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945. (1864) Corneille, Shakespeare et Goethe : étude sur l’influence anglo-germanique en France au XIXe siècle pp. -311

Mais je n’ai ni le droit, ni le pouvoir d’aller aussi loin. […] Mme de Staël rétablit les droits de la pensée et le spiritualisme. […] Quant à moi je lui faisais des objections tirées du droit des gens et des traités de 1815, continuant ainsi le rôle du directeur de Revue qui, en sa qualité d’annexé, n’était pas plus que moi partisan de ces dernières conquêtes politiques. […] — On en aura le droit, Madame, mais cela ne me fera pas changer d’avis. […] Toute notion de droit, tout respect de la propriété semblaient éteints dans nos âmes.

946. (1907) Propos littéraires. Quatrième série

Le socialisme, c’est le droit du faible. […] Pourquoi aider le droit de la force ? […] Pourquoi encore aider le droit de la force ? […] Un homme comme le prince de Bismarck a suffisamment conquis le droit de s’appeler Bismarck tout court. […] Tout simplement, pour Bismarck le droit n’existait pas.

947. (1930) Le roman français pp. 1-197

C’est pourquoi ces artistes tiennent tant à se battre en duel : le droit au duel était jadis un privilège de l’aristocrate. […] Cette guerre révéla qu’il n’y avait plus qu’une religion ayant le droit d’imposer le sacrifice de la vie : le patriotisme. […] voilà qu’il s’est dressé tout droit comme un serpent. […] C’est ce qu’on a le droit d’appeler le courage de M.  […] Il est sensuel, il est ardent, il se laisse aller joyeusement à ses élans juvéniles,  il en réclame le droit.

948. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 octobre 1885. »

Que Wagner ait été l’ennemi de la France, que ses œuvres marquent une haine contre les Français, qu’en 1871 il ait écrit l’Ode à l’armée allemande et la Kaisermarsch, ce n’est point pour ces causes que Wagner doit être proscrit de Paris : Wagner, Allemand, avait le droit de haïr et d’attaquer la France ; son patriotisme était légitime comme celui de Gœthe, celui de Beethoven ; mais Wagner a été l’insulteur de la France malheureuse ; contre Paris tombé il écrivit cette œuvre de moquerie et d’outrage, Une Capitulation. […] Grâce à la tombe refermée, nous avons le droit et même le devoir de choisir entre nos souvenirs. […] Il ignorera la passion des droits électoraux ou civiques, des droits judiciaires, et les mairies et les préfectures. […] Nuitter possède, par son contrat, le droit exclusif de la traduction de lohengrin, et ne veut pas renoncer à son titre : une pétition a été adressée de Paris à Madame Wagner en faveur ce M.  […] Nuitter a déclaré qu’il corrigeait son œuvre ; il s’est mis à la besogne, paraît-il, aidé de hautes collaborations, et, comme il a pour lui des droits légaux, c’est apparemment son texte revu qui sera chanté à l’Opéra-comique.

949. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Charles Magnin ou un érudit écrivain. »

Le devoir de chaque génération est d’enterrer ses morts et de célébrer plus particulièrement ceux qui ont droit à des honneurs distingués. […] Magnin fut de ceux qui se montrèrent le plus disposés à comprendre et à aider les poètes, sans leur rien céder pourtant de ses droits comme juge. […] A l’entendre, nul n’avait le droit de toucher au jardin solennel ; ces prétendus embellissements « déshonoraient l’œuvre de Le Nôtre et usurpaient sur la circulation publique. […] S’il n’avait pas eu ce goût d’instinct pour le théâtre et ses jeux les plus divers, depuis la comédie anecdotique d’Andrieux jusqu’aux Burgraves, depuis les drames chrétiens de Hrotsvitha jusqu’aux marionnettes, on aurait droit d’être sévère sur sa qualité d’érudit ; on pourrait le définir le contraire d’un Letronne ou d’un Fauriel, et soutenir sans trop d’injustice qu’il n’y apportait aucune initiative personnelle.

950. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XIV » pp. 58-60

— La chronique politique de la Revue des Deux Mondes est depuis plus d’un mois écrite par Carné, qui l’avait prise durant l’absence de Rossi, lequel était allé présider un concours de droit à Aix en Provence.

951. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Le Vavasseur, Gustave (1819-1896) »

Il fut, avec Philippe de Chennevières, l’auteur des Contes de Jean de Falaise , d’un groupe d’esprits rares qui forma un moment une sorte de petite école dont la Normandie aurait le droit d’être fière et qui eût fait plus de bruit si les gens du pays du cidre étaient aussi retentissants et ardents et hardis que les félibres méridionaux.

952. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — Q — Quinet, Edgar (1803-1875) »

Elle a le double aspect, ce qu’on pourrait appeler le double versant, politique et littéraire, et par conséquent la double utilité dont notre siècle a besoin ; d’un côté le droit, de l’autre l’art ; d’un côté l’absolu, de l’autre l’idéal… Le style d’Edgar Quinet est robuste et grave, ce qui ne l’empêche pas d’être pénétrant.

953. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 157-158

sur la Musique des Anciens, qui, de l’aveu de tous les Connoisseurs, lui donne droit de figurer parmi le petit nombre de Littérateurs connus par une érudition aussi vaste que profonde & lumineuse.

954. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 430-432

ne lui donneroient pas le droit de figurer parmi les Littérateurs qui écrivent avec le plus de sagesse & de naturel, nous nous serions fait un devoir de le placer dans notre Ouvrage, en faveur des vûes patriotiques qui ont animé ses travaux.

955. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric-le-Grand Correspondance avec le prince Henri — II » pp. 375-394

Frédéric ne pouvait admettre l’invasion violente de la Bavière par l’Autriche et ce mépris des droits des princes de l’empire ; il avait de la plupart de ces derniers, tels qu’ils étaient alors, une très chétive idée : « Aussi n’est-ce pas mon intention de devenir leur don Quichotte, disait-il. […] Frédéric vit le bon côté, le côté sérieux de ce succès de son frère dans l’opinion : Le public en France, lui écrivait-il (13 septembre 1784), suit ce droit bon sens naturel qui voit les objets sans déguisement ; mais les ministres ont bien d’autres réflexions à faire, dont la principale roule sur leur conservation… Mais j’ose me flatter que votre séjour disposera les esprits en notre faveur, et que si la France voit enfin qu’elle est obligée de revirer de système, elle nous choisira comme son pis-aller. […] Il pouvait avoir à peu près cinquante-cinq ans à cette époque ; il était petit, mince, et sa taille, quoiqu’il se tînt fort droit, n’avait aucune noblesse.

956. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — II — Vauvenargues et le marquis de Mirabeau » pp. 17-37

Gilbert à même de publier cet épisode de la correspondance du marquis de Mirabeau, il a droit aux remerciements de tous. […] Mirabeau toujours préoccupé de l’idée que Vauvenargues n’est pas ambitieux, qu’il est philosophe par tempérament et par choix (il le juge trop sur la mine, et par le dehors), qu’il est porté à l’inaction et au rêve, le presse souvent et dans les termes d’une cordiale amitié de se proposer un plan de vie, un but, de ne plus vivre au jour la journée : « Nous avons besoin de nous joindre, mon cher ami ; vous appuieriez sur la raison, et je vous fournirais des idées. » Vauvenargues décline ce titre de philosophe auquel, dit-il, il n’a pas droit : Vous me faites trop d’honneur en cherchant à me soutenir par le nom de philosophe dont vous couvrez mes singularités ; c’est un nom que je n’ai pas pris ; on me l’a jeté à la tête, je ne le mérite point ; je l’ai reçu sans en prendre les charges ; le poids en est trop fort pour moi. […] Il nous reste à les voir avec le détail qu’elles méritent, paraissant aujourd’hui pour la première fois. — Heureux âge de vingt-cinq ans qui permet et sollicite de tels épanchements entre égaux, qui ouvre un infini de perspective dans toutes les carrières, les montre plus simples et plus droites qu’elles ne sauraient jamais l’être à les parcourir en réalité ; qui, des oppositions même et des contrariétés du sort, sait tirer des combinaisons nouvelles, et se fraye en idée, par-delà l’obstacle, de plus belles routes inconnues !

957. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Merlin de Thionville et la Chartreuse du Val-Saint-Pierre. »

Quant à moi, je l’avoue, j’ai toujours le frisson quand j’ai à prononcer sur ces hommes, et, tout en étant sévère, je me demande si j’ai bien le droit de l’être. […] Un autre chartreux, de Thionville, dom Ignace Jaunez (oncle de Mme Hoche), lequel, en sa qualité de sacristain, avait le droit d’entrer dans les pavillons, venait me chercher dans ma chambre vers onze heures ou minuit ; je vois encore ce spectre blanc, aux yeux caves, avec la tète encapuchonnée, avançant sous mes yeux sa lanterne sourde, et prononçant Ave Maria, à quoi, me levant pour le suivre, je répondais Amen. […] Ne vous fiez point à ses promesses ; il n’a pas le droit de vous céder sa place ; et, le pourrait-il, il ne le ferait pas.

958. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers (suite.) »

A la vérité l’intérêt qu’il vous montre augmenterait, s’il était possible, l’opinion qu’on a de sa magnanimité et de sa bienfaisance, et les personnes comme vous ont des droits naturels sur une âme comme la sienne. […] Il a le cœur droit, l’âme noble et désintéressée. […] Quand on y porte un cœur droit et des intentions pures, quand on veut en faire partie et non pas la dominer, l’assujettir, on ne la trouve point un assemblage de monstres odieux.

959. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Sismondi. Fragments de son journal et correspondance »

Plus tard, Mme de Staël s’étonnait, au début de sa liaison avec Sismondi, qu’il ne fût point reçu dans le haut monde de Genève, quoiqu’il y eût tout droit par son éducation comme par sa naissance. […] C’est ainsi qu’une nuit, en Italie, il rêva qu’il était à Genève, en tiers avec sa sœur et une autre dame genevoise ; celle-ci se mit à lui parler avec franchise de ses qualités et défauts, et, entre autres vérités un peu dures, elle lui dit : « J’ai encore un reproche impardonnable à vous faire : c’est d’avoir abandonné votre patrie, et d’avoir voulu renoncer au caractère de citoyen genevois. » — Je me défendis d’abord, nous dit Sismondi, qui a pris soin de relater par écrit ce songe, en représentant que la société n’était formée que pour l’utilité commune des citoyens ; que, dès qu’elle cessait d’avoir cette utilité pour but et qu’elle faisait succéder l’oppression et la tyrannie au règne de la justice, le lien social était brisé, et chaque homme avait droit de se choisir une nouvelle patrie. Mais elle a répliqué avec tant de chaleur en faisant parler les droits sacrés de la patrie véritable et première, le lien indissoluble qui lui attache ses enfants, la résignation, la constance et le courage avec lesquels ils doivent partager ses malheurs, lui en diminuer le poids, qu’elle m’a communiqué tout son enthousiasme.

960. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Lettres inédites de Michel de Montaigne, et de quelques autres personnages du XVIe siècle »

Il obtint même en ces années le titre et la charge de gentilhomme ordinaire de la Chambre du roi, qui lui donnait de droit un pied au Louvre. […] Au xve  siècle, le bourgeois de Bordeaux avait le droit de porter toujours des armes ; il ne reconnaissait pour chef militaire que le maire. […] Tout d’abord Montaigne procéda avec ceux qui venaient de l’élire comme il avait fait avec les princes qui, durant ses séjours à Paris, l’avaient pris pour médiateur et négociateur : il ne se donna pas pour meilleur et plus grand qu’il n’était ; il les prévint de ses défauts et de ses manquements ; il fit toutes ses réserves pour qu’ils n’eussent ensuite aucun mécompte et ne se crussent pas en droit de se plaindre de l’objet de leur choix.

961. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Dominique par M. Eugène Fromentin »

Après d’excellentes études littéraires, sa famille le dirigeait vers la magistrature ; il était avocat, et presque déjà docteur en droit, si je ne me trompe, quand le génie de la couleur l’a séduit. […] Fromentin le sait bien ; tout en usant des acquisitions pittoresques modernes et du droit de détail qui est le nôtre, il se rattache néanmoins par des traits essentiels et par l’esprit à la grande école des Anciens, Lucrèce, Virgile, et à celle, je le répète, de Bernardin de Saint-Pierre, discrètement entendue. […] Ils l’ont commencée du côté gauche du pavé, ils la continuent du côté droit ; c’est la seule différence qu’il y ait dans leurs habitudes entre le matin et le soir. » Voilà le commentaire du tableau : sur la toile, le dessin exact, le caractère et le ton fixe ; ici, les variations du plus au moins et la succession notée des divers moments.

962. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid(suite et fin.)  »

— Oui, admirable ; mais il faut ajouter, pour rendre justice à qui de droit, pour rendre à César ce qui est à César, que ce n’est qu’admirablement traduit de Guillem de Castro, comme tant d’autres passages et de belles paroles dont la monnaie circule et retentit depuis deux siècles. […] « Je ne dois qu’à moi seul toute ma renommée », Corneille a droit de le dire pour cette scène originale. […] Il n’est jamais bien prouvé, dans ce pays-ci, qu’on ait eu le droit de s’être amusé ou d’avoir été ému.

963. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

Le résultat atteint, et à peine sorti d’un régime d’ambition et de conquête, il put vite s’apercevoir qu’il allait avoir affaire à des opposants d’un autre genre, et non pas les moins opiniâtres ni les moins dangereux : il retrouvait sur son chemin, après vingt-cinq ans, comme au premier jour, l’entêtement dans le passé, les préventions personnelles et l’humeur, l’ornière de la routine, les hauteurs du droit divin, un favoritisme exclusif et inintelligent, la méconnaissance de l’esprit d’un siècle. […] Telle est, messieurs, la liberté de la presse. » Il y disait encore : « La société, dans sa marche progressive, est destinée à subir de nouvelles nécessités ; je comprends que les gouvernements ne doivent pas se hâter de les reconnaître et d’y faire droit ; mais quand ils les ont reconnues, reprendre ce qu’on a donné, ou, ce qui revient au même, le suspendre sans cesse, c’est une témérité dont, plus que personne, je désire que n’aient pas à se repentir ceux qui en conçoivent la commode et funeste pensée. […] Royer-Collard, droit de taille, le front couvert d’une perruque brunâtre, le sourcil proéminent et remuant, le nez fort et marqué, le visage rugueux, la voix mordante, par moments stridente et se riant volontiers à elle-même quand il avait dit quelque mot ; en tout un esprit altier et des plus fins sous une écorce restée en partie rustique ; mais il ne faudrait pas faire non plus M. de Talleyrand plus délicat qu’il n’était et plus débile à cause de son infirmité.

964. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

Ces pauvres Anglais avaient beau rappeler les droits de l’hospitalité ; rien n’était compris par ce peuple ours. […] On voyait des jeunes gens de l’École de médecine et de droit engager des Savoyards et des chiffonniers à crier : À bas les missionnaires ! […] Révilliod n’est pas un éditeur, c’est un ami des lettres, libéral et généreux, qui ne se fit éditeur, cette fois, que pour avoir le droit de mettre un prix aux Poésies posthumes d’une muse qu’il respectait et admirait.

965. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Boileau »

En sortant de philosophie, il fut mis au droit ; son père mort, il continua de demeurer chez son frère Jérôme qui avait hérité de la charge de greffier, se fit recevoir avocat, et bientôt, las de la chicane, il s’essaya à la théologie sans plus de goût ni de succès. […] La littérature et la poétique de Boileau sont merveilleusement d’accord avec la religion, la philosophie, l’économie politique, la stratégie et tous les arts du temps : c’est le même mélange de sens droit et d’insuffisance, de vues provisoirement justes, mais peu décisives. […] A ceux qui l’accuseraient encore d’avoir jeté la pierre aux statues de Racine et de Boileau, l’auteur, pour toute réponse, a droit maintenant de faire remarquer qu’en écrivant les Larmes de Racine et la Fontaine de Boileau, il a témoigné, très-incomplètement sans doute, de son admiration sincère pour ces deux poëtes, mais qu’en cela même il a donné bien autant de gages peut-être que ne l’ont fait certains de ses accusateurs.

966. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série «  Paul Bourget  »

La situation de cet Hamlet moderne, d’un caractère si décidé, et qui n’hésite d’ailleurs pas un instant sur son droit, cette situation est telle que d’abord, étant donné le caractère de ce personnage, elle n’implique chez lui qu’un assez petit nombre de sentiments et fort simples, dont la description sans cesse recommencée devient un peu monotone, et qu’en outre nous ne nous intéressons pas très fortement à ce qu’il éprouve. […] Ou bien il me semble qu’au lieu de faire d’André Cornélis un gaillard si prodigieusement énergique (ce qui, au surplus, n’est peut-être pas très compatible avec les habitudes d’analyse à outrance qu’on lui prête en même temps), je l’eusse conçu comme une créature encore plus incertaine que l’Hamlet anglais et l’eusse empêtré, par surcroît, de scrupules et d’hésitations sur son droit au meurtre. […] Le Deuxième Amour, c’est l’histoire d’une femme qui, s’étant trompée, ne se croit pas le droit de recommencer l’expérience amoureuse.

967. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XII »

L’invraisemblance excessive des situations où l’auteur le place, son intrusion fantastique dans la vie intime de tous et de toutes, ce droit de visite, aussi outrageant que le droit de jambage des temps féodaux, qu’il s’arroge sur le cœur des autres, font de lui un être de raison, sans réalité, sans modèle, créé ou plutôt forgé pour les besoins de la pièce. […] Elle l’a fait fatalement, et naturellement : elle n’a le droit d’accuser personne, Un enfant est né de sa faute, et elle a été heureuse d’être mère.

968. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers. Tome IXe. » pp. 138-158

Son génie se croyait sans cesse en droit de demander des miracles, et, comme on dit, de mettre le marché à la main à la Fortune. […] Le tout, pour cette race de mortels à part, est de bien prendre son moment, de bien proportionner son audace, et de faire valoir encore dans une certaine juste mesure le droit du lion. […] Pourtant la vérité générale de pareils tableaux se prouve aussi, se déclare d’elle-même, et, en les voyant, on a droit de s’écrier comme devant un portrait dont on n’a jamais connu le modèle : Que c’est vrai !

969. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Adrienne Le Couvreur. » pp. 199-220

Mlle Le Couvreur, dans sa première jeunesse, avait accueilli bien des adorateurs, dont on a droit de nommer quelques-uns, Voltaire par exemple. […] qu’on me montre beaucoup d’amour et beaucoup d’esprit. » Ce qu’il disait là tout crûment comme un franc original qu’il était, bien d’autres se croyaient en droit de le penser, s’ils avaient la politesse de ne pas le dire. À force d’esprit, de bon sens, de sentiment des bienséances et de modestie, Mlle Le Couvreur sut se faire accorder ce qu’à cette époque nulle autre de son état n’était en mesure ni en droit de réclamer.

970. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Œuvres de Barnave, publiées par M. Bérenger (de la Drôme). (4 volumes.) » pp. 22-43

Avec un goût vif pour la littérature, il sait se contraindre et s’appliquer fortement au droit par déférence pour son père. […] En se livrant à l’étude du droit, il se sentit d’abord poussé bien moins vers les lois civiles que vers les lois politiques ; il lut avec avidité, il s’empressa d’extraire et d’approfondir tous les ouvrages français composés sur ces matières de gouvernement et d’institutions. […] Une telle déclaration, placée en regard du récit de Mme Campan, ne laisse pas d’embarrasser, je le répète, et de jeter dans une vraie perplexité ; car on se refuse à admettre que Barnave ait parlé simplement ici comme un avocat qui se croit en droit de nier tout ce qui n’est pas prouvé.

971. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de lord Chesterfield à son fils. Édition revue par M. Amédée Renée. (1842.) » pp. 226-246

Placé à l’université de Cambridge, il apprit tout ce qu’on y enseignait, le droit civil, la philosophie ; il suivit les leçons de mathématiques du savant aveugle Saunderson. […] Il n’avait pas été long à sentir ce qui manquait à cet enfant qu’il voulait former, et dont il avait fait l’occupation et le but de sa vie : En scrutant à fond votre personne, lui disait-il, je n’ai, Dieu merci, découvert jusqu’ici aucun vice du cœur ni aucune faiblesse de la tête ; mais j’ai découvert de la paresse, de l’inattention et de l’indifférence, défauts qui ne sont pardonnables que dans les personnes âgées, qui, sur le déclin de leur vie, quand la santé et la vivacité tombent, ont une espèce de droit à cette sorte de tranquillité. […] Sur la religion, il dira, en répondant à quelques opinions tranchantes qu’avait exprimées son fils : « La raison de chaque homme est et doit être son guide ; et j’aurais autant de droit d’exiger que tous les hommes fussent de ma taille et de mon tempérament, que de vouloir qu’ils raisonnassent absolument comme moi. » En toutes choses, il est d’avis de connaître et d’aimer le bien et le mieux, mais de ne pas s’en faire le champion envers et contre tous.

972. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Les Mémoires de Saint-Simon. » pp. 270-292

Notre prose s’y montre déjà avec des qualités simples, droites et naturelles qui lui resteront acquises, et avec des tons de grandeur épique qu’elle ne gardera pas toujours. […] L’auteur, en les terminant, a eu vraiment le droit d’en juger comme il l’a fait : « Je crois pouvoir dire qu’il n’y en a point eu jusqu’ici qui aient compris plus de différentes matières, plus approfondies, plus détaillées, ni qui forment un groupe plus instructif ni plus curieux. » Ces vastes mémoires, qui n’ont paru au complet qu’en 1829-1830, étaient dès longtemps connus et consultés par les curieux et les historiens ; Duclos et Marmontel s’en sont perpétuellement servis pour leurs histoires de la Régence. […] La vérité, s’écrie-t-il, il l’a eue en vue jusqu’à lui sacrifier toutes choses : « C’est même cet amour de la vérité qui a le plus nui à ma fortune ; je l’ai senti souvent, mais j’ai préféré la vérité à tout, et je n’ai pu me ployer à aucun déguisement ; je puis dire encore que je l’ai chérie jusque contre moi-même. » Pourtant, s’il redresse si haut la tête sur ce chapitre de la vérité, il convient que l’impartialité n’a pas été son fait ; il sent trop vivement pour cela : On est charmé, dit-il, des gens droits et vrais ; on est irrité contre les fripons dont les cours fourmillent ; on l’est encore plus contre ceux dont on a reçu du mal.

973. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Monsieur Théodore Leclercq. » pp. 526-547

Théodore Leclercq avait été nommé receveur principal des droits réunis à Paris, place excellente et lucrative, mais à laquelle il ne put s’assujettir. […] Leclercq a cru devoir y ajouter un mot à l’adresse des nombreux arrangeurs, qui s’étaient emparés de l’idée de certains proverbes pour les transporter au théâtre, sans lui demander son agrément : Le fait, disait-il, s’est établi comme un droit, ainsi qu’il arrive pour des choses beaucoup plus importantes. […] Il n’a jamais connu cet effort combiné qui consiste à monter une pièce, à la construire, à la faire sortir plus ou moins sauve de toutes les embûches des coulisses, à la faire marcher droit et haut devant la rampe redoutable ; il n’a jamais eu à consommer, comme dit Voltaire, cette œuvre du démon.

974. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Le duc de Lauzun. » pp. 287-308

Le duc de Lauzun, d’ailleurs, a laissé des Mémoires, et par là il appartient de droit à la littérature. […] Mais ici on a droit d’interrompre la personne du monde qui juge de la sorte si à la légère, et de lui dire : « Non, madame, il n’est au pouvoir d’aucun homme, si élevé qu’il soit par son nom et son influence, de récuser ainsi et de mettre à néant d’un trait de plume des indiscrétions, fussent-elles scandaleuses et préjudiciables à tout un ordre de la société. […] Mais enfin l’ancienne société, ayant vécu de la sorte, ne pouvait avoir droit à tous les bénéfices, ni ajouter, à l’excès des prodigalités et des jouissances passées, la considération finale qu’elle ne devrait qu’à la parfaite discrétion et au silence.

975. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mémoires et correspondance de Mallet du Pan, recueillis et mis en ordre par M. A. Sayous. (2 vol. in-8º, Amyot et Cherbuliez, 1851.) — I. » pp. 471-493

André Sayous, déjà connu par d’excellents morceaux d’histoire littéraire, et qui vient de gagner son droit de cité en France par ce service rendu à tous les amis des saines idées politiques et des informations historiques judicieuses. […] Quoique étranger et républicain, j’ai acquis, au prix de quatre ans écoulés sans que je fusse assuré en me couchant de me réveiller libre ou vivant le lendemain, au prix de trois décrets de prise de corps, de cent et quinze dénonciations, de deux scellés, de quatre assauts civiques dans ma maison, et de la confiscation de toutes mes propriétés en France, j’ai acquis, dis-je, les droits d’un royaliste ; et comme, à ce titre, il ne me reste plus à gagner que la guillotine, je pense que personne ne sera tenté de me le disputer. […] Pourtant, la Révolution n’étant plus française exclusivement, mais cosmopolite, « tout homme, remarque l’auteur, a droit de montrer ses inquiétudes… Chaque Européen est aujourd’hui partie dans ce dernier combat de la Civilisation : nous avons corps et biens sur le vaisseau entrouvert ».

976. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Notice historique sur M. Raynouard, par M. Walckenaer. » pp. 1-22

Après avoir fait avec succès ses études au petit séminaire d’Aix et pris ses grades à l’école de droit de cette ville, Raynouard vint à Paris vers 1784 ; il ne fit que tâter le terrain et n’y resta pas. […] Supposant un concours solennel entre les poètes de toutes les nations, chaque nation n’ayant droit qu’à nommer un seul représentant : Les Grecs, s’écrie Raynouard, nommeraient Homère ; les Latins, Virgile ; les Italiens, le Tasse ou l’Arioste (il serait, je crois, plus juste de mettre Dante) ; les Anglais, Milton (lisez plutôt Shakespeare) ; et nous tous, — oui, vous-mêmes qui savez admirer Racine… ah ! […] Quand il composera des ouvrages en prose, tels que son Histoire du droit municipal en France (1829), il ne fera guère autre chose que de mettre en ordre et de classer chronologiquement les notes recueillies dans ses recherches, que de vider ses sacs et de ranger ses matériaux par chapitres avec aussi peu de lien que possible.

977. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le Brun-Pindare. » pp. 145-167

Il avait compris que « de tous les genres de poésie, c’était l’ode sûrement qui avait le plus droit de lui plaire, parce qu’elle avait plus de rapport avec l’élévation de ses idées et la hauteur de son style ». […] S’agissait-il de célébrer, par exemple, le livre des Époques de la nature, Le Brun avait droit de s’écrier : Au sein de l’Infini ton âme s’est lancée ; Tu peuplas ses déserts de ta vaste pensée. […] Quand il serait vrai qu’un tel marché honteux eût été conclu, et que le prince eût, dans les premiers temps, acheté ou obtenu de Le Brun le droit du seigneur, toute allusion de la part du mari ou de la femme, dans le procès, devenait impossible à cause de l’inviolabilité du personnage sérénissime.

978. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — I. » pp. 1-22

Un Français, un Allemand et un Anglais seront toujours très inférieurs sous ce rapport, toutes choses égales d’ailleurs en facultés, à un Corse, un Albanais ou un Grec ; et il est bien permis de faire entrer encore en ligne de compte l’imagination, l’esprit vif et la finesse innée qui appartiennent comme de droit aux méridionaux, que j’appellerai les enfants du soleil. […] Marmont, mis hors de combat par de si graves blessures, fut transporté à Burgos et jusqu’à Bayonne, et reçu partout avec les honneurs dus à sa dignité : « Spectacle imposant, dit-il, de cette entrée en pompe d’un général d’armée mutilé sur le champ de bataille, porté avec respect devant les troupes, entrant au bruit du canon et escorté de tout son état-major. » Et comme il faut que l’esprit français se trouve partout, même dans les revers : « Je fis la plaisanterie, ajoute-t-il, de dire que j’avais, pendant ce voyage, assisté plusieurs fois à l’enterrement de Marlborough. » Sur la foi de son chirurgien Fabre, Marmont résista à toutes les insinuations qu’on lui faisait de se laisser couper le bras (qui était le bras droit) ; il aima mieux souffrir et obtenir une lente guérison. […] Pour achever de le peindre dans cette dernière attitude où nous l’avons vu, repoussant la colonne russe à la tête de 60 hommes, qu’on se rappelle que son bras droit était hors de service depuis la bataille d’Arapiles, que sa main gauche avait le pouce et l’index fracassés depuis Leipzig.

979. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Montesquieu. — I. » pp. 41-62

Il lisait plume en main et en réfléchissant : « Au sortir du collège, on me mit dans les mains des livres de droit ; j’en cherchai l’esprit. » Cet esprit des choses du droit et de l’histoire fut la recherche de toute sa vie : il ne se reposa que quand il crut l’avoir trouvé. […] Quant à mon métier de président, j’ai le cœur très droit ; je comprenais assez les questions en elles-mêmes ; mais, quant à la procédure, je n’y entendais rien.

980. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « M. Necker. — I. » pp. 329-349

Cet homme distingué était né à Genève, le 30 septembre 1732, d’un père professeur de droit public qui, né à Custrin en Prusse, était venu s’établir dans la ville de Calvin, et qui tirait lui-même son origine d’une famille irlandaise. […] Necker semblait également leur avoir communiqué et qui se liait au précédent, c’était de respecter très fort et de proclamer très haut les droits de l’humanité, d’estimer peut-être le genre humain en masse au-dessus de sa juste valeur, et à la fois de ne point accorder toujours aux individus avec qui il était en rapport le juste degré d’estime qui pouvait leur appartenir. […] Mais, à l’époque de son premier ministère, l’opinion publique en France, dans la haute société, semblait une reine sans tache, et à laquelle un homme d’État, qui voulait le bien, n’avait, pour marcher droit, qu’à se confier sans réserve.

981. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Ivan Tourguénef »

Il se torture d’arguties, recommence sans cesse son infructueux examen de conscience, et se butte toujours à l’impossibilité d’éprouver une sensation forte et décisive, qui est le symptôme dernier de sa ruine morale : « Elle m’aime, écrit-il à un ami, et elle m’a dit qu’elle serait à moi, si je me reconnaissais le droit de, l’exiger. Je ne me reconnais pas ce droit. […] Nejdanoff jeta autour de lui un regard scrutateur et méfiant, puis il marcha droit à un vieux pommier… Le tronc de ce pommier était couvert de mousse desséchée ; ses branches rugueuses et dénudées, avec quelques petites feuilles vertes et rouges accrochées çà et là, s’élevaient tordues vers le ciel, semblables à des bras de vieillard suppliant, les coudes repliés.

982. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « X. Ernest Renan »

« Beaucoup d’esprits droits et honnêtes, dit-il, s’attribuent sans les mériter les honneurs de l’athéisme. » Mais ne les a pas qui veut et qui s’en vante. […] Renan a moins écrit son livre pour résoudre des difficultés qu’au fond il regarde lui-même comme insolubles, que pour proclamer les droits de la Critique indépendante et désintéressée, de la Critique en dehors de tout dogmatisme et de toute polémique, comme il dit. […] Si la pleine liberté de la Critique était consentie, si la Science avait le droit d’agir en vue seulement des résultats scientifiques, on n’aurait plus besoin de rien, on aurait tout, et les vêpres siciliennes de la philosophie sonneraient, à pleines volées, sur nos têtes !

983. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Béranger — Béranger, 1833. Chansons nouvelles et dernières »

Là, leurs droits sont perçus.  […] On ferait preuve d’un esprit bien superficiel en n’y voyant que des accidents particuliers auxquels se serait pris le poëte : Béranger a dramatisé, sous ces figures populaires, toute une économie politique impuissante, tout un système d’impôts écrasants ; il a touché en plein la question d’égalité réelle, du droit de chacun à travailler, à posséder, à vivre, la question, en un mot, du prolétaire. 

984. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « FLÉCHIER (Mémoires sur les Grands-Jours tenus à Clermont en 1665-1666, publiés par M. Gonod, bibliothécaire de la ville de Clermont.) » pp. 104-118

Et de quel droit ferions-nous les censeurs si rigides et les compatissants par excellence ? […] Nau est le bras droit, cette digne mère qui est venue là pour tenir le ménage de monsieur son fils, occupe dans la relation toute la place qu’elle peut ambitionner ; elle préside à sa façon les Grands-Jours parmi les dames de la ville, les organise en assemblées de charité, les réglemente, les gronde, les fait taire, s’ingère dans les brouilleries des couvents, et prétend réformer jusqu’aux Ursulines.

985. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « VICTORIN FABRE (Œuvres publiées par M. J. Sabbatier. Tome Ier, 1845. » pp. 154-168

L’amitié certainement a des droits, la sincérité d’intention a des priviléges ; il est d’usage de penser et de dire sur l’auteur qu’on publie, sur l’ami dont on recueille les reliques, un peu plus que tout le monde, et la part d’illusion permise a sa latitude. […] Sabbatier parmi ces héritiers compromettants, et nous en aurions presque le droit en lisant les paroles plus que sévères et les qualifications flétrissantes qu’il inflige à toutes doctrines littéraires et philosophiques qui ne sont pas les siennes.

986. (1874) Premiers lundis. Tome I « Walter Scott : Vie de Napoléon Bonaparte — I »

En s’élevant à une immense hauteur, il prend d’avance le droit de faiblir, et, après avoir ravi l’enthousiasme, il peut à son tour réclamer l’indulgence comme une justice. […] Aurait-il été déterrer le mauvais conte d’Arsace et Isméme pour avoir le droit de ranger Montesquieu parmi les conteurs impudiques ?

987. (1874) Premiers lundis. Tome II « Jouffroy. Cours de philosophie moderne — III »

Jouffroy, la partie qui est vraiment nous a tout droit de commander, d’exploiter, de confisquer l’autre à son profit. […] Ils lui accordent bien d’entrer en rapport avec le non-moi par la pensée et l’intelligence ; d’en connaître et d’en réfléchir les lois, d’en posséder la science, quoique encore cela soit impossible, sans que l’activité matérielle s’en môle à un certain degré ; mais dès que le moi désire modifier activement, transformer, embellir ce monde extérieur, ils l’arrêtent, ils l’avertissent comme s’ils n’en avaient que fort précairement le droit et le pouvoir ; de même en effet qu’ils nient la continuité entre le moi et la vie dite de nutrition, de même aussi ils nient la continuité essentielle du moi avec la vie dite de relation ; entre la pensée et l’acte, entre la volonté et l’acte, il y a pour eux un abîme, de même qu’il y en avait un entre la sensation et la pensée.

988. (1874) Premiers lundis. Tome II « Chronique littéraire »

L’Irlande est désormais la question vitale pour l’Angleterre ; l’Irlande opprimée et martyrisée depuis des siècles, l’Irlande traitée en conquête, pressurée sans relâche par le Saxon, par le Normand, par Jacques Ier, par Cromwell, par Guillaume d’Orange ; l’Irlande, cette noble et sainte Pologne de l’Océan, inépuisable en douleur comme en espérance ; l’inextinguible Irlande, un moment voisine de l’émancipation à la fin du dernier siècle, se lève aujourd’hui en armes pour regagner ses droits, pour faire sa révolution étouffée en 98 ; elle ne connaît plus Guillaume IV, ni ses officiers, ni ses prélats, ni le parlement britannique ; elle n’obéit qu’à son O’Connell, qui chargé de plaider pour elle à Westminster, s’y montre moins à l’aise, il faut le dire, que sur la terre nationale, au milieu de son peuple. […] Les sociétés populaires, démocratiques, des Amis du peuple, des Droits de l’homme, etc., etc., qui, à ce qu’on assure, existent toujours, n’auraient rien de mieux à faire, au lieu des motions et harangues empruntées au portefeuille d’Anacharsis Clootz, que d’expédier dès demain, par les villages, quelques chanteurs ambulants, avec ordre de ne quitter chaque endroit que lorsque deux ou trois garçons des plus éveillés sauraient les quatre ou cinq chansons magiques : il sera mémorable, l’instant où la population de la France les redira en chœur.

989. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre III. Les dieux »

Il a le droit de préparer de toute éternité le malheur infini des âmes qu’il répand sur le monde, et, si quelque âme lui agrée davantage, de bouleverser une nation pour la sauver. […] L’Aurore, « au voile de safran, aux doigts de roses », apparaît toujours sur « le thym et la rosée » ; mais c’est le lapin qui lui fait la cour. « Atropos et Neptune » deviennent « péagers » et « recueillent leurs droits » sur les vaisseaux marchands.

990. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre I. Renaissance et Réforme avant 1535 — Chapitre I. Vue générale du seizième siècle »

Dans ce cadre charmant, elle posait l’idéal de l’homme complet : le corps souple, robuste, gracieux, amené à la perfection de sa force et de sa forme, non plus instrument vil et méprisé, mais valant par soi, ayant droit à l’entière réalisation de ses fins propres et particulières, droit d’être et de jouir le plus possible ; l’âme parfaite aussi en son développement, enrichie de tous les modes d’existence qu’il lui est donné de posséder, s’épanouissant avec aisance dans sa triple puissance d’agir, de comprendre et de sentir.

991. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « José-Maria de Heredia.. »

Dès lors la forme du sonnet, qui exige la sobriété et commande presque la perfection, qui n’a pas le droit d’être plus ou moins bon, mais qui doit être superbe ou exquis sous peine de n’être pas, s’imposait à M.  […] Et plus tard c’est à la Havane, dans la cour de l’École de droit et de théologie, sous les orangers d’une fontaine, qu’il lisait ses auteurs favoris, Ronsard, Chateaubriand et Leconte de Lisle.

992. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Baudelaire, Œuvres posthumes et Correspondances inédites, précédées d’une étude biographique, par Eugène Crépet. »

Mais, au reste, je ne vous ai parlé de ce plan de drame que pour avoir le droit de vous parler, à cette place1, de Baudelaire lui-même. […] … » Et ses notes intimes se terminent par cette page, où il y a, si vous le voulez, encore un peu d’artifice et de « pose » en face de soi-même, mais où j’ai tout aussi bien le droit de trouver (qui sait ?)

993. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Anatole France, le Lys rouge »

Parce qu’il n’y a pas dans le sang, dans la chair d’une femme, cette fureur absurde et généreuse de possession, cet antique instinct dont l’homme s’est fait un droit. […] Brunetière, non l’infaillibilité de la science, mais le droit illimité de la recherche scientifique et de la libre spéculation.

994. (1888) Demain : questions d’esthétique pp. 5-30

Mais sur ces idées mêmes, j’ai tant à dire et, comme vous l’avez pensé, le sujet intéresse si fort quiconque n’est pas indifférent à la littérature, que je ne crois point excéder mes droits en vous demandant congé, Monsieur, de faire à votre réponse publique  puisque aussi bien elle se refuse à conclure et reste hérissée de points d’interrogation  une réponse publique aussi  D’ailleurs je me défends d’avance de toute ridicule prétention à rien vous enseigner ; vous parlez au nom de l’expérience et avec l’autorité que des livres excellents vous donnent : je ne vous opposerai guère que des intuitions, et no puis compter que sur l’incertain avenir pour légitimer par des œuvres les théories. […] Ils sont spéciaux à notre siècle, les poètes esthètes, c’est vrai ; mais n’y ont-ils pas, de par Edgar Poe, Wagner et Baudelaire, droit de cité ?

995. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre XII. L’antinomie morale » pp. 253-269

L’art social reconnaîtra-t-il à des pensées nettement antisociales ou jugées telles le droit de s’exprimer (par exemple au pessimisme asocial ou antisocial, à l’immoralisme) ? […] Bayet l’admet comme un droit évident de l’individu.

996. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre I. Place de Jésus dans l’histoire du monde. »

Cette Thora n’a rien de commun avec les « Lois » grecques ou romaines, lesquelles, ne s’occupant guère que du droit abstrait, entrent peu dans les questions de bonheur et de moralité privés. […] Le judaïsme devint la vraie religion d’une manière absolue ; on accorda à qui voulut le droit d’y entrer 88 ; bientôt ce fut une œuvre pie d’y amener le plus de monde possible 89.

997. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre VII. Développement des idées de Jésus sur le Royaume de Dieu. »

La liberté et le droit ne sont pas de ce monde ; pourquoi troubler sa vie par de vaines susceptibilités ? […] Mais il n’avait pas dit encore : « Mon royaume n’est pas de ce monde. » Bien des ténèbres se mêlaient à ses vues les plus droites.

998. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre II : La littérature — Chapitre I : Une doctrine littéraire »

Ils se sont surtout appliqués à défendre les droits de l’imagination et l’initiative du génie. […] Certainement Pline et Quintilien avaient le droit de se considérer comme les représentants de la raison générale, de la raison commune, contre ce sens propre et individuel qui se disait inspiré.

999. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre II. Mademoiselle Mars a été toute la comédie de son temps » pp. 93-102

« Au contraire, Alceste, s’il n’est entré dans le salon de Célimène qu’en passant et par hasard, de quel droit, je vous prie, vient-il dire à chacun ces vérités inattendues ? De quel droit adresse-t-il, à ces futiles gentilshommes, des leçons que pas un ne lui demande ?

1000. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre septième. »

Peut-être un autre que La Fontaine n’eut pas osé s’exprimer aussi simplement ; mais la bonhommie a bien des droits. […] Elle voudrait en dégoûter Jeannot Lapin, car elle n’est pas elle-même bien sûre de ses droits.

1001. (1860) Ceci n’est pas un livre « Le maître au lapin » pp. 5-30

Et, si l’artiste reste inconnu par sa faute, s’il se cache de parti pris, n’avons-nous pas le droit d’entrer violemment dans son obscurité ? […] Que cela ne vous arrive plus. » Et il sortit. — Vous reconnaissez à ce trait l’homme droit jusqu’à la brutalité que je vous ai présenté en commençant.

1002. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre III. Besoin d’institutions nouvelles » pp. 67-85

Est-il bien certain que nos droits politiques ne se régleront désormais que par le registre des impositions ? […] Le dogme de la souveraineté du peuple, enté sur le système représentatif, système ancien dans nos habitudes nationales, mais rétabli dans un autre ensemble d’idées ; le dogme de la souveraineté du peuple, disons-nous, a fait croire que le corps institué comme organe de l’opinion et des besoins actuels du peuple, était investi du droit de concourir à la formation de la loi.

1003. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre premier. Mme de Staël »

… Pourquoi Mme de Staël qui, comme Chateaubriand et Balzac, a bien droit à une publication d’ensemble de ses œuvres, est-elle, avec Bonald et Joubert, sur le point de manquer sur la place ? […] Le sien, à Mme Sand, est plus épais, plus bourgeois, plus prosaïque, et si la passion l’a soulevé parfois, ce n’a été ni bien haut ni bien longtemps… ni surtout bien droit !

1004. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXI. Mme André Léo »

Mme André Léo ne se débarrasse jamais entièrement de ce ton d’institutrice, qui apprend ses devoirs et ses droits au pauvre monde, et qui gâte, à toute place, le talent qu’elle aurait peut-être sans cet insupportable ton, La raideur de l’institutrice, — de ce piquet intellectuel qu’on appelle une institutrice, — supprime les mollesses de la femme, qui feraient son génie, comme les rondeurs font sa beauté, et durcit, quand elle l’a, jusqu’au sentiment maternel. […] Mais Proudhon, appliqué au roman, doit donner quelque chose comme l’ennui d’un Grandisson dépassé… L’avocasserie pour les droits de la femme détermine beaucoup plus les livres des bas-bleus que la vocation des belles œuvres.

1005. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « L’idolâtrie au théâtre »

à ces esprits-là tout est possible ; mais quand l’importance des vaudevilles ou des tragédies de salon paraîtrait à ces forts penseurs un droit à maintenir au génie, quand tel hôtel, à la porte blasonnée, serait devenu pour le théâtre français une succursale d’émulation honorable et utile, il resterait toujours la question qui prime toutes les autres, — la question des mœurs. […] Elle devait pousser, après beaucoup de siècles, il est vrai, dans le cerveau des nations chrétiennes, et nous devions la réaliser avec cette légèreté charmante « qui ne voit pas grand mal à ça », comme nous avons le droit de le dire, tant notre vieillesse, ainsi qu’on le sait, a le cœur pur !

1006. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Louis Vian » pp. 373-387

Lorsque Benoist ΧIIΙ lui octroya pour lui et ses enfants la permission de faire gras toute leur vie, il fallut payer les droits de daterie ; mais il planta là ses bulles de dispense, et plutôt que de rien payer, il aima mieux faire maigre à jamais. […] — enfin, exerça ses droits féodaux comme le plus féodal des terriens anglais.

1007. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Les Césars »

C’était un livre sans parti pris, sans théorie à priori, sans système ; un livre sain, vigoureux, d’un grand sens pratique, allant droit à la difficulté et à la réalité avec une netteté de ton qui devenait fort piquante au milieu des solennités de la rhétorique ordinaire, une petite brusquerie à la Napoléon, rangeant, en maître, les choses de l’Histoire, et marchant lestement sur le gâchis qu’on en avait fait jusque-là. […] Tels sont, en résumé, les observations et les reproches que la Critique nous semble avoir le droit d’adresser à Champagny et à son œuvre.

1008. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Le roi René »

Elle lui revenait de droit. […] Il serait le paiement de l’innocence et du droit immolés dans la personne de Conradin.

1009. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « La Femme et l’Enfant » pp. 11-26

Il a constaté que la division des propriétés, cette vermine du plus beau sol, qui le ronge parcelle à parcelle, n’existe pas dans ce fort pays de droit d’aînesse, et que la grande propriété peut aisément y faire les frais de la grande culture qui féconde. […] En cherchant sérieusement à créer une population agricole, au lieu de laisser presque au hasard et à la misère le soin de retenir dans les campagnes les enfants qu’il y a placés, l’État agrandira le domaine fécondé de la patrie, et pourra donner à la fois et des leçons et des exemples utiles à l’avenir du pays. » Et, plus loin, ajoute-t-il encore : « L’agglomération de grands territoires dans une seule main, par suite des substitutions aristocratiques, étant impossible avec nos mœurs françaises et un passé historique qui remonte aux propriétés morcelées de Tacite, il faut, de toute nécessité, chercher dans la généralisation d’un principe appliqué aujourd’hui dans les manufactures ce que le droit de primogéniture avait jusqu’ici réalisé.

1010. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Femmes d’Amérique » pp. 95-110

Il a appliqué plus ou moins légèrement des idées faites à l’Amérique et à ses femmes, mais, lui qui parle de l’individualité, de sa grandeur et de ses droits, avec l’orgueil ivre de l’eau qu’il a troublée, on cherche en vain celle de son esprit… on ne la trouve pas ! […] Diogène est un spiritualiste ; il n’avait pas pour la matière et ses jouissances les goûts hardis de Bellegarrigue, dont l’unique mesure intellectuelle et morale est l’argent, et dont l’épouvantable théorie nous donnerait le droit de le mépriser lui-même s’il n’est pas, à cette heure, riche comme un nabab.

1011. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « La Papesse Jeanne » pp. 325-340

Emmanuel Rhoïdis s’imagine avoir deux bras droits, armés chacun d’une arme terrible : l’une, petit pistolet de poche, péniblement travaillé pour être léger, et d’une balle plus meurtrière que celle du plus fort calibre, — et c’est le pistolet du romancier, qui veut faire rire ni plus ni moins que Rabelais et Voltaire !  […] Je suis de ceux qui croient qu’il peut tout, s’il n’a pas le droit de tout, et qu’il reste encore le génie en faisant une scélératesse.

