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882. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Dédicace, préface et poème liminaire de « La Légende des siècles » (1859) — Préface (1859) »

Exprimer l’humanité dans une espèce d’œuvre cyclique ; la peindre successivement et simultanément sous tous ses aspects, histoire, fable, philosophie, religion, science, lesquels se résument en un seul et immense mouvement d’ascension vers la lumière ; faire apparaître, dans une sorte de miroir sombre et clair ― que l’interruption naturelle des travaux terrestres brisera probablement avant qu’il ait la dimension rêvée par l’auteur ― cette grande figure une et multiple, lugubre et rayonnante, fatale et sacrée, l’Homme ; voilà de quelle pensée, de quelle ambition, si l’on veut, est sortie la Légende des Siècles.

883. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface d’« Hernani » (1830) »

C’est pour elle surtout qu’il travaille, parce que ce serait une gloire bien haute que l’applaudissement de cette élite de jeunes hommes, intelligente, logique, conséquente, vraiment libérale en littérature comme en politique, noble génération qui ne se refuse pas à ouvrir les deux yeux à la vérité et à recevoir la lumière des deux côtés.

884. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Platon, et Aristote. » pp. 33-41

Ces deux grandes lumières de la Grèce cherchèrent à s’obscurcir mutuellement.

885. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Introduction »

Ces faits, ainsi qu’on le verra dans les derniers chapitres de cet ouvrage, semblent jeter quelque lumière sur l’origine des espèces, « ce mystère des mystères », ainsi que l’a appelé l’un de nos plus grands philosophes.

886. (1936) Histoire de la littérature française de 1789 à nos jours pp. -564

La phrase célèbre est typique : « Je n’ai point cédé, j’en conviens, à de grandes lumières surnaturelles, ma conviction est sortie du cœur ; j’ai pleuré, et j’ai cru. » Là est en effet la vraie religion de Chateaubriand. […] Tout se passe comme si l’ambition de l’auteur du Génie et des Martyrs consistait à refaire dans une prose composite cette unité perdue, à fondre l’épopée chrétienne de Milton dans la poésie de Racine, et à les envelopper dans la lumière d’or du paysage romain. […] Tous quatre sont des esprits pleinement intelligents, que la poésie touche, qui ont le goût de la perfection et le sens de la lumière, qui sont terriblement gênés par leur temps. […] La découverte de l’atelier de Chénier, en 1819, ressemble pour la génération romantique, à ce qu’avait été la découverte d’Herculanum pour la génération de Chénier lui-même : un monde de formes, arrêté et immobilisé par une catastrophe, rendu brusquement à la lumière, et qui devient école, ou qui plutôt le redevient. […] Si un être, si un autre cœur, manque à la seconde, c’est qu’elle est environnée d’un peuple, que le génie est marqué de solitude pour le service et la lumière de ce peuple.

887. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — chapitre VI. Les romanciers. » pp. 83-171

En effet, la conscience est une lumière ; un moraliste est un psychologue ; la casuistique chrétienne est une sorte d’histoire naturelle de l’âme. […] Si grêles, si entrelacés, si enfouis qu’ils soient, il atteint jusqu’à eux ; il les démêle, il ne les casse point, il les rapporte à la lumière, et là où nous n’imaginions qu’une simple tige, nous contemplons avec étonnement la population et la végétation souterraine des fibres multipliées et des fibrilles par qui la plante visible végète et se soutient. […] Aux quatre murs, sous les vitres transparentes et reluisantes, les torses se soulèvent, les chairs palpitent, la tiède rosée du sang court sous la peau veinée, les visages parlants se détachent dans la lumière ; il semble que le laid, le vulgaire et l’odieux aient disparu du monde. […] Y a-t-il rien de plus agréable à peindre qu’une ivresse de nuit, de bonnes trognes insouciantes, et la riche lumière noyée d’ombres qui vient jouer sur des habits chiffonnés et des corps appesantis ? […] Détestables Yahous que vous êtes, et qui prétendez usurper la lumière bénie, dans quel cerveau avez-vous pu naître, et pourquoi un peintre est-il venu salir les yeux de votre aspect ?

888. (1896) Études et portraits littéraires

Relisons-les surtout aux heures grises où l’on a besoin d’une débauche de couleur et de lumière. […] J’ai reconnu l’effort et le talent du descriptif, l’attention du peintre aux jeux de la lumière et de l’ombre, aux vibrations de la couleur. […] Cette réflexion d’un camarade sur son chapelet de treize sous, la veille de sa première communion, lui fut un coup de lumière. […] Elles s’entraînent par l’hyperbole, l’énormité des tableaux largement brossés, avec des reliefs audacieux et des coups de lumière aveuglante. […] Il a, comme Jules de Goncourt le lui écrivait, « des phrases de lumière, des pages de soleil », d’un soleil qui brûle.

889. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome III pp. -

On faisoit tous les jours, dans l’université de Paris, de nouvelles tentatives pour écarter les ténèbres de l’Aristotélisme, & leur substituer les lumières de la bonnes physique. […] A mesure qu’il portoit la lumière dans tous les climats disposés à la recevoir, les reflets en venoient jusqu’à Paris. […] Ayant entendu parler du Traité de l’homme de Descartes, il fut curieux de le lire, & cette lecture fut pour lui un coup de lumière. […] Mais, quel est l’ordre religieux qui ne regarde son fondateur comme l’unique lumière qui ait paru ? […] Ce magistrat avoit beaucoup de considération dans son corps : Il s’y étoit distingué par ses talens & par ses grandes lumières.

890. (1928) Quelques témoignages : hommes et idées. Tome I

Il n’est qu’un moyen de jeter une lumière plus vive sur les énergies que le peintre des mœurs s’est proposé de définir et de caractériser. […] Elle se plongeait dans Dante comme dans un fleuve de lumière, elle se parfumait dans les livres saints de l’Inde, elle se fortifiait dans les philosophes antiques. […] En faire un moment d’un esprit collectif, qui la précède, qui lui survit, qui l’ignore, c’est de nouveau la nier, elle, et les appétits de justice, de lumière, d’amour qui constituent son essence. […]  » Ce besoin qu’il y ait un sens humain à la vie humaine, cette certitude que l’obscurité actuelle où nous nous débattons s’éclairera d’une lumière consolatrice, et que nous possédons déjà des signes et des traces de cette lumière, — c’est tout Pascal. […] Est-il besoin de rappeler quelles découvertes, sur la lumière, l’électricité, la mécanique céleste, l’embryogénie, le système nerveux, elle avait dès lors à son actif et quelles perspectives elle ouvrait sur l’avenir ?

891. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre IV. Que la critique doit être écrite avec zèle, et par des hommes de talent » pp. 136-215

« Chaque siècle, dit Fontenelle, a pour ainsi dire, un certain ton d’esprit. » C’est justement ce ton d’esprit auquel s’est monté le journal français qui fera juger, plus tard, des lumières du xixe  siècle ; son œuvre accomplie, il devra s’estimer bien haut, notre siècle, s’il peut se rendre à lui-même cette justice d’avoir uni l’exactitude à la vivacité de l’esprit, l’étendue à la finesse, l’élégance à la conviction. […] Toutefois, quand Molière fut mort à son poste, quand sa veuve, femme indigne d’un si illustre et si excellent homme, eut brûlé les papiers de son mari, le Théâtre-Français eut enfin cette admirable idée qu’il fallait remettre en lumière, non pas le Don Juan, mais Le Festin de Pierre. […] Le petit ballet de L’Amour médecin a été remis en lumière une seule fois de nos jours, pour célébrer un des anniversaires de la naissance de Molière […] — La lumière purpurine qu’Hébé de son urne verse sur la froide terre, m’est revenue dès que je t’ai aimée. » Et comme ce malheureux Bragelone se trouve fort ridicule de parler ainsi, il ajoute : « C’est l’amour qui m’a d’abord enseigné les mots dorés sous l’effigie desquels les cœurs honnêtes frappent, eux aussi, leur métal massif. » Je ne sais pas si c’est là du métal massif, c’est de la lourde poésie à coup sûr. […] l’héliotrope, regardant le soleil, ne lui demande que sa lumière pour briller !

892. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « M. Andrieux »

Je crois bien qu’on s’occupe d’idées plus larges, de théories plus radicales et plus absolues ; mais il en est peut-être à ce sujet des littératures qui se décomposent, comme des corps organiques en dissolution, lesquels donnent alors accès en eux par tous les pores aux éléments généraux, l’air, la lumière, la chaleur : ces corps humains et vivants étaient mieux portants, à coup sûr, quand ils avaient assez de loisir et de discernement pour songer surtout à la décence de la démarche, aux parfums des cheveux, aux nuances du teint et à la beauté des ongles.

893. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Première partie. Préparation générale — Chapitre II. De la sensibilité considérée comme source du développement littéraire »

La bonté du cœur, la pitié, la soif de sacrifice peuvent agrandir, élargir brusquement, violemment l’esprit, et en faire jaillir quelque soudaine lumière, comme sortit un cri désespéré de la bouche de ce prince muet qui vit son père menacé d’un coup mortel.

894. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Jean Lahor (Henri Cazalis). »

Quand mon esprit aspire à la pleine lumière, Je sens tout un passé qui le tient enchaîné ; Je sens rouler en moi l’obscurité première : La terre était si sombre, aux temps où je suis né !

895. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Un grand voyageur de commerce »

Une pâle lumière verdâtre se joue sur les jeunes troupes entraînées au combat par l’exemple des aînés.

896. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — F — Fort, Paul (1872-1960) »

Les petits étouffent les plus grands, ou les plus grands écrasent… Et que c’est saint, au fond, cette lutte infinie vers la lumière !

897. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « Hartley »

Au xviiie  siècle, la plupart des phénomènes physiques s’expliquaient par des fluides : la chaleur, la lumière, l’électricité, le magnétisme et même les actions vitales.

898. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préfaces des « Odes et Ballades » (1822-1853) — Préface de 1826 »

Comparez un moment au jardin royal de Versailles, bien nivelé, bien taillé, bien nettoyé, bien ratissé, bien sablé, tout plein de petites cascades, de petits bassins, de petits bosquets, de tritons de bronze folâtrant en cérémonie sur des océans pompés à grands frais dans la Seine, de faunes de marbre courtisant les dryades allégoriquement renfermées dans une multitude d’ifs coniques, de lauriers cylindriques, d’orangers sphériques, de myrtes elliptiques, et d’autres arbres dont la forme naturelle, trop triviale sans doute, a été gracieusement corrigée par la serpette du jardinier ; comparez ce jardin si vanté à une forêt primitive du Nouveau-Monde, avec ses arbres géants, ses hautes herbes, sa végétation profonde, ses mille oiseaux de mille couleurs, ses larges avenues où l’ombre et la lumière ne se jouent que sur de la verdure, ses sauvages harmonies, ses grands fleuves qui charrient des îles de fleurs, ses immenses cataractes qui balancent des arcs-en-ciel !

899. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre X. Suite du Prêtre. — La Sibylle. — Joad. — Parallèle de Virgile et de Racine. »

Enfin, les images favorites des poètes enclins à la rêverie sont presque toutes empruntées d’objets négatifs, tels que le silence des nuits, l’ombre des bois, la solitude des montagnes, la paix des tombeaux, qui ne sont que l’absence du bruit, de la lumière, des hommes, et des inquiétudes de la vie27.

900. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre quatrième. Éloquence. — Chapitre IV. Bossuet orateur. »

Souvent aussi cette lumière de l’Église porte la clarté dans la discussion de la plus haute métaphysique, ou de la théologie la plus sublime ; rien ne lui est ténèbres.

901. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre viii »

Il écrit, dans la dédicace de l’Étang de Berre (1915) : « Ce petit livre — dit — la ville et la province — épanouies — dans le royaume — pour les progrès — du genre humain » ; dans la préface de Quand les Français ne s’aimaient pas (1916), mettant en lumière « les services rendus à la beauté et à la vérité par les hommes de sang français », il spécifie que cela doit être considéré « sans perdre un seul instant de vue que la raison et l’art ont pour objet l’universel ».

902. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXIII. Des panégyriques en vers, composés par Claudien et par Sidoine Apollinaire. Panégyrique de Théodoric, roi des Goths. »

Il devint conquérant et homme d’état, protégea Byzance, subjugua Rome, la répara et l’embellit après l’avoir conquise, joignit partout les lumières au courage, établit différents tribunaux pour juger les Italiens et les Barbares, et fit en même temps une multitude de lois sages pour réunir les deux nations divisées, à peu près comme le vainqueur de Darius eut le projet de réunir les Grecs et les Perses.

