Viennet, debout, se retourne, regarde et de cet air militaire qu’il a toujours, et qui lui sied, il répond fièrement : “Je vis, la poésie classique n’est pas morte.”
Une conversation souvent donne l’idée d’un étrange pot-pourri musical où tous les chanteurs exécuteraient des airs d’opéras différents, où Faust donnerait la réplique à Valentine, où Vasco de Gama ferait sa partie à côté de Rachel.
Quand on descend de la Papauté au xive siècle, de l’altière figure de Boniface VIII et des grandes contentions du schisme d’Occident et du Concile de Constance1 au Triumvirat littéraire 2 de Charles Nisard, on manque d’air et il semble que tout se rapetisse.
Quand on a lu cette mort dans le Phédon, on se sent comme un air de joie et de fête dans l’âme ; on croit sortir d’un banquet au lieu de sortir d’un supplice. […] « Vraiment, cette forme de gouvernement a bien l’air d’être la plus belle de toutes, parce que, grâce à la liberté, il renferme en soi tous les gouvernements possibles. » Platon critique ensuite ironiquement les vices propres à toute nature de gouvernement démocratique. […] Il s’approprie l’espace, par la place qu’il y occupe et dont on ne peut le priver qu’en le tuant ; il s’approprie le temps, par la durée plus ou moins prolongée qu’il lui emprunte ; il s’approprie la lumière, par le regard, qui fait entrer tout ce qui est visible dans son âme à travers ses yeux ; il s’approprie les bruits, les sons, les paroles, les significations des paroles, par l’oreille ; il s’approprie l’air nécessaire à sa poitrine, par la respiration ; il s’approprie les fruits et les aliments de la terre indispensables à sa conservation, par la main et par la bouche ; et, quelle que soit l’étendue de ses possessions ou de ses domaines, il ne peut s’approprier réellement et corporellement en effet que la partie de ces éléments ou de ces aliments nécessaires à ses cinq sens : le surplus, sous une forme ou sous une autre, retourne aux autres hommes, qui ont le même droit de vivre que lui. […] Si Platon avait eu à lui donner un gouvernement, il aurait dû lui donner le gouvernement des circonstances, la constitution de l’à-propos, un costume aussi varié et aussi souple que l’air élastique qui l’environne, un manteau de pourpre sans forme et sans couture comme celui dont se vêtaient les Arabes, ces Français d’Asie, se pliant à toutes les saisons et à toutes les attitudes pour le jour et pour la nuit, pour la paix et pour la guerre, pour l’autorité ou pour la liberté, devant elle-même et devant l’ennemi.
Des parfums vertigineux se dégageaient des fleurs, l’air grisait, on était fou de lyrisme et d’art. […] Le nom intervint, en effet, dans les quelques paroles qui s’échangeaient entre mon auguste interlocuteur (Napoléon III) et moi : « Comprenez-vous, me dit l’Empereur, d’un air à la fois grave et légèrement railleur, qu’un homme de ce mérite fasse des vers comme ceux-ci : … J’en suis émerveillé Comme l’eau qu’il secoue aveugle un chien mouillé » ? […] C’était un souffle nouveau, une bouffée de grand air, un resplendissement de soleil. […] La poésie de Victor Hugo est parce qu’elle est, voilà tout ; tout y est réinventé et créé à nouveau ; le sens du mystère et le sens du lyrisme par elles ont été restitués à la poésie française ; c’est d’elle que nous tirons notre existence, tous ; elle est l’air que chacun de nous respire : nous ne le saurions décomposer et vivre.
L’air frais de la montagne a fait trembler ta chair. […] La voix pure, au lointain, des beaux pêcheurs de sable, Redit aux longs échos du fleuve un air ancien Au rythme d’or, tandis qu’ils tirent sur les câbles, Dans la limpidité du soir Languedocien, M. […] Lacuzon est, en tous cas, un artiste puissant, et, s’il n’avait autant l’air de s’en rendre compte à travers son œuvre, on admirerait celle-ci sans restrictions. […] Le paysage est brut, semble morne de vivre En l’air jaunâtre et gris de cette aube… Pleuvoir !
Entre le jeune voyageur de 1831 et celui d’aujourd’hui, je fais la part de la physionomie individuelle, de la différence des caractères et des formes de talent ; mais aussi il me semble qu’on peut, en lisant les deux récits, se faire une idée des éléments tout nouveaux qui sont entrés dans l’éducation depuis trente ans, des excitants qui flottent dans l’air et qu’on y respire ; de la réalité en fusion qui circule, qu’on absorbe, et qui ressort ensuite par tous les pores ; en un mot, du changement introduit dans la nourriture générale des esprits, même de ceux qui sembleraient appartenir à un même courant d’opinions et de traditions. […] Les Indiens s’avancèrent d’un air morne vers le rivage : on fit d’abord passer les chevaux, dont plusieurs, peu accoutumés aux formes de la vie civilisée, prirent peur et s’élancèrent dans le Mississipi, d’où on ne put les retirer qu’avec peine : puis vinrent les hommes, qui, suivant la coutume ordinaire, ne portaient rien que leurs armes ; puis les femmes, portant leurs enfants attachés sur leur dos ou entortillés dans les couvertures qui les couvraient ; elles étaient, en outre, surchargées de fardeaux qui contenaient toute leur richesse. […] « Il y avait dans l’ensemble de ce spectacle un air de ruine et de destruction, quelque chose qui sentait un adieu final et sans retour ; on ne pouvait y assister sans avoir le cœur serré.
Dans ces grandes crises, elle n’était plus maîtresse de ses sentiments : soudains et prompts, ils s’envolaient au plus haut de l’air, comme des nuées de colombes. […] sans pompe, et sans culte et sans prêtre, Où je faisais dans l’air jouer ma faible voix, Où la ronce montait fière à chaque fenêtre ; Près du Christ mutilé, qui m’écoutait peut-être, N’irai-je plus rêver du Ciel comme autrefois ? […] C’est dans une lettre du 1er novembre 1826 ; elle lui écrivait, en bonne royaliste toujours, en amie spirituelle et sensée, mais qui n’entendait rien à ce genre de scrupules : « Mon cœur, disait-elle, sait lui pardonner (à la sœur de Mme Valmore, pour un grief en l’air et par manière de plaisanterie), comme il te pardonne la nonchalance que tu mets pour recevoir une pension qui ne peut, sous tous les rapports, n’être pour toi que fort agréable.
Le ranz des vaches de cette contrée, le ranz des Colombettes, celui, entre les divers ranz, auquel l’air célèbre est attaché, a de plu une petite action dramatique, vive de couleur et de poésie1. […] Les étudiants de Lausanne aiment à marier de beaux airs allemands à des chants poétiques souvent composés par quelqu’un d’entre eux. […] … Dans une pièce de vers qui obtint, il y a peu d’années, le prix à l’académie de Lausanne, je trouve ces beaux traits de nature ; il s’agit d’un voyageur : Il voit de là les monts neigeux Et les hauts vallons nuageux : Puis il entend les cornemuses Des chevriers libres et fiers, Perdus dans la pâleur des airs Par-dessus les plaines confuses ; et cette autre gracieuse peinture des ébats auxquels se plaisent les nains et les sylphes de la montagne : Sur les bords de l’eau claire, à l’ombre des mélèzes.
C’est presque comme pour les familles de plantes étagées sur les Cordillères, et qui ne dépassent jamais une certaine hauteur, ou plutôt c’est comme pour les familles d’oiseaux dont l’essor dans l’air est fixé à une certaine limite. […] Néanmoins je ne demeurai pas, et elle me répondit d’un air fort doux et fort obligeant ; et, pour vous dire la vérité, il faut que je l’aie prise dans quelque mauvais jour, car elle passe pour fort belle dans la ville, et je connois beaucoup de jeunes gens qui soupirent pour elle du fond de leur cœur. […] Toutefois, malgré la parenté des religions et la communauté de certaines croyances, il y a dans le judaïsme un élément à part, intime, primitif, oriental, qu’il importe de saisir et de mettre en saillie, sous peine d’être pâle et infidèle, même avec un air d’exactitude : et cet élément radical, si bien compris de Bossuet dans sa Politique sacrée, de M. de Maistre en tous ses écrits, et du peintre anglais Martin dans son art, n’était guère accessible au poëte doux et tendre qui ne voyait l’ancien Testament qu’à travers le nouveau, et n’avait pour guide vers Samuel que saint Paul.
La fièvre, qui était toujours très-considérable, augmentait fréquemment et par bouffées, et Lemonnier, qui le veillait, en disant qu’il était comme il devait être, avait bien l’air de ne pas dire ce qu’il pensait. […] Il allait avec une grande exactitude aux prières des quarante heures, toujours avec une très-bonne contenance, avec un air réellement abattu, et ne prenait part à rien en public. […] Quoique ce sentiment fût le même à Versailles, l’air d’inquiétude y était plus général ; c’est d’abord le pays du déguisement, et si le déguisement est permis dans un cas, c’est bien dans celui où quand on peut, sans blesser l’honneur, cacher ce qu’on pense, on ne peut pas le faire paraître sans étourderie et sans courir le risque à peu près sûr d’une Bastille éternelle.
On peut même soupçonner qu’il prend grand plaisir à l’enfler, et regarde au nombre plus qu’au choix : témoin ces amours d’un éléphant et d’une bouquetière en la ville d’Alexandrie, dont il nous fait part gravement, et je ne sais combien d’autres sottises, auxquelles il se donne l’air de croire. […] On sait comment Montaigne se comporte pendant la peste de Bordeaux : il n’affronte pas le « mauvais air ». […] Sur la fin de sa seconde magistrature, la peste désola Bordeaux : Montaigne se tint à Libourne, en bon air.
Il est toujours naturel et il a toujours l’air de s’amuser de ce qu’il dit, même quand ce n’est guère amusant. […] En somme et malgré les grands airs d’assurance qu’on prend, on les tranche au gré de son intérêt et, quand on est honnête, au petit bonheur. […] Maintenant, je sais bien, il insiste un peu trop, il vous met trop les points sur les i, il a toujours l’air de s’adresser à des illettrés qui ne comprendraient point sans ce luxe de redites et d’explications.
— « L’oie sauvage se repose au milieu du lac, et nous, nous travaillons sans relâche à construire des murailles de boue. » — « Voilà que les corbeaux des montagnes fendent l’air de leurs ailes immobiles ; ils semblent se reposer en volant, et moi je suis rongé de soucis. […] Cet incurable ennui n’était pas soutenant une maladie patricienne et philosophique, elle était dans l’air. […] C’est une des faiblesses et des déceptions du drame que cette conspiration en l’air qui se borne à chuchoter en sourdine, dans une ruelle.
La voix, dont les hardis préludes chantant, il y a plus d’un quart de siècle, la grandeur du conquérant de l’Europe en cellule il Sainte-Hélène, célébraient cet aigle qui, abattu et captif, Manque d’air dans la cage, où l’exposent les rois ; cette voix, aujourd’hui proscrite par un contrebas de la fortune, ne serait pas embarrassée pour rendre l’expression littérale et l’accent même du poëte thébain, pour nommer l’oiseau domestique, non moins que sa cage ; et, sans avoir besoin de l’aigle, personnage noble en tout temps, elle dirait ce coq guerroyant au logis (ἐνδομάχης), dont s’effrayait le bon abbé Massieu. […] de l’ode, dont Polymnie À ses amants nota les airs, Tu peux abjurer l’harmonie, Qu’elle doit aux charmes des vers ! […] » Puis, dans un retour aux mouvements impétueux de la vie, est-ce Pindare, est-ce Bossuet, qui, frappé du sillon d’éclair de l’aigle, que sa pensée a tant de fois suivi dans les cieux, dit d’un guerrier qu’il admire : « Comme une aigle qu’on voit toujours, soit qu’elle vole au milieu des airs, soit qu’elle se pose sur quelque rocher, porter de tous côtés ses regards perçants et tomber si sûrement sur sa proie qu’on ne peut éviter ses ongles non plus que ses yeux ; aussi vifs étoient les regards, aussi vite et impétueuse était l’attaque, aussi fortes et inévitables étaient les mains du prince de Condé. » Un seul mot vient ici littéralement de Pindare, et avant lui, d’Homère : χεῖρας ἀφύκτους.