1012. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. H. Wallon » pp. 51-66

Parce que ce grand Justicier a fait justice envers et contre tous, et même contre lui-même, quand il renonça, par exemple, aux droits injustement acquis que les traités de ses prédécesseurs lui avaient donnés sur l’Angleterre ; — parce que, dans son différend avec l’évêque de Beauvais, il ne céda ni à l’évêque, ni même au pape ; — parce que, dans la honteuse défection de Thibaut de Champagne, violateur de ses engagements, Saint Louis ne s’arrêta ni devant sa qualité de croisé, ni devant la défense de l’attaquer que lui fit le pape et tira l’épée ; — les historiens ennemis, sortant des limites de son droit dans lequel il resta toujours, ont trouvé plaisant d’opposer à la Papauté un Saint reconnu par la Papauté, et lui ont fait de cette circonstance une impertinente et impossible gloire.

1013. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Émile de Girardin » pp. 45-61

Tous les autres rôles, qui tournent autour de ceux-là, n’existent que pour mettre en relief la fille du millionnaire, bête comme une dot de six millions, et qui abuse encore de cet énorme droit. […] « Si la guerre existe, — dit-il, — la Bourse a le droit d’exister. » Et il pousse la comparaison devant lui sans se rappeler les fameux Congrès de la Paix fondés contre la guerre ; car s’il y en a contre la guerre, des congrès, il doit y en avoir contre la Bourse.

1014. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Madame de Sabran et le chevalier de Boufflers »

Et il ne se contenta pas de lui être infidèle, même pour des laiderons, comme elle le lui reproche dans des vers sans orthographe mais non sans hiatus :         Car la beauté et la laideur         Ont les mêmes droits sur ton cœur, Et tu prises aussi bien le chardon que la rose ! […] On ferait un livre bien piquant de l’influence de l’aristocratie sur le naturel ; car ce qui le gâte et ce qui le perds, c’est la prétention, et il n’y a de prétentions à rien dans un monde qui a droit à tout… Or, elle était de ce monde-là.

1015. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Le roi Stanislas Poniatowski et Madame Geoffrin »

Pour penser à rendre un service, et un service d’argent, au prince Poniatowski, pour lui donner le droit et la hardiesse d’un tel service, il fallait que Madame Geoffrin, cette femme d’un si grand tact et d’une si grande mesure, eût déjà pour lui un sentiment bien profond… Et c’est toujours la même chose, comme dit le paysan de Molière, parce que c’est toujours la même chose ! […] Déjà avancée dans la vie quand le prince Poniatowski lui présenta son fils, — car on en était alors arrivé à cette dégringolade de tout que les princes polonais venaient dans leurs grosses bottes, droits et heureux comme des princes, ainsi que le dit Sterne de son postillon, demander pour leurs fils les bontés de femmes dont on eût à peine parlé sous Louis XIV, mais qui étaient devenues des puissances parce qu’elles donnaient à dîner à quelques impertinents écrivassiers !

1016. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « III. Donoso Cortès »

… Mais laissons là ces dédains factices qui n’ont pas le droit d’exister. […] Au premier rang de ce monde par les titres et les relations, Donoso Cortès, marquis de Valdegamas, n’y exerça pas toute l’influence à laquelle, de talent et d’âme, il avait droit, et la faute en fut justement au monde de ce temps, haïsseur de toute vigueur et de toute vérité complète !

1017. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Funck Brentano. Les Sophistes grecs et les Sophistes contemporains » pp. 401-416

Funck Brentano… Peut-être qu’au fond de sa pensée il conclut que tout système philosophique a droit au respect ou à l’admiration des hommes, non pour la vérité qu’il prouve, mais pour le génie qu’il a prouvé ! […] On pouvait laisser dans son néant la vie privée de ces hommes, qui n’ont plus le droit d’occuper d’eux le genre humain.

1018. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « E. Caro »

Les nouveaux critiques de l’Idée de Dieu ont remis en valeur des théories qui n’avaient pas le degré de force, de précision et de profondeur, qu’on est en droit d’exiger d’une philosophie, et l’insuffisant redevenait du vrai à la lumière épouvantable du faux complet ! […] Avec cette charité et cette politesse qui drapent de si haut les coups… que l’on porte si bas, nous sommes plus libres, nous, les brutaux, de jeter à la porte, à notre manière, les réputations et les idées qui n’avaient pas le droit d’entrer !

1019. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Edgar Quinet. L’Enchanteur Merlin »

Quinet, au lieu de trouver une inspiration personnelle, un fond de choses vierge, comme on est en droit de l’exiger de tout homme qui se donne les grands airs d’une épopée, on est assailli des plus importunes et, que dis-je ? […] Edgar Quinet a brouillé, avec son Merlin, jusqu’au sens droit, si net, si français, si moqueur, de M. 

1020. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Paul Féval » pp. 145-158

… Demande que la Critique a bien le droit de lui adresser avec sympathie, mais derrière laquelle s’élève une autre question, bien plus générale et bien plus haute que la personnalité littéraire, quelle qu’elle soit, de M.  […] Il se plaint, je le sais, et il a droit de se plaindre du mutisme de la Critique à son égard, lui, qui depuis vingt-cinq ans fait jet continu de production !

1021. (1925) Les écrivains. Première série (1884-1894)

Soutenu par la force seule de son génie, par l’âpre ténacité de son courage, il a marché droit devant lui, et il a fait sa trouée magnifiquement. […] Il fallait être au moins baron et vicomtesse pour avoir droit à l’amour des romanciers. […] Moi, j’en pense du bien ; c’est mon droit. […] C’était son droit, il me semble. […] Et ils trouvent, dans le crime, le morceau de pain et la part de bonheur, que tout homme, ici-bas, a le droit de rêver.

1022. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XV » pp. 61-63

Ponsard a droit de ne pas être content de l’article de Magnin, qui a cette justesse stricte qui n’est peut-être pas l’exacte justice, et qui est sans cordialité ; mais il a tort de se plaindre par écrit, car l’article est loyal, et Magnin a pu parfaitement user d’articles de M.

1023. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXXIX » pp. 164-165

Brindeau ; il s’est bien vengé, car il a eu tant de succès sous l’habit de Rosamberg, que maintenant c’est lui qui aura le droit à l’avenir de douter de moi.

1024. (1875) Premiers lundis. Tome III « M. Buloz et le Messager de Paris. »

On prouve déjà son droit à les rejeter par ce bon sens qui a empêché de les commettre.

1025. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Barbusse, Henri (1873-1935) »

Un volume a été immédiatement reconnu comme sortant de l’ordinaire, et son auteur, encore très jeune, peut être tout de suite placé à côté des poètes dont nous avons le droit d’être fiers.

1026. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — C — Colet, Louise (1810-1876) »

Aussi fut-elle tout cela, comme l’exigeaient impérieusement la mode et les convenances ; mais quels démentis cruels donnaient à ce parti pris nécessaire son beau front droit, ses grands yeux plus éveillés que les cloches de matines, son petit nez retroussé comme ceux qui changent les lois d’un empire, et l’arc de sa jolie bouche, et son menton rose, et les énormes boucles de cheveux clairs, lumineux, couleur d’or, tombant à profusion sur un buste dont les blanches, éclatantes et superbes richesses chantaient glorieusement à tue-tête la gloire de Rubens, ivre de rose !

1027. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Sardou, Victorien (1831-1908) »

mais sa tête pâle, souffrante, ses yeux enfoncés et inquiets, sa bouche tourmentée, son grand front plein d’orages montrent clairement que. riche, heureux enfin, maître de son succès et de son art, propriétaire d’un beau château et d’un nom qui voltige sur les bouches des hommes, roi absolu du théâtre du Gymnase et du théâtre du Vaudeville, assez affermi dans sa tyrannie légitime pour pouvoir ne faire qu’une bouchée d’Edgard Poe et de Cervantès, et pour contraindre les poètes morts à lui gagner les droits d’auteur, — il ressent encore les souffrances passées du temps où les directeurs de spectacles, aujourd’hui ses esclaves !

1028. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Veuillot, Louis (1813-1883) »

— Le Droit du Seigneur (1854). — Saint Vincent de Paul (1854). — Les Français en Algérie (1854). — La Légalité (1854). — Le Lendemain de la victoire (1855). — La Guerre et l’Homme de guerre (1855). — Mélanges (1856-1858). — Le Parti catholique (1856). — Agnès de Lauvens (1867). — L’Honnête Femme (1858)

1029. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 198-200

Malgré tant de droits à notre estime ; Balzac ne sauroit être proposé comme un modele.

1030. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 275-277

Qu’on lise la Certitude des Preuves du Christianisme, le Déïsme réfuté par lui-même, la Réponse au Systême de la Nature, & l’on verra combien cette même raison est un guide sûr pour l’homme éclairé qui en connoît les bornes, & un prestige dangereux pour l’esprit indépendant qui exagere ses droits afin d’en abuser.

1031. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 344-346

Il a des droits bien plus assurés à la célébrité, par son Histoire du Traité de Westphalie, & par celle des Guerres & des Négociations qui précéderent ce Traité, sous les Ministeres de Richelieu & de Mazarin.

1032. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 397-399

Celui-ci est plus connu dans la Littérature, & a acquis plus de droit sur la reconnoissance des Gens de Lettres, pour avoir professé avec distinction les Humanités pendant plus d’un demi-siecle.

1033. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — J. — article » pp. 531-533

Avertir des défauts qui lui échappent un Peintre habile, entre les mains de qui on voit un pinceau capable de tout, c’est se montrer jaloux de sa gloire & non de son merite ; c’est lui indiquer les routes de la perfection, & concourir foiblement à la vérité, mais toujours concourir aux chef-d’œuvres que le Public a droit d’attendre de ses talens.

1034. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 208-210

Si jamais la Religion s’éteignoit parmi nous, le Recueil de ces Lettres, parvenu au trente-deuxieme volume, suffiroit pour en faire déplorer la perte, & même y ramener les esprits raisonnables & les cœurs droits.

1035. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 328-330

Pour appliquer ceci à notre Siecle ; si, par exemple, les Productions qu’il enfante sont marquées au même coin, ont les mêmes travers que celles qui ont paru sur le déclin des Siecles de Périclès, d’Auguste, de Léon X, ne sera-t-on pas en droit d’en conclure que nous tendons à la chute que ces Siecles ont successivement éprouvée ?

1036. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 502-504

Privés des suffrages du vulgaire, ils n’en ont pas moins de droits à la reconnoissance publique.

1037. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 42-44

Si l’on avoit besoin d’exemple pour prouver qu’un esprit juste & un cœur droit ne peuvent long-temps persister dans l’erreur & l’impiété, celui de M. de Ramsay viendroit à l’appui de cette vérité.

1038. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 260-261

Les petites Poésies de M. de Sauvigny n'ont pas les mêmes droits à l'indulgence ; elles manquent de naturel, & sentent trop le travail : à cela près, ses Lettres philosophiques & ses Odes anacréontiques offrent de l'esprit, de la finesse, & quelquefois de la sensibilité.

1039. (1891) Impressions de théâtre. Cinquième série

Quel droit avons-nous au bonheur ? […] « … De quel droit avez-vous agi comme vous l’avez fait ? […] Car le peuple a le droit d’affranchir, au cirque, les esclaves vainqueurs. […] … — Non, Monsieur, il n’a pas le droit ! […] Vous n’en avez pas le droit !

