’une grande sotte à vue basse, il faut que la Critique dise bien haut que la carte était belle et qu’il n’y avait ni obstination, ni infatuation, ni même présomption à la jouer. […] « L’incontinence des grands — nous dit-il quelque part — est l’engrais où se développe le germe de la liberté des petits » ; et il a beaucoup de ces pensées, qui montrent un regard résolu, une intuition claire de la vérité, mais de la vérité fragmentée, et que l’on pourrait opposer à sa philosophie générale.

1154. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Sainte Térèse » pp. 53-71

et qui va nous montrer, dans la sainte Térèse entrevue, une autre sainte Térèse inconnue : c’est le livre des Fondations. […] La traduction de sainte Térèse pourra leur montrer, en attendant que l’abbé Bouix leur traduise aussi le docteur Séraphique (saint Bonaventure), où elle était, cette psychologie toute vivante, avant qu’on la vît morte et disséquée dans leurs écrits, comme sur des marbres d’amphithéâtre.

1155. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Goethe »

Ensuite, elles sont l’autobiographie d’un grand esprit peu enclin — toute sa vie en fait foi — à montrer le fond d’une âme qu’il a toujours beaucoup drapée, comme les femmes couvrent les épaules qu’elles n’ont pas. […] Goethe, qui a joui d’un bonheur sans égal durant sa vie, ce Polycrate moderne qui aurait pu jeter toutes ses bagues — sans crainte de les perdre — aux carpes du Rhin ; Goethe, qui n’était pas né sur le trône et qui a montré pour la première fois au monde ébahi la poésie aux affaires, qui a été tout ensemble Richelieu et Corneille ; son Excellence M. de Goethe, qui avait été un beau jeune homme, puis un beau vieillard ; qui fut aimé d’amour dans sa vieillesse comme Ninon de l’Enclos dans la sienne ; qui mourut tard, en pleine gloire, en pleine puissance, que dis-je ?

1156. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « L’Abbé Prévost et Alexandre Dumas fils » pp. 287-303

Quant au poète, c’est-à-dire au romancier, il est temps de montrer, par-dessus la tête de Dumas qui l’admire, ce qu’il est, dans Manon Lescaut. […] » Mais montrez-le donc, cet air-là !

1157. (1895) Impressions de théâtre. Huitième série

Il lui arrive de nous montrer des choses abominables sans nul étonnement et, par conséquent, sans insistance. […] Guérin nous a montré manque un peu de relief et d’accent ; mais passons. […] Il entendait montrer que nous ne pouvons rien, dans l’ordre du salut, sans la grâce de Dieu. […] Pendant longtemps encore, à vrai dire, les théâtres ne montrèrent que les « gonzesses » pour gens riches. […] L’événement a montré qu’elle ne pouvait rien faire de plus spirituel.

1158. (1922) Nouvelles pages de critique et de doctrine. Tome I

Comment, resserrée dans ses dimensions étroites, en montrerait-elle la genèse ? […] Relisez le début de Carmen et voyez comme il s’applique à vous montrer José Navarro par des gestes. […] Il montrait un magnifique cœur de soldat, palpitant jusqu’à l’agonie devant l’imminence du danger français. […] Il a montré dans sa vigoureuse étude du Correspondant, sur Taine et M.  […] Ne montrer d’une bataille que des accidents isolés, pour ce motif que les combattants n’en voient pas d’autres, ce n’est pas la montrer vraiment.

1159. (1881) Études sur la littérature française moderne et contemporaine

Je montrerai par quelles industries il fit fortune. […] Le roi ne montra aucun désir de connaître le pamphlet ; Sartines n’avait aucune envie de reparler de cette affaire ; il ne fut plus question d’Angelucci. […] Lui montra l’assistance et lui dit : « Fais la quête !  […] Montrés par un guide si sûr, les poétiques tableaux de l’histoire doublent de charme et de prix. […] On a montré qu’il valait mieux que ses Maximes, et qu’en lui le cœur donnait à l’esprit un démenti.

1160. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXIII » pp. 244-246

Ce n’était pas la peine de se montrer si sévère tout à côté contre Anacréon et contre Horace, ainsi que le poëte n’a pas craint de le faire.

1161. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — K — Klingsor, Tristan (1874-1966) »

Dors, mignon chat blanc, dors ; Reste à ronronner, reste couché Et ferme un peu tes yeux semés d’or ; Les souris montrent leur nez aux trous du plancher.

1162. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Lebrun, Pierre (1785-1873) »

Lebrun, en publiant en 1858 une édition complète de ses œuvres, nous a montré, par quelques pièces de vers charmantes, que, dès l’époque du premier Empire, il y avait bien des élans et des essors vers ces heureuses oasis de poésie qu’on a découvertes depuis et qu’il a été des premiers à pressentir, comme les navigateurs devinent les terres prochaines au souffle odorant des brises..

1163. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Villeroy, Auguste »

Le défaut d’une œuvre dramatique ainsi conçue peut-être de manquer de mouvement : quand, dans un drame, on néglige le mouvement extérieur, il faut, nous semble-t-il, montrer, presque à chaque réplique, que croissent ou diminuent les passions des personnages ; ainsi le drame reste vivant, d’un mouvement passionnel.

1164. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 311-314

Des feux de mon bûcher, j’irai jusqu’en l’abîme Allumer dans ton cœur les remords de ton crime ; Et mon ombre par-tout te suivant pas à pas, Te montrera par-tout ton crime & ton trépas ; Et jusque dans l’Enfer faisant vivre ma haine, Mon ame, chez les Morts, jouira de ta peine, Ceux qui connoissent les vers Latins, verront qu’il seroit difficile de les rendre plus fidélement.

1165. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 451-455

Sans aucune apparence de prétention, le Poëte sait plaire, & ses leçons n’ont rien de cette philosophie fade & baroque qui ose se montrer dans les Opéra comiques, & finira par en dégoûter.

1166. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 10, objection tirée des tableaux pour montrer que l’art de l’imitation interesse plus que le sujet même de l’imitation » pp. 67-70

Section 10, objection tirée des tableaux pour montrer que l’art de l’imitation interesse plus que le sujet même de l’imitation On pourroit objecter que des tableaux où nous ne voïons que l’imitation de differens objets qui ne nous auroient point attachez, si nous les avions vûs dans la nature, ne laissent pas de se faire regarder long-tems.

1167. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 23, quelques remarques sur le poëme épique, observation touchant le lieu et le tems où il faut prendre l’action » pp. 179-182

Il est vrai que les raisons que nous avons alleguées pour montrer qu’on ne devoit point prendre une action trop recente pour le sujet d’une tragedie, prouvent aussi qu’une action trop recente ne doit pas être le sujet d’un poëme épique.

1168. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Avant-propos » pp. 1-5

Je montrerai en troisiéme lieu, que les anciens avoient si-bien réduit l’art du geste ou la saltation, qui étoit un des arts subordonnez à la science de la musique, en methode reglée, que dans l’execution de plusieurs scenes ils pouvoient partager et qu’ils partageoient en effet la déclamation théatrale entre deux acteurs, dont le premier recitoit tandis que le second faisoit les gestes convenables au sens des vers récitez, et que même il se forma des troupes de pantomimes ou de comédiens muets qui jouoient sans parler des pieces suivies.

