/ 2522
888. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 418-420

En donnant ces préceptes, nous ne prétendons pas les appliquer à l’affectation trop commune de ne choisir jamais que l’amour pour ressort d’intérêt.

889. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 378-380

Montagne a le talent de développer tellement chacun des objets successifs, qu’il devient l’objet principal, & fait oublier volontiers le point duquel l’Ecrivain est parti ; on s’y arrête avec complaisance, par le nouvel intérêt qu’il inspire.

890. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — O. — article » pp. 430-432

Tout le monde connoît son Histoire des Révolutions d’Angleterre ; on ne peut la lire sans éprouver le plaisir qui naît de la surprise & de l’intérêt.

891. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 260-261

On s'abuse que de prétendre racheter par la chaleur de la versification, par quelques traits de profondeur & d'énergie dans les sentimens, le défaut d'intérêt & de combinaison dans la conduite d'une Piece.

892. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des romans — Préfaces de « Han d’Islande » (1823-1833) — Préface de janvier 1823 »

Il se bornera seulement à faire remarquer que la partie pittoresque de son roman a été l’objet d’un soin particulier ; qu’on y rencontre fréquemment des K, des Y, des H et des W, quoiqu’il n’ait jamais employé ces caractères romantiques qu’avec une extrême sobriété, témoin le nom historique de Guldenlew, que plusieurs chroniqueurs écrivent Guldenloëwe, ce qu’il n’a pas osé se permettre ; qu’on y trouve également de nombreuses diphtongues variées avec beaucoup de goût et d’élégance ; et qu’enfin tous les chapitres sont précédés d’épigraphes étranges et mystérieuses, qui ajoutent singulièrement à l’intérêt et donnent plus de physionomie à chaque partie de la composition.

893. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Introduction »

Mais il nous paraît qu’il y a quelque intérêt à les en dégager, à les formuler à part, en les accompagnant de leurs preuves et en les illustrant d’exemples empruntés soit à cet ouvrage, soit à des travaux encore inédits.

894. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre II. La Nationalisation de la Littérature (1610-1722) » pp. 107-277

Leurs intérêts les y engageaient, les intérêts mêmes de leur art, et le souci de leur dignité. […] Et si l’on cherche la raison de ce progrès du style narratif, où la trouvera-t-on, que dans l’intérêt nouveau qu’on prend aux choses voisines et contemporaines ? […] Elles offrent toutes ou presque toutes le plus grand intérêt pour l’histoire littéraire du temps […] La Correspondance est assez considérable, et du plus grand intérêt pour l’histoire de Bossuet. […] II, a publié une importante Correspondance de Malebranche, dont l’intérêt littéraire est de nous le montrer en relations avec Mairan et le groupe de Fontenelle.

895. (1903) Hommes et idées du XIXe siècle

L’enfant devient un homme, se marie par intérêt, veut se rendre libre et jette donc sa femme par la fenêtre. […] Mais il est placé dans notre société moderne, qui est fondée sur l’intérêt et dans laquelle le principe de l’égalité a abaissé toutes les barrières. […] Il a déversé dans ses livres le trop-plein de ses carnets : de là tant de niaiseries, tant de détails inutiles où s’éparpille l’intérêt, où se noie l’impression d’ensemble. […] Qu’ils mesurent les limites où les enferment et les intérêts de la morale et les conditions mêmes de leur art ! […] Il ne s’intéresse qu’à lui seul et pense que le monde entier porte à sa personne autant d’intérêt que lui-même.

896. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIe entretien. L’homme de lettres »

Ses vues politiques embrassent le globe entier, qu’il réunit par le commerce, par l’intérêt et par l’amour. […] Tout en se séparant de Martin pour vivre seule avec sa mère, elle se réservait la possibilité de le revoir pour ses intérêts littéraires. […] Ils se revirent de temps en temps, toujours avec un intérêt plus tendre, mais le silence qu’ils s’imposaient ne faisait qu’accroître leur tendresse muette. […] Si vous redoutez son crédit, chargez quelque autre que moi de faire un discours qui lui convienne: je ne peux dissimuler sur de si grands intérêts. […] Elle avait sacrifié ses intérêts aux vôtres, et vous avait préféré à la fortune, comme la seule récompense digne de sa vertu.

897. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIIIe entretien. Littérature cosmopolite. Les voyageurs »

J’ai touché un mot du pouvoir que la reine mère avait sur l’esprit du roi, et combien d’ailleurs elle était unie d’amitié et d’intérêt avec le premier ministre ; et j’ai dit aussi la consternation du roi, quand les assassins de ce seigneur lui présentèrent sa tête. […] Partout son voyage a le même intérêt, sans phrases. […] Vous ne pouvez donc pas sans injustice ou, pour mieux dire, sans une noire trahison, oublier l’aîné et le sacrifier et à vos passions et aux intérêts de son cadet. Que plutôt le cadet soit sacrifié à lui et aux intérêts de l’État ! […] Ils voyaient tous qu’il parlait contre ses propres intérêts, et que ce ne pouvait être que le zèle pour la justice et pour le bien de l’État, le désir de contenter les peuples et la fidélité qu’il devait à son défunt maître qui le faisaient agir.

898. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXI » pp. 220-221

Toutefois, la conception du Misanthrope peut avoir eu un autre principe : ne serait-ce pas l’intérêt commun de la société des quatre amis.

899. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 377-379

Ces différens objets avoient répandu un nouveau degré d’intérêt sur les travaux de ses Prédécesseurs, qui s’étoient écartés, en ce point, du plan suivi par tous ceux qui ont écrit l’Histoire de France.

900. (1763) Salon de 1763 « [À mon ami Monsieur Grimm. » pp. 171-182

La véritable éloquence ne se montrera qu’au milieu des grands intérêts publics.

901. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Machy » pp. 174-175

Cet assemblage d’architecture et de ruines produit de l’intérêt.

902. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Parocel » pp. 255-256

Au bas ce sont deux apôtres qui dorment de bon cœur et à qui l’on ne saurait pourtant reprocher le peu d’intérêt qu’ils prennent à leur maître, car le peintre ne l’a point fait intéressant.

903. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Avis du traducteur » pp. -

Le jour n’est pas loin sans doute où, le nom de Vico ayant pris enfin la place qui lui est due, un intérêt historique s’étendra sur tout ce qu’il a écrit, et où ses erreurs ne pourront faire tort à sa gloire ; mais ce temps n’est pas encore venu.

904. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « DE LA MÉDÉE D’APOLLONIUS. » pp. 359-406

Et pour ce qui est de la Didon de Virgile en particulier, à laquelle tout ceci a trait et se rapporte, on se rend mieux compte alors de ces qualités souveraines qui assurent la vie aux œuvres de l’art dans les époques d’entière culture, à savoir, la composition, l’unité d’intérêt et un achèvement heureux de l’ensemble et des parties. […] L’intérêt véritable est là ; on tient le nœud ; l’action se resserre, elle est vive, pressante, à la fois naturelle et merveilleuse, unissant les combinaisons mythologiques et les peintures du cœur humain. […] Lorsqu’ils furent sortis du palais tout affligés, Chalciope, se gardant de la colère d’Éétès, eut hâte de rentrer dans sa chambre avec ses fils ; et Médée aussi, de son côté, se retira : elle agitait en elle tout ce que les Amours soulèvent de chers intérêts dans une âme. […] C’est à ce moment, et comme dans ce lointain, que le poème devrait finir, ce me semble, pour garder son intérêt et pour trouver son unité. […] Qu’on se garde de conclure pourtant qu’il ne se rencontre pas encore de beaux passages, et dignes de souvenir, notamment l’épisode des noces en Phéacie ; ce que je veux marquer, c’est que l’action, si heureuse et si pleine dans son milieu, est véritablement sur le retour, c’est que l’intérêt principal se traîne et n’a plus d’objet.

905. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE LA FAYETTE » pp. 249-287

Dans ce genre secondaire où la délicatesse et un certain intérêt suffisent, mais où nul génie (s’il s’en rencontre) n’est de trop ; que l’Art poétique ne mentionne pas ; que Prevost, Le Sage et Jean-Jacques consacreront ; et qui, du temps de Mme de La Fayette, confinait, du moins dans ses parties élevées, aux parties attendrissantes de la Bérénice ou même de l’Iphigénie, Mme de La Fayette a fait exactement ce qu’en des genres plus estimés et plus graves ses contemporains illustres s’étaient à l’envi proposé. […] Rœderer, qui a intérêt à ce qu’aucune des plaisanteries de Molière n’atteigne l’hôtel de Rambouillet, le fait se dépeupler et finir un peu plus tôt qu’il ne convient. […] Je ne lui répondis qu’avec des larmes… « Cependant elle diminuoit toujours… » Le 30 juin 1673, Mme de La Fayette écrivait à Mme de Sévigné : « Il y a aujourd’hui trois ans que je vis mourir Madame : je relus hier plusieurs de ses lettres ; je suis toute pleine d’elle. » Au milieu de ce monde galant et brillant, durant dix années, Mme de La Fayette jeune encore, avec de la noblesse et de l’agrément de visage, sinon de la beauté, n’était-elle donc qu’observatrice et attentive, sans intérêt actif de cœur, autre que son attachement pour Madame, sans choix singulier et secret ? […] ) — Je ne veux pas oublier de vous dire que j’ai trouvé terriblement de l’esprit au comte de Saint-Paul. » Pour ajouter à l’intérêt de cette lettre, qu’on veuille bien se rappeler la situation précise : M. de Saint-Paul, fils de Mme de Longueville et probablement aussi de M. de La Rochefoucauld, venant voir Mme de La Fayette, qui passe pour l’objet d’une dernière passion tendre, et qui voudrait le voir détrompé… ou trompé là-dessus. — Le terriblement d’esprit du jeune prince allait droit, je pense, au cœur de Mme de Longueville, à qui le post-scriptum au moins, et le reste aussi sans doute, fut bien vite montré. […] Elle en avoit aussi beaucoup que M. de Nemours les connût ; mais cette dernière douleur n’étoit pas si entière, et elle étoit mêlée de quelque sorte de douceur. » — Les scènes y sont justes, bien coupées, parlantes, en un ou deux cas seulement invraisemblables, mais sauvées encore par l’à-propos de l’intérêt et un certain air de négligence.

906. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers (2e partie) » pp. 177-248

C’est en creusant qu’on trouve l’intérêt au fond de l’histoire : celui qui voit tout s’intéresse à tout. […] Thiers donne à ce procès l’intérêt d’un grand drame ; il y est aussi juste qu’éloquent : juste envers Bonaparte, qui avait le droit de sévir contre un rival devenu un conjuré ; juste envers Moreau, qui avait failli à la patrie, à la reconnaissance et à lui-même ; juste envers la magistrature du pays, qui montre dans ce jugement des caractères dignes de Rome. […] « Moreau, cette fois, était accablé, et l’intérêt de l’auditoire avait fini par diminuer sensiblement. Toutefois, de maladroits reproches du président sur sa fortune avaient un peu réveillé cet intérêt prêt à s’éteindre. « Vous êtes au moins coupable de non-révélation, lui avait dit le président ; et, bien que vous prétendiez qu’un homme comme vous ne saurait faire le métier de dénonciateur, vous deviez d’abord obéir à la loi, qui ordonne à tout citoyen, quel qu’il soit, de dénoncer les complots dont il acquiert la connaissance. […] XXIII Le vingt et unième livre est une accumulation d’intérêt historique pressé dans l’espace d’une demi-année par les événements comme sous la plume de l’écrivain : création du royaume d’Italie, second couronnement à Milan ; coalition européenne contre l’ambition du nouveau César ; négociation entre la Russie, l’Angleterre et l’Autriche ; anxiété de Napoléon attendant en vain la concentration de ses flottes sous l’amiral Villeneuve ; sa fureur quand il voit tous ses plans déjoués par Villeneuve, qui a fait voile pour Cadix au lieu de se diriger sur la Manche ; le renversement subit de toutes les pensées et de tous les efforts de volonté de Napoléon, au moment de l’exécution si longtemps et si laborieusement préparée ; l’improvisation non moins subite de son plan d’invasion en Allemagne ; la marche de son armée en six colonnes, des bords de l’Océan aux sources du Danube, marche sans parallèle dans l’histoire par l’ordre, la précision, l’arrivée au but marqué à heure fixe ; l’investissement de l’armée autrichienne dans Ulm ; la reddition de toute l’armée du général Mack ; quatre-vingt mille ennemis anéantis en vingt jours ; pendant ce triomphe sur le continent, le plus grand revers maritime dont le monde moderne ait été témoin dans la bataille navale de Trafalgar ; toutes les pensées d’invasion de l’Angleterre par Napoléon englouties avec nos vaisseaux sous le canon de Nelson ; description vivante de ce combat naval ; mort de Nelson, qui paye de sa vie tant de gloire ; marche sur Vienne entre le Danube et les Alpes ; bataille d’Austerlitz livrée aux Russes ; aptitude unique de l’historien pour exposer homme à homme l’organisation des armées, et pour suivre pas à pas les plans et les marches d’une campagne ; feu de l’âme du général transvasé dans l’âme de l’écrivain ; scènes pittoresques du champ de bataille décrit sans autre éclat que la topographie exacte et que l’éclat sévère des armes sur la terre ou sur la neige des plaines ou des coteaux.

907. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CIXe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (1re partie) » pp. 5-79

Il ne faut pas qu’on s’y trompe, le titre ne donne pas une idée précise du livre ; bien qu’il soit d’un grand et vif intérêt, il n’a que très peu d’analogie avec ce que nous appelons ordinairement Mémoires. […] Cet homme de bien, très détaché de lui-même, ne se jugeait pas assez important pour s’occuper exclusivement de lui et pour en occuper les autres ; il se passe habituellement sous silence ; mais, quand il rencontre sur le chemin de ses souvenirs et de sa plume quelqu’une de ces questions historiques qui ont agité et l’Église et le monde, telles que le concordat, le rétablissement du culte en France, le conclave d’où sortit Pie VII, le voyage du pape à Paris pour y couronner Napoléon, l’emprisonnement de ce pontife à Savone, sa dure captivité, sa résidence forcée à Fontainebleau, les désastres de Russie et de Leipsick qui forcèrent l’empereur à tenter sa réconciliation avec Pie VII et à renoncer à l’empire des âmes pour recouvrer à demi l’empire des soldats ; le retour du pape à Rome, l’enthousiasme de l’Italie à sa vue, qui le fait triompher seul à Rome de l’omnipotence indécise de Murat en 1813 ; enfin sa restauration spontanée sur son trône : alors Consalvi, directement ou indirectement mêlé à toutes ces transactions, prend des notes, les rédige et les confie aux archives du Saint-Siège pour éclairer le gouvernement pontifical et traditionnel sur ses intérêts. […] Poussant même les choses au-delà des justes bornes, je ne visitai jamais, ainsi que mes confrères, les neveux du Pape, et je n’assistai jamais à leurs réunions, car j’avais peur qu’on ne crût que l’intérêt me guidait. […] Comme j’étais bien résolu de mourir auditeur ou d’attendre le cours naturel des choses, afin d’en être le doyen et d’arriver au cardinalat par cette voie, je crus que visiter la famille Braschi, ce serait alors gratitude et non plus intérêt. […] Il fit remarquer en même temps quel était son zèle pour le bien de l’Église, son estime et son intérêt à l’égard de Son Éminence, en choisissant comme Pape un membre du parti opposé au sien, lié par tant d’attaches au pape Pie VI dont il était la créature la plus aimée, et qui, entre parenthèses, était uni à Son Éminence et à la maison Braschi par la gratitude et par l’amour de la même patrie.

908. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIIIe entretien. Fior d’Aliza » pp. 177-256

Au premier regard, il paraissait évident que l’intérêt de la France serait de se poser en médiatrice entre les rois et les peuples, et d’empêcher les puissances étrangères d’intervenir, comme une haute police armée, à Naples, et bientôt à Turin, pour faire reculer le régime des institutions libres. […] Calquée sur l’insurrection armée de Cadix et de Riego, en Espagne, elle était un encouragement à toutes les turbulences des ambitieux de régiment ; enfin, si la Sainte-Alliance, cette mutualité des rois, prenait dans un congrès fait et cause pour le roi de Naples, il était bien embarrassant à nous, gouvernement restauré par la vertu et dans l’intérêt de cette ligue de monarchies, de nous déclarer contre elle les soutiens d’une insurrection de troupes et de conspirateurs qui couvaient peut-être jusque sous notre propre trône, à Paris. […] Le cardinal Consalvi la visitait deux fois par jour, une fois dans la matinée pour les intérêts politiques de son gouvernement avec l’Angleterre, dont elle passait pour l’ambassadeur anonyme ; une fois dans la soirée, pour s’y délasser dans un petit cercle d’hommes d’esprit des soucis du ministère. […] Notre devoir, selon moi, n’était pas de fomenter en Italie l’agrandissement, diminutif pour la France, de la maison de Savoie, mais de favoriser une confédération italienne qui constituât la péninsule en États solidaires contre l’Autriche et reliés à la France par l’éternel intérêt d’une indépendance commune. […] La destination romanesque et pieuse de ce monument extraordinaire et mystérieux ajoutait à cette vue un intérêt qui sacrait pour ainsi dire le bois et la pierre.

909. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre premier. Le Moyen Âge (842-1498) » pp. 1-39

Ajoutons même ici que, de n’avoir été précipitée ou contrariée dans son mouvement par aucune intervention du dehors ni par aucun caprice individuel, c’est ce qui fait le grand intérêt historique de la littérature du Moyen Âge. […] Et comment ne s’aviseraient-ils pas, en lisant la Vie de saint Louis, du sire de Joinville, ou la Conquête de Constantinople, de Geoffroy de Villehardouin, que l’emploi de la prose n’enlève rien à l’intérêt d’un récit, fut-il même héroïque ? […] À cette différenciation des genres et des classes, nous voyons enfin se lier une différenciation des nationalités ; et quand il est bien établi que ni la Papauté ni l’Empire ne peuvent maintenir l’unité de l’Europe contre la diversité des intérêts qui la divisent, ce sont, après les genres ou les classes, les nations à leur tour qui prennent conscience d’elles-mêmes. […] Gaston Paris, La Littérature française au Moyen Âge]. — La matière déborde le cadre ; — l’intérêt général cède le pas à l’intérêt d’actualité pure ; — et comme cette dernière phase coïncide avec celle de la perversion de la langue, — le Moyen Âge, une fois de plus, manque l’occasion de fixer une ingénieuse idée sous la forme d’un chef-d’œuvre. […] Il n’est l’auteur ni des Repues franches, ni du Franc archer de Bagnolet qu’on s’obstine à reproduire dans presque toutes les éditions de son œuvre ; — et des onze Ballades en jobelin ou en argot qu’on lui attribue, il y en a quatre au moins qui ne sont certainement pas de lui ; — mais toutes ces pièces ont le grand intérêt, puisqu’on les lui a attribuées, de prouver par là même le caractère représentatif de son œuvre ; — et que les contemporains l’ont aussitôt reconnu.

910. (1840) Kant et sa philosophie. Revue des Deux Mondes

Lorsque de toutes parts il n’était question en France, en Angleterre, en Italie, que de plaisir, d’intérêt et de bonheur, une voix s’éleva de Kœnigsberg pour rappeler l’âme humaine au sentiment de sa dignité, et enseigner aux individus et aux nations qu’au-dessus des attraits du plaisir et des calculs de l’intérêt, il y a quelque chose encore, une règle, une loi, une loi immuable, obligatoire en tout temps et en tout lieu et dans toutes les conditions sociales ou privées : la loi du devoir. […] S’il y a dans l’homme l’idée d’une loi supérieure à la passion et à l’intérêt, ou l’existence de l’homme est une contradiction et un problème insoluble, ou bien il faut que l’homme puisse accomplir la loi qui lui est imposée ; si l’homme doit, il faut qu’il puisse, et le devoir implique la liberté. […] Enfin, l’idée du devoir implique encore l’idée du droit : mon devoir envers vous est votre droit sur moi, comme vos devoirs envers moi sont mes droits sur vous ; de là encore une morale sociale, un droit naturel, une philosophie politique, bien différente et de la politique effrénée de la passion et de la politique tortueuse de l’intérêt. […] Et il indique les argumens en faveur de l’existence de Dieu, de la liberté, de l’immortalité que donnait l’ancienne métaphysique, et ceux que la nouvelle mettra à leur place ; il soutient que la critique peut bien nuire au monopole de l’école, mais non pas à l’intérêt du genre humain, puisqu’elle-même répare les ruines qu’elle opère.

911. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — I. Faculté des arts. Premier cours d’études. » pp. 453-488

Par une sorte de vanité qui n’est pas la moins insensée, l’homme met souvent à ses jeux, à la Plus dangereuse et la plus frivole de ses occupations, plus d’importance qu’à ses affaires d’intérêt. […] Les arts mécaniques sont stationnaires par l’ignorance des ouvriers ; ils dégénèrent par leur intérêt mal entendu. […] La logique est l’art de penser juste, ou de faire un usage légitime de ses sens et de sa raison, de s’assurer de la vérité des connaissances qu’on a reçues, de bien conduire son esprit dans la recherche de la vérité, et de démêler les erreurs de l’ignorance ou les sophismes de l’intérêt et des passions : art sans lequel toutes les connaissances sont peut-être plus nuisibles qu’utiles à l’homme, qui en devient ridicule, sot ou méchant. […] Je demande si ces personnages fameux, connus d’avance, on n’en rencontrera pas les noms avec plus d’intérêt dans les ouvrages qui en parleront ; si l’on n’en interprétera pas plus aisément ces ouvrages, si l’on n’en sentira pas mieux le charme, et si les épines de la grammaire n’en seront pas émoussées ? […] 4° D’un traité du bon et du beau, qui n’est jamais que l’éclat du bon ; du sublime, qui n’est que l’éclat du bien ou du mal, accompagné d’un frisson qui naît, ou de la grandeur, ou du péril, ou de l’intérêt.

912. (1739) Vie de Molière

Cette intrigue a le défaut d’un roman, sans en avoir l’intérêt ; et le cinquième acte employé à débrouiller ce roman, n’a paru ni vif ni comique. […] Il eut un grand succès sur ce théâtre irrégulier ; on ne se révolta point contre le monstrueux assemblage de bouffonnerie et de religion, de plaisanterie et d’horreur, ni contre les prodiges extravagants qui font le sujet de cette pièce : une statue qui marche et qui parle, et les flammes de l’enfer qui engloutissent un débauché sur le théâtre d’Arlequin, ne soulevèrent point les esprits : soit qu’en effet il y ait dans cette pièce quelque intérêt, soit que le jeu des comédiens l’embellit ; soit plutôt que le peuple, à qui Le Festin de Pierre plaît beaucoup plus qu’aux honnêtes gens, aime cette espèce de merveilleux. […] Il s’est fait à lui-même un sujet stérile, privé d’action, dénué d’intérêt. […] Enfin on prendrait la liberté de dire, que Le Misanthrope est une satire plus sage et plus fine que celles d’Horace et de Boileau, et pour le moins aussi bien écrite : mais qu’il y a des comédies plus intéressantes ; et que le Tartuffe, par exemple, réunit les beautés du style du Misanthrope, avec un intérêt plus marqué. […] Loin d’examiner sévèrement cette farce, les gens de bon goût reprochèrent à l’auteur d’avilir trop souvent son génie à des ouvrages frivoles qui ne méritaient pas d’examen ; mais Molière leur répondait qu’il était comédien aussi bien qu’auteur, qu’il fallait réjouir la cour et attirer le peuple, et qu’il était réduit à consulter l’intérêt de ses acteurs aussi bien que sa propre gloire.

913. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre premier. La Formation de l’Idéal classique (1498-1610) » pp. 40-106

Car, d’où vient l’intérêt que nous prenons à tous ces personnages, et quelle en est au vrai la nature ? […] Par des chemins différents, tous ces écrits, d’origine et de caractères si divers, tendent ensemble à deux ou trois fins : dont la première est de rendre à la morale éternelle quelque chose au moins de son ancien empire ; la deuxième, de soustraire l’esprit français à des influences étrangères que l’on regarde alors bien moins comme des entraves à sa liberté que comme les causes de sa corruption ; et la troisième enfin, d’imposer à l’individu, dans l’intérêt commun de la société, les qualités ou les vertus dont il ne se soucierait pas pour lui-même. […] Dans l’intérêt de la société des hommes, et par conséquent, dans son intérêt même, personnel et particulier, que chacun de nous abdique donc un peu de cet égoïsme qui lui est d’ailleurs si naturel ! […] Pierre de Larrivey [1540-1612] ; — son origine italienne ; — sa traduction des Facétieuses Nuits de Straparole, 1576 ; — ses comédies, 1579. — Il n’y en a pas une des neuf qui ne soit traduite ou « adaptée » de quelque comédie italienne. — Déclarations de Larrivey dans sa Dédicace à M. d’Amboise. — À noter également que ses comédies sont toutes en prose. — Ce sont de pures comédies d’intrigue. — Le principal intérêt qu’elles offrent est d’avoir été plus tard imitées par Molière [Cf. notamment L’Avare d’une part, et de l’autre Le Laquais, I, sc. 1 ; — La Veuve (dont l’original italien a pour auteur un Bonaparte), III, sc. 2 ; — et Les Esprits, III, sc. 6]. — D’une curieuse différence de ton entre les premières et les dernières comédies de Larrivey : La Constance, Le Fidèle, Les Tromperies ; — et en quoi celles-ci sont plus romanesques. […] Palissy [Cf. l’article indiqué de Lamartine, et Henri Martin, dans son Histoire de France] ; — et que les chefs-d’œuvre de l’art de terre ne méritent pas tant d’enthousiasme ; — s’il peut y avoir infiniment d’art, mais il n’y a pas de grand art où il n’y a pas de grand dessein ; — et il n’y en a pas dans un pot. — Intérêt littéraire de la distinction. — Vie et aventures de Bernard Palissy. — La page fameuse de l’Art de terre [Édit.

914. (1891) La bataille littéraire. Quatrième série (1887-1888) pp. 1-398

En l’éclairant sur ses intérêts et sur ses devoirs, ou en flattant ses mauvais instincts et ses goûts dépravés. […] La fable prend son intérêt d’intensité dans sa simplicité, et c’est de cette simplicité même que naît l’émotion que l’on conserve encore longtemps après qu’on a fermé le livre. […] Je n’ai pas à cacher l’intérêt du livre qui est réel, mais j’ai dû signaler ses tendances au lecteur. […] L’avilissement de ces deux personnages l’un par l’autre est-il suffisant pour l’intérêt du roman ? […] Le livre a tout l’intérêt d’un procès et ne sera certes pas un des moindres succès du romancier.

915. (1928) Quelques témoignages : hommes et idées. Tome II

Le grand intérêt du livre du Père Lebreton est de nous initier à une existence spirituelle où les événements extérieurs ne furent presque rien en regard du développement intérieur. […] Ce jour-là, il me parla surtout de l’intérêt qu’offraient ses longues séances aux Archives. […] Avec Dumas fils, Augier et Barrière, le théâtre substitue à l’élan passionnel du romantisme un constat volontiers brutal des appétits et des intérêts. […] Pour ce qui me concerne, il remonte en moi cet intérêt aux premiers jours de ma jeunesse. […] Les Serbes, les Bulgares, les Grecs vont suivre, et que d’intérêts plus ou moins avoués se trouvent engagés dans le conflit !

916. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Appendice — Sur un exemplaire de Vauquelin de la Fresnaie »

Elle est d’un grand intérêt pour les amateurs, et ne contribuait pas peu à en donner au livre171.

917. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre XII. Dernière et nécessaire opération, qui consiste à corriger ce que l’on a écrit »

Non ; il reste une dernière partie du travail, non la moins nécessaire et la moins délicate, mais dont on se dispense souvent, parce qu’elle est moins matériellement indispensable, parce qu’on est las de l’activité dépensée, parce que ce travail est minutieux, ennuyeux, parce que l’on n’est plus soutenu par le plaisir d’inventer, de créer, et qu’enfin l’œuvre étant si avancée, vivant par elle-même, l’auteur s’en détache et n’y prend plus le même intérêt.

918. (1891) [Textes sur l’école romane] (Le Figaro)

Le symbolisme, qui n’a eu que l’intérêt d’un phénomène de transition, est mort.

919. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 421-423

Ce personnage est le principal mobile de l’action ; & sans agir pour lui-même, sans affoiblir l’intérêt qui roule sur les Amans, ni emprunter aucun secours étranger, il parvient à faire sortir le dénouement du fond du sujet ; ce qui est très-rare dans un Valet intrigant, & peut-être même sans exemple chez nos meilleurs Comiques anciens & modernes.

920. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 367-370

Il est vrai que cette liberté de prononcer sur les Ecrivains, qui, en général, ne demandent que des Panégyristes, lui attira des disgraces, & en occasionna la suppression pour quelque temps : mais l’autorité comprit bientôt qu’il n’étoit pas moins essentiel de maintenir les loix de la Littérature, que celle de la subordination dans les autres ordres de l’Etat ; qu’il sera toujours avantageux aux Littérateurs d’être instruits, redressés, & contenus dans les bornes qu’ils ne doivent pas franchir ; que le bon usage des connoissances & des talens est un objet essentiel à l’intérêt & aux agrémens de la société ; que l’abus de ces deux puissans ressorts, dignes de toute l’attention de la Politique, entraîne toujours des suites dangereuses ; qu’un esprit éclairé, courageux, inflexible, mérite de l’encouragement, & ne doit point être livré à d’injustes persécutions.

921. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 459-462

La force, la vivacité, la chaleur, la plaisanterie, le raisonnement, y jettent une variété & un intérêt qui soutient l’attention du Lecteur, malgré la longueur & la fréquence des citations.

922. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 474-476

On sent qu’un Ouvrage de la nature de celui-là, qui contredit les idées reçues, & qui contient une doctrine si opposée à celle des Inoculateurs & à leurs intérêts, devoit nécessairement éprouver des contradictions, & susciter des ennemis à l’Auteur.

923. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 548-551

Le but du Prédicateur est de persuader, c’est-à-dire, de faire passer dans l’ame de ceux qui l’écoutent ou qui le lisent, les sentimens qu’il a intérêt de leur communiquer.

924. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préfaces des « Odes et Ballades » (1822-1853) — Préface de 1823 »

Il a donc pensé que si l’on plaçait le mouvement de l’Ode dans les idées plutôt que dans les mots, si de plus on en asseyait la composition sur une idée fondamentale quelconque qui fût appropriée au sujet, et dont le développement s’appuyât dans toutes ses parties sur le développement de l’événement qu’elle raconterait, en substituant aux couleurs usées et fausses de la mythologie païenne les couleurs neuves et vraies de la théogonie chrétienne, on pourrait jeter dans l’Ode quelque chose de l’intérêt du drame, et lui faire parler en outre ce langage austère, consolant et religieux, dont a besoin une vieille société qui sort, encore toute chancelante, des saturnales de l’athéisme et de l’anarchie.

925. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre II. Les directions divergentes de l’évolution de la vie. Torpeur, intelligence, instinct. »

Encore ces directions n’ont-elles pas toutes pour nous le même intérêt : c’est de la voie qui conduit à l’homme que nous devons nous occuper plus particulièrement. […] L’intérêt bien entendu de l’animal était donc de se rendre plus mobile. Comme nous le disions à propos de l’adaptation en général, on pourra toujours expliquer par leur intérêt particulier la transformation des espèces. […] De la mobilité même notre intelligence se détourne, parce qu’elle n’a aucun intérêt à s’en occuper. […] Il est présumable que, sans le langage, l’intelligence aurait été rivée aux objets matériels qu’elle avait intérêt à considérer.

926. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Souvenirs militaires et intimes du général vicomte de Pelleport, publiés par son fils. » pp. 324-345

En traversant le midi de la France, il y rencontre la réaction dans tout son feu : Les terroristes et les thermidoriens se disputaient le pouvoir ; les royalistes, malgré la paix de Bâle et les désastres de Quiberon, conservaient leurs espérances ; chaque parti se plaignait de l’armée parce qu’elle restait étrangère aux passions et aux intérêts de tous ; elle commençait à jouer son rôle : elle restait froide au milieu de ce brouhaha politique. […] Après avoir jeté un coup d’œil rapide, sur ce corps couvert de haillons, mais riche de jeunesse, ayant le courage des privations et l’expérience acquise par trois campagnes, soit dans les Alpes et les Pyrénées, soit dans la Vendée, il réunit les officiers, se plaça dans le cercle et nous dit : « J’ai suivi avec un grand intérêt les opérations de la dernière campagne, soit en Espagne, soit en Italie ; j’ai applaudi au courage et au dévouement des deux armées. […] Le récit qu’il fait de la campagne de Russie où il eut une si belle conduite sous les ordres de Ney à l’arrière-garde de la retraite, commence par un aveu d’une effusion extrême, et qui exprime bien le genre d’intérêt religieux que ces militaires esclaves du devoir et de l’honneur attachent à la consécration des souvenirs : L’un des grands regrets que je puisse éprouver aujourd’hui, écrivait Pelleport dans les dernières années de sa vie, c’est de penser qu’il me faudra peut-être mourir sans avoir pu lire dans Thiers l’histoire de notre immortelle campagne de Russie.

927. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Benjamin Constant. Son cours de politique constitutionnelle, ou collection de ses divers écrits et brochures avec une introduction et des notes, par M. Laboulaye »

Mais, après tout, ce prétexte, qui a fourni quelques armes à la jalouse médiocrité, ou plutôt à la mauvaise foi, pour les cas où il s’agit de la France et de ses intérêts secrets, devient ici sans application possible, puisqu’il est question d’une organisation étrangère. […] pourquoi n’avoir pas joint au recueil les Lettres de Benjamin Constant sur les Cent-Jours, de tous ses ouvrages politiques celui qui est resté le plus vivant, le seul vivant même, à cause de l’intérêt qui s’attache à des conversations immortelles ? […] Voici une de ses phrases fameuses et du petit nombre de celles qu’on retient ; il parle, dans la préface de son livre sur la Religion, contre le principe moral de l’intérêt bien entendu : « Son effet naturel, dit-il, est de faire que chaque individu soit son propre centre.

928. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe, et d’Eckermann »

Mais vous, jeunes gens, vous pouvez dire s’ils ont pour vous de la valeur, et s’ils présentent quelque intérêt, à notre point de vue littéraire actuel. » On voit, dès les premiers jours, le genre d’emploi qu’il assignera à Eckermann et la fonction que celui-ci exercera auprès de lui. […] Cousin, de « rester toujours à la maison. » Gœthe avait donc organisé sa vie avec ensemble, avec une suprême ordonnance, et dans l’intérêt de cette universalité de goûts qui était le caractère éminent de sa vaste intelligence. […] Ne déracinez pas les pensées sous prétexte de les montrer plus nettes et plus dégagées ; elles y perdent de leur sève et de leur fraîcheur. — Je reviens à la poésie d’après Gœthe, et à ce qui la fait naître et l’alimente : « Que l’on ne dise pas, ajoutait-il, que l’intérêt poétique manque à la vie réelle, car justement on prouve que l’on est poëte lorsque l’on a l’esprit de découvrir un aspect intéressant dans un objet vulgaire.

929. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Don Carlos et Philippe II par M. Gachard Don Carlos et Philippe II par M. Charles de Mouy »

Je ne sais pas d’exemple plus propre à marquer la difficulté de condition qui est faite dorénavant aux poètes modernes, condition la plus opposée à celle des poètes de l’Antiquité, lesquels, avant l’institution de la critique, avaient pour eux et en faveur de leurs créations les bruits, les fables, les erreurs répandues dans l’air, pourvu qu’elles fussent touchantes et de nature à exciter l’intérêt. […] A la nouvelle du fâcheux accident, Philippe II fut plein d’inquiétude et manifesta le plus grand intérêt pour l’état de son fils. […] A l’intérêt que le roman et le théâtre avaient jeté sur l’infortuné don Carlos, à cet amour partagé qui aurait fait deux victimes, à cet enthousiasme de philosophie et de liberté dont le prince espagnol aurait été le complice et le martyr, est substitué, d’après des pièces authentiques, le récit d’une longue démence et d’une maladie terminée par la mort.

930. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Jean-Bon Saint-André, sa vie et ses écrits. par M. Michel Nicolas. (suite et fin.) »

Nous faisions entendre qu’en notre qualité d’otages l’aga devait veiller à notre sûreté et qu’il était responsable de notre conservation ; ces représentations produisaient si peu d’effet qu’un jour que le citoyen Majastre se présenta à lui la tète ensanglantée d’une pierre qu’il venait de recevoir à côté de l’œil et qui lui avait fait une blessure large et profonde, il n’en obtint pas un signe d’intérêt. […] Haag, la France protestante, à l’article Jean-Bon Saint-André, je trouve cette remarque sur la Relation qu’il a donnée de sa captivité : « Elle n’est pas sans intérêt, y est-il dit ; elle renferme des détails curieux sur le caractère et les mœurs des Turcs ; mais il nous semble qu’un homme tel que Jean-Bon, qui avait traversé sans sourciller le règne de la Terreur, aurait dû être plus endurci aux contrariétés et aux privations. […] L’exécution de ces grands travaux est aussi nécessaire à l’intérêt de mes peuples qu’à ma propre satisfaction… Les fonds ne manquent pas ; mais il me semble que tout cela marche lentement, et cependant les années se passent.

931. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires de Malouet (suite et fin.) »

Ce moment inspira sans doute un vif intérêt à tous ceux qui aiment la Constitution, et qui ont étudié les causes de la Révolution à qui nous en sommes redevables. […] Un moment Malouet a la pensée de partir pour Saint-Domingue, où l’insurrection vient d’éclater, et où des intérêts de fortune l’appellent. […] Les principaux propriétaires de Saint-Domingue, le voyant si bien accueilli de plusieurs membres du Cabinet anglais, lui confièrent leurs intérêts et lui donnèrent leurs pleins pouvoirs « pour solliciter auprès du Gouvernement anglais des moyens de protection contre l’insurrection des nègres, qui était notoirement suscitée par la Convention. » Le point délicat à traiter dans cette affaire, c’était, tout en demandant et en acceptant l’appui de l’Angleterre, de ne pas abjurer sa qualité de Français et de ne pas prétendre disposer de la souveraineté de l’île : il s’agissait donc de constituer une sorte de séquestre provisoire de la colonie sous la garde du Gouvernement anglais, en réservant la question de droit et de souveraineté jusqu’au prochain traité de paix qui interviendrait entre les deux nations.

932. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE PONTIVY » pp. 492-514

La jeune fille de Saint-Cyr, tombée ainsi au milieu de ces gentilshommes révoltés, et de ce prochain de Bretagne moins joli et plus tumultueux que jamais, le prit sur un tout autre ton d’intérêt et d’émotion, on peut le croire, que Mme de Sévigné en son temps simple spectatrice pour son plaisir, du bout de son avenue des Rochers. […] Quoique l’expiration du règne de Louis XIV et de la dévotion régnante fût pour lui un énorme poids de moins, quoiqu’il se sentît avec joie délivré de cette condition de faveur à laquelle il aurait pu difficilement se soustraire, et dont l’idée le blessait par une honte secrète (lui converti, enfant, par astuce et intérêt), pourtant il ne voyait dans la Régence qu’un débordement déplorable et la ruine de toutes les nobles mœurs. […] Et il arrivait que cette pensée, commençant par M. de Pontivy, n’aboutissait bientôt qu’à sentir et à admirer tout ce qu’avait de délicat la conduite de M. de Murçay, qui, l’aimant (elle n’en pouvait douter), agissait si sincèrement pour le retour et dans l’intérêt d’un rival.

933. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre I. Renaissance et Réforme avant 1535 — Chapitre II. Clément Marot »

Les dominicains, pour l’intérêt des études théologiques et de leurs missions lointaines, semblent s’être préoccupés du grec, comme de l’hébreu : on a d’eux quelques traductions faites sur les originaux. […] Même François Ier voulait témoigner par des effets plus solides l’intérêt que, selon son idée du prince accompli, il estimait devoir prendre aux études : il rêva des établissements fastueux, dont le malheur du temps priva la France. […] Il est visible que dans l’Heptaméron l’intérêt ne va pas surtout aux actions, mais aux mobiles, aux antécédents intérieurs des actions.

934. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre IV. Le patriarche de Ferney »

A ses vieux griefs contre les Parlements jansénistes s’ajoutait une haine humanitaire contre les traditions surannées de ces corps, contre leur légèreté, leur présomption, contre leur égoïste indifférence, et la préférence qu’ils donnaient à leurs intérêts collectifs sur l’intérêt de la justice ou des particuliers : aussi applaudit-il des deux mains au coup d’État de Maupeou, à l’institution des nouveaux Conseils qui promettaient une justice plus rapide, plus sûre, plus humaine. […] Il méprisait les hommes en masse, le peuple, et il a eu des phrases révoltantes sur ce bétail humain que les propriétaires, les rois, doivent engraisser dans leur propre intérêt : il n’estimait pas l’humanité capable de faire elle-même son bien ; il ne croyait qu’aux réformes venues d’en haut, et le despote bienfaisant était son idéal.

935. (1902) L’œuvre de M. Paul Bourget et la manière de M. Anatole France

Est-il, en effet, un romancier dont la méditation eût pu mieux flatter, s’il ne se fût si tôt perverti, ce goût cérébral très accentué qui a failli se généraliser pour une mesure presque savante d’expression, de portée et d’intérêt ? […] Qui ne voit d’ailleurs que les grandes lignes du roman, c’est-à-dire le sujet dans sa floraison mouvante, ne sauraient constituer à elles seules le roman, ni surtout le roman d’analyse ; que, par suite, le sujet ne saurait être entièrement séparé de sa portée psychologique, et nous entendons par l’auteur, — dont le dogmatisme n’est une charge d’état que parce qu’il y a des significations multiples derrière les événements les plus futiles en apparence, derrière les moindres affirmations de la réalité où tout s’enchaîne, tout le passé à tout le présent, dans une constante, rigoureuse et subtile logique. — On ne peut nier non plus que, si les faits présentés, si peu alourdis qu’ils soient de complications matérielles, se distinguent des ordinaires accidents ressassés, par une idée, — il en résulte souvent un ensemble capable d’offrir des ressources d’émotion et d’intérêt, mille fois plus puissantes sur le cœur que ne l’ont jamais été sur l’imagination les ficelles du roman à physionomie unilatérale, comme le roman d’aventures, par exemple. […] Bourget avec l’intérêt qu’il mérite, aura sans doute observé en cet esprit logique un phénomène très curieux de sujétion idéale, exercée sur ses dispositions raisonnées par des exigences de sensibilité souvent contradictoires.

936. (1890) L’avenir de la science « XIX » p. 421

Qui ne serait profondément touché en voyant l’intérêt que nos classes ignorantes prennent à cette civilisation qui est là au milieu d’eux, non pour eux ? […] Quand l’objet scientifique a par lui-même quelque intérêt esthétique ou moral, il occupe tout entier celui qui s’y applique ; quand, au contraire, il ne dit absolument rien à l’imagination et au cœur, il laisse ces deux facultés libres de vaquer à leur aise. […] Or ne serait-il pas plus utile et plus agréable d’exercer durant deux ou trois heures le métier de menuisier ou de jardinier, en le prenant au sérieux, c’est-à-dire avec un intérêt réel, que de se fatiguer ainsi à des mouvements insignifiants et sans but ?

937. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — CHAPITRE VII »

Aux reproches accablants de son père, le fils répond par des récriminations injurieuses ; il l’accuse de l’avoir arraché à Léa et marié à sa pupille, pour satisfaire un intérêt égoïste. […] » Cela dit, le talent l’emporte : ce n’est pas l’intérêt de l’action, souvent fausse ou vide, qu’il faut chercher dans le drame de M.  […] La présence réelle est une des lois de l’intérêt, au théâtre ; là surtout les absents ont tort.

938. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur de Broglie. » pp. 376-398

Indépendamment de l’intérêt tout particulier qui s’attachait au nom glorieux de Ney et de la question d’humanité même, il y avait dans ce vote autre chose encore, il y avait une théorie. […] Nul n’a fait plus que lui usage de la réflexion et de la dialectique pour réagir sur lui-même et sur son idée, pour élever sa doctrine libérale première à une puissance plus haute, pour la couronner d’une idée religieuse qui la rendît sainte, pour lui trouver au-dedans de l’homme une base plus digne et plus intime que celle de l’utilité commune ou de l’intérêt bien entendu. […] Humann, ministre des Finances, en présentant son budget à la Chambre en janvier 1836, avait brusquement déclaré, sans avoir consulté ses collègues, que le moment était venu, selon lui, de réduire l’intérêt de la rente.

939. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Biographie de Camille Desmoulins, par M. Éd. Fleury. (1850.) » pp. 98-122

Camille Desmoulins a laissé un nom qui, de loin, excite l’intérêt : le souvenir de son dernier acte, de ces feuilles du Vieux Cordelier où il osa, le premier sous la Terreur et jusque-là presque terroriste lui-même, prononcer le mot de clémence, les colères qui excita chez les tyrans, l’immolation sanglante qui s’ensuivit, l’ont consacré dans l’histoire comme une espèce de martyr de l’humanité, et on ne se le représente volontiers que dans ce dernier mouvement de cœur et dans cette suprême attitude. […] La nation sera purgée, et les étrangers, les mauvais citoyens, tous ceux qui préfèrent leur intérêt particulier au bien général, en seront exterminés… Camille ajoute, il est vrai, aussitôt après : « Mais détournons nos regards de ces horreurs. » Il les en détourne néanmoins si peu, que, dans une note de sa brochure, il s’arrête avec complaisance sur l’exécution sommaire des malheureux de Launay, Flesselles, Foulon et Berthier : « Quelle leçon pour leurs pareils, s’écrie-t-il, que l’intendant de Paris rencontrant au bout d’un manche à balai la tête de son beau-père ; et, une heure après, que sa tête à lui-même, ou plutôt les lambeaux de sa tête, au bout d’une pique !  […] » Les sentiments d’humanité prirent enfin le dessus en lui, et, les trouvant d’accord avec ses intérêts de parti, il ressaisit sa plume de journaliste pour publier (décembre 93) les premiers numéros du Vieux Cordelier.

940. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Rivarol. » pp. 62-84

La capitale a donc agi contre ses intérêts en prenant des formes républicaines ; elle a été aussi ingrate qu’impolitique en écrasant cette autorité royale, à qui elle doit et ses embellissements et son accroissement prodigieux ; et, puisqu’il faut le dire, c’était plutôt à la France entière à se plaindre de ce que les rois ont fait dans tous les temps pour la capitale, et de ce qu’ils n’ont fait que pour elle. […] si les provinces ouvrent jamais les yeux, si elles découvrent un jour combien leurs intérêts sont, je ne dis pas différents, mais opposés aux intérêts de Paris, comme cette ville sera abandonnée à elle-même !

941. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Mémoires de Daniel de Cosnac, archevêque d’Aix. (2 vol. in 8º. — 1852.) » pp. 283-304

M. le comte Jules de Cosnac a été un éditeur tel qu’il convenait de l’être à notre date, comptant les intérêts du public lettré avant ceux même qui ne touchaient qu’à la gloire de son ancêtre et à l’amour-propre de sa maison. […] Ce signalement que nous donne Choisy de l’abbé de Cosnac au physique, répond bien à ce qu’il se montre dans le courant de ses Mémoires : n’y cherchez pas d’élévation, aucune idée morale, distincte de l’intérêt et du désir d’arriver ; entré domestique, comme on disait alors (et sans idée de défaveur), auprès du prince de Conti, il ne songe qu’à plaire à son maître, à lui devenir agréable, utile, puis nécessaire, et à s’y procurer ses propres avantages. […] Tout spirituel qu’il est, le prince de Conti hésite, et il faut que l’abbé de Cosnac, qui prend très peu de part et d’intérêt à ces plaisirs de la comédie, insiste, par pur esprit de justice et d’exactitude, pour faire accorder à Molière et à sa troupe une suite de représentations promises et qui préludent avec une sorte d’éclat à ses débuts de Paris.

942. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Volney. Étude sur sa vie et sur ses œuvres, par M. Eugène Berger. 1852. — II. (Fin.) » pp. 411-433

L’histoire entière des peuples est présentée comme un vaste quiproquo et une fausse route prolongée qui ne doit se rectifier que lorsque les hommes seront éclairés et sages ; et comme le néophyte, effrayé de ce spectacle universel d’erreurs, se met à désespérer de nouveau et à se lamenter, le Génie le rassure une seconde fois et lui démontre que ce règne de la sagesse et de la raison va enfin venir ; que, par la loi de la sensibilité, l’homme tend aussi invinciblement à se rendre heureux que le feu à monter, que la pierre à graviter, que l’eau à se niveler ; qu’à force d’expérience, il s’éclairera ; qu’à force d’erreurs, il se redressera ; qu’il deviendra sage et bon, parce qu’il est de son intérêt de l’être ; que tout sera fait quand on comprendra que la morale est une science physique, etc. […] Il dit qu’il a vu les hommes sous les diverses religions rester les mêmes et obéir à leurs intérêts, à leurs passions : il ne se demande pas si les hommes ne s’y abandonneraient pas bien davantage en étant absolument destitués de cet ordre de lois. […] Volney se propose toujours ce but en écrivant, et ce but donne de l’intérêt à ce qu’il écrit.

943. (1899) Esthétique de la langue française « Le cliché  »

Un recueil du même genre fut publié au siècle dernier, mais la littérature était modeste alors ; l’on se contentait d’un dictionnaire d’épithètes220, livre misérable et qui n’a d’intérêt que comme représentant psychologique d’une basse époque. […] Nous avons « la sphère d’influence — la sphère diplomatique — les sphères politiques — une sphère plus étendue — la sphère intellectuelle — la sphère morale — la sphère d’activité — une sphère plus élevée — la sphère des idées — la sphère des progrès démocratiques — la sphère des intérêts matériels, etc. », toutes locutions où « sphère » n’évoque plus aucune image, sinon en certains esprits irrespectueux ; non seulement le mot est arrivé au dernier période de l’abstraction, mais il semble même, la plupart du temps, n’avoir qu’une valeur de redondance oratoire, ne correspondre à rien. […] Le répertoire politique est si riche en abstractions qu’on serait tenté de croire que les intérêts dont on charge un député sont tout à fait immatériels et semblables à ceux que défendent dans leurs discours les rhétoriciens du concours général.

944. (1889) L’art au point de vue sociologique « Introduction »

La vie, dans sa réalité immédiate, c’est l’individualité : « on ne sympathise donc qu’avec ce qui est ou semble individuel ; de là, pour l’art, l’absolue nécessité, en même temps que la difficulté de donner à ses créations la marque de l’individuation 8. » Une restriction cependant, ou plutôt une condition d’élargissement toujours possible, c’est que l’individualité, en tant que telle, sera assez parfaite pour atteindre à la hauteur du type : « ce qui ne serait qu’individuel et n’exprimerait rien de typique ne saurait produire un intérêt durable. […] L’art moderne doit être fondé sur la notion de l’imparfait, comme la métaphysique moderne sur celle du relatif. » Le progrès de l’art se mesure en partie, selon Guyau. à l’intérêt sympathique qu’il porte aux côtés misérables de la vie, à tous les êtres infimes, aux petitesses et aux difformités : « C’est une extension de la sociabilité esthétique. » Sous ce rapport, l’art suit nécessairement le développement de la science « pour laquelle il n’y a rien de petit, de négligeable, et qui étend sur toute la nature l’immense nivellement de ses lois ». […] L’auteur, sous l’influence de cette doctrine, montre un souci constant de chercher leur sens aux choses, — ce qui revient à leur donner à toutes un intérêt.

945. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre premier. La solidarité sociale, principe de l’émotion esthétique la plus complexe »

L’agréable et le beau peuvent toujours subsister indépendamment de l’utile, comme le plaisir et le bonheur à part de l’intérêt, qui n’est qu’un calcul de moyens intermédiaires. […] L’art est un des déploiements les plus remarquables de l’activité humaine, c’est la forme du travail la plus difficile et où l’on met : le plus de soi, c’est donc celle qui mérite le plus d’éveiller l’intérêt et la sympathie. […] L’intérêt que nous prenons à une œuvre d’art est la conséquence d’une association qui s’établit entre nous, l’artiste et les personnages de l’œuvre ; c’est une société nouvelle dont on épouse les affections, les plaisirs et les peines, le sort tout entier.

946. (1888) La critique scientifique « La critique et l’histoire »

Que l’on conçoive un travail psychologique, historique, littéraire de cette sorte, accompli parfaitement pour l’art, les artistes et les admirateurs dans une époque, dans un peuple ; que l’on sache celui-ci divisé par un procédé approximatif, en une série de types intellectuels et de similaires, à constitution déterminée par termes scientifiques précis : que ces types soient connus et posés comme des hommes vivants et en chair, ces foules comme des agrégats tumultueux, vivants, animés, logés, vêtus, gesticulant, ayant une conduite, une religion, une politique, des intérêts, des entreprises, une patrie, — qu’à ces groupes ainsi déterminés et montrés, on associe, si l’histoire en porte trace, cette tourbe inférieure ne participant ni à l’art ni à la vie luxueuse ou politique communeee, et dont on peut vaguement soupçonner l’être, par le défaut même des aptitudes reconnues aux autres classes ; que l’on condense enfin cette immense masse d’intelligence, de cerveaux, de corps, qu’on la range sous ses chefs et ses types, on aura atteint d’une époque ou d’un peuple la connaissance la plus parfaite que nous puissions concevoir dans l’état actuel de la science, la plus profonde pénétration dans les limbes du passé, la plus saisissante évocation des légions d’ombres évanouies. […] Les chroniqueurs et les historiens, jusqu’au commencement de ce siècle, jugeant les faits à première vue et les expliquant par une doctrine superficielle mais relativement juste, en étaient venus à concentrer tout l’intérêt et le mérite de chaque entreprise dans les individus, rois, ministres, généraux dont le nom lui était resté attaché. […] Si l’on conçoit la suite des sciences qui, prenant la matière organique à ses débuts, dans les cornues des chimistes ou l’abîme des mers, en conduisent l’étude à travers la série ascendante des plantes et des animaux, jusqu’à l’homme, le décrivent et l’analysent dans son corps, ses os, ses muscles, ses humeurs, le dissèquent dans ses nerfs, sa moelle, son cerveau, son âme enfin et son esprit ; si, abandonnant ici l’homme individu, on passe à la série des sciences qui étudient l’être social, de l’ethnographie à l’histoire, on verra que ces deux ordres de connaissances, les plus importantes sans aucun doute, et celles auxquelles s’attache l’intérêt le plus prochain, se terminent en un point où ils se joignent : dans la notion de l’homme individu social, dans la connaissance intégrale, biologique, physiologique, psychologique de l’individu digne de marquer dans la société, constituant lui-même par ses adhérents et ses similaires un groupe notable, propageant dans son ensemble particulier ou dans l’ensemble total, ces grandes ondes d’admirations, d’entreprises, d’institutions communes qui forment les États et agrègent l’humanité.

947. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Nisard » pp. 81-110

Nisard a autant de finesse que Sainte-Beuve, mais où Sainte-Beuve est fin dans l’intérêt d’une malice, M. Nisard est fin dans l’intérêt d’une gracieuseté. […] Intellectuellement, en effet, ce livre n’est qu’une relation de petits faits qui ont leur intérêt, sans doute, puisqu’ils se rapportent aux deux plus illustres poètes de leur temps, mais cette relation est tellement saturée de citations, de vers et d’admiration poétique, qu’on se demande, non par quel scholar, mais par quel bas-bleu ces Souvenirs ont été écrits ?

948. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — La rentrée dans l’ordre »

Les bienheureux vainqueurs de ce terrible mal n’en sont que plus dignes de notre intérêt et de nos éloges, tout au moins de notre attention. […] L’entrevue a lieu enfin, après trois mois de tentatives vaines pour approcher de l’être redoutable enseveli au fond du Vatican : l’échec absolu de l’abbé Pierre auprès du pape, fermé par nécessité et par principe à tout élan d’humanité, uniquement conduit par le froid calcul des intérêts de l’Église, marque l’écroulement de son rêve. « C’était l’arrachement final, la dernière croyance arrachée de son cerveau, de son cœur saignants. […] » Nous pourrions encore mieux servir les intérêts du jeune homme promis à la prêtrise, en répétant ces paroles d’un noble esprit : « Il faut qu’il prenne conscience avec nous du seul dieu réel et méconnu qui a créé à sont image tous les dieux évanouis, du dieu futur, l’Homme.

949. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXX » pp. 126-128

Le Semeur est inconséquent quand il soutient les doctrines de Quinet et de Michelet qui mènent à la non-liberté de l’enseignement, lui Semeur qui veut l’entière séparation de l’Église et de l’État : mais c’est ainsi qu’on fait toujours ; on est pour la doctrine absolue jusqu’à ce que la passion ou l’intérêt s’en mêlent : alors on fléchit tout doucement.

950. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « PENSÉES ET FRAGMENTS. » pp. 495-496

Je me propose pourtant, si je vis, de donner dans un volume à part la suite de mes articles au Globe ; on me dit que ce ne serait pas sans intérêt, et je me suis laissé persuader.

951. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » pp. 163-165

elles n’en ont pas moins des rapports de ressemblance très-marqués avec ces Tragédies, dont les représentations firent couler autrefois les larmes de toute la Grece, & qu’on lit encore avec intérêt, en suppléant par l’imagination au défaut de l’illusion théatrale.

952. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 308-311

Ces Mémoires forment six volumes, qu’on eût pu réduire à trois, sans leur rien faire perdre du côté de l’intérêt.

953. (1824) Préface d’Adolphe

Sans la presque certitude qu’on voulait en faire une contrefaçon en Belgique, et que cette contrefaçon, comme la plupart de celles que répandent en Allemagne et qu’introduisent en France les contrefacteurs belges, serait grossie d’additions et d’interpolations auxquelles je n’aurais point eu de part, je ne me serais jamais occupé de cette anecdote, écrite dans l’unique pensée de convaincre deux ou trois amis, réunis à la campagne, de la possibilité de donner une sorte d’intérêt à un roman dont les personnages se réduiraient à deux, et dont la situation serait toujours la même.

954. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. LEBRUN (Reprise de Marie Stuart.) » pp. 146-189

Eh bien, à ce point de vue, on doit le rappeler aux plus sévères, l’intérêt, un intérêt élevé, n’y a pas fait faute aux grands moments voulus et désignés par l’art dans l’architecture graduée de cette forme classique. […] On y crut voir pourtant un intérêt de circonstance, le retour de l’exilé, du monarque légitime dans la patrie. […] Le fait est que, lorsqu’elle se produisit d’abord, il n’y eut qu’une voix sur l’accueil soudain, sur l’intérêt excité et sur les larmes.

955. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXIIIe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (4e partie) » pp. 1-63

Cette partie de l’Histoire des Girondins est la plus ténébreuse ; les conjectures y suppléent aux documents vrais, tant les survivants, parmi les assassins, ont eu intérêt à déchirer les pages de ce mois néfaste. […] Ce déchirement de la république à son berceau n’était certes ni dans leur intérêt ni dans leur opinion. […] Tout son règne protestait, depuis son avènement au trône, de la tendance philosophique de son esprit et des instincts populaires de son cœur à prémunir la royauté contre les tentations du despotisme, à faire monter les lois sur le trône, à demander des conseils à la nation, à faire régner par lui et en lui les droits et les intérêts du peuple. […] Elle prépara ainsi une réaction contre la cause républicaine, et mit du côté de la royauté la sensibilité, l’intérêt, les larmes d’une partie des peuples.

956. (1890) L’avenir de la science « XXIII »

L’homme raffiné trouve niaises les choses auxquelles le peuple et l’homme de génie prennent le plus d’intérêt, les animaux et les enfants. […] Il n’y a que des esprits superficiels ou des cœurs faibles, qui, le christianisme étant admis, puissent prendre intérêt à la vie, à la science, à la poésie, aux choses de ce monde. […] Tous ceux qui adorent quelque chose sont frères, ou certes moins ennemis que ceux qui n’adorent que l’intérêt et le plaisir. […] Je ne me tiendrai pour apostat que le jour où des intérêts usurperaient dans mon âme la place des choses saintes, le jour où, en pensant au Christ de l’Évangile, je ne me sentirais plus son ami, le jour où je prostituerais ma vie à des choses inférieures et où je deviendrais le compagnon des joyeux de la terre, Funes ceciderunt mihi in praeclaris !

957. (1830) Cours de philosophie positive : première et deuxième leçons « Première leçon »

(6) On voit donc, par cet ensemble de considérations, que, si la philosophie positive est le véritable état définitif de l’intelligence humaine, celui vers lequel elle a toujours tendu de plus en plus, elle n’en a pas moins dû nécessairement employer d’abord, et pendant une longue suite de siècles, soit comme méthode, soit comme doctrines provisoires, la philosophie théologique ; philosophie dont le caractère est d’être spontanée, et, par cela même la seule possible à l’origine, la seule aussi qui pût offrir à notre esprit naissant un intérêt suffisant. […] Bien que toutes les sciences fondamentales n’inspirent pas aux esprits vulgaires un égal intérêt, il n’en est aucune qui doive être négligée dans une étude comme celle que nous entreprenons. […] Celles, d’ailleurs, dont les résultats présentent, au premier abord, un moindre intérêt pratique, se recommandent éminemment, soit par la plus grande perfection de leurs méthodes, soit comme étant le fondement indispensable de toutes les autres. […] (3) Une seconde conséquence, non moins importante, et d’un intérêt bien plus pressant, qu’est nécessairement destiné à produire aujourd’hui l’établissement de la philosophie positive définie dans ce discours, c’est de présider à la refonte générale de notre système d’éducation.

958. (1830) Cours de philosophie positive : première et deuxième leçons « Deuxième leçon »

Le corps de doctrine propre à cette classe nouvelle, et qui doit constituer les véritables théories directes des différents arts, pourrait sans doute donner lieu à des considérations philosophiques d’un grand intérêt et d’une importance réelle. […] Ce qui montre clairement la différence du point de vue chimique et du point de vue minéralogiques quoique les deux sciences portent sur les mêmes objets, c’est que la plupart des faits envisagés dans la première n’ont qu’une existence artificielle, de telle manière qu’un corps, comme le chlore ou le potassium, pourra avoir une extrême importance en Chimie par l’étendue et l’énergie de ses affinités, tandis qu’il n’en aura presque aucune en minéralogie ; et réciproquement, un composé, tel que le granit ou le quartz, sur lequel porte la majeure partie des considérations minéralogiques, n’offrira, sous le rapport chimique, qu’un intérêt très médiocre. […] Ainsi, en résultat de tout ce qui vient d’être exposé dans cette leçon, nous voyons : 1° que la science humaine se composant, dans son ensemble, de connaissances spéculatives et de connaissances d’application, c’est seulement des premières que nous devons nous occuper ici ; 2° que les connaissances théoriques ou les sciences proprement dites, se divisant en sciences générales et sciences particulières, nous devons ne considérer ici que le premier ordre, et nous borner à la physique abstraite, quelque intérêt que puisse nous présenter la physique concrète. […] La seule imperfection fondamentale qu’on pourrait reprocher au mode dogmatique, c’est de laisser ignorer la manière dont se sont formées les diverses connaissances humaines ce qui, quoique distinct de l’acquisition même de ces connaissances, est, en soi du plus haut intérêt pour tout esprit philosophique.

959. (1913) La Fontaine « I. sa vie. »

J’insiste sur ce détail-là, car La Fontaine en parle dans son Voyage en Limousin, et cela n’est pas sans intérêt, parce qu’il est possible, il est même à peu près certain que La Fontaine tint pour un peu plus de sa mère que de son père, comme il paraît que cela est arrivé pour beaucoup d’hommes supérieurs. […] On a dit, depuis qu’on s’acharne à la faire, cette biographie des hommes illustres, dans tous les détails, et dans des détails quelquefois désobligeants, on a dit que c’était dans l’intérêt de l’histoire, dans l’intérêt de la grande psychologie des hommes de génie et, par conséquent, dans l’intérêt de la grande psychologie générale.

960. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Crétineau-Joly »

Nul plus que nous ne se préoccupe du raffermissement d’une autorité ébranlée ; nul ne prend plus en considération les grands motifs que nous avons fait valoir de voiler, pendant certaines phases, les côtés dangereux de l’histoire, comme Montesquieu veut qu’on voile la statue de la Liberté ; de contenir la vérité dans son intérêt même, car elle est une ; enfin, de mettre la main autour du flambeau pour sauver la lumière, parce que l’air est agité encore. […] Dire donc ce qu’on sait, sans trembler et sans gaucher, est le plus sûr, même dans l’intérêt de cette autorité qui ne doit jamais déchoir ; car si elle a un jour de faiblesse, on montrera par le respect désolé du reproche, par le sentiment de soumission pour la personne qui circulera dans chaque expression du jugement sur sa conduite, que le principe de l’autorité domine toutes les solidarités et y échappe par son essence. […] Ni Choiseul, cet autre obligé des Philosophes, ce ministre d’État d’une prostituée dont les Jésuites, accusés de tant de facilité, n’avaient pas voulu servir les intérêts ; ni Manuel de Roda lui-même, le parricide d’une société qui l’avait élevé et comblé de bienfaits, n’approchèrent seulement de Pombal. […] Les gouvernements catholiques méconnaissant leur grandeur passée, leur force présente et les intérêts de leur avenir, ne songeaient plus qu’à frapper le catholicisme.

961. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Gustave Flaubert »

il va devant lui comme un enfant, attiré par l’objet à décrire, pris par cet objet d’un intérêt futile, — l’intérêt d’une sensation. […] Aucun homme vulgairement et passablement organisé ne pourra prendre un intérêt quelconque à ces apparitions grotesques, qui ne font rire que de l’auteur qui a pu les inventer, et qui se succèdent, sans raison d’être et sans s’arrêter une minute, pendant quatre cents pages, lesquelles finissent par jouer cruellement sur les nerfs. […] Quinet, qui n’est un Gœthe que pour sa femme, mais qui n’est qu’un Allemand pour qui ne l’a pas épousé, débuta dans la célébrité par son poème en prose d’Ahasvérus, lequel n’a pas plus de composition, d’unité, de cohérence, que La Tentation de saint Antoine, mais a réellement plus de richesse de détails, d’étendue, d’intérêt, par la très bonne raison qu’Ahasvérus (le Juif errant) parcourt le monde, qu’il reflète ou qui le réverbère, tandis que saint Antoine est bloqué dans un cercle de tentations qui ne sont pas très variées.

962. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Histoire de la Restauration, par M. Louis de Viel-Castel » pp. 355-368

Je ne prétends pas ici traiter la question dans son étendue, ni même l’effleurer, n’étant pas de ceux qui se plaisent à soulever de telles discussions rétrospectives, et je n’ai pas oublié d’ailleurs qu’à défaut d’un gouvernement alors selon nos vœux, il y a eu pour les esprits des saisons bien brillantes : mais ce qu’il faut bien dire quand on vient de parcourir le tableau fidèle de cette première Restauration, c’est que je ne crois pas qu’il se puisse accumuler en moins de temps plus de fautes, de maladresses, d’inexpériences, d’offenses choquantes à la raison, à l’instinct, aux intérêts d’un pays, ni qu’on puisse mieux réussir (quand on y aurait visé) à établir dans les esprits, au point de départ, la prévention de l’incorrigibilité finale des légitimités caduques et déchues, de leur incompatibilité radicale avec les modernes éléments de la société, et de leur impuissance, une fois déracinées, à se réimplanter et à renaître. […] La raison en est simple : un hasard, une surprise, une catastrophe imprévue suffit pour reporter sur le trône des princes dont le nom parle encore à bien des imaginations qui se tournent naturellement vers eux dans un jour de crise ; mais, pour s’y maintenir, pour faire une juste part entre les intérêts et les principes dont ils sont les représentants et ceux qui se sont créés sans eux ou contre eux, pour se concilier, pour rassurer la masse de la population qui, s’étant momentanément attachée à un autre drapeau, ne peut les voir revenir qu’avec crainte et défiance, il faut un mélange d’intelligence, de sagacité, de fermeté et d’adresse que bien peu d’hommes ont possédé, comme Henri IV, au degré suffisant69.

963. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) «  Œuvres et correspondance inédites de M. de Tocqueville — I » pp. 93-106

La correspondance et les écrits qui sont publiés aujourd’hui sont d’un intérêt très varié et nous remettent tout à fait dans le vrai avec M. de Tocqueville. […] Nous qui avons passé le meilleur de notre jeunesse au gré de notre imagination, dans les jeux de la poésie et de l’art, nous devons, ce me semble, y regarder à deux fois, quand nous nous mêlons de vouloir mesurer et discuter des esprits constamment sérieux, qui se sont occupés sans relâche et passionnément des grands intérêts publics.

964. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Appendice. »

Pasquier commençait alors ; le salon de Mme de Boigne devint véritablement le salon du chancelier : il y était lui tout entier, et avec un degré d’intérêt de plus qu’au Petit-Luxembourg. […] Je ne sais pas comment vous l’accueillerez, mais ce mot est trop gravé au fond de mon cœur pour que je résiste au besoin de vous l’adresser. — J’attendais vos paroles avec confiance, mais non pas sans impatience. — Je remercie Dieu et vous d’avoir encore eu la fortune de les pouvoir entendre avant ma dernière heure. — L’excellent ami dont la perte me laisse si bereaved en toutes choses était une des personnes qui vous jugeaient le mieux et vous portaient le plus d’intérêt : il méritait d’être aussi bien apprécié par vous.

965. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « M. Viguier »

Toutefois, si j’avais beaucoup l’occasion de vous voir, indépendamment du goût que j’aurais à causer après la pièce de ce que j’aime mieux penser comme vérité, — je m’attacherais dans votre intérêt au point de vue de la prudence qui, sans exiger de vous le sacrifice de vos opinions, doit vous conseiller beaucoup de mesure, en proportion même des applaudissements que recevez. […] La fatigue est plus que compensée par le plaisir d’accoutumer mon oreille à la parole la plus rapide, outre l’intérêt même des cours qui sont si bien faits et si bien écoulés.

966. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre III. L’écrivain »

Il essayait d’arranger l’Eunuque de Térence, et flottait assez maladroitement entre deux genres, sans atteindre la fidélité d’une traduction ni l’intérêt d’une imitation. […] Nos enfants l’apprennent par coeur, comme jadis ceux d’Athènes récitaient Homère ; ils n’entendent pas tout, ni jusqu’au fond, non plus que ceux d’Athènes, mais ils saisissent l’ensemble et surtout l’intérêt ; ce sont de petits contes d’enfants, comme l’Iliade et l’Odyssée, qui sont de grands contes de nourrice.

967. (1890) L’avenir de la science « Préface »

Une condition m’était imposée, pour qu’une telle publication ne fût pas dénuée de tout intérêt, c’était de reproduire mon essai de jeunesse dans sa forme naïve, touffue, souvent abrupte. […] Entre les deux objectifs de la politique, grandeur des nations, bien-être des individus, on choisit par intérêt ou par passion.

968. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. James Mill — Chapitre III : Sentiments et Volonté »

Il est pour lui un objet d’un grand intérêt, en d’autres termes, une suite d’idées intéressantes, c’est-à-dire d’idées de plaisirs ou de douleurs, s’associe avec l’enfant. […] Il n’est peut-être pas sans intérêt de comparer le 3e livre de l’Ethique avec l’analyse de J.

969. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre II » pp. 12-29

Dans ces sociétés animées par la conversation des femmes, tous les intérêts se placent par la parole entre toutes les frivolités ; la raison la plus solide, l’imagination la plus active y apportent leurs tributs ; les aines les plus sensibles y versent leurs effusions ; les esprits les plus affinés y apportent leurs délicatesses : là, tous les sujets se prêtent aux conditions que la conversation impose ; les matières les plus abstraites s’y présentent sous des formes sensibles et animées, les plus compliquées avec simplicité, les plus graves et les plus sérieuses avec une certaine familiarité, les plus sèches et les plus froides avec aménité et douceur, les plus épineuses avec dextérité et finesse, toutes réduites à la plus simple expression, toutes riches de substance et surtout nettes de pédanterie et de doctrine. […] C’était sous l’influence de l’heureux besoin dont les esprits étaient alors pressés, que s’ouvrait l’hôtel de Rambouillet aux gens de la cour ennemis des scandales, aux gens du monde poli de la capitale, aux gens de lettres de profession, aux esprits cultivés de toutes les classes ; c’était par cet intérêt que les femmes les plus distinguées y étaient amenées et reçues avec des hommes d’élite, par une des plus belles, des plus jeunes, des plus riches et des plus respectables femmes de la cour.

970. (1913) Le bovarysme « Quatrième partie : Le Réel — IV »

Leur intérêt posthume exigeait qu’ils se pourvussent de descendants : car seuls ces descendants pouvaient, au gré de leur croyance, apporter à leurs mânes les repas funèbres. […] Si la vie abondante de l’espèce n’a d’autre intérêt que de rendre la connaissance possible, si elle n’est elle-même, ainsi qu’on en a posé l’hypothèse, qu’un moyen pour la connaissance de se réaliser, on peut imaginer que des vérités nouvelles seront un jour inventées pour réglementer dans les limites qui conviennent le nombre des naissances sur une planète où il est déjà possible de prévoir une densité trop grande de la vie humaine.

971. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre IV. Littérature dramatique » pp. 202-220

Depuis, nous en sommes tombés à la comédie de sentiment, au tragique larmoyant et bavard qui de La Chaussée, lequel savait au moins le français, s’abaisse encore jusqu’à Brieux, nous sommes tombés au vaudeville morne, à la farce niaise, à des compromis entre le music-hall, la maison close et le vaudeville qui n’ont même plus l’intérêt de chacun de ces genres si l’on peut dire. […] Théâtre moral, parfaitement possible devant un vrai public, d’un intérêt plus soutenu qu’on ne peut l’avouer, Saül et le Roi Candaule seront jouées régulièrement quelque jour et lors, on s’étonnera de l’inintelligence de notre critique actuelle.

972. (1912) L’art de lire « Chapitre II. Les livres d’idées »

Que l’égoïsme, l’intérêt, l’amour-propre, comme il dit, est le fond de tous nos sentiments et le mobile de toutes nos actions. ! […] Dire que nous agissons toujours en vue de notre intérêt, c’est dire que nous n’agissons jamais par bonté, mais c’est dire aussi que nous n’agissons jamais par méchanceté, que l’homme ne fait jamais le mal pour le plaisir de faire le mal, qu’en un mot la méchanceté n’existe pas !

973. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « VIII. Du mysticisme et de Saint-Martin »

Caro, tout incomplet qu’il soit par la conclusion, est d’un intérêt très vif encore. […] Caro nous montre Saint-Martin, abrité contre la révolution française dans le désert intérieur de sa spiritualité, et, quand la tempête est passée, plus tard, en 1795, il suit avec un intérêt mêlé d’éloge le solitaire devenu homme public, répondant sur la question de l’enseignement, agitée alors officiellement par le Pouvoir, aux attaques cauteleuses de Garat, le rhétoricien de la sensation.

974. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « IX. L’abbé Mitraud »

Il a eu tort aussi dans l’intérêt de ses idées… futures ! […] Mitraud, qu’il ne faudrait pas cependant dilater au point de le perdre, ce christianisme de l’Utopie, que la Philosophie aime à embusquer partout dans l’intérêt de son service et qui, sur les débris des institutions monarchiques, ferait volontiers descendre, — et toujours sous la forme d’une colombe, — un Saint-Esprit par trop désarmé !

975. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Charles Monselet »

Pourquoi faut-il qu’il y soit chargé, accablé de choses qui, eu elles-mêmes, ont, si l’on veut, leur petit intérêt de curiosité et de bric-à-brac, mais qui offusquent le talent que Monselet pourrait montrer sans elles ? […] A part encore la moralité, qui tient pourtant plus à l’intelligence que ne le croient des penseurs vulgaires, il faudrait que, dans un intérêt d’un autre ordre, Charles Monselet s’essuyât des marques laissées sur lui et sur la naïveté de son talent par ce siècle dans lequel il a cherché ses modèles, et avec lequel il a trop intimement vécu.

976. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Marie Desylles » pp. 323-339

Cette résolution, qui ne dure qu’une minute, est la seule circonstance étrangère au magnifique développement d’amour qui est l’intérêt profond de ce roman par lettres sans égal ; car Clarisse et Delphine et les Lettres de deux jeunes mariées sont pleines d’événements. […] III Quel livre de femme, en effet, — et de femme célèbre, — vaudrait en intérêt humain et palpitant ces lettres tout à la fois délicieuses et poignantes ?

977. (1889) La bataille littéraire. Première série (1875-1878) pp. -312

Un but, un intérêt dans la vie, il n’y en avait plus pour lui depuis quelques heures. […] Voici l’introduction de ce roman, qui n’en est point un, et dont l’intérêt est aussi puissant que celui d’un procès criminel. […] Est-ce à dire que l’intérêt romanesque y manque ? […] Feuillet, cède bien vite à l’intérêt qu’inspire Cécile, la véritable héroïne du roman. […] En un instant l’hostilité avait fait place à un vif et universel intérêt.

978. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — A — Ackermann, Louise (1813-1890) »

Les sujets qu’elle excelle à traiter, tirés du problème de la condition de l’homme, sont d’un intérêt supérieur et permanent.

979. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 311-314

Mais comment voudroient-ils, à travers les dangers, Poursuivre ma vengeance en des bords étrangers, Eux, que leur intérêt & l’amour de la vie Ont à peine arrachés du sein de leur patrie ?

980. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 364-367

L’amour de Pyrrhus & de Téglis est le seul objet d’intérêt qui y regne ; mais cette passion est conduite avec tant d’art, que seule elle suffit pour attacher le Spectateur, & même le Lecteur.

981. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 368-371

L’Observateur Hollandois, espece de Journal Politique, composé de quarante-sept Lettres, n’eut pas plutôt paru, que tous les Connoisseurs applaudirent à la sagacité, aux connoissances profondes, à la méthode, à la netteté, avec lesquelles l’Auteur développe les intérêts & la situation des différentes Puissances de l’Europe.

982. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 45-49

L’intérêt de la vérité exige que nous apprenions à ceux qui l’ignorent, que toute la part que l’Abbé de Rancé prit à ces démêlés, se réduit à deux Lettres très-courtes adressées à l’Evêque de Meaux, & publiées contre le gré de celui qui les avoit écrites.

983. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Préface de l’auteur »

Mais notre recherche nous parut bientôt offrir un intérêt plus général.

984. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Madame de Verdelin  »

Vouée à ses soins d’épouse garde-malade, à ses devoirs de mère, et les remplissant exactement, elle avait placé ailleurs son plus tendre intérêt, le plus cher de son âme, et elle ne trouvait en retour que refroidissement, scrupules et restrictions de conscience chez ce M. de Margency, déjà plus qu’à demi converti. […] M. de Margency ne m’a écrit ni fait écrire ; je n’ai de ses nouvelles ni directement ni indirectement ; et quoique nos anciennes liaisons m’aient laissé de l’attachement pour lui, je n’ai eu nul égard à son intérêt dans ce que je viens de vous dire : mais moi, que vous laissâtes lire dans votre cœur, et qui en vis si bien la tendresse et l’honnêteté, moi, qui quelquefois vis couler vos larmes, je n’ai point oublié l’impression qu’elles m’ont faite, et je ne suis pas sans crainte sur celle qu’elles ont pu vous laisser. […] À partir de ce voyage de Jean-Jacques en Angleterre et depuis son retour en France, la Correspondance que Mme de Verdelin essaye de soutenir décline et perd en intérêt : la confiance entière n’existe plus ; cette aimable et douce amie est enveloppée par lui dans le sombre voile qui lui dérobe une partie du présent et presque tout le passé. […] Les personnes curieuses de tout approfondir pourront lire avec intérêt une Notice intitulée : Charles de Bremond d’Ars, marquis d’Ars, tué à bord de la frégate l’Opale, dans un combat contre les Anglais, sur les côtes de Bretagne ; par M.  […] Mais il est piquant d’observer, cependant, comme les générations se succèdent et s’enchaînent avec contraste : on ne s’attendait guère à voir l’amie de Jean-Jacques et sa voisine de Montmorency émue de crainte et d’intérêt au lendemain de Friedland.

985. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre II. La vie de salon. »

Subordination des autres intérêts et devoirs. — Indifférence aux affaires publiques. — Elles ne sont qu’une matière à bons mots. […] Même le retard est si régulier, qu’à la fin on est obligé de leur payer à 5 pour 100 l’intérêt de leurs avances ; à ce taux, en 1778, après toutes les économies de Turgot, le roi doit encore près de 800 000 livres à son marchand de vin, près de trois millions et demi à son pourvoyeur233. […] À ce titre, la femme a son cortège personnel de solliciteurs et de protégés, et, comme son mari, ses amis, ses ennemis, ses ambitions, ses mécomptes et ses rancunes propres ; rien de plus efficace pour disjoindre un ménage que cette ressemblance des occupations et cette distinction des intérêts. — Ainsi relâché, le lien finit par se rompre sous l’ascendant de l’opinion. « Il est de bon air de ne pas vivre ensemble », de s’accorder mutuellement toute tolérance, d’être tout entier au monde. […] Remplissez votre imagination de ces alentours et de ces figures, et vous trouverez alors à leurs amusements l’intérêt qu’ils y prenaient eux-mêmes. […] Les intérêts payés sont de 12 969 francs pour le boulanger, de 39 631 francs pour le marchand de vins, de 173 899 francs pour le pourvoyeur.

986. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre sixième »

Pour moi, je n’y crois pas, soit dit sans intérêt. […] Au lieu de deux hommes de caractères opposés dont l’un est sacrifié à l’autre, et dont le dialogue, selon Diderot, n’est qu’un tissu de petites idées et d’antithèses, vous avez deux personnes qui diffèrent d’intérêt, d’âge, de passion, et dont l’entretien est grave, aisé, naturel ; témoin, dans le Père de famille, le père et le commandeur. […] « Je veux, dit-il, que mon Eugénie soit un modèle de raison, de dignité, de douceur, de vertu, de courage… Je veux qu’elle soit seule, et que son père, son amant, sa tante, son frère, et jusqu’aux étrangers, tout ce qui aura quelque relation avec cette victime dévouée, ne fassent pas un pas, ne disent pas un mot qui n’aggrave le malheur dont je veux l’accabler. » « Tenez vos personnages dans la plus grande gêne possible », avait dit le maître. « Je veux, dit le disciple, que la situation des personnages soit continuellement en opposition avec leurs désirs, leurs intérêts, leurs caractères. » Soit. […] Faire contraster les situations avec les caractères, où Diderot voit plus de vérité et d’intérêt dramatique, est seulement plus facile. […] S’il préfère les sujets compliqués aux sujets simples, c’est, avoue-t-il, qu’il est plus aisé d’en faire le dialogue ; et il ajoute : « La multitude des incidents donne pour chaque scène un objet d’intérêt déterminé ; au lieu que si la pièce est simple, et qu’un seul incident fournisse à plusieurs scènes, il reste pour chacune je ne sais quoi de vague qui embarrasse un auteur ordinaire ; mais c’est où se montre un homme de génie. » Rien de plus vrai.

987. (1926) L’esprit contre la raison

À noter d’ailleurs que cet acte, gratuit pour la plupart, présente au moins l’intérêt d’aider à croire à la possibilité de n’en prendre à rien. […] L’obstination à juger petitement, à faire semblant de croire à la réalité, à donner cette réalité en aliment à l’espritbo avec l’illusion que plus elle sera basse, facile, méprisable, moins elle comportera de périls, l’acharnement individuel à tout peser, relativement à soi, afin de tout accommoder à son intérêt propre, d’en prendre bonne opinion, les sourires attendris des critiques ou romanciers lotissant les steppes du rêve et, pour résumer, tout ce qui permet ou prouve l’habitude simpliste de se limiter dans la conscience, voilà qui a rapetissé l’être et corrompu son esprit. […] Si les profondeurs de notre esprit recèlent d’étranges forces capables d’augmenter celles de la surface ou de lutter victorieusement contre elles, il y a tout intérêt à les accepter, à les capter d’abord pour les soumettre, ensuite, s’il y a lieu, au contrôle de la raison.  […] Crevel, dans l’intérêt de sa démonstration lui substitue le mot « esprit ». « Acte d’accusation », O.C. t.  […] /Mais les procédés logiques, de nos jours, ne s’appliquent plus qu’à la résolution de problèmes d’intérêt secondaire. » Éd. cit. p. 315 bs.

988. (1767) Salon de 1767 « Peintures — La Grenée » pp. 90-121

Les peintres se jettent dans cette mitologie, ils perdent le goût des événements naturels de la vie ; et il ne sort plus de leurs pinceaux que des scènes indécentes, folles, extravagantes, idéales, ou tout au moins vuides d’intérêt. […] Est-ce que cet époux la soutenant ne devoit pas me montrer la tendresse, l’intérêt, la joye dans toute leur énergie ? […] Il n’y a nul intérêt. […] Mettez un bonnet de laine sur la tête ignoble de ce dauphin, et vous aurez un malade de l’hôtel-dieu ; et tous ces bambins avec leur cordon bleu, sans en excepter le revenant de l’autre monde avec son cordon bleu ; et l’inadvertance de la mère et des frères, pour ce revenant ; et le parti qu’on pouvoit tirer de ce revenant pour donner à la scène un peu d’intérêt et de mouvement ; et toute cette scène qui n’en reste pas moins immobile et muette, qu’en dites-vous ? […] Si l’agriculture est la plus favorisée des conditions, les hommes seront entraînés où leur plus grand intérêt les poussera, et il n’y aura fantaisie, passion, préjugés, opinions qui tiennent.

989. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVIII. J.-M. Audin. Œuvres complètes : Vies de Luther, de Calvin, de Léon X, d’Henri VIII, etc. » pp. 369-425

Mais tout ce li tient à nos intérêts et à nos relations avec les hommes se ressemble. […] Ces livres, manqués et médiocres, où le talent n’existe qu’à l’état d’éclair, étaient des tentatives dans des genres différents, et ils n’ont à présent d’autre intérêt que le profond mystère du développement des facultés d’un homme qui a battu opiniâtrement le buisson pour découvrir les sentiers cachés par où l’esprit s’élève, trace plus difficile à indiquer que celle du chamois. […] Il n’y a plus, il est vrai, de ces ingénieuses ou éloquentes digressions qui vous saisissent tout à coup, comme la Main mystérieuse prenait le prophète par la chevelure, et vous enlèvent au récit pour vous y ramener ; et on les regrette, non dans l’intérêt de l’art, cette voluptueuse bagatelle de l’esprit, mais dans l’intérêt d’une chose plus grande que l’art, et devant laquelle tout ce qui est de cette vie défaille, — la conquête des âmes à Dieu. […] Audin n’a pas caché la sienne ; mais naturellement, par le fait de son amour de l’étude et du recueillement, par la tournure d’une imagination tout à la fois positive et rêveuse, par l’élévation d’un caractère qui se trouvait seul en s’élevant, il a vécu à peu près caché à la foule, même à ceux-là qui auraient besoin, dans l’intérêt de sa renommée, d’ausculter et de savoir sa vie.

990. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre IV. Addison. »

Il songe à la vie future, mais il n’oublie pas la vie présente ; il appuie la vertu sur l’intérêt bien entendu. […] C’est une sorte de bon sens commercial appliqué aux intérêts de l’âme ; un prédicateur là-bas n’est qu’un économiste en rabat, qui traite de la conscience comme des farines, et réfute le vice comme les prohibitions. […] Joignez-y des motifs d’intérêt et des calculs de prudence qui peuvent faire des recrues, mais non des convertis : voilà ses preuves. […] Addison, pour louer Milton, établit que, selon la règle du poëme épique, l’action du Paradis est une, complète et grande ; que les caractères y sont variés et d’un intérêt universel, que les sentiments y sont naturels, appropriés et élevés ; que le style y est clair, diversifié et sublime : maintenant, vous pouvez admirer Milton ; il a un certificat d’Aristote. […] Il est pénétré par la présence de l’invisible ; il a besoin de dépasser les intérêts et les espérances de la vie mesquine où nous rampons940.

991. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre cinquième. Le réalisme. — Le trivialisme et les moyens d’y échapper. »

Toute chose ou toute action présente nécessairement deux côtés ; le premier, mobile et changeant, nouveau sans cesse sous le jour qui l’éclairé, donne l’illusion de la vie : c’est l’expression, la poésie des choses, et aussi leur intérêt ; celui-là seul marque vraiment pour nous. […] A moins que ce ne soit justement pour prouver qu’à son insu le passant en a été affecté, ou encore que faire obstacle ou non à la marche n’est pas le seul intérêt que puissent présenter les pierres rencontrées sous ses pas. […] Le progrès de l’art se mesure en partie à l’intérêt sympathique qu’il porte aux côtés misérables de la vie, à tous les êtres infimes, aux petitesses et aux difformités. […] Aussi l’art réaliste est-il plus difficile que celui qui cherche à éveiller l’intérêt par le fantastique. […] Il faut donc que le peintre ait le talent d’envelopper d’ombre tout ce qui n’est pas l’intérêt de la scène.

992. (1898) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Troisième série

La défaite est funeste à leurs intérêts et la victoire à leurs préjugés. […] Dans ses réponses, le Languedoc prouvait que la grande majorité de ses dépenses, et les plus grosses, avaient été faites autant et plus dans un intérêt général, dans un intérêt français, que dans un intérêt languedocien. […] C’est leur intérêt même qui dut ouvrir les yeux aux propriétaires de l’antiquité. […] Il n’a pas intérêt ou, du moins, il n’a pas un intérêt urgent, perpétuellement senti, à être servi par les meilleurs. […] Fixera-t-il la valeur d’après son goût, son humanité, son intérêt ou son caprice ?

993. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Donnay, Maurice (1859-1945) »

Donnay gagnerait en intérêt si les spectateurs étaient admis (prix à débattre, nécessairement) à jouer un rôle actif.

994. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Dorchain, Auguste (1857-1930) »

Ce cas de conscience a son intérêt, sûrement ; mais c’est beaucoup de l’agiter durant deux cents pages.

995. (1887) Discours et conférences « Discours prononcé au nom de l’Académie des inscriptions et belles-lettres aux funérailles de M. .Villemain »

Ministre de l’instruction publique à une époque où la culture élevée de l’esprit était tenue par la politique, non pour un amusement frivole d’aristocrates oisifs, mais pour un intérêt public, M. 

996. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » pp. 56-59

Outre le mérite de l’exactitude, elle auroit eu l’intérêt du style, qui manque à presque toutes les Histoires particulieres de nos Provinces.

997. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — H — article » pp. 497-500

C’est elle qui corrompt les mœurs & les maximes, Ravale des vertus, & couronne des crimes, Selon son intérêt regle les sentimens, Juge des actions par les événemens, Méprise un vertueux que le Ciel abandonne, Révere un scélérat que le bonheur couronne, Aux Peuples inquiets vante les nouveautés, Et leur fait un Héros d’un Chef de Révoltés, &c.

998. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Préface »

Dans notre étude sur la Littérature et la Critique littéraire au xixe  siècle nous avons rencontré le problème si difficile, et d’un intérêt si général, de la conciliation de l’autorité et de la liberté, de la tradition et du changement, des lois du goût et des droits du génie ; et tout en restant fidèle à notre admiration pour les principes éternels de l’art classique, nous avons défendu la liberté de l’invention en littérature ; car ces lois éternelles elles-mêmes ne sont que l’expression des grandes inventions du génie.

999. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Pierre » pp. 200-201

C’est une grande figure, froide, imbécile, sans action, sans passion, sans mouvement, sans caractère, ne prenant pas le moindre intérêt à ce qui se passe.

1000. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « XVIII »

Ce Manuel serait inutile plus encore que je ne le crois que tel et tel de ses chapitres garderaient leur intérêt de documentation et d’exposition52. » Les pires adversaires de nos théories nous rendent justice : « Ce livre, dit M. 

1001. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre IV. Des Livres nécessaires pour l’étude de l’Histoire. » pp. 87-211

Ce livre est très-propre à faire connoître les intérêts des Princes, & il peut être considéré comme une excellente notice de la politique & du gouvernement de tous les peuples. […] Nul Ecrivain n’a si bien développé l’histoire du siécle de Philippe, les intérêts des peuples de la Grèce, leurs mœurs & leurs coutumes ; mais son histoire manque d’art. […] Enfin nous y avons trouvé tout l’intérêt, toute la chaleur qu’on pouvoit attendre & du sujet & de l’écrivain. […] Les intérêts de tous les peuples de l’Europe y sont développés avec beaucoup d’impartialité & d’intelligence. […] Le Jésuite françois régle la plûpart de ses jugemens tantôt sur les intérêts de la Cour Romaine, tantôt sur les principes de la Monarchie françoise.

1002. (1907) Le romantisme français. Essai sur la révolution dans les sentiments et dans les idées au XIXe siècle

Le seul intérêt de ces observations familières, c’est que, sous cette apparence scrutatrice et ombrageuse, cette âme, n’en veut qu’à soi. […] Ce qui détermine ses attitudes publiques, ce n’est pas un intérêt de doctrine et de parti, mais l’éclat, entendez l’éclat retentissant et populaire, du rôle. […] Mais cette division ne se recommande pas seulement par un intérêt de clarté. […] Il mesure avec âpreté, comme n’y participant lui-même en rien, le mensonge des mœurs et des lois, la bassesse des intérêts humains. […] Les discours et gestes à la René, du moment qu’ils ne sont que superfétation et placage, n’offrent plus aucun intérêt.

1003. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Riposte à Taxile Delord » pp. 401-403

Jeune homme, qui vous destinez aux lettres et qui en attendez douceur et honneur, écoutez de la bouche de quelqu’un qui les connaît bien et qui les a pratiquées et aimées depuis près de cinquante ans, — écoutez et retenez en votre cœur ces conseils et cette moralité : Soyez appliqué dès votre tendre enfance aux livres et aux études ; passez votre tendre jeunesse dans l’etude encore et dans la mélancolie de rêves à demi-étouffés ; adonnez-vous dans la solitude à exprimer naïvement et hardiment ce que vous ressentez, et ambitionnez, au prix de votre douleur, de doter, s’il se peut, la poésie de votre pays de quelque veine intime, encore inexplorée ; — recherchez les plus nobles amitiés, et portez-y la bienveillance et la sincérité d’une âme ouverte et désireuse avant tout d’admirer ; versez dans la critique, émule et sœur de votre poésie, vos effusions, votre sympathie et le plus pur de votre substance ; louez, servez de votre parole, déjà écoutée, les talents nouveaux, d’abord si combattus, et ne commencez à vous retirer d’eux que du jour où eux-mêmes se retirent de la droite voie et manquent à leurs promesses ; restez alors modéré et réservé envers eux ; mettez une distance convenable, respectueuse, des années entières de réflexion et d’intervalle entre vos jeunes espérances et vos derniers regrets ; — variez sans cesse vos études, cultivez en tous sens votre intelligence, ne la cantonnez ni dans un parti, ni dans une école, ni dans une seule idée ; ouvrez-lui des jours sur tous les horizons ; portez-vous avec une sorte d’inquiétude amicale et généreuse vers tout ce qui est moins connu, vers tout ce qui mérite de l’être, et consacrez-y une curiosité exacte et en même temps émue ; — ayez de la conscience et du sérieux en tout ; évitez la vanterie et jusqu’à l’ombre du charlatanisme ; — devant les grands amours-propres tyranniques et dévorants qui croient que tout leur est dû, gardez constamment la seconde ligne : maintenez votre indépendance et votre humble dignité ; prêtez-vous pour un temps, s’il le faut, mais ne vous aliénez pas ; — n’approchez des personnages le plus en renom et le plus en crédit de votre temps, de ceux qui ont en main le pouvoir, qu’avec une modestie décente et digne ; acceptez peu, ne demandez rien ; tenez-vous à votre place, content d’observer ; mais payez quelquefois par les bonnes grâces de l’esprit ce que la fortune injuste vous a refusé de rendre sous une autre forme plus commode et moins délicate ; — voyez la société et ce qu’on appelle le monde pour en faire profiter les lettres ; cultivez les lettres en vue du monde, et en tâchant de leur donner le tour et l’agrément sans lequel elles ne vivent pas ; cédez parfois, si le cœur vous en dit, si une douce violence vous y oblige, à une complaisance aimable et de bon goût, jamais à l’intérêt ni au grossier trafic des amours-propres ; restez judicieux et clairvoyant jusque dans vos faiblesses, et si vous ne dites pas tout le vrai, n’écrivez jamais le faux ; — que la fatigue n’aille à aucun moment vous saisir ; ne vous croyez jamais arrivé ; à l’âge où d’autres se reposent, redoublez de courage et d’ardeur ; recommencez comme un débutant, courez une seconde et une troisième carrière, renouvelez-vous ; donnez au public, jour par jour, le résultat clair et manifeste de vos lectures, de vos comparaisons amassées, de vos jugements plus mûris et plus vrais ; faites que la vérité elle-même profite de la perte de vos illusions ; ne craignez pas de vous prodiguer ainsi et de livrer la mesure de votre force aux confrères du même métier qui savent le poids continu d’une œuvre fréquente, en apparence si légère… Et tout cela pour qu’approchant du terme, du but final où l’estime publique est la seule couronne, les jours où l’on parlera de vous avec le moins de passion et de haine, et où l’on se croira très clément et indulgent, dans une feuille tirée à des milliers d’exemplaires et qui s’adresse à tout un peuple de lecteurs qui ne vous ont pas lu, qui ne vous liront jamais, qui ne vous connaissent que de nom, vous serviez à défrayer les gaietés et, pour dire le mot, les gamineries d’un loustic libéral appelé Taxile Delord.

1004. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 424-428

M. de Gomicourt est beaucoup plus connu par un Ouvrage périodique, intitulé, l’Observateur François à Londres, où il sait répandre de l’intérêt sur les matieres qu’il traite.

1005. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Préface » pp. -

Daudet prenait plaisir à la lecture, s’échauffait sur l’intérêt des choses racontées sous le coup de l’impression, me sollicitait d’en publier des fragments, mettait une douce violence à emporter ma volonté, en parlait à notre ami commun, Francis Magnard, qui avait l’aimable idée de les publier dans Le Figaro.

1006. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Autobiographie » pp. 169-176

Daudet prenait plaisir à la lecture, s’échauffait sur l’intérêt des choses racontées sous le coup de l’impression, me sollicitait d’en publier des fragments, mettait une douce violence à emporter ma volonté, en parlait à notre ami commun, Francis Magnard, qui avait l’aimable idée de les publier dans le Figaro.

1007. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre XI. Des Livres sur la Politique & le Droit Public. » pp. 315-319

Une érudition très-étendue, une connoissance exacte des intérêts des différens princes de l’Europe, un style noble & élégant ; telles sont les qualités qui distinguent cet ouvrage.

1008. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre XX. Des Livres de facéties, des recueils d’anecdotes & de bons mots. » pp. 381-385

De graves commentateurs ont chargé de notes ce tas de sottises bouissonnes ; des éditeurs les ont abrégées ; mais nous n’indiquerons pour l’intérêt du goût & des mœurs aucun de ces commentaires, ni aucune de ces éditions.

1009. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Édouard Fleury »

., et cette classification, presque dramatique, donne beaucoup d’intérêt, de vie et de clarté à un livre qu’on lirait encore avec la passion que les récits qu’il contient inspirent, fussent-ils empilés, sans art, comme des matériaux dans un chantier.

1010. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre III. L’Âge moderne (1801-1875) » pp. 388-524

Leurs opinions se modifieront profondément un jour, avec leurs intérêts ! […] On s’est rendu compte qu’il ne saurait y avoir de théâtre sans un sujet dont l’intérêt soit vraiment général, mais surtout sans une certaine « aliénation de soi-même », qui arrache le poète à la préoccupation de son individualité pour l’incarner dans ses personnages. […] Au milieu de cette misère si réelle et si profonde quel intérêt voulez-vous qu’excitent les plaintes superbes de la froide intelligence ? […] Ils n’ignorent pas qu’ils sont hommes, sujets comme tels à l’erreur, et, de plus, imbus de préjugés qu’ils tiennent de leur naissance, ou de leur éducation, ou de la nature actuelle de leurs intérêts. […] Nous avons signalé l’intérêt de sa Correspondance.

1011. (1788) Les entretiens du Jardin des Thuileries de Paris pp. 2-212

Il n’y a que l’égoïste qui ne prend nul intérêt au sort de sa patrie. […] On parle au libraire à l’oreille, & comme il est toujours dans les intérêts de celui qui achete, il donne en secret des ouvrages qui révolteroient un pere ou un époux. […] Ce sont eux qui en font les honneurs, de sorte que si les étrangers entendoient bien leurs intérêts, ils en loueroient pour ranimer leurs jardins. […] Heureusement il n’en fut plus question, & l’on reprit l’entretien sur l’agriculture avec intérêt. […] Ils guérissent savamment, promptement & sans intérêt.

1012. (1890) Causeries littéraires (1872-1888)

Là est l’intérêt. […] Daudet ne pouvait-il donc multiplier les incidents, imaginer des péripéties, donner enfin un intérêt dramatique à son tableau ? […] Mais non, là n’est pas l’intérêt. […] Sardou a pris une donnée très grave, d’un haut intérêt et d’une haute portée, et il l’a traitée en vaudevilliste. […] c’est dans l’intérêt de sa fille !

1013. (1802) Études sur Molière pp. -355

Je trouve très piquant que L’Inadvertito, après avoir continuellement nui à ses intérêts par sa présence, leur nuise bien davantage en se défiant de lui-même, et en prenant la fuite au moment de signer son contrat. […] Les coups de bâton sont nécessaires aux intérêts de Lélie, on le lui persuade du moins, et le coup de pied ne peut être excusé. […] Ce mouvement subit de générosité, fût-il involontaire, peint, mieux qu’un long discours, un amant tout entier aux intérêts de son cœur ; et je félicite le comédien qui l’imagina. […] La maison du roi jouissait des entrées gratis à tous les spectacles ; les camarades de Molière exigèrent qu’il sollicitât la suppression d’un droit aussi contraire à leurs intérêts. […] Jusqu’à quand leurs protecteurs voudront-ils se dissimuler qu’on ne sert pas un art en permettant que sa gloire soit journellement sacrifiée à de futiles et de vils intérêts ?