1040. (1899) Préfaces. — Les poètes contemporains. — Discours sur Victor Hugo pp. 215-309

Quant à la valeur spéciale d’art d’une œuvre conçue dans cette donnée, elle reste soumise à qui de droit, abstraction faite de toute théorie esthétique particulière à l’auteur. […] C’est alors seulement que l’idée de la beauté reparaît dans l’intelligence et l’idée du droit dans l’ordre politique. […] Il ne mérite ni respect ni dédain, n’ayant point de droits à exercer, mais un devoir strict à remplir, qui est d’écouter et de comprendre. […] J’ai dit, messieurs, que ses romans étaient aussi des poèmes ; et, en effet, si la magie du vers leur manque, l’ampleur de la composition, la richesse d’une langue originale, énergique et brillante, la création des types plutôt que l’analyse des caractères individuels, leur donnent droit à ce titre. […] Il dédaigne la science qui prétend expliquer les origines de la vie ; il ne lui accorde même pas le droit de le tenter, et il se rattache en ceci, plus qu’il ne se l’avoue à lui-même, aux dogmes arbitraires des religions révélées.

1041. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre I. De la sélection des images, pour la représentation. Le rôle du corps »

Ce que vous avez donc à expliquer, ce n’est pas comment la perception naît, mais comment elle se limite, puisqu’elle serait, en droit, l’image du tout, et qu’elle se réduit, en fait, à ce qui vous intéresse. Mais si elle se distingue justement de l’image pure et simple en ce que ses parties s’ordonnent par rapport à un centre variable, sa limitation se comprend sans peine : indéfinie en droit, elle se restreint, en fait, à dessiner la part d’indétermination laissée aux démarches de cette image spéciale que vous appelez votre corps. […] Mais d’abord on ne voit pas comment ces sensations acquerront de l’extension ni surtout comment, une fois l’extension acquise en droit, s’expliquera la préférence de telle d’entre elles, en fait, pour tel point de l’espace. […] Je ne saisis donc, dans cette hypothèse, ni pourquoi, à tel moment déterminé, une diminution d’intensité dans le phénomène lui confère un droit à l’extension et à une apparente indépendance, ni comment un accroissement d’intensité crée, à un moment plutôt qu’à un autre, cette propriété nouvelle, source d’action positive, qu’on nomme douleur. […] Nous avions donc raison de dire que la coïncidence de la perception avec l’objet perçu existe en droit plutôt qu’en fait.

1042. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre V. La Renaissance chrétienne. » pp. 282-410

Je n’y ai nul droit, il n’y a rien en moi qui ne soit abominable ; cette prière même, c’est vous qui me l’inspirez et qui la faites en moi. […] Si les appels portés des anciens d’une congrégation aux assemblées provinciales, départementales et nationales sont de droit divin et par la volonté et le commandement de J. […] Si quelques-unes seulement sont de droit divin ? […] Si le pouvoir des assemblées en de tels appels est de droit divin et par la volonté et le commandement de J. […] Un homme secourable, Évangéliste, lui montre le droit chemin.

1043. (1929) Amiel ou la part du rêve

… La famille s’arroge l’impunité des vilenies, le droit des insultes et l’irresponsabilité des affronts… Par qui est-on méconnu, rejeté, jalousé, vilipendé, plus que par sa famille ? […] Mais avez-vous été tout à fait sans reproche, Tout à fait droit et vrai pour moi ? […] Voilà les belles vocations, les clairs et droits appels de Dieu. […] La justice consiste à reconnaître le droit des autres, le droit réciproque, ponctuel, équivalent, des autres nations, des peuples, des sociétés, le droit de l’humanité. […] D’avance ils sentent l’avantage et le droit de la diversité.

1044. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LII » pp. 203-205

Leur droit y est reconnu, et ils se contenteront de cette part qui leur est faite en toute connaissance de cause.

1045. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — A — Amiel, Henri Frédéric (1821-1881) »

Et plus tard encore, dans ses Étrangères, le bruit qu’il n’avait pu faire avec ses Grains de mil et son Penseroso, ses articles et ses notices, il essayait de le faire en innovant, dans notre poésie, le vers de quatorze et de seize syllabes : Quand le lion, roi des déserts, pense à revoir son vaste empire, Vers la lagune, allant tout droit, dans les roseaux il se retire ; ou encore : Les chênes de la forêt, à l’ombre épaisse et tranquille Aujourd’hui, comme autrefois, m’ont chanté leur grave idylle… Qu’était-ce donc qu’Amiel, et où le mettrons nous ?

1046. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — C — Lahor, Jean = Cazalis, Henri (1840-1909) »

Étudiant en droit, puis en médecine, passionnément épris et profondément instruit des littératures orientales, il a joint à cette riche et multiple expérience intellectuelle celle des grands voyages et de la vie cosmopolite.

1047. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préface et poème liminaire des « Contemplations » (1856-1859) — Préface (1859) »

Si un auteur pouvait avoir quelque droit d’influer sur la disposition d’esprit des lecteurs qui ouvrent son livre, l’auteur des Contemplations se bornerait à dire ceci : Ce livre doit être lu comme on lirait le livre d’un mort.

1048. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Parocel » pp. 255-256

Messieurs du comité, quand on a admis cela on n’est pas en droit de refuser l’ Antiope de Madame Therbouche.

1049. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Avis du traducteur » pp. -

Renouard, Cœuret de Saint-Georges et Foucart, ont éclairé le traducteur sur plusieurs questions de droit.

1050. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Ma biographie »

Il y avait en dernier lieu organisé l’octroi, et il était contrôleur principal des droits réunis lorsqu’il mourut. […] Son père, contrôleur principal des droits réunis de l’arrondissement, directeur de l’octroi de Boulogne, s’était marié et était mort en cette même année 1804, avant la naissance de son fils. […] Sainte-Beuve a continué de figurer en qualité de professeur titulaire sur les affiches du Collège de France, mais il a depuis longtemps renoncé à tous ses droits. […] C’est franc et net, avec tout ce dont la connaissance des hommes, et peut-être aussi bien, dans le moment même, la conversation de l’artiste (qui avait nom Mme Favart) peut les éclairer de fine galanterie et de malice. — Je ne sais si le souvenir du fils me ferait préjuger du père. — Le costume est celui du temps : habit bleu, collet relevé et droit, gros boutons à reflet métallique, un gilet croisé d’une étoffe claire tirant sur le jaune, à pointes et à revers larges, la cravate fine et blanche en mousseline, entourant doublement le cou sous le menton, et bien nouée entre les deux revers du gilet. […] Son fils lui ressemblait beaucoup, dit-on ; quelqu’un qui avait bien connu Mme Sainte-Beuve, et qui a le droit d’avoir un avis sur ces matières de santé, répétait souvent à M. 

1051. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. BALLANCHE. » pp. 1-51

Nous assistons à la formation lente et mystérieuse de cette nature singulière qui, s’affermissant à travers tant de crises, eut bien le droit de croire à la vertu des épreuves. […] En voyant aux prises les deux partis acharnés, les libéraux et les ultra-royalistes, chacun croyant à son droit et pouvant produire également des hommes de vertu et d’intelligence, M. […] Ballanche ne put croire que le droit fût exclusivement d’un côté, et au lieu de prendre parti avec MM. de Bonald et de Maistre pour l’antique tutelle, ou avec Condorcet et Saint-Simon pour l’émancipation purement humaine, il s’avança, un rameau de paix à la main, pour expliquer comment chacun avait tort et avait raison, pour accorder aux uns la vérité dans le passé, aux autres le règne dans l’avenir. […] Ballanche parle de la légitimité dans l’Essai, il s’agit, non point du droit divin tel qu’on l’entend vulgairement, mais d’une légitimité historique que nul publiciste spiritualiste ne conteste aujourd’hui. […] Durant un séjour qu’il fit à Rome en 1824, dans la même compagnie d’élite qu’autrefois, il eut conscience de l’antique cité latine, du droit patricien et de cette époque incertaine dont il a cherché, dans la Formule générale, à reconquérir le sens sur Tite-Live.

1052. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CIXe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (1re partie) » pp. 5-79

Détrôné pour cause de papauté, est un axiome de droit public qui n’a pas encore été admis sur la terre. […] « Enfin la mort d’un autre de mes domestiques, ayant tous les droits à mon estime à cause de la fidélité et de l’attachement avec lesquels il me servait, mit le comble aux afflictions de cette espèce, afflictions, je l’ai dit, par lesquelles mon âme a toujours été très éprouvée. » VI Consalvi ressentit quelque amertume du refus du pape de le choisir pour successeur du cardinal Negroni dans un emploi inférieur auquel il avait droit. […] « Vous savez ainsi que moi », écrivit l’ambassadeur français au Directoire, « que personne à Rome n’a donné d’ordre de tirer ni de tuer qui que ce fût ; le général Duphot a été imprudent, tranchons le mot, il a été coupable. » Il y avait à Rome un droit des gens comme partout. […] D’un côté, je professais une constante aversion pour tout emploi à responsabilité quelconque ; de l’autre, je n’avais pas d’ambition qui pût être flattée des droits ou des affections que l’on devait acquérir dans ce poste, soit auprès du nouveau Pape, soit auprès des cardinaux qui l’approcheraient de plus près.

1053. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIIIe entretien. Madame de Staël. Suite. »

XXIX « Quelques tribuns voulaient établir dans leur assemblée une opposition analogue à celle d’Angleterre et prendre au sérieux la Constitution, comme si les droits qu’elle paraissait assurer avaient eu rien de réel, et que la division prétendue des corps de l’État n’eût pas été une simple affaire d’étiquette, une distinction entre les diverses antichambres du consul dans lesquelles des magistrats de différents noms pouvaient se tenir. […] Je ne serai donc point inutile au monde, en signalant tout ce qui doit porter à ne laisser jamais aux souverains le droit arbitraire de l’exil. […] On voit à l’accent du récit qu’elle fait de cet événement, dans son livre Dix années d’exil, qu’elle éprouva quelque chose de semblable à ce qu’éprouva Agrippine à la première révélation de l’inhumanité de son fils, une consternation mêlée de joie tragique, parce qu’elle avait enfin le droit de haïr celui qu’elle craignait. […] Il viola tout dans une seule action : le droit des gens européens, la constitution telle qu’elle existait encore, la pudeur publique, l’humanité, la religion. […] Implorer la tyrannie qu’on déteste, c’est s’enlever le droit de la détester.

1054. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre II. L’antinomie psychologique l’antinomie dans la vie intellectuelle » pp. 5-69

De quel droit nier son action ici après l’avoir admise là ? […] Il croit, au nom d’une réfutation vague de l’idée de race, avoir le droit d’oublier les travaux des physiologistes modernes sur les différences intellectuelles produites par l’hérédité. […] Du point de vue de l’intuition, je ne dois pas parler de la vérité ; je dois dire, avec Stirner : « Ma vérité. » * * * Mais, dira-t-on, n’y a-t-il pas une vérité objective au nom de laquelle un groupe peut s’arroger le droit de discipliner intellectuellement l’individu et d’exiger de lui une pleine et entière soumission d’esprit ? […] Au fond il est inutile de revendiquer en face de l’orthodoxie les droits de ce qu’on appelait autrefois la conscience errante ; car quand bien même on ne réclamerait pas en faveur de ces droits, la conscience errante saurait bien toute seule les faire valoir.

1055. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1860 » pp. 303-358

Il a vu, sur la place de Grève, un condamné dont les cheveux coupés ras, au moment où on le tournait en face de l’échafaud, se dressèrent tout droit, très visiblement. […] Dimanche 11 mars On sort de table… Femme au délicat profil, au joli petit nez droit, à la bouche d’une découpure si spirituelle, à la coiffure de bacchante donnant aujourd’hui à sa physionomie une grâce mutine et affolée, femme aux yeux étranges qui semblent rire, quand sa parole est sérieuse. […] Et quand je repasse toute mon existence, ça été toujours comme ça, rien qui sort du train-train des événements ordinaires et j’ai le droit d’appeler la Providence une marâtre. […] Il ne les communiquait qu’à son mentor intime, M. de Gerlach, un mystique germain, un conservateur féodal à la de Maistre, plein de mépris pour les parvenus du droit national, et outré de la visite de la reine Victoria à Paris. […] L’État surtout, depuis 1789, a été diantrement absorbant, a joliment entamé au profit de tous, les droits d’un chacun, et je me demande si l’avenir ne nous réserve pas, sous le nom du gouvernement absolu de l’État, servi par le despotisme d’une bureaucratie française, une tyrannie bien autre que celle d’un Louis XIV.