1169. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (3e partie) » pp. 193-271

D’ailleurs, Platon ne s’en tient pas à cette indication générale ; et, après avoir montré d’où vient le mouvement, il veut expliquer aussi avec plus de détails les apparences diverses qu’il nous offre. […] Que si l’on s’étonnait qu’il ne l’ait point achevée et faite tout entière à lui seul, je rappellerais l’aveu modeste et fier par lequel il termine sa Logique : « Si, après avoir examiné nos travaux, dit le philosophe, il vous paraît que cette science, dénuée avant nous de tous antécédents, n’est pas trop inférieure aux autres sciences qu’ont accrues les labeurs de générations successives, il ne vous restera plus, à vous tous qui avez suivi ces leçons, qu’à montrer de l’indulgence pour les lacunes de cet ouvrage, et de la reconnaissance pour toutes les découvertes qui y ont été faites. » Histoire des animaux par Aristote VII M.  […] Il ne lui reste plus qu’à montrer comment l’homme, soumis à une loi si sainte et si douce, la viole cependant, et à expliquer d’où vient en lui cette lutte, où il est si souvent vaincu, et cette révolte qui le perd. […] Mais éclairer l’humanité sur les caractères de la vertu, lui montrer avec pleine lumière la fin obligatoire de toutes les actions humaines, et lui indiquer les voies qui mènent à cette fin, c’est un immense service ; et l’on n’a point à s’étonner de l’estime et de la gloire qui le récompensent. […] Je crois donc qu’à cette mesure on peut juger équitablement les divers systèmes qui se montrent à nous dans l’histoire de la philosophie, et qu’en les comparant à cet idéal de la science, tout incomplet qu’il est, on peut voir avec assez d’exactitude et de justice ce qu’ils valent.

1170. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre sixième »

Le public était venu voir un méchant ; on lui montrait un brouillon, à peine un peu plus méchant qu’un médisant, et beaucoup meilleur qu’un méchant : il était désappointé, et il le disait. […] La beauté du théâtre, c’est de montrer comment le bonheur ou le malheur des hommes sort invinciblement de ce fond, et comment, dans les épreuves de la vie, la personne dont chaque homme a le plus à se plaindre, c’est lui-même. […] Il veut bien en trouver des exemples dans Molière, chose louable, au moment où il entreprend de réformer sa tradition ; mais ces exemples montrent tout le contraire de ce qu’il y voit. […] Or, c’est en cela que consiste proprement le caractère ; la condition n’est qu’une occasion pour le caractère de se montrer tel qu’il était avant et tel qu’il doit rester après. […] C’est en effet continuer Molière que nous montrer Philinte, si sec pour autrui, si tendre quand on le touche, qui s’écrie à la nouvelle d’un acte d’improbité dont il est victime : Je me perds, je m’égare.

1171. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre onzième »

Quand Balzac se plaint des monceaux de lettres entassées sur sa table, qui demandent des réponses, et des réponses à montrer, il perce du contentement jusque dans son chagrin ; car ce qu’on lui demande, c’est de quoi parler de lui. […] Je meurs dans ses bras. » Dans une scène, on le voyait rentrant de la promenade, des plantes dans une main, et, dans l’autre, un nid de fauvettes, « qu’il confiait aux soins de sa femme, pour les rendre à la liberté sitôt qu’elles auraient des ailes. » Une autre scène le montrait causant avec le menuisier du village de quelques réparations à faire « dans sa modeste demeure. » Dans une troisième, un créancier auquel il devait cent écus le menaçait de saisir ses meubles ; le libraire Rey lui envoyait cent écus avec lesquels il payait le créancier. […] Je me sens une âme qui peut se montrer. » C’est, aux mots près, le début des Confessions. […] Je veux montrer à mes semblables un homme dans toute la vérité de la nature, et cet homme ce sera moi. […] Un vrai repentir lui eût appris à les voir avec tristesse et à n’en montrer aux autres que ce qui pouvait les édifier.

1172. (1890) L’avenir de la science « XV » pp. 296-320

Le progrès analytique de la pensée eût-il été scientifiquement reconnu si les langues ne nous eussent montré, comme dans un miroir, l’esprit humain marchant sans cesse de la synthèse ou de la complexité primitive à l’analyse et à la clarté ? […] Les faits qui suivirent l’établissement de l’islamisme, et qui sont si propres à montrer comment les religions se consolident, sont tous aussi du domaine de l’histoire. […] J’ai voulu montrer par quelques exemples à quels résultats philosophiques peuvent mener des sciences de pure érudition et combien est injuste le mépris que certains esprits, doués d’ailleurs du sens philosophique, déversent sur ces études. Que serait-ce si, abordant la philosophie de l’histoire, je montrais que cette science merveilleuse, qui sera un jour la science maîtresse, n’arrivera à se constituer d’une manière sérieuse et digne que par le secours de la plus scrupuleuse érudition, que jusque-là elle restera au point où en étaient les sciences physiques avant Bacon, errant d’hypothèse en hypothèse, sans marche arrêtée, ne sachant quelle forme donner à ses lois et ne dépassant jamais la sphère des créations artificielles et fantastiques ? Que serait-ce si je montrais que la critique littéraire, qui est notre domaine propre, et dont nous sommes à bon droit si fiers ne peut être sérieuse et profonde que par l’érudition ?

1173. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VII »

Ses récitatifs sont composés avec l’intention avérée de montrer ce dont la langue française est capable ; ils sont si puissants qu’ils ont convaincu même Rousseau. […] Ce sont des vers à deux, trois, quatre, cinq, six pieds… En voici quelques spécimens, pour montrer l’allure générale : Ma maison, c’est la loi de l’hospitalité, Pour la nuit te tienne abrité ; Mais demain, retiens la menace, Demain, sans merci ni grâce, De nos morts je veux venger le trépas. (33)44 Est-ce donc un crime si grand D’écouter la voix de son âme ? […] Ces exemples auront d’ailleurs suffi, je l’espère, à montrer ce que c’est que la Valkyrie de M.  […] Nous voulons qu’ils étudient les écrits de Wagner ; qu’ils apprennent à voir en lui plus qu’un simple musicien, un profond penseur ; qu’ils subissent ainsi l’influence de cet homme dont l’effort principal (quoique peu connu) a été de montrer que l’art est la chose la plus sainte, et le théâtre un lieu où peuvent vivre de la vie intense de l’art les plus profondes passions et les émotions les plus cachées, Y a-t-il au monde quoi que ce soit qui puisse influencer plus salutairement un artiste que le spectacle de cette vie virile tout entière vouée à un idéal, et de ce prodigieux effort vers la réalisation de cet idéal ? […] Ainsi que je l’ai montré pour certaines parties de la Goetterdaemmerung (Rev.

1174. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre deuxième. L’émotion, dans son rapport à l’appétit et au mouvement — Chapitre premier. Causes physiologiques et psychologiques du plaisir et de la douleur »

Nous exposerons ce qu’il y a de vrai et ce qu’il y a aussi d’incomplet dans les explications empruntées à la doctrine de la sélection naturelle : nous rechercherons la portée et les limites de ces explications ; puis nous montrerons les conséquences morales ou métaphysiques auxquelles aboutit l’étude des rapports du plaisir et de la douleur avec la vie. […] Ne serait-ce point précisément parce qu’ils expriment ce qu’il y a en nous de plus fondamental et de plus stable qu’ils montrent cette apparente mobilité ? […] Pourquoi le sentiment du sublime est-il, comme l’a montré Kant, un mélange de joie et de tristesse ? […] Nous venons de montrer qu’il existe des plaisirs directs, dus à un surplus d’activité sans douleur préalable, qui n’ont pas pour simple objet la préservation de l’organisme dans la lutte pour la vie. […] La jouissance « pure et véritable », qui n’est pas seulement un « remède à la douleur », apparaît ainsi comme l’activité débordante, qui se sent libre enfin des obstacles, supérieure à ce qui était strictement nécessaire pour la satisfaction du besoin ; elle n’est plus une simple balance, mais un profit et, comme nous croyons l’avoir montré, un surcroît.