903. (1890) Causeries littéraires (1872-1888)

Il complète nos souvenirs et les ravive ; il présente en faisceau, il éclaire d’une lumière intense ce qui était épars ou à demi effacé. […] Si l’auréole n’est plus aussi radieuse, cette tête aimable, fine, aristocratique, apparaîtra encore en une assez belle et pure lumière. […] Le Midi, par l’éclat de sa lumière, par son fracas, son tumulte, ses sonorités, ses vibrations, voilà a tenté l’artiste. […] Une ombre discrète s’étend sur la catastrophe de la chute définitive et toute la lumière est portée sur les épisodes préliminaires. […] Ce ciel enflammé, cette lumière d’incendie brûlait ses yeux ; l’atmosphère embrasée pesait à son corps accablé.

904. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre I. Les origines. — Chapitre I. Les Saxons. » pp. 3-71

. —  La lumière entra. —  Il y avait une clarté dans la salle, comme lorsque du ciel,  — luit doucement — la lampe du firmament. » Alors il vit Grendel mort dans un coin de la salle, et quatre de ses compagnons, ayant soulevé avec peine la tête monstrueuse, la portèrent par les cheveux jusqu’à la maison du roi.C’est là sa première œuvre, et le reste de sa vie est pareil : lorsqu’il eut régné cinquante ans dans sa terre, un dragon dont on avait dérobé le trésor sortit de la colline et vint brûler les hommes et les maisons de l’île « avec des vagues de feu. » Alors le refuge des comtes — commanda qu’on lui fît — « un bouclier bigarré — tout de fer », sachant bien qu’un bouclier en bois de tilleul ne suffirait pas contre la flamme. « Le prince des anneaux — était trop fier — pour chercher la grande bête volante — avec une troupe,  — avec beaucoup d’hommes. —  Il ne craignait pas pour lui-même cette bataille. —  Il ne faisait point cas — de l’inimitié du ver,  — de son labeur, ni de sa valeur. » Et cependant il était triste et allait contre sa volonté, car « sa destinée était proche. » Il vit une caverne, « un enfoncement sous la terre — près de la vague de l’Océan,  — près du clapotement de l’eau,  — qui au dedans était pleine — d’ornements en relief et de bracelets. —  Il s’assit sur le promontoire,  — le roi rude à la guerre,  — et dit adieu — aux compagnons de son foyer  » ; car, quoique vieux, il voulait s’exposer pour eux, « être le gardien de son peuple. » Il cria, et le dragon vint jetant du feu ; la lame ne mordit point sur son corps, et le roi fut enveloppé dans la flamme. […] Ainsi que chacun fasse justice, s’il le peut, avant sa mort. » Regardez à côté de lui ces monstres qu’il détruit, derniers souvenirs des anciennes guerres contre les races inférieures et de la religion primitive, considérez cette vie dangereuse, ces nuits passées sur les vagues, ces efforts de l’homme aux prises avec la nature brute, cette poitrine invaincue qui froisse contre soi les poitrines bestiales, et ces muscles colossaux qui, en se tendant, arrachent aux monstres un pan de chair ; vous verrez, dans le nuage de la légende et sous la lumière de la poésie, reparaître les vaillants hommes qui, à travers les folies de la guerre et les fougues du tempérament, commençaient à asseoir un peuple et à fonder un État. […] Les cinquante rayons de lumière que chaque chose envoie tour à tour dans un esprit régulier et mesuré arrivent dans celui-ci à la fois, en une seule masse ardente et confuse, pour le bouleverser par leur saccade et leur afflux. […] Voilà qu’Orphée emmena sa femme avec lui jusqu’à ce qu’il fût venu à la borne de la lumière et de l’obscurité. […] Quand il fut arrivé à la lumière, il regarda derrière lui du côté de sa femme.

905. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre septième »

Ce qui reste d’âpreté dans les mœurs civiles, et de violence dans le gouvernement, n’y nuit pas à certains égards ; elle en tire des lumières pour éclairer les passions fortes et les situations violentes, où elle va chercher ses principales beautés. […] Louis XIV entendit prêcher Bourdaloue dix carêmes de suite, et cet esprit si droit, si capable de s’approprier les lumières d’autrui, apprit, dans ces profondes analyses de tous les états du péché, non seulement à se mieux connaître, mais à mieux connaître les autres. […] Aussi ne lit-on pas ces sermons, que Louis XIV a entendus, pour y trouver des détails de mœurs sur une époque, mais pour y voir une image de notre intérieur éclairé à jamais, dans ses profondeurs les plus reculées, par la lumière de la morale chrétienne. […] Il se servit de son caractère et de ses grandes lumières pour diriger les travaux de rassemblée de 1682 ; il se servit de sa main pour tracer les prérogatives de l’Eglise gallicane. […] La foi et les lettres doivent à cette conduite de Louis XIV les beaux travaux de l’épiscopat de Bossuet : ces prédications, ces exhortations appropriées aux auditoires les plus différents, à des enfants, à des religieuses, aux gens du monde ; ces lettres spirituelles, où la lumière qu’il jette sur les inquiétudes et les troubles obscurs de la vie dévote éclairent tant de circonstances de la vie mondaine ; deux chefs-d’œuvre d’éloquence et d’onction chrétiennes, les Elévations sur les mystères, et les Méditations sur l’Évangile.

906. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre septième. Les altérations et transformations de la conscience et de la volonté — Chapitre deuxième. Troubles et désagrégations de la conscience. L’hypnotisme et les idées-forces »

À l’influence que peut exercer ridée même du sommeil hypnotique, on oppose les exemples si fréquents de sommeil provoqué par une vive lumière jaillissant à l’improviste, par un coup de gong, par la vibration d’un diapason, etc. […] C’est ce que Bertrand avait déjà fait observer ; c’est ce que Lehmann a mis en pleine lumière. […] La petite lumière de l’étoile qui, en plein jour, ne se laissait point voir, redevient visible dans cette nuit ; de plus, il n’y brille que l’étoile évoquée par la parole de l’hypnotiseur. […] Un phénomène d’éclairage intérieur fait monter à la lumière les éléments perdus dans l’ombre, rentrer dans l’ombre les éléments d’abord lumineux. […] On découvrira que la conscience prend une foule de formes et de directions, comme le mouvement revêt une foule de figures dans l’espace : elle est tantôt sensation de lumière, tantôt sensation de chaleur, tantôt faim ou soif, tantôt volition.

907. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. LEBRUN (Reprise de Marie Stuart.) » pp. 146-189

Lebrun est un succès de parti, une victoire des lumières sur les préjugés. […] La première scène du troisième acte, quand Marie, échappée dans le jardin, se ressaisit du jour et de la libre lumière, fut admirée de tous pour l’expression. […] Alceste mourante, dans Euripide, s’écriait : « O soleil, ô lumière du jour, ô nuages qui roulez sur nos têtes !

908. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre I. Succès de cette philosophie en France. — Insuccès de la même philosophie en Angleterre. »

Talent unique, le plus rare en un siècle classique, le plus précieux de tous, puisqu’il consiste à se représenter les êtres, non pas à travers le voile grisâtre des phrases générales, mais en eux-mêmes, tels qu’ils sont dans la nature et dans l’histoire, avec leur couleur et leur forme sensibles, avec leur saillie et leur relief individuels, avec leurs accessoires et leurs alentours dans le temps et dans l’espace, un paysan à sa charrue, un quaker dans sa congrégation, un baron allemand dans son château, des Hollandais, des Anglais, des Espagnols, des Italiens, des Français chez eux469, une grande dame, une intrigante, des provinciaux, des soldats, des filles470, et le reste du pêle-mêle humain, à tous les degrés de l’escalier social, chacun en raccourci et dans la lumière fuyante d’un éclair. […] Sous cette lumière subite, la vraie figure, difforme, odieuse ou plate, apparaît ; nous haussons les épaules. […] Voilà l’avantage de ces génies qui n’ont pas l’empire d’eux-mêmes : le discernement leur manque, mais ils ont l’inspiration ; parmi vingt œuvres fangeuses, informes ou malsaines, ils en font une qui est une création, bien mieux une créature, un être animé, viable par lui-même, auprès duquel les autres, fabriqués par les simples gens d’esprit, ne sont que des mannequins bien habillés  C’est pour cela que Diderot est un si grand conteur, un maître du dialogue, en ceci l’égal de Voltaire, et, par un talent tout opposé, croyant tout ce qu’il dit au moment où il le dit, s’oubliant lui-même, emporté par son propre récit, écoutant des voix intérieures, surpris par des répliques qui lui viennent à l’improviste, conduit comme sur un fleuve inconnu par le cours de l’action, par les sinuosités de l’entretien qui se développe en lui à son insu, soulevé par l’afflux des idées et par le sursaut du moment jusqu’aux images les plus inattendues, les plus burlesques ou les plus magnifiques, tantôt lyrique jusqu’à fournir une strophe presque entière à Musset480, tantôt bouffon et saugrenu avec des éclats qu’on n’avait point vus depuis Rabelais, toujours de bonne foi, toujours à la merci de son sujet, de son invention et de son émotion, le plus naturel des écrivains dans cet âge de littérature artificielle, pareil à un arbre étranger qui, transplanté dans un parterre de l’époque, se boursoufle et pourrit par une moitié de sa tige, mais dont cinq ou six branches, élancées en pleine lumière, surpassent tous les taillis du voisinage par la fraîcheur de leur sève et par la vigueur de leur jet.

909. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Introduction. » pp. -

Voilà un nouveau monde, monde infini, car chaque action visible traîne derrière soi une suite infinie de raisonnements, d’émotions, de sensations anciennes ou récentes, qui ont contribué à la soulever jusqu’à la lumière, et qui, semblables à de longues roches profondément enfoncées dans le sol, atteignent en elle leur extrémité et leur affleurement. […] Ce qu’on appelle la race, ce sont ces dispositions innées et héréditaires que l’homme apporte avec lui à la lumière, et qui ordinairement sont jointes à des différences marquées dans le tempérament et dans la structure du corps. […] J’ai tâché de définir ces ressorts primitifs, d’en montrer les effets graduels, d’expliquer comment ils ont fini par soulever jusqu’à la lumière les grandes œuvres politiques, religieuses, littéraires, et de développer le mécanisme intérieur par lequel le Saxon barbare est devenu l’Anglais que nous voyons aujourd’hui.

910. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIIIe entretien. Poésie lyrique. David (2e partie) » pp. 157-220

Et nous, nous disons : Jéhovah, fais luire sur nous la lumière de ta face. […] « Que ces pervers se fondent comme la pluie, comme le limaçon qui se fond en traînant sur la terre humide, comme l’avorton né avant terme et qui n’a pas vu la lumière ! […] Cette mer réfléchit là-bas les rayons du soir dans ses eaux pesantes et opaques comme une épaisse glace de Venise qui donne une teinte mate et plombée à la lumière.

911. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXIIIe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (4e partie) » pp. 1-63

Elle leur donna beaucoup de lumières, beaucoup de principes, beaucoup de calcul. […] Elle lui laissait la lumière du coup d’œil et le sang-froid du commandement. […] Il ne lui demandait ni plus de lumière, ni plus d’éclat.

912. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXVe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (4e partie) » pp. 429-500

À certaines époques de l’année, et dans certains recoins ouverts au soleil, les arbres et l’air fourmillent joyeusement d’oiseaux et d’insectes qui boivent la vie avec ivresse ; la chaleur, la lumière, une alimentation facile et abondante, animent et surexcitent ces multitudes. […] On poursuit sa route et l’on retrouve enfin la lumière du jour, mais on la retrouve dans le ciel. […] Lisez et comprenez cette préface d’un autre Cosmos : « Je crois même que la question de la vie et des destinées humaines ne peut être bien résolue que par les enchaînements de la vie universelle dont elle fait partie : une même lumière logique, éclairant et fécondant ce vaste ensemble, sera la plus saisissante des preuves pour l’esprit humain.

913. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXIIe entretien. Chateaubriand, (suite.) »

En regardant les lumières qui brillaient dans la demeure des hommes, je me transportais par la pensée au milieu des scènes de douleur et de joie qu’elles éclairaient, et je songeais que, sous tant de toits habités, je n’avais pas un ami. […] Les chambres étaient à peine éclairées par la faible lumière qui pénétrait entre les volets fermés ; je visitai celle où ma mère avait perdu la vie en me mettant au monde, celle où se retirait mon père, celle où j’avais dormi dans mon berceau, celle enfin où l’amitié avait reçu mes premiers vœux dans le sein d’une sœur. […] Une petite lumière paraissait à la fenêtre grillée.

914. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Edgar Allan Poe  »

Sur le pâle buste de Pallas, juste au-dessus de la porte de ma chambre ; Et ses yeux ont toute la semblance de ceux d’un démon qui rêve, Et la lumière de la lampe glissant sur lui, jette son ombre sur le sol ; Et mon âme hors de cette ombre qui gît flottante sur le sol, Ne sera soulevée, jamais plus, En ces artifices, les plus apparents, Poe se montre l’homme de toutes les ruses littéraires, habile à composer et à stiller d’une main sûre la délicate émotion qui transporte le lecteur hors de lui-même, et le charme en une vie étrangère plus intense et plus belle. […] Et le corbeau sans voleter, siège encore, — siège encore, sur le buste, pallide de Pallas, juste au-dessus de la porte de ma chambre, et ses yeux ont toute la semblance des yeux d’un démon qui rève, et la lumière de la lampe ruisselant sur lui, projette, son ombre à terre ; et mon âme, de cette ombre qui gît flottante à terre, ne s’élèvera jamais plus 8. […] De même que chaque artiste aperçoit plus vivement et conserve plus obstinément dans la mémoire, certaines formes, certains êtres, certains ensembles, et, de ces spectacles, un caractère spécifique et abstrait, que Michel-Ange avait l’âme pleine de torsions de muscles, Rembrandt de dégradations de lumières, Beethoven de rythmes héroïques, Poe dut accumuler en lui tous les objets de l’épouvante humaine.

915. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Taine » pp. 305-350

Il ajoute même à celles qui, comme le diamant, sont le plus en possession de la lumière. […] Sa terrible face d’avare, morte à tout, s’illumine au feu de ces pierres qu’il tourne et retourne dans ses mains tremblantes et habiles pour en attiser mieux la flamme, pour les épuiser, s’il le pouvait, de leur lumière, et alors, sa physionomie devient sublime. […] Pour peu que le cerveau ne soit pas imbécile, la métaphysique est le milieu, dans la tête humaine, par lequel tous les faits sont obligés de passer pour se teindre des reflets qui sont les conditions de leur lumière.

916. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Gustave Flaubert »

Il n’y a pas jusqu’au cochon de la légende, dans lequel le symbolisme profond du Moyen Âge voyait la personnification des vices de l’humanité qui traînent encore derrière le talon des plus saints dans leur sillon de lumière, où la légion des farceurs, qui est éternelle, ne vît je ne sais quelles sales et sottes analogies entre ce porc, gris ou noir, encapuchonné de ses oreilles et baissant humblement son groin vers la terre, et le moine qu’il accompagnait et qu’il fallait bien (histoire de rire !) […] Après le vigoureux hoquet panthéiste à travers lequel saint Antoine s’écrie qu’il « voudrait se mêler à tout, voler, nager, aboyer, beugler, hurler, souffler de la fumée, avoir une carapace, porter une trompe, s’émanier avec les odeurs, couler comme l’eau, se développer comme la plante, briller comme la lumière, pénétrer les atomes, Être la matière » , tout à coup, on ne sait pourquoi, le ciel se découvre dans les nuages d’or, « et on voit dans le disque même du soleil la figure rayonnante de Jésus-Christ ». […] Henri Monnier et Balzac se sont moqués des affectations et des ridicules des bourgeois, mais ils ne les ont pas bernés dans leur désir, qui n’est pas bête, de s’élever dans la lumière sociale et scientifique de leur temps.

917. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « De la poésie de la nature. De la poésie du foyer et de la famille » pp. 121-138

Il voit autour de lui tout périr, tout changer ; À la race nouvelle il se trouve étranger, Et lorsqu’à ses regards la lumière est ravie, Il n’a plus en mourant à perdre que la vie. […] Si l’on ajoute aux huit vers cités par Mme Du Deffand et qui sont du chant de L’Automne, quelques vers assez beaux peignant les jours caniculaires de L’Été et cet accablement qui pèse alors sur tous les corps mortels : Tout est morne, brûlant, tranquille, et la lumière Est seule en mouvement dans la nature entière, on aura présent à l’esprit à peu près tout ce qu’il y a d’un peu remarquable pour nous dans ce poème si fort vanté à sa naissance et aujourd’hui tout entier passé.

918. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Histoire de Louvois et de son administration politique et militaire, par M. Camille Rousset, professeur d’histoire au lycée Bonaparte. (Suite et fin) »

Ce qu’on a appelé ses Œuvres et ses Mémoires, et qui ont été remis en lumière récemment47, nous le montrent dès 1661, et dans les années qui précédent la guerre de 1667, déjà formé par l’âme et le caractère. […] Il est mort comme il avait vécu, en vue de tous et en toute lumière, conservant jusqu’à la fin sa noblesse de sentiments, sa droiture d’esprit, sa langue parfaite et royale.

919. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Maurice et Eugénie de Guérin. Frère et sœur »

Aujourd’hui c’est une seconde édition plus complète qui se publie et qui, se joignant au Journal et aux Lettres de Mme Eugènie de Guérin, sœur aînée du poète et morte elle-même peu de temps après lui, vient montrer quel couple poétique distingué c’était que ce frère et cette sœur : — lui, le noble jeune homme « d’une nature si élevée, rare et exquise, d’un idéal si beau qu’il ne hantait rien que par la poésie » ; — elle la noble fille au cœur pur ; à l’imagination délicate et charmante, à la croyance vaillante et ferme ; toute dévouée à ce frère qu’elle adorait, qu’elle admirait : et que, sans le savoir ; elle surpassait peut-être ; qu’elle craignait sans cesse devoir s’égarer aux idées et aux fausses lumières du monde ; qu’elle fût heureuse de ramener au bercail dans les heures dernières ; qu’elle passa plusieurs années à pleurer, à vouloir rejoindre, et dont elle aurait aimé cependant, avant de partir, à dresser elle-même de ses mains le terrestre monument. […] Jamais je n’ai vu de plus bel effet de lumière sur le papier, à travers des arbres en peinture.

920. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Le père Lacordaire. Les quatre moments religieux au XIXe siècle, (suite et fin.) »

Mais, auparavant, constatons bien un fait qui est à l’honneur du XIXe siècle, et que le même homme d’esprit déjà cité (l’abbé de Pradt), et qui avait plus de lumières que de gravité et d’autorité, proclamait en 1818, à la veille même du règne de la Congrégation, quand il disait en y insistant : « Jamais la France ne fut plus religieuse qu’à l’époque actuelle87. » Ou du moins, si c’était beaucoup dire, on pouvait se rabattre à ceci : la France n’était nullement impie et irréligieuse ; elle était indifférente ou plutôt sympathique et favorablement disposée, toutes les fois que des excès ne venaient pas l’irriter, et c’est en cela qu’elle se séparait nettement de la France du XVIIIe siècle. […] Et comment aurait-il paru, aux yeux de l’opinion, se séparer le moins du monde de ces inspirateurs funestes, lorsque lui-même, par des projets insensés tels que celui de la loi du sacrilège, venait porter un défi aux lumières et à l’humanité de l’époque ?

921. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette (suite et fin.) »

La suite de ce riche présent historique, dont on ne saurait trop le remercier, la marche même de la publication, nous obligera à revenir plus d’une fois sur les personnages et les événements qui y gagnent en lumière. […] Taschereau dans la Revue rétrospective en 1835 ; la Correspondance de Mirabeau et du comte de La Marck, publiée par M. de Bacourt en 1851, avait achevé de mettre le personnage et le caractère du comte de Mercy en pleine lumière.

922. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Mlle Eugénie de Guérin et madame de Gasparin, (Suite et fin.) »

Quand elle parle d’un tapis de vert uniforme « où s’emboit la lumière », des profondeurs d’un vert intense « où s’emboit le soleil », c’est-à-dire où il est tout entier absorbé, sans laisser jour ni reflet à aucune des nuances du prisme, il y a certainement une intention : ne se marque-t-elle pas trop expressément ? […] Lorsque les lèvres de la religieuse s’entrouvrent, elles laissent passer un mot court, une sorte de note monotone, comme le bruit d’une goutte d’eau qui tomberait à intervalles réguliers des parois de quelque grotte humide dans cette flaque qui n’a jamais réfléchi la lumière. » Je ne sais si l’habitude que nous autres catholiques avons des couvents m’abuse, mais il me semble qu’il y a dans cette peinture minutieuse, étonnée et un peu effrayée, de l’émerveillement naïf et un peu d’exagération.

923. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Idées et sensations : par MM. Edmond et Jules de Goncourt. »

Le ciel est bleu pâle, d’un bleu presque vert, comme si une émeraude y était fondue ; là-dessus marchent doucement, d’une marche harmonieuse et lente, des masses de petits nuages balayés, ouateux et déchirés, d’un violet aussi tendre que des fumées dans un soleil qui se couche ; quelques-unes de leurs cimes sont roses, comme des hauts de glacier, d’un rose de lumière. […] Ils sont bien des hommes de la fin du xviiie  siècle en cela ; mais ils sont tout à fait des artistes du xixe   par les touches successives du tableau et les nuances à l’infini : « Se trouver, en hiver, dans un endroit ami, entre des murs familiers, au milieu de choses habituées au toucher distrait de vos doigts, sur un fauteuil fait à votre corps, dans la lumière voilée de la lampe, près de la chaleur apaisée d’une cheminée qui a brûlé tout le jour, et causer là à l’heure où l’esprit échappe au travail et se sauve de la journée ; causer avec des personnes sympathiques, avec des hommes, des femmes souriant à ce que vous dites ; se livrer et se détendre ; écouter et répondre ; donner son attention aux autres ou la leur prendre ; les confesser ou se raconter ; toucher à tout ce qu’atteint la parole ; s’amuser du jour, juger le journal, remuer le passé comme si l’on tisonnait l’histoire ; faire jaillir, au frottement de la contradiction adoucie d’un : Mon cher, l’étincelle, la flamme, ou le rire des mots ; laisser gaminer un paradoxe, jouer sa raison, courir sa cervelle ; regarder se mêler ou se séparer, sous la discussion, le courant des natures et des tempéraments ; voir ses paroles passer sur l’expression des visages, et surprendre le nez en l’air d’une faiseuse de tapisserie ; sentir son pouls s’élever comme sous une petite fièvre et l’animation légère d’un bien-être capiteux ; s’échapper de soi, s’abandonner, se répandre dans ce qu’on a de spirituel, de convaincu, de tendre, de caressant ou d’indigné ; jouir de cette communication électrique qui fait passer votre idée dans les idées qui vous écoutent ; jouir des sympathies qui paraissent s’enlacer à vos paroles et pressent vos pensées comme avec la chaleur d’une poignée de main : s’épanouir dans cette expansion de tous et devant cette ouverture du fond de chacun ; goûter ce plaisir enivrant de la fusion et de la mêlée des âmes, dans la communion des esprits : la conversation, — c’est un des meilleurs bonheurs de la vie, le seul peut-être qui la fasse tout à fait oublier, qui suspende le temps et les heures de la nuit avec son charme pur et passionnant.

924. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre troisième. Les sensations — Chapitre premier. Les sensations totales de l’ouïe et leurs éléments » pp. 165-188

Telles sont les sensations de contact, de pression, de chatouillement, qui ordinairement s’éveillent en nous lorsqu’un corps extérieur touche d’une certaine façon certaines portions de notre corps ; telles sont les sensations de température qui se produisent lorsqu’un certain degré de chaleur est ajouté ou ôté à notre température propre ; telles sont les sensations d’activité musculaire, ainsi nommées parce qu’elles nous avertissent de la tension ou du relâchement de nos muscles ; telles sont enfin les sensations excitées en nous par les particules liquides d’un objet que nous goûtons, par les particules volatiles d’un objet que nous flairons, par les vibrations de l’air qui frappe notre appareil acoustique, par les vibrations de la lumière qui frappe notre appareil optique, et qu’on nomme ordinairement sensations de saveur, d’odeur, de son et de couleur. […] La chose est bien plus visible encore si l’on compare entre elles, non plus deux sensations différentes du même sens, mais les sensations de deux sens différents, même lorsqu’elles sont produites par la même cause extérieure, par exemple le chatouillement de la peau et le son produit par les mêmes vibrations de l’air, la sensation de douleur et le cercle lumineux produit par la même compression de l’œil, les sensations de lumière éclatante, de son sifflant, de choc ou de picotement, produites par la même électricité appliquée aux différents sens.

925. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVe entretien. Littérature grecque. L’Iliade et l’Odyssée d’Homère » pp. 31-64

Son berceau fut placé au bord de la mer enchantée qui sépare l’Asie Mineure de la Grèce, en face de Chio et de l’Archipel, point de vue le plus ravissant où l’œil d’un homme puisse s’ouvrir à la lumière. […] Après qu’il eut expiré sur cette plage, au bord des flots, comme un naufragé de la vie, l’enfant qui servait de lumière à ses pas, ses compagnons, les habitants de la ville et les pêcheurs de la côte lui creusèrent une tombe dans le sable, à la place même où il avait voulu mourir.

926. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Le père Monsabré »

On entre et tout de suite on se sent enveloppé de mystère, de paix, de demi-ténèbres très douces éclairées par les pierres précieuses des vitraux, d’où semble rayonner une lumière qui leur est propre. […] Malgré tout, cette lamentation lointaine qui recommence, cette lumière tamisée venant on ne sait d’où, cette ombre douce et solennelle, cela berce et caresse l’âme à la faire pleurer.

