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463. (1881) Le naturalisme au théatre

Ce qui réussit là, échoue ailleurs ; un soir, un mot porte, le lendemain il ne fait aucun effet. […] La Comédie-Française a fait salle comble tous les soirs. […] Les soirs où l’on me tue une pièce, ce n’est encore qu’une maquette qu’on me casse. […] L’effet a été grand, le soir de la première représentation. […] La stricte vérité est que, le premier soir, la salle s’ennuyait.

464. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Les Mémoires de Saint-Simon » pp. 423-461

Il amasse jour par jour, il écrit chaque soir ; il commence dès dix-neuf ans sous la tente, et il continue sans relâche à Versailles et partout. […] Et avec cela il est artiste, et il l’est doublement : il a un coup d’œil et un flair 93 qui, dans cette foule dorée et cette cohue apparente de Versailles, vont trouver à se satisfaire amplement et à se repaître ; et puis, écrivain en secret, écrivain avec délices et dans le mystère, le soir, à huis-clos, le verrou tiré, il va jeter sur le papier avec feu et flamme ce qu’il a observé tout le jour, ce qu’il a senti sur ces hommes qu’il a bien vus, qu’il a trop vus, mais qu’il a pris sur un point qui souvent le touchait et l’intéressait. […] Pour le reste la paresse même : peu de promenades sans grande nécessité ; du jeu, de la conversation avec ses familiers, et tous les soirs un souper avec un très petit nombre, presque toujours le même, et si on étoit voisin de quelque ville, on avoit soin que le sexe y fût agréablement mêlé. […] Telle étoit à l’armée la vie de ce grand général, et telle encore à Paris, où la Cour et le grand monde occupaient ses journées, et les soirs ses plaisirs.

465. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. RODOLPHE TÖPFFER » pp. 211-255

J’ai trouvé ce sentiment-là exprimé avec bien de l’onction résignée et de la tendresse dans les strophes nées un soir au plus beau site de ces rivages et sorties d’un de ces nobles cœurs dont j’ai parlé, strophes dès longtemps publiées, qui ont fait le tour des rochers sonores et qu’on n’a pas lues ici : Pourtant, ô ma Patrie, ô Terre des montagnes Et des lacs bleus dormant sur leur lit de gravier, Nulle fée autrefois errant dans tes campagnes, Nul esprit se cachant à l’angle du foyer, Nul de ceux dont le cœur a compris ton langage, Ou dont l’œil a percé ton voile de nuage, Ne t’aima plus que moi, Terre libre et sauvage Mais où ne croît pas le laurier. […] Ce séjour à Paris date de 1819 à 1820 ; de jour, il suivait les cours publics ; il allait écouter Talma le le soir. […] Quelques années après encore, vers l’âge de douze ans, sorti de la ville au hasard, sous l’impression d’un chagrin violent et un peu burlesque, d’un précoce dépit amoureux, il se retrouve le soir, seul, dans le même endroit de mystère. […] Prévère, que Charles partira le soir même pour Genève, et qu’il quittera pour longtemps la cure, pour toujours Louise et ses espérances.

466. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « PARNY. » pp. 423-470

Un soir, nous passâmes six heures ensemble, et il me parla d’Éléonore. […] le donnerai ici une ode au Plaisir qu’on peut supposer traduite en prose d’un élégiaque étranger, allemand ou anglais ; elle exprime sous une autre forme la pensée que nous venons de rencontrer à propos de Parny ; mais il y faudrait la fraîcheur de touche d’un Gray ou d’un Collins : « O doux et cher Génie, au regard vif et tendre ; au vol capricieux, rapide ; à l’accent vibrant, argenté, mélodieux ; dont la chevelure exhale un parfum sous la couronne à demi penchée ; dont la main porte un rameau de myrte en fleur, ou d’amandier tout humide de gouttes de rosée qui brillent au soleil du matin ; ou qui, le soir, assoupis tes pas sur les gazons veloutés aux rayons de la lune ; « O Dieu de la jeunesse et de la tendresse, langoureux comme une femme, hardi comme un amant ; volage, imprévu, consolateur ; — ô Plaisir, à toi, avant que ma voix ait perdu son timbre qui pénètre et cet accent que tu connais, à toi mes adieux ! […] La vie d’un soir était douce encore. […] Venez demain mardi ; nous serons seuls depuis onze heures du matin jusqu’à neuf heures du soir, y compris la demi-heure du dîner.

467. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Edmond et Jules de Goncourt »

Le Jardin des plantes ; un atelier de trente élèves ; une ville d’Asie Mineure racontée par un coloriste ; une partie de canotage la nuit ; quelques aperçus sur la cuisine russe ; une vente après décès d’artiste pauvre et malchanceux ; un atelier au crépuscule ; l’ouverture du Salon ; ce qu’on voit en omnibus le soir ; le corps d’un modèle ; une pluie de printemps au Palais-Royal ; une synagogue ; un bal masqué chez un peintre ; les amours d’un bohème et d’un singe ; un petit cochon dans un atelier ; l’auberge de Barbizon ; la forêt de Fontainebleau ; la Bièvre et ses paysages ; la plage de Trouville ; je ne sais quelle rue derrière Saint-Gervais ; une pleine eau, la nuit, dans la Seine, sous les ponts… — le tout mêlé de tirades amusantes et truculentes sur l’École de Rome, sur Ingres et Delacroix, sur les primitifs, sur le bourgeoisisme des artistes..   […] Encore sous le coup de son chagrin, Barnier, qui est pourtant un brave et honnête garçon, ayant trop bu d’eau-de-vie ce soir-là et poussé d’ailleurs par les plaisanteries des camarades, tente d’embrasser la sœur, qui le frappe au visage. […] Voyez dans Sœur Philomène, l’agonie de Romaine, à qui l’on vient de couper le sein, le délire impie de la mourante, entrecoupé, dans la grande salle d’hôpital où souffrent tant de malheureuses, par la voix de la sœur récitant la prière du soir : « Hélas ! […] Qu’on juge de la précision de cette chasse par quelques détails : «… La mélancolique métamorphose se faisait, changeant sur les toiles l’azur matinal des paysages en pâleurs émeraudées du soir… Au-dessus de la copie de Saint-Marc, du noir était entré dans la gueule ouverte du lion… Le parquet perdait le reflet des châssis de bois blanc qui se miraient dans son luisant… » Et voici le trait final : « Une paillette, sur le côté des cadres, monta, se rapetissa, disparut à l’angle d’en haut ; et il ne resta plus dans l’atelier qu’une lueur d’un blanc vague sur un œuf d’autruche pendu au plafond et dont on ne voyait déjà plus ni la corde ni la houppe de soie rouge. » Qu’on lise tout le morceau, on y sentira, parmi l’amusement des détails, la mélancolie légère de cette décroissance et de cet insensible effacement du jour dans un fouillis d’objets élégants et brillants qui se noient l’un après l’autre, doucement et silencieusement, dans la nuit.

468. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Mémoires et journal de l’abbé Le Dieu sur la vie et les ouvrages de Bossuet, publiés pour la première fois par M. l’abbé Guettée. — II » pp. 263-279

M. de Meaux donna la sainte communion à Mme de Bourgogne le soir de la Conception, et entendit le nouveau prédicateur la même fête. […] On les voudrait taire, mais puisque Le Dieu nous les a transmis, nous ne pouvons plus les ignorer : Le samedi au soir (23 janvier 1700, Bossuet étant à Versailles), il fut fort parlé de Télémaque.

469. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Souvenirs et correspondance tirés des papiers de Mme Récamier » pp. 303-319

Cette beauté faisant retraite avec les années, — une retraite bien lente —, et se voilant insensiblement, l’esprit avait apparu peu à peu, comme à certains jours, bien avant le soir, l’astre au front d’argent se dessine dans un ciel serein du côté opposé au soleil. […] Je commence cette lettre le mercredi saint au soir, au sortir de la Chapelle Sixtine, après avoir assisté à Ténèbres et entendu chanter le Miserere, Je me souvenais que vous m’aviez parlé de cette belle cérémonie, et j’en étais, à cause de cela, cent fois plus touché.

470. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — III » pp. 174-189

On était au soir, la délibération durait toujours ; on voyait des fenêtres du casin les mouvements de l’ennemi et ses préparatifs pour une bataille. […] Enfin, sur le soir, il parut décidé à la retraite ; il dit à ses généraux qu’ils pouvaient se rendre près de leurs troupes, et que d’ici à une heure ou deux il leur expédierait les ordres pour commencer le mouvement : mais ceux-ci avaient été trop longtemps témoins de cette funeste hésitation pour se persuader que le général en chef persisterait dans le parti qu’il semblait décidé à prendre ; ils se rendirent près de leurs troupes et s’occupèrent plus de dispositions de défense que de retraite.

471. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Souvenirs d’un diplomate. La Pologne (1811-1813), par le baron Bignon. (Suite et fin.) »

« Les dames, écrivait une plume bien informée41, qui se trouvaient en grand nombre à cette séance mémorable, ont pris sur-le-champ la cocarde bleu et rouge et, le soir, ont paru en habit à la polonaise avec ces deux couleurs. […] Singulier mélange, en effet, que cet abbé de Pradt, instruit de tant de choses et qui croyait s’entendre à toutes ; homme d’Église qui l’était si peu, qui savait à fond la théologie, et qui avait à apprendre son catéchisme ; publiciste fécond, fertile en idées, en vues politiques d’avenir, ayant par moments des airs de prophète ; écrivain né des circonstances, romantique et pittoresque s’il en fut ; le roi des brochuriers, toujours le nez au vent, à l’affût de l’à-propos dans les deux mondes, le premier à fulminer contre tout congrès de la vieille Europe ou à préconiser les jeunes républiques à la Bolivar ; alliant bien des feux follets à de vraies lumières ; d’un talent qui n’allait jamais jusqu’au livre, mais qui avait partout des pages ; habile à rendre le jeu des scènes dans les tragi-comédies historiques où il avait assisté, à reproduire l’accent et la physionomie des acteurs, les entretiens rapides, originaux, à saisir au vol les paroles animées sans les amortir, à en trouver lui-même, à créer des alliances de mots qui couraient désormais le monde et qui ne se perdaient plus ; et avec cela oublieux, inconséquent, disparate, et semblant par moments sans mémoire ; sans tact certainement et sans goût ; orateur de salon, jaseur infatigable, abusant de sa verve jusqu’à l’ennui ; s’emparant des gens et ne les lâchant plus, les endoctrinant sur ce qu’ils savaient le mieux ; homme à entreprendre Ouvrard sur les finances, Jomini sur la stratégie, tenant tout un soir, chez Mme de Staël, le duc de Wellington sur la tactique militaire et la lui enseignant ; dérogeant à tout instant à sa dignité, à son caractère ecclésiastique, avec lequel la plupart de ses défauts ou, si l’on aime mieux, de ses qualités se trouvaient dans un désaccord criant ; un vrai Mirabeau-Scapin, pour parler comme lui, un archevêque Turpin et Turlupin.

472. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires du comte Beugnot »

Lui-même, érudit fort distingué, mais encore plus causeur spirituel, il se plaisait à raconter des scènes de la vie de son père, des épisodes dramatiques et comiques du Conseil d’État, des malices sur quelques contemporains du Consulat et de l’Empire, par exemple sur François de Neufchâteau, qui, ayant à faire le récit du 19 brumaire, le soir même, devant des auditeurs avides et impatients, ne parvenait pas à sortir des parenthèses ni des embarras que sa voiture avait rencontrés dans sa route vers Saint-Cloud : on lui demandait les grands résultats, les résolutions prises, et il vous expliquait, à n’en pas finir, comment il avait eu toutes les peines du monde à passer. […] Si l’auteur, sous le coup d’un mandat d’arrêt, va se promener au Jardin des Plantes, et s’il monte au labyrinthe, il jette de là un regard sur Paris, « cette magnifique cité que la tyrannie couvrait de son crêpe. » Il nous décrit du haut de ce belvédère toutes ses pensées, ses réflexions mélancoliques, et il prolonge jusqu’au soir « le rêve du sentiment.

473. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Léonard »

Et plus loin, en des vers d’ailleurs bien élégants, le poëte ajoute : Mais ces riches climats fleurissent en silence ; Jamais un chantre ailé n’y porte sa cadence : Ils n’ont point Philomèle et ses accents si doux, Qui des plaisirs du soir rendent le jour jaloux. […] Il ne vit plus désormais, il attend l’heure du soir, la fin de la journée, le moment de la réunion future avec ce qu’il a perdu.