1175. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre cinquième. Genèse et action des principes d’identité et de raison suffisante. — Origines de notre structure intellectuelle »

Goltz et Loeb ont montré que les chiens deviennent doux quand on leur enlève leur lobe occipital : de bons traitements et une bonne éducation peuvent avoir le même effet ; mais il serait absurde, dit V. […] Il faut donc montrer le rapport intime qui relie les croyances nécessaires, principalement les principes d’identité et de raison suffisante, aux lois biologiques des réactions motrices et aux lois psychologiques du désir ou du vouloir. […] Il n’en est pas moins vrai qu’à l’origine elles sont mentales, non mécaniques ; elles résultent, comme nous l’avons montré, de la nature même de la volonté consciente : la loi primordiale, la loi des lois, c’est la volonté de l’être et du bien-être, dont le mécanisme n’est que la conséquence extérieure. […] Dès lors, si les mêmes causes reparaissent avec cette seule différence de temps qui s’est montrée de fait indifférente, nous attendrons logiquement les mêmes effets, comme si le temps était indifférent. […] Quant à ajouter : — Ce que telle chose a fait une fois et ce que telle autre a souffert de son action arrivera encore de la même manière, selon une loi, — c’est là une idée très ultérieure, dont nous avons montré plus haut la genèse.

1176. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1864 » pp. 173-235

En passant dans la rue, elle a hélé une de ses amies, assise à une fenêtre du rez-de-chaussée, et lui a demandé une épingle, en disant, tout bas : « C’est gênant de montrer sa peau dans la rue !  […] Une gorgerette en batiste, sous laquelle passait le rosé de sa peau, resserrait encore le peu de chair vivante, montrée aux yeux. […] Puis, de temps en temps, elle avait de ces lents errements de main, qui, tour à tour, montraient et cachaient, sous le carmin du bout de ses doigts, le blanc mat de sa peau. […] de l’hercule de la baraque, où on la montrait ! […] Lefebvre… Cette sœur donnait de féroces détails sur l’ensevelissement à Paris, où se montrent tous les cynismes et toutes les avarices de la richesse, racontant qu’elle avait vu, de ses yeux, ensevelir un fils de grande famille, dans un vieux costume de pierrot.

1177. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1887 » pp. 165-228

Dimanche 6 février Daudet frappé de la dureté, du coupant, que Mounet apportait au rôle de Roumestan, et ne trouvant chez lui rien du mutable et de l’ondoyant, que Montaigne attribue à l’homme du Midi, et ne rencontrant quoi que ce soit de l’homme sensuel, flou, attendrissable, qu’il a montré dans son héros, copié, des pieds à la cervelle, sur le catholique du Midi, lors des dernières répétitions, jeta soudain à son acteur : « Mounet, est-ce que vous êtes calviniste ?  […] Et Carnajou passe si bien pour un menteur, qu’un vrai chirurgien qui fait quelque temps après des réapplications de chair, n’ose pas les ébruiter. » « Il arrive même que Després, un interne de Dupuytren, recolle un morceau de doigt à un individu, qui revient lui montrer son doigt, au bout de huit jours, et que Dupuytren, à qui on montre ce morceau recollé, l’arrache en disant : « Ça ne tient pas, ça !  […] Jamais ne s’est montré aussi bien, en un événement triste, l’affamement de publicité qu’a le Parisien du xixe  siècle. […] Lebiez, lui, au contraire, montra un courage extraordinaire. […] Tout en disant : « Quand on n’est plus jeune, il faut se faire des occupations qui vous tiennent compagnie », elle se lève d’un petit bureau, qui est comme une jardinière de glaïeuls naturels, en dedans desquels se pressent et se tassent des sébiles et des soucoupes, pleines de couleurs, pleines de pétales artificiels non encore colorés ; elle se lève pour me montrer un imperceptible « Jugement de Pâris » ; un pastel de la Lecouvreur, qui a bien certainement la touche des pastels de Coypel, et pourrait bien être l’original ou une répétition de la peinture à l’huile ; un collier de perles, aux perles usées, qui viendrait de la femme du duc de La Rochefoucauld, l’auteur des Maximes.

1178. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — III. Le Poëme épique, ou l’Épopée. » pp. 275-353

C’est là qu’il veut montrer que le culte qu’on leur rend n’est point un culte d’idolâtrie, mais un culte raisonné : à l’exception de quelques légers défauts qu’il reconnoît en eux, il les trouve divins en tout, & croit la nature épuisée en leur faveur. […] Les chefs de parti reconciliés, le feu de la querelle ne fut pas éteint : il resta caché pendant quelque temps, & enfin il se montra plus violent & plus à craindre que jamais, lorsque l’on vit La Mothe aux prises avec madame Dacier. […] On ne lui accordoit même d’être créateur en ce point, que pour montrer combien son imagination, livrée à elle-même, s’égaroit & devenoit bisarre. […] Mais on a montré que l’action de l’Énéide est complette. […] Ce chevalier, blanchi dans la carrière pour laquelle il combat, soutient qu’un roman n’est pas plus dangereux que le bal, la comédie, la promenade & les jeux d’exercice ; que la voie la plus courte & la plus sûre pour instruire la jeunesse & lui donner le goût des choses solides, c’est de commencer par lui présenter les choses agréables ; que le roman a cet avantage de montrer la vertu récompensée & le vice puni, au lieu que l’histoire offre souvent le contraire, les gens vertueux dans le malheur & les scélérats au faîte des grandeurs & des prospérités ; que l’abus d’un bien, d’un plaisir innocent, n’est pas une raison pour le défendre, tout étant relatif au caractère & ne devenant poison que lorsqu’on est mal disposé.

1179. (1885) La légende de Victor Hugo pp. 1-58

Hugo a dû ne savoir à quelle excuse se vouer, pour en arriver à prêter à sa mère défunte, des opinions en contradiction si flagrante avec les actes de sa vie et à nous la montrer traître au parti, traître au roi pour qui elle aurait affronté la mort. […] Mais si on leur avait prouvé que dans ce siècle du Progrès, les romantiques avaient domestiqué la muse vagabonde, qu’ils lui avaient enseigné l’art de « jouer de l’encensoir, d’épanouir la rate du vulgaire, pour gagner le pain de chaque soir7 », et si on leur avait montré le chef de l’école romantique recevant à vingt ans trois mille francs de pension pour des vers « somnifères » les parents, jugeant que la poésie rapportait davantage que l’élève des lapins ou la tenue des livres auraient encouragé, au lieu de réprimer, les velléités poétiques de leur progéniture8. […] Ils se montrent exigeants à l’extrême, quand ils demandent que ce catholicisme d’occasion survive aux causes qui l’avaient engendré. […] Partout il se montra virtuose habile. […] D’autres recueils ont trouvé moyen de faire bénéfice sur les faveurs du ministre du roi, lesquels se sont souvenus des avantages de l’économie lorsqu’il s’est agi d’encourager un ouvrage assez maladroit pour se montrer royaliste et indépendant. » (Préface du troisième volume du Conservateur littéraire). — Cependant page 361 du même recueil on lit : « L’ode sur la mort du duc de Berry, insérée dans la septième livraison, ayant été communiquée par le comte de Neufchâteau au duc de Richelieu, président du conseil des ministres et zélé pour les lettres, qui l’ayant jugée digne d’être mise sous les yeux du Roi, sa Majesté daigna ordonner qu’une gratification (sic), de 500 fr. fût remise à l’auteur, M. 

1180. (1866) Nouveaux essais de critique et d’histoire (2e éd.)

Ils montrent aux hommes le ciel où ils ont été ravis. […] On ne peut blâmer et louer à la fois avec plus de finesse, ni montrer tout ensemble plus de modestie et plus de dignité. […] Ils ont comme une voix articulée, et quand ils se lèvent sur leurs pieds, ils montrent une face humaine ; et, en effet, ils sont des hommes. […] Jugez maintenant si vous pouvez leur montrer le tumulte de la vie et le débordement des passions. […] En ce moment encore, si Çakya-Mouni fait son salut, c’est pour nous montrer la voie du salut.