Il est vrai que c’est dans une comédie qu’il dit cela, et qu’on ne peut pas prendre tout à fait au sérieux ces sortes de saillies ; mais il faut pourtant reconnaître que, si les honnêtes gens en ce monde sont moins mal partagés d’ordinaire et dans les temps réguliers que Ménandre ne le dit, il est aussi des instants de crise où ils se conduisent de manière à avoir tout l’air en effet de ne venir qu’après les flatteurs, les calomniateurs et ceux qui vivent à petit bruit de la corruption. […] De là bien des haines ; de là aussi la difficulté de trier les bons, et un souci qui peut sembler exclusif parfois, un air négatif et préventif, et qui n’est la plupart du temps que prévoyant. — « Il y a dix ans que je ferme la porte aux Barbares, » disait un jour le fondateur de cette Revue.
Il continuait de vivre et de jouer sous ces mille formes que lui dictait un secret instinct ; le crayon jouait sous ses doigts, et la saillie accompagnait le crayon, comme un air qu’on sait suit naturellement les paroles. […] Mais le goût a parfois à souffrir aussi de certaines duretés, de rocailles, pour ainsi dire, que rachètent bientôt après, comme dans une marche alpestre, la pureté de l’air et la fraîcheur.
A le prendre ainsi, et vu l’urgence, vu la prorogation du Corps législatif, qui a pu être nécessaire, mais qui est survenue irrégulièrement et qui a choqué et interloqué ce Corps, vu bien d’autres circonstances que chacun sent assez sans qu’on les dise, il me semblait que le Sénat aurait pu procéder plus vite, motiver son empressement même par la condition fâcheuse qui était faite au Corps législatif, resté en l’air et en suspens, se mettre dès le premier jour avec ce Corps dans des relations d’égards et de bons procédés et, en vérité, quand je vois les modifications apportées au sénatus-consulte après une discussion si laborieuse, je trouve qu’il eût été mieux de l’accepter et de l’acclamer sous sa première forme. […] Charles Giraud) : « Il m’est arrivé bien souvent de donner des avis, et à des ministres de ma connaissance ou de ma familiarité de dire à l’occasion : « mais prenez garde, voilà tel ou tel fait, tel indice grave, telle initiative considérable qui, si on la néglige et si l’on n’en tient compte, peut avoir ses inconvénients. » A quoi il m’était invariablement répondu d’un certain air : « On s’en passera ».
Une idée lui plaît par un air de vérité : il l’accueille. […] Tout ce qu’on n’assoit point sur cette base, de quelque forme qu’on le revête, est une beauté en l’air, sans solidité, fragile et prompte à flétrir : ce n’est vraiment que du clinquant.
Des formes vagues d’oiseaux lourds Dans l’air entre-croisent leur voie… L’homme se croit poursuivi par un être mystérieux qui le talonne. […] Pourquoi détester chez un poète ce qu’il est permis d’aimer chez une femme : la coquetterie, le désir de plaire se traduisant soit par les petits airs de tête, soit par les indexions de voix câlines et à demi fausses, soit par l’arrangement symétrique et compliqué de petits objets, chiffons, rubans, oripeaux ?
Telles sont les images, évidemment incomplètes, qui me viennent à l’esprit au moment où j’évoque le crâne chauve, la barbe hirsute, les petits yeux obliques, le nez kalmouk, le visage ravagé, l’âme sensuelle et dolente de Paul Verlaine… Il a donné du jour, de l’air, et une sorte de fluidité frémissante aux vers et à la strophe, qu’avait durcie et glacée la discipline des Parnassiens. […] Elles semblaient à peine un remuement dans l’air ; un son de flûte dans l’ombre, au clair de lune ; une fuite de robe soyeuse dans le vent ; un frisson de verres et de cristaux sur une étagère.
La circulation et la respiration avec les sensations de faim, soif, suffocation qui s’y rattachent, le plaisir de respirer un air pur, le malaise produit par une atmosphère confinée influe beaucoup sur notre état. […] Le système nerveux peut ainsi se comparer à un orgue, dont les soufflets sont constamment pleins d’air, et se déchargent dans telle ou telle direction, selon les touches particulières qui sont mises en jeu.
Cette apothéose souterraine n’était pas un privilège, mais une loi commune ; elle transfigurait les bons et les méchants également. « L’air plein de dieux », dit quelque part Homère : la terre n’était pas moins pleine de divinités. […] Les Choéphores ont arrêté Gilissa au passage : Clytemnestre l’a chargée de dire à Égisthe de ne rentrer au palais qu’entouré d’une escorte année : — « Garde-toi, — lui disent-elles, — de rapporter cela au tyran maudit ; prends un air joyeux pour qu’il t’écoute sans soupçon ; dis-lui de revenir seul et en hâte.
Je suis grande, j’ai la taille admirable et le meilleur air que l’on puisse avoir ; j’ai de beaux cheveux bruns faits comme ils doivent être pour parer mon visage et relever le plus beau teint du monde, quoiqu’il soit marqué de petite vérole en beaucoup d’endroits. […] Mais je crois que c’est un défaut qu’on m’impute, pour ne m’en avoir pu trouver d’autres, et que je dois pardonner à ceux qui disent que je n’ai point la bouche tout à fait régulière, quand ils conviennent en même temps que ce défaut est d’un agrément infini et me donne un air très spirituel dans le rire et dans tous les mouvements de mon visage.
On se laissoit prendre aux exhortations ; à l’air insinuant du P. directeur. […] Fénélon est scandalisé de la proposition ; &, révolté de cet air d’empire, il répond qu’on ne verra jamais son nom au bas d’un libèle .
Il avait même l’air de n’être pas fâché en disant cela. […] Ils changent d’air.
C’était suprêmement un talent d’imagination, de la fantaisie la plus entraînante, mais aussi la plus aisément entraînée, car il n’y a pas de mors possible — si moelleux qu’il soit — pour ces filles de l’air ! […] Cuvillier-Fleury avait dit de Janin : « Il fut le Roi de la littérature facile », — laquelle, croyez-moi, n’est facile que pour ceux qui savent faire de cette littérature-là, et qui est très difficile pour les lourds qui se donnent les airs de la mépriser, — M.
« C’est elle qui prépare et anime la fête, orne de guirlandes la chambre nuptiale72, dépeint la beauté des jeunes vierges, fait avancer Aphrodite sur le char des Grâces entouré du chœur des Amours, attache avec une tige d’hyacinthe les cheveux de la déesse qui se partagent sur ses tempes, et laisse flotter les autres au souffle de l’air. […] « Mais viens de ce côté, si jamais tu écoutas ma voix dominée par l’amour, et si, quittant la maison de ton père, tu descendis avec ton char attelé, alors que de beaux cygnes te portaient d’un vol léger, agitant à coups pressés, autour du point noir de la terre, leurs ailes dans le milieu des airs.
ayant devant eux le petit lot d’une vie à peine vitale, emportés dans l’air comme la fumée, assurés seulement de la chose où chacun d’eux s’est heurté, et poussés çà et là vers toute a chose ! […] Lorsque, séparé du corps, tu viendras dans le milieu libre de l’air, tu seras dieu impérissable, incorruptible, non plus soumis à la mort. » Quelle que soit l’élévation de cette morale, on sent cependant ce qui peut y manquer.
Et le plus doucement possible, avec lenteur et circonspection, déplaçant sous le drap celui de ses bras qui se trouvait le plus éloigné de la figure imaginaire, il l’allongea avec précaution dans la direction opposée, afin de sortir sa main aussi loin que possible de celle qu’il contemplait et de revenir sur celle-ci par un détour fait en l’air, bien lentement, comme on fait quelquefois pour atteindre un papillon ; il s’attendait à voir la main s’envoler avant de l’avoir touchée ; mais pas du tout, les légers plis de la couverture qui se firent malgré ses soins pendant cette grande opération ne modifièrent en rien l’apparence de cette main charmante : voilà que la sienne en est tout près et va pouvoir la saisir.
L’affichage moderne L’affiche illustrée (œuvre imprimée, qu’il faut donc mentionner ici) dont les oisifs regardent la pose toute fraîche et toute humide, admirant comment le mauvais et mince et tortillé chiffon sorti de la blouse grise affecte vite sur le renforcement du mur une allure de tableau et sous la décharge du pinceau un bel air verni, l’affiche illustrée est au juste, à cette heure, une industrie charmante qu’on est en train de gâcher.
Le Seau du Tassoni y sert de bénitier ; la Boucle de cheveux que Pope a célébrée, de goupillon ; l’Eloge de la Déesse est prononcé, dans les jours de solennités, par Erasme, devant la Lampe de l’enthousiasme, qui se tient en l’air sans être suspendue ; Quinault est un Opérateur herborisant dans les bois d’Idalie.
Sa Poésie consistoit moins à dire de grandes choses, qu’à en exprimer de petites par de grands mots moitié Grecs, moitié François ; il donnoit, par cet appareil, un air merveilleux à son style, que l’ignorance seule pouvoit goûter.
Tantôt il raconte que le char du dieu vole comme la pensée d’un voyageur qui se rappelle, en un instant, les lieux qu’il a parcourus ; tantôt il dit : Autant qu’un homme assis au rivage des mers Voit, d’un roc élevé, d’espace dans les airs, Autant des Immortels les coursiers intrépides En franchissent d’un saut81.
Et vous ne songez pas que ces arbres doivent être touchés fortement, qu’il y a une certaine poésie à les imaginer selon la nature du sujet, sveltes et élégans, ou brisés, rompus, gercés, caducs, hideux ; qu’ici pressés et touffus, il faut que la masse en soit grande et belle ; que là rares et séparés, il faut que l’air et la lumière circulent entre leurs branches et leurs troncs ; que cette terrasse veut être chaudement peinte ; que ces eaux imitant la limpidité des eaux naturelles, doivent me montrer comme dans une glace l’image affaiblie de la scène environnante ; que la lumière doit trembler à leur surface ; qu’elles doivent écumer et blanchir à la rencontre des obstacles ; qu’il faut savoir rendre cette écume ; donner aux montagnes un aspect imposant ; les entr’ouvrir, en suspendre la cime ruineuse au-dessus de ma tête, y creuser des cavernes, les dépouiller dans cet endroit, dans cet autre les revêtir de mousse, hérisser leur sommet d’arbustes, y pratiquer des inégalités poétiques ; me rappeller par elles les ravages du temps, l’instabilité des choses, et la vétusté du monde ; que l’effet de vos lumières doit être piquant ; que les campagnes non bornées doivent, en se dégradant, s’étendre jusqu’où l’horizon confine avec le ciel, et l’horizon s’enfoncer à une distance infinie ; que les campagnes bornées ont aussi leur magie ; que les ruines doivent être solennelles, les fabriques déceler une imagination pittoresque et féconde ; les figures intéresser, les animaux être vrais ; et que chacune de ces choses n’est rien, si l’ensemble n’est enchanteur ; si composé de plusieurs sites épars et charmans dans la nature, il ne m’offre une vue romanesque telle qu’il y en a peut-être une possible sur la terre.
Il a trop l’air de n’y avoir pas songé. […] C’est ainsi qu’il nous raconte un épisode historique qui a des airs de roman, l’histoire du duc de Gueldres et de son fils. […] Le roi, les princes, les princesses les chantaient à l’envi, chacun sur un air de son choix. […] Un air de danse et des paroles d’adoration. […] De la terre ne sera fait eau ; l’eau en l’air ne sera transmuée, de l’air ne sera fait le feu, … et de ce monde rien ne prêtant ne sera qu’une chiennerie. » Voilà la parodie, et l’une des plus fines et des plus fortes qu’on ait imaginées.