474. (1894) Propos de littérature « Chapitre III » pp. 50-68

Moréas et Gustave Kahn, mais riche et sapide autant qu’elles, sa vivante variété eût, je crois, séduit le grand Théophile Gautier : Le pays était plantureux et riche en vins, Gai du soleil qui dans la mer se mire Et le port Était vivant matin et soir, De la foule bigarrée ; Toute l’heure de marée Était de bon espoir, D’accueils, d’adieux : Il entrait des navires de tous les horizons, De Carthage, de Rome et d’Orient Et du Nord et de l’Ouest mystérieux ; Il partait des vaisseaux vers tous les cieux — Avec leurs voiles claires, comme en riant. […] Lisez celui-ci : Avec la double odeur de la chair et du soir Et les souffles épars comme des chevelures Voici luire des torches hautes au bois noir.

475. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre X. La commedia dell’arte en France pendant la jeunesse de Molière » pp. 160-190

Son costume est entièrement noir depuis la toque jusqu’aux nœuds des souliers ; d’où la phrase de Molière dans Le Sicilien : « Le ciel s’est habillé ce soir en Scaramouche. » 16. — Scaramuccia. […] Chez le grand Scaramouche il va soir et matin.

476. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXII » pp. 355-377

Mais nous faisons une vie qui m’ôte toute espérance de pouvoir vous donner un rendez-vous sûr, car madame rie Montespan sort depuis le matin jusqu’au soir, et n’a gardé la chambre qu’un seul jour, et je n’en fus pas avertie. […] On y joue tour à tour : on y mange : il y a des concerts tous les soirs.

477. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XIX. Mme Louise Colet »

On n’a pas oublié non plus le crachat dont un soir, en plein salon, — elle étoila le visage surpris du capitaine d’Arpentigny parce qu’il avait osé vanter devant elle Mme George Sand. […] Elle n’est encore ici que la toute petite Révoil d’avant le mariage, la petite pensionnaire au corsage plat, aux bras plats, à l’esprit plat, au style plat, à toutes les platitudes, et on ne devinerait jamais que de ce vibrion — de cet insignifiant infusoire sortirait un jour cette organisation turbulente, imprécatoire et spumeuse qui a fait sur tout ce qui fut longtemps sacré parmi les hommes, la Religion, l’Église, la Papauté, les Rois, les anciennes Mœurs, ce qu’elle fit un soir sur la figure du capitaine d’Arpentigny… Tous les ouvrages de cette perdue d’esprit sont là pour l’attester.

478. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires de madame de Genlis sur le dix-huitième siècle et la Révolution française, depuis 1756 jusqu’à nos jours — I »

Nul n’est averti ; hier encore nous l’avons vue… Elle a fui mystérieusement du soir au matin, elle est à Mantes.

479. (1875) Premiers lundis. Tome III « Lafon-Labatut : Poésies »

Un soir d’hiver arrivèrent à pied, dans le village, un homme et un enfant épuisés de fatigue ; ils vinrent frapper à la porte de M. 

480. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bataille, Henry (1872-1922) »

Cela a l’air d’être né ainsi, tout fait, un soir, sur des lèvres, près du cimetière et de l’église d’un village de Bretagne, parmi l’odeur âcre des ajoncs écrasés, au son des cloches tristes, sous les yeux surpris des filles aux coiffes blanches.

481. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — V »

« Le soir de Wagram, a le droit de dire un Bonaparte, j’étais si fatigué que je suis tombé de sommeil, que j’ai dormi couché tout de mon long dans un sillon : j’étais la semence d’une admirable moisson de dévouements, de belles volontés, d’un lyrisme jusqu’alors inconnu… »‌ En vérité, la vie morale embrasse plus de choses que cet homme savant et vénérable n’en reproduisait en lui.

482. (1881) Études sur la littérature française moderne et contemporaine

Le soir même du 14, plusieurs heures avant que Beaumarchais fit sa déposition à Nuremberg, il a fait seul et spontanément la sienne à Neustadt. […]   Acte reçu à Neustadt, le 14 août 1774, après six heures du soir. […] C’est le 25 au soir que l’éruption s’est déclarée. […] Fabrice était un perruquier devenu poète, que son ami Gil Blas, après une longue absence, retrouva un soir dans un cabaret de Madrid et auquel il demanda de lui communiquer une de ses productions. […] » — Le même soir, il sortit à la nuit tombante, et vendit un diamant que lui avait donné sa mère.

483. (1893) Impressions de théâtre. Septième série

 » « Le soir, ses deux fils vinrent. […] Mais que sa Conjuration d’Amboise nous a donc paru cruelle l’autre soir ! […] Et si elle a succombé, c’est pendant un voyage de Ledoux, un soir qu’elle était lasse. […] Il vient tous les soirs, muni de son falot, passer la veillée dans la grange des Muselle. […] J’ai connu l’autre soir, je l’avoue, cette joie suprême.

484. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (4e partie) » pp. 81-143

Le soir une vapeur de rêverie se dégageait du jardin et l’enveloppait ; un linceul de brume, une tristesse céleste et calme, le couvraient ; l’odeur si enivrante des chèvrefeuilles et des liserons en sortait de toute part comme un poison exquis et subtil ; on entendait les derniers appels des grimpereaux et des bergeronnettes s’assoupissant sous les branchages ; on y sentait cette intimité sacrée de l’oiseau et de l’arbre. […] L’autre soir j’étais derrière vous, vous vous êtes retournée, je me suis enfui. […] XXX L’histoire des enfants perdus, soit dans la forêt, mangeant des mûres, soit dans les rues d’une grande capitale, et recueillis par la pitié d’un vagabond dans son nid d’un soir, dans un monument en charpente d’Égypte ou de Paris, est toujours une des misères les plus apitoyantes de l’humanité.

485. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIVe entretien. Mélanges »

J’allai de nouveau chez cette intermédiaire, si heureusement trouvée, pour lui faire part du désir que j’avais de dîner confidentiellement avec M. de Lamennais chez elle un soir de la semaine. […] Genoude reçut le soir même la lettre qui le faisait noble, et le mariage n’éprouva plus d’obstacle de ce côté. […] — Rien, me répondit-il en pleurant, excepté un pauvre jeune homme, le cadet de ses fils, à qui ma femme et moi nous donnons la soupe tous les soirs, et que nous vêtons de temps en temps pour lui donner le courage de porter son nom sous ses haillons dans les rues de Paris. — Et que fait-il ?

486. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre quinzième. »

« Je vous envoie cette relation, écrit-elle à sa fille, à cinq heures du soir. […] M. de Coulanges viendrait ce soir qui la voudrait copier, et je hais cela comme la mort182. » Ne la croyons qu’à demi. […] Aussi, pour le rang à donner aux deux recueils, je m’en rapporte plus volontiers à un autre juge excellent des ouvrages de l’esprit, Royer-Collard, lequel, sur la fin de sa belle vie, lisait chaque soir, après une page de Tacite, quelque lettre de Mme de Sévigné.

487. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre septième. L’introduction des idées philosophiques et sociales dans la poésie. »

Ce soir, dans le silence de la nuit, j’entends une petite voix qui sort des rideaux blancs du berceau. […] Elle éteint chaque soir celle qui l’a guidée ; Elle en allume une autre à l’immortel flambeau : Comme ces morts vêtus de leur parure immonde, Les générations emportent de ce monde    Leurs vêtements dans le tombeau. […] Et moins qu’un vestige lui suffit, et il prie : Console-moi ce soir, je me meurs d’espérance J’ai besoin de prier pour vivre jusqu’au jour.

488. (1898) Les personnages de roman pp. 39-76

J’imaginais un vieux moine disant, de longues années après, un soir, à l’heure où toute la ville est rose, et où monte dans l’esprit la pensée du jour fini et celle du passé lointain : « J’étais de ce conseil ; j’y entendis parler don Christophe et, pour la joie de ma vie, je fus de ceux qui l’encouragèrent à partir sur les caravelles. » Hélas ! […] Un soir, j’ai prié Dieu, lui, le grand artiste, de me rendre capable de faire le travail qu’il veut que je fasse. […] Et c’est le soir.

489. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XIII. »

Il s’est au loin étendu ; il voit accompli le soir ce qu’il a projeté au lever du jour ; le soir, les grandes choses ; les moindres, à l’instant où il les conçoit. […] Sur le nombre, douze sont choisies de noble race, gloire de Lacédémone, qui le soir, dans la chambre nuptiale, chanteront l’épithalame et mèneront les chœurs de danse.

490. (1897) Aspects pp. -215

D’Axa est quelque peu « passé à tabac », puis enfermé avec plus de soin et transféré le soir au Dépôt. […] Les massifs d’arbres riverains, tordant vers le ciel leurs bras dépouillés, pleurent tout bas dans le vent du soir. […] Edmond Pilon : Les Poèmes de mes soirs (chez Vanier) […] Le soir tombait ; la lutte était ardente et noire. […] Mais l’homme, continûment, traverse de l’aube au soir, d’avril en mars.

491. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Académie française — Réception de M. Émile Augier » pp. 317-321

Émile Augier Jeudi soir, 28 janvier 18587.

492. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XII » pp. 47-52

Madame de Girardin, ayant rencontré l’autre soir M.

493. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section III. Des ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre premier. Que personne à l’avance ne redoute assez le malheur. »

On se sent saisi par une seule idée, comme sous la griffe d’un monstre tout puissant, on contraint sa pensée, sans pouvoir la distraire ; il y a un travail dans l’action de vivre qui ne laisse pas un moment de repos ; le soir est la seule attente de tout le jour, le réveil est un coup douloureux qui vous représente chaque matin votre malheur avec l’effet de la surprise.

494. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Note III. Sur l’accélération du jeu des cellules corticales » pp. 400-404

Bref, nous arrivâmes le soir dans une hôtellerie ; nous y passâmes la nuit.

495. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — K — Karr, Alphonse (1808-1890) »

. — Vendredi soir (1835). — Le Chemin le plus court (1836). — Geneviève (1838). — Les Paysans illustres (1838). — Civerley (1838). — Clotilde (1839). — Les Guêpes (1839-1849). — Am. 

496. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Art français » pp. 243-257

Le soir où il écrivait cela, Gavarni avait près de lui une maîtresse d’ancienne date ; et, pour se tenir compagnie, il avait tiré d’un tiroir secret un petit livre rouge, à coins usés, usés, usés.

497. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface de « Marie Tudor » (1833) »

Quant à l’auteur de ce drame, sûr de l’avenir qui est au progrès, certain qu’à défaut de talent sa persévérance lui sera comptée un jour, il attache un regard serein, confiant et tranquille sur la foule qui, chaque soir, entoure cette œuvre si incomplète de tant de curiosité, d’anxiété et d’attention.

498. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre III. Partie historique de la Poésie descriptive chez les Modernes. »

Mais le soleil s’est levé, et déjà les bêtes sauvages se sont retirées…… L’homme alors sort pour le travail du jour, et accomplit son œuvre jusqu’au soir…… ……………………………………………………………………………………………… Comme elle est vaste, cette mer qui étend au loin ses bras spacieux !

499. (1896) Impressions de théâtre. Neuvième série

Donne, ce soir, un souper d’adieu à tes amis. » … Après ces scènes de comédie railleuse, tout à coup éclate un drame violent, brutal, — et aussi, par endroits, d’un arrangement ingénieux. […] Donc, Edouard arrive, un triste soir d’hiver, dans la villa solitaire où s’est réfugié le pauvre fils de fou. […] J’ai tenu à citer le texte même, puisqu’il paraît qu’une partie des spectateurs de l’autre soir n’y avaient pas fait attention ou qu’ils avaient des oreilles pour ne pas entendre. […] Tout le monde a remarqué, l’autre soir, que M.  […] J’étais donc un peu gêné l’autre soir.

500. (1868) Curiosités esthétiques « I. Salon de 1845 » pp. 1-76

Toutes ses femmes coquettes et doucement sensuelles étaient les idéalisations de celles que l’on avait vues et désirées le soir dans les concerts, aux Bouffes, à l’Opéra ou dans les grands salons. […] Gleyre Il avait volé le cœur du public sentimental avec le tableau du Soir. — Tant qu’il ne s’agissait que de peindre des femmes solfiant de la musique romantique dans un bateau, ça allait ; — de même qu’un pauvre opéra triomphe de sa musique à l’aide des objets décolletés ou plutôt déculottés et agréables à voir ; — mais cette année, M.  […] Mme Céleste Pensotti Le tableau de madame Céleste Pensotti s’appelle Rêverie du soir. […] Français est aussi un paysagiste de premier mérite — d’un mérite analogue à Corot, et que nous appellerions volontiers l’amour de la nature — mais c’est déjà moins naïf, plus rusé — cela sent beaucoup plus son peintre — aussi est-ce plus facile à comprendre. — Le soir est d’une belle couleur.

501. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Fénelon. Sa correspondance spirituelle et politique. — I. » pp. 19-35

Depuis que la nature physique est plus connue et que la science en observe et en expose successivement les lois, il serait à craindre que la pensée de Dieu, même auprès de ceux qui ne cessent de l’admettre et de s’incliner devant elle, ne reculât en quelque sorte aux confins de l’univers et ne s’éloignât trop de l’homme, jusqu’à ne plus être à son usage et à sa portée ; il serait à craindre que ce Dieu, tel qu’on a reproché à Bolingbroke de le vouloir établir, Dieu plus puissant que bon, plus souverainement imposant que présent et que juste, Dieu qu’on admet en un mot, mais qu’on n’adore point et qu’on ne prie point, il serait à craindre que ce Dieu-là ne prît place, et seulement pour la forme, dans les esprits, si la pensée chrétienne ne veillait tout à côté, si le Dieu du Pater ne cessait d’être présent matin et soir à chaque cœur, et si la prière ne maintenait cette communication invisible et continuelle de notre esprit borné avec l’Esprit qui régit tout. […] Il y a une foule de petits soucis voltigeants qui viennent chaque matin à votre réveil, et qui ne vous quittent plus jusqu’au soir ; ils se relayent pour vous agiter.

502. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Eugénie de Guérin, Reliquiae, publié par Jules Barbey d’Aurevilly et G.-S. Trébutien, Caen, imprimerie de Hardel, 1855, 1 vol. in-18, imprimé à petit nombre ; ne se vend pas. » pp. 331-247

Huit soirs ce soir que tu reposes là-bas, à Andillac, dans ton lit de terre.

503. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier. »

… « La petite Cour allait tous les soirs au spectacle et voyait peu de monde ; aucun Anglais n’y allait, et les Romains sont rarement amusants. […] Par malheur, ces renseignements nous manquent. » — Mais vous êtes bien curieux, en vérité, mon cher biographe ; ces sortes de renseignements de chambre à coucher et d’alcôve sont difficiles à constater, et quand il éclate un soir des cris tels que ceux qu’on vient d’entendre, c’est déjà bien suffisant pour nous avertir de tout ce qui a dû se répéter souvent, et qu’on ne sait pas.

504. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Préface »

. — À défaut du Temps, il fût allé au Journal de Paris, qu’il se faisait lire tous les soirs en dilettante et avec une prédilection marquée. […] » était son premier mot quand on lui apportait les journaux du soir ; et qu’on dise encore aujourd’hui que M. 

505. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Racine — II »

Diana Vernon à cheval, franchissant les barrières et se perdant dans le taillis ; Juliette au balcon tendant les bras à Roméo ; l’ingénue Agnès à son balcon aussi, et rendant à son amant salut pour salut du matin au soir ; la moqueuse Suzanne et la belle comtesse habillant le page ; que sais-je ? […] Comme un cœur pur de jeune fille Qui coule et déborde en secret, A chaque peine de famille, Au moindre bonheur, il pleurait ; A voir pleurer sa fille aînée ; A voir sa table couronnée D’enfants, et lui-même au déclin ; A sentir les inquiétudes De père, tout causant d’études, Les soirs d’hiver, avec Rollin ; Ou si dans la sainte patrie, Berceau de ses rêves touchants, Il s’égarait par la prairie Au fond de Port-Royal-des-Champs ; S’il revoyait du cloître austère Les longs murs, l’étang solitaire, Il pleurait comme un exilé ; Pour lui, pleurer avait des charmes.

506. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Jean-Baptiste Rousseau »

Le café n’avait pas passé de mode, malgré la prédiction de madame de Sévigné ; bien au contraire, il devait exercer une assez grande influence sur le xviiie  siècle, sur cette époque si vive et si hardie, nerveuse, irritable, toute de saillies, de conversations, de verve artificielle, d’enthousiasme après quatre heures du soir ; j’en prends à témoin Voltaire et son amour du Moka. […] Au lieu de la feuille séchée, le texte donne : « Mon pèlerinage est fini ; il a été emporté comme la tente du pasteur. » Qu’est devenue cette tente du désert, disparue du soir au matin, et si pareille à la vie ?

507. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Millevoye »

Il chante, il s’égaye, il soupire, et, dans son gémissement s’en va, un soir, au vent d’automne, comme une de ces feuilles dont la chute est l’objet de sa plus douce plainte ; il incline la tête, comme fait la marguerite coupée par la charrue, ou le pavot surchargé par la pluie. […] Parmi les romances de Millevoye, les amateurs distinguent, pour la tendresse du coloris et de l’expression, celle de Morgane (dans le poëme de Charlemagne) ; la fée y rappelle au chevalier la bonheur du premier soir : L’anneau d’azur du serment fut le gage : Le jour tomba ; l’astre mystérieux Vint argenter les ombres du bocage, Et l’univers disparut à nos yeux.

508. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Marie Stuart, par M. Mignet. (2 vol. in-8º. — Paulin, 1851.) » pp. 409-426

David Riccio fut saisi par les conjurés un soir au souper (9 mars 1566), dans le cabinet de Marie, Darnley étant présent, et de là entraîné et poignardé dans la chambre voisine. […] Que reprocher d’ailleurs à celle qui, après dix-neuf ans de supplice et de torture morale, dans la nuit qui précéda sa mort, chercha dans la vie des saints, que ses filles avaient coutume de lui lire tous les soirs, un grand coupable à qui Dieu eût pardonné ?

509. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « J. K. Huysmans » pp. 186-212

Tout y apparaît, depuis l’appartement de garçon artiste où André s’installe après sa mésaventure conjugale, jusqu’à la place du Carrousel où il va promener sa nostalgie féminine et comtempler « le merveilleux et terrible ciel qui s’étendait au soleil couchant par de là les feuillages noirs des Tuileries…, les ruines dont les masses violettes se dressaient trouées sur les flammes cramoisies des nuages » ; depuis le brouhaha d’un café du Palais-Royal le soir, jusqu’à ces taches lumineuses que la nuit, les fenêtres éclairées, dans les maisons noires font passer devant le voyageur d’impériale. Ce livre avec lequel on pourra toujours restituer la physionomie exacte du Paris actuel, nous donne l’aspect intime de la rue le matin quand les cafés s’ouvrent sur le passage des ouvriers et des filles découchées la nuit au moment des rentrées tardives, le soir à l’heure discrète ou des messieurs bien mis enboitent le pas d’ouvrières en cheveux, au crépuscule, où déserte et morte, elle sèche d’une averse sous la flambée jaune du soleil couchant ; il nous donne les boutiques, les ateliers, le garni d’un peintre, les brasseries, les restaurants, l’appartement d’une fille, celui d’un employé, tout le dedans et le dehors de la capitale du monde moderne.

510. (1903) Considérations sur quelques écoles poétiques contemporaines pp. 3-31

Et quand, solennel, le soir Des chênes noirs tombera, Voix de notre désespoir, Le rossignol chantera. […] Les vers suivants, d’ailleurs, ne sont-ils pas bien agréables en dépit de l’hiatus qu’on y rencontre : Rien n’est charmant le soir, rien n’est doux à entendre Comme le chant d’un pâtre au milieu des troupeaux ?

511. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Académie française — Réception de M. Biot » pp. 306-310

Biot Jeudi soir, 5 février 18575.

512. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « PAUL HUET, Diorama Montesquieu. » pp. 243-248

La veille encore, à cinq heures du soir, cet ami de quarante ans était assis à mon coin du feu, causant, non sans quelque ombre de tristesse, de toutes ces choses qui nous étaient communes et chères, idées d’art et de philosophie sociale, souvenirs du passé, perspectives un peu sombres et voilées de l’avenir.

513. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bornier, Henri de (1825-1901) »

Mais ce vrai triomphe de mardi soir, non, nous ne nous y attendions point.

514. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Ponsard, François (1814-1867) »

Ponsard alla lire sa tragédie tous les soirs !

515. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXVII » pp. 298-304

Elle écrit du matin au soir ; en se couchant elle déchire tout.

516. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Gabriel Ferry »

Pour échapper au mortel ennui de cette civilisation hypocrite, vaniteuse, âpre au gain, qui est la civilisation américaine, Cooper s’est rejeté à la vie sauvage, et il a été le peintre de ces vieux patriarches des prairies, aussi poétiques que ceux de la Bible ou des Burgraves du désert, dont les forteresses terribles et menaçantes sont un bout de buisson immobile, un carré de hautes herbes qui frissonnent, un lac étincelant dont la surface ne fait pas un pli aux tranquilles rayons du soir.

517. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre ix »

Comment se refuserait-il la douceur de répéter avec la foule, avec les meilleurs, le long des siècles, ce que son cœur lui suggère ce soir : Adveniat regnum tuum, Fiat voluntas tua.‌

518. (1889) Ægri somnia : pensées et caractères

Notre homme voit donc diminuer de jour en jour les visites du soir. […] Il déjeune le matin d’un journal qui calomnie le prince, et soupe le soir d’une brochure qui l’insulte. […] — Dès ce soir, m’écriai-je, c’est impossible ! […] P***; si ce n’est pas ce soir, que ce soit demain. […] P***, et je lui promis que, le lendemain au soir, nous ne serions plus à Paris.

519. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Eugène Gandar »

« Ne semble-t-il pas qu’en changeant chaque soir d’idée, de spectacle, de patrie, qu’en emportant chaque jour quelque chose à des objets, à des êtres auxquels nous laissons aussi une partie de ce que nous sommes, nous devrions désapprendre et les affections profondes et les grandes pensées qui inspirent toute une vie ? […] Il était naturellement le contraire de ces professeurs improvisés qui ne doutent de rien, qui comptent sur l’inspiration du moment, qui apprennent le malin ce qu’ils débiteront le soir, et qui sauront peut-être à la seconde ou à la troisième année ce qu’ils ont commencé à enseigner dès la première. […] Dans une lettre de Londres, du 25 septembre 1857, adressée à Mme Gandar, dans un post-scriptum écrit à onze heures du soir, il disait : « Je viens, à l’instant même, de voir représenter Richard III. […] J’aurais mieux aimé que tu entendisses hier soir cette spirituelle comédie de l’École de la Médisance, très joliment jouée à Hay-Market. […] Mercredi soir une étrange peur m’a pris, j’avais dépassé la limite où il faut rester quand on ne veut pas balbutier en récitant une leçon mal apprise.

520. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre sixième. Le roman psychologique et sociologique. »

Voici, par exemple, l’original de l’interminable promenade de Gervaise sur le trottoir des boulevards dans la neige : Vers les premiers jours de janvier 1823, un soir qu’il avait neigé, une créature rôdait en robe de bal et toute décolletée avec des fleurs sur la tète devant la vitre du café des officiers… Chaque fois que cette femme passait (devant un des élégants de l’endroit), il lui jetait, avec une bouffée de la fumée de son cigare, quelque apostrophe qu’il croyait spirituelle et gaie, comme : — Que tu es laide ! […] Elle revenait à sept heures du soir, et se couchait bien vite ; elle était si fatiguée Son mari la battait… C’était une brave fille qui n’allait pas au bal, qui était bien tranquille. […] A midi mille papillons blancs s’y réfugiaient, et c’était un spectacle divin de voir là tourbillonner on flocons dans l’ombre cette neige vivante de l’été… Le soir, une vapeur se dégageait du jardin et l’enveloppait ; l’odeur si enivrante des chèvrefeuilles et des liserons en sortait de toute part comme un poison exquis et subtil ; on entendait les derniers appels des grimpereaux et des bergeronnettes s’assoupissant sous les branchages… C’était un jardin fermé, mais une nature acre, riche, voluptueuse et odorante . […] Chez les romantiques, l’idéalisme et le réalisme sont encore si peu fondus que que, lorsque celui-ci apparaît, à tout moment il voici un détonne et fait dissonance ; voici un exemple : invincible que donne le soir, Cosette songeait ; une tristesse la gagnait peu à peu, celle tristesse invincible que donne le soir et qui vient peut-être, qui sait ?

521. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre dixième. Le style, comme moyen d’expression et instrument de sympathie. »

Attendre tous les soirs une robe qui passe,           Baiser un gant jeté. […] Ce genre d’images est voisin de celles qui personnifient et font vivre : « Les affections profondes ressemblent aux honnêtes femmes ; elles ont peur d’être découvertes et passent dans la vie les yeux baissés269. » Les grands chars gémissants qui reviennent le soir . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . […] Voici un échantillon quelconque de la première : Sur les champs gris, sur le vallon, sur le pré, Le soir tombait ; mais le grand mont, empourpré, Seul survivant au jour qui meurt, semble encore Dans cette nuit sentir passer une aurore. […] Voyez plutôt l’image qui suit, une des plus splendides de Victor Hugo : C’est naturellement que les monts sont fidèles Et purs, ayant la forme âpre des citadelles, Ayant reçu de Dieu des créneaux où, le soir, L’homme peut, d’embrasure en embrasure voir Etinceler le fer de lance des étoiles. […]     Par une soirée sanglante de cette fin de siècle,          Oui, un soir, le peuple lâché, débridé,          Galoperait ainsi sur les chemins ; Et il ruissellerait du sang des bourgeois,     Il promènerait des têtes, Il sèmerait l’or des coffres éventrés.

522. (1894) La bataille littéraire. Sixième série (1891-1892) pp. 1-368

C’est le cas de la mère de l’assassin Lebiez, à Tours, disant subitement un soir à son mari, en parlant de son fils habitant alors Paris, où il étudiait la médecine, comme tu sais : « Ah ! […] Le costumier dit : « Pas d’argent, pas de costumes », mais, le soir, bien qu’il n’ait pas reçu un sou, tout le monde est habillé ; pourquoi ? […] À propos de Salammbô il écrit à Ernest Feydeau : Samedi soir. […] Ce qui ne m’empêche pas de hurler du matin au soir à me casser la poitrine. […] Idem pour le rudiment et l’allemand au soir.

523. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XLV » pp. 176-182

Le soir on jouait Tartufe et le Malade imaginaire à tous les théâtres ; c’était une fête populaire.

524. (1874) Premiers lundis. Tome I « Bonaparte et les Grecs, par Madame Louise SW.-Belloc. »

La pièce suivante nous a paru l’une des plus heureusement reproduites ; c’est le Tombeau du Klephte : Le soleil se couchait ; Dimas parle, il ordonne : — « Enfants, apportez l’eau pour le repas du soir.

525. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bergerat, Émile (1845-1923) »

Il chroniquait à l’Événement, au Soir, au Bien public et dans cinq ou six autres feuilles, quand il commença au Voltaire la campagne de l’Homme masqué.

526. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Préface » pp. -

le soir même, en rentrant, ou au plus tard, le lendemain matin.

527. (1859) Critique. Portraits et caractères contemporains

M’en voulez-vous beaucoup pour avoir loué les Heures du soir quelque part ? […] Qui voudrait se baisser pour ramasser au coin de la borne, où il versait sa hotte chaque soir, le trop-plein de ce bouffon qui avait déclaré une guerre à mort au rossignol ? […] « Je le perdis le 21 septembre 1833, à onze heures du soir. […] À peine, de temps à autre, le soir venu, vous le rencontriez dans quelque allée du bois de Boulogne aux environs de Passy, où il occupait une masure. […] Sur la tête de la statue, le vent du soir agitait une couronne d’immortelles.

528. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « DÉSAUGIERS. » pp. 39-77

Comme vaudevilliste et auteur dramatique, il prit rang vers 1805, et ne cessa, durant les vingt années qui suivirent, d’attester chaque soir sa présence par cette quantité de folies, de parades, de parodies plaisantes dont les représentations se comptaient par centaines, et qui fournissaient aux Brunet et aux Potier des types d’une facétie incomparable : M. […] J’ai parlé de ses belles et grandes chansons ; mais il y a celles de genre, les miniatures, le Palais-Royal d’alors, les rues d’alors, Paris à cinq heures du matin, à cinq heures du soir. […] — Le soir, en rentrant du théâtre, à minuit, il se mettait à lire les pièces présentées, avant de les faire lire au comité.

529. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Quelques documents inédits sur André Chénier »

On sait le joli fragment : Fille du vieux pasteur, qui, d’une main agile, Le soir remplis de lait trente vases d’argile. […] A la fin de l’idylle intitulée la Liberté, entre le chevrier et le berger, on lit sur le manuscrit : Commencée le vendredi au soir 10, et finie le dimanche au soir 12 mars 1787.

530. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « George Farcy »

Chaque matin, l’un allait à ses croquis, l’autre à ses rêves, et ils se retrouvaient le soir. […] Il y a un calme, une douceur, une tristesse dans tout ce qui vous environne, qui pénètre par tous les sens ; et cette douceur, cette tristesse tombent vraiment goutte à goutte sur le cœur, comme la fraîcheur du soir. […] Un soir, en nous parlant de Naple et de ses grèves, Beaux pays enchantés où se plaisaient tes rêves, Ta bouche eut un instant la douceur de Platon ; Tes amis souriaient, … lorsque, changeant de ton, Tu devins brusque et sombre, et te mordis la lèvre, Fantasque, impatient, rétif comme la chèvre !

531. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXIVe entretien. Chateaubriand, (suite.) »

Voulant les activer par sa présence, il y conduisit un soir madame de Chateaubriand, retrouvée à Paris. […] Pendant qu’on se fusillait dans les rues de la capitale, le roi, retiré à Saint-Cloud, continuait sa partie de chasse le matin et sa partie de whist le soir, comme si les anges s’étaient chargés de le défendre. […] L’Abbaye-au-Bois, séjour de madame Récamier, devint deux fois par jour le salon de M. de Chateaubriand : le matin, en tête-à-tête ; le soir, avec un petit nombre d’amis du grand homme.

532. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 septembre 1886. »

Nous donnerons quelque idée du wagnérisme à Munich en publiant une semaine wagnérienne de la Lœwenbraeu-Keller ; parmi les trois ou quatre grandes brasseries ou cafés qui donnent chaque soir, à Munich, des concerts, nous avons pris les programmes de la brasserie de Lœwenbraeu, jour par jour, pendant la semaine que nous avons passée à Munich ; les programmes des autres maisons ressemblent à ceux là. […] Notes historiques et esthétiques — le motif de réminiscence Meminisse juvat Un soir du printemps passé, notre directeur, de passage à Berlin, me demanda pour sa chère Revue Wagnérienne une réduction de la minutieuse et longue étude que je viens de publier dans la Revue de Bayrteuh55 sur le « Motif de réminiscence » avant Wagner. […] Elle fait une dernière apparition, une trentaine d’années plus tard, au commencement de la Prise de Troie, dans l’Allégro : « Quitte-moi dès ce soir » de l’air de Chorèbe dans la scène avec Cassandre ; voir l’intéressante interprétation de ce passage dans le volume d’Alfred Ernst ; L’œuvre dramatique de Berlioz (Calmann Lévy, 1884) [NdA] 59.

533. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Romans et nouvelles » pp. 3-80

Depuis vingt-cinq ans, elle nous bordait tous les soirs dans nos lits, et tous les soirs c’étaient les mêmes plaisanteries sur sa laideur et la disgrâce de son physique… Chagrins, joies, elle les partageait avec nous. […] ……………………………………………………………………………………………… Au milieu du dîner rendu tout triste par la causerie qui va et revient sur la morte, Maria, qui est venue dîner ce soir, après deux ou trois coups nerveux du bout de ses doigts sur le crêpage de ses blonds cheveux bouffants, s’écrie : « Mes amis, tant que la pauvre fille a vécu, j’ai gardé le secret professionnel de mon métier… Mais maintenant qu’elle est en terre, il faut que vous sachiez la vérité. » Et nous apprenons sur la malheureuse des choses qui nous coupent l’appétit, en nous mettant dans la bouche l’amertume acide d’un fruit coupé avec un couteau d’acier.

534. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Notes et éclaircissements. [Œuvres complètes, tome XIII] »

» ——— L’auteur d’une Épître à M. de Châteaubriand, publiée en 1809, avait placé dans ses vers un tableau du siècle de Louis-le-Grand, où l’on reconnaîtra une imitation de ce passage : Comme on voit le soleil, disait-il, Comme on voit le soleil, ce monarque des mondes, À l’approche du soir s’incliner vers les ondes, Des forêts et des monts colorer le penchant, Et de ses feux encore embraser le couchant ; Tel Louis, atteignant la vieillesse glacée, Conservoit les débris de sa gloire passée, Et de la royauté déposant le fardeau, Grand par ses souvenirs, descendoit au tombeau. […] IV, chap. 5] Voici ce que Montesquieu écrivait en 1752 à l’abbé de Guasco : « Huart veut faire une nouvelle édition des Lettres Persanes ; mais il y a quelques Juvenilia que je voudrais auparavant retoucher. » Sous ce passage on trouve cette note de l’éditeur : « Il a dit à quelques amis que s’il avait eu à donner actuellement ces Lettres, il en aurait omis quelques-unes dans lesquelles le feu de la jeunesse l’avait transporté ; qu’obligé par son père de passer toute la journée sur le Code, il s’en trouvait le soir si excédé, que pour s’amuser il se mettait à composer une Lettre Persane, et que cela coulait de sa plume sans étude. » (Œuvres de Montesquieu, tom.  […] Son regard suit encor ces pieux Solitaires Errant sous les arceaux de leurs noirs monastères ; Dans la brise du soir elle entend leurs soupirs ; En silence elle écoute, immobile, rêveuse, De l’orgue qui gémit la plainte harmonieuse : — Il lui semble qu’au loin d’invisibles concerts > S’élèvent, emportés dans le vague des airs, Et, de l’autel brisé relevant l’édifice, À l’Éternel encore elle offre un sacrifice.

535. (1833) De la littérature dramatique. Lettre à M. Victor Hugo pp. 5-47

Malheureusement pour moi des applaudissements exagérés, partis de la loge de l’honorable M. de Choiseul, donnèrent au consul beaucoup d’humeur, et dès le soir même il proscrivit l’ouvrage et l’auteur. […] Moi, je crois au contraire que loin de nous avoir fait un public, vous avez complètement défait le nôtre ; public bien respectable dont j’ai longtemps brigué les honorables suffrages ; public qui se composait alors d’une grande partie de la jeunesse instruite, de l’élite de la société, d’un grand nombre d’anciens magistrats, d’artistes, de savants qui le soir régulièrement venaient se délasser de leurs graves travaux et chercher de douces émotions ou égayer leur esprit à nos jeux scéniques. […] Ces cabales devinrent si fortes, si ridicules, qu’un décret de l’empereur força les élèves à rentrer à sept ou huit heures du soir.

536. (1901) Figures et caractères

C’était, d’ordinaire, le mardi soir. […] Il en est une qu’il conta ce soir-là et où je crois qu’il faisait allusion à lui-même. […] Chaque soir il représente à nos yeux ce que nous avons été peut-être aux yeux des autres. […] De celui-là, Stéphane Mallarmé vous parla, un soir, en termes admirables et profonds. […] Je me souviens d’un soir, au crépuscule.

537. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [1] Rapport pp. -218

Et, quand commença de monter le soir de son jour humain, il s’éloigna tout à fait de l’humanité ; dans plus d’éloignement, derrière plus d’épaisseur, il devint plus auguste. […] On s’étonna, on s’éprit, on s’enthousiasma de cette Madame de Montarcy qui rallumait les soirs illustres du romantisme. […] Il me semble que moi-même je me suis assez écarté d’eux pour me ressembler dans les Soirs moroses, dans Hespérus, dans le Soleil de minuit et dans mes petits poèmes d’amour et de modernité. […] Il n’avait point mérité les soirs errants, les gîtes douteux, les jeûnes, les hôpitaux, où elle l’obligea ; et voici — pas autre chose — un poète de plus assassiné par la vertu des sots et l’ingratitude austère des élites. […] Vous est-il arrivé jamais, adolescent encore, de regagner, seul, après quelques verres de champagne, votre logis, le soir, le long de l’allée de printemps, sous la beauté infinie d’un ciel d’étoiles ?