1181. (1911) L’attitude du lyrisme contemporain pp. 5-466

Régnier est tout cela —  et bien autre chose encore — il est tout cela mais pas dans l’ordre où je l’ai montré. […] Il n’avait analysé en phrases caressantes et débordantes de lyrisme éthéré l’attitude mystique, que pour mieux montrer l’essence de l’art véritable et de la poésie immanente. […] Il suffit d’avoir montré de quel élan le poète d’Intérieur a poussé l’inspiration créatrice contemporaine vers des états d’âme intimes. […] Plusieurs pourtant, au nom de la liberté, se sont montrés intransigeants anarchistes et se sont lancés à l’aventure dans de graves réformes. […] L’art, au contraire, a pour fin de donner la vie aux idées, de les montrer dans leur richesse première, pourvues de leur résidu sentimental ; il ne saurait user de procédés abstracteurs.

1182. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre cinquième. Le réalisme. — Le trivialisme et les moyens d’y échapper. »

Montrez-moi plutôt le changeant et le nouveau de la vie, ce qui se détache, émeut et fait réellement vivre. […] Balzac, dans une de ses nouvelles, a montré un peintre aux prises avec le dessin, et Zola, dans son roman, nous montre le sien désespéré devant la couleur, qui, depuis Delacroix est le tourment des peintres. […] Si donc il vient à le transporter en pays inconnu, à lui parler uniquement de ce qu’il ignore, la besogne se simplifie : le lecteur ne saura, ne verra, n’entendra que ce qui lui sera dit et montré ; n’associera que les idées voulues par l’écrivain : rien ne viendra à rencontre des effets ménagés ; il sera en quelque sorte au pouvoir de l’écrivain. […] Si l’on veut nous transporter dans des milieux lointains et étranges, il faut nous y montrer les manifestations d’une vie semblable à la nôtre, quoique diversifiée ; ainsi ont fait Bernardin de Saint-Pierre, Flaubert, Pierre Loti. […] Vouloir montrer toutes choses à la fois, c’est ne rien faire voir du tout.

1183. (1888) Poètes et romanciers

Ce ne fut jamais le rayon direct et plein du soleil sur une tête radieuse de poète, montré à la foule et salué par elle dans le triomphe qui le porte au Capitole. […] Il aime à nous donner une haute idée de sa force, à se montrer formidable. […] Si de bonne heure, dans la vie sérieuse, il montra tant de finesse, de raison et de justesse piquante de bon sens, il faut lui en savoir gré. […] Lucrèce n’est ici qu’un prétexte pour l’auteur de montrer son habitude de la réflexion et sa compétence dans ces matières. […] Il y a dans ces strophes et dans beaucoup d’autres une fermeté, une simplicité de style, qui nous montrent déjà M. 

1184. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Appendice. — [Lamartine.] » pp. 534-535

. — Vous avez dit de ma mère, entrevue par vous, des choses qui montrent que tout poète a l’âme d’un fils et des divinations de premier coup d’œil. — Vous avez choisi dans mes écrits avec une intelligence amie ce qui pouvait le plus faire aimer le poète. — Vous avez glissé sur les défauts et voilé avec délicatesse les parties regrettables chez celui qui s’est trop abandonné en écrivant aux sentiments éphémères et au courant des circonstances.

1185. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LIV » pp. 209-212

Saisset a beau dire des injures (car il en a dit) aux sceptiques, aux matérialistes ; il a beau dire que ces systèmes n’ont de prise aujourd’hui que sur les âmes basses et les esprits obtus (page 472), il échappe très-difficilement lui-même et les siens à ce scepticisme qui ne diffère pas notablement du matérialisme quant au résultat moral ; de plus il viole les droits de la philosophie qu’il prétend défendre en s’exprimant de la sorte sur des doctrines peu hautes et peu consolantes à coup sûr, mais envers qui les philosophes proprement dits n’ont pas à se montrer si injurieux.

1186. (1887) Discours et conférences « Discours prononcé au nom de l’Académie des inscriptions et belles-lettres aux funérailles de M. .Villemain »

Qu’il soit permis à notre compagnie, gardienne des souvenirs et des œuvres du passé, de montrer les sources où M. 

1187. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XX. Conclusion » pp. 499-500

J’ai voulu seulement (je le rappelle une dernière fois) préciser la méthode qui peut conduire à trouver des réponses justes et nettes à ces multiples interrogations, et montrer ce que doit devenir l’histoire d’une littérature.

1188. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « XVIII »

Si mes ouvrages n’apprennent pas à écrire, ils apprennent certainement à lire, et, s’ils ne donnent pas du talent, ils montrent, du moins, en quoi il consiste.

1189. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre III. Le lien des caractères généraux ou la raison explicative des choses » pp. 387-464

Il a fallu la grande induction de Newton pour reconnaître que l’attraction des molécules croît en raison inverse du carré de leurs distances, d’où il suit que, passé un certain degré de proximité, les forces attractives doivent faire équilibre aux forces répulsives ; et il a fallu les inductions d’autres physiciens pour reconnaître quel degré de refroidissement amène ce degré de proximité entre les molécules de la vapeur d’eau. — Mais, si les procédés de la découverte ont été différents, la structure des choses s’est montrée la même. […] Comme il manie très bien l’expérience et l’induction, il a fini par reconnaître qu’il y a dans chaque monceau des habitants invisibles, et dans chaque monceau différent des habitants différents, que certains mélanges réussissent mieux que d’autres, qu’il y faut toujours garder certaines proportions, qu’après le mélange l’édifice nouveau présente des caractères qui ne se montraient dans aucun des deux tas mélangés. […] Par exemple, il s’agit pour l’astronome de chercher comment se sont formées les diverses planètes, pour le géologue de montrer comment se sont formées les couches étagées de l’écorce terrestre, pour le minéralogiste de découvrir comment se sont formées les différentes roches, pour le naturaliste de savoir comment se sont formées nos espèces végétales et animales, pour l’historien de démêler comment se sont formées les époques successives d’une même société humaine et les différents traits d’un caractère national. […] Nous ne pouvons montrer cette raison, mais nous sommes persuadés qu’elle existe ; nous anticipons par une affirmation hardie sur nos découvertes futures, et même sur des découvertes que peut-être nous ne ferons jamais. […] Comme il n’y a pas de choix entre la présence et l’absence de la raison explicative, dès que les chances ne sont plus pour l’absence, elles sont pour la présence, et la balance penche vers le second plateau. — Elle pencherait vers lui bien davantage encore, si l’on pouvait montrer des sciences qui, s’affranchissant des conditions imposées à la science expérimentale, trouvent par cela même à toutes leurs lois une raison explicative.

1190. (1887) Études littéraires : dix-neuvième siècle

C’est le vrai du christianisme que Bossuet s’applique à montrer, et il ne le fait pas voir comme poétique et tendrement romanesque. […] N’est-il pas singulier que tu arrives exprès d’Amérique pour être mon compagnon de boulet en Europe, pour montrer la liberté et la servitude, le vice et la vertu accouplés au même joug ? […] De tels essais montrèrent au poète le but. […] Je dis aussi qu’il lui manque une certaine souplesse d’imagination, ce qui est plus difficile à bien montrer. […] L’étude que je fais en ce moment a précisément pour but de montrer qu’il a été cela, et aussi autre chose.

1191. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxviiie entretien. Littérature germanique. Les Nibelungen »

Le pays de son père en fut illustré, tant il se montra accompli en toutes choses. […] Elle-même avait tant de richesses sur elle, que trente femmes de roi n’auraient pu montrer ce qu’elle étalait sur sa seule personne. […] Mes yeux le verront avec bonheur, car je l’aime tendrement pour la grande fidélité qu’il m’a montrée. […] Et si Hagene de Troneje refusait de les accompagner, qui donc leur montrerait le chemin à travers le pays ? […] Les autres conseillant le voyage au Hiunen-lant, le féroce Hagene y montra un danger de mort.