1056. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « III. M. Michelet » pp. 47-96

Michelet serait un génie ailé comme Ariel, bon à monter, bon à descendre, aurait-il le droit de se jeter dans l’histoire avec des étourderies d’oiseau, et devrait-il s’y jouer, comme on a dit que Voltaire s’était joué dans la lumière, pour la briser et en éparpiller les rayons, avec les instincts d’un méchant ? […] Pour cette sorte d’esprits, Richelieu coudoie de son bras droit Louis XI, et du gauche, Robespierre. […] … Certes, si la critique est quelque chose de plus qu’une leçon d’anatomie donnée sur le cadavre d’un livre mal fait, si elle a le droit et le devoir de remonter du livre à l’homme, et de regarder dans le cœur et sous l’écorce de l’arbre qui a distillé un pareil poison, il peut être utile de rechercher quelles causes mystérieuses ont pu placer un écrivain à contre-sens de sa nature d’intelligence, de son talent, de ses premiers ouvrages ; car, ironie d’un Dieu qui a d’épouvantables plaisanteries ! […] elle en avait le droit, si elle était la seule vérité, la seule religion, comme M.  […] Michelet, toutes ces femmes modernes qui ne sont pas de vraies chrétiennes, toutes ces femmes plus ou moins libres, avec les droits politiques qu’elles rêvent ou jalousent, avec leurs vaniteuses invasions dans les lettres et dans les arts, avec cet amour de la gloire, le deuil éclatant du bonheur , disait Mme de Staël, et qui est le deuil aussi de la vertu, toutes ces femmes, il ne faut pas s’y tromper, continuent les femmes de la Renaissance.

1057. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 3665-7857

De-là le droit particulier & le droit public, que l’ambition seule a distingués, & qui ne sont l’un & l’autre que le droit naturel plus ou moins étendu, mais soumis aux mêmes principes. […] Il entendoit par-là des esprits droits & des ames sensibles, sans préjugés, sans prétention. […] On a dit qu’une pensée appartenoit à celui qui la rendoit le mieux : cela ressemble au droit du plus fort. […] plus ces droits sont sacrés, plus la confiance est tranquille, & plus par conséquent la perfidie est à couvert. […] Ils avoient raison : sans un esprit droit & une ame pure, l’imagination n’est qu’une Circé, & l’harmonie qu’une sirene.

1058. (1895) Les mercredis d’un critique, 1894 pp. 3-382

Montigny avait, en effet, le droit de représenter une pièce qu’on lui avait adressée, avec prière de la jouer, et dont les droits d’auteurs, perçus par l’agent dramatique, seraient à la disposition de l’inconnu, quand il lui plairait de se faire connaître ; mais le directeur du théâtre n’avait pas le droit de vendre à un éditeur la pièce qu’il représentait. […] Je puise le droit de ma protestation dans l’exemple même de cet excellent docteur. Luther ayant pris le droit, dans sa seule conscience, de protester contre l’Église catholique, je ne vois pas ce qui m’empêcherait de prendre, moi aussi, dans ma seule conscience, le droit de protester contre le protestantisme. […] C’est leur droit et je ne me mets pas en peine d’y contredire. […] Je galopais droit devant moi, cherchant à gagner, comme l’ordre en avait été donné, l’autre extrémité du campement, quand un cavalier arabe, superbement vêtu et monté sur un beau cheval noir, arriva sur moi et, m’appliquant le canon de son fusil sur le flanc droit, pressa la gâchette.

1059. (1878) Nos gens de lettres : leur caractère et leurs œuvres pp. -316

De quel droit et dans quel but a-t-on brusquement détourné sa vie ? […] serait-il en droit de répondre. […] L’heure venue, de quelle triomphante manière il défend les droits de son cœur ! […] Nous avions la Déclaration des droits de l’homme ; les Prophètes du passé, c’est la Déclaration des droits de Dieu. […] Le roman n’a le droit d’être constatation qu’après avoir été analyse.

1060. (1904) Zangwill pp. 7-90

Une large application des découvertes de la physiologie et du principe de sélection pourrait amener la création d’une race supérieure, ayant son droit de gouverner, non seulement dans sa science, mais dans la supériorité même de son sang, de son cerveau et de ses nerfs. […] Le meurtre inutile d’une mouche est un acte blâmable ; celui qui est sacrifié aux fins idéales n’a pas droit de se plaindre, et son sort, au regard de l’infini (τῷ θεῷ), est digne d’envie. […] Rigoureusement parlant, l’homme dans la vie duquel règne l’égoïsme fait un acte de cannibale en mangeant de la chair ; seul l’homme qui travaille en sa mesure au bien ou au vrai possède ce droit. […] Quand Dieu sera en même temps parfait et tout-puissant, c’est-à-dire quand l’omnipotence scientifique sera concentrée entre les mains d’un être bon et droit, cet être voudra ressusciter le passé, pour en réparer les innombrables iniquités. […] Ceux qui prennent l’existence comme un devoir, non comme une jouissance, ont bien droit à cela.

1061. (1882) Hommes et dieux. Études d’histoire et de littérature

Le nez se rattache au front par ce trait droit et pur qui est la ligne même de la beauté. […] Il est droit, ferme, presque rond, comme un fût de colonne supportant un buste. […] Son droit d’aînesse reléguait César au second plan de la scène. […] Lui seul avait le droit d’y toucher. […] Un chandelier énorme tombe droit de la voûte.

1062. (1881) Études sur la littérature française moderne et contemporaine

Ce factum était intitulé : Avis à la branche espagnole sur ses droits à la couronne de France à défaut d’héritiers. […] Mais ici la populace, personnage immense, a droit… La Commune a droit ; la Convention a raison. […] Dès lors, la Commune perd jusqu’à l’apparence d’un droit et d’une justice quelconque. […] Quand le poète apprit cette nouvelle en Belgique où il philosophait sur le droit et la loi, Paris et Versailles, Léviathan et Béhémoth, il dut ressentir une profonde douleur. […] la mort, la défaite, le triomphe de la force injuste sur la faiblesse et sur le droit.

1063. (1927) Approximations. Deuxième série

Ai-je au contraire abusé de ce droit à la démonstration duquel Baudelaire disait que tout le monde est intéressé : le droit de se contredire ? […] Il y a même parfois, entre autres dans l’étonnant paragraphe final, un moelleux auquel avec Strachey nous ne pensions pas avoir droit. […] Qu’en France ils le soient davantage, je voudrais pouvoir l’affirmer ; mais en aurais-je sincèrement le droit ? […] Est-il en droit au retour de se rendre ce témoignage ? […] Il y a ici bien autre chose encore que le mérite (qu’en aucun cas d’ailleurs on n’a le droit de décompter) d’avoir été le premier à parler.

1064. (1716) Réflexions sur la critique pp. 1-296

du droit d’éxaminer. c’est ce partage de sentimens qui selon moi, nous fait rentrer dans tous les droits de l’examen. […] Mais j’aime mieux croire que les anciens ont éxaminé ; et je prétends seulement que ce droit n’est pas éteint pour nous. […] Cette raison est décisive ; mais on veut bien encore nous en donner d’autres par surabondance de droit. […] En vertu de ce droit de fable, les chevaux deviendront-ils des personnages tragiques ? […] L’un et l’autre ont ici d’inviolables droits : l’un est le fils des dieux, l’autre est le chef des rois.

1065. (1829) Tableau de la littérature du moyen âge pp. 1-332

Ce ne sont pas des luttes de vassaux qui se battent pour un maître, qui souffrent ou frappent, sans que leur intelligence s’élève, et que leurs droits s’augmentent. […] Des récompenses, des honneurs, des droits de cité, offerts à l’ambition des provinciaux, les invitaient à étudier la langue romaine. […] Ne vous semble-t-il pas que les papes seuls avaient le droit de les maudire et de les insulter, et que, du reste, tout genou fléchissait devant ces princes ? […] La raison avait déjà ses droits. […] Il conclut en faveur de l’homme, à cause de son droit de prééminence.

1066. (1896) Impressions de théâtre. Neuvième série

la « revendication du droit de l’individu à son développement intégral », malgré les religions, les codes et les préjugés sociaux ! le droit des êtres nobles et fiers contre les basses et serviles collectivités ! le droit de « se créer sa morale, sa règle », de « remplir toute sa destinée divine », d’être à soi-même son propre dieu ! […] Ce Zaccharia a de vagues droits au duché d’Athènes comme étant le fils d’un ancien duc dépossédé. […] Et, tout à coup, les deux hommes sentent qu’ils n’ont pas le droit de faire ce qu’ils font, qu’ils ne peuvent pas.

1067. (1896) Les idées en marche pp. 1-385

Chaque mot porte juste et droit. […] Le colonel attendait, droit sur son cheval, que ces mille femmes fussent rasées. […] Dans les petites allées droites et correctes, on discutait les choses de l’État. […] Ici l’on admire tout d’abord l’honnête homme et le cœur droit. […] Celui qui a senti tressaillir et grouiller en lui cette multitude a désormais le droit à la création.

1068. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Avant-propos »

Enfin, nos amis très proches : Émile Mignard, Pierre Richard, Georges Varenne, André Demelle et Louis Lossouarn, qui furent, en ce travail, nos dévoués auxiliaires, ont droit à un très affectueux merci.

1069. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bertrand, Aloysius (1807-1841) »

C’est en feuilletant, pour la vingtième fois au moins, le fameux Gaspard de la Nuit, d’Aloïsius Bertrand (un livre connu de vous, de moi et de quelques-uns de nos amis, n’a-t-il pas tous les droits à être appelé fameux ?)

1070. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 285-288

Qu’on pardonne à l’Homme l’incertitude de ses vues, la témérité de ses opinions, l’Ecrivain paroîtra toujours supérieur ; & la France, en condamnant ses erreurs, est en droit de s’enorgueillir de ses talens.

1071. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 445-448

D’ailleurs personne ne devroit être plus réservé sur la plaisanterie, lorsqu’il s’agit de Comédie, que l’Auteur de la Prude, de l’Indiscret, de la Femme qui a raison, du Droit du Seigneur, de Charlot ou la Comtesse de Givry, du Dépositaire, en un mot, de toutes les Comédies réprouvées qui ont paru sous son nom.

1072. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 474-476

Les raisonnemens de l’Auteur, appuyés sur des faits incontestables, ont paru concluans à tous les esprits droits & sans préjugé ; & l’heureuse expérience que plusieurs villes, entre autres St.

1073. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Chardin » pp. 220-221

Il faut que vous sachiez encore que cet artiste a le sens droit, et parle à merveille de son art.

1074. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Bellengé » p. 204

C’est, au centre et du côté droit, un grand rideau verd, partie replié partie tombant.

1075. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Préface »

Je suis persuadé que son ouvrage rencontrera le succès auquel il a droit : les spécialistes, comme je l’indiquais à l’instant, y trouveront matière à compléter leurs connaissances et sans doute à découvrir des aperçus nouveaux ; la masse du public, elle aussi, voudra lire ce livre et ceux qui le suivront, car, aujourd’hui comme au temps de La Fontaine, nous aimons tous et toujours à nous faire conter l’histoire de Peau d’Ane ; notre plaisir se double même d’une piquante sensation de curiosité lorsque c’est un nègre qui nous la conte, pourvu que ce nègre ait trouvé un interprète aussi averti que l’est M. 

1076. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre quatrième. Du cours que suit l’histoire des nations — Chapitre II. Trois espèces de langues et de caractères » pp. 296-298

Le droit romain en conserva ses acta legitima, qui accompagnaient toutes les transactions civiles.