927. (1829) De la poésie de style pp. 324-338

* * * Ceux qui redoutent les lumières comme un danger pour les peuples ressemblent aux personnes qui craignent que la foudre ne tombe sur une maison par les fenêtres, tandis qu’elle ne pénètre jamais à travers les carreaux, mais par leur encadrement de plomb ou par le trou des cheminées qui fument. […] Newton se comparant dans ses Mémoires à un enfant qui ramasse des coquillages au bord du grand océan de la vérité n’est pas différent de Newton écrivant dans une formule algébrique les mouvements des corps célestes ou les lois de la lumière.

928. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Discours sur l’histoire de la révolution d’Angleterre, par M. Guizot (1850) » pp. 311-331

Des faits récents ont mis cette dernière vérité en lumière. […] Guizot en conclut que, sous toutes les formes de gouvernement, qu’il s’agisse d’une monarchie ou d’une république, d’une société aristocratique ou démocratique, la même lumière brille dans les faits ; le succès définitif ne s’obtient, dit-il, qu’au nom des mêmes principes et par les mêmes voies.

929. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « M. de Féletz, et de la critique littéraire sous l’Empire. » pp. 371-391

Cet homme de collège et de théâtre, ce vieux professeur qui avait près de soixante ans quand le xviiie  siècle expira, n’avait, à aucun moment, été ébloui par les lumières de ce siècle brillant. […] Il s’agissait de les restaurer et de les Remettre en lumière, à leur place, au-dessus de l’auteur de Mérope et de Zaïre.

930. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Mme du Châtelet. Suite de Voltaire à Cirey. » pp. 266-285

La mission de Voltaire, à ce moment, était de naturaliser en France les idées anglaises, les principes philosophiques qu’il avait puisés dans la lecture de Locke, dans la société de Bolingbroke ; mais surtout, ayant apprécié la solidité et l’immensité de la découverte de Newton, et rougissant de voir la France encore amusée à de vains systèmes, tandis que la pleine lumière régnait ailleurs, il s’attacha à propager la vraie doctrine de la connaissance du monde, à laquelle il mêlait des idées de déisme philosophique. […] Au fond, il aime mieux (et elle le sait bien) donner jour à sa Métaphysique et la produire en lumière, que de la sacrifier sans bruit à l’amour et au bon sens : c’est bien là l’homme de lettres dans sa vérité de nature.

931. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Les Confessions de J.-J. Rousseau. (Bibliothèque Charpentier.) » pp. 78-97

Les mots, en ce chef-d’œuvre de l’art, ont pris une magie nouvelle ; ce sont des mots pleins de lumière et d’harmonie. […] S’il lui manque par moments une plus chaude lumière et les clartés d’Italie ou de la Grèce ; si, comme autour de ce beau lac de Genève, la bise vient quelquefois refroidir l’air, et si quelque nuage jette tout à coup une teinte grisâtre aux flancs des monts, il y a des jours et des heures d’une limpide et parfaite sérénité.

932. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Vauvenargues. (Collection Lefèvre.) » pp. 123-143

Mais lorsque, malgré la fortune et malgré ses propres défauts, j’apprends que son esprit a toujours été occupé de grandes pensées, et dominé par les passions les plus aimables, je remercie à genoux la Nature de ce qu’elle a fait des vertus indépendantes du bonheur, et des lumières que l’adversité n’a pu éteindre. […] On ne voit pas qu’il ait été occupé des femmes dans les années où il écrit, et le peu qu’il en dit nous montre un homme revenu : « Les femmes ne peuvent comprendre, dit-il, qu’il y ait des hommes désintéressés à leur égard. » Il semble que, brisé avant l’âge par les maladies, il se soit retranché sur ce point jusqu’aux regrets stériles : « Ceux qui ne sont plus en état de plaire aux femmes et qui le savent, s’en corrigent. » Sans être insensible aux lumières de son temps et sans y fermer les yeux, il était loin de s’en exagérer l’importance, et il se préoccupait du perfectionnement moral intérieur, bien plus que de cette perfectibilité générale à laquelle il est si commode de croire et de s’abandonner.

933. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Nouveaux documents sur Montaigne, recueillis et publiés par M. le docteur Payen. (1850.) » pp. 76-96

Ce n’est pas un siècle doux ni qu’on puisse appeler un siècle de lumières, c’est un âge de lutte et de combats. […] « Qui ne me voudra savoir gré, dit-il, de l’ordre, de la douce et muette tranquillité qui a accompagné ma conduite, au moins ne peut-il me priver de la part qui m’en appartient par le titre de ma bonne fortune. » Et il est inépuisable à peindre en expressions vives et légères ce genre de services effectifs et insensibles qu’il croit avoir rendus, bien supérieurs à des actes plus bruyants et plus glorieux : « Ces actions-là ont bien plus de grâce qui échappent de la main de l’ouvrier nonchalamment et sans bruit, et que quelque honnête homme choisit après, et relève de l’ombre pour les pousser en lumière à cause d’elles-mêmes. » Ainsi la fortune servit à souhait Montaigne, et, même dans sa gestion publique, en des conjonctures si difficiles, il n’eut point à démentir sa maxime et sa devise, ni à trop sortir du train de vie qu’il s’était tracé : « Pour moi, je loue une vie glissante, sombre et muette. » Il arriva au terme de sa magistrature, à peu près satisfait de lui-même, ayant fait ce qu’il s’était promis, et en ayant beaucoup plus fait qu’il n’en avait promis aux autres.

934. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « De la poésie et des poètes en 1852. » pp. 380-400

C’est la gravité solennelle d’un paysage du Poussin, avec plus de lumière : MIDI. […] ce soleil te parle en lumières sublimes ; Dans sa flamme implacable absorbe-toi sans fin ; Et retourne à pas lents vers les cités infimes, Le cœur trempé sept fois dans le néant divin !

935. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — I. » pp. 186-205

Cependant il revient peu à peu de ce coup d’électricité ; il s’oriente, il choisit et discerne entre les objets de sa recherche : « Dans les commencements je ne voyais Rome qu’à travers un brouillard pétrifié ; aujourd’hui c’est un nuage qui laisse échapper quelques traits de lumière. » C’est en se dirigeant particulièrement vers son objet principal, les médailles, qu’il réussit à augmenter peu à peu son trésor. […] On était en même temps surpris de voir tant de lumières avec tant de simplicité.

936. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Marguerite, reine de Navarre. Ses Nouvelles publiées par M. Le Roux de Lincy, 1853. » pp. 434-454

Item, ce jour même 13 septembre 1515, entre sept et huit heures du soir, fut vu en plusieurs lieux en Flandres un flambeau de feu de la longueur d’une lance, et semblait qu’il dût tomber sur les maisons ; mais il était si clair que cent torches n’eussent rendu si grande lumière. […] Le beau moment est celui où, par une inclinaison soudaine de la saison, les lumières et l’esprit se répandant tout d’un coup d’une manière plus riche et plus égale sur toute une génération d’esprits vigoureux, l’on revient vivement au naturel et où l’on peut s’y abandonner sans contrainte.

937. (1824) Discours sur le romantisme pp. 3-28

Ce qu’en un siècle de barbarie, avaient fait Shakespeare et Lope de Vega, l’un par ignorance et l’autre par nécessité, les Allemands, à une époque de lumières universelles, le firent avec choix et systématiquement. […] Peignez surtout le cœur humain, mais sans recherche et sans exagération : c’est un abîme, dit-on ; portez-y la lumière, au lieu d’en épaissir les ténèbres ; soyez-en les observateurs, les historiens, les romanciers : mais n’en soyez pas les Lycophrons et les Sphinx.

938. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre VI. Daniel Stern »

Elle a étudié âprement Hegel et Fuerbach, Elle a déformé les lignes d’un front de camée à écraser tous ces œufs d’autruche, comme disait dans son dédain Joubert, cet amoureux de la lumière. […] « Je ne pense pas mal de l’espèce humaine, nous dit-elle, car je la crois plus abusée que perverse : je la plains plus que je ne la condamne, car je la vois toujours rectifiant de plus en plus ses erreurs et redressant ses voies à mesure que s’étendent ses lumières et que s’exerce dans de plus vastes limites sa liberté. » On l’entend : c’est la ritournelle du progrès chantée aux bornes sur toutes les orgues de Barbarie philosophiques.

939. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Édelestand du Méril »

J’ai souvent pensé que la critique devait ressembler à une maîtresse de maison qui a du tact et qui sait placer ses convives, disant à ceux-là qui se pressent un peu trop autour d’elle et qui croient y rester : « Descendez plus bas… » vers la porte ; et à ceux qui, plus modestes, se tiennent dans les coins de la salle : « Montez plus haut… » à la place d’honneur et dans la lumière. De la lumière !

940. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Charles Baudelaire  »

— que le haschisch invoque toujours des magnificences de lumière, des splendeurs glorieuses, des cascades d’or liquide ; toute lumière lui est bonne, celle qui ruisselle en nappes et celle qui s’accroche comme du paillon aux pointes et aux aspérités, les candélabres des salons, les cierges du mois de Marie, les avalanches de rose dans les couchers de soleil (image neuve !). 

941. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre II : M. Royer-Collard »

. — Les fleuves ne remontent pas vers leur source ; les événements accomplis ne rentrent pas dans le néant. » Il disait à la Sorbonne : « A mesure que la réflexion retire la causalité que l’ignorance avait répandue sur les objets, les volontés locales, exilées du monde matériel, sont successivement rassemblées et concentrées par la raison en une volonté unique, source commune de toutes les volontés contingentes, cause première et nécessaire que la pensée de l’homme affirme sans la connaître, et dont elle égale le pouvoir à l’étendue, à la magnificence, à l’harmonie des effets qu’elle produit sous nos yeux. » Il invente des expressions superbes, qu’on n’oublie plus, images puissantes qui condensent sous un jet de lumière de longues suites d’abstractions obscures. […] » Là-dessus, il continue notant, décomposant, comparant, tirant les conséquences pendues au bout de ses syllogismes, curieux de savoir ce que du fond du puits il ramène à la lumière, mais indifférent sur la prise, uniquement attentif à ne pas casser la chaîne et à remonter le seau bien plein.

942. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre III : M. Maine de Biran »

« Il avait, dit-il lui-même, une pente naturelle vers les choses d’observation intérieure »… Il suivait « une lumière intérieure, un esprit de vérité qui luit dans les profondeurs de l’âme et dirige l’homme méditatif appelé à visiter ces galeries souterraines… Cette lumière n’est pas faite pour le monde, car elle n’est appropriée ni au sens externe ni à l’imagination ; elle s’éclipse ou s’éteint même tout à fait devant cette autre espèce de clarté des sensations et des images ; clarté vive et souvent trompeuse qui s’évanouit à son tour en présence de l’esprit de vérité. » Ainsi occupé, et ses regards concentrés sur lui-même, il avait fini, comme les philosophes indiens, par isoler et constituer à part, du moins à ses propres yeux, son être intérieur et sa volonté active.

943. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre X : M. Jouffroy psychologue »

Jouffroy dans une lumière éclatante. […] Ce n’est pas assez de lui fournir sa lumière ; il faut encore l’appliquer sur son objet.

944. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXVI. Des oraisons funèbres et des éloges dans les premiers temps de la littérature française, depuis François Ier jusqu’à la fin du règne de Henri IV. »

Il entrevit ces principes étouffés tour à tour par l’ignorance et par l’orgueil, qu’il n’y a ni législation, ni politique sans lumières ; que ceux qui éclairent l’humanité, sont les bienfaiteurs des rois comme des peuples ; que l’autorité de ceux qui commandent n’est jamais plus forte que lorsqu’elle est unie à l’autorité de ceux qui pensent ; que le défaut de lumière, en obscurcissant tout, a quelquefois rendu tous les droits douteux, et même les plus sacrés, ceux des souverains ; qu’un peuple ignorant devient nécessairement ou un peuple vil et sans ressort, destiné à être la proie du premier qui daignera le vaincre ; ou un peuple inquiet et d’une activité féroce ; que des esclaves qui servent un bandeau sur les yeux, en sont bien plus terribles, si leur main vient à s’armer, et frappe au hasard ; qu’enfin, tous les princes qui avant lui avaient obtenu l’estime de leur siècle et les regards de la postérité, depuis Alexandre jusqu’à Charlemagne, depuis Auguste jusqu’à Tamerlan, né Tartare et fondateur d’une académie à Samarcande, tous dédaignant une gloire vile et distribuée par des esclaves ignorants, avaient voulu avoir pour témoins de leurs actions des hommes de génie, et relever partout la gloire du trône par celle des arts.

945. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Sur Adolphe de Benjamin Constant » pp. 432-438

Il avait, comme publiciste, des lumières, des doctrines ou des théories libérales et généreuses, des accès et comme des poussées d’enthousiasme : tout cela ne tenait pas dans le particulier ; esprit aiguisé, blasé, singulièrement flétri de bonne heure par je ne sais quel souffle aride, il se raillait lui-même, il se persiflait, lui et les autres, par une sorte d’ironie fine, continuelle, insaisissable, qui allait à dessécher les sentiments et les affections en lui et autour de lui.

946. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. Laurent (de l’Ardèche) : Réputation de l’histoire de France de l’abbé de Montgaillard  »

Osons avouer toutefois que, malgré le silence prolongé de ses adversaires, la querelle ne nous paraîtras définitivement vidée, qu’elle renaîtra probablement d’ici avant peu, moins prématurée et moins inégale, et qu’il en jaillira à coup sûr pour tout le monde de nouvelles et vives lumières sur les grandes questions sociales.

947. (1874) Premiers lundis. Tome II « Mort de sir Walter Scott »

Les grands hommes ne leur manqueront pas, elles peuvent le croire ; l’âge brillant des poëtes n’est peut-être pas fermé encore ; l’infatigable humanité n’a peut-être pas épuisé tous ses génies ; mais, en laissant à la Providence le soin de susciter les génies en leur temps, les générations nouvelles, en présence de ces tombes glorieuses dont elles sont appelées à sceller les pierres, doivent y contracter le saint engagement de ne pas s’arrêter dans la route de la civilisation et des lumières bienfaisantes, de rester probes, sincères, amies de tout progrès, de toute liberté, de toute justice.

948. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Rêveries sur un empereur »

Or  et nous entrons ici dans le rêve  que pourrait-on attendre aujourd’hui d’un monarque absolu qui, un siècle après la Révolution, aurait, au fond, la même notion du pouvoir royal et le même genre de sérieux et de bonne volonté que les rois-prêtres de jadis, qu’un Philippe-Auguste, un Louis IX ou un Charles V, et qui, jeté dans un monde totalement différent du leur, joindrait à cela les lumières auxquelles est parvenue, depuis ces grands princes, la conscience de l’humanité ?

949. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Les derniers rois »

Ma fille, que j’aimais tendrement, avait le tort de donner dans une dévotion outrée ; et cela n’était point pour plaire à un peuple jeune et généreux, qui commence à s’affranchir de la superstition et chez qui les lumières de la philosophie se répandent de jour en jour.

950. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Heredia, José Maria de (1842-1905) »

Leconte de Lisle, son maître, serait plutôt la lumière ; — et je ne crois pas que jamais vers aient mieux rendu que les siens la diversité des époques ou le changeant décor des lieux.

951. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Merrill, Stuart (1863-1915) »

Ce qui frappe en Stuart Merrill, après la lumière dont il inonde son vers, c’est le sens du légendaire avec le don de suggérer.

952. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Silvestre, Armand (1837-1901) »

Dans les murmures de la création, il écoute le chant des morts, dont il sent passer l’âme dans l’air qu’il respire, dans la lumière si douce et pure, par les matins où se fleurissent les prés de toutes les couleurs du printemps.

953. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Sully Prudhomme (1839-1907) »

Ferdinand Brunetière Sully Prudhomme a éclairé d’une lumière nouvelle, dont le charme est fait de ce qu’elle a d’incertain et de rapide, « notre cœur faible et sombre ».

954. (1911) La valeur de la science « Introduction »

Autant demander si celui qui a vu, peut devenir aveugle et ne pas sentir la nostalgie de la lumière.

955. (1911) La valeur de la science « Deuxième partie : Les sciences physiques — Chapitre VII. L’Histoire de la Physique mathématique. »

Le plus remarquable exemple de cette nouvelle Physique Mathématique est sans contredit la théorie électro-magnétique de la Lumière de Maxwell.

956. (1882) Qu’est-ce qu’une nation ? « I »

L’investigation historique, en effet, remet en lumière les faits de violence qui se sont passés à l’origine de toutes les formations politiques, même de celles dont les conséquences ont été le plus bienfaisantes.

957. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Jean-Baptiste Rousseau et M. de Voltaire. » pp. 47-58

Aussitôt qu’il eut achevé l’ouvrage, il se fit un devoir de l’envoyer à celui dont il ambitionnoit le suffrage, & dont il croyoit la critique & les lumières sûres.

958. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Le voltairianisme contemporain »

— leur défaille contre ce monstre de fausse lumière, à qui rien n’a défailli contre Dieu, et qui fit oublier une fois dans toute sa vie au grand de Maistre, monté ce jour-là à la hauteur d’un courroux de prophète, que le mépris est la colère du gentilhomme.

959. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXII. Des éloges des hommes illustres du dix-septième siècle, par Charles Perrault. »

Perrault que l’on ne connaîtrait point, si on ne le connaissait que par l’humeur, les épigrammes et la prose de Boileau, est un des hommes du siècle de Louis XIV qui contribua le plus à honorer et à faire respecter les lettres ; au lieu de les avilir par la satire, il les soutint par son crédit : ses lumières et sa probité l’avaient rendu l’ami de Colbert.

960. (1888) Impressions de théâtre. Première série

» du « puits sombre d’Iran », de trèfles de lumière reflétés sur les murs, d’yataghans, de minarets, de muezzins, de henné et de confitures à la rose. […] Le mystère est là dans la lumière même. […] Et alors… Alors c’est comme une lumière soudaine et surnaturelle parmi ces « ténèbres ». […] Ce pauvre homme qui, seul, entre ces créatures d’ombre, porte en lui cette lumière, la conscience, devient tout à coup grand et vénérable. […] Akoulina offre le thé à Nikita : « Non, dit-il subitement dégrisé ; je ne veux pas… Éteignez la lumière… Oh !

961. (1836) Portraits littéraires. Tome I pp. 1-388

La vue se réjouirait à manier l’histoire comme les rayons de la lumière. […] A-t-il ajouté quelque lumière nouvelle aux travaux de l’Allemagne savante ? […] Il a beau se contenir, se mettre en garde, son front calme et serein, son regard paisible et assuré ne peuvent le soustraire à la lumière éblouissante dont il a lui-même concentré les rayons. […] Au lieu d’un métal poli qui réfléchirait la lumière en la brisant sous des angles simples et prévus, nous avons un métal capricieusement taillé, où les rayons se croisent en mille routes. […] Elle ménage la lumière à ses yeux ignorants.

962. (1898) Essai sur Goethe

Ajoutez encore qu’elle tendra avec force à l’unité : la nature, l’art et la vie ne seront pour elle qu’une synthèse, dans laquelle il faudra, pour remplir son rôle, qu’elle s’absorbe, comme un rayon qui remonte à la source de la lumière. […] Je comprenais, je sentais très vivement que mon existence s’était élargie à l’infini ; tout était nouveau pour moi, inconnu, et cette lumière à laquelle je n’étais pas accoutumé me faisait mal aux yeux. […] Que de fois je suis revenu de partout et de loin, contempler sous chaque lumière du jour sa dignité et sa magnificence ! […] sur son cheval blanc : la lumière du jour l’entoure, et les mouvantes ombres aiguës l’accompagnent ! […] Des lumières, des lumières, des flambeaux !

963. (1891) La bataille littéraire. Quatrième série (1887-1888) pp. 1-398

Une lumière indiquait la fenêtre du sous-officier attaché à l’infirmerie des chevaux. Cette lumière s’éteignit. […] La lumière avait tout effacé, tout dévoré. […] Agnès, elle, laissait traîner un manteau de cour, filé de lumière, brodé d’étoiles. […] Et, dans la lumière éclatante, les urubus et le corbillard très noirs se glacent et reluisent.

964. (1895) La comédie littéraire. Notes et impressions de littérature pp. 3-379

Remercions la Providence de nous avoir gardé ses lumières ! […] Il a gardé une âme aussi neuve que celle d’Adam ouvrant les yeux à la lumière. […] C’est lui qui fit le monde avec de la lumière. […] J’aime mieux, pour ma part, un fin portrait s’épanouissant dans une calme lumière. […] Émile Zola n’a rien oublié : il a mis chaque détail en lumière.

965. (1894) Dégénérescence. Fin de siècle, le mysticisme. L’égotisme, le réalisme, le vingtième siècle

L’image du monde se présente donc à lui comme une eau-forte ou un dessin à la mine de plomb, où l’effet des couleurs absentes est remplacé par les dégradations de lumière, par la plus ou moins grande profondeur et par la vigueur des endroits blancs et noirs. […] Car, ou bien la volonté renforce chaque aperception surgissante jusqu’à la pleine lumière et à la netteté, ou bien, si elle ne le peut pas, elle l’éteint complètement. […] La conscience est comme inondée d’une aveuglante lumière de midi. […] « Lorsque, autour de sa tête, sera attachée l’auréole, et qu’il sera habillé de blanc, je le prendrai par la main et j’irai avec lui aux sources profondes de la lumière. […] Nous savons, par exemple, que le siphon de la pholade (pholas dactylus), qui à chaque excitation se contracte plus ou moins énergiquement et rapidement, est sensible à toutes les impressions extérieures, lumière, bruit, contact, odeurs, etc.

966. (1927) Les écrivains. Deuxième série (1895-1910)

Aucune surprise de dialectique, aucun éclat de passion, aucune illumination d’éloquence ne peuvent traverser ces murs, ouvrir des brèches de lumière dans ces murs de ténèbres que sont les majorités parlementaires. […] De cette fosse, il jette aux passants des bouses de lumière et d’éternité, des haines d’or, le verbe le plus sauvage et le plus magnifique, lourd et pénétrant comme la lave et l’aérolithe. […] Elles passent, l’astre demeure ; Astra manent… Et elles ont ceci d’admirable et de consolateur qu’elles semblent garder plus de lumière à l’astre qu’elles ont voilé un instant ! […] C’est une œuvre d’amour et de pacification… Et elle rayonne de lumière. […] Ce qui nous étonne surtout, ce qui nous subjugue, c’est la force de l’action intérieure, et c’est toute la lumière douce et chantante qui se lève sur ce livre, comme le soleil sur un beau matin d’été.

967. (1902) Le chemin de velours. Nouvelles dissociations d’idées

La pathologie sexuelle a mis cela en lumière. […] Un flambeau a l’utilité, non de sa lumière, mais des objets sur lesquels porte sa lumière. […] Pascal subit ce sourire ; il l’aime ; c’est sa seule lumière. […] Les Jésuites sont tout aussi chrétiens que les Jansénistes, mais moins durement et avec plus de lumières. […] Au moindre contact, la sensitive va se replier ; la lumière même, si elle est trop vive, resserre ses fibres.

968. (1895) Impressions de théâtre. Huitième série

Et, en effet, la bonne Astolaine et les sœurs de Palomides viennent délivrer les captifs en arrachant les pierres de la voûte, et la féerie s’évanouit sous la lumière crue du soleil ; et le rêve se dissout au heurt brusqué de la réalité. […] — C’est la lumière qui n’a pas eu pitié… Je ne regrette plus les rayons du soleil […] Il fait éteindre les lumières… et le fidèle Roustan s’empare du comte de Neipperg, qui allait pénétrer chez l’impératrice. […] Mirelet fils, dans une lumière de bengale, y profère maintes choses bardies, propres à étonner les théologiens. […] Et, en même temps, la lumière de la bougie qui éclaire la cachette d’André se trahit par deux rectangles enserrant de leurs lignes de feu les deux panneaux inférieurs du bahut.

969. (1894) La bataille littéraire. Sixième série (1891-1892) pp. 1-368

La Lumière, ce qui n’a pas encore de nom : Deus. […] Veux-tu dans la lumière inconcevable et pure Ouvrir tes yeux par l’ombre affreuse appesantis ? […] À regarder fixement le soleil, source de lumière, les yeux se troublent et la nuit s’y fait ; est-ce à dire que sa flamme soit éteinte ? […] Puis, dans un coin, une petite porte obscure, derrière laquelle, hallebarde au pied, paradait dans la lumière un grave suisse chamarré d’or. […] Je m’arrête, renonçant à donner un compte rendu détaillé de ce livre touffu, encombré, mais dans les obscurités duquel pointe souvent la lumière d’une véritable observation, de pensées élevées.

970. (1920) Essais de psychologie contemporaine. Tome I

La mysticité, comme le libertinage, se codifie en formules dans ce cerveau qui décompose ses sensations, avec la précision d’un prisme décomposant la lumière. […] Ô lumière qui m’as conduit à t’aimer, sois maudite ! […] Taine, un chapitre d’histoire est comme le moellon d’un édifice au sommet duquel se dressera une vérité, générale encore, exhaussée jusqu’à la pleine lumière de l’évidence. […] L’œuvre d’art ne m’intéresse plus en elle-même, elle est un signe des causes profondes qui l’ont amenée à la lumière. […] La magnifique lumière sauve de la laideur même les haillons des mendiants.