Voici l’homme est un recueil de notes qui, même dans leur réunion, gardent un air éparpillé, plutôt un air éperdu. […] André Rivoire a bien l’air de ne s’en être pas douté. […] Mais nos airs et nos livres, il les tarabuste. […] L’air a de la mélancolie et de la gaieté toute prête. […] » répond noblement l’auteur de L’Air des cimes.
L’aimée. — L’air et le monde point cherchés. […] Je me suis séché à l’air du crime. […] Une émotion vraie l’anime, plus touchante peut-être de se dissimuler sous un air d’enjouement et de gentille galanterie. […] » — la princesse Aricie, timide, aux pleurs sanglants, le vieil Ashvérus, avec son air de légende, apparaissent d’abord, figures très caractéristiques que créèrent et dont s’amusèrent les ancêtres. […] L’air se déchire de cris tumultueux d’oiseaux, de plaintes vagues ; sur les bourdons sonores des beffrois, les marteaux cassent les heures.
de quel air d’assurance formidable M. […] Il affecte des airs d’homme pratique et dépourvu de préjugés. […] Ce n’était pas la peine de prendre ces airs d’homme fort, pour redevenir si vite, sous un regard de jeune fille, un si bon jeune homme. […] Non ; c’est une idée qui est comme cela dans l’air. […] Passe une pauvre fille, Jeanne-Marie, l’air triste, qui va couper des ajoncs.
Le ton, le sérieux, l’air de satisfaction profonde, rappellent Chateaubriand racontant son ambassade à Londres. […] J’ai dit que son style avait un air de nouveauté : c’est pour cela. […] Il dit qu’il secoue le joug de l’opinion, qu’il la brave : mais la braver de cet air, c’est toujours songer à elle. […] Il travaillait alors à la musique du Devin du Village et il nous chantait au clavecin les airs qu’il avait composés. […] On l’amènera (car il ne s’agit pas de l’y contraindre) à vivre beaucoup en plein air, à exercer beaucoup son corps.
Et même, à mesure que ce rideau descendra, il créera entre la salle et la scène un courant d’air de plus en plus violent, l’ouverture étant de plus en plus étroite. […] Ils sentent qu’ils ont bon air dans leurs rôles respectifs. […] C’est que Mimi a décidément trop l’air d’un personnage de romance. […] Elle a bien l’air de ce qu’elle est. […] Gotte est tombée amoureuse de son maître pour l’avoir entendu fredonner l’air de Gounod : Dans les sentiers ombreux.
Les testateurs ont des airs d’électeurs démagogues, encore que, d’ordinaire, ils le soient peu. […] Air et maigreur de martyre. […] Ne ressemble pas à ces femmes qui ont ou se donnent l’air vulgaire d’une victime. […] Il a le parfum d’une matinée, l’air du printemps et l’aspect de fête d’un départ pour un beau voyage. […] Ai-je l’air d’un homme qui a peur ?
Un air nouveau moins froid vous souffle aux joues ; le ciel change et le sol aussi. […] Plus de grandeur ni de puissance ; l’air sauvage ou triste s’efface ; la monotonie et la poésie s’en vont ; la variété et la gaieté commencent. […] Tout y semblait maniable et civilisé ; tout y était sur un petit modèle, en proportions commodes, avec un air de finesse et d’agrément. […] L’air et les aliments font le corps à la longue ; le climat, son degré et ses contrastes produisent les sensations habituelles, et à la fin la sensibilité définitive : c’est là tout l’homme, esprit et corps, en sorte que tout l’homme prend et garde l’empreinte du sol et du ciel ; on s’en aperçoit en regardant les autres animaux, qui changent en même temps que lui, et par les mêmes causes ; un cheval de Hollande est aussi peu semblable à un cheval de Provence qu’un homme d’Amsterdam à un homme de Marseille. […] Imaginez le paysan qui vit toute la journée en plein air, qui n’est point, comme nous, séparé de la nature par l’artifice des inventions protectrices et par la préoccupation des idées ou des visites.
Et il entrait avec un grand air, et il saluait galamment, et de temps en temps éternellement souriant, lançait un assez joli trait d’esprit, que Mme Récamier relevait, faisait valoir. […] Aujourd’hui dîne Taine, avec son regard un peu fuyard sous ses lunettes, son attention, pour ainsi dire, affectueuse, sa parole facile, imagée, nourrie de notions historiques et scientifiques, sa distinction légèrement malingre ; enfin ce semblant d’air d’homme du monde, qu’attrapent les jeunes professeurs, ayant fait l’éducation d’enfants d’une grande famille. […] Là, assis sur un banc, entre Lariboisière et l’abattoir, ces deux souffroirs de l’homme et de la bête, je reste rêvant, à respirer un air chaud de viande, à écouter de sourds beuglements venant jusqu’à moi, comme de lointains égorgements… Et pendant ce, j’entends, dans mon dos, trois petites filles blaguer la façon dont les sœurs leur font faire le signe de la croix. […] Il s’accroche au moindre mot technique que nous lâchons, le crayonne sur une feuille de papier, où il bâtit son article au moyen de points de repère, semés ça et là, qui lui donnent l’air du dessin d’un acarus du faux bourdon, grossi au microscope. […] Mme Sand arrive avec un air de somnambule, et reste endormie tout le déjeuner… Après le déjeuner, on va dans le jardin.
Les faces pâles ont des visages triangulaires, aux pommettes osseuses, pareils à des coquilles de noix sculptées en têtes d’hommes, l’air très fragile. […] Mais il semble plus las, et lorsque se décidant, d’un air d’immense effort, il a porté à ses lèvres deux bouchées, il repousse tout le reste de la main. […] Et averti, dès cinq heures, qu’on se battait à Bazeilles, il était venu, de son air silencieux et morne de fantôme, aux chairs ravivées de vermillon ». […] L’air des cloches qui s’y survivent et des tours. […] Elle va devant soi, avec un air impassible, sans perdre de temps.
Lorsqu’on l’adressait à Goethe, il prenait, dit-on, des airs de sphinx. […] Tout à l’heure Werther et Faust nous paraissaient malheureux et coupables ; mais ni leurs malheurs, ni leurs fautes, n’étaient destitués d’un certain air de grandeur. […] Un mot seul n’est rien, pas plus qu’on ne sent une bulle d’air froid qui vient tout à coup se mêler à une chaude atmosphère ; une suite de mots, s’ajoutant les uns aux autres, quelquefois inaperçus, jamais perdus, finissent par composer un air subtil, répandu partout, qui n’affecte plus les sens de la même manière dont ils étaient jadis affectés. […] Le jardin, le château, les êtres à part qui l’habitent, tout s’offre à Antoine avec un air de grandeur et d’élégance dont il n’a pas encore eu d’idée. […] « Je le sais, dit-elle d’un air confidentiel, et elle lui pressa légèrement le bras.
Montalembert étale des vérités excessives, repoussantes, et qui dès lors ne sont plus des vérités ; ce sont des plaies secrètes que tout le monde désire soigner et soulager, et que le grand air va irriter.
Son talent s’est fait de pièces et de morceaux ; il s’est fondu au feu de forge d’une volonté ardente : il en garde encore aujourd’hui les marques, un air de tourment et de convulsion.
Pourtant il n’est pas si malaisé d’entendre ce qu’il n’a été permis que d’indiquer ; et même dans cette manière, que je nomme ma première, et qui a un faux air de panégyrique, la louange (prenez-y garde) n’est souvent que superficielle, la critique se retrouverait dessous, une critique à fleur d’eau : enfoncez tant soit peu, et déjà vous y touchez.
Les cheveux noirs sont légèrement frisottants et crêpelés, ce qui leur donne l’air ébouriffé ; le teint d’un brun mat, les dents blanches, petites et espacées, les lèvres pourprées d’un rouge de corail, les yeux petits et un peu enfoncés, mais très vifs, et qui prennent l’air malin quand le rire les éclaire, les narines ouvertes, les sourcils fins et droits, l’oreille exquise, le col un peu fort et très bien attaché, sont d’une sphinge tranquille et divine, ou d’une guerrière de Thyatire dont la beauté simple, accomplie et idéalement parfaite ne peut fournir aucun thème d’illustration aux dessinateurs de La Comédie humaine.
. — Brunette, ou petits airs tendres (1892). — À l’orée (1899). — Le Sourire d’Hellas (1899). — Un jour tout de rêve (1900). — La Petite Porte feuillue (1900).
Édouard Thierry Il lisait toujours et s’efforçait rarement de produire ; mais ce qu’il écrivait était simple et excellent, ingénieux avec le plus grand air de naturel, et spirituel sans se piquer de le paraître… Tout cela est précis et délicat, ingénieux et sincère, toujours intéressant, toujours original, mais de cette originalité vraie et qui s’ignore, plein de ce charme funeste, et qui ne fut mauvais qu’à lui-même, l’enchantement du rêve répandu sur la vie.
Henri Barbusse À Bussang, au pied des montagnes des Vosges, à mi-côte d’une hauteur verte magnifiquement encadrée d’un décor d’éléments, s’ouvre simple et grandiose, avec des airs d’horizon, la scène du Théâtre du Peuple.
Je plaindrais ceux qui ne seraient pas touchés de la douce majesté de cette scène finale où se dresse en plein air une table à laquelle s’assied la foule des malheureux, une table servie dont on ne voit pas les bouts.
Un style délicat & correct, un petit ton de minauderie, une morale légere & tout-à-fait du bel air, les rendent un Code amusant pour les têtes frivoles, sans qu’il puisse prétendre au suffrage des ames sensées.
C’est moins chez eux, ainsi que parmi nous, quelques pensées éclatantes, au milieu de beaucoup de choses communes, qu’une belle troupe de pensées qui se conviennent, et qui ont toutes comme un air de parenté : c’est le groupe des enfants de Niobé, nus, simples, pudiques, rougissants, se tenant par la main avec un doux sourire, et portant, pour seul ornement, dans leurs cheveux, une couronne de fleurs.
Ce n’est pas de cet air que le capitaine chrétien repousse les adresses d’Armide : il résiste, car il connaît les fragiles appas du monde ; il continue son vol vers le ciel, comme l’oiseau rassasié qui ne s’abat point où une nourriture trompeuse l’appelle .
Je demeurerai dans une paix profonde (elle se leva ici avec un air de dignité, que l’esprit de religion semblait encore augmenter) ; et lorsque l’ange de la mort paraîtra, je lui tendrai la main.
n’ont pas les proportions aussi élegantes, ni le corsage et l’air aussi nobles que les chevaux que les sculpteurs ont faits depuis qu’ils ont connus les chevaux du nord de l’Angleterre, et que l’espece de ces animaux s’est embellie dans differens païs par le mêlange que les nations industrieuses ont sçû faire des races.
Le tableau d’Attila peint par Raphaël ne tire point son mérite de ce qu’il nous en impose assez pour nous séduire et pour nous faire croire que nous voïons véritablement saint Pierre et saint Paul en l’air, et menaçans l’épée à la main ce roi barbare entouré des troupes qu’il menoit saccager Rome.
Il insiste surtout (avec toutes sortes de précautions et de révérentes excuses) sur ce qu’Annibal Caro, en donnant à sa traduction de Virgile une couleur de simplicité aimable et de noble familiarité, un certain air dégagé (scioltezza) ou, si l’on veut de désinvolture, a légèrement faussé la noblesse de ton et la magnificence habituelle de l’original. […] du moins, lors de la grande renaissance des lettres, la ruine de l’Italie n’était pas consommée ; l’étincelle du génie circulait dans l’air au moindre souffle. […] Dans ma première enfance, alors qu’un jour de fête Nous rend impatients de l’heure qui s’apprête, Ou le soir, au sortir du grand jour écoulé, Tout douloureux déjà, dans mon lit éveillé, Si quelque chant au loin, gai refrain de jeunesse, M’arrivait, prolongeant sa note d’allégresse, Et d’échos en échos dans les airs expirait, Alors comme aujourd’hui tout mon cœur se serrait. […] Dans les airs le printemps étincelle et sourit ; C’est sa fête, et tout cœur, à le voir, s’attendrit. […] Moi, pendant ce temps-là, je m’en vais comme en deuil Par ce côté désert, évitant qu’on me voie, Ajournant à plus tard tout plaisir, toute joie ; Et derrière les monts, dans les airs transparents, Le soleil m’éblouit de ses rayons mourants, Et d’un dernier regard il semble aussi me dire Que l’heureuse jeunesse avec lui se retire.