1077. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — II » pp. 112-130

Sans se croire précisément des droits, il voyait toutes sortes de raisons en sa faveur. […] Causant vers ce temps-là (novembre 1736) avec le maréchal de Noailles qui revenait de l’armée d’Italie, et entendant ce maréchal se plaindre de n’avoir pas été aidé du côté de Versailles, à ce terrible mot M. d’Argenson s’empressait de tourner court et de parler d’autre chose, par exemple, de matières de droit public et des biens allodiaux de la Toscane ; « car les bruits sont grands aujourd’hui, disait-il, de brigues contre le premier ministre » ; et la seule idée d’en être informé l’effrayait : À propos de cet article, dit-il, je donnerai avis à mes enfants de ne se jamais fourrer dans toutes ces intrigues de cour. […] De tout cela il lui a résulté peu de soif de la justice, et comme il ne se commande rien à lui-même, par facilité de vivre et par habitude de suivre ses penchants, il ne s’est formé aucuns principes de morale, de justice, ni de droit public ; il ne voit ces règles qu’à mesure des occurrences et de l’offre de chaque espèce, ce qui rend nécessairement cette conduite fautive et peu profonde, n’étant conduite que par l’esprit.

1078. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat (suite.) »

« L’Empereur, parlant de Catinat, disait l’avoir trouvé fort au-dessous de sa réputation, à l’inspection des lieux où il avait opéré en Italie et à la lecture de sa Correspondance avec Louvois. » Napoléon ne le trouvait nullement comparable à Vendôme ; il eût dit de Catinat, servant sous ses ordres, ce qu’il disait de Saint-Cyr : « Saint-Cyr, général très-prudent. » Toute la manière de voir et d’agir de Catinat a été exposée au long par lui-même dans ses lettres confidentielles à son frère Croisilles ; il le fait dans une langue naïve et forte, un peu enveloppée, médiocrement polie, grosse de raisons, et qui sent son fonds d’esprit solide ; il faut en passer par là, si on veut le comprendre, et bien posséder son Catinat, nature originale et compliquée, un peu difficile à déchiffrer, et qui ne se laisse pas lire couramment : « Si je t’entretenais au coin du feu de notre campagne, disait-il à ce frère qui était un autre lui-même (31 octobre 1691), j’aurais bien du plaisir à te faire toucher au doigt et à l’œil ma conduite et les prévoyances que j’ai eues sur ce qui pouvait arriver, et comme il a fallu charrier droit pour faire aller la campagne aussi loin qu’elle a été, sans exposer tout le gros des affaires. […] Mais, ce qui était pis, Vauban, l’autorité même, Vauban semblait croire que Catinat aurait pu agir autrement et tenir le poste de La Pérouse ; il le disait à qui voulait l’entendre : « Je t’assure, écrivait Catinat à son frère, qu’il n’y a ombre de raison à ce dire, et qu’il aurait de la confusion de l’avoir avancé s’il était sur les lieux et qu’on lui dît de disposer ce poste pour être soutenu contre une armée qui a du canon… Je suis assurément rempli d’un grand fonds d’estime et d’affection pour M. de Vauban ; mais je voudrais bien voir jusqu’où iraient ses lumières et la tranquillité de son esprit, s’il était chargé en chef des affaires de ce pays-ci : je crois qu’il y serait pour le moins aussi fécond en inquiétudes qu’il l’était à Namur, où il était demeuré après la prise. » Catinat d’ailleurs n’en veut point à Vauban, et il trouve, pour l’excuser de ce léger tort à son égard, une belle explication amicale : « M. de Vauban est de mes amis ; sa franchise naturelle l’a surpris et l’a fait parler d’une chose qu’il a pensée et qu’il ne sait point, et avec peu de ménagement pour un homme qu’il aime ou qui est en droit de le croire. » Bien qu’endurci par l’expérience à tous les propos, Catinat était donc en ce moment fort fécond en soucis et des plus travaillés d’esprit ; toutes ses lettres adressées du camp de Fénestrelles à son frère nous ouvrent le fond de son âme : « Personne n’est à l’abri du discours, c’est un mal commun à tous ceux qui sont honorés du commandement : il faudrait que je fusse bien abîmé dans un esprit de présomption pour que je pusse imaginer que cela fût autrement à mon égard. […] Marcher en avant, la baïonnette au bout du fusil, sans tirer un coup, c’était l’ordre du maréchal : « D’abord que nous fûmes dans l’ordre que je viens de marquer, dit-il dans sa Relation au roi, nous marchâmes droit devant nous pour charger tout ce que nous trouverions.

1079. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LOYSON. — POLONIUS. — DE LOY. » pp. 276-306

Plusieurs romanciers pourtant auraient droit encore de réclamer contre nos lenteurs ; leur tour viendra. […] Le critique, qui sait très-bien se prendre aux vers les plus hasardeux du classique novateur, nous semble pourtant méconnaître le principe et le droit d’une tentative qui reste légitime dans de certaines mesures, mais dont nous-même avons peut-être, hélas ! […] Labinsky restera donc pour nous Jean Polonius, l’auteur des élégies, élégies douces, senties, passagères, qui, avec quelques-unes d’Ulric Guttinguer, ont droit d’être comptées dans le cortége d’Elvire.

1080. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LES JOURNAUX CHEZ LES ROMAINS PAR M. JOSEPH-VICTOR LE CLERC. » pp. 442-469

Mais les beaux-esprits s’arrêtent le plus souvent en chemin et se rebutent avant d’acquérir le droit d’être juges. […] En face des érudits et des philosophes également ardents de nos jours et emportés à toutes sortes d’espérances, il est bon de ne pas laisser tout à fait tomber ce droit de rappel à l’homme qui semble relégué chez les défunts moralistes. […] Jusqu’à plus ample recherche, c’est Bonneville qui a droit à l’invention.

1081. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Madame de Krüdner et ce qu’en aurait dit Saint-Évremond. Vie de madame de Krüdner, par M. Charles Eynard »

Eynard a très-bien résumé ces premières phases du développement de Mme de Krüdner, quand il dit : « Encore enfant, à Millau, elle ne cherchait que l’amusement ; à Venise, son cœur parle ; à Copenhague, sa vanité s’éveille ; mais c’est à Paris que son intelligence semble réclamer ses droits. » A peine y est-elle arrivée en effet, que Mme de Krüdner recherche les savants et les gens de lettres en renom, l’abbé Barthélémy, Bernardin de Saint-Pierre. […] Eynard traite bien durement le spirituel comte Alexandre de Tilly, « un homme que ses ridicules Mémoires, dit-il, ont livré au mépris des uns et à la pitié des autres. » On a assez le droit d’être sévère pour le comte de Tilly, sans qu’il soit besoin d’en venir à ces extrémités de dédain qui passent la justice ; d’autres diraient, qui blessent la charité. […] Il suffirait que sur quelques autres articles le biographe eût apporté la même complaisance et facilité de jugement, pour que nous eussions le droit de modifier certaines de ses conclusions.

1082. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIIIe entretien. Fénelon, (suite) »

Oserais-je vous dire que c’est un état qui porte avec soi sa consolation pour un homme droit qui ne tient pas au monde ? […] Ces pauvres gens étaient reçus comme des enfants, dont les plus malheureux avaient droit aux premiers soins. […] Le service militaire réduit à cinq ans de présence sous les drapeaux ; les pensions aux invalides servies dans leurs familles, pour être dépensées dans leurs villages, au lieu d’être dilapidées dans l’oisiveté et dans la débauche du Palais des Invalides dans la capitale ; Jamais de guerre générale contre toute l’Europe ; Un système d’alliance variant avec les intérêts légitimes de la patrie ; Un état régulier et public des recettes et des dépenses de l’État ; Une assiette fixe et cadastrée des impôts ; Le vote et la répartition de ces subsides par les représentants des provinces ; Des assemblées provinciales ; La suppression de la survivance et de l’hérédité des fonctions ; Les États généraux du royaume convertis en assemblées nationales ; La noblesse dépouillée de tout privilége et de toute autorité féodale, réduite à une illustration consacrée par le titre de la famille ; La justice gratuite et non héréditaire ; La liberté réglée de commerce ; L’encouragement aux manufactures ; Les monts-de-piété, les caisses d’épargne ; Le sol français ouvert de plein droit à tous les étrangers qui voudraient s’y naturaliser ; Les propriétés de l’Église imposées au profit de l’État ; Les évêques et les ministres du culte élus par leurs pairs ou par le peuple ; La liberté des cultes ; L’abstention du pouvoir civil dans la conscience du citoyen, etc.

1083. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre II. Corneille »

Ni l’un ni l’autre aussi ne songe à y renoncer : même poursuivant Rodrigue, Chimène se croit le droit, le devoir de l’aimer. […] Les dernières pièces de Corneille se caractérisent par l’élimination de plus en plus complète de la passion, même de l’exaltation : il ne reste guère que des volontés plus ou moins fortes, désintéressées et droites. […] Pierre Corneille, né le 6 juin 1606, à Rouen, était d’une famille de robe ; il étudia le droit, fut reçu avocat, et acquit une charge d’avocat général à la table de marbre du Palais (eaux et forêts, et navigation).

1084. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre IV. Le patriarche de Ferney »

En attendant, il lâche son Essai sur les mœurs complété, renforcé, définitif (1756), et ses discours sur la Religion naturelle (1756) ; deux autres coups droits atteignaient la Providence chrétienne, à travers l’optimisme de Leibniz : le poème du Désastre de Lisbonne (1756), et le roman de Candide (1758). […] Il faisait avec plaisir le seigneur de village ; il tenait aux privilèges, aux droits de ses fiefs. […] Il n’a pas eu de grandes vues politiques ; il n’a pas approfondi l’origine des sociétés, la théorie des pouvoirs publics, les principes du droit et des lois.

1085. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Octave Feuillet »

Octave Feuillet résume comme il suit : Développer à toute leur puissance les dons physiques et intellectuels qu’il tenait du hasard, faire de lui-même le type accompli d’un civilisé de son temps, charmer les femmes et dominer les hommes, se donner toutes les joies de l’esprit, des sens et du pouvoir, dompter tous les sentiments naturels comme des instincts de servage, dédaigner toutes les croyances vulgaires comme des chimères ou des hypocrisies, ne rien aimer, ne rien craindre et ne rien respecter que l’honneur : tels furent, en résumé, les devoirs qu’il se reconnut et les droits qu’il s’arrogea. […] Feuillet a voulu marquer dès le début que cette Locuste n’est qu’une darwiniste pratique, quelque chose comme un Lebiez en jupons : la première fois qu’elle apparaît à Vaudricourt, c’est en chasseresse braconnant sur les terres d’autrui et pénétrée des droits que lui confère la grande loi de la « lutte pour la vie ». […] La malfaisance ne semble un droit qu’aux âmes nées méchantes et perverses.

1086. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre premier »

Mais ne fut-il demeuré de Marguerite de Valois que le souvenir de cette influence, elle aurait droit à une place dans l’histoire de la littérature française. […] Parler d’amour, même aux dames du plus haut rang, de si bas qu’on le fît, c’était le droit de tout poète, et un reste des mœurs chevaleresques. […] Au lieu d’un homme qui échappe à ses juges, je vois un homme qui a le droit de les braver.

1087. (1902) L’œuvre de M. Paul Bourget et la manière de M. Anatole France

Et, d’autre part, si le droit reste en quelque sorte acquis à la critique d’incriminer une évolution dans un genre bien délimité, quand il doit en résulter pour celui-ci une inadmissible altération de caractère, il n’y a pas moins loin d’une telle mesure générale au radicalisme littéraire, qui voudrait aller jusqu’à imposer une casuistique rigoureuse aux formes génériques de l’expression. […] Il est manifeste que, pour avoir été replacés en face de la même impossibilité de contrôler, dans la pratique, la métrique des impressions, et d’en fixer la modalité, en deçà comme au-delà des événements, nous nous rendons mieux compte que l’esprit humain transforme tout en idées ; que c’est là le plus sûr résultat de notre supériorité spécifique ; que ce résultat même indique combien nous voyons les choses d’une certaine manière, qui n’est pas la vraie, tant s’en faut ; qu’enfin nous devons uniquement à notre besoin de connaître, de nous être attribué un droit de savoir, dont l’expression est aussi caractéristique de notre humanité qu’elle restera accablante pour notre enfantine insoumission. […] Mais le penseur qui va droit à l’idée, ou le plus droit qu’il est humainement possible, comment l’amener à s’astreindre aux règles particulières ?

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