1014. (1908) Jean Racine pp. 1-325

La suppression d’une vie humaine par intérêt dynastique ou raison d’État, est-ce que cela n’est point pratiqué dans des civilisations très avancées ? […] L’intérêt de Titus, s’il y pouvait songer, se confond avec le premier de ses devoirs. […] Ses desseins sont bien ceux d’un vizir expérimenté et du ministre d’un despote soupçonneux et jaloux : ils n’impliquent aucune préoccupation de l’intérêt public, et le vizir ne compte, pour les réaliser, que sur l’intérêt personnel et immédiat de ceux qu’il y associe. […] Il est bien sûr de son affaire ; l’intérêt de Bajazet et de Roxane lui répond du succès. […] Là est l’intérêt profond de quelques-unes de nos tragédies classiques.

1015. (1904) En lisant Nietzsche pp. 1-362

De sorte que c’est l’intérêt qui conseille le désintéressement et qui le réclame. […] L’intérêt vulgaire du peuple, sa joie des sens, son « bon cœur » se révoltaient contre ces hommes. […] Il n’a intérêt qu’à la cacher. […] Parce qu’il est très certain que la société repose sur la chasteté des femmes et a beaucoup moins d’intérêt à la chasteté des hommes, ou, plutôt, a plus d’intérêt à l’énergie, au courage, à la loyauté, à la probité des hommes qu’à leur chasteté. […] La morale n’a été sans doute, chez les peuples primitifs, que la nécessité profondément sentie de sacrifier l’intérêt personnel à l’intérêt commun.

1016. (1888) Impressions de théâtre. Deuxième série

Il faut ajouter que son devoir et son intérêt sont ici d’accord. […] Par là, « il se sauve », et si vous ne regardez que l’intérêt particulier de M.  […] , soit au nom de l’intérêt social. […] Et c’est cela, d’ailleurs, qui a fait l’intérêt de la séance. […] … Rome… subséquemment… la gloire de Rome… les intérêts de Rome…, scrongnieugnieu !

1017. (1905) Études et portraits. Sociologie et littérature. Tome 3.

Ce serait une grave erreur de croire que cet intérêt date d’aujourd’hui ni même d’hier. […] Ils disent : « L’intérêt du pays est identique, en son fond, à celui des familles. […] Il y a intérêt aussi à ce que ces maîtres aient choisi cette tâche désintéressée et ingrate, par vocation et non par carrière. […] Il y a là pourtant un véritable intérêt civique. […] Il y a là aussi un haut intérêt d’enseignement.

1018. (1891) Impressions de théâtre. Cinquième série

Une révolution d’âme, du plus grand intérêt et du plus général, y est exposée avec force, avec hardiesse, et avec une sorte d’émotion et d’emportement farouche. […] … Sans nier, ce qui serait simplement absurde, l’influence de l’amour sur les actions humaines, il n’est pas téméraire d’affirmer que l’intérêt en inspire un bien plus grand nombre. […] bien d’autres instincts, d’autres intérêts et d’autres drames que ceux de l’amour ? […] Vous voyez dès lors où devrait être l’intérêt du drame. […] Ou plutôt ils ne l’aiment qu’en tant que sa pensée leur est un encouragement à travailler pour des objets d’un bien autre intérêt que la possession d’une créature de chair.

1019. (1828) Introduction à l’histoire de la philosophie

La prudence me conseillait de différer la reprise de ces leçons, et de travailler à les rendre, pour l’année prochaine, moins indignes de votre intérêt. […] C’est là qu’est toute lumière ; j’ajoute, et tout intérêt ; car l’intérêt véritable est dans l’enchaînement et le développement régulier des choses. […] Souvent l’historien, préoccupé d’un intérêt particulier, par exemple, de l’intérêt politique, considère dans un peuple l’élément politique presque exclusivement ; ou, préoccupé de l’intérêt de la religion, il considère surtout l’élément religieux ; et alors ou il néglige tous les autres et mutile l’histoire ; ou sans les négliger, il leur impose à tous le caractère qu’il emprunte au seul élément qu’il considère, et s’il ne mutile pas l’histoire il la fausse. […] Voilà ce qui a donné tant d’importance, tant d’intérêt, tant de célébrité aux batailles. […] Le même motif attache le même intérêt au nom de Pharsale.

1020. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XIII » pp. 53-57

Saint-Marc est plus leste de ton, plus badin, persifleur, bel esprit et belle plume ; pour prendre idée du style et de la manière de Saint-Marc, lisez dans les Débats de vendredi (26 mai) l’article en tête contre la Gazette : c’est du pur Saint-Marc : caillette maligne et de grand esprit ; il porte d’ailleurs dans cette question l’intérêt personnel et d’amour-propre d’un universitaire. — Je crois pourtant, malgré les présomptions, que le gros des articles, ceux du milieu de la querelle, sont de Sacy16.

1021. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Première partie. Préparation générale — Chapitre IV. Le développement général de l’esprit est nécessaire pour bien écrire, avant toute préparation particulière »

Mais une âme fine et philosophique qui ait senti ce que la présence de l’homme met d’intérêt dans les choses inanimées, ce que l’indifférente sérénité de la nature a de navrant, quand disparaît ce bonhomme qui allait, venait, bêchait, taillait, introduisant le mouvement, la variété, la vie, peuplant ce désert à lui seul, âme de ce petit inonde ; une imagination imbue de poésie païenne, qui exprime la tristesse de cette impassibilité même, et mette en deuil pour le vieux jardinier les fleurs éternellement belles et souriantes, peuvent seules dicter cette brève parole, où l’on entend un écho d’Homère et de Virgile.

1022. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Première partie. Préparation générale — Chapitre VI. Utilité possible de la conversation »

Il faut se défier de cette inclination : il faut ne recevoir ou ne rejeter rien pour la personne qui le dit, et regarder la chose en soi ; mais en même temps se demander pourquoi celui qui parle parle ainsi, à quel sentiment il cède, à quel intérêt, si un autre parlerait de même, si lui-même n’a jamais parlé, ne parlera jamais autrement.

1023. (1890) L’avenir de la science « A. M. Eugène Burnouf. Membre de l’Institut, professeur au Collège de France. »

Or, s’il en était ainsi, si la science ne constituait qu’un intérêt de second ordre, l’homme qui a voué sa vie au parfait, qui veut pouvoir dire à ses derniers instants : « J’ai accompli ma fin », devrait-il y consacrer une heure, quand il saurait que des devoirs plus élevés le réclament ?

1024. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » pp. 34-39

Quand on rapporte tout à une personne, les Lecteurs n’y prennent jamais tant d’intérêt que quand on rapporte tout au Public.

1025. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 516-521

La multiplicité des Loix, leurs Commentateurs, souvent divisés d'opinions & d'intérêts, des prétentions opposées, multiplient à l'infini les difficultés dans l'étude du Droit public & de la constitution de cette partie de l'Europe : dans votre Ouvrage, tout rentre à sa place ; l'ordre qui en facilite les recherches, soulage la mémoire en fixant des époques, & prévient le dégoût presque inséparable de ces sortes d'études.

1026. (1913) Le bovarysme « Deuxième partie : Le Bovarysme de la vérité — II »

Avant, toutefois, d’entreprendre cette œuvre de réparation à l’égard d’un principe injustement déprécié, il n’est pas sans intérêt d’analyser les causes de cette humeur chagrine qui engagea dans cette voie calomnieuse les analyses précédentes.

1027. (1875) Premiers lundis. Tome III « De la liberté de l’enseignement »

Or, si je suis dans le vrai, quand je proclame que Jésus-Christ est Dieu, pouvez-vous exiger de moi, au nom de la tolérance et dans un intérêt de paix, que je consente à ne voir dans cet adorable Sauveur qu’un sage ou un philosophe ? […] nous avons de la peine à suivre vos paroles : c’est dans votre intérêt même que je me permets cette interruption. […] Une singulière disposition de la haute société française est venue prêter à ce parti un surcroît de puissance ou de hardiesse : je veux parler de la connivence qui s’est établie, au vu et au su de tous, entre les moins croyants, les moins pieux et les moins édifiants des hommes et ceux qui poussent avec une ferveur plus convaincue au triomphe et à la suprématie prédominante de l’intérêt religieux. […] Dans de telles conditions, il ne saurait être raisonnable de faire au clergé cette concession exorbitante dont il userait aussitôt moins dans le sens de la science même que dans l’intérêt de sa propre influence à lui.

1028. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre III. Pascal »

L’autorité civile, se souvenant du siècle précédent, craignit que la secte religieuse ne contînt le germe d’un parti politique, et crut de son intérêt de faire cause commune avec les jésuites, servant ainsi ceux qui devaient la combattre et persécutant ceux qui devaient la défendre dans ses rapports avec Rome. […] Il y eut là une lutte pénible, que compliquèrent des questions d’intérêt : enfin Jacqueline l’emporta et devint la sœur Sainte Euphémie. […] Ils ont eu raison même absolument, en dehors de tout dogme, du seul point de vue de la conscience, lorsqu’ils ont rétabli la lutte incessante, obstinée contre l’instinct et l’intérêt, l’inquiétude de tous les instants, comme les conditions de la moralité, et qu’aux décisions des directeurs complaisants ils ont opposé leur rigorisme, l’obligation, dans tous les cas douteux, de choisir le parti le plus dur, et de décider contre l’égoïsme, par la seule raison qu’il est l’égoïsme. […] Par là ce pamphlet est demeuré un des livres que lira toujours quiconque, chrétien ou non, cherchera sa règle de vie : il a réalisé cette loi des grandes œuvres d’art, de dépasser les circonstances contingentes qui lui ont donné l’être, et de revêtir un intérêt absolu, universel.

1029. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre deuxième »

Sujet d’un intérêt éternel et toujours pressant, le premier qui s’offre à la pensée sitôt qu’elle est libre de l’autorité, de l’imitation, de l’exemple, et rendue à elle-même ; problème dont tous les esprits ont l’instinct, mais auquel la plupart se dérobent, sous l’empire des choses qui ne souffrent pas de délai ! […] L’excès dans le désir de convaincre rend Descartes dur pour ses contradicteurs, outre le faible humain, qui fait que les meilleurs esprits ne peuvent défendre la vérité sans s’opiniâtrer, ni sans en confondre l’intérêt avec le leur. […] Cette clarté admirable, cette précision, cette généralité du langage, dans une matière d’un intérêt si grand, ôtent tout prétexte de reculer ou de s’abstenir. […] Du reste, les auteurs ne manquent pas de s’en reconnaître redevables à Descartes, « un célèbre philosophe de ce siècle, disent-ils, qui a autant de netteté d’esprit qu’on trouve de confusion dans les autres. » Ce n’est pas seulement un acte d’honnêtes gens ; c’est la preuve que ces excellents esprits préféraient la vérité à l’honneur de l’avoir trouvée, et tenaient à ce qu’on sût, dans son intérêt même, que ce qu’ils pensaient à leur tour, un homme célèbre l’avait pensé avant eux.

1030. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre premier »

Il honore Perrault, il le loue même, mais d’une plume avare, et non sans jeter sur lui un dernier regard de travers ; et quand on lui annonce sa mort, « il n’y prend, dit-il, d’autre intérêt que celui qu’on prend à la mort de tous les honnêtes gens5. » La différence entre cette réconciliation un peu maussade et le traité de paix accepté par Lamotte ne s’explique pas seulement par l’humeur des deux hommes. […] La vérité se doit à tous, mais aux vivants bien plus qu’aux morts, et aux morts dans l’intérêt seul des vivants. […] Là même où Lamotte n’est que spécieux, pour peu qu’il le soit sans intérêt, ses vues ingénieuses et engageantes provoquent la réflexion plutôt que la contradiction, et il sert le goût par les scrupules mêmes qu’il éveille. […] L’intérêt qu’ils y prennent passe facilement pour une violence faite aux consciences, et l’opinion protégée, fût-elle la bonne, a le tort de l’être de par l’autorité.

1031. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « IV »

Il y aurait là toute une enquête à établir, d’un grave intérêt. […] Henry Fouquier). « … Cette œuvre, il est de notre dignité et de notre intérêt de l’entendre et de la connaître… » Même jour, XIXe Siècle : article de M.  […] Lamoureux ajouta, en même temps, que le personnel n’avait aucune crainte à avoir, et que les intérêts de chacun seraient absolument sauvegardés. […] Je n’ai pas à qualifier les manifestations qui se produisent, après l’accueil fait par la presse et le public à l’œuvre que, dans l’intérêt de l’art, j’ai fait représenter à mes risques et périls sur une scène française.

1032. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre III »

L’intérêt est si fin, si roué, si retors ! […] Aussi bien le public, laissant ces amoureux chimériques monter sur des échasses et aspirer aux mansardes, s’est-il pris de je ne sais quel intérêt sympathique pour leur ennemi, leur bête noire, l’être sacrifié de cette comédie, M.  […] Le petit comte de Puygeron est bien mince, bien frêle, bien insignifiant ; le seul intérêt qu’il pût exciter était dans l’excès de son amour, un amour aveugle et sourd qui, de lui-même, se crèverait les yeux et se boucherait les oreilles, pour ne rien voir, ne rien entendre, et ne recouvrer ses organes que devant une patente et criante évidence. […] En somme, l’impression d’ensemble a été celle d’un intérêt et d’un saisissement concentrés.

1033. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre quatrième. Éléments sensitifs et appétitifs des opérations intellectuelles — Chapitre premier. Sensation et pensée »

Si je regarde un carré, il y a dans les impressions mêmes qu’il produit, dans les résidus de ces impressions au sein de ma conscience, dans l’intensité de ces impressions, dans la réaction motrice qui suit ces impressions, dans l’intensité et dans la durée de cette réaction, dans les résidus qu’elle laisse elle-même, enfin dans l’intérêt que peuvent offrir ces résidus et dans l’attention qui en résulte, il y a là, dis-je, tous les éléments nécessaires pour produire un sentiment d’égalité, de répétition symétrique. […] Supposez maintenant que, dans le monde, il apparaisse un être chez qui le sentiment de la différence et de la ressemblance, contenu en germe dans les émotions et motions successives, se renforce en se répétant, se dégage au point de devenir lui-même une sorte de représentation reconnaissable parmi les autres, un objet d’intérêt et de réflexion, un tel être n’aura-t-il pas des chances de survie bien supérieures ? […] Or, la plupart des problèmes viennent d’impressions sensibles, soit vives, soit nouvelles ; c’est un intérêt qui nous fait penser. Il n’y a pas lieu de séparer une pensée théorique et une pensée pratique : il n’y a au fond qu’une manière de penser, qui, dans son origine, est essentiellement pratique, c’est-à-dire issue d’appétitions et tendant à des appétitions ; elle s’élève peu à peu vers des objets d’un intérêt plus général, mais sans perdre jamais, même à l’apogée de son développement, la marque de son caractère primitivement sensible et volitif.

/ 2522