Ce courant de folles idées, ce souffle aveugle dans l’air, attisait plus d’un bûcher. […] Scaliger et Cardan, les deux plus grands personnages modernes selon Naudé, les deux seuls qu’on pût opposer aux plus signalés des anciens, avaient poussé le plagiat de l’antiquité jusqu’à parler d’une façon presque sérieuse de leurs démons familiers, et jusqu’à se donner l’air d’y croire. […] En poussant cette pointe, il a, sous air pédantesque, sa double malice cachée, et il infirme plus de choses ecclésiastiques qu’il ne fait semblant. […] Mais chez Huet on peut dire que le scepticisme a moins l’air encore d’être déguisé qu’enchevêtré dans l’érudition ; on ne sait trop jusqu’où il l’étend et à quel point juste sa religion s’y concilie. […] Une lettre de lui à Peiresc, du 20 juillet 1634 (Correspondance de Peiresc, tome X, manuscrits de la Bibliothèque du Roi), nous trahit le secret de toutes les démarches, sollicitations et suppliques trop peu dignes auxquelles la nécessité et la peur de manquer poussaient Naudé en terre étrangère : il subit l’air du pays.
Sa lettre tomba entre les mains de mon maître, qui la lut secrètement, et qui me l’avoua ensuite, en me disant : “Mon cher Benvenuto, votre air ne m’a pas trompé, et j’en suis convaincu par la lettre de votre père, qui me paraît un bien honnête homme. […] À la fin de l’an, mon maître eut besoin d’aller à Florence, pour y vendre des balayures d’or et d’argent qu’il avait amassées ; et, comme le mauvais air de Pise m’avait donné la fièvre, je l’y accompagnai. […] Cet homme était de belle taille, fort avantageux ; il avait plus l’air d’un guerrier que d’un artiste. […] Lucagnolo, impatient de savoir ce que j’avais reçu, en présence de ses garçons et d’autres voisins qui étaient curieux de voir la fin de notre contestation, prit son sac avec un sourire moqueur, et le versant avec grand bruit sur l’atelier, nous fit voir vingt-cinq écus de monnaie : moi qui étais piqué des cris d’étonnement de la compagnie, et de ses mauvaises plaisanteries, j’entrouvris mon sac ; et, voyant qu’il était rempli d’or, les yeux baissés, sans dire mot, je le soulevai en l’air avec deux mains ; et le faisant bruire comme la trémie d’un moulin, j’en fis sortir en or la moitié plus d’argent que lui ; de sorte que ceux qui d’avance se moquaient de moi se mirent à crier : Lucagnolo, la monnaie de Benvenuto est plus belle que la tienne ! […] « C’est dans cette situation que je passais ma vie, couché sur une triste paillasse tout humide, sans pouvoir me remuer, à cause de ma jambe rompue, et obligé de ramper au milieu des ordures pour aller faire mes besoins au dehors, afin de ne pas augmenter l’air infect de ma chambre.
Goethe ne comprenait pas l’air pressé de son fils et paraissait fâché. […] — Partez donc, dit Goethe en secouant la tête d’un air sérieux, mais je ne vous comprends pas. » Nous montâmes dans les chambres du haut avec Mlle Ulrike ; le jeune Goethe resta en bas pour préparer son père à la triste nouvelle. […] Souvent, avant l’apparition de la lumière, je suis éveillé, j’ouvre ma fenêtre ; je rassasie mes yeux de la splendeur des trois planètes qui sont dans ce moment au-dessus de l’horizon ; je me rafraîchis en voyant l’éclat grandissant de l’aurore. — Presque toute la journée je reste en plein air, j’ai des conversations muettes avec les pampres et les vignes ; elles me donnent de bonnes idées, et je pourrais vous en raconter des choses étranges. […] Il dit plusieurs fois à son copiste Jean, qui était près de lui pendant la nuit : « Soyez-moi fidèle et restez chez moi, cela ne peut durer que quelques jours. » Le lendemain matin, il dit encore à sa belle-fille Ottilie : « Avril amène avec lui plus d’une belle journée ; l’exercice en plein air me rendra mes forces. » Il fit quelques pas vers son cabinet de travail, mais il fut obligé de se rasseoir aussitôt ; plus tard il voulut se lever de nouveau, il retombait dans son fauteuil. […] Son esprit resta actif, même après qu’il eût perdu l’usage de la parole ; suivant une de ses habitudes, quand un sujet le préoccupait fortement, il traça avec l’index des signes dans l’air ; peu à peu il traça ces signes moins haut, et enfin, sa main, tombant sur la couverture étendue sur ses genoux, y traça des mots inconnus.
La terre les modifie, mais aussi la qualité de l’air. […] La table est soulevée, les quatre pieds à environ 30 centimètres du sol, et elle reste, en l’air sept secondes. […] Curie, il est retourné les pieds en l’air, puis posé, plateau contre plateau, sur la table. […] Elle fuit, elle fond dans l’air. […] Un de leurs tours consiste à lancer en l’air une balle qui ne retombe pas.
L’éloquence se guinde, la verve forcée prend des airs d’emphase. […] Plus d’une fois elle avait osé, pour respirer le grand air des libres espaces, soulever un instant le joug de plomb qui l’écrase. […] Les amants prennent tout à coup, dans leurs extases, des airs d’inspirés. […] L’amour légitime avec des airs d’aventurier ! […] Cependant George Sand restait calme, plus que calme, silencieuse, avec cet air indolent et lassé qui m’avait frappé en elle.
À ces récits, mais à ceux-là seulement, Eekhoud prête une physionomie moins rébarbative, plus plaisante et comme un petit air « sans façon », qui ne messied point. […] Ils ont tous grand air. […] Elles ont toujours l’air d’apporter un désastre. […] Il y avait un jardin magnifique, une sorte de Paradis terrestre tout hanté, en plus, de beaux fantômes, et de ces souvenirs de la Renaissance dont l’air même est saturé, à Florence. […] Je rampe et rampe dans les airs Comme une flamme de l’enfer.
Ni musc ni fumier, de l’air, telle semble être sa devise. […] Sur la terre, une lumière argentée ; l’air est frais, et pourtant il oppresse, chargé de langueur, charriant des parfums. […] Enfin le monarque parut, l’air distrait : il s’était oublié dans son cabinet à lire l’Iliade. […] Quelles que soient par la suite leurs évolutions, on les reconnaît toujours à leur air de famille et à un signe indélébile ; ce sont les hommes des « années quarante ». […] Tout brillait joyeusement autour de nous, sous nos pieds et sur nos têtes, — le ciel, la terre, les eaux : on eût dit que l’air même était saturé de clarté.
À défaut de la fille du duc de Beauvilliers, il se maria à la fille aînée du maréchal de Lorges ; la bonté et la vérité du maréchal, de ce neveu et de cet élève favori de Turenne, l’attiraient, et l’air aimable et noble de sa fille, je ne sais quoi de majestueux, tempéré de douceur naturelle, le fixa. […] Tout cela ensemble forme un air modeste· et de grandeur qui imprime du respect : elle a d’ailleurs toute la beauté d’âme qu’une personne de qualité doit avoir, et elle ira de pair en mérite avec M. le duc de Saint-Simon son époux, l’un des plus sages et des plus accomplis seigneurs de la Cour. […] Quoiqu’il faille prendre garde de trop raisonner sur les portraits, et que l’air de jeunesse du nouvel époux jure un peu avec l’idée que donnent ses Mémoires, on remarque pourtant que sa figure et sa physionomie sont assez bien celles de son œuvre ; la figure est fine ; l’œil assez doux peut se courroucer et devenir terrible. Il a le nez un peu en l’air et assez mutin, la bouche maligne et d’où le trait n’a pas de peine à partir.
Ces années furent plus amères pour moi peut-être que pour un autre ; plus le nid est doux sur l’arbre et sous l’aile de la mère, plus l’oiseau déteste les barreaux de la cage où on lui siffle des airs empruntés qu’il doit répéter sans les comprendre. […] Leur composition un peu banale était pleine des images, des Bucoliques, des ruisseaux, des troupeaux, des oiseaux, des bergers assis sous des hêtres et jouant des airs champêtres sur leurs chalumeaux, des prairies émaillées de fleurs sur lesquelles voltigeaient des nuées d’abeilles et de papillons. […] Ces trois chaires, rapprochées les unes des autres comme des stalles dans un chœur d’église, forment une façade semi-circulaire qui regarde l’orient ; en sorte que les bergers ou les chasseurs fatigués qui s’y placent et qui s’y assoient, pour se reposer à l’abri du vent, peuvent se voir obliquement les uns presque vis-à-vis des autres, et s’entretenir même à voix basse, sans que le mouvement de l’air dans ces hauts lieux emporte leurs paroles préservées du vent. […] Philosophie, religion, législation, histoire, poésie, roman, journal même, tout passait et repassait tour à tour ou tout à la fois par les controverses de cette académie en plein air.
quand ils virent la riche et belle flotte, qui avait si peu perdu pour attendre, surgir à toutes voiles et passer bientôt tout près d’eux, « ils en eurent si grande honte, dit Villehardouin, qu’ils n’osèrent se montrer » ; et le comte de Flandre ayant envoyé une barque pour les reconnaître, un des soldats non chevaliers, qui était parmi les transfuges, se laissa couler dedans, et cria de là à ceux qu’il abandonnait : « Je vous tiens quittes de tout ce que je laisse à bord, mais je m’en veux aller avec ceux-là qui m’ont tout l’air de devoir conquérir du pays. » Ce soldat, qui s’échappait d’avec les fugitifs pour s’en revenir avec les conquérants, fut reçu à merveille, on le peut croire ; on l’accueillit comme l’enfant prodigue87, et cet épisode anima la traversée. […] s’écrie tout d’un coup Nicétas en s’interrompant, le Barbare devance mes paroles ; il est emporté plus rapide dans sa course que l’aile de l’Histoire, et aucun obstacle ne l’arrête ; car elle, elle en est encore à le montrer saccageant Thèbes, s’emparant d’Athènes, envahissant l’Eubée : mais lui, il ne marche pas, il vole, il traverse les airs laissant en arrière tout récit ; il marche vers l’Isthme, il renverse l’armée romaine qui lui barre le passage ; il pénètre dans cette ville assise sur l’Isthme même et qui était jadis l’opulente Corinthe ; il se porte à Argos, il enveloppe tout le pays de Lacédémone, il s’élance dans l’Achaïe, court de là à Méthone, et se rue sur Pylos, la patrie de Nestor : puis, arrivé aux bords de l’Alphée, il s’abreuvera, je pense, de ses ondes, et, s’y baignant, il y puisera le souvenir de la tradition antique et gracieuse ; et, dès qu’il aura su que le fleuve s’est fondu d’amour pour Aréthuse, la source de Sicile, qui désaltère les fils de l’Italie, je crains fort que, ne faisant violence au fleuve lui-même, il n’écrive sur ses eaux et ne fasse savoir par lui à ses compatriotes de là-bas les exploits dont ont souffert les Grecs.
L’une de ces pièces s’adresse à un mort ou à une morte chérie : À un esprit qui s’en est allé Du haut des brillantes étoiles, ou du sein de l’air invisible, ou de quelque monde que n’atteint point l’humaine pensée, Esprit ! […] » Ainsi soupirait, traversant l’air, une voix sortie des vieilles murailles des ancêtres.