1192. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Joseph de Maistre »

Fut-il tout d’abord ce que ses brillants écrits l’ont montré, théoricien intrépide d’une pensée qui contredisait si absolument celle de son siècle ? […] M. de Maistre est ici le Lally-Tolendal de sa contrée, comme dans son pamphlet de Claude Têtu il s’en était montré par avance le Paul-Louis Courier. […] Athènes, qui aime avant tout qu’on s’occupe d’elle, quand ce serait pour l’insulter et pour la battre, Athènes s’est montrée reconnaissante. […] Si M. de Maistre a compris d’emblée, à ce degré de justesse, la Révolution française, c’est, nous l’avons assez montré, qu’il l’avait vue de près et sentie à fond par sa propre expérience douloureuse. […] Il crut voir en Bacon un tel adversaire tout fourré d’hermine, et dès lors il se fit devoir et plaisir de le montrer nu.

1193. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXXIe entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff » pp. 237-315

Sophie Cirilovna s’assit, alluma une cigarette, et se montra très empressée de reprendre son vif entretien. […] Il avait la figure d’un bohémien, chantait, dansait comme les bohémiens, faisait la cour à toutes les femmes et se montrait fort empressé près de Viéra. […] Figurez-vous… » Longtemps Pierre refusa de le croire ; lorsque enfin il ne put plus douter de cette catastrophe, il resta tout un jour sans oser se montrer à Viéra. […] À partir de ce jour, il se montra très occupé d’elle. […] Mais aussitôt Moumou releva convulsivement la tête et montra les dents.

1194. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « La religion statique »

La folie des persécutions, plus précisément le délire d’interprétation, est là pour montrer que le bon sens peut être endommagé alors que la faculté de raisonner demeure intacte. […] Brusquement elle se sentit rejeter en arrière : l’homme chargé de manœuvrer l’appareil venait de se montrer, et la repoussait sur le palier. […] Et je n’avais d’autre souci que de lui montrer ce que je savais faire. […] Hubert et Mauss, dans leur très intéressante Théorie générale de la Magie, ont montré avec force que la croyance à la magie est inséparable de la conception dit mana. […] Et l’explication est en psychologie ce qu’elle est en biologie ; on a rendu compte de l’existence d’une fonction quand on a montré comment et pourquoi elle est nécessaire à la vie.

1195. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Riposte à Taxile Delord » pp. 401-403

Riposte à Taxile Delord Un écrivain que je ne prétends nullement hostile par système ni méchant, mais qui s’est montré en ceci parfaitement léger, avait publié dans Le Siècle (fin de janvier 1864) une espèce de portrait-biographie de moi tout à fait inexact, et dans le dessein, avant tout, de faire rire aux dépens de celui qu’on dépeignait.

1196. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Louÿs, Pierre (1870-1925) »

Soyez sûrs que les cendres de Gautier ont frémi de joie, à l’apparition de ce livre, et que, dans le paradis des lettrés, l’ombre de Flaubert hurle, à l’heure qu’il est, des phrases de Pierre Louÿs, les soumet à l’infaillible épreuve de son gueuloir, et qu’elles la subissent victorieusement… Enfin voilà donc un jeune, un vrai jeune — Pierre Louÿs n’a pas vingt-six ans — qui nous donne un beau livre ; un livre écrit dans une langue impeccable, avec les formules classiques et les mots de tout le monde, mais rénovés et rajeunis à force de goût et d’art ; un livre très savant et où se révèle, à chaque page, une connaissance approfondie de l’antiquité et de la littérature grecque, mais sans pédantisme aucun et ne sentant jamais l’huile et l’effort ; un livre dont la table contient sans doute un symbole ingénieux et poétique, mais un symbole parfaitement clair ; un livre, enfin, qui est vraiment issu de notre tradition et animé de notre génie et dans lequel la beauté, la force et la grâce se montrent toujours en plein soleil, et inondées d’éclatante lumière !

1197. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 120-124

Les Philosophes ont beau employer toute sorte de moyens pour se venger des courageux adversaires de leurs systêmes ; ils ont beau se montrer, dans la pratique, les plus fiers ennemis de la tolérance qu’ils prêchent, nous n’en serons pas moins disposés à les plaindre, quand ils seront malheureux ; & plus nous aurons mis de zele & de chaleur à combattre leurs erreurs, plus on nous trouvera empressés à réclamer, pour leur personne, l’indulgence de l’autorité & la protection du crédit.

1198. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 127-131

Par-là, il a montré le secours mutuel que les Sciences peuvent se donner les unes aux autres.

1199. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 94-98

Depuis vingt ans il résiste au torrent de la dépravation, & s'en est constamment montré l'adversaire.

1200. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Préface » pp. -

Je demande enfin au lecteur de se montrer indulgent pour les premières années, où nous n’étions pas encore maîtres de notre instrument, où nous n’étions que d’assez imparfaits rédacteurs de la note d’après nature ; puis, il voudra bien songer aussi qu’en ce temps de début, nos relations étaient très restreintes et, par conséquent, le champ de nos observations assez borné1.

1201. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Autobiographie » pp. 169-176

Je demande enfin au lecteur de se montrer indulgent pour les premières années, où nous n’étions que d’assez imparfaits rédacteurs de la note d’après nature ; puis il voudra bien songer aussi qu’en ce temps de début, nos relations étaient très restreintes et, par conséquent, le champ de nos observations assez borné35.

1202. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre premier. Beaux-arts. — Chapitre II. Du Chant grégorien. »

Au reste, en ne parlant que des chants grecs de l’Église, on sent que nous n’employons pas tous nos moyens, puisque nous pourrions montrer les Ambroise, les Damase, les Léon, les Grégoire, travaillant eux-mêmes au rétablissement de l’art musical ; nous pourrions citer ces chefs-d’œuvre de la musique moderne, composés pour les fêtes chrétiennes, et tous ces grands maîtres enfin, les Vinci, les Leo, les Hasse, les Galuppi, les Durante, élevés, formés, ou protégés dans les oratoires de Venise, de Naples, de Rome, et à la cour des souverains pontifes.

1203. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre troisième. Histoire. — Chapitre premier. Du Christianisme dans la manière d’écrire l’histoire. »

Et pour en montrer un exemple dans notre révolution, qu’on nous dise si ce furent des causes ordinaires qui, dans le cours de quelques années, dénaturèrent nos affections, et affectèrent parmi nous la simplicité et la grandeur particulières au cœur de l’homme.

1204. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — De l’état de savant. » pp. 519-520

Il y a deux sortes d’écoles publiques : les petites écoles ouvertes à tous les enfants du peuple au moment où ils peuvent parler et marcher ; là ils doivent trouver des maîtres, des livres et du pain, des maîtres qui leur montrent à lire, à écrire et les premiers principes de la religion et de l’arithmétique ; des livres dont ils ne seraient peut-être pas en état de se pourvoir ; du pain111 qui autorise le législateur à forcer les parents les plus pauvres d’y envoyer leurs enfants.

1205. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Ollivier » pp. 299-300

Ce sont les incidents singuliers et pathétiques qu’entraîne une pareille scène, qu’il faut savoir imaginer, c’est l’art de montrer la fureur et d’exciter la compassion, qu’il faut avoir.

1206. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 38, que les remarques des critiques ne font point abandonner la lecture des poëmes, et qu’on ne la quitte que pour lire des poëmes meilleurs » pp. 554-557

Mais les raisons que nous avons exposées dans ces refléxions et l’expérience du passé, montrent suffisamment que la possibilité de faire un poëme épique françois meilleur que l’éneïde, n’est qu’une possibilité métaphisique, et telle qu’est la possibilité d’ébranler la terre en donnant un point fixe hors du globe.

