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704. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Champfleury ; Desnoireterres »

D’autres nous avaient raconté comment les femmes cédaient et succombaient dans ce malheureux temps de perdition universelle.

705. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre VI. Des éloges des athlètes, et de quelques autres genres d’éloges chez les Grecs. »

On raconte qu’un philosophe grec, arrivant par hasard à Smyrne le jour qu’on y célébrait la fête d’Homère, fut prié de prononcer son éloge.

706. (1836) Portraits littéraires. Tome I pp. 1-388

Il n’y a qu’une imagination d’origine milésienne qui puisse inventer ce monologue où le héros raconte son entrevue avec le démon. […] Comment discuter sérieusement le rêve angélique, le rêve céleste que je viens de raconter ? […] La Vision de Charles XI est racontée trop sommairement pour que la critique en fasse l’objet du blâme ou des louanges. […] Si vous l’accostez, il vous racontera quelque anecdote graveleuse et cynique, quelque scène ignoble et hideuse, dans laquelle il se complaira. […] Mais sa biographie, racontée à Sténio par Lélia, loin d’entamer l’individualité du narrateur, devient au contraire une occasion de franchise et de naïveté.

707. (1888) Poètes et romanciers

On se rappelle ce périlleux voyage, raconté par le poète avec candeur, avec une sorte de foi dans la brillante et austère fiction de son esprit. […] Sous prétexte de raconter et de décrire l’âme humaine, ils aiment à se raconter et à se décrire eux-mêmes. […] Ses vingt-sept dernières années ne seront racontées que par ses lettres. […] Le poète nous raconte qu’il a transporté dans son jardin un rosier pris dans un cimetière, où l’arbuste a vécu longtemps sur le tombeau d’un pauvre enfant. […] Un homme a toujours mauvaise grâce à raconter, même avec toute la modestie possible, une bonne fortune, une séduction de cœur aussi rapide, aussi complète.

708. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre IV. Addison. »

Ceci est raconté, mais n’est point vu. […] Il allègue très-noblement comme excuse qu’il ne joue pas pour le gain ; qu’il se livre à un plaisir innocent ; qu’il vaut mieux passer sa soirée de cette façon qu’à jouer ou à boire… Le caractère de ce gentleman est un si heureux mélange de douceur et de férocité qu’il surpasse ses deux prédécesseurs et attire de plus grandes foules de spectateurs qu’on n’en vit de mémoire d’homme… J’ai raconté ce combat du lion pour montrer quels sont à présent les divertissements favoris des gens bien élevés de la Grande-Bretagne. » Il y a beaucoup d’originalité dans cette gaieté grave. […] Par exemple, Addison raconte en manière de rêve la dissection du cerveau d’un élégant937 : « La glande pinéale, que plusieurs de nos philosophes modernes considèrent comme le siége de l’âme, exhalait une très-forte odeur de parfums et de fleur d’oranger. […] Courtly présentant à Flavia son gant (qu’elle avait laissé tomber exprès), Flavia reçut le gant, et tua l’homme d’une révérence938. » D’autres statistiques, avec récapitulations et tables de chiffres, racontent l’histoire du saut de Leucade […] Jette tes yeux vers l’orient, me dit-il ; et raconte-moi ce que tu vois. —  Je vois, répondis-je, une large vallée et un prodigieux courant de mer qui roule à travers elle. —  Considère maintenant, me dit-il, cette mer, qui à ses deux extrémités est bornée par des ténèbres, et dis-moi ce que tu y découvres. —  Je vois, repris-je, un pont qui s’élève au milieu du courant. —  Le pont que tu vois, me dit-il, est la vie humaine : considère-le attentivement. —  L’ayant regardé plus à loisir, je vis qu’il consistait en soixante-dix arches entières et en plusieurs arches rompues qui, avec les autres, faisaient environ cent.

709. (1879) À propos de « l’Assommoir »

C’est là qu’il faut le voir, si l’on veut connaître ses goûts : ce sont ceux d’un collectionneur, ou plutôt d’un amateur de tout ce qui est ancien, de tout ce qui porte un souvenir et raconte une histoire. […] Nous lisons dans le Petit National (21 janvier) : « On est venu nous raconter que l’auteur, préoccupé d’une haute question de morale, a voulu montrer la décadence fatale d’une famille d’ouvriers, dans le milieu empesté de nos faubourgs. […] Nous allons raconter l’histoire de ce drame, qui, comme beaucoup de choses, est né du hasard. […] Toutes les célébrités du monde parisien étaient réunies : dans une avant-scène, Mlle Sarah Bernard, qui a si fort applaudi, à ce que raconte la légende, qu’elle a cassé sa chaise. […] Ces médecins vous racontent un tas de machines pour vous effrayer… Comme si un petit verre pouvait tuer un homme !

710. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre V. Comment finissent les comédiennes » pp. 216-393

Évidemment, à raconter toutes ces choses qui ne sont plus curieuses, on y perdrait sa peine et son patois. […] monsieur Diderot, que vous êtes beau, lui disait Sedaine un jour où Diderot racontait une de ses propres comédies ! […] Il a pleuré, entendant raconter un jour cette parole touchante de madame de Mailly. […] Avez-vous entendu raconter l’histoire de madame Célimène ? […] le bon temps où ils étaient presque tous si pauvres, que c’est pitié de les entendre raconter leurs misères !

711. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XLV » pp. 176-182

Il raconte simplement, humblement et presque individuellement ce que c’est qu’un jésuite, cet être abominable pour beaucoup et exécré ; il analyse les Exercices de saint Ignace, les Constitutions de la Compagnie ; il suit le novice dans les divers degrés d’initiation ; il traite du gouvernement et des doctrines de l’Ordre.

712. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires de madame de Genlis sur le dix-huitième siècle et la Révolution française, depuis 1756 jusqu’à nos jours — III »

Mieux lui sied encore, je pense, nous raconter tout le ménage de Belle-Chasse sans oublier le registre de la dépense et le prix du marché, ou nous exposer les règlements et les charmes mystiques de la Trappe, que dans son enthousiasme elle place bien au-dessus de l’Œil-de-Bœuf.

713. (1874) Premiers lundis. Tome I « Bonaparte et les Grecs, par Madame Louise SW.-Belloc. »

Et que le rossignol, de sa voix pure et belle, Me raconte que mai fleurit encor nos champs. » Le précis de la guerre durant ces quatre dernières années est un résumé, un peu oratoire, des nombreuses relations récemment publiées.

714. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 4, du pouvoir que les imitations ont sur nous, et de la facilité avec laquelle le coeur humain est ému » pp. 34-42

Cedrenus raconte qu’un tableau du jugement dernier contribua beaucoup à la conversion d’un roi des bulgares.

715. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 12, qu’un ouvrage nous interesse en deux manieres : comme étant un homme en general, et comme étant un certain homme en particulier » pp. 73-80

Les fêtes, les combats et les lieux dont il parle ne sont connus à plusieurs de ses lecteurs que par ce que lui-même en raconte.

716. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 8, des instrumens à vent et à corde dont on se servoit dans les accompagnemens » pp. 127-135

La poëtique d’Horace suppose encore cet usage, et Dion raconte que du temps de Neron on se servit de ces instrumens dans la representation de quelques tragedies.

717. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « VI »

Taine le raconte et nul ne le conteste.‌

718. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Méry »

La hauteur des opinions de Méry sur les hérésies, l’influence de l’hérésie sur les Barbares, le frappant vis-à-vis de l’apostasie d’Attila et de l’apostasie de Julien, — lequel appartient exclusivement au nouvel historien de Constantinople et qui a l’inattendu d’une révélation, — son bel épisode des Croisades, son mépris pour l’esprit des Grecs rebelles et disputeurs et pour ces protestants du xvie  siècle qui renouvelèrent, à leur manière, l’esprit grec, et forcèrent les puissances chrétiennes à se détourner de la grande guerre traditionnelle de la chrétienté contre la barbarie musulmane pour brûler Rome et s’entre-déchirer entre elles au nom de la dernière hérésie sortie de la plume de Luther, enfin son jugement, d’une si noble pureté de justice, sur les grands calomniés de l’histoire, les jésuites, — puisqu’il faut dire ce nom si magnifiquement exécré, — et dont il nous raconte l’établissement et l’héroïsme, sous Murad III, à Constantinople, toutes ces choses et toutes ces pages, qui font de l’histoire de Méry une composition d’un mouvement d’idées égal pour le moins au mouvement de faits qu’elle retrace, n’ont pu être pensées et écrites que par un catholique carré de base déjà, mais qui va s’élargir encore.

719. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre ii »

« L’origine de notre petit noyau, raconte un soldat de Champagne, date du 24 septembre 1916, jour mémorable à tous les points de vue.

720. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « DÉSAUGIERS. » pp. 39-77

Lorsque Ulysse déguisé en mendiant arrive chez le fidèle Eumée, celui-ci traite son hôte avec honneur ; il lui sert le dos tout entier d’un porc succulent, lui présente la coupe toute pleine, et Ulysse, moitié ruse, moitié gaieté, et comme animé d’une pointe de vin, se met à raconter avec verve certaine aventure à demi mensongère où figure Ulysse lui-même : « Écoute maintenant, Eumée, s’écrie-t-il, écoutez vous tous, compagnons, je vais parler en me vantant, car le vin me le commande, le vin qui égare, qui ordonne même au plus sage de chanter, qui excite au rire délicieux et à la danse, et qui jette en avant des paroles qu’il serait mieux de retenir… » Et cela dit, le malin conteur pousse sa pointe et, comme entre deux vins, il risque son histoire, qui a bien son grain d’humour et dans laquelle il joue avec son propre secret. […] On raconte qu’un jour l’acteur qui faisait Arlequin, dans je ne sais quelle farce de lui, se trouvant indisposé au moment de la représentation, il le suppléa à l’improviste, et joua incognito le rôle avec applaudissement21. […] L’aimable chose est si en souffrance pour le quart d’heure, qu’il a dû être raconté et analysé (j’en demande bien pardon à ses mânes) par celui de tous les auteurs de Tristes qui a le moins le bonheur de lui ressembler.

721. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIIe entretien » pp. 223-287

Je raconterai, dans mes prochains Entretiens sur la littérature diplomatique, comment ce même homme d’État, quinze ans plus tard, me prédit une autre fortune plus difficile à discerner dans mon avenir d’orateur, fortune alors très lointaine et très voilée pour tout le monde, excepté pour lui et pour moi. […] Qu’on oublie donc que ces vers parlent de moi ; qu’au lieu de moi, retiré depuis longtemps de la lice, et qui n’ai fait que toucher superficiellement et avec distraction la lyre jalouse qui veut tout l’homme, on suppose un nom véritablement et légitimement immortel ; qu’on se figure, par exemple, que Solon, poète d’abord, et poète élégiaque dans sa jeunesse, puis restaurateur, législateur et orateur de la république athénienne, puis banni de la république renversée par l’inconstance mobile des Athéniens, puis rentré obscurément dans sa patrie, par l’insouciance du maître, y végète pauvre et négligé du peuple sur une des montagnes de l’Attique ; qu’on se représente en même temps un jeune poète d’Athènes, moins oublieux que ses compatriotes, bouclant sa ceinture de voyage, chaussant ses sandales, et partant seul du Parthénon pour venir visiter bien loin son maître en poésie, relique vivante de la liberté civique ; que Solon reçoive bien ce jeune homme, partage avec lui son miel d’Hymette, ses raisins de Corinthe, ses olives de l’Attique ; que le disciple, revenu à Athènes après une si bonne réception, raconte en vers familiers à ses amis son voyage pédestre, ses entretiens intimes avec le vétéran évanoui de la scène et se survivant, mutilé, à lui-même et à tous dans un coin des montagnes natales. […] Le jeune poète se trouvait apparemment là, et voilà comment il raconte la petite niche que nous fîmes aux petits bergers de la montagne, plus enfants qu’eux sous des cheveux gris ou sous nos fronts chauves.

722. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxive Entretien. Réminiscence littéraire. Œuvres de Clotilde de Surville »

Dans un de ces entretiens, il nous raconta qu’il allait bientôt paraître un volume du poésies dont il avait connu intimement l’auteur ou plutôt l’éditeur à Lauzanne. — Ce chevalier français, nous dit-il, était lieutenant-colonel d’un régiment de cavalerie émigré licencié, et vivait habituellement avec sa femme dans un modeste village des environs de Liége. […] Tout ce que l’émigré nous racontait de la vie de Clotilde dans sa terre de l’Ardèche, et des malheurs de son petit-fils M. de Surville, découvrait ces chefs-d’œuvre inconnus d’une existence de son vieux château, de son long exil sur la terre étrangère, et de sa mort héroïque couronnant une si noble existence, toute cette vie de son aïeule dans ce pays reculé, sauvage, alpestre, au milieu des rochers, des torrents et d’une population d’habitants dont elle était la sœur et la mère, enfin toute cette poésie si longtemps ensevelie avec elle dans cet oubli, et ne ressortant que sous la pieuse et chevaleresque curiosité d’un arrière-petit-fils, nous faisaient rêver à tous des destinées semblables. […] Le premier s’appelait Lygdamon : il raconte en vers délicieux que dans un combat, où il allait périr, un héros se présente, renverse ses ennemis et le sauve ; que ce héros blessé, qui est une femme, répand des flots de son sang, puis disparaît emporté par les siens aux murs de Venise, où il va la rejoindre et l’épouser.

723. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre I. Le broyeur de lin  (1876) »

Tout était peuple en elle, et son esprit naturel donnait une vie surprenante aux longues histoires qu’elle racontait et qu’elle était presque seule à savoir. […] si on racontait cela à ces Parisiens, ils riraient. […] Je raconterai peut-être un jour ces histoires.

724. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — CHAPITRE VI »

La découverte n’est pas sérieuse et rend des sons de marotte, lorsqu’il la raconte. […] Le nouveau dénouement met en action ce que racontait le fils et ce que devinait le père. […] Il raconte aux assistants, d’une voix affaiblie, le dévouement de cette femme, et il leur demande d’être témoins du mariage suprême qui, en lui léguant son nom, acquittera sa dette de cœur envers elle.

725. (1707) Discours sur la poésie pp. 13-60

Monsieur Despréaux condamne aussi ce commencement de l’Alaric : je chante le vainqueur des vainqueurs de la terre. et ces deux grands critiques après avoir donné un exemple du ridicule, proposent pour modéle de la perfection, l’un, le début de l’odissée : muse, raconte-moi les avantures de cet homme, qui après la prise de Troye, vit tant de pays et tant de moeurs différentes ; l’autre, ce commencement de l’Enéïde : je chante cet homme qui contraint de fuir les rivages de Troye, aborda enfin en Italie . mais supposons un moment que ces quatre propositions soient des commencemens d’ode. […] Il dit dans sa premiére ode que sa lyre ne veut chanter que les amours, et il raconte que, quoiqu’il l’eût remontée de cordes nouvelles pour chanter les actions des héros, elle ne rendoit cependant que d’amoureux accords. J’exécute ce qu’Anacréon raconte, et en voulant célébrer la gloire de Mars, je me laisse insensiblement entraîner à une digression sur ses amours avec Vénus, d’où je ne puis revenir au sujet que je m’étois proposé.

726. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Division dramatique. » pp. 64-109

Ces sortes de récits sont, pour l’ordinaire, dans la bouche des personnages qui, s’ils n’ont pas un intérêt à l’action du poème, en ont du moins un très fort qui les attache au personnage le plus intéressé dans l’événement funeste qu’ils ont à raconter. […] Je dis dans le désordre d’un premier mouvement, parce que ce qu’ils racontent venant de se passer dans le moment même, il serait absurde de supposer qu’ils eussent eu le temps de la réflexion, et que le comble du ridicule serait de les faire parler comme s’ils avaient pu méditer à loisir l’ordre et l’art qu’il leur faudrait employer pour arriver plus sûrement à leurs fins. […] Cependant tous nos héros de théâtre sont atteints de cette espèce d’égarement ; ils raisonnent, ils racontent même, ils arrangent des projets, s’objectent des difficultés qu’ils lèvent dans le moment, balancent différents partis et des raisons contraires, et se déterminent enfin au gré de leurs passions et de leurs intérêts ; tout cela comme s’ils ne pouvaient se sentir et se conseiller eux-mêmes, sans articuler tout ce qu’ils pensent.

727. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Ernest Feydeau » pp. 106-143

Le malheureux qui raconte son histoire semble croire qu’elle n’est pas finie. […] Ernest Feydeau, est un jeune homme fatal, comme toute la race d’où il vient, qui raconte à la première personne les malheurs de sa vie jusqu’à sa mort, que M. Feydeau est bien obligé, lui, de raconter à la troisième.

728. (1925) Portraits et souvenirs

J’ai entendu souvent raconter par eux l’arrivée à Paris de ce « dernier des Chateaubriand ». […] Le poète s’y suppose autant qu’il s’y raconte. […] La conversation où Leconte de Lisle me raconta ce fait curieux date du printemps 1893. […] oui, une fois il avait été le jouet d’un phénomène inexplicable et il allait nous le raconter. […] On raconte qu’il y logeait sous le nom de M. de Breugnol, pour échapper à ses créanciers.