Mais enfin, en poursuivant cette lecture à travers les mille particularités dont elle se compose, et en faisant la part de la bienveillance et de l’optimisme de Dangeau, décidé à trouver tout bien, on arrive à un résultat qui, selon moi, ne trompe point : on ressent et l’on respire ce qui est dans l’air à un certain moment. […] J’ai remarqué plus d’une jolie anecdote, une entre autres, toute littéraire, qui montre que ce n’est pas seulement de nos jours que l’ironie s’est glissée sous un air d’éloge dans le discours d’un directeur de l’Académie française recevant un nouveau confrère.
Et c’était un charme nouveau ajouté à tant d’autres que celui des accords assoupis tremblant dans l’air, en même temps que les mélodies secrètes de l’amour, plus mélodieuses encore, chantaient en nous. Mais se détachant soudain du groupe des joueurs derrière lequel jusqu’alors il s’était tenu debout, mon rival s’avança vers nous d’un air affable, et le plus naturellement du monde, nous demanda de quoi nous parlions.
Sous ses airs de naïveté et de bonhomie, ne le jugez pas trop modeste : il avait une haute idée de sa supériorité ; il ne pardonna jamais à l’Académie française de l’avoir fait attendre. […] Il se nourrissait de parfums et vivait dans la région la plus pure de l’air ; et sa brillante existence se terminait sur un bûcher de bois odoriférants, dont le soleil allumait la flamme.
Quand un gros nuage chargé de foudre passe dans l’air, tous les corps s’en ressentent aussitôt et reprennent chacun le genre d’électricité qui leur est propre, bien souvent une électricité contraire : ainsi arriva-t-il en 1840 dans le conflit des opinions sur la grande mesure : Faut-il, ou ne faut-il pas fortifier Paris ? […] En lisant cette belle histoire qui sans doute a ses défauts, ses redites et ses longueurs, mais où rien n’est oublié ; où toutes les sources contemporaines se sont versées dans un plein et vaste courant ; où se déploie, sous air de facilité, une si grande puissance de travail ; où tout est naturel, — naturellement pensé —, naturellement dit ; si magnifique partout de clarté et d’étendue, et qui offre dans le détail des touches de la plus heureuse finesse ; où le style même, auquel ni l’historien ni le lecteur ne songent, a par endroits des veines rapides et comme des venues d’autant plus charmantes ; — en achevant de lire cette histoire, à laquelle il ne manque plus qu’un ou deux volumes de complément et de surcroît, je dirai encore ce que diront à distance tous ceux qui la liront : c’est que, quelque regret qu’ait droit d’avoir l’historien dans l’ordre de ses convictions politiques, la postérité trouvera qu’il n’eût pu employer les années fécondes de son entière maturité à rien de mieux qu’à édifier un tel monument.
Il admet des idées en l’air, sans forme : comprenne qui pourra ! […] Ô vous tous, amis de l’idéal, je ne me ferai pas de querelle avec vous ; j’accorde qu’il y a un idéal ; mais, admettez aussi qu’il y en a un vrai et un faux ; et si jamais vous rencontrez un idéal, ou soi-disant tel, froid, monotone, triste, incolore sous air de noblesse, vaporeux, compassé, insipide, non pas brillant et varié comme le marbre, mais blanc comme le plâtre, non pas puissant et chaud comme aux jours de la florissante Grèce, quand le sang à flots de pourpre enflait les veines des demi-dieux et des héros, quand les gouttes d’un sang ambrosien coulaient dans les veines même des déesses, mais pâle, exsangue, mortifié comme en carême, s’interdisant les sources fécondes, vivant d’abstractions pures, rhumatisant de la tête aux pieds, imprégné, imbibé d’ennui, oh !
Pourquoi, dans ce même Çà et Là (car je ne m’astreins pas à l’ordre chronologique), à propos d’une visite et d’un séjour en Alsace, courir sus aux Juifs en masse, aux Luthériens, aux Piétistes ou non Piétistes, aux humbles pasteurs de ces contrées : « On rencontre par la campagne, dit l’auteur, des charretées de personnages, hommes et femmes, vêtus de noir, avec un certain air d’honnêteté douceâtre et de santé blafarde. […] Il parle de vérité ; mais est-ce qu’il se figure que parce que nous sommes polis et que nous nous exprimons sur certains grands sujets d’un air de doute et de défiance pour nos propres opinions, nous ne croyons pas aussi à la vérité ?
Car, bien que nous ne soyons pas demeurés muets chacun de notre côté, il me semble que nous nous faisons valoir l’un l’autre, et que nous nous entredisons des choses que nous ne disons pas ailleurs. » Je ne sais si elle le fait valoir autant qu’il s’en flatte ; mais certes, il la fait valoir par sa roideur de ton et ses airs guindés, elle la rieuse à belles dents, la malicieuse enjouée, la ravissante et la légère ! […] Sa fille lui avait écrit qu’elle était un peu jalouse de voir cette tendresse extrême pour l’enfant : elle croyait sans doute, en parlant ainsi, faire plaisir à sa mère qui lui avait quelquefois reproché son air de froideur et d’indifférence.
fort bon air, de la librairie Garnier43 ; on y a ajouté les Contes de Mme d’Aulnoy : ce sont des vignettes, des gravures sur bois à chaque page et hors de page. […] Les caractères sont ceux du xviie siècle ; l’œil de l’enfant et l’œil du vieillard s’en accommodent également bien et s’y reposent ; rien d’aigu, rien de pressé et d’entassé ; il y a de l’espace et un espace égal entre les mots, l’air circule à travers avec une sorte d’aisance, la prunelle a le temps de respirer en lisant ; en un mot, c’est un caractère ami des yeux.
Sans prendre trop à la lettre le précepte, Solve senescentem…, sans mettre précisément son cheval à l’écurie, ce qu’elle ne doit faire que le plus tard possible, elle le mènera doucement par la bride à la descente : cela en laisse pas d’avoir très bon air encore. […] Quand le maître se néglige et quand le disciple se soigne et s’endimanche, ils se ressemblent ; les jours où Chateaubriand fait mal, et où Marchangy fait de son mieux, ils ont un faux air l’un de l’autre ; d’un peu loin, par derrière, et au clair de lune, c’est à s’y méprendre.
Chaque espèce et chaque nation de soldats est dépeinte avec son air, ses gestes, ses armures. […] Quoi qu’il en soit, dès que Salammbô se présente, on a aussitôt reconnu, à sa démarche et à tout son air, moins une sœur d’Hannibal qu’une sœur de la vierge gauloise Velléda, transposée, dépaysée, mais évidemment de la même famille sous son déguisement.
Mieux vaut un bon tiens que deux tu l’auras ; mieux vaut un moineau dans la main que la grue qui vole en l’air. » — Mais aussi le même Sancho (car il a deux bâts à son âne) dirait « que mieux vaut tard que jamais ; qu’il n’y avait nul péril en la demeure ; que bonne espérance, après tout, vaut mieux que chétive possession, et qu’on peut attendre patiemment quand on est déjà si bien loti d’ailleurs et si bien nanti. » Le fait est que la dernière œuvre de M. […] Le fier soldat de Lépante a gardé de certaines allures et de certains airs de tête jusque dans ses inventions les plus gaies.
L’air vif lui donnait la vigueur, le soleil l’illuminait. […] Que vous fussiez une sainte. » Elle choisit toujours de préférence pour confidente de ses chastes et ardents désirs cette Louise de Bayne qu’a aimée son frère, qui n’a plus seize ans, qui en a vingt déjà et plus, mais qui n’a pas changé et dont elle nous trace ce ravissant portrait en deux lignes : « C’est même air de jeunesse, même gaieté, même œil de feu.
Les comédiens lui en avaient donné un faux air, il l’a rectifié, et il est de mise partout, jusqu’au chevet du lit du roi, où il a l’honneur de lire quelquefois : ce qu’il fait mieux qu’un autre. […] J’ai même été promener cette après-dînée aux Tuileries avec votre mère, croyant que l’air me fortifierait ; mais à peine j’y ai été une demi-heure qu’il m’a pris dans le dos un point insupportable qui m’a obligé de revenir au logis.
Dumont, qui le vit beaucoup à ce moment, nous l’a peint au physique et au moral avec vérité : « Je ne sais s’il n’avait pas un peu trop l’ambition d’imposer par un air de réserve et de profondeur. […] Une manière sentencieuse, une politesse froide, un air d’examen, voilà ce qui formait une défense autour de lui dans son rôle diplomatique. » Mais dans l’intérieur et l’intimité le masque tombait ou avait l’air de tomber tout à fait : il était alors charmant, familier, d’une grâce caressante, aux petits soins pour plaire, « se faisant amusant pour être amusé. » Son goût le plus vif semblait être celui de la conversation avec des esprits faits pour l’entendre, et il aimait à la prolonger jusque bien avant dans la nuit.
Mais ce n’est que vers 1828 que cette école (j’emploie souvent ce vilain mot pour abréger) a pleine conscience et science d’elle-même, qu’elle s’organise avec plus d’étude et de sérieux, qu’elle marche en avant d’un air d’ensemble, chacun sur son point, et plusieurs avec originalité. Voilà donc à peu près quinze ans, terme moyen, qu’elle se développe en plein air et vit au soleil.
Que ses airs, oubliés longtemps, Flattent mon oreille attendrie ! […] Passant à la Guadeloupe quelques années après la mort de Léonard, une jeune muse, qui n’est autre que madame Valmore, semble avoir recueilli dans l’air quelques notes, devenues plus brûlantes, de son souffle mélodieux.
Vous imaginez tout ce qu’on peut dire là-dessus : — Oui, sans doute, l’érudition, comme nous la voyons pratiquée par les trois quarts des érudits, est, sous ses airs graves, une des plus futiles entre les occupations humaines. […] — Grosse question, attirante comme toutes les questions insolubles, et frivole peut-être sous un air de sérieux.
Valerio entre d’un air respectueux ; Arlequin le traite de voleur en reconnaissant son habit. […] Scaramouche reprend son air contrit et son ton pédant, et dit à son élève qu’il n’était entré dans la chambre que pour le surprendre.
Ces derniers, malgré tout, ont respiré l’air contagieux du temps. […] Pourtant, il n’y a pas seulement chez les incroyants d’airs, comme semble le croire Hello, un parti pris d’indifférence religieuse, et peut-être sont-ils animés d’une ferveur aussi intrépide que la sienne, mais orientée à d’autres fins.
. — Je reviens au Raphaël d’aujourd’hui, à celui de M. de Lamartine : S’il eût tenu un pinceau, dit notre auteur, il aurait peint la Vierge de Foligno ; s’il eût manié le ciseau, il aurait sculpté la Psyché de Canova ; s’il eût connu la langue dans laquelle on écrit les sons, il aurait noté les plaintes aériennes du vent de mer dans les fibres des pins d’Italie… S’il eût été poète, il aurait écrit les apostrophes de Job à Jéhovah, les stances d’Herminie du Tasse, la conversation de Roméo et Juliette au clair de lune, de Shakespeare, le portrait d’Haydé de lord Byron… S’il eût vécu dans ces républiques antiques où l’homme se développait tout entier dans la liberté, comme le corps se développe sans ligature dans l’air libre et en plein soleil, il aurait aspiré à tous les sommets comme César, il aurait parlé comme Démosthène, il serait mort comme Caton. […] » Et, si épris, si enivré que fût son amant, il ne s’exprimait point encore alors comme il fait aujourd’hui : J’ouvrais les bras à l’air, au lac, à la lumière, comme si j’eusse voulu étreindre la nature et la remercier de s’être incarnée et animée pour moi dans un être qui rassemblait, à mes yeux, tous ses mystères, toute sa bonté, toute sa vie, tout son enivrement !
Un journal vient de publier la réponse en vers que fit M. de Lamartine à M. de Musset, réponse qui date de 1840, et qui, en paraissant aujourd’hui, a presque un air d’injustice ; car M. de Musset n’est plus, il y a beau jour, sur ce pied de débutant en poésie où l’a voulu voir M. de Lamartine. […] On ferait un piquant chapitre de mœurs sur les personnes de bel air, les enthousiastes à la suite, qui l’ont adopté avec engouement, les mêmes qui auraient admiré, il y a vingt-cinq ans, des vers alexandrins, parce qu’ils les auraient crus jetés dans le moule de ceux de Racine, et qui exaltent aujourd’hui les moindres bagatelles du brillant poète, à l’égal de ce qu’il a fait de mieux et de réellement bon.