1207. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — XV. Le fils du sérigne »

Il a suivi le chemin que lui avait indiqué son père jusqu’à ce que quelque chose se soit montré à ses yeux.

1208. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « Appendice »

Sans quitter le chant X, quelques exemples nous montreront l’exact procédé de traduction du poète parnassien.

1209. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Édouard Fleury »

On dirait des sceptiques de ce temps aux mœurs douces, qui ont l’horreur du sang et le dégoût de la fange, comme il sied à des naturels honnêtes et à des esprits cultivés, mais qui, ce sang montré dans sa vermeille couleur et cette fange dans son infamie, ont tout dit, à l’honneur de l’art et du style, et ne savent pas tirer de cette effroyable peinture, faite avec de véritables pourlècheries de pinceau, un enseignement ou une conclusion.

1210. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre I. La Restauration. »

L’homme méritait alors ce traitement, parce qu’il inspirait alors cette philosophie ; il va se montrer sur la scène tel qu’il s’est montré dans la théorie et dans les mœurs. […] Wycherley lui ôtait son manteau mal ajusté de politesse française, et le montrait avec la charpente de ses muscles et l’impudence de sa nudité. […] Les lavements et les coups de bâtons, les mascarades et les ballets montrent qu’il s’agit de bouffonneries. […] Rien ne lui avait manqué ; il avait tout atteint, de prime-saut, sans effort apparent, comme un prince qui n’a qu’à se montrer pour trouver sa place. […] Elle, pour soutenir la gageure, se mit à la montrer jusqu’au-dessus du genou. » (Grammont.)

1211. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Quelques « billets du matin. » »

Les parfums préparés dans les sous-sols du monastère étaient ainsi amenés dans les salles où se montrait l’exquise thaumaturge. […] Ils connaissent bien les hommes, car ils les voient justement dans les circonstances où les hommes se montrent le mieux tels qu’ils sont. […] Et celui-ci : J’ai montré ma blessure aux deux mers d’Italie. […] Mais ce que je vous en dis n’est que pour vous montrer la conscience et les scrupules de Jean-Paul. […] Etc… Je vais appeler, et montrer à tout le monde qui tu es !

1212. (1884) Propos d’un entrepreneur de démolitions pp. -294

L’auteur des Origines du Christianisme a raison de ne pas s’en montrer dédaigneux. […] Je ne sais pas une plus sotte manière de montrer un livre que de le feuilleter dans le vent de paroles d’un compte rendu. […] Jamais, peut-être, le bourgeois n’avait été montré plus répugnant, plus abominable qu’il ne montre les auteurs de ses jours. […] Les carnassiers trembleurs ne se montraient pas. […] Ces ruminants ont été montrés dans mille romans et ils ont fait les délices de plusieurs littératures.

1213. (1925) Comment on devient écrivain

D’incontestables écrivains n’ont pas montré dans leur jeunesse des aptitudes bien décisives. […] Ce sont quelquefois les moins doués qui montrent le plus d’ambition. […] Elle consiste à montrer les sentiments en marche et en action. […] … Je raconterai, autant que je le pourrai, ce passé ; je montrerai ces sources d’émotion et d’études… Mais que voulez-vous ? […] Un volume ne suffirait pas à montrer l’influence des grands traducteurs sur notre langue.

1214. (1890) La bataille littéraire. Deuxième série (1879-1882) (3e éd.) pp. 1-303

Vaudrey montrait, devant ce spectacle, une stupéfaction naïve dont Granet, son ami et son collègue à la Chambre, souriait dans sa moustache cirée. […] Je veux cependant lui emprunter quelques pages pour montrer jusqu’où peut aller la fidélité, pour ainsi dire photographique, des descriptions de M. de Goncourt. […] Elle avait vécu du désordre ; c’était une fille célèbre, une de celles que les débauchés se montrent du doigt en riant ! […] L’auteur, à force de recherches, a retrouvé la trace de cette intéressante famille et nous la dépeint avec cette conscience qu’il a montrée dans ses moindres écrits, et cet esprit léger qui ont fait vivre son théâtre. […] Lui, ne pouvait, n’osait rien dire, mais elle aurait dû montrer plus de tendresse, plus d’abandon.

1215. (1898) Essai sur Goethe

Les quelques exemples que nous avons cités, que les limites de notre travail ne nous permettent pas de multiplier, montrent à quel point l’exactitude en est discutable ; ils montrent aussi que ce ne sont pas toujours des motifs élevés qui poussent l’auteur hors du cercle de la vérité dans celui de la fiction. […] Or, en prenant ce mot dans son sens le plus classique, les apologistes de Goethe n’ont guère eu de peine à montrer que ce reproche n’avait aucune raison d’être. […] Il y eut une épidémie de suicides : en 1778, une jeune fille se jeta dans l’Inn, accident dont Goethe se montra fort ému. […] Ses lettres à Schiller montrent qu’il estimait fort Les Entretiens. […] L’art national est propre à ce théâtre, ici l’on ne sert plus d’idoles étrangères ; nous pouvons bravement montrer un laurier qui a verdi sur le Pinde allemand.

1216. (1916) Les idées et les hommes. Troisième série pp. 1-315

Les portes des maisons s’ouvrent et montrent des hommes porteurs de valises ou de baluchons. […] L’Allemagne s’en montra fort satisfaite. […] Jacques Bainville, la monarchie française se montrait manœuvrière et novatrice. » Et l’opinion publique ? […] Il lui importait de montrer que la déclaration de guerre n’avait pas été, de sa part, un caprice de légèreté. […] Gramont, néanmoins, montrait sa hâte d’en finir : « Employez tous vos efforts pour obtenir une réponse décisive.

1217. (1883) Essais sur la littérature anglaise pp. 1-364

Seulement, nous avons été bien aise de montrer comment à l’occasion le philosophe le plus sérieux pouvait être en même temps le personnage le plus amusant. […] Voici les traits sous lesquels je vous ai montré cette âme humaine si noble et si basse, si démoniaque et si angélique. […] Ces épisodes sont comme des représentations de choses lointaines ou passées qu’on vous montrerait dans un miroir magique. […] C’est l’œuvre de l’histrion que vous continuez à montrer au public, et non celle du poète et du sage. […] Puis elle me montra son testament. » Cette petite fortune dont elle voulait faire Sterne héritier servit vingt ans plus tard à payer en grande partie les dettes laissées par lui.

1218. (1890) Dramaturges et romanciers

C’est le contraire qu’il fallait montrer, car c’est le contraire qui est vrai. […] C’est une ingénieuse apologie des caractères poétiques que de les avoir montrés fidèles à la nature et fortement attachés aux sentiments vrais. […] Il a montré depuis longtemps qu’il était maître souverain dans le domaine de la grâce, de la délicatesse, des sentiments aimables et subtils. […] Droz s’est montré passé maître dans l’art d’accorder son instrument avec justesse au ton de l’air qu’il voulait jouer. […] Bien qu’elle soit écrite en vers, la pièce, loin de montrer la poésie de la vie conjugale, n’en montre que la plus triste prose.

1219. (1874) Premiers lundis. Tome II « L. Aimé Martin. De l’éducation des mères de famille, ou de la civilisation du genre humain par les femmes. »

Le saint- simonisme, sous ce rapport, a eu l’immense mérite de soulever et de poser avec audace les vraies questions, celles qui ressortent de l’examen réel de la société d’à présent, et bien que ses solutions aient été hasardées et mystiques parfois jusqu’à la folie, il a déchiré le voile d’une fausse pudeur et a montré au christianisme attiédi ce qu’on oubliait trop et ce qu’il fallait guérir. — M. 

1220. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Épilogue »

L’Orgueil, ce vice des hommes, est descendu jusque dans le cœur de la femme, qui s’est mise debout pour montrer qu’elle nous atteignait et nous ne l’avons pas rassise à sa place, comme un enfant révolté qui mérite le fouet !