729. (1888) Impressions de théâtre. Deuxième série

Je ne vous le raconterai pas, voulant vous laisser la joie d’une surprise. […] Colineau raconte à Édouard qu’il a passé à Mâcon une nuit d’ivresse. […] Tabarin monte sur les planches, commence la parade, raconte avec des airs de Jocrisse qu’il est jaloux de sa femme. […] Ils n’ont même pas su nous garder intacts les trente petits vers où Anacréon nous raconte l’Amour mouillé. […] Il va le tuer, revient, raconte la chose. « Pourquoi l’as-tu tué ?

730. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Delille »

Madame Lebrun, qui nous le fait connaître à merveille, raconte qu’à la Malmaison, chez madame du Moley, il était convenu, pour plus de liberté, qu’en se promenant dans les jardins, on tiendrait à la main une branche de verdure, si l’on désirait ne pas se chercher ou s’aborder : « Je ne marchais jamais sans ma branche, dit-elle ; mais je la jetais bien vite, si j’apercevais l’abbé Delille. » Madame Lebrun elle-même, avec sa facilité, son goût vif à peindre et sa séduction de coloris, me semble avoir été, dans ce même monde, une chose légère, assez semblable à l’abbé Delille. […] Bernardin de Saint-Pierre, dans une lettre à sa femme, raconte que l’abbé Delille est venu s’asseoir près de lui à l’Institut : « Je l’ai trouvé si aimable et si amoureux de la campagne, dit-il, et il m’a fait des compliments qui m’ont causé tant de plaisir, que je lui ai offert de venir à Éragny… »  — Après bien des lectures à l’Académie et dans les soupers, le poëme des Jardins, premier fruit raffiné de ce goût champêtre, parut en 1782, et n’eut pas de peine à fixer toute l’attention, alors si prompte. […] On a dit plaisamment qu’une faute de français, un cuir d’un membre du Comité de salut public qu’il rencontra, le fit s’écrier : « Décidément on ne peut plus habiter ce pays-ci. » On a raconté non moins plaisamment37 que l’abbé de Cournand, alors son ami, et qui depuis crut lui jouer un mauvais tour en retraduisant les Géorgiques, étant de garde aux Tuileries, reconnut le poëte qui se promenait malgré sa mise en arrestation au logis, qu’il fit mine de le vouloir reconduire chez lui au nom de la loi, et que depuis lors Delille avait peur de la garde nationale et de l’abbé de Cournand. […] s’écria Delille ; ce qui a été dit en prose n’a pas été dit. » Les élèves descriptifs de Delille avaient tous, plus ou moins, contracté cette habitude, cette manie de larcin, et M. de Chateaubriand raconte agréablement que Chênedollé lui prenait, pour les rimer, toutes ses forêts et ses tempêtes ; l’illustre rêveur lui disait : « Laissez-moi du moins mes nuages ! 

731. (1875) Premiers lundis. Tome III « Du point de départ et des origines de la langue et de la littérature française »

Quand on commence, comme les Bénédictins, à Pythéas, le navigateur grec de Marseille, antérieur de 400 ans environ à Jésus-Christ, qui se dirigea au Nord à la recherche de la mystérieuse Thulé, et qui racontait tant de choses et si merveilleuses, qu’il passa en son temps pour menteur, comme Marco Polo dans le sien, et qu’on lui appliquait déjà le proverbe : A beau mentir, qui vient de loin ; quand on s’arrête à montrer les premiers établissements des Romains dans le midi de la Gaule, qu’on énumère les nombreux rhéteurs et grammairiens latins que produisit cette contrée, dès lors si prompte au beau langage : qu’on n’omet ni Marc-Antoine Gniphon, qui tint école à Rome, l’un des maîtres de César, et qui eut Cicéron pour auditeur ; — ni Valère Caton, le grammairien et le poète, que les Romains, novices encore à l’harmonie, avaient surnommé la Sirène latine, pour son talent de lire les poètes et de les former, qui faisait lui-même d’assez beaux vers, assez énergiques et touchants (il avait été dépossédé de son champ par les vétérans, cela l’inspira), et qu’a imité Virgile ; — quand on est heureux de rencontrer sur son chemin le grand comédien honnête homme Roscius, sous prétexte qu’il naquit dans la Narbonnaise ; — quand on embrasse ce cadre et qu’on tient à le remplir en détail, on écrit tout simplement un livre intéressant qui comprend une riche province de la culture latine, une province entièrement romaine depuis César. […] La solitude, avec ses pures délices, est célébrée par saint Eucher, évêque de Lyon, et racontée dans ses détails, exprimée dans ses mœurs par Cassien, né peut-être dans la petite Scythie, au bord de la mer Noire, mais qui vécut et écrivit à Marseille. […] Posthumianus, qui a visité les moines de la Thébaïde dans leurs solitudes, fait d’abord un récit de tout ce qu’il y a vu ; après quoi, s’adressant à Sulpice, il le prie de lui raconter les traits de la vie de saint Martin, qu’il avait omis dans sa biographie de ce saint ; mais Sulpice, écartant de lui cette tâche, la rejette sur Gallus, comme particulièrement apte à la remplir eu sa qualité de disciple du saint évêque. […] Apulée raconte (Metam., IX, 39) qu’un soldat romain parlant à un jardinier grec et lui parlant latin ne fut pas compris, ce que voyant, il répéta sa question en grec (græce) ; et alors le paysan comprit à merveille.

732. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXVe entretien » pp. 317-396

L’histoire que Confucius y raconte, la doctrine, la morale, la politique en font tout le prix. […] Les annales racontent, sur toutes les dynasties, les succès des études des fils des empereurs, dont plusieurs l’ont été depuis. […] Comme les faits y sont racontés en peu de mots et tels qu’ils sont, leurs causes et leurs effets, leur enchaînement et leur ensemble, dont il lui est si aisé de se faire le commentaire, lui présentent un miroir où il se voit tel qu’il est et tel que l’histoire le montrera aux siècles futurs. […] Après ces premiers chapitres viennent ceux des mots, c’est-à-dire des phrases de quelques mots qui font proverbe, sentence, etc., qu’on cite ou auxquels on fait sans cesse allusion dans les ouvrages de littérature, soit en prose ou en vers, et on donne l’explication de chacune en citant l’anecdote, le discours, la circonstance où elle a été dite, à peu près comme si l’on racontait comment et à quelle occasion César dit son Veni, vidi, vici , ou bien le Tu quoque, mi Brute  !

733. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXe entretien. Dante. Deuxième partie » pp. 81-160

Alors le Romain raconte, en vers pathétiques, au Dante comment il fut appelé à son aide par une femme céleste, dans laquelle on entrevoit soudain Béatrice. […] Le tyran qui les épie à leur insu, et qui, les perçant à la fois du même glaive, confond dans un même ruisseau leur sang sur la terre et dans un même soupir leur première et leur dernière respiration d’amour ; Le ciel qui les châtie avec une sévérité morale, mais avec un reste de divine compassion, dans un autre monde, et qui leur laisse au moins, à travers leur expiation rigoureuse, l’éternelle consolation de ne faire qu’un dans la douleur, comme ils n’ont fait qu’un dans la faute ; La pitié du poète ému qui les interroge et qui les envie (on le reconnaît à son accent) tout en les plaignant ; Le principal coupable, l’amant, qui se tait, qui sanglote de honte et de douleur d’avoir causé la mort et la damnation de celle qu’il a perdue par trop d’amour ; la femme qui répond et qui raconte seule pour tous les deux, en prenant tout sur elle, par cette supériorité d’amour et de dévouement qui est l’héroïsme de la femme dans la passion ; Le récit lui-même, qui est simple, court, naïf comme la confession de deux enfants ; Le cri de vengeance qui éclate à la fin de ce cœur d’amante contre ce Caïn qui a frappé dans ses bras celui qu’elle aime ; Cette tendre délicatesse de sentiment avec laquelle Francesca s’abstient de prononcer directement le nom de son amant, de peur de le faire rougir devant ces deux étrangers, ou de peur que ce nom trop cher ne fasse éclater en sanglots son propre cœur à elle si elle le prononce, disant toujours lui, celui-ci, celui dont mon âme ne sera jamais « désunie » ; Enfin la nature du supplice lui-même, qui emporte dans un tourbillon glacé de vent les deux coupables, mais qui les emporte encore enlacés dans les bras l’un de l’autre, se faisant l’amère et éternelle confidence de leur repentir, buvant leurs larmes, mais y retrouvant au fond quelque arrière-goutte de leur joie ici-bas, flottant dans le froid et dans les ténèbres, mais se complaisant encore à parler de leur passé, et laissant le lecteur indécis si un tel enfer ne vaut pas le ciel… Quoi de plus dans un récit d’amour ? […] « Le pécheur releva sa bouche de sa féroce pâture, et, l’essuyant aux cheveux de la tête qu’il avait rongée par derrière, il commença ainsi : « “Tu veux que je renouvelle la douleur désespérée qui me tenaille le cœur, rien qu’en pensant d’avance à ce que je vais te raconter. […] « “Une étroite lucarne à travers les murailles de la tour de la Faim, qui a reçu son nom de moi, et qui se referma encore sur tant d’autres, m’avait déjà laissé entrevoir plusieurs fois la clarté du jour par ses fissures, quand je fis un rêve qui déchira pour moi le voile de l’avenir.” » Ugolino raconte ici son rêve, qui n’est qu’une allusion symbolique aux partis qui se combattaient entre Lucques, Pise et Florence.

734. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre III. Le roman » pp. 135-201

Mais, ce ne sont pas des rêves racontés comme nous en connaissons tant ; ici, il y a quelque chose de plus en originalité, quelque chose de moins en littérature. […] Les femmes qui écrivent ont une tendance à se raconter ou à faire croire qu’elle se racontent que la littérature objective n’est pas faite par les femmes. […]   Paul Brulat : M. d’Alméras nous a raconté les débuts de M. 

735. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le marquis de Lassay, ou Un figurant du Grand Siècle. — I. » pp. 162-179

Le vrai et le meilleur témoin est Lassay, qui a raconté en détail, et avec une admiration tendre, l’histoire de celle qu’il regretta toute sa vie. […] Il a raconté dans une relation historique fort précise, et dans des lettres écrites au maréchal de Bellefonds, toute cette campagne de Hongrie contre les Turcs (1685).

736. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — III. (Suite et fin.) » pp. 454-472

. — Un des épisodes les plus célèbres de l’Histoire de Venise est la fameuse et à la fois obscure conjuration de 1618, racontée par Saint-Réal avec tant d’art et de vérité que quelques-uns l’ont crue même en partie imaginée par lui. […] On raconte qu’un jour, à une réception des Tuileries, le roi s’adressa à lui en lui citant quelques vers latins du poète ; et M. 

737. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — II » pp. 71-89

Toute cette scène est racontée par celui-ci d’une manière vive et charmante. […] C’est un tout qui se détache et qui fait un parfait ensemble ; la façon de dire et de raconter y est égale à l’action.

738. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Henri IV écrivain. par M. Eugène Jung, ancien élève de l’École normale, docteur es lettres. — I » pp. 351-368

On a souvent raconté qu’après la victoire de Coutras (octobre 1587) les chefs protestants, et Henri tout le premier, ne surent point profiter de leurs avantages. […] D’Aubigné nous a raconté les causes, à son égard, de l’inimitié de la comtesse.

739. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Madame Swetchine. Sa vie et ses œuvres publiées par M. de Falloux. »

Qu’aurait-ce donc été si j’avais parlé avec toute la liberté qu’un critique biographe peut prendre, si j’avais raconté plus d’une particularité qui me venait et qui m’était attestée par des témoins aussi dignes de foi, mais d’un autre bord que M. de Falloux ? […] Le pauvre bonhomme ne savait plus que faire et la cherchait toujours machinalement. » — M. de Falloux, ayant lu cette anecdote, a cru de son devoir d’en contester l’authenticité ; il a fait une espèce d’enquête auprès du valet de chambre du général Swetchine : je n’ai pas entrepris moi-même de contre-enquête ; mais le fait m’a été raconté à deux reprises, et a eu pour témoin une femme du monde.

740. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Œuvres complètes d’Hyppolyte Rigault avec notice de M. Saint-Marc Girardin. »

On me raconte deux petits faits qui le montrent assez au naturel à cette date. […] Dans le premier, il commit une faute par excès de préoccupation morale : à force de vouloir éviter la chronique scandaleuse, il se jeta dans la chronique vertueuse et raconta comment des demoiselles de sa connaissance, millionnaires, prenaient leurs maris parmi des jeunes gens distingués et sans fortune, précepteurs de leurs jeunes frères.

741. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Madame de Staël. Coppet et Weimar, par l’auteur des Souvenirs de Mme Récamier »

Un voyage et un séjour que Mme de Staël fit aux eaux d’Aix en 1811, et dans lequel elle rencontra Mme la comtesse de Boigne, me rappelle une anecdote qui a été souvent racontée devant moi, et qui donne bien l’idée de ce qu’était cette improvisation prodigieuse d’esprit, cette conversation à la fois naturelle et extraordinaire. […] Dans l’un des carrosses, les dames avaient eu peur ; on avait fait arrêter, et l’on était descendu au moment où les coups étaient le plus forts ; il y avait eu maint incident qu’on se racontait avec agitation.

742. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Œuvres de M. P. Lebrun, de l’Académie française. »

Daru a souvent depuis raconté à l’auteur comment les choses s’étaient passées. […] Il faut l’entendre nous raconter sa vie, et en prose d’abord ; car sa prose a du naturel et de la grâce : « C’est là que j’ai passé, dit-il, loin des distractions et des entraînements du monde, de 1808 à 1816 ou 17, bien des semaines ou des mois de la belle saison et de l’automne, quelquefois avec un ami, le plus souvent tout seul, et alors dans une solitude si profonde, si complète, que je demeurais des jours entiers sans faire usage de la voix.

743. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Jean-Bon Saint-André, sa vie et ses écrits. par M. Michel Nicolas. »

On raconte le même tour de force de l’archevêque M. de Harlay. […] On raconte que dans les premiers mois où il siégeait à la Convention, Jean-Bon, au milieu de tous les soins et soucis que lui donnait la chose publique, trouvait encore le temps de diriger de loin l’instruction du fils de sa sœur, le jeune Belluc30, et que chaque courrier apportait à l’enfant ses devoirs corrigés.

744. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire des cabinets de l’Europe pendant le Consulat et l’Empire, par M. Armand Lefebvre (suite et fin.) »

La nature, en livrant à l’historien ce personnage nouveau de sa plus haute invention et en qui elle s’est visiblement complu, en le remettant, pour ainsi dire, entre ses mains pour le raconter et le peindre, semble lui dire comme Horace au poëte : « Regardez-y bien ! […] Il aurait pu raconter bien des épisodes piquants, restés longtemps mystérieux, et s’en autoriser dans ce tableau tracé par lui des inimitiés de la vieille Europe, tremblante et soumise en 1812, mais rongeant son frein et ne désespérant pas de la fortune.

745. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre V. De la littérature latine, pendant que la république romaine durait encore » pp. 135-163

Excepté Xénophon, qui avait été lui-même acteur dans l’histoire militaire qu’il raconte, mais qui néanmoins n’a jamais eu de pouvoir dans l’intérieur de la république, aucun des hommes d’état d’Athènes ne fut en même temps célèbre par ses talents littéraires ; aucun, comme Cicéron et César, ne crut ajouter par ses écrits à son existence politique. […] Plutarque, qui laisse de ce qu’il peint des souvenirs si animés, raconte que Brutus, prêt à s’embarquer pour quitter l’Italie, se promenant sur le bord de la mer avec Porcie, qu’il allait quitter, entra avec elle dans un temple ; ils y adressèrent ensemble leur prière aux dieux protecteurs.

746. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Jean Richepin »

Richepin, nous ayant raconté la naissance d’un gueux dans un fossé, par la neige, nous jure, « le front découvert, que l’autre (entendez Jésus) n’a pas tant souffert », nous trouvons drôle son grand geste après qu’il s’est si visiblement amusé à nous décrire en rimes triples, avec des mots furibonds, un accouchement pittoresque. […] Et quelle idée biscornue de nous raconter, dans le rythme sautillant de Remy-Belleau chantant Avril, l’origine de la vie aux profondeurs de la mer : C’est en elle, dans ses flots, Qu’est éclos L’amour commençant son ère Par l’obscur protoplasma Qui forma La cellule et la monère.

747. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre quatrième »

» A ces étranges paroles, raconte Mathieu Paris28, il perdit tout à coup la voix et devint non-seulement muet, mais idiot. […] La langue, dans tous ces écrits, est claire, et les tours en sont vifs ; on sent qu’elle raconte et qu’elle raille mais elle manque de variété et de couleur.

748. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre dixième »

Après avoir raconté l’histoire de la terre émergeant du sein des mers desséchées, celles des animaux qui la peuplent, des végétaux qui revêtent sa surface, des minéraux que recèlent ses entrailles, celle de l’homme, roi de toutes les choses créées, il voulut raconter ce qui a précédé toute histoire, décrire ce qui n’avait pas de forme, débrouiller le chaos, y suivre, y tracer les grands commencements des choses, en faire sortir par degrés l’univers avec la dernière face que la création lui a imprimée.

749. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Mémoires de Philippe de Commynes, nouvelle édition publiée par Mlle Dupont. (3 vol. in-8º.) » pp. 241-259

Il dut avoir plus d’une fois à se plaindre de lui ; on raconte l’histoire d’une botte armée d’éperon dont le duc lui donna un jour à travers le visage, sans doute en remercîment de quelque bon conseil. […] Le serviteur du duc de Bourgogne, au sortir de là, impatient de colère, n’a de hâte que pour faire seller son cheval, et aller raconter à son maître la trahison du connétable.

750. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Éloges académiques de M. Pariset, publiés par M. Dubois (d’Amiens). (2 vol. — 1850.) » pp. 392-411

Il avait son parti pris avant de quitter Paris, il croyait à la contagion ; et, dans le récit qu’il a publié de son premier voyage, il a naïvement raconté comment, à peine arrivé à Madrid, il en était déjà à rêver tout un vaste système de lazarets, qui aurait embrassé de son réseau toute l’Europe. […] L’anecdote est assez agréablement racontée chez Pariset ; pourtant, au lieu de dire l’hôpital Necker et de nommer la fondatrice, il nous parle d’un établissement « qu’une dame célèbre avait fondé du côté de Vaugirard » ; il tourne autour de cette dame comme s’il voulait et n’osait la définir : « La simplicité, dit-il, n’est pas toujours compagne de la bienfaisance.

751. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres inédites de la duchesse de Bourgogne, précédées d’une notice sur sa vie. (1850.) » pp. 85-102

Lisons donc du pur Louis XIV, ou mieux écoutons le grand roi causer et raconter : langue excellente, tour net, exact et parfait, termes propres, bon goût suprême pour tout ce qui est extérieur et de montre, pour tout ce qui tient à la représentation royale. […] Saint-Simon, qui n’est nullement malveillant pour la duchesse de Bourgogne, nous raconte dans le plus grand détail, et comme le tenant des confidentes les mieux informées, les légers faibles de la princesse pour M. de Nangis, pour M. de Maulévrier, pour l’abbé de Polignac.

752. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Monsieur Droz. » pp. 165-184

Il racontait souvent avec énergie l’impression qu’il reçut de l’état de terreur qui pesait alors sur la grande cité : « Cet état de prostration et de stupeur était tel (c’est lui qui parle), que si l’on avait dit à un condamné : Tu iras dans ta maison et là tu attendras que la charrette passe demain matin pour y monter, il serait allé et il y serait monté. » Ce qui n’est pas moins remarquable chez quelqu’un qui avait senti à ce degré l’horreur des crimes, il ne fut point dégoûté de la liberté ; il n’entra point, au sortir de là, dans la crainte et l’aversion des progrès modérés et des lumières. […] Il eut de vives impressions au camp devant Mayence dans l’été de 1795, et il les a racontées depuis ; Sterne ne les aurait pas éprouvées ni exprimées différemment : Une partie des gardes avancées de l’attaque de gauche, nous dit-il, était placée dans un jardin anglais, près du village de Monback.

753. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — I. » pp. 201-219

Je laisse à son biographe le soin de nous raconter ses premiers essais en vers, en prose rimée. […] En cette qualité de lieutenant général des chasses, il connaissait de certains délits et était investi d’un office de judicature qu’il remplissait sans trop sourire En 1764 (il avait trente-deux ans), se place un des épisodes les plus dramatiques de sa vie et qu’il a raconté lui-même dans un de ses Factums : c’est l’histoire de Clavico dont on a fait des drames, mais le seul vrai drame est chez Beaumarchais.

754. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « L’abbé Gerbet. » pp. 378-396

Il nous le raconte lui-même à chaque ligne de ses chapitres sur le Sacrement ; le quatrième livre explique les trois autres. […] C’est le sentiment vif de cette incomparable et idéale agonie qui lui inspira un Dialogue entre Platon et Fénelon, où celui-ci révèle au disciple de Socrate ce qu’il lui a manqué de savoir sur les choses d’au-delà, et où il raconte, sous un voile à demi soulevé, ce que c’est qu’une mort selon Jésus Christ : Ô vous, qui avez écrit le Phédon, vous, le peintre à jamais admiré d’une immortelle agonie, que ne vous est-il donné d’être le témoin de ce que nous voyons de nos yeux, de ce que nous entendons de nos oreilles, de ce que nous saisissons de tous les sens intimes de l’âme, lorsque, par un concours de circonstances que Dieu a faites, par une complication rare de joie et de douleurs, la mort chrétienne, se révélant sous un demi jour nouveau, ressemble à ces soirées extraordinaires dont le crépuscule a des teintes inconnues et sans nom !

755. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Monsieur Étienne, ou une émeute littéraire sous l’Empire. » pp. 474-493

Étienne, en écorchant ainsi le nom de Conaxa dont il faisait Onaxa, marquait assez qu’il n’avait nulle connaissance de cette ancienne pièce, ou du moins du manuscrit ainsi intitulé, et il en provoquait hardiment la confrontation avec son propre ouvrage : « Si quelque héritier ou quelque ami du jésuite voulait même le faire imprimer, disait-il, je lui indique l’adresse de Le Normant et Barba, chez lesquels va paraître ma quatrième édition. » Dans une préface qu’il se décida à joindre à cette quatrième édition mise en vente à quelques jours de là, il entrait dans quelques explications, et racontait qu’un de ses amis, M.  […] Après avoir raconté comment, dans un triage de vieux papiers qui se faisait aux Archives de la police, il avait mis la main sur le manuscrit en question et l’avait sauvé des flammes, puis l’avait confié à M. 

756. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Regnard. » pp. 1-19

Durant les relâches forcées qu’il fait dans quelque île de la Baltique, il raconte qu’il allait tous les jours passer quelques heures sur des rochers escarpés où la hauteur des précipices et la vue de la mer n’entretenaient pas mal ses rêveries : Ce fut, dit-il, dans ces conversations intérieures que je m’ouvris tout entier à moi-même, et que j’allai chercher dans les replis de mon cœur les sentiments les plus cachés et les déguisements les plus secrets, pour me mettre la vérité devant les yeux sans fard, telle qu’elle était en effet. […] la femme sensée et rigide, le comique riant et un peu dissolu disent la même chose ; Mme Grognac et Lisette chez Regnard, quand elles parlent des jeunes gens à la mode, font le pendant exact de ce que Mme de Maintenon racontait à Mme des Ursins sur les jeunes femmes à la mode au temps de la duchesse de Bourgogne : des deux côtés, c’est le jeu effréné, c’est le vin, le contraire en tout du sobre et du poli ; l’orgie avait commencé à huis clos sous Louis XIV.

757. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Franklin. — III. Franklin à Passy. (Fin.) » pp. 167-185

On raconte pourtant, de sa part, quelques méprises. […] Quincy (22 avril 1779), de ce que vous racontez de la politesse française et des manières honnêtes que montrent les officiers et l’équipage de la flotte.

758. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre premier. Le problème des genres littéraires et la loi de leur évolution » pp. 1-33

La société, en effet, commence par chanter ce qu’elle rêve, puis raconte ce qu’elle fait, et enfin se met à peindre ce qu’elle pense… Une observation importante : nous n’avons aucunement prétendu assigner aux trois époques de la poésie un domaine exclusif, mais seulement fixer leur caractère dominant. […] Tous ceux qui ont à raconter l’histoire littéraire de plusieurs siècles savent la difficulté qu’il y a à classer certaines œuvres.

759. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre IX : M. Jouffroy écrivain »

Il a raconté lui-même sa conversion, et comment de chrétien il devint philosophe. […] Nous croyons le scepticisme à jamais invincible, parce que nous regardons le scepticisme comme le dernier mot de la raison sur elle-même. » Ses amis m’ont raconté qu’une fois, ayant entrepris de prouver la spiritualité de l’âme, il passa involontairement trois mois à décrire les nerfs, le cerveau, les effets moraux des blessures et des contusions cérébrales, à décomposer les actions de l’esprit, à comparer les deux ordres de faits, et qu’enfin, obligé de conclure, il déclara que la science n’était pas assez avancée et qu’on ne pouvait rien dire.