Sa lèvre inférieure était plus marquée et plus forte qu’on ne le demande à la bouche d’une jolie femme ; sa taille aussi était un peu pleine ; mais l’ensemble était d’un grand air et d’une souveraine noblesse. […] Elle pouvait aimer comme elle faisait la liberté des entretiens et des jeux, la familiarité des intérieurs ; elle pouvait jouer à la vie de bergère ou de femme à la mode, il lui suffisait de se lever, de reprendre en un rien son air de tête : elle était reine.
Le poète Callimaque a fait une épigramme où il dit à peu près : « Ce lièvre que le chasseur poursuit par monts et par vaux avec toutes sortes de fatigues et par toutes les intempéries de l’air, donnez-le-lui tout tué, il n’en voudra pas. » Anselme, pour le résumer dans sa double carrière, reste mémorable à deux titres : historiquement, il a été l’un des patrons, des défenseurs, des militants et des patients pour la liberté de l’Église en face de l’État, scientifiquement, il est l’inventeur d’un argument métaphysique pour l’existence de Dieu, ce qui, joint à ses autres écrits, fait de lui l’un des rares successeurs de saint Augustin et de Platon, l’un des prédécesseurs de Descartes et de Malebranche. […] Dans les développements qu’il y donne, il me permettra de regretter que là, comme il lui arrive d’ordinaire en pareille matière, il se soit trop asservi aux formes philosophiques du jour, et que lui, esprit si vif et si français quand il le veut, il ne perce pas d’outre en outre, une fois pour toutes, ces expressions vagues et vaines, ces métaphores abstraites qui donnent un air de réalité à ce qui n’est que le nuage subtilisé du raisonnement.
Il lui faut des faits pour prouver ses assertions générales, le désir qu’ont les menuisiers de ne travailler que pour le théâtre, une fois qu’ils ont goûté de cette gloriole, pour montrer la séduction que celui-ci exerce sur tout ce qui l’approche ; des faits pour trait final à une analyse de caractère, ou à la notation d’un changement moral ; la mère des Zemganno appelée en justice, ne voulant témoigner qu’en plein air, pour montrer le farouche amour de la bohémienne pour le ciel libre ; pour représenter la modification produite en Chérie par sa puberté, décrire en détail la gaucherie et la timidité subite de ses gestes. […] Dans le spectacle des paysages, des vues urbaines, des objets forcément immobiles, il perçoit le caractère mouvant et variable, les vibrations de la lumière, les variations du jour, le frisson passager de l’air.
L’air manque, la vue se trouble ; on n’est plus en pays humain, on n’aperçoit d’abord qu’un entassement d’abstractions formidables, solitude métaphysique où il ne semble pas qu’un esprit vivant puisse habiter ; à travers l’Être et le Néant, le Devenir, la Limite et l’Essence, on roule, la poitrine oppressée, ne sachant si jamais on retrouvera le sol uni et la terre. […] Les observations et les analyses sont de simples accessoires qu’elle emploie pour se donner un faux air de science, et sur lesquels elle ne s’appuie pas.
Puis je manquais de confiance en lui ; sous cet air si grave et si froid, je ne sus pas reconnaître tout ce qu’il y avait de chaleur et même d’enthousiasme dans le cœur.
Chose remarquable, sa rédaction se renouvelle souvent, elle ne se rajeunit jamais. » Depuis que la rivalité de la Presse a commencé de poindre, le Journal des Débats n’a cessé, par son dédain, ses airs de grand seigneur, et son peu de zèle à rallier les éléments de résistance, de faire tout ce qu’il fallait pour favoriser les progrès de l’adversaire : ses inconséquences et ses déviations, dans la ligne des doctrines littéraires et philosophiques, sont perpétuelles.
Ici l’air est pur ; nous sommes aux grèves des mers, en Bretagne, dans ce que le poète appelle sa Thébaïde, c’est-à-dire dans le manoir de la famille, et au sein des joies intimes ou des douleurs d’une âme restée simple et chrétienne.
Alors, comme elle aimait les rumeurs de la guerre, La poudre, les tambours battants, Pour champ de course, alors, tu lui donnas la terre, Et des combats pour passe-temps : Alors, plus de repos, plus de nuits, plus de sommes ; Toujours l’air, toujours le travail, Toujours comme du sable écraser des corps d’hommes, Toujours du sang jusqu’au poitrail.
Jean-Jacques Weiss La comédie des Effrontés appartient au second Augier, celui qui est de son temps plus que de sa race et sur qui les influences de l’air moral ambiant ont eu plus d’action et de pénétration que les instincts de son imagination et de son cœur.
Après, vint Mercure, qui pria Orphée de continuer les doux airs de sa musique, l’assurant que, non seulement les bêtes farouches, mais les étoiles du ciel danseraient au son de sa voix.
On ne sçauroit donc contrefaire le génie des grands hommes, mais on réussit quelquefois à contrefaire leur main, c’est-à-dire, leur maniere de coucher la couleur et de tirer les traits, les airs de tête qu’ils repetoient et ce qui pouvoit être de vicieux dans leur pratique.
Il a le détaché qui plaisait à lord Byron, l’air cavalier et la cape nonchalante sur le bras qui plaisait à Montaigne.
Sudermann a, finalement, tout l’air d’un plaidoyer pour la Règle, — telle que la comprennent les âmes généreuses, — contre le pseudo-individualisme. […] Mais la visite de Jane à l’enfant, nécessairement secrète, a eu des airs équivoques d’expédition galante. […] Or, c’est ce que ne font guère, c’est ce que ne font vraiment pas assez les cheveux fous, la voix éclatante, la bouche épanouie et l’air de franchise heureuse de Mlle Marsy. […] Il y a trop d’air entre les répliques ; il est trop rare qu’elles semblent s’appeler nécessairement… Avec tout cela il est clair, n’est-ce pas ? […] Tout le monde est en l’air.
Oscar dit comme eux avec un profond étonnement et l’air le plus ahuri du monde. […] Il bat l’air de ses bras. […] Mendès, et c’est ce manque qui donne un air de marche fantaisiste au drame le plus enchaîné en son fond et le plus engrené que je connaisse. […] Cela, malgré quelques explications qu’en donne Perraud et parce que ces explications ont tout à fait l’air d’être des défaites, reste un peu obscur. […] Elle prend un air de quelque chose d’accidentel.
Son système se tient en l’air, prêt à tomber de tous côtés. […] Est-ce un principe d’architecture que de bâtir en l’air ? […] C’était leur air natal ; ni l’un ni l’autre ne supposaient que des étrangers pussent s’y trouver mal à l’aise. […] Il veut être gai, gracieux, et il est balourd ; il fait penser à cet Allemand qui pour se donner l’air léger se jetait par la fenêtre. […] Il donne sa démission de ministre au moment opportun, et d’un air philosophique il se retire à la campagne.
Qui ne sait d’ailleurs que la touche ironique et légère d’Arvède Barine se plaît à ces contrastes, excelle à en tirer parti, et met ainsi dans la ressemblance comme un air de malice qui l’égaie sans y nuire ? […] Elles changent un peu de l’air de roman qu’Aimé Martin a donné à cette histoire d’amour. […] L’air est dangereux et fatal, Où des bouquets mourants dans leurs cercueils de verre. […] En dehors d’elle et sans elle, nous ne saurions bâtir qu’en l’air, dans les nuages, des cités idéales, mensongères, utopiques, aussitôt évanouies qu’entrevues ou rêvées. […] Mais pour s’acquitter de sa tâche, elle ne saurait fréquenter en ville ; ou du moins, quand elle y fréquente, elle est obligée d’y porter un air de résistance que le monde prend volontiers pour de la mauvaise humeur.
A notre tour de citer parmi ce qui a été cité : Supposez au clavecin de la sensibilité et de la mémoire, et, dites-moi s’il ne répétera pas, de lui-même, les airs que vous aurez exécutés sur ses touches ? […] Prud’hommed, elle vous a un de ces petits airs paternes, elle devient la prière mielleuse dont tous les rentiers espèrent qu’elle empêchera leurs rentes de descendre. […] Ici, l’auteur, volontiers, s’attendrirait de n’avoir pas mieux été touché, de n’avoir pas, clavecin selon Diderot, répondu justement à des airs justes, donc collaboré à du mieux. […] D’où, succès des bals martiniquais, des airs cubains, des orchestres de Harlem et de tous les tam-tams de l’Exposition coloniale. […] Or, en vérité l’air a son poids.
Enfin il reçoit, il a un salon qui est celui de la Compagnie même, un salon où l’on discute à l’avance les choix, où on les prépare, où l’on respire un air attiédi, tempéré, où les candidats prochains s’acclimatent, où les visages s’accoutument, où les aspérités non académiques s’émoussent ; et, pour peu que le secrétaire perpétuel ait de tact, de connaissance du monde et d’urbanité, il imprime insensiblement à tout ce cercle poli un mouvement dont il est l’âme. […] Arnault, qui lui succéda et qui eût continué le même air d’une voix plus rauque, ne fit que paraître et disparaître au fauteuil de secrétaire perpétuel ; mais, avec M. […] L’essentiel est de se mettre en communication régulière avec l’air du dehors ; qu’elle tienne à honneur et à devoir de paraître informée, à son heure, de tout ce que la littérature contemporaine produit de distingué, même dans les branches réputées légères.
L’air qui circulait dans les esprits, si l’on peut ainsi dire, était alors d’une merveilleuse sérénité. […] A propos de la mort de M. le Duc (1710), il nous dit avec ce feu qui mêle tout, et qui fait tout voir à la fois : « Il étoit d’un jaune livide, l’air presque toujours furieux, mais en tout temps si fier, si audacieux, qu’on avoit peine à s’accoutumer à lui. […] C’étoit une meule toujours en l’air, qui faisoit fuir devant elle, et dont ses amis n’étoient jamais en sûreté, tantôt par des insultes extrêmes, tantôt par des plaisanteries cruelles en face, etc. » A l’année 1697, il raconte comment, tenant les États de Bourgogne à Dijon à la place de M. le Prince son père, M. le Duc y donna un grand exemple de l’amitié des princes et une bonne leçon à ceux qui la recherchent.
. — À l’état normal, pendant la veille, nos images demeurent plus ou moins vagues et incolores ; même dans la rêverie intense, les figures que nous imaginons, les airs que nous fredonnons mentalement, n’ont pas la netteté des figures que nous voyons les yeux ouverts et des airs qu’un instrument de musique envoie à nos oreilles ; l’image d’une sensation visuelle ou auditive n’est que l’écho affaibli de cette sensation. — Mais, dans la maladie, l’image s’exagère jusqu’à se transformer en sensation complète. […] VI À présent, examinons de plus près ce recul apparent que subit l’image. — Je suis couché bien tranquille à l’ombre d’une haie, écoutant de petits cris d’oiseaux et le long bruissement des insectes ailés qui, l’été, tourbillonnent dans l’air ; tout d’un coup il se fait un roulement lointain qui va s’enflant et, avec un grincement et un grondement furieux, arrive sur moi comme un tonnerre ; je sursaute, c’est un train de chemin de fer qui passe ; j’étais sans m’en douter à dix pas de la voie.
C’est un baril de poudre qui ferait sauter en l’air tout l’établissement social. […] — Oui, me répondit-il avec un air d’embarras et en détournant les yeux. — Mais vous m’aviez promis qu’il ne paraîtrait qu’après que vous me l’auriez fait relire à moi-même, et sans doute vous l’avez rendu aussi inoffensif que nous en étions convenus et vous en avez changé l’adresse et le titre ? […] Cette belle chienne, assise devant elle, les yeux sur ses yeux, la regardait avec un air d’attendrissement et de pitié qui n’est jamais sorti de mon âme.