1221. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Charles Nisard »

Avec un amour de cloporte pour la poussière, Nisard a remué celle des bibliothèques ; et ce n’a point été, comme on pourrait le croire, pour nous raconter et nous montrer le vaste mouvement littéraire du siècle auquel s’associèrent Juste Lipse, Scaliger et Casaubon, mais — ô piété de ce pieux Énée de l’annotation envers ses ancêtres ! 

1222. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre II. Le public en France. »

À peine osent-ils se montrer dans les rues sans être hués… Comme notre nation et notre siècle sont bien autrement éclairés » qu’au temps de Luther, « on ira jusqu’où on doit aller ; on bannira tous prêtres, tout sacerdoce, toute révélation, tout mystère… » — « On n’ose plus parler pour le clergé dans les bonnes compagnies ; on est honni et regardé comme des familiers de l’inquisition… Les prêtres ont remarqué cette année une diminution de plus d’un tiers dans le nombre de leurs communiants. […] Sans doute ils aiment le danger ; « une probabilité d’avoir des coups de fusil est trop précieuse pour qu’on la néglige540. » Mais il s’agit en outre d’affranchir des opprimés ; « c’est comme paladins, dit l’un d’eux, que nous nous montrions philosophes541 » et l’esprit chevaleresque se met au service de la liberté  D’autres services, plus sédentaires et moins brillants, ne les trouvent pas moins zélés. […] Le sacrifice est voté par acclamation ; ils viennent d’eux-mêmes l’offrir au Tiers-état et il faut voir dans les procès-verbaux manuscrits leur accent généreux et sympathique. « L’ordre de la noblesse du bailliage de Tours, dit le marquis de Lusignan545, considérant que ses membres sont hommes et citoyens avant que d’être nobles, ne peut se dédommager, d’une manière plus conforme à l’esprit de justice et de patriotisme qui l’anime, du long silence auquel l’abus du pouvoir ministériel l’avait condamné, qu’en déclarant à ses concitoyens qu’elle n’entend plus jouir à l’avenir d’aucun des privilèges pécuniaires que l’usage lui avait conservés, et qu’elle fait par acclamation le vœu solennel de supporter dans une parfaite égalité, et chacun en proportion de sa fortune, les impôts et contributions générales qui seront consenties par la nation. » — « Je vous le répète, dit le comte de Buzançais au Tiers-état du Berry, nous sommes tous frères, nous voulons partager vos charges… Nous désirons ne porter qu’un seul vœu aux états et, par là, montrer l’union et l’harmonie qui doivent y régner. […] Aucun gouvernement ne s’est montré plus doux : le 14 juillet 1789, il n’y avait à la Bastille que sept prisonniers, dont un idiot, un détenu sur la demande de sa famille, et quatre accusés de faux553.

1223. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIIIe entretien. Revue littéraire de l’année 1861 en France. M. de Marcellus (1re partie) » pp. 333-411

Le duc de Rivière était, comme M. de Polignac, un de ces monuments de fidélité chevaleresque, que Louis XVIII et le comte d’Artois étaient heureux de montrer à la jeunesse royaliste de 1825 dans les grandes places, comme des preuves vivantes de la mémoire des princes restaurés. […] Canning, qu’il fallait ménager ; M. de Chateaubriand, qu’il fallait flatter et informer ; le roi, qu’il fallait intéresser ; M. de Villèle, qu’il fallait éviter de blesser, — n’eut une tâche plus complexe, et ne dut montrer sous plus de faces la loyauté d’un homme d’honneur, la dextérité d’un homme de plume, la fermeté d’un homme de résolution, l’agrément d’un homme de lettres dans le sérieux d’un diplomate ; et cet homme avait vingt-cinq ans ! […] Je l’ai fait conduire dans le désert, vers la ville qu’il dit avoir découverte ; il me doit bien des facilités apportées à son voyage, et il s’en est montré peu reconnaissant ; mais je sais oublier les ingrats. […] Cet illustre Polonais, par exemple, si grand amateur de chevaux, qui s’est montré en Syrie il y a deux ans, n’a nullement les qualités propres à l’Arabie ; il est vrai qu’il y a à peine pénétré.

1224. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCVIIIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (3e partie) » pp. 81-152

Des romanciers se sont plu à mettre en scène la femme de quarante ans, et ils ont eu beau se montrer sympathiques pour des souffrances qui ne dépendent pas du nombre des années, on voit percer une secrète ironie dans leurs peintures. […] Bien qu’elle en fût dès longtemps saturée sans le montrer et sans le dire, et qu’il y eût, dit-on, plus de domination que d’attrait dans l’espèce de subjugation qu’Alfieri exerçait sur elle, elle ne voulut pas l’avouer ; elle eût retranché quelque chose à son excuse, en retranchant un atome à la grandeur factice de son héros. […] C’est beaucoup, sensible comme elle est, passionnée pour ce qui lui est refusé, faible et craintive comme elle s’est montrée souvent, que d’avoir conservé un courage négatif qui ne s’est jamais démenti. […] En personne prudente, elle n’eut garde de se montrer à Genève, où ses amis de Coppet espéraient bien l’arrêter au passage

1225. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre premier »

Tel ouvrage où l’auteur y est resté fidèle, sans rien créer, n’a réussi qu’à montrer ce qu’il était incapable de faire. […] Lamotte put montrer des lettres signées de Fénelon, où celui-ci louait son entreprise, accusait notre versification, blâmait les gens de goût qui se moquaient de Lamotte, et toutefois se taisait sur ses vers. […] Le bon Fontenelle se montra tout à fait le jour où, entrant dans sa vraie voie, il eut l’idée d’initier le public aux vérités des sciences, de les mettre à la mode sans les abaisser. […] Desmarets avait tort sans doute de montrer au doigt Le Vayer comme un homme sans religion9; mais Desmarets devinait juste.

1226. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre III. Les immoralités de la morale » pp. 81-134

Sous sa forme abstraite et systématisée, elle s’est toujours montrée incapable de remplir sa mission, par impuissance, par maladresse ou par ignorance de son but réel dont elle s’est même interdit de connaître la vraie nature. […] C’est une des circonstances qui montrent en chacun de nous plusieurs morales. […] L’esprit théologique, l’esprit militaire ont montré leur puissance d’abus. […] C’est un spectacle qui n’est pas rare, mais qui reste toujours curieux, que de voir, en ce cas, une personne montrer quelque remords d’avoir sainement et naturellement agi, à l’encontre des idées morales qu’elle révère.

1227. (1878) La poésie scientifique au XIXe siècle. Revue des deux mondes pp. 511-537

Lucrèce n’est ici qu’un prétexte pour l’auteur de montrer son habitude de la réflexion et sa compétence dans ces matières. […] Il y a dans ces strophes et dans beaucoup d’autres une fermeté, une simplicité de style, qui nous montrent déjà M.  […] Je voudrais montrer que la justice ne peut sortir ni de la science seule, qui suspecte les intuitions du cœur, ni de l’ignorance généreuse qui s’y fie exclusivement ; mais que l’application de la justice requiert la plus délicate sympathie pour l’homme, éclairée par la plus profonde connaissance de sa nature ; qu’elle est par conséquent le terme idéal de la science étroitement unie à l’amour. » C’est donc bien d’un poème scientifique et philosophique qu’il s’agit. […] C’est évidemment à la contrainte d’une forme impossible qu’il faut attribuer des vers pareils à ceux-ci ; il s’agit de réveiller le poète de sa langueur : Mais si je lui montrais la Gloire Sonnant ses vers sous un laurier ?