760. (1890) La bataille littéraire. Troisième série (1883-1886) pp. 1-343

Dans Sapho est racontée l’histoire d’un jeune homme sans fortune qui, tout en préparant son examen aux consulats, tombe un soir dans un bal d’artistes. […] — Allons, voyons, raconte-moi ça. […] Tout y est vrai, tout y est juste, tout y est raconté avec une rare précision, mais le roman est-il fait pour devenir le révélateur des huis clos que la Gazette des Tribunaux n’oserait reproduire ? […] Criquette est une de ces enfants-là, et c’est son odyssée que nous raconte M.  […] Autour d’elle, on racontait le drame.

761. (1923) Nouvelles études et autres figures

Cette mort, Plutarque nous l’a racontée dans le Banquet des Sept Sages. […] Telle fut l’histoire qu’il raconta un jour à Byron. […] Mais l’Arioste ne croit pas ce qu’il raconte. […] Les seules pages faibles du Sahara sont celles où l’auteur nous raconte la prise d’El Aghouat. […] L’histoire de ce personnage, que nous raconte M. 

762. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Les legs de l’exposition philosophie de la danse »

Le triste solo de la danse orientale raconte la séquestration de la femme, la jalousie du maître, l’isolement des sexes.

763. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXIV » pp. 251-258

Madame de La Fayette racontait plaisamment à madame de Sévigné qu’on discourut tout une après-dînée chez Gourville, sur les personnes qui ont le goût au-dessus ou au-dessous de leur esprit.

764. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 3, que le merite principal des poëmes et des tableaux consiste à imiter les objets qui auroient excité en nous des passions réelles. Les passions que ces imitations font naître en nous ne sont que superficielles » pp. 25-33

Lucien raconte seulement que les abderitains aïant vû la répresentation de l’Andromede d’Euripide durant les chaleurs les plus ardentes de l’été, plusieurs d’entre eux qui tomberent malades bientôt après, recitoient dans le transport de la fievre des vers de cette tragedie ; c’étoit la derniere chose qui eût fait sur eux une grande impression.

765. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — I. Takisé, Le taureau de la vieille »

Quand il rendit visite au roi, le gambari lui raconta qu’il avait vu chez une vieille femme du village une jeune fille d’une beauté sans pareille : « Cette fille, conclut-il ne peut avoir qu’un sartyi pour époux. » Le sartyi ordonna incontinent à son griot d’aller, en compagnie du dioula, chercher la jeune fille.

766. (1882) Types littéraires et fantaisies esthétiques pp. 3-340

Explique-t-il les effets de la musique, ou raconte-t-il les phases successives d’une sensation voluptueuse ? […] Nous l’aimons, non parce qu’elle nous flatte et nous corrompt, mais parce qu’elle nous raconte à nous-mêmes nos sentiments, nos passions, notre histoire morale tout entière. […] À la cour de la duchesse, après avoir raconté toutes les folies de son maître, il termina son discours par ces paroles admirables : « Eh bien ! […] Regardez bien cependant au fond de son histoire : qu’est-ce autre chose qu’une histoire d’occurrence journalière, et si vulgaire qu’on ne sait comment la raconter sans brutalité ? […] Daniel Stern raconte dans son livre un fait curieux qui est au plus grand honneur de l’Église catholique.

767. (1889) La bataille littéraire. Première série (1875-1878) pp. -312

Émile Zola écrit, et quelle que soit la fable qu’il ait à raconter, quel que soit son cadre, il y fait entrer tout ce qu’il a de couleur et d’observation sur sa palette. […] On me raconta que, le jour de sa mort, elle n’avait cessé d’entendre des cloches, bien qu’Alexéïevka soit à cinq verstes de l’église, et que ce jour-là ne fût pas un dimanche. […] il aimait à raconter ses affaires ; mais quoi qu’il racontât, il y avait toujours quelque chose qu’il ne disait pas ; il joignait le partage à la cachotterie. […] Le maître de la maison donne l’exemple, il se raconte, et quand il a fini de parler passe la parole à un de ses convives. […] Voici une anecdote que raconte Odilon Barrot au commencement du volume.

768. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Première partie. Préparation générale — Chapitre II. De la sensibilité considérée comme source du développement littéraire »

Au reste la critique de notre siècle a fait une rude guerre il toutes ces belles paroles ; elle nous a appris qu’il fallait les imputer plus souvent à l’homme d’esprit qui racontait, qu’à homme de cœur qui avait senti.

769. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Un grand voyageur de commerce »

Les grandes choses qu’il a faites ou qu’il a vues, il ne les raconte jamais simplement, et cela en diminue un peu la grandeur.

770. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre VII. Le théâtre français contemporain des Gelosi » pp. 119-127

La Farce qu’il nous raconte n’aurait, comme une infinité d’autres, laissé aucune trace sans doute dans l’histoire de notre théâtre, si elle n’avait touché à la politique.

771. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XVI, les Érynnies. »

Plutarque raconte, à ce sujet, une étrange histoire. — Un soir, Dion, le libérateur de la Sicile, était assis, pensif, sous un portique assombri par le crépuscule ; un bruit le tira de sa rêverie.

772. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 17, quand ont fini les représentations somptueuses des anciens. De l’excellence de leurs chants » pp. 296-308

Cet historien raconte avec indignation que Rome se trouvant menacée de la famine, on avoit pris la précaution d’en faire sortir tous les étrangers, même ceux qui professoient les arts liberaux.

773. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « I. Historiographes et historiens » pp. 1-8

Louis XIV, par exemple, investissait bien deux des plus honnêtes grands hommes de son temps, Boileau et Racine, du soin de raconter une des campagnes qu’il menait en personne.

774. (1714) Discours sur Homère pp. 1-137

Les premiers ont pour eux le titre même de l’ouvrage, et toutes les choses qui en font la matiere : car, quoique ce qui se passe dans l’iliade, ne soit qu’une fort petite partie de la guerre de Troye, ce qui s’y raconte, fournit presque le reste. […] muse raconte-moi la colere d’Achille, qui fut si fatale aux grecs, et qui coûta la vie à tant de héros. voilà les paroles du poëte, et son dessein : mais il faut remarquer que selon les sçavans, le mot grec que nous rendons simplement par celui de colere, signifie colere noble, ressentiment héroïque . […] Il a semé son ouvrage de ce que les sentimens naturels ont de plus touchant, de ce que les passions ont de plus vif : mais il ne s’est pas contenté de raconter ces passions ; il les a mises sous les yeux. […] Il raconte des faits ; il faut examiner le caractere de sa narration. […] Il étoit le maître d’imaginer les circonstances pour les assortir au fait principal qu’il avoit à raconter.

775. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxiiie entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff »

Zverkoff lui avait un jour raconté ce qu’il appelait l’atroce ingratitude d’Anina. […] — Arina, … — me dit-elle, vous comprenez, … je rougis de vous le raconter. — Est-il possible ? […] — Mais n’allez pas le raconter. […] Plutôt que de penser à cela, raconte-moi ce que tu as vu à l’étranger. […] Le récit d’une nuit passée au milieu des Prairies avec les crédules enfants d’un autre village russe à entendre les merveilles populaires que les mères ont raconté aux enfants.

776. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxvie entretien. L’ami Fritz »

Où donc ces jeunes yeux ont-ils pu voir ce qu’ils racontent aujourd’hui comme des daguerréotypes vivants ? […] Vous allez voir ; ici il faut beaucoup plus citer que dire ; car on peut raconter le dessin, mais il faut peindre la couleur. […] Le grand Frédéric Schoûltz, ancien secrétaire du père Kobus, et ancien sergent de la landwehr, en 1814, avec sa grande redingote bleue, sa perruque ficelée en queue de rat, ses longs bras et ses longues jambes, son dos plat et son nez pointu, se démenait d’une façon étrange, pour raconter comment il était réchappé de la campagne de France, dans certain village d’Alsace, où il avait fait le mort pendant que deux paysans lui retiraient ses bottes. […] » Il racontait cet événement au gros percepteur Hâan, qui semblait l’écouter, son ventre arrondi comme un bouvreuil, la face pourpre, la cravate lâchée, ses gros yeux voilés de douces larmes, et qui riait en songeant à la prochaine ouverture de la chasse. […] Elle m’a tout raconté ce qui se passe ici.

777. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre septième. Les altérations et transformations de la conscience et de la volonté — Chapitre deuxième. Troubles et désagrégations de la conscience. L’hypnotisme et les idées-forces »

Lehmann lui-même raconte que, venant de voir un chien qui jouait, il essaya vainement d’en reproduire la forme sur le papier, bien qu’il eût fait grande attention à l’animal. […] Ochorowicz raconte ainsi une de ses expériences de suggestion mentale ; « Lève ta main droite ! […] On nous raconte aussi des histoires peu convaincantes : le révérend Godfrey, en se mettant au lit, désira, avec toute l’énergie de sa volonté et toute la concentration de sa pensée, apparaître au pied du lit de son amie Mme X… Il rêva qu’il l’avait en effet visitée, et lui demanda si elle l’avait vu en rêve : « Oui. — Comment ? […] Dans un des cas, un frère avait supplié son frère de lui apparaître ; dans un autre, raconté par miss Bird, l’auteur anglais de livres de voyages, il y avait eu promesse de la personne qui mourut et apparut ensuite. […] Bergson a raconté, dans la Revue philosophique, l’histoire de cet hypnotisé qui paraissait lire à travers le dos un livre ouvert devant l’hypnotiseur, et qui lisait réellement la page reflétée sur la cornée de ce dernier.

778. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXVIIIe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 65-128

Alors je lui racontai précipitamment comment j’avais pris les habits et la zampogne de mon oncle dans le coffre, afin de ne pas être exposée, comme une pauvre fille, aux poursuites, aux insolences et aux libertinages des hommes dans les rues ; comment mon oncle et ma tante avaient voulu s’opposer par force à mon passage, comment le père Hilario leur avait dit, au nom du bon Dieu : Laissez-la faire son idée ; comment il avait promis d’avoir soin d’eux, à défaut de leurs deux enfants, dans la cabane ; comment une noce, qui avait besoin d’un musicien, m’avait ramassée sur le pont du Cerchio ; comment cette noce s’était trouvée être la noce de la fille du bargello ; comment leur gendre, en s’en allant de la maison avec sa sposa, avait laissé vacante la place de serviteur et de porte-clefs de la prison ; comment la femme et le mari, trompés par mes vêtements et contents de ma figure, m’avaient offert de les servir à la place du partant ; comment j’avais pressenti que la prison était la vraie place où j’avais le plus de chance de trouver et de servir mon frère prisonnier ; comment j’avais joué de ma zampogne, dans ma chambre haute au sommet de la tour, pendant la nuit, afin de lui faire connaître, par notre air de la grotte, que je n’étais pas loin et qu’il n’était pas abandonné de tout le monde, au fond de son cachot, où il avait été jeté par les sbires ; comment le bargello m’avait appris mon service le matin et comment j’avais compris que le meurtrier c’était lui ; comment j’étais parvenue, petit à petit, à l’empêcher de pousser aucun cri en me revoyant ; comment je le verrais à présent à mon aise, et sans qu’on se doutât de rien, tous les jours ! […] Je m’approchai avec un visage gracieux, compatissant, de la loge de la femme du galérien qui donnait le sein à son nourrisson ; je la plaignis, je la flattai d’une prochaine délivrance, de la certitude de retrouver son amant après sa peine accomplie ; je la provoquai à me raconter toutes les circonstances que déjà je connaissais de ses disgrâces ; je fis vite amitié avec elle, car ma voix était douce, attendrie encore par l’émotion que j’avais dans l’âme depuis le matin ; de plus nous étions du même âge, et la jeunesse ne se défie de rien, pas plus que l’amour et le chagrin. […] Alors, il nous raconta qu’il avait frappé à toutes les portes de Lucques pour savoir si l’on avait entendu parler d’un homicide commis dans la montagne, sur un brigadier de sbires, et si l’on savait quelque chose du sort qu’on réservait au jeune montagnole ; qu’on lui avait répondu qu’il serait jugé prochainement par un conseil de guerre, et qu’en attendant il était renfermé dans un des cabanons de la prison, sous la surveillance du bargello ; que le bargello était incorruptible, mais très humain, et qu’il n’aggraverait certainement pas jusqu’à l’échafaud les peines du pauvre criminel.

779. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIIe entretien. Madame de Staël »

VIII La femme dont nous allons raconter la vie et les œuvres sortit de son sexe ; elle affronta le bruit, elle se jeta dans le tumulte d’un grand siècle, elle parla, elle chanta, elle écrivit sur la religion, la philosophie, la politique, la liberté, la tyrannie ; elle brava l’échafaud, elle subit l’exil ; elle combattit corps à corps tantôt les factions, tantôt le conquérant de l’Europe, et, si son nom ne nous rappelait son sexe, nous la placerions par ses œuvres au rang des grands hommes ; si c’est sa gloire, c’est aussi son malheur ; moins virile, elle nous intéresserait davantage. […] Racontons : IX Madame de Staël était fille de M.  […] Une jeune fille de Genève, que madame Necker avait appelée auprès d’elle pour donner un objet aux premières amitiés de sa fille encore enfant, raconte ainsi les premiers épanchements de son amie : « Elle me parla avec une chaleur et une facilité qui étaient déjà de l’éloquence et qui me firent une grande impression.

780. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre cinquième »

Le poète dramatique n’est lui-même qu’un historien qui commence où l’annaliste finit ; il raconte ce qui s’est accompli dans ce secret des cœurs, où les passions consomment leur œuvre et où l’annaliste ne pénètre pas. […] Je m’explique par cette passion pour le grand, par cette vie de son esprit au sein du grand, ce qu’on raconte de sa candeur, de son ingénuité, de ses absences, de sa maladresse pour les choses de la vie réelle. […] César avait assez d’esprit pour les enfler, s’il eût voulu, par le discours ; mais il avait une idée trop exquise de la gloire pour être tenté de se vanter, et il a raconté simplement des choses prodigieuses, sachant bien qu’il donnerait à l’homme de guerre tout ce qu’il ôterait à l’écrivain.

781. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre V. Le Séminaire Saint-Sulpice (1882) »

Hugon racontait qu’il s’accusa, le samedi suivant, en confession « d’avoir formé des jugements téméraires sur la piété d’un saint évêque ». […] Garnier racontait ses souvenirs, parlait de M.  […] Le Hir était bien plus près du vrai en ne cherchant pas à atténuer la chose racontée et en étudiant attentivement, à la façon d’Ewald, le récit lui-même.

782. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XVII, l’Orestie. — les Euménides. »

Une vieille femme qui a peur n’est plus rien, elle vaut moins qu’un enfant » — Ce qu’elle a vu, elle le raconte avec tremblement. […] Qu’on se figure cette cohue de Stryges envahissant la scène, avec leurs cris sauvages, leurs saltations épileptiques, leurs cheveux sifflants, leurs torches livides ; et le grammairien Pollux paraîtra croyable, lorsqu’il raconte qu’à cette entrée formidable, des femmes grosses avortèrent, et que des enfants moururent dans les convulsions. […] Quintilien raconte aussi que l’Aréopage condamna à mort un enfant qui arrachait les yeux à des cailles, ne voulant pas laisser croître le monstre que ce jeu cruel prédisait.

783. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — CHAPITRE IX »

Ce drame est de ceux que l’on raconte tout au long et sans rien omettre. […] Ce corbeau, c’est le sculpteur Taupin, un vieux rapin misanthrope qui raconte son histoire en culottant sa pipe, une triste histoire, celle des liaisons vulgaires et des amours pêchées en eau trouble. […] Et le voilà qui fait le fier tout d’abord, et qui repousse, avec de sévères paroles, cette fantaisie passionnée ; si bien que la grande dame s’humilie, qu’elle se confesse, qu’elle raconte, tout du long, sa vie à ce jeune homme de vingt-six ans, à peine entrevu, qu’elle lui demande d’être son ami, son conseil, son frère, L’artiste se laisse aller à ces enchantements de sirène, à ce point que, lorsqu’il sort, à deux heures du matin, de cette étrange visite, il est amoureux fou de la comtesse et résolu de la suivre partout où elle voudra bien le mener.

784. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Edgar Allan Poe  »

La description des lieux dans le Double assassinat est classique : avec des phrases ternes d’inventaire, avec des redites et des insistances, Poe raconte la distribution de l’appartement, le mécanisme des fenêtres, l’aspect des cadavres, le désordre du mobilier, recompose l’acte du crime, suscitant de cet égorgement une vision plus concrète qu’un réquisitoire dramatisé. […] Bedloe, on se rappelle de quelle façon équivoque celui-ci, ayant raconté que dans une vision opiacée il s’était vu tomber mort, refusa de répondre quand on lui fit remarquer qu’il venait de prouver l’inanité de son hallucination. […] Certains des contes analytiques inspirent déjà une sorte de vague effroi par le calme glacial, la netteté livide dont Poe raconte quelque monstrueux assassinat, et désigne les plaies.