Je ne contredirai pas pourtant ceux qui ont noté dans son recueil des traces de précieux : on ne respirait pas impunément l’air de l’hôtel de Rambouillet. […] Il est vrai qu’elle fait tout avec son esprit ; c’est son langage, son air, sa physionomie, mais ce n’est pas tout son fonds. […] En revanche, ils nous font vivre plus près des personnages, et presque respirer le même air.
Il ne faut pas négliger ici de parler des œuvres de quelques jeunes musiciens qui ont avec celles de Wagner un faux air de ressemblance, mais qui ont aussi contribué à convertir le public. […] Dans le théâtre antique, en plein air, dans l’amphithéâtre, les points de repère abondaient et la notion de distance se maintenait toujours sensiblement juste malgré la chaleur et la lumière. […] Mystérieux, ils viennent vers nous dans l’air… et nulle question ne monte à mes lèvres, lorsque je m’abandonne à leur enchantement… » Ce symbole de Lohengrin, il me faut y toucher, en quelques lignes du moins.
Il ne s’intitula M. de Chamfort qu’au sortir du collège et pour se présenter dans le monde d’un air plus décent74. […] Je ne le connais pas d’ailleurs ; mais s’il fallait deviner son caractère d’après sa petite comédie, je parierais qu’il est petit-maître, bon enfant au fond, mais vain, pétri de petits airs, de petites manières, ignorant et confiant à proportion ; en un mot, de cette pâte mêlée dont il résulte des enfants de vingt à vingt-cinq ans assez déplaisants, mais qui mûrissent cependant, et deviennent, à l’âge de trente à quarante ans, des hommes de mérite. […] Ce n’était pas tant dans le monde et dans un cercle régulier qu’il fallait l’entendre : il y causait beaucoup et même trop, il y parlait des heures de suite, contant anecdotes sur anecdotes, décochant épigrammes sur épigrammes, et prodiguant d’un air facile tous ces traits, ces mots tout faits, toutes ces provisions d’esprit qu’on a trouvées après sa mort rassemblées dans ses petits papiers.
J’ai eu sous les yeux quantité de réflexion de lui sur la musique, des airs notés de sa main, et ce qu’il appelait le « Catalogue de ma petite musique », c’est-à-dire de toutes les ariettes, ambigus ou romances tirées des opéras-comiques en vogue, et qu’il s’était procurées : on voit même une liste de celles qu’il désirait acquérir. Je lis à la première page de ce catalogue : Airs fugitifs : D’Albanèse : « Bergère légère, je crains… », nº 55. […] Si l’on parle des mesures qui ont eu du succès, de quelque intrigue habile, de quelque projet momentanément applaudi, ils vous regardent avec un air fin et d’intelligence ; ils vous louent presque et vous caressent comme voulant mériter auprès de vous d’entrer en participation de l’habile dessein qu’ils vous supposent ; ils croient à votre infamie, parce qu’eux s’en revêtiraient comme d’un honneur.
Aussi, partout ailleurs que dans l’exposition et la discussion philosophique, où il a ce que Mirabeau disait l’éloquence de la chose, le célèbre professeur n’est-il qu’un écrivain d’imitation, de pastiche réussi, qui se donne de grands airs, mais qui n’ose prendre la langue de son siècle, parce qu’elle est trouble encore, malgré tout ce que son siècle y a déversé de puissant ! […] Elles recouvrirent par une politesse qui ne venait ni de la bonté de leur cœur, ni du charme de leur esprit, une corruption très profonde et très réfléchie, car leurs grands airs ne nous imposent pas, à ces Brinvilliers scélérates et frivoles qui, comme Mme de Chevreuse, passèrent leur vie, la bouche en cœur, à préméditer des conspirations et des assassinats ! […] Elle faisait partie de l’escadron volant des filles de la reine (comme l’on disait depuis Catherine de Médicis), et c’est au milieu d’elles que le roi Louis XIII le Réservé la distingua pour son air de réserve, et, nous disent les mémoires du temps, pour sa rare beauté.
Le palmier de Délos s’est doucement incliné tout à coup, et le cygne fait entendre un mélodieux accent dans les airs. […] Et ce Dieu gouverne les vents dans les airs et sur l’Océan ; et il suscite l’éclat de la foudre toute-puissante. […] Il donne beaucoup aussi à des rois courageux, beaucoup aux villes, beaucoup à de braves compagnons de guerre ; et, dans les lices sacrées que protège Bacchus, il n’est pas venu d’homme habile à moduler des airs, que ce roi ne lui ait donné un digne loyer de son art.
Ces préfaces, par leur air belliqueux et leur provocante allure, rappellent une date lointaine déjà et des passions bien oubliées. […] J’y manque d’air, ô Dieu ! […] Victor Hugo un faux air de bout rimé grandiose. […] Toussenel et Michelet, ont pris, depuis cette belle découverte, un petit air de pédants qui m’est insupportable. […] Puis tout alla s’aggravant ; Et l’éther devint l’air, et l’air devint le vent ; L’ange devint l’esprit, et l’esprit devint l’homme.
Il paraît qu’on dansait à sa Cour sur quelques airs de nos anciens Noels. […] De ce nombre est l’air des Folies d’Espagne. […] Il s’agit d’un château construit en l’air par les Démons, d’où ils désolent & accablent une troupe de soldats chrétiens. […] On devenait guerrier en respirant l’air de Sparte ; on devenait orateur en respirant celui d’Athenes. […] C’est dans ses symphonies & ses airs de danse.
Son front busqué, sa bouche rentrée, que la jeunesse décorait jadis de teintes fines, changeaient alors son air, naturellement dédaigneux, en un air rechigné. […] Un oiseau bleu volait dans l’air et me parla ; et comment voulez-vous que j’échappe à cela ? […] « Thérèse, ô bien-aimée, quel air méchant prend ton œil lorsqu’il s’ouvre ! […] Créer, voler dans l’air ! […] Un quatrième peindra une barque avec quatre jeunes gens et autant de femmes à l’air bête et roide, et voilà la poésie du soir !
Malheureusement d’Axa aime trop l’air libre. […] Entré dans l’atelier, le vieux conseiller ne découvrit rien hormis un établi plane devant lequel un des filous coupait l’air avec de grands ciseaux tandis que l’autre piquait le vide d’une aiguille sans fil. […] Le ciel clair comme l’air entre par les croisées. […] Dans l’air gris s’entrechoquent des toussotements de cloches asthmatiques, des gargouillis d’orgue et des clameurs d’ivrognes. […] » Je m’approchai et je découvris alors que la statue était plantée sur son piédestal de telle façon qu’elle avait la tête en bas et les pieds en l’air.
Laya : « Ce que vous appelez mon affectation (dans le style) est mon naturel. » J’ajouterai que cet homme bouillant et brillant, qui portait toutes ses qualités en dehors et qui les avait aussi en dedans, avait une véritable modestie littéraire sous un air de faste, de même qu’il disait avoir eu une timidité première à vaincre avant d’arriver à toute sa hardiesse.
Les bourres de papier ne doivent pas être trop serrées, — assez pour empêcher le camphre de sortir, pas assez pour empêcher l’air de circuler.
Or, en prétendant qu’une telle philosophie, construite d’ailleurs avec une admirable méthode et un air de rigueur qui séduit, doit marcher tout uniment de concert avec la religion comme le premier cartésianisme, on soutient une chose que la religion a bien de la peine à se persuader.
Quand on en vient là, toute discussion est superflue ; et, en vérité, du moment qu’il croyait nécessaire d’implorer le Deus ex machina, contre la règle de l’art, Nec Deus intersit, il aurait mieux fait de couper court tout de suite aux difficultés historiques, en admettant que le cœur de saint Louis, s’envolant miraculeusement de Monréale à Paris, à travers les airs, était venu s’enterrer lui-même dans la Sainte-Chapelle, à l’insu de tout le monde, gardant un incognito que personne ne pouvait violer. — On voit qu’avec un peu d’aide, quelque chose d’analogue à la Sainte Ampoule pouvait nous être rendu ; et, à l’heure qu’il est, il y a des gens qui ne me pardonnent pas d’y avoir mis obstacle. » On a là un échantillon de la manière piquante et incisive de M.
Des femmes pâles, échevelées, se montraient silencieuses aux fenêtres et disparaissaient ; des gémissements sourds, inarticulés, remplissaient l’air, et j’étais seul dans la rue, seul, immobile de terreur, et sans force pour chercher mon salut dans la fuite.
Point d’air.
S’il répand des nuages dans l’air, comme ils y sont suspendus légèrement !
Au-dessous de Jupiter sévère, je vois un scélérat qu’on se prépare à lier ; il est désespéré, il regarde la terre, il se frappe le front du poing. à côté de ce brigand, car il en a bien l’air, un jeune homme qui lui a saisi le bras, qui tient une chaîne de sa main gauche, et qui serre si fort cette chaîne qu’on dirait qu’il craint plus qu’elle ne lui échappe que son coupable.
L’air vif et presque toujours serain de ces regions subtilisoit leur sang, et les disposoit à la musique, à la poësie et aux plaisirs les moins grossiers.
« C’est un grand tort que vous eûtes De ne point savoir vous taire. » La musique fut charmante et bien moderne Et morose comme il sied : l’air des Neiges d’antan. […] qu’un oiselet dans l’air. […] Les pleurs répandus, les baisers vibrants, Uniront les cieux aux mondes souffrants Comme l’arc-en-ciel aux heures d’alarmes… — Terre, nous gardons ton culte béni, Car nous retrouvons, peuplant l’Infini, L’air de nos baisers et l’or de nos larmes. […] Il suffit de n’avoir pas l’air de les connaître : — éclairer sa lanterne n’est plus d’un artiste. […] II Son de cloche un soir de novembre, Qui vient avec des parfums d’ambre Se perdre aux velours de ma chambre, Purifié par l’air des bois !
Il était beau, il avait le front élevé, la barbe noire, l’air bienveillant, le regard limpide et profond. […] Non, je ne puis souffrir cette lâche méthode Qu’affectent la plupart de vos gens à la mode ; Et je ne hais rien tant que les contorsions De tous ces grands faiseurs de protestations, Ces affables donneurs d’embrassades frivoles, Ces obligeants diseurs d’inutiles paroles, Qui de civilités avec tous font combat, Et traitent du même air l’honnête homme et le fat. […] Quel air de bonne foi et presque de candeur, quel charme surtout dans les réponses de l’autre, malgré sa perfidie ! […] Chaque jour à l’église il venait, d’un air doux, Tout vis-à-vis de moi se mettre à deux genoux. […] Je sais que vous avez trop de bénignité, Et que vous ferez grâce à ma témérité ; Que vous m’excuserez, sur l’humaine faiblesse, Des violents transports d’un amour qui vous blesse, Et considérerez, en regardant votre air, Que l’on n’est pas aveugle, et qu’un homme est de chair.
Nous connaissons le mode d’action de l’air ou de l’éther ; c’est une ondulation dont nous calculons la longueur et la vitesse ; nous pouvons donc en tirer des inductions sur les sensations correspondantes. […] Un corps n’a de saveur que s’il est en dissolution ; il a plus de saveur91 s’il est remué et pressé sur la membrane gustative ; il faut de plus que cette membrane ne soit pas sèche, ni glacée par l’air froid. […] Tous ces faits conduisent à une même conclusion : c’est que les molécules du gaz se dissolvent dans l’humidité de la membrane pituitaire au contact des filets olfactifs, et là forment une combinaison chimique avec l’oxygène de l’air. — En sorte que l’action du nerf olfactif, comme celle des nerfs gustatifs, semble avoir une combinaison chimique pour antécédent immédiat. […] Qu’on leur plonge la main dans l’eau, ils savent que c’est un liquide à cause de l’impression cutanée, mais en agitant la main ils n’éprouvent pas cette molle résistance qui fournit la notion de fluidité aqueuse, et ils ne savent s’ils se remuent dans l’air ou dans l’eau.