971. (1846) Études de littérature ancienne et étrangère

Malgré sa prudence habituelle, il livrait bataille lorsque, durant sa veille nocturne, il avait vu la lumière de sa lampe baisser et s’éteindre d’elle-même. […] quelle est cette lumière ? […] Soit que le poète habite les ténèbres ou la lumière de ce monde mystérieux, il faut que tout ce qu’il raconte soit créé par l’imagination et soutenu par elle. […] Et toutefois, quels jets de lumière, quelle poésie de l’Orient brillent à travers ces nuages et les colorent d’un éclat céleste ! […] L’inspiration s’élève et monte à son plus haut degré, en approchant d’Éden, où le beau feu du poète s’épure sans s’affaiblir, et jette une si douce lumière.

972. (1859) Moralistes des seizième et dix-septième siècles

Les croisades furent une sorte d’entrainement aveugle ; la Réforme, au contraire, saisit le plus souvent les individus un à un, dans l’intimité de leur conscience et dans la lumière de leur raison. […] Vraie ou fausse, presque toute sa lumière lui vient de là. […] Sa lumière ne lui vient pas d’un nouveau raisonnement, mais d’un nouveau sens. […] C’est un tourbillon d’étincelles, ce n’est pas une flamme, ce n’est pas une lumière. […] Ils ne peuvent, sous le rapport de la doctrine, différer que par des nuances : ils sont tous disciples d’une même école, éclairés d’une même lumière, mue dans une même direction ; la raison de Dieu est leur raison.

973. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « LEOPARDI. » pp. 363-422

Mais ton visage, à moi, ne m’offrait sa lumière Que trembante, à travers le voile de mes pleurs, Car ma vie était triste et vouée aux douleurs. […] Combien de fois, le soir ou plus tard à l’aurore, Laissant tomber son front que la veille dévore, Il s’est dit bienheureux, si du brûlant chevet Jamais dès lors, jamais il ne se relevait, Et ne rouvrait les yeux à l’amère lumière ! […] Et toutefois, vous collines et coteaux, vous ne resterez pas longtemps plongés dans l’ombre, vous retrouverez tout à l’heure, de l’autre côté de l’horizon, une aube nouvelle, suivie d’un radieux soleil ; et il ajoutait : « Mais la vie mortelle, du moment que la belle jeunesse a disparu, ne se colore plus jamais d’une autre lumière ni d’une autre aurore ; elle est veuve jusqu’à la fin, et, à cette nuit qui obscurcit tous les autres âges, les Dieux n’ont mis pour terme que le tombeau. » Ma la vita mortal, poi che la bella Giovinezza spari, non si colora D’altra luce giammai, nè d’altra aurora. […] Nos idées et nos lumières ont pu améliorer l’ordre social, mais je ne sais si les hommes des temps modernes sont meilleurs pour être plus faibles, et les progrès ne sont pas des vertus. » Cette page est un beau commentaire de la manière de sentir de Leopardi.

974. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers (3e partie) » pp. 249-336

Scènes terribles, dont l’aspect serait intolérable si le génie, si l’héroïsme déployés n’en rachetaient l’horreur, et si la gloire, cette lumière qui embellit tout, ne venait les envelopper de ses rayons éblouissants !  […] » XIII L’expression ici même est encore faible dans sa justice, car la médiocrité serait plutôt une excuse de la déloyauté que le génie ; le génie n’est pas une excuse, il est une aggravation de tous les crimes ; car le génie est une lumière et une force ; il lui est moins permis de s’aveugler et de faiblir qu’à la médiocrité, qui est une obscurité et une faiblesse. […] Thiers rentre dans sa nature ; il manœuvre, il décrit en tacticien, il combat avec une supériorité de lumière, de feu, qui ne laisse ni une pensée des généraux, ni un général, ni un soldat, ni une goutte de sang, ni un accident du fleuve ou du terrain dans l’ombre ; c’est une inondation de clarté sur quatre cent mille combattants sortant des ténèbres de la nuit pour s’entrechoquer au bord du Danube. […] Ce vide on l’éprouve en fermant ce beau livre ; je ne sais quelle tristesse vous saisit comme après une ivresse de gloire ; on est ébloui, on n’est pas éclairé intérieurement de cette saine lumière qui satisfait la conscience.

975. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Herbert Spencer — Chapitre II : La psychologie »

Chez l’être inférieur, où le tissu tout entier a la propriété de répondre aux changements marqués dans la quantité de lumière qui tombe sur lui, il y a comme une ébauche de la faculté visuelle et des correspondances qui en résultent. « L’œil rudimentaire qui consiste, comme celui des planaires, en un petit nombre de grains colorés placés sous le tégument, peut être considéré comme n’étant simplement qu’une partie de la surface, plus irritable à la lumière que le reste. Nous pouvons nous former une idée de l’impression, qu’il est probablement approprié à recevoir, en tournant vers la lumière nos yeux fermés, et en passant la main devant eux dans les deux sens. » Cependant cette petite spécialisation de fonction implique déjà un progrès dans la correspondance. […] Dans l’évolution de la faculté visuelle, par exemple, il se produit une aptitude toujours croissante à distinguer les diverses intensités des couleurs, les teintes intermédiaires, les teintes de lumière et d’ombre.

976. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1890 » pp. 115-193

Samedi 18 janvier Une après-midi passée devant les tableaux anglais de Groult, devant ces toiles génératrices de toute la peinture française de 1830, ces toiles qui renferment une lumière si laiteusement cristallisée, ces toiles aux jaunes transparences, semblables aux transparences des couches superposées d’une pierre de talc. […] À notre entrée le bruit terrestrement céleste d’un orgue-mélodium, dont joue l’artiste, et pendant qu’il vient à notre rencontre, les regards soudainement attirés par un trou illuminé, devant lequel est une aquarelle commencée ; un trou fait dans l’ouverture d’une étoffe jouant la toile levée d’un théâtre d’enfant, et dans lequel se voit figurée par de petites maquettes, une scène de la Passion, éclairée par une lumière semblable aux lueurs rougeoyantes éclairant un Saint-Sépulcre, le soir du Vendredi Saint. […] On s’était grisé, on avait lutté, et dans la lutte, il s’était foulé un pied, mais il se faisait porter en bateau par deux marins, et quittait tout heureux, un soir de mardi-gras, la plage pleine de lumière et de cris de carnaval, pour aller à une mauvaise mer, au danger, à l’inconnu. […] Le jour tombé, il ne lisait pas, aux lumières, une ligne d’un journal, une ligne même d’une lettre : il la mettait dans sa poche, disant qu’il la lirait le lendemain.

977. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Bossuet et la France moderne »

Saint-Simon ne craint pas de dévoiler « l’ignorance la plus grossière en tous genres dans laquelle on avait eu grand soin d’élever le Roi… », ce roi que l’on nous représente comme éclairé de toutes les lumières. « L’esprit du Roi était au-dessous du médiocre…, ajoute Saint-Simon. […] En dépit de leur zèle à blanchir l’altier prélat, les faits eux-mêmes sont venus démontrer, dans une éclatante lumière, que Bossuet fut, en réalité le plus féroce, le plus impitoyable, et le plus cynique des inquisiteurs français. […] Les gens de lettres, les théologiens, les artistes, les juristes et les médecins apportèrent le concours de leurs lumières. […] Le grand nom de l’évêque de Meaux se présente naturellement à la pensée ; mais ni la correspondance de Bossuet, ni les documents relatifs à sa vie, ne fournissent de lumières à ce sujet, et l’on ignore s’il faut ajouter une responsabilité matérielle et directe a la responsabilité morale que les maximes de Bossuet et l’esprit de ses ouvrages font peser sur sa mémoire ».

978. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gibbon. — II. (Fin.) » pp. 452-472

Guizot déclare en être demeuré à apprécier, dans ce vaste et habile ouvrage, « l’immensité des recherches, la variété des connaissances, l’étendue des lumières, et surtout cette justesse vraiment philosophique d’un esprit qui juge le passé comme il jugerait le présent », et qui, à travers la forme extraordinaire et imprévue des mœurs, des coutumes et des événements, a l’art de retrouver dans tous les temps les mêmes hommes. […] Je dirai donc aussi qu’en maint cas Gibbon ne produit point la parfaite lumière : il s’arrête en deçà du sommet où peut-être elle brille.

979. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « William Cowper, ou de la poésie domestique (I, II et III) — III » pp. 178-197

Si folâtre est le rayon lancé à travers les branches, qu’il danse lorsqu’elles dansent elles-mêmes ; ombre et lumière s’entremêlant dans un réseau rapide, et obscurcissant ou illuminant, au gré des feuilles qui se jouent, chaque point du sol, à chaque instant. […] Au soir, le rayon de la lune, glissant mollement entre les feuilles endormies, est toute la lumière qu’il désire ; le gazouillement des oiseaux est toute sa musique.

980. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Vie de Maupertuis, par La Beaumelle. Ouvrage posthume » pp. 86-106

Attendant vos instructions et le plaisir de jouir de vos lumières, je vous assure que je suis avec bien de l’estime Votre très affectionné, Frédéric. […] Avec quel plaisir je recevrai vos instructions, et je jouirai de vos lumières !

981. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Journal et mémoires du marquis d’Argenson, publiés d’après les manuscrits de la Bibliothèque du Louvre pour la Société de l’histoire de France, par M. Rathery » pp. 238-259

On doit des remerciements à tous ceux qui nous apportent sur quelque partie de l’histoire des informations et des lumières nouvelles : on en doit à ceux même qui nous les apportent à contrecœur et en grondant51 ; à plus forte raison, à ceux qui le font de bonne grâce, dans la seule vue du public et par zèle pour la vérité. […] J’en parlerai aujourd’hui avec plus de liberté que je ne l’avais fait précédemment, quand ses mémoires n’étaient que manuscrits et non exposés encore à la pleine lumière qui fait saillir tous les défauts.

982. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers (suite et fin.) »

Distinguée par le rang et la naissance, elle l’est infiniment plus par l’élévation et la délicatesse des sentiments, la beauté du génie, l’étendue des lumières, la pénétration de l’esprit, la précision et la vigueur du raisonnement, la pureté et l’élégance du langage, la justesse et la finesse du goût. […] Mais la brillante amie du prince de Conti méritait d’être remise en lumière à son vrai point de vue, d’être tirée du vague et de l’incertitude où flottait sa mémoire.

983. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat (suite.). Guerre des Barbets. — Horreurs. — Iniquités. — Impuissance. »

» Mais l’amour de la patrie luttait encore dans l’esprit des Vaudois contre la lumière qu’y faisaient pénétrer ces paroles et contre l’évidence désolante : « — Ce serait une lâcheté, s’écriaient-ils, de perdre courage devant Dieu, qui a si souvent délivré nos pères, et qui a sauvé de tant de périls le peuple d’Israël.  […] Depuis la bataille, je me conduis sur les lumières de la Cour, et mon mérite ne pourra être que dans l’exécution.

984. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ALFRED DE MUSSET. » pp. 177-201

Pourquoi, quand la lumière a percé, redonner champ libre au chaos, et livrer le lecteur sans réplique à ce monologue incohérent qui couronne la mystification du cercueil, à ce conflit de beautés aveuglantes et de pensées qui se heurtent, Telles par l’ouragan les neiges flagellées ? […] Quand on a soi-même des portions de l’artiste, qu’on l’a été un moment, ou du moins qu’on a désiré de le devenir à quelque degré, la vigilance sur les créations naissantes est extrême ; le clin d’œil est rapide et peu trompeur ; on reconnaît avec un instinct vif, presque jaloux, ces lumières qui pointent à l’horizon et vont à mesure éteindre les anciennes.

985. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « GRESSET (Essai biographique sur sa Vie et ses Ouvrages, par M. de Cayrol.) » pp. 79-103

L’observation fine de Gresset venait de prendre sur le fait un travers, un vice particulier à ce moment de société auquel il assistait ; son talent redevenu net, vif, élégant, et à la fois enhardi, avait mis l’odieux objet dans une entière lumière ; sa conscience d’honnête homme l’avait flétri. […] En combien d’endroits de ses lettres Cicéron se montre préoccupé de ce je ne sais quoi si réel et si indéfinissable, soit que, du fond de la Cilicie, il écrive à un de ses amis plus heureux, qui vit, comme il dit, à la lumière : « Urbem, urbem, mi Rufe, cole et in ista luce vive 39, » soit qu’il écrive à cet autre qui se plaignait de lui, et qui tout d’un coup, en arrivant à Rome, change de ton : « Il a suffi du seul aspect de la ville pour te rendre ta première urbanité, adspectus videlicet urbis tibi tuam pristinam urbanitatem reddidit 40 ! 

986. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXIIIe entretien. Chateaubriand, (suite) »

Ici, il voit éclater le réverbère à la porte de cet hôtel, dont les habitants, plongés dans les plaisirs, ignorent qu’il est un misérable, occupé seul à regarder de loin la lumière de leurs fêtes, lui qui eut aussi des fêtes et des amis ! […] Auprès d’un humble feu et d’une lumière vacillante, certain de n’être point entendu, on s’attendrit sur les maux imaginaires des Clarisse, des Clémentine, des Héloïse, des Cécilia.

987. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIIe entretien. Sur la poésie »

Ensuite, elle est transparente, elle ressemble au firmament ou à l’éther qui répercutent la lumière de l’astre du jour ou des étoiles de la nuit, elle se transfigure sans fin comme le caméléon par ses couleurs changeantes, roulant tantôt la lumière, tantôt la nuit dans ses vagues. — Émotion !

988. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre V. Transition vers la littérature classique — Chapitre I. La littérature sous Henri IV »

Au lieu que, sans être économiste, on sera charmé de Montchrétien244: son traité d’Économie politique, remis en lumière dans ces dernières années, est une des belles œuvres du temps. […] Deux œuvres mettent alors en lumière l’avortement du genre historique : d’abord l’admirable corps d’Histoires du président de Thou259, si exact, si informé, si impartial, et qui, écrivant en latin avec les mots et la couleur de Tite-Live, n’arrive qu’à faire un pastiche ; en second lieu la célèbre Histoire Romaine de M. 

989. (1890) L’avenir de la science « XIII »

Ainsi, je suis persuadé que les naturalistes tireraient de grandes lumières, pour le problème si philosophique de la classification et de la réalité des espèces, de l’étude de la méthode des linguistes et des caractères naturels qui leur servent à former les familles et les groupes, d’après la dégradation insensible des procédés grammaticaux. […] Je suis persuadé néanmoins que ce livre, que je me propose de lire, renferme de précieuses lumières et doit former un utile complément aux travaux de Braun, Schrœder et Hartmann sur les vêtements du grand prêtre et des femmes hébraïques.

990. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Histoire des travaux et des idées de Buffon, par M. Flourens. (Hachette. — 1850.) » pp. 347-368

Et reporté vingt-huit ans après sur le même sujet d’attaque en reprenant, dans ses Époques de la nature, ce même ensemble de vues et de travaux : Tâchons néanmoins, disait-il, de rendre la vérité plus palpable ; augmentons le nombre des probabilités ; rendons la vraisemblance plus grande ; ajoutons lumières sur lumières, en réunissant les faits, en accumulant les preuves, et laissons-nous juger ensuite sans inquiétude et sans appel ; car j’ai toujours pensé qu’un homme qui écrit doit s’occuper uniquement de son sujet et nullement de soi ; qu’il est contre la bienséance de vouloir en occuper les autres, et que, par conséquent, les critiques personnelles doivent demeurer sans réponse.

991. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Monsieur de Bonald, (Article Bonald, dans Les Prophètes du passé, par M. Barbey d’Aurevilly, 1851.) » pp. 427-449

Avec Bonald, au contraire, on est comme si l’on s’embarquait d’abord sur un fleuve assez peu navigable ; puis le patron vous fait entrer dans un canal, et vous met à bord d’un bateau exactement fermé, où l’on descend et où l’on est sans plus voir la lumière ni le ciel, et l’on ne peut sortir la tête et regarder sur le pont que par intervalles, pour apercevoir en effet d’assez hautes et grandes perspectives, mais en regrettant de les perdre de vue si souvent. […] Pour montrer le degré de rigueur et d’absolu de la vérité qui se mesure à l’étendue même des lumières et de la certitude, il a pu écrire : « L’homme le plus éclairé sera l’homme le moins indifférent ou le moins tolérant ; et l’Être souverainement intelligent doit être, par une nécessité de sa nature, souverainement intolérant des opinions 56. » Voilà Dieu compromis, dans la bouche d’un homme pieux, par une expression malheureuse.

992. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Notice historique sur M. Raynouard, par M. Walckenaer. » pp. 1-22

L’auteur, oubliant que le véritable objet d’une tragédie était d’émouvoir et de toucher, s’est trop occupé d’avoir une opinion sur un fait qui sera toujours enveloppé de ténèbres parce qu’il est impossible d’y apporter aucune lumière. […] Il faut donc frotter nos cailloux pour en faire jaillir une lumière utile ; mais gardons-nous bien de nous les jeter à la tête.

993. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Montesquieu. — I. » pp. 41-62

Je m’éveille le matin avec une joie secrète de voir la lumière ; je vois la lumière avec une espèce de ravissement, et tout le reste du jour je suis content.

994. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Grimm. — II. (Fin.) » pp. 308-328

Buffon et Rousseau contribuèrent ensuite à remettre en lumière par de larges exemples le style plein, mâle, éloquent : Ces sortes de beautés, observe Grimm, étaient perdues pour M. de Fontenelle. […] Grimm et Diderot causaient un soir ensemble, le 5 janvier 1757 ; Diderot était dans un de ces moments d’exaltation et de prédiction philosophique qui lui étaient familiers : il voyait le monde en beau et l’avenir gouverné par la raison et par ce qu’il appelait les lumières ; il exaltait son siècle comme le plus grand que l’humanité eût vu jusque-là.

995. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « M. Necker. — II. (Fin.) » pp. 350-370

Il démontre sous toutes les formes, et par une quantité de considérations prises dans le cœur humain, que la morale religieuse vient sans cesse au secours de la législation civile : Elle parle un langage que les lois ne connaissent point ; elle échauffe cette sensibilité qui doit devancer la raison même ; elle agit, et comme la lumière et comme la chaleur intérieure ; elle éclaire, elle anime, elle s’insinue partout ; et ce qu’on n’observe point assez, c’est qu’au milieu des sociétés cette morale est le lien imperceptible d’une multitude de parties qui semblent se tenir par leurs propres affinités, et qui se détacheraient successivement, si la chaîne qui les unit venait jamais à se rompre. […]  » Aucune lumière ne les réjouit ; aucune beauté ne les épanouit ; tout les concentre.

996. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Saint-Simon »

Ils éclairent de la lumière simplificatrice du génie les parties obscures de l’Histoire de France, qui en a tant encore ! […] Tel le droit que dans deux Mémoires55, restés inédits et remis aujourd’hui en lumière, Saint-Simon a établi de la manière la plus péremptoire et la plus irréfragable, avec la logique la plus victorieuse, car là où il y a l’obscurité d’un hiatus dans la chaîne des faits nécessaires au développement de sa thèse il répond par l’impérieuse et inévitable nature des choses, que les fautes et les crimes des gouvernements et des hommes peuvent violer, mais dont, pour l’avoir violée, les hommes et les gouvernements meurent nécessairement toujours !

997. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Henri Heine »

Henri Heine est un génie éminemment tendre, nuancé des plus ravissantes et (dans le sens religieux) des plus divines mélancolies, chez qui le sourire et même le rire trempent dans les larmes, et les larmes se rosent de sang… C’est une âme d’une si grande puissance de rêverie et d’un désir si amoureux du bonheur, que l’on peut dire qu’elle est faite pour le Paradis tel que les chrétiens le conçoivent, comme les fleurs sont faites pour habiter l’air et la lumière. […] Nous voulons croire que comme cet autre glorieux grabataire, ce Milton de l’Histoire, qui a dit : « Dieu doit me regarder avec plus de tendresse et de pitié, parce que je ne puis voir que lui », Heine, le grand et charmant poète, reviendra à la source de cette lumière qui passe si bien, pour inonder une âme, à travers de pauvres yeux fermés.

998. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XI : M. Jouffroy moraliste »

« Quand cet être si fort, si fier, si plein de lui-même, si exclusivement préoccupé de ses intérêts dans l’enceinte des cités et parmi la foule de ses semblables, se trouve par hasard jeté au milieu d’une immense nature, qu’il se trouve seul en face de ce ciel sans fin, en face de cet horizon qui s’étend au loin et au-delà duquel il y a d’autres horizons encore, au milieu de ces grandes productions de la nature qui l’écrasent, sinon par leur intelligence, du moins par leur masse ; lorsque, voyant à ses pieds, du haut d’une montagne et sous la lumière des astres, de petits villages se perdre dans de petites forêts, qui se perdent elles-mêmes dans l’étendue de la perspective, il songe que ces villages sont peuplés d’êtres infirmes comme lui, qu’il compare ces êtres et leurs misérables habitations avec la nature qui les environne, cette nature elle-même avec notre monde sur la surface duquel elle n’est qu’un point, et ce monde à son tour avec les mille autres mondes qui flottent dans les airs et auprès desquels il n’est rien : à la vue de ce spectacle, l’homme prend en pitié ses misérables passions toujours contrariées, ses misérables bonheurs qui aboutissent invariablement au dégoût. » Il se demande si la vie est bonne à quelque chose, et ce qu’il est venu faire dans le petit coin où il est perdu. […] » Ainsi d’écho en écho retentit la question éternelle, unique matière de la religion, de la poésie et de la science, poursuivie par toutes les puissances de l’homme « qui, alarmées, demandent, invoquent la lumière, comme les lèvres du voyageur altéré appellent la source dans le désert. » Mais jamais elle ne reparaît plus impérieuse que dans des temps comme les nôtres, où les anciennes réponses niées ou combattues laissent l’âme en proie au tourment du doute, battue par le vent des opinions contraires, ébranlée et arrachée à tous ses appuis.

999. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXVI » pp. 100-108

Il n’est pas moins vrai que Villemain, au milieu de toutes les grâces brillantes et mondaines dont il a su recouvrir sa nature première, reste foncièrement un esprit universitaire, une fleur et une lumière de rhétorique et d’académie.

1000. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Sur l’École française d’Athènes »

Quant à la langue, à la philologie, les considérations se pressent, elles concourent au même point, elles viennent en quelque sorte aboutir au même lieu comme à un centre tout désigné de lumière et de perfectionnement.

1001. (1874) Premiers lundis. Tome I « [Préface] »

Ils sont certainement pleins de chaleur et de lumière, et tout à fait inspirés du sujet qui faisait alors la préoccupation des plus grands poètes et artistes : la guerre de l’indépendance grecque.

1002. (1874) Premiers lundis. Tome I « A. de Lamartine : Réception à l’Académie Française »

Depuis ce temps, fier et blessé dans sa candeur, le poète s’en retourna vivre sur cette terre d’Italie dont il aimait l’air, la lumière et la noble beauté.

1003. (1874) Premiers lundis. Tome I « Deux révolutions — I. De la France en 1789 et de la France en 1830 »

Le malheur est que cette fausse vue, cette erreur d’observation et de jugement, combinée chez beaucoup d’hommes publics avec les intérêts et l’amour-propre, peut avoir pour conséquences pratiques d’entraver le libre et prompt développement des principes émis en lumière en juillet.

1004. (1874) Premiers lundis. Tome II « E. Lerminier. Lettres philosophiques adressées à un Berlinois »

Il avance, il se développe, il compose son dessein ; il agrandit chaque jour l’horizon distinct de ses observations et y jette des lumières inattendues ; il rallie sur sa route tous les résultats mémorables qu’y ont déposés les penseurs, les réformateurs, dont il consulte et interprète la sagesse.

1005. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre III. Buffon »

C’est que Buffon est avant tout un philosophe : les faits particuliers ne l’intéressent que par le sens qu’ils contiennent, par la lumière qu’ils apportent dans un essai d’explication générale de l’univers.

1006. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — K — Kahn, Gustave (1859-1936) »

Albert Arnay Il y a dans ce livre, Limbes de lumières, des choses légères et d’une séduction câlinante.

1007. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Laurent Tailhade à l’hôpital » pp. 168-177

Heureusement, nous voici bientôt rue de Rivoli, rentrés dans la foule, dans les lumières, dans la vie.

1008. (1898) Inutilité de la calomnie (La Plume) pp. 625-627

* *   * Pour moi, si je chante la lumière, le précieux printemps ou les belles campagnes, je ne le fais jamais que dans l’extase.

1009. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Dédicace, préface et poème liminaire de « La Légende des siècles » (1859) — La vision d’où est sorti ce livre (1857) »

C’est la tradition tombée à la secousse Des révolutions que Dieu déchaîne et pousse ; Ce qui demeure après que la terre a tremblé ; Décombre où l’avenir, vague aurore, est mêlé ; C’est la construction des hommes, la masure Des siècles, qu’emplit l’ombre et que l’idée azure, L’affreux charnier-palais en ruine, habité Par la mort et bâti par la fatalité, Où se posent pourtant parfois, quand elles l’osent, De la façon dont l’aile et le rayon se posent, La liberté, lumière, et l’espérance, oiseau ; C’est l’incommensurable et tragique monceau, Où glissent, dans la brèche horrible, les vipères Et les dragons, avant de rentrer aux repaires, Et la nuée avant de remonter au ciel ; Ce livre, c’est le reste effrayant de Babel ; C’est la lugubre Tour des Choses, l’édifice Du bien, du mal, des pleurs, du deuil, du sacrifice, Fier jadis, dominant les lointains horizons, Aujourd’hui n’ayant plus que de hideux tronçons, Épars, couchés, perdus dans l’obscure vallée ; C’est l’épopée humaine, âpre, immense, — écroulée.