1228. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VIII : Hybridité »

Néanmoins, ces faits montrent de quelles causes mystérieuses, et sans importance apparente, peut dépendre la plus ou moins grande fécondité des croisements entre espèces, en comparaison de la fécondité des mêmes espèces naturellement fécondées par elles-mêmes. […] De tels faits montrent combien la fécondité des hybrides est complétement indépendante de leurs ressemblances extérieures avec l’un ou l’autre de leurs parents d’espèce pure. […] J’ai plus d’une fois fait allusion à un ensemble considérable de faits que j’ai recueillis, et qui montrent que lorsque les plantes et les animaux sont placés hors de leurs conditions naturelles, leur système reproducteur en est très fréquemment et très gravement affecté. […] Bien que Gærtner ait établi que la faculté de croisement n’est pas en rapport constant avec celle de greffement, c’est-à-dire que les espèces capables d’être greffées les unes sur les autres ne sont pas toujours celles qui croisent le plus aisément et qui se montrent les plus fécondes, il reste néanmoins très probable que la faculté générale, mais inégalement constatée chez les diverses espèces, de pouvoir être greffées les unes sur les autres, est une conséquence générale de leur faculté de croisement, c’est-à-dire que les deux ordres de phénomènes ont quelque chose de commun et dérivent des mêmes causes, tout en suivant jusqu’à un certain point d’autres lois.

1229. (1856) La critique et les critiques en France au XIXe siècle pp. 1-54

« Montrer avec clarté comment le beau dérive des idées primitives de notre esprit ; déterminer avec plus de précision les rapports qui l’unissent au vrai et au bon ; établir avec solidité en quoi consiste le beau dans la nature, et chercher avec plus de profondeur le lien intime qui existe entre la nature et l’art15. » Il semble que ce soit là le programme qu’à la même époque, dans la même année, s’était tracé à lui-même le jeune et brillant professeur de la Sorbonne. […] Plus elles se montrent librement dans un objet, plus aussi éclate la beauté. […] Racine s’est montré libre malgré les règles : c’est un exemple dangereux. […] Elle doit pénétrer dans l’esprit de l’ouvrage, montrer s’il est ou non conforme à sa propre loi, s’il rend bien l’idée de l’auteur, si cette idée valait la peine d’être rendue.

1230. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gui Patin. — II. (Fin.) » pp. 110-133

Quoi qu’il en soit, c’en est assez pour montrer que, dans le cabinet de Gui Patin, le grand crucifix pouvait, en toute sincérité, occuper la première place, et que le bon Dieu, comme on disait et comme il disait en langage de famille, continuait de régner en effet sur cet assemblage un peu disparate de personnages si divers et sur la conscience du maître lui-même. […] Ce beau temps, selon lui, où l’on pouvait penser à cœur joie et dire tout haut ce qu’on avait sur le cœur, était avant que Berthe filât : « Depuis qu’elle a filé, le monde s’est bien corrompu. » Je l’ai montré, dans la première partie de sa vie, guerroyant et processif : il s’apaisa pourtant un peu en vieillissant. […] Ses dernières lettres, à mesure qu’on avance dans le règne de Louis XIV, montrent à quel point il retarde en quelque sorte et ne peut se faire au siècle nouveau.

1231. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le marquis de Lassay, ou Un figurant du Grand Siècle. — II. (Fin.) » pp. 180-203

On a retenu, grâce à Mme de Caylus, un mot très spirituel et piquant de la marquise de Lassay à son mari, un jour qu’il soutenait devant tous la vertu sans tache, l’impeccabilité de Mme de Maintenon, et qu’il s’en montrait plus opiniâtrement convaincu qu’il n’était convenable à un homme du monde. […] Je me suis plu à montrer cette figure qui fuirait aisément, mais qui a pourtant son espèce d’originalité. […] [NdA] Quand j’ai dit qu’on ne connaît pas la personne à qui ces lettres sont adressées, j’ai peut-être été trop circonspect ; je crois, si la discussion était convenable en pareil cas, qu’on pourrait montrer qu’elles sont probablement adressées à la marquise de Nesle, née de Coligny, qui mourut en 1693 dans sa vingt-sixième année : elle en aurait eu vingt-trois ou vingt-quatre au moment de cette liaison.

1232. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — II » pp. 57-80

On les vendit, l’un portant l’autre, à Ulm, cent cinquante livres : par conséquent, le gain sur les chevaux défraya le reste du voyage. » Le roi loua fort le bon esprit et le bon ordre de Viliars… Aussi n’est-ce point d’avoir raconté au roi la chose, qu’on peut blâmer Villars ; il répondait par là d’avance à plus d’une accusation, et montrait que, sous son faste et son apparente profusion, il savait calculer juste. […] Il se montrait dès lors très préoccupé de ses ennemis et de ses envieux, qui, le voyant décidément percer et arriver aux plus grands emplois, redoublaient en Cour de railleries et de méchants propos. […] La lettre, d’ailleurs, se terminait par un post-scriptum plus grave et qui montrait qu’à travers les bouffées et les saillies de la vanité, on avait affaire à un chef réfléchi, ayant la conscience de ses hauts devoirs militaires.

1233. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — III » pp. 455-479

Nous avons vu sur les bancs de nos cours publics de ces exemples innocents, mais qu’on se montrait au doigt, d’une interminable scolarité 94. […] Il a trop bonne opinion de moi pour que je ne perde pas à me montrer. […] L’esprit du siècle, dégagé des débris du vieux âge, s’était montré tellement supérieur aux institutions tombées, que déjà, l’absence de ces institutions était un bien.

1234. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Journal et Mémoires, de Mathieu Marais, publiés, par M. De Lescure  »

Je leur montrerai bien qu’il faut nécessairement avoir des spectacles dans un État pour purger les passions. […] Toujours Mathieu Marais maintiendra la mémoire de Despréaux et s’y montrera fidèle, même alors que le goût public aura le plus changé et que l’esprit des Fontenelle et des La Motte prévaudra. À propos du clinquant qu’il avait reproché au Tasse, Boileau avait été blâmé par un traducteur du Tasse et déclaré plus poète que critique : contrairement à ces sentences du nouveau siècle, Marais tient ferme et reste dans les termes de sa première admiration : « Je dis que Despréaux était grand critique, qu’il l’a montré par ses Satires qui sont des critiques en vers, et que son Art poétique est un des plus beaux ouvrages de critique que nous ayons, aussi bien que ses Réflexions sur Longin. » Le président Bouhier, dans une dissertation savante, avait parlé un peu légèrement de Despréaux et de Bayle, les deux cultes de Marais ; celui-ci, après avoir lu la pièce manuscrite que lui avait communiquée l’auteur, le supplie (et il y revient avec instance) de modifier ce qu’il a dit d’eux et d’adoucir un peu ses expressions ; et il en donne, en définitive, une touchante et haute raison, tirée de Cicéron même, cette source de toute belle pensée et de toute littérature : « Multum parcendum est caritati hominum, ne offendas eos qui diliguntur.

1235. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Discours préliminaire » pp. 25-70

Plan de l’Ouvrage Après avoir rassemblé quelques-unes des idées générales qui montrent la puissance que peut exercer la littérature sur la destinée de l’homme, je vais les développer par l’examen successif des principales époques célèbres dans l’histoire des lettres. […] J’essaierai de montrer le caractère que telle ou telle forme de gouvernement donne à l’éloquence, les idées de morale que telle ou telle croyance religieuse développe dans l’esprit humain, les effets d’imagination qui sont produits par la crédulité des peuples, les beautés poétiques qui appartiennent au climat, le degré de civilisation le plus favorable à la force ou à la perfection de la littérature, les différents changements qui se sont introduits dans les écrits comme dans les mœurs, par le mode d’existence des femmes avant et depuis l’établissement de la religion chrétienne ; enfin le progrès universel des lumières par le simple effet de la succession des temps ; tel est le sujet de la première partie. […] Cette seconde Partie montrera à la fois, et notre dégradation actuelle, et notre amélioration possible.

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