785. (1857) Articles justificatifs pour Charles Baudelaire, auteur des « Fleurs du mal » pp. 1-33

S’il le craint encore ou s’il a cessé de le craindre, je ne sais, mais il parle avec l’amertume d’un vaincu qui raconte ses défaites. […] Dans un temps où la littérature indiscrète a raconté au public les mœurs de la vie de bohème, les aventures de la baronne d’Ange et celles de Marguerite Gautier, il est venu après les amusants conteurs dire à son tour l’idylle à travers champs, l’églogue à côté d’une bête morte, le boudoir de la courtisane assassinée, et personne ne viendra plus après lui Il a écrit la vérité dernière. […] Les poètes satiriques, les historiens, les dramaturges ont-ils jamais été accusés de tresser des couronnes pour les forfaits qu’ils peignent, qu’ils racontent, qu’ils produisent sur la scène ?

786. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — II. (Suite.) » pp. 434-453

Il aimait à raconter comment, un matin, il la vit jaillir, en quelque sorte, tout entière du front lumineux, jusque-là chargé d’un triple nuage. […] Dans la préface qu’il a mise à sa comédie des Capitulations dans le recueil de ses Œuvres, Picard raconte comment il a recommencé sa pièce jusqu’à trois fois, à de nouveaux frais et sur un nouveau plan ; il aurait pu dire qu’il l’avait recommencée cinq et six fois, j’en ai les preuves sous les yeux ; et chaque fois, en lisant la pièce à ses amis, il a le regret de sentir que l’ouvrage (il se l’avoue) reste pâle, toujours grave et sérieux, et incomplet.

787. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « II » pp. 21-38

Chacun, de près ou de loin, réclamait ses bons offices ; on le consultait, on lui racontait les injustices dont on était victime, et on sollicitait le secours de sa plume, de son crédit. […] L’homme dont parle Grimm a tout l’air d’être le prince de Ligne, qui, de son côté, raconte ce qui suit d’une conversation de Voltaire, à Ferney : Je n’aime pas, disait Voltaire, les gens de mauvaise foi et qui se contredisent.

788. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Histoire de Louvois et de son administration politique et militaire, par M. Camille Rousset, professeur d’histoire au lycée Bonaparte. (Suite et fin) »

Les quatre places investies sont prises à point nommé, et l’on en vient à ce fameux passage du Rhin, poétiquement chanté par Boileau et très simplement raconté par Louis XIV. A vrai dire, Boileau a raconté la chose aussi bien, aussi élégamment qu’un fait d’armes aussi compliqué peut se décrire en vers ; mais comme on a toujours affaire à des moqueurs, il n’a pas assez songé au parti qu’on tirerait contre son héros de cet éloge un peu fastueux où il l’a représenté comme inactif et immobile : « Louis, les animant du feu de son courage, Se plaint de sa grandeur qui l’attache au rivage. » Boileau, sans le vouloir, a porté par là préjudice à Louis XIV devant la postérité.

789. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Maurice et Eugénie de Guérin. Frère et sœur »

Ainsi, pour exprimer le galop, fougueux, et les délices de cette course effrénée ; éperdue, au sein des fleuves, à travers ; les forêts — (c’est le Centaure vieilli qui parle et qui est censé raconter les plus chères sensations de sa jeunesse à un homme venu dans sa caverne pour l’interroger) : « L’usage de ma jeunesse, dit-il, fut rapide, et rempli d’agitation. […] Tout enfant, dans un séjour à Gaillac chez des cousines, c’est elle qui le raconte, elle se levait souvent, quand on l’avait couchée, pour regarder les étoiles à une petite fenêtre qui était au pied de son lit.

790. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet »

Il se figurait donc le peintre comme devant être absorbé dans l’étude de son art, et il se dirigeait d’un pas respectueux vers l’atelier : « Cependant, à mesure que j’avançais, raconte-t-il, j’entendais un bruit confus ; il augmentait à chaque pas ; et en approchant du sanctuaire, c’était un tapage plus bizarre et plus incohérent que le célèbre concert de Jean-Jacques. […] Paul Mantz, qui a raconté et contrôlé en critique ces débuts d’Horace Vernet, ne le fait exposer, du moins d’une manière notable, qu’à partir de 1812.

791. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Mémoires de l’abbé Legendre, chanoine de Notre-Dame, secrétaire de M. de Harlay, archevêque de Paris. »

Il aimait plus tard à raconter gaiement comment il avait dû, à cette époque, emprunter plus d’une fois à des amis. […] On racontait quelque chose de plus merveilleux : un jour à Rouen, à la fête de la Conception de la Vierge (1667), un récollet de talent appelé Le Rret prêchait dans la cathédrale sur le texte de la fête : il avait divisé son sermon en trois points, et il terminait le premier, lorsqu’il fut pris d’une extinction de voix et d’une indisposition subite qui l’obligea de demander grâce au prélat présent et à tout l’auditoire, et de descendre de la chaire.

792. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Le maréchal de Villars. »

Et qu’est-ce donc lorsqu’un Épaminondas est raconté par un Xénophon ? […] On raconte l’histoire d’un officier, d’un lieutenant-colonel brave, irréprochable jusqu’alors, lequel, à Malplaquet, placé en un poste périlleux, s’enfuit et courut jusqu’à Calais, sa ville natale.

793. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Le mariage du duc Pompée : par M. le comte d’Alton-Shée »

A mon avis, celui-là est un sot qui, en admettant qu’il ait quelque chose à raconter, fait à sa femme le récit de ses galanteries. […] » On la rassure ; ce n’est pas elle qui a vieilli, c’est Herman ; il prend tout sur lui, il s’excuse, il s’humilie ; la nécessité… ; il raconte son histoire, ce testament d’un vieil ami, d’un père… plus qu’adoptif ; c’est Pompéa du moins qui le dit, comme elle l’a deviné, à la simple vue d’un portrait et à la ressemblance ; — il parle de son amour pour sa femme, de ce sentiment nouveau qui lui est venu en la voyant : «  J’ai senti que près de cette charmante personne je devenais meilleur ; j’ai apprécié ses excellentes qualités ; je l’ai estimée, puis aimée d’un amour inconnu, confiant, impérissable… » Mais Pompéa n’est pas de celles qui prennent le change ; elle sourit d’un sourire de pitié : « Voilà une idylle qui a le défaut d’arriver trop tard ; hier je t’aurais cru, mais il ne fallait pas me faire passer la soirée avec ta belle-sœur. » Herman assure ne pas comprendre ; Pompéa reprend : « Est-ce qu’on nous trompe, nous autres ?

794. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Mémoires de madame Roland »

Lorsqu’il a eu à parler de Mme Roland, comme s’il s’agissait avant tout de la disculper et de la défendre, il a essayé de diminuer son rôle actif auprès de son mari et sa part virile d’influence : il s’est refusé également à admettre qu’il se fût logé dans ce cœur de femme aucun sentiment autre que le conjugal et le légitime, ni aucune passion romanesque : « Écoutez-les, disait-il hier encore, en s’adressant par la pensée aux différents historiens ses prédécesseurs et en les indiquant du geste tour à tour : ceux-là, soit admiration sincère pour le mérite de Mme Roland, soit désir de rabaisser celui des hommes qui l’entouraient, voient dans la femme du ministre la tête qui dirige et son mari et les législateurs qui le fréquentent, et répétant un mot célèbre : Mme Roland, disent-ils, est l’homme du parti de la Gironde ; — ceux-ci, habitués à se laisser aller à l’imagination du romancier ou du poète, transforment l’être qu’ils ont créé en nouvelle Armide, fascinant du charme de ses paroles ou de la douceur de son sourire ceux qu’elle réunit dans ses salons ou qu’elle convie à sa table ; — d’autres enfin, scrutateurs indiscrets de la vie privée, se placeront entre la jeune femme et son vieux mari, commenteront de cent façons un mot jeté au hasard par cette femme, chercheront à pénétrer jusqu’aux plus secrets sentiments de son âme, compteront les pulsations de son cœur agité, selon que telle ou telle image, tel ou tel souvenir l’impressionne, et montreront sous un voile transparent l’être vers lequel s’élancent sa pensée et ses soupirs ; car à leur roman il faut de l’amour. » Et il ajoute, plein de confiance dans le témoignage qu’il invoque : « Mme Roland a raconté elle-même avec une simplicité charmante ce qu’elle a pensé, ce qu’elle a senti, ce qu’elle a dit, ce qu’elle a fait. » Eh bien ! oui, elle l’a raconté, et c’est précisément cette vérité et cette franchise d’aveux qui, à votre tour, avocat excellent et honnête, va vous forcer à en rabattre et vous donne tort aujourd’hui.

795. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « La reine Marie Leckzinska (