1010. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Milton, et Saumaise. » pp. 253-264

Il fut frappé de tout ce qu’il y trouva ; des images grandes & sublimes ; des idées neuves, hardies, effrayantes, & faites pour l’imagination Angloise ; des coups de lumière avec d’épaisses ténèbres, & des écarts de génie & de raison.

1011. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — Les inscriptions des monumens publics de France doivent-elles être écrites en Latin ou en François. » pp. 98-109

La matière est traitée, dans cet ouvrage, avec assez d’ordre, de lumières & de goût.

1012. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Seconde Partie. De l’Éloquence. — Éloquence du barreau. » pp. 193-204

On trouve, dans ceux qui furent appellés les deux lumières du barreau, des applications forcées, un assemblage d’idées singulières & de mots emphatiques, un ton insupportable de déclamateur ; quelques belles images, il est vrai, mais souvent hors de place ; le naturel sacrifié à l’art, & l’état de la question presque toujours perdu de vue.

1013. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre VI. Conclusions » pp. 232-240

Châteaubriand disait : « … Dans ce siècle de lumières, l’ignorance est grande.

1014. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre quatrième. Éloquence. — Chapitre V. Que l’incrédulité est la principale cause de la décadence du goût et du génie. »

Dans un siècle de lumières, on ne saurait croire jusqu’à quel point les bonnes mœurs sont dépendantes du bon goût, et le bon goût des bonnes mœurs.

1015. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Wallon »

Pour qu’il tombe de plus haut et qu’il se brise mieux, il l’élève ; puis, quand il l’a mis au plus haut de ses facultés exagérées, il le précipite dans cette conclusion (page 129) : « Il est le modèle achevé, pour ainsi dire idéal, de ces riches et pauvres natures, communes à toutes les époques, mais qu’il était donné à notre xixe  siècle de mettre en pleine lumière… qui sont à la fois sincères et fausses, aptes et inaptes à tout, font le bien avec ardeur, le mal avec passion, aiment l’idée pour l’idée, l’art pour l’art, et, sublimes égoïstes, se prêtent toujours pour ne se donner jamais.

1016. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Léon Bloy »

Si les préfaces signifient quelque chose, c’est quand elles sont les prévisions de la Critique en faveur des obscurs, qu’elle distingue dans leur obscurité et qu’elle doit aimer à faire monter dans la lumière.

1017. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Madame Sand ; Octave Feuillet »

Aucun jeune nom inconnu, l’espoir de ce qui nous reste de xixe  siècle à vivre, n’a jailli de l’obscurité et brillé, je ne dis pas comme une étoile, — je ne suis pas si ambitieux, — mais simplement comme une de ces bulles de lumière dont le destin est de tout à l’heure s’évanouir !

1018. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Renan — III »

Or, il est très utile de projeter une lumière abondante sur les figures caractéristiques, parce qu’elles sont représentatives, et que, fortement éclairées, à leur tour elles illuminent pour nous soit une époque, soit une série d’êtres.‌

1019. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — VII »

Après quelques instants, on démêlait très vite que ces yeux gris, remarquables de douceur, de lumière et de profondeur, étaient inégaux et voyaient un peu de travers ; exactement, M. 

1020. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre quatrième. Du cours que suit l’histoire des nations — Chapitre III. Trois espèces de jurisprudences, d’autorités, de raisons ; corollaires relatifs à la politique et au droit des Romains » pp. 299-308

Le sénat assistait le peuple de sa présence dans les assemblées législatives, de peur qu’il ne résultât quelque dommage public de son peu de lumières.

1021. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre III. Combinaison des deux éléments. »

Aux approches de 1789, il est admis qu’on vit « dans le siècle des lumières », dans « l’âge de la raison », qu’auparavant le genre humain était dans l’enfance, qu’aujourd’hui il est devenu « majeur ». […] Ses archives sont enterrées ; il faut pour les dégager des recherches dont il n’est pas capable ; elles subsistent pourtant, et aujourd’hui l’histoire les remet en lumière  Quand on le considère de près, on trouve que, comme la science, il a pour source une longue accumulation d’expériences : les hommes, après une multitude de tâtonnements et d’essais, ont fini par éprouver que telle façon de vivre ou de penser était la seule accommodée à leur situation, la plus praticable de toutes, la plus bienfaisante, et le régime ou dogme qui aujourd’hui nous semble une convention arbitraire a d’abord été un expédient avéré de salut public. […] » Toutes les souillures qu’il a contractées lui viennent du dehors ; c’est aux circonstances qu’il faut attribuer ses bassesses et ses vices : « Si j’étais tombé dans les mains d’un meilleur maître…, j’aurais été bon chrétien, bon père de famille, bon ami, bon ouvrier, bon homme en toutes choses. » Ainsi la société seule a tous les torts  Pareillement, dans l’homme en général, la nature est bonne. « Ses premiers mouvements sont toujours droits… Le principe fondamental de toute morale, sur lequel j’ai raisonné dans mes écrits, est que l’homme est un être naturellement bon, aimant la justice et l’ordre… L’Émile en particulier n’est qu’un traité de la bonté originelle de l’homme, destiné à montrer comment le vice et l’erreur, étrangers à sa constitution, s’y introduisent du dehors et l’altèrent insensiblement… La nature a fait l’homme heureux et bon, la société le déprave et le fait misérable412. » Dépouillez-le, par la pensée, de ses habitudes factices, de ses besoins surajoutés, de ses préjugés faux ; écartez les systèmes, rentrez dans votre propre cœur, écoutez le sentiment intime, laissez-vous guider par la lumière de l’instinct et de la conscience ; et vous retrouverez cet Adam primitif, semblable à une statue de marbre incorruptible qui, tombée dans un marais, a disparu depuis longtemps sous une croûte de moisissures et de vase, mais qui, délivrée de sa gaine fangeuse, peut remonter sur son piédestal avec toute la perfection de sa forme et toute la pureté de sa blancheur.

1022. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXIXe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Le drame de Faust par Goethe (2e partie) » pp. 161-232

de la lumière ! […] Puis Dorothée dit : « Que j’aime cette douce lumière de la lune ! […] La lumière dans laquelle plongeaient les têtes culminantes comme la sienne ne descendait pas jusqu’aux masses populaires, capables de croire, incapables de raisonner leur croyance.

1023. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Hugo, Victor (1802-1885) »

En lui voyant le visage d’un ange, il s’imagine qu’elle en a l’âme aussi : Là-haut, dans sa vertu, dans sa beauté première, Veille, sans tache encore, un ange de lumière ; Un être chaste et doux, à qui sur les chemins, Les passants à genoux devraient tendre les mains… Marion ne comprend pas très bien ce langage, différent de celui qu’elle a entendu jusqu’à ce jour. […] Que de fois, la nuit, couché avec mon frère, la bougie enveloppée d’un cornet en gros papier, de peur que la lumière ne nous trahit, j’ai veillé jusqu’au blanc de l’aube pour lire Victor Hugo. « Dormirez-vous à la fin ! […] Que sera-ce, quand l’avenir l’aura pacifiée, lorsque le recul des années l’aura fixée dans l’harmonie et dans la lumière !

1024. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre II, grandeur et décadence de Bacchus. »

Sous cet aspect à demi humain, Bacchus figure le côté aventureux de la vie, l’instinct des migrations, l’esprit des conquêtes, la civilisation hellénique domptant et absorbant les barbares, les lois et les dieux portés comme des lumières, par la force d’un bras invincible, à travers les nations sombres. […] Un mariage funèbre les unit, la vie et la mort se pénètrent dans leurs embrassements. « Il y a aussi dans la tombe des amours et des noces », dit un poète antique : — Ως ϰάν ταφοίς έρωτες είσί ϰαί γάμοι Tous deux passent la saison de la torpeur hivernale dans le noir royaume ; puis ils remontent à la lumière, au milieu de la gloire en fleurs du printemps. […] Sous le nom déjà byzantin de Phanés — « Intelligence ou Lumière première — il n’est plus qu’une entité abstraite, qu’un Démiurge d’école, renseigne indéchiffrable d’une logomachie pédantesque.

1025. (1878) La poésie scientifique au XIXe siècle. Revue des deux mondes pp. 511-537

Ni l’expérience externe ni l’expérience interne, nos seules lumières, ne sont en état de résoudre le problème de la substance ; il leur est donc impossible d’en attester la division et la pluralité. […] En somme se résoudre aboutit à savoir Quelle secrète chaîne on suivra la dernière ; Toute l’indépendance expire à la lumière Puisqu’on saisit l’anneau sitôt qu’on l’a pu voir. […] Sur une pareille matière, il fallait répandre à flots la lumière, la couleur, la vie.

1026. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « H. Forneron » pp. 149-199

Éblouissants, ils avaient passé à travers l’Histoire dans le même tourbillon de lumière. Et quant à ces trois qui firent une famille de l’imposance d’une dynastie, et qui pouvait devenir une quatrième race, avant celle de Napoléon, on ne savait guères lequel était le plus grand, dans son tourbillon de lumière, de cette panoplie auréolisée de héros. […] » XII Voilà ce que le livre actuel de Forneron a mis, pour son compte, en lumière.

1027. (1856) Mémoires du duc de Saint-Simon pp. 5-63

Nulle part on n’a vu une telle force, une telle abondance de raisons si hardies, si frappantes, si bien accompagnées de détails précis et de preuves ; tous les intérêts, toutes les passions appelées au secours, l’ambition, l’honneur, le respect de l’opinion publique, le soin de ses amis, l’intérêt de l’État, la crainte ; toutes les objections renversées, tous les expédients trouvés, appliqués, ajustés ; une inondation d’évidence et d’éloquence qui terrasse la résistance, qui noie les doutes, qui verse à flots dans le cœur la lumière et la croyance ; par-dessus tout une impétuosité généreuse, un emportement d’amitié qui fait tout « mollir et ployer sous le faix de la véhémence » ; une licence d’expressions qui, en face d’un prince du sang, se déchaîne jusqu’aux insultes, « personne ne pouvant plus souffrir dans un petit-fils de France de trente-cinq ans ce que le magistrat et la police eussent châtié il y a longtemps dans tout autre » ; étant certain « que le dénûment et la saleté de sa vie le feraient tomber plus bas que ces seigneurs péris sous les ruines de leur obscurité débordée ; que c’était à lui, dont les deux mains touchaient à ces deux si différents états, d’en choisir un pour toute sa vie, puisque après avoir perdu tant d’années et nouvellement depuis l’affaire d’Espagne, meule nouvelle qui l’avait nouvellement suraccablé, un dernier affaissement aurait scellé la pierre du sépulcre où il se serait enfermé tout vivant, duquel après nul secours humain, ni sien ni de personne, ne le pourrait tirer. » Le duc d’Orléans fut emporté par ce torrent et céda. […] Comme un lustre flamboyant, chargé et encombré de lumières, mais exclu de la grande salle de spectacle, il brûla en secret dans sa chambre, et après cent cinquante ans, il éblouit encore. […] Quand un homme nous met le feu au cerveau, nous nous sentons presque du génie sous la contagion de sa verve ; par la chaleur notre esprit arrive à la lumière ; l’émotion l’agrandit et l’instruit.

1028. (1878) Leçons sur les phénomènes de la vie communs aux animaux et aux végétaux. Tome I (2e éd.)

Ces définitions ne rappellent-elles pas celle dont se moquait Pascal : « La lumière est un mouvement luminaire des corps lumineux » ? […] On entend dire en effet souvent que le physicien agit sur l’électricité ou sur la lumière ; que le médecin agit sur la vie, la santé, la fièvre ou la maladie : ce sont là des façons de parler. La lumière, l’électricité, la vie, la santé, la maladie, la fièvre, sont des êtres abstraits qu’un agent quelconque ne saurait atteindre ; mais il y a des conditions matérielles qui font apparaître les phénomènes que l’on rapporte à l’électricité : la chaleur, la lumière, la santé, la maladie ; nous pouvons agir sur elles et modifier par là ces différents états. […] Une expérience curieuse d’Engelmann semble jeter quelque lumière sur ce rôle d’excitant qu’aurait l’oxygène. […] Néanmoins, les recherches, les hypothèses s’accumulent, et un jour viendra où la lumière sortira de ce long et pénible travail.

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