538. (1868) Curiosités esthétiques « V. Salon de 1859 » pp. 245-358

Il n’en pouvait pas nier les singuliers mérites ; mais cet aspect villageois, tout ce petit monde vêtu de velours, de coton, d’indienne et de cotonnade que l’Angelus rassemble le soir sous la voûte de l’église de nos grandes villes, avec ses sabots et ses parapluies, tout voûté par le travail, tout ridé par l’âge, tout parcheminé par la brûlure du chagrin, troublait un peu ses yeux, amoureux, comme ceux d’un bon connaisseur, des beautés élégantes et mondaines. […] À voir cet épanchement majestueux, intarissable, de peinture, il serait facile de deviner l’homme à qui j’entendais dire un soir : « Comme tous ceux de mon âge, j’ai connu plusieurs passions ; mais ce n’est que dans le travail que je me suis senti parfaitement heureux. » Pascal dit que les toges, la pourpre et les panaches ont été très-heureusement inventés pour imposer au vulgaire, pour marquer d’une étiquette ce qui est vraiment respectable ; et cependant les distinctions officielles dont Delacroix a été l’objet n’ont pas fait taire l’ignorance. […] La simplicité de regard et d’attitude s’accorde heureusement avec cette couleur chaude et mollement dorée qui me semble faite pour traduire les douces pensées du soir. […] La blancheur de la neige fait un contraste agréable avec l’incendie du soir qui s’éteint lentement derrière les innombrables mâtures de la forêt sans feuilles. […] C’est l’impression glorieuse et mélancolique du soir descendant sur la cité sainte, un soir solennel, traversé de bandes pourprées, pompeux et ardent comme la religion romaine.

539. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIe entretien. Vie et œuvres de Pétrarque » pp. 2-79

Je garde le silence depuis le matin jusqu’au soir, n’ayant personne à qui parler ; les paysans, uniquement occupés à cultiver leurs vignes, leurs vergers, ou à tendre leurs filets dans la Sorgue, ne connaissent ni la conversation ni les commerces de la vie. […] « Je m’y tiens à midi ; le matin je vais sur les collines plus hautes ; le soir dans les prés ou dans le voisinage de la fontaine de Vaucluse, ou dans ce petit jardin dans l’île en bas de la grotte, à l’ombre du rocher au milieu des eaux. […] Le même jour, à la dixième heure, c’est-à-dire vers quatre heures après midi, je vis arriver un courrier m’apportant une lettre du chancelier de l’Université, Robert de Bardy, qui me conjurait de donner la préférence à la ville de Paris pour y recevoir la couronne de gloire. « Décidez pour moi », écrivit-il le même jour au soir à son patron et à son ami le cardinal Colonna ; vous êtes mon conseil, mon appui, mon ami, ma gloire !  […] « “Je suis celle qui te donna tant d’angoisses ici-bas, celle qui remplit sa journée avant le soir.

540. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXVIIIe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Le drame de Faust par Goethe » pp. 81-160

dit Méphistophélès, je ferai plus : elle est maintenant sortie de sa demeure, je vais t’introduire dans sa chambre ; là tu pourras tout seul te repaître dans l’atmosphère qu’elle habite en paix, atmosphère d’espérance et d’illusion. » XXXII La scène change ; c’est le soir du même jour. […] Il semble frappé de respect à la vue de Marguerite étincelante de bijoux ; il raconte à la voisine que son mari absent est mort à Padoue, laissant un trésor, et comment il peut lui amener un témoin de sa mort, le soir, dans son petit jardin derrière la maison, pourvu que la charmante Marguerite s’y trouve aussi à la nuit tombante. […] Notre ménage est petit, encore faut-il s’en occuper ; il faut faire le feu, préparer les aliments, balayer, tricoter et coudre, et courir ici et le soir et le matin. […] Encore si je dormais seule, je laisserais bien volontiers pour toi les verrous ouverts ce soir ; mais ma mère a le sommeil léger, et, si elle nous surprenait, j’en mourrais sur la place.

541. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIe entretien. Balzac et ses œuvres (1re partie) » pp. 273-352

« Un jour qu’on lisait dans un journal un article sur un centenaire (article qu’on ne passait pas, comme on peut croire), contre son habitude, il interrompit le lecteur pour dire avec enthousiasme : « — Celui-là a vécu sagement et n’a pas gaspillé ses forces en toute sorte d’excès, comme le fait l’imprudente jeunesse… « Il se trouva que ce sage se grisait souvent, au contraire, et soupait tous les soirs, une des plus grandes énormités que l’on pût commettre contre sa santé (selon mon père). […] « Notre grand-mère aimait à raconter les faits et gestes de son petit-fils chez elle, et répétait volontiers cette petite scène : « Un soir qu’elle avait fait venir pour lui la lanterne magique, Honoré n’apercevant pas parmi les spectateurs son ami Mouche, se lève en criant d’un ton d’autorité : “Attendez ! […] « Il est à présumer que ses amis se séparèrent, ce soir-là, en déplorant entre eux l’aveuglement paternel… « Ma mère, moins confiante que son mari, pensa qu’un peu de misère ramènerait promptement Honoré à la soumission. […] ils vendent tout le jour, comptent le soir leur gain, se délectent de temps à autre à quelque affreux mélodrame, et les voilà heureux !

542. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIe entretien. Ossian fils de Fingal, (suite) »

Il paraît calme comme le rayon du soir qui luit au travers des nuages sur la paisible vallée de Cona. […] Au matin, mon premier regard embrassait les mers ; le soir, mon dernier coup d’œil était sur les vagues. […] Mais il s’est couché avant le soir pour ne plus se lever. […] Les vents orageux du jour se taisent ; le bruit du torrent semble s’être éloigné ; les vagues apaisées rampent au pied du rocher ; les moucherons du soir, rapidement portés sur leurs ailes légères, remplissent de leurs bourdonnements le silence des airs.

543. (1894) Textes critiques

De Chaudet (ordre alphabétique car, fors des connus, nul nom ne saille, et ceux-là par habitude on en parle moins) le Champ de Blé Noir, par un brûlant soir d’orage ; les cônes du blé couvent le feu des charbonniers. […] Des Néo-impressionnistes : l’Air du Soir de Cross ; — des Signac ; de la Rochefoucault, le portrait d’Erik Satie. — Des Luce.‌ […] Léger transcrit très vraisemblablement l’évolution d’un « guerrier » primate de ces temps bourgeois et évolutifs depuis une date vétuste, chez qui deux siècles de progrès et de civilisation (dont le nôtre, ça se passe vers 2000) ont « déterminé » la supériorité de l’esprit ; que son métier de typographe aide à « suivre les grands courants de la pensée » contemporaine, au souffle desquels s’avivent ses lumières « naturelles », et qui complète son éducation le soir dans les salles de lecture. […] C’est que Bourrienne parle des choses qu’il a vues ; il a fait campagne avec Bonaparte en Egypte et en Syrie ; il a participé au coup d’Etat de Brumaire, aux transformations et à l’accaparement du Consulat ; son récit est mouvementé, curieux en détails, attachant lorsqu’il renonce à ses paperasses documentaires ; et il faut lire par exemple les chapitres consacrés à l’amiral Brugs et au désastre d’Aboukir, à la détresse de l’armée française d’Orient décimée par les maladies, les suicides, les assassinats des bédouins, abandonnée finalement par son chef dont l’ambition rêve un soir de conquérir l’Asie, et qui s’échappe pour revenir en France violenter la Fortune et se faire acclamer comme un libérateur.

544. (1926) L’esprit contre la raison

Des Bourses, des Chambres de députés étaient camouflées en temples grecs et les plis lourds et faussement classiques d’une pseudo-Antiquité cachaient ce soleil de soufre et d’amour qui, un beau soir, finit toujours par éclaterq, là-bas, plus loin que l’horizon et l’habitude. […] Et que nous importe cette décomposition d’un mauve si faussement délicatai dont se contraignit à vouloir être séduit Barrès au soir de son adolescence. […] Cette métaphore un peu lyrique du grand soir de la Révolution, de même que le geyser, qui figure dans la phrase suivante « l’esprit jaillissant » après avoir été longtemps emprisonné, s’oppose à la « Walkyrie domestiquée ». […] Il aime les voyages comme il aime les femmes, l’alcool certains soirs.

545. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le prince de Ligne. — II. (Fin.) » pp. 254-272

J’étais là, dit-on, le soir de cette fameuse bataille. […] Le prince de Ligne, malgré sa douceur de mœurs habituelle, ne pouvait s’empêcher d’avoir quelque accès de misanthropie ; il en voulait aux engouements et à toutes ces contrefaçons de talent ou d’esprit qui usurpent la réputation des originaux et des véritables : « Il se fait, disait-il, dans la société un brigandage de succès, qui dégoûte d’en avoir. » Mais il était plus dans sa nuance de philosophie et dans les tons qui nous plaisent, lorsqu’il écrivait cette pensée qui résume sa dernière vue du bonheur : Le soir est la vieillesse du jour, l’hiver la vieillesse de l’année, l’insensibilité la vieillesse du cœur, la raison la vieillesse de l’esprit, la maladie celle du corps, et l’âge enfin la vieillesse de la vie.

546. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Chateaubriand. Anniversaire du Génie du christianisme. » pp. 74-90

Un soir nous passâmes cinq heures ensemble, et il me parla d’Éléonore, etc. » Sur Le Brun, il y a un commencement de portrait qui, en trois coups de crayon, est admirable : « Le Brun a toutes les qualités du lyrique. […] Après avoir conseillé surtout l’étude de la botanique, comme propre à calmer l’âme et à lui ouvrir une source d’aimables et faciles jouissances, il montre le promeneur fatigué rentrant plus riche le soir dans sa pauvre chambre : « Oh !

547. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Santeul ou de la poésie latine sous Louis XIV, par M. Montalant-Bougleux, 1 vol. in-12. Paris, 1855. — II » pp. 39-56

Santeul, tel qu’il faut se le représenter, non plus dans ses vers, mais en pratique et en action, dans cette espèce de comédie à un seul personnage qu’il représentait volontiers du matin au soir, c’est un La Fontaine de collège au gros sel, un Chapelle moins débauché et plus moral, bien qu’aimant aussi la bonne chère, un Piron honnête et aussi fertile en bons mots, un Roquelaure plus honnête également, mais à ripostes toujours plaisantes, une manière de Désaugiers en vers latins ; enfin c’est Santeul, chanoine très peu régulier de Saint-Victor, et unique en son espèce. […] On a raconté qu’étant à Dijon pendant la tenue des états, en août 1697, un soir, à un souper chez M. le duc, ce dernier se divertit à pousser Santeul de vin de Champagne, et de gaieté en gaieté il trouva plaisant de verser sa tabatière pleine de tabac d’Espagne dans un grand verre de vin, et de le faire boire à Santeul pour voir ce qui en arriverait.

548. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Madame Bovary par M. Gustave Flaubert. » pp. 346-363

— Les jeunes chansons, c’est aussi la pièce du soir, c’est le roman du jour, c’est ce qui fait l’entretien de la jeunesse à l’instant où cela paraît. […] Un soir que Rodolphe est venu, rendre visite à Mme Bovary et qu’il s’est installé dans le cabinet aux consultations où personne n’entre à cette heure, on entend du bruit ; Emma lui dit : « As-tu tes pistolets ? 

549. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « La princesse des Ursins. Ses Lettres inédites, recueillies et publiées par M. A Geffrot ; Essai sur sa vie et son caractère politique, par M. François Combes » pp. 260-278

Mme des Ursins, en recevant les ordres du roi par Torcy, ne se sent pas de joie ; Mme de Noailles en a la première effusion et le rejaillissement : « Au reste, madame, je suis transportée de joie, et depuis le matin jusqu’au soir je ne suis occupée qu’à penser combien vous êtes aimable. » Il est curieux de voir comme d’abord elle diminue la portée et la visée de sa mission : elle est choisie pour accompagner Mme la princesse de Savoie jusqu’à Madrid ; voilà tout ; rien au-delà ; qu’elle mette le pied en Espagne, cela lui suffit ; elle ne restera que juste autant qu’il le faudra pour ses affaires et autant que le roi le lui commandera : elle n’est qu’un instrument docile, obéissant et presque inerte dans la main des puissances de Versailles. […] Dites-lui, je vous supplie, que c’est moi qui ai l’honneur de prendre la robe de chambre du roi d’Espagne lorsqu’il se met au lit, et de la lui donner avec ses pantoufles quand il se lève, — jusque-là je prendrais patience — ; mais que tous les soirs, quand le roi entre chez la reine pour se coucher, le comte de Benevente me charge de l’épée de Sa Majesté, d’un pot de chambre et d’une lampe que je renverse ordinairement sur mes habits ; cela est trop grotesque.

550. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Journal de la santé du roi Louis XIV »

Le roi et feu Monsieur aimaient beaucoup les œufs durs. » Fagon nous donne l’aperçu d’un souper du roi déjà vieux (1709), qui répond bien à un tel dîner ; il est vrai que cela avait toutes les peines du monde à passer : « La variété, dit-il, des différentes choses qu’il mêle le soir à son souper avec beaucoup de viandes et de potages, et entre autres les salades de concombres, celles de laitues, celles de petites herbes, toutes ensemble assaisonnées comme elles le sont de poivre, sel, et très fort vinaigre en quantité, et beaucoup de fromage par-dessus, font une fermentation dans son estomac, etc. » Si tel était un souper ou un dîner ordinaire de Louis XIV, il est curieux de voir quelles étaient ses diètes, quand on le mettait au régime ; par exemple (1708) : « Le roi, fatigué et abattu, fut contraint de manger gras le vendredi, et voulut bien qu’on ne lui servit à dîner que des croûtes, un potage aux pigeons, et trois poulets rôtis ; le soir, du bouillon pour y mettre du pain, et point de viandes… Le lendemain, il fut servi comme le jour précédent, les croûtes, un potage avec une volaille, et trois poulets rôtis, dont il mangea, comme le vendredi, quatre ailes, les blancs et une cuisse ! 

551. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. Suite et fin. » pp. 73-95

Quant à Salammbô, à laquelle le lecteur à bout de sensations et d’abominations a moins que jamais le cœur de s’intéresser, dès longtemps fiancée à Narr’Havas, elle meurt en revoyant de ses yeux dans cet état horrible ce Mâtho, ce beau drôle de Lybien pour qui elle s’est sentie allumée dès le premier soir, et à qui elle s’est, de gaieté de cœur, abandonnée. […] Flaubert ; il est celui de presque tous les romanciers de ce temps, à commencer par Walter Scott, lequel, ayant à nous montrer un étranger entrant le soir dans une salle de festin, s’amuse à nous le décrire de la tête jusqu’aux pieds, y compris les bas, les souliers, comme si des convives assis pouvaient distinguer cette partie inférieure de l’individu, ce qui serait tout au plus possible de jour.

552. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires de Malouet »

Préville y avait son rôle, tout en faisant répéter les autres, et, pour premier précepte à ses camarades de société, il voulait, quand on avait à jouer le soir, qu’on s’habillât dès le matin, pour donner des plis à ses habits (c’était son mot) et ne point paraître neuf et emprunté. […] Je tire d’un des premiers mémoires qu’il composa pour un des comités de l’Assemblée cette page curieuse, qui se rapporte à son intendance de Toulon, et qui achève de nous édifier sur ce que c’était que l’ancien régime, confié même aux meilleures mains : « J’ai quatre-vingts commis sous mes ordres qui travaillent du matin au soir ; ils expédient annuellement pour le ministre plus de vingt rames de papier ; ils tiennent plus de quatre cents registres et plus de huit cents rôles.

553. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XIII »

Une Visite de noces « Hors du temple et du sacrifice, ne montrez pas les intestins. » Je me rappelais ce beau précepte d’un ancien, en écoutant, l’autre soir, une Visite de Noces, où M.  […] Donc, Séverine a recouvré la paix de son cœur ; elle croit et elle aime ; le prince lui a même fait promettre de recevoir, madame de Terremonde, ce soir, tout à l’heure, comme d’habitude, le sourire aux lèvres.

554. (1920) Impressions de théâtre. Onzième série

Les soirs de première, elles ne s’empêtreront pas dans des robes trop neuves et trop riches, fruit de leur déshonneur. […] Par exemple, il y avait l’autre soir dans votre jeu un peu de tension et de fièvre. […] Nous sommes dans un couvent de dominicains, à Tortola, au haut d’une montagne, le soir. […] Un autre appartement dans le château. — C’est le soir. […] Et certes il ne perd pas son temps, et il doit s’en retourner le soir avec une jolie collection de frimousses et d’attitudes.

555. (1874) Premiers lundis. Tome I « Dumouriez et la Révolution française, par M. Ledieu. »

En un seul jour, il eût pu, sans forcer son naturel, se jeter au château aux pieds de Marie-Antoinette, s’asseoir en patriote sincère à la table frugale de son collègue Roland, et, sortant le soir avec Danton par le bras, se prendre aux familières confidences du sans-culotte sans façon.

556. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Les legs de l’exposition philosophie de la danse »

Une d’elles a eu l’autre soir un bien beau cri de piété filiale.

557. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Villiers de L'Isle-Adam, Auguste de (1838-1889) »

Ce sont des phrases d’une spiritualité douloureuse, comme Villiers seul sut en concevoir : « Vous serez la fiancée amère de ce soir nuptial… »

558. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XIX. Réflexions morales sur la maladie du journal » pp. 232-240

Il en faut chaque soir une autre.

559. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface d’« Hernani » (1830) »

Le principe de la liberté littéraire, déjà compris par le monde qui lit et qui médite, n’a pas été moins complètement adopté par cette immense foule, avide des pures émotions de l’art, qui inonde chaque soir les théâtres de Paris.

560. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — XVIII. La bague aux souhaits »

Tu mangeras l’un le matin et l’autre le soir.

561. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Jean-Jacques Ampère »

Il pouvait être cinq heures du soir : assis sur un banc à l’extrémité de son petit jardin, il jouissait de la vue du parc et de la beauté du jour et de l’heure. […] Vous vous êtes levé dès avant l’aurore ; vous êtes en campagne tout le jour, vous faites des recrues en toute contrée, il vous en vient de tous les points de l’horizon ; ce n’est jamais assez à votre gré : il vous en faut du fond de la Laponie, il vous en faut du plus lointain Orient, c’est bien ; mais prenez garde, au train que vous suivez, de passer le jour entier aux préparatifs et de ne livrer bataille qu’à sept heures du soir, après que le soleil sera couché. […] Et le soir, combien de fois, rentrant vers minuit, Ampère retrouvait son ami veillant encore, et là, assis au bord du lit, le pressant des questions qui le préoccupaient et que les rencontres de la journée avaient suscitées en lui, il prolongeait jusque bien avant dans la nuit les doctes enquêtes et les poursuites historiques de sa pensée ! […] Il dut goûter, indépendamment de tout succès, de grandes satisfactions d’intelligence : il pouvait lire une phrase hiéroglyphique sur le sarcophage d’un pharaon ; il lui était arrivé un soir, avant de s’endormir, de lire un livre chinois sur les ruines d’Éphèse. […] me disais-je pendant le combat d’hier au soir.

562. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Troisième partie. — L’école historique » pp. 253-354

Il notait le soir ses impressions de la journée. […] Enhardi par son exemple, je lui dis un soir (à quoi songeais-je ce soir-là ?) […] Il est permis au public d’un théâtre de s’abstenir, lorsque l’affiche annonce pour le soir la représentation d’une pièce totalement étrangère à ses mœurs, à ses sentiments, à ses idées, bien qu’il ne lui fût pas permis de siffler cette pièce, si elle était signée d’un nom illustre, et s’appelait Guillaume Tell, Hamlet, Faust, Iphigénie en Aulide ou Le Misanthrope. […] Le sixième jour de la fête, on promit pour le soir une comédie nouvelle de Molière, qui n’était pas encore terminée. […] On lit dans le registre de La Grange, à la date du vendredi, 17 février 1673 : « Après la comédie, sur les dix heures du soir, M. 

563. (1891) Impressions de théâtre. Cinquième série

» Et trois minutes après (car il faut finir) la Célénia crie au bonhomme : « Dites à mes camarades que je jouerai ce soir !  […] Elle ressent d’abord très vivement l’humiliation de cette tromperie ; et, comme Pagol doit revenir le soir même : « Donnez-moi ce poignard, dit-elle à son père. […] Nous avons éprouvé, ce soir-là, ce que c’est que l’âme collective de la foule. […] Les soirs de premières, pendant les entractes et quelquefois pendant la pièce, il tire de sa poche un volume jaune qu’il feuillette avec sérénité. […] demande-t-elle d’une voix subitement altérée. — Je ne sais pas ; je ne l’ai jamais vue que le soir. — Elle est spirituelle ?

564. (1837) Lettres sur les écrivains français pp. -167

Le soir où je l’ai rencontré, M.  […] Mais l’anecdote, la voici : Un soir de Janvier M. de Balzac entra dans le même salon, disant à tout le monde qu’il avait donné à M.  […] En nous quittant, il nous annonça qu’il allait prendre la fuite, parce qu’il avait envoyé quérir sa nourriture du soir. […] Puis, le soir, M.  […] Jal mangeait à ses repas pendant la route, et à quelle heure il éteignait la chandelle, le soir, en s’endormant.

565. (1925) Proses datées

Je me souviens qu’un soir nous allâmes avec lui voir danser une danseuse arménienne. […] Un soir, après dîner, quelques amis qui se trouvaient là demandèrent au Maître de lire quelques vers. […] Puis le soir est venu. […] Nous étions revenus, la veille au soir, de Brousse à Mudania et nous faisions rate vers l’île de Rhodes. […] Je ne me propose pas, ce soir, de vous y associer.

566. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Académie française — Réception de M. de Falloux » pp. 311-316

Réception de M. de Falloux Jeudi soir, 26 mars 18576.

567. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XVI, les Érynnies. »

. — Un soir, Dion, le libérateur de la Sicile, était assis, pensif, sous un portique assombri par le crépuscule ; un bruit le tira de sa rêverie.

568. (1888) La vie littéraire. Première série pp. 1-363

Moreau, qui, chaque soir, au Vaudeville, malmène si fort, m’a-t-on dit, les pauvres pessimistes ? […] C’est celui d’une jeune femme qui me demandait, un soir de cet hiver, à quoi servaient les poètes. […] Jamais M. de Bismarck ne s’était montré si grand que ce soir-là. […] Elle est très pieuse ; elle prie Dieu matin et soir ; elle lui demande un duc pour mari, une belle voix et la santé de sa mère. […] À huit heures du soir, les médecins déclarèrent à Jérôme que la reine n’avait plus que quelques heures à vivre.

569. (1874) Histoire du romantisme pp. -399

Le soir est leur aurore et la lumière ne leur vient que lorsqu’elle s’éteint au ciel. […] Ce soir-là, ce grand soir à jamais mémorable d’Hernani, elle applaudissait, comme un simple rapin entré avant deux heures avec un billet rouge, les beautés choquantes, les traits de génie révoltants… Mars-août 1872. […] Aussi, l’autre soir, en nous rendant au Théâtre-Français, éprouvions-nous une certaine inquiétude, à laquelle le talent de M.  […] Nous songions au spectacle que présentaient les abords de la Porte-Saint-Martin le soir de la première représentation d’Antony, en 1831. […] La veille, on avait joué Mérope ; le soir même on donnait el Campañero de San Pablo, du très illustre seigneur don José Bouchardy.

570. (1896) Écrivains étrangers. Première série

Et en effet, je fus invité pour le dimanche soir. […] Puis le soir était venu, et l’on s’était séparé. […] — Demain soir. […] Ojetti l’a vu deux fois dans la même journée : d’abord chez lui, puis, le soir, dans un café de la place Galvani. […] Bientôt l’on apporta les valises de Carducci, qui partait ce soir-là pour passer l’été dans les Alpes.

571. (1928) Quelques témoignages : hommes et idées. Tome II

L’une, celle de Biran, est en marche vers la foi, mais n’y arrive que sur le soir de sa vie, à travers quel long et douloureux chemin ! […] C’est le soir, les lumières des maisons s’allument, révélant ce que la contemplatrice définit, avec un frisson, la vie infatigable et assidue. […] Car si ce cœur vieilli vaut encor quelque chose, C’est pour avoir battu de ce grand battement Tandis que je voyais passer ton flot dormant, Par des soirs aussi doux et clairs que ce soir rose. […] Je fus frappé, ce soir-là, de la réserve qu’avait, au contraire, dans sa tenue, dans ses paroles, dans toute son attitude, ce successeur, si connu déjà, du génial Trousseau. […] Je me souviens encore aujourd’hui de la forte impression de supériorité qu’il me donna ce soir-là et qui grandit encore quand je commençai de suivre et sa clinique et ses leçons.

572. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE STAEL » pp. 81-164

L’année 1806 lui sembla trop longue pour que son imagination tînt à un pareil supplice, et elle arriva à Paris un soir, n’amenant ou ne prévenant qu’un très-petit nombre d’amis. Elle se promenait chaque soir et une partie de la nuit à la clarté de la lune, n’osant sortir de jour. […] Les conversations philosophiques, littéraires, toujours piquantes ou élevées, s’engageaient déjà vers onze heures du matin, à la réunion du déjeuner ; on les reprenait au dîner, dans l’intervalle du dîner au souper, lequel avait lieu à onze heures du soir, et encore au delà souvent jusqu’après minuit. […] Morris est un homme d’esprit, moqueur, et qui écrit chaque soir en rentrant chez lui ; auprès d’un tel témoin l’enthousiasme a peu de faveur ; Mme de Staël, dans sa forme exaltée, n’a pas toujours tort pourtant : « 25 janvier 1791 : — à trois heures je vais dîner chez Mme de Staël ; — elle n’est pas encore rentrée. […] Le soir étend son deuil et plus avant m’explique La scène d’alentour, sans voix et sans flambeaux.

573. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. LEBRUN (Reprise de Marie Stuart.) » pp. 146-189

Une jeune actrice, un soir où l’on n’attendait rien, s’est trouvée dire à merveille des vers que depuis longtemps on ne récitait plus à la scène d’une façon tolérable. […] Voilà ce qu’on se pouvait dire, ce que le poëte aurait pu opposer aux idées de reprise, s’il avait mieux aimé sa tranquille possession de renommée que l’art même, si longtemps glorieux, qu’il a, pour sa part, cultivé d’un noble effort, et qu’il parut, à un certain jour, avoir agrandi. — « J’irai voir ce soir vos Templiers, » disait quelqu’un à M. […] » — « C’est moi, monsieur, répliqua-t-elle en se retournant brusquement dans le couloir, son petit cabas à la main, c’est moi-même ; mais donnez-moi donc deux sous pour m’acheter de la galette, s’il vous plaît. » Et voilà pourquoi, entre autres motifs à l’appui, elle eut toute raison, l’autre soir, de reparaître dans le personnage de l’illustre infortunée à qui elle avait dû une joie d’enfance ; voilà pourquoi elle eut raison de vouloir dire, aux applaudissements de tous, ce mot de fierté qu’elle relève si bien : Si le Ciel était juste, indigne souveraine, Vous seriez à mes pieds, et je suis votre reine.

574. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « MÉLEAGRE. » pp. 407-444

Au chant xiii de l’Odyssée, Ulysse, trop longtemps retenu à son gré chez les Phéaciens, a obtenu un vaisseau ; il doit partir le soir même, il assiste au dernier festin que lui donnent ses hôtes ; mais, impatient qu’il est de s’embarquer pour son Ithaque, il n’entend qu’avec distraction, cette fois, le chantre divin Demodocus, et il tourne souvent la tête vers le soleil comme pour le presser de se coucher : « Comme lorsque le besoin du repas se fait sentir à l’homme qui, tout le jour, a conduit à travers son champ les bœufs noirs tirant l’épaisse charrue : il voit joyeusement se coucher la lumière du soleil pressé qu’il est d’aller prendre son souper, et les genoux lui font mal en marchant ; c’est avec une pareille joie qu’Ulysse vit se coucher la lumière du soleil. » La passion de l’exilé sur le point de revoir sa patrie, comparée à celle du pauvre journalier pour son souper et son gîte à la dernière heure d’une journée laborieuse, ne se trouve point rabaissée en cela ; elle n’en paraît que plongeant plus à fond, enracinée plus avant dans la nature humaine ; mais rien n’est compris si cette circonstance naïve des genoux qui font mal en marchant est atténuée ou dissimulée ; car c’est justement cette peine qui est expressive, et qui aide à mesurer l’impatience même, la joie de ce simple cœur. […] Puisses-tu, rebroussant chemin au plus tôt, devenir l’Étoile du soir, ô toi qui lances une douce lumière si amère pour moi ! […] Il nous a dit en six vers dont le rhythme seul pourrait figurer la légèreté, l’entrelacement et l’abondance : « Je tresserai la violette blanche, je tresserai le tendre narcisse avec les myrtes, je tresserai les lis riants, je tresserai le safran suave, et encore l’hyacinthe pourpré, et aussi je tresserai les roses chères à l’amour, afin que, sur les tempes d’Héliodora aux grappes odorantes, la couronne frappe de ses fleurs les belles boucles de sa chevelure. » — J’aime à croire que ce ne fut que dans les débuts de sa liaison qu’il doutait assez de cette chère Hélio-dora pour s’écrier, tandis qu’il se dirigeait le soir vers sa demeure : « Astres, et toi, Lune qui brilles si belle aux amants, Nuit, et toi, petit instrument compagnon des sérénades, est-ce que je la trouverai encore l’amoureuse, sur sa couche, tout éveillée et se plaignant à sa lampe solitaire ?

575. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre I. Succès de cette philosophie en France. — Insuccès de la même philosophie en Angleterre. »

Jamais et nulle part ils ne l’ont été si habituellement et au même degré. « Pour un homme de science et de génie, dit un voyageur anglais, ici le principal plaisir est de régner dans le cercle brillant des gens à la mode456. » Tandis qu’en Angleterre ils s’enterrent morosement dans leurs livres, vivent entre eux et ne figurent dans la société qu’à la condition de « faire une corvée politique », celle de journaliste ou de pamphlétaire au service d’un parti, en France, tous les soirs, ils soupent en ville, et sont l’ornement, l’amusement des salons où ils vont causer457. […] Un soir, au moment de partir pour le bal de l’Opéra, elle trouve sur la toilette la Nouvelle Héloïse 486, je ne m’étonne point si elle fait attendre d’heure en heure ses chevaux et ses gens, si, à quatre heures du matin, elle ordonne de dételer, si elle passe le reste de la nuit à lire, si elle est étouffée par ses larmes ; pour la première fois, elle vient de voir un homme qui aime  Pareillement, si vous voulez comprendre le succès de l’Émile, rappelez-vous les enfants que nous avons décrits, de petits Messieurs brodés, dorés, pomponnés, poudrés à blanc, garnis d’une épée à nœud, le chapeau sous le bras, faisant la révérence, offrant la main, étudiant devant la glace les attitudes charmantes, répétant des compliments appris, jolis mannequins en qui tout est l’œuvre du tailleur, du coiffeur, du précepteur et du maître à danser ; à côté d’eux, de petites Madames de six ans, encore plus factices, serrées dans un corps de baleine, enharnachées d’un lourd panier rempli de crin et cerclé de fer, affublées d’une coiffure haute de deux pieds, véritables poupées auxquelles on met du rouge et dont chaque matin la mère s’amuse un quart d’heure pour les laisser toute la journée aux femmes de chambre487. […] Il faisait voir l’aurore à des gens qui ne s’étaient jamais levés qu’à midi, le paysage à des yeux qui ne s’étaient encore arrêtés que sur des salons et des palais, le jardin naturel à des hommes qui ne s’étaient jamais promenés qu’entre des charmilles tondues et des plates-bandes rectilignes, la campagne, la solitude, la famille, le peuple, les plaisirs affectueux et simples à des citadins lassés par la sécheresse du monde, par l’excès et les complications du luxe, par la comédie uniforme que, sous cent bougies, ils jouaient tous les soirs chez eux ou chez autrui488.

576. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIe entretien. Vie du Tasse (1re partie) » pp. 5-63

II Un soir d’automne de l’année 1812 je visitais pour la première fois Rome, ville presque déserte alors par l’enlèvement du pape et par la dispersion des pontifes de l’Église romaine, que Napoléon avait emprisonnés à Savone. […] La petite cloche du campanile, comme une voix timide qui craignait d’éveiller l’étranger maître à Rome, tintait l’Angelus du soir aux solitaires et aux pauvres femmes du quartier : cette cloche avait dans son timbre argentin quelque chose du gazouillement de l’alouette qui s’élève d’un champ moissonné devant les pas du glaneur. […] Rentré le soir à l’hôtellerie, à Ferrare, et encore tout ému de mes impressions dans le cachot du Tasse, j’écrivis les strophes suivantes qui n’ont jamais, je crois, été imprimées.

577. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXVe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (4e partie) » pp. 429-500

Vers le soir la vie reprend : les chants, les cris, mille bruits retentissent de plus belle dans les fourrés et les arbres. […] Le matin et le soir, les singes hurleurs font entendre un concert effrayant. […] X C’est le soir ; nous sommes dans la capitale du monde occidental ; le Colisée, théâtre bâti par Vespasien à la mesure du peuple-roi et bourreau de l’univers alors connu, s’élève à des centaines de pieds au-dessus des édifices publics et des palais des citoyens de Rome.

578. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXVIIIe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 65-128

On la voyait sur sa porte tous les matins et tous les soirs, quand la bande des galériens allait à l’ouvrage ou en revenait, soit pour balayer les rues et les égouts de la ville, soit pour curer les immondices de la mer dans la darse, prendre la main enchaînée du vieillard, la baiser, et lui apporter tantôt une chose, tantôt une autre : pain blanc, cocomero, tabac, rosolio, ceci, cela, toutes les douceurs enfin qu’elle pouvait se procurer pour adoucir la vie de ce pauvre homme. […] Quand je fus peu à peu, en apparence, remise des confidences de la bonne femme, je repris le panier et je rentrai dans la cour pour distribuer la soupe du soir de loge en loge. […] Je continuai à en jouer tous les soirs et une partie des nuits, pour reporter, par les sons, la pensée d’Hyeronimo en haut, vers moi et vers nos beaux jours dans la montagne.

579. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIIe entretien. Madame de Staël »

Ce fut de cette époque qu’elle prit le goût et la passion de ce qu’elle appelle sans cesse dans ses ouvrages la société, c’est-à-dire un cercle plus ou moins étendu d’hommes oisifs et de femmes désœuvrées qui se réunissent le soir dans un salon pour causer au hasard de toutes choses. […] Hommes de lettres, hommes de cour, femmes avides d’adoration ou d’importance, diplomates étrangers, voyageurs de toutes les nations du continent, orateurs du parlement britannique, républicains d’Amérique consacrés par l’auréole de leur liberté naissante, se pressaient chaque soir dans ce salon. […] Le soir, les portes de la prison ne s’ouvrirent plus, et cet événement, dont le bruit remplissait alors le monde, retombe tout entier sur deux femmes solitaires et malheureuses, et qui n’étaient soutenues que par l’attente du même sort que leur frère et leur époux.

580. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLVe entretien. Vie de Michel-Ange (Buonarroti) »

Elles flottaient entre une tombe et le ciel, comme des nuées du soir sur un champ des morts. […] XVI Les fréquentes absences de Vittoria Colonna de Rome et les voyages de Michel-Ange à Florence interrompaient souvent la délicieuse familiarité de leurs entretiens du soir au palais du connétable Colonna. […] Celles-là ont, pour ainsi dire, le découragement mélancolique d’ici-bas et la sainteté des hymnes chantés dans le sanctuaire de la vie à la lueur des cierges du soir.

581. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXIIe entretien. Chateaubriand, (suite.) »

XXVI Bonaparte avait calculé si juste avec les amis de Chateaubriand que le Génie du Christianisme parut le soir même du jour où les autels publics furent réinstallés par lui, au milieu d’une pompe militaire, à Notre-Dame. […] « J’accompagnai mon père à son dernier asile ; la terre se referma sur sa dépouille ; l’éternité et l’oubli le pressèrent de tout leur poids : le soir même l’indifférent passait sur sa tombe ; hors pour sa fille et pour son fils, c’était déjà comme s’il n’avait jamais été. […] « Quand le soir était venu, reprenant le chemin de ma retraite, je m’arrêtais sur les ponts pour voir se coucher le soleil.

582. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Mme Desbordes-Valmore » pp. 01-46

Ce soir, ma robe encore en est tout embaumée… Respires-en sur moi l’odorant souvenir. […] Trente mille ouvriers sans pain, errant dans le givre et la boue, le soir, et chantant la faim ! […] Jules Favre a passé tout le soir avec moi… M. 

583. (1894) Propos de littérature « Chapitre IV » pp. 69-110

Ainsi que les clairons se taisent à la flûte D’un pâtre parmi son troupeau qui broute et bêle, Des songes tressaillirent où se renouvelle, Avec ses soirs mornes et ses aubes belles Tout le passé muet que l’angoisse interpelle. […] Printanière, dans l’aube éternelle du rêve Et dans l’aurore assise, Elle tisse en rêvant Des choses qu’Elle sait, et sourit ; et, devant Elle, au gré de sa main agile, court sans trêve La navette laborieuse, et le doux vent D’avril emmêle ses cheveux qu’Elle soulève Et rejette sur son épaule ; et, relevant La tête, Elle fredonne un air qu’Elle n’achève… De l’ombre, Elle apparaît, comme en un cadre d’or : Derrière Elle l’azur et des plaines qu’arrose Un fleuve ; et, sur sa tête, un rameau de laurose Étend ses fleurs contre l’azur clair ; — et l’effort Du métier, comme un chant monotone et morose Se plaint très doucement : — on envierait le sort De celui qui baiserait la main qu’Elle pose Négligemment, parfois, et lasse de l’effort… Mais moi, la voyant rire en rappelant sans doute Quelque doux jour mort de sa joie un soir de mai, Je songeai que, peut-être, pour avoir aimé Son rire, d’autres ont repris la lente route Tristes d’un souvenir et le cœur affamé D’un mets où nulle lèvre impunément ne goûte. […] « Vous ma fierté tout enorgueillie, Vous seul but, seule voie et seule fin, Vous de qui seul je me rêvais cueillie, Vous mon poème et ma soif et ma faim, — Quel soir est tombé, quelle heure est vieillie ? 

584. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Additions et appendice. — Treize lettres inédites de Bernardin de Saint-Pierre. (Article Bernardin de Saint-Pierre, p. 420.) » pp. 515-539

Mon très cher ami, Je suis arrivé à Riga le jeudi au soir, après avoir couru la poste constamment le jour et la nuit. […] On danse du matin au soir. […] Il m’a prié de le recommander, ce que j’ai fait dès le soir même à deux ou trois personnes.

585. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — I. » pp. 204-223

Il ne s’est jamais recueilli ; il est de ceux qui n’ont jamais travaillé passé midi et demi : on s’habillait, on mettait manchettes et jabot, on sortait pour dîner en ville, et on ne rentrait plus que très tard le soir ou dans la nuit. […] À la longue les défauts prirent le dessus ; cet homme qui dîna en ville jusqu’à la fin, et qui pérorait du matin au soir, avait enroué sa voix et donné comme un effort à son esprit ; il lui fallait à tout prix du montant naturel ou factice : Duclos aimait le vin, dit Sénac de Meilhan, et rarement sortait de table sans être échauffé : alors sa conversation n’en était que plus brillante, mais aussi il se permettait les propos les plus imprudents contre les ministres et les gens en place.

586. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) «  Œuvres de Chapelle et de Bachaumont  » pp. 36-55

Le 18 au matin, nous essuyâmes un coup de vent de l’arrière, qui nous obligea de rester jusqu’à onze, heures du soir sous la misaine. […] À sept heures du soir, nous reçûmes un coup de mer par les fenêtres de la grande chambre.

587. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « William Cowper, ou de la poésie domestique (I, II et III) — II » pp. 159-177

Newton une escapade et une fuite de son lièvre favori qui, un soir, pendant le souper, rompt son treillage, prend sa course à travers la ville, et qu’on ne parvient à rattraper qu’après toute une odyssée aventureuse, on lira une lettre très grave, très élevée, à une de ses nobles cousines qu’il n’avait pas vue depuis des années, qui avait été très belle, et à qui les hautes et sérieuses pensées étaient devenues familières. […] Le printemps le dissipait trop pour qu’il pût beaucoup s’y recueillir ; il aimait mieux en profiter avec l’abeille et avec l’oiseau : mais les soirs d’hiver, près de son intelligente et silencieuse amie, dans ce doux confort domestique qu’il a si bien exprimé, ayant là près de lui la bouilloire qui chante, et la tasse pleine de cette liqueur « qui égaye et qui n’enivre pas », il s’appliqua pour la première fois à traiter en vers d’assez longs sujets, tout sérieux d’abord et presque théologiques, qui montrent, à leur titre seul, le fond de ses pensées : Le Progrès de l’erreur, La Vérité, L’Espérance, etc.

588. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Le maréchal de Villars. »

Puis, le 23 au soir, l’armée fut mise en mouvement sans savoir où on la conduisait ; le secret avait été gardé entre les deux maréchaux et le très petit nombre d’officiers indispensables. […] Mais il ne cessa point d’être le général en chef, et un général intrépide, celui qui entrait dans les retranchements de Denain à cheval à la tête de ses troupes, et qui recevait en personne la soumission du duc d’Albemarle et des sept ou huit lieutenants généraux de l’empereur ; il avait le droit d’écrire au ministre, du camp de Denain, le soir même (24 juillet) : « Je n’ai pas le temps, Monsieur, de vous écrire une bien longue lettre ; je ne puis trop me louer des troupes.

589. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Marie-Thérèse et Marie-Antoinette. Leur correspondance publiée par le chevalier d’Arneth »

Ce n’est pas que la reine m’eût montré ni humeur, ni vivacité ; elle avait pu se préparer d’après la lettre que je lui avais écrite le lundi soir ; je l’ai rarement trouvée aussi tranquille et aussi maîtresse de ses mouvements. […] Son orgueil avait pris naissance à Vienne, où Marie-Thérèse, autant pour lui donner du crédit sur l’esprit de l’archiduchesse que pour s’emparer du sien, lui avait permis de se rendre tous les soirs au cercle intime de sa famille… » A Versailles on haïssait surtout en l’abbé de Vermond l’homme de Vienne ; il est aisé, de plus, de deviner dans l’animosité que lui a vouée Mme Campan quelque blessure d’amour propre ; la première femme de chambre de la reine, et un bel esprit prétentieux comme elle était, avait dû avoir, un jour ou l’autre, à se plaindre de lui ; elle le lui rend : « Il est très-probable », dit-elle, « par les relations constantes et connues de cet homme avec le comte de Mercy, ambassadeur de l’Empire pendant toute la durée du règne de Louis XVI, qu’il était utile à la Cour de Vienne, et qu’il a souvent déterminé la reine à des démarches dont elle n’appréciait pas les conséquences.

590. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Florian. (Fables illustrées.) » pp. 229-248

       Soir et matin, nos bons amis,        Profitant de ce voisinage. […] Il avait terminé l’un des livres de ses Fables par ces vers, qui pourraient être plus forts d’expression, mais qui sont pleins de sentiment et de philosophie, et qu’il a intitulés Le Voyage : Partir avant le jour, à tâtons, sans voir goutte, Sans songer seulement à demander sa route, Aller de chute en chute, et, se traînant ainsi, Faire un tiers du chemin jusqu’à près de midi ; Voir sur sa tête alors s’amasser les nuages, Dans un sable mouvant précipiter ses pas, Courir, en essuyant orages sur orages, Vers un but incertain, où l’on n’arrive pas ; Détrompé, vers le soir, chercher une retraite, Arriver haletant, se coucher, s’endormir, On appelle cela naître, vivre et mourir : La volonté de Dieu soit faite !

591. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Madame Sophie Gay. » pp. 64-83

Un soir, au sortir de l’Opéra, il sauve la vie de Valentine, de Mme de Saverny, qui allait être écrasée sous les pieds des chevaux ; lui-même est blessé et disparaît. […] De son côté, Anatole, le bel Espagnol, doué de tous les talents et de tous les charmes, et à qui il ne manque que la parole, se croit également sacrifié, et il est disposé à s’éloigner pour toujours, lorsqu’un soir, à l’Opéra (car sans Opéra point de roman), Valentine, qui a voulu le revoir, et à qui il croit aller faire du regard un éternel adieu, lui adresse de loin un signe qui veut dire : Restez !

592. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Boileau. » pp. 494-513

Les peintres, en sortant le soir, n’avaient pas songé à fermer les portes ; ceux qui ont soin de cet appartement avaient eu autant de négligence que les peintres : ainsi les ours, trouvant les portes ouvertes, entrèrent, et, toute la nuit, gâtèrent tout. […] Despréaux et Racine y allèrent aussi vers le soir, et, entrant de chambre en chambre, enfoncés ou dans leur curiosité ou dans leur douce conversation, ils ne prirent pas garde qu’on fermait les premières chambres ; de sorte que, quand ils voulurent sortir, ils ne le purent.

593. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Marguerite, reine de Navarre. Ses Nouvelles publiées par M. Le Roux de Lincy, 1853. » pp. 434-454

Item, ce jour même 13 septembre 1515, entre sept et huit heures du soir, fut vu en plusieurs lieux en Flandres un flambeau de feu de la longueur d’une lance, et semblait qu’il dût tomber sur les maisons ; mais il était si clair que cent torches n’eussent rendu si grande lumière. […] Son premier mot est pour consoler le captif, pour le rassurer : « Madame (Louise de Savoie) a senti si grand redoublement de forces que, tant que le jour et soir dure, il n’y a minute perdue pour vos affaires ; en sorte que de votre royaume et enfants ne devez avoir peine ou souci. » Elle se félicite de le savoir aux mains d’un aussi bon et généreux vainqueur que le vice-roi de Naples Charles de Lannoy ; elle le supplie, au nom de sa mère, de songer à sa santé : Elle a entendu que voulez entreprendre de faire ce carême sans manger chair ni œufs, et quelquefois jeûner pour l’honneur de Dieu.

594. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre VI. Daniel Stern »

Un soir, la plus innocente des femmes a la fantaisie de se couvrir d’un domino, et sous cette armure un peu légère d’un capuchon de satin, de se risquer dans un de ces bals qui sont des arènes où le vice exécute la danse de Saint-Guy qu’il a inventée. […] nous n’avons pas affaire ici à un bas-bleu de petite encolure, à un bas-bleu à petits vers, à petits romans, à petites comédies minaudées dans les salons, les soirs où l’on y trissotine.

595. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « Brizeux. Œuvres Complètes »

Ce rude et joyeux jaugeur, au bonnet bleu et à la branche de houx, ce chanteur de chansons, le soir, dans les granges, ce joueur de violon et de cornemuse — qui ne l’est pas qu’en vers — et qui faisait réellement danser dans leurs sabots les meunières et les batelières de l’Écosse, a toujours vécu sur le cœur de son pays, et il y a trouvé sa force et sa gloire. […] « Heureux, ajoute-t-il, qui s’en tient aux seules émotions de l’âme, aux habitudes du foyer, aux simples soirs du pays natal… mais combien pourraient dans la vie et dans l’art négliger la science et impunément se passer d’elle ? 

596. (1900) La province dans le roman pp. 113-140

L’article qu’on discute le soir à Paris sera commenté le matin dans les cafés de province. […] Pas une femme ne dirait aujourd’hui le mot d’une maîtresse de maison d’il y a quarante ans : « Nous serons ce soir trente chaufferettes. » Les fameuses piles de linge, fleurant l’iris et la lavande, diminuent de hauteur dans l’armoire maternelle.

597. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXIII. »

« Seulement, lorsque l’étoile du matin et celle du soir me voient m’agenouiller, je sens que, malgré la grande distance qui nous sépare, tes prières, à la même heure, montent aux cieux pour moi. […] Hâtez-vous, assistez un moment à son repos du soir : « Notre tâche du jour est achevée.

598. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XI » pp. 39-46

On se l’arrache, il dîne en ville, n’y arrive qu’à huit heures du soir, et il s’en tire… M.

599. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Note »

Il vint me prendre un soir d’été dans ma chambre de la rue Notre-Dame-des-Champs pour me mener chez M. de Chateaubriand, logé alors rue d’Enfer, à l’hospice Marie-Thérèse, et qui allait repartir pour son ambassade de Rome.

600. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — Le Comte Walewski. L’École du Monde »

Dampré est vrai, je le crois volontiers ; nous savons tous une quantité de Dampré qui ne sont occupés, en effet, qu’à ce genre de séduction et à tendre leurs filets soir et matin.

601. (1875) Premiers lundis. Tome III « Le roi Jérôme »

Il fait son devoir dans les terribles journées des Quatre-Bras et de Waterloo ; blessé, il continue de lutter ; il se bat simplement, vaillamment, dans ce bois accidenté d’Hougoumont dont chaque arbre est pris et repris avec tant d’acharnement pendant tout le jour ; le soir, il rejoint l’héroïque et désespéré Capitaine dans le carré de la vieille garde, où l’âme guerrière de la France s’est comme réfugiée ; et il entend cette parole qui, en un tout autre moment, eût réjoui son cœur : « Mon frère, je vous ai connu trop tard. » On n’a pas à suivre le prince Jérôme dans les longues années de la proscription et de l’exil.

602. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « André Theuriet »

On déjeunait de café au lait ; on dînait à midi d’un potage, d’un plat de viande et d’un légume, et le soir, à huit heures, on soupait des restes du dîner et d’une salade.

603. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Heredia, José Maria de (1842-1905) »

José-Maria de Heredia est un excellent ouvrier en vers, un des plus scrupuleux qu’on ait vus et qui apporte dans son respect de la forme quelque chose de la délicatesse de conscience et du point d’honneur d’un gentilhomme… Je ne lui demande qu’une chose : Qu’il continue de feuilleter le soir, avant de s’endormir, des catalogues d’épées, d’armures et de meubles anciens, rien de mieux ; mais qu’il s’accoude plus souvent sur la roche moussue où rêve Sabinula.

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