Bientôt le pavillon qui annonce du haut du palais impérial la présence du souverain, tombant immobile le long du mât qui le supporte, proclama le silence des airs. […] Les rameurs chantaient un air national, tandis que leurs maîtres jouissaient de la beauté du spectacle et du calme de la nuit. […] Songez que les pyramides d’Égypte, rigoureusement orientées, précèdent toutes les époques certaines de l’histoire ; que les arts sont des frères qui ne peuvent vivre et briller qu’ensemble ; que la nation qui a pu créer des couleurs capables de résister à l’action libre de l’air pendant trente siècles, soulever à une hauteur de six cents pieds des masses qui braveraient toute notre mécanique, sculpter sur le granit des oiseaux dont un voyageur moderne a pu reconnaître toutes les espèces ; que cette nation, dis-je, était nécessairement tout aussi éminente dans les autres arts, et savait même nécessairement une foule de choses que nous ne savons pas. […] « Quinze siècles avaient passé sur la ville sainte lorsque le génie chrétien, jusqu’à la fin vainqueur du paganisme, osa porter le Panthéon dans les airs, pour n’en faire que la couronne de son temple fameux, le centre de l’unité catholique, le chef-d’œuvre de l’art humain, et la plus belle demeure terrestre de celui qui a bien voulu demeurer avec nous, plein d’amour et de vérité. » XI Voilà tout ce livre du Pape, œuvre très savante, quoique très décousue, inférieure aux Soirées de Pétersbourg, et qui cependant produisit plus de gloire à l’écrivain, parce qu’elle fut adoptée à son apparition par les Chateaubriand, les Bonald, les Lamennais, hommes éclatants de la restauration théocratique en France à cette époque.
Mais, comme je crois à la vérité, comme je crois que le christianisme est une chose grave et considérable, j’ai quasi l’air controversiste, et certains délicats vont crier, j’en suis sûr, à la renaissance du voltairianisme. […] L’éternelle objection qui éloigne du rationalisme certaines âmes très distinguées qui, par suite même de leur délicatesse, sont possédées d’un plus vif besoin de croire, c’est la brièveté de son symbole, la contradiction de ses systèmes, l’apparence de négation qui lui donne les airs du scepticisme. […] Ceux qui une fois dans leur vie ont respiré l’air de l’autre monde et goûté le nectar idéal, ceux-là me comprendront 39. […] Les vérités de la critique ne sont point à la surface ; elles ont presque l’air de paradoxes, elles ne viennent pas poser à plein devant le bon esprit comme des théorèmes de géométrie : ce sont de fugitives lueurs qu’on entrevoit de côté et comme par le coin de l’œil, qu’on saisit d’une manière tout individuelle et qu’il est presque impossible de communiquer aux autres.
Dans une de ces trêves qui séparèrent les différentes Frondes, les gentilshommes fidèles à la cour se plaisaient à prendre avec les Parisiens des airs provocants. […] Ailleurs dans un dialogue satirique, où il ressuscite les bergers de Virgile, il fait dire à Tityre71 : Quel air faut-il jouer et sur quel instrument ? […] Mais ne va plus, au moins, te perdre dans les nues, A travers tes forêts, tes cimes inconnues Où dans l’air libre et pour les aigles font leur nid, Où l’on fuit les tyrans jusque dans l’infini, Ou la liberté gronde avec les avalanches… En pareille circonstance, il y a toujours une littérature française hors de France, une littérature de proscrits. […] Il faudrait mettre tout cela en regard des services éminents que Paris a rendus et rend encore en affinant les esprits, en émancipant la pensée, en grossissant par la liberté de mœurs qu’il permet à ses hôtes et à ses habitants les types offerts à l’observation, en y rassemblant sur un même point tant de personnes originales et intelligentes que les idées se respirent, pour ainsi dire, dans l’air ambiant.
Là, les gens à tempérament amoureux, hommes et femmes, les femmes attifées de leur mieux dans leurs capotes grises, les hommes au bonnet de coton, posé sur la tête d’un air conquérant, prenaient leur place sur le premier rang de chaises du passage, où se promenait un infirmier, choisissant le côté, où ils ou elles pouvaient montrer un profil moins endommagé — car il y avait parmi eux beaucoup de scrofuleux, très avancés — et ainsi placés, chacun et chacune tenaient son livre de messe, de façon à faire voir le numéro de son lit, qui est inscrit dessus. […] Il aurait besoin de passer un mois dans une ferme, en Beauce… et dans ces conditions… avec une lettre de recommandation d’un riche propriétaire à son fermier… lettre, qui lui annoncerait l’arrivée avec son mari, d’une femme malade, ayant besoin de l’air de la campagne… « Vous concevez, deux lits dans une chambre blanchie à la chaux, c’est tout ce qu’il nous faut… et bien entendu, la nourriture à la table du fermier… autrement je ne saurais rien. » Les chemins de fer, son roman sur le mouvement d’une gare, et la monographie d’un bonhomme vivant dans ce mouvement ; avec un drame quelconque… ce roman, il ne le voit pas dans ce moment-ci… Il serait plus porté à faire quelque chose, se rapportant à une grève dans un pays de mine, et qui débuterait par un bourgeois, égorgé à la première page… puis le jugement… des hommes condamnés à mort, d’autres à la prison… et parmi les débats du procès, l’introduction d’une sérieuse et approfondie étude de la question sociale. […] Commentaires de Pélagie sur l’air sérieux du visiteur. […] Et je vais m’asseoir dans un coin, que le mort aimait, là où il y a une guérite en toile, une chaise longue en sparterie, un hamac : dans ce coin, dont il avait fait une espèce d’atelier, en plein air.
Aux endroits éclatants de ses œuvres, dans les scènes douces ou superbes, quand le paragraphe lentement échafaudé va se terminer par une idée grandiose ou une cadence sonore, Flaubert, usant d’habitude d’un « et » initial, balançant pesamment ses mots, qui roulent et qui tanguent comme un navire prenant le large, pousse d’un seul jet un flux de phrases cohérentes : « Trois fois par lune, ils faisaient monter leur lit sur la haute terrasse bordant le mur de la cour ; et d’en bas on les apercevait dans les airs sans cothurnes et sans manteaux, avec les diamants de leurs doigts qui se promenaient » sur les viandes, et leurs grandes boucles d’oreilles qui se penchaient entre les buires, tous forts et gras, à moitié nus, heureux, riant et mangeant en plein azur, comme de gros requins qui s’ébattent dans l’onde. » Et cette autre période, dans un ton mineur « Maintenant, il l’accompagnait à la messe, il faisait le soir, sa partie d’impériale, il s’accoutumait à la province, s’y enfonçait et même son amour avait pris comme une douceur funèbre, un charme assoupissant. […] Son apparition dans le salon de la rue de Choiseul, avec son « air de bonté délicate » ; puis à la campagne où Frédéric échange avec elle les premiers mots intimes, plus tard la scène d’intérieur où il la trouva instruisant ses enfants : « ses petites mains semblaient faites pour répandre des umônes puis essuyer des pleurs, et sa voix un peu sourde naturellement avait des intonations caressantes et comme des légèretés de brise » la visite qui lui est rendue dans une fabrique, et cette conversation où la beauté : s’élève au mystère et à l’auguste : « Le feu dans la cheminée ne brûlait plus, Mme Arnoux sans bouger restait les deux mains sur les bras de son fauteuil ; les pattes de son bonnet tombaient comme les bandelettes d’un sphinx ; son profil pur se découpait en pâleur au milieu de l’ombre. […] Cette robe se confondant avec les ténèbres lui paraissait démesurée, infinie, insoulevable… » — Une rencontre dans la rue, le revirement mystérieux où elle s’avoue « en une, désertion immense » aimer Frédéric, puis l’entrevue capitale dans le magasin de porcelaine de son mari et les lèvres de son amant touchant ses magnifiques paupières enfin ce centre de tout le livre, l’idylle d’Auteuil, et les longue visites souffreteuses : « Presque toujours, ils se tenaient en plein air au haut de l’escalier, et des cîmes d’arbre jaunies par l’automne se mamelonnaient devant eux, jusqu’au bord du ciel pâle, ou bien ils allaient au bout de l’avenue dans un pavillon ayant pour tout meuble un canapé de toile grise. […] Et que l’on joigne à ces grandes œuvres certaines pages de l’Hérodias, les imprécations de Jeochanann, la scène gracieuse où Salomé, nue et cachée par un rideau, étend dans la chambre du tétrarque son bras ramant l’air pour saisir une tunique ; enfin cette Légende de saint Julien qui contient les plus divines pages en prose de ce siècle, la vie pure et fière du château, les combats et les hasards de Julien fuyant son destin de parricide, les lieux luxurieux où il se marie, son crime, sa rigueur, sa transfiguration finale certes pas même chez les grands poètes de ce temps et d’autres on ne trouve un pareil ensemble de scènes aussi purement belles et hautes flattant l’oreille, les sens, l’esprit et toute l’âme, au point que certaines pages entrent par les yeux comme une caresse, se délayant dans tout le corps, et le font frissonner d’aise comme une brise et comme une onde.
Il y a un air de famille incontestable entre Hamilton, Saint-Évremond et Alfred de Musset ; cœurs de même grâce, esprits de même sève, philosophes de même insouciance, si on peut appliquer à l’insouciance le nom de philosophie. […] Marietta, tu nous restais encore ; Lorsque sur le sillon l’oiseau chante l’aurore, Le laboureur s’arrête, et, le front en sueur, Aspire dans l’air pur un souffle de bonheur : Ainsi nous consolait ta voix fraîche et sonore, Et tes chants dans les airs emportaient la douleur ! […] Pour moi j’avoue (mais c’est sans doute un tort de ma nature un peu trop sensible aux impressions de l’air ambiant), j’avoue que c’est surtout cette ironie moqueuse, cette caresse à rebrousse-poil, ce chaud et froid de ses vers, cette profanation du sentiment qui m’ont rendu moins sensible que je ne devais l’être au mérite incomparable des ouvrages légers de cet émule en poésie.
Un crachement de sang inspira des inquiétudes ; on l’envoya respirer l’air natal, et là, sur ces côtes de Normandie, il s’appliqua à l’étude anatomique des poissons ; il fit des études analogues sur les oiseaux. […] N’ayons pas, au reste, l’air de le justifier d’une suite d’actions honnêtes : cette délicatesse rigoureuse, que trois mariages semblent offenser, a souvent elle-même besoin d’indulgence.
Comme il était grand maître de l’ordre de Saint-Lazare, il se chargea généralement de l’entretien et de l’éducation de vingt jeunes gentilshommes, qu’il fit chevaliers de cet ordre, et les rassembla dans une maison de la rue de Charonne, en bon air, avec un jardin, mur mitoyen du couvent de Bon-Secours. […] le dit-elle d’un ton de raillerie plaisante et de cet air dont on dit quelque chose d’impossible ?
Henri Estienne et Amyot, eux, gens du métier, lisaient Homère à livre ouvert quand ils le voulaient, et leur belle et bonne langue en a profité comme de toute la Grèce ; Amyot même a cela de particulier que, sans le savoir, il a donné un air homérique à Plutarque, et il le fait parler un peu comme Nestor. […] Ce n’est pas, à cette heure, que je ne lui trouve bien des défauts hors de ce feu et de cet air poétique qu’il possédait naturellement, car on peut dire qu’il était sans art et qu’il n’en connaissait point d’autre que celui qu’il s’était formé lui-même dans la lecture des poètes grecs et latins, comme on le peut voir dans le traité qu’il en a fait à la tête de sa Franciade.
Dès le commencement du xviiie siècle, une nouvelle maladie de l’esprit, un nouveau genre de précieux, et d’autant plus subtil qu’il se donnait des airs simples, s’introduisit et courut par Fontenelle et La Motte. […] Tant il est vrai que les langages les plus purs courent des risques par le voisinage, et se ressentent toujours plus ou moins de l’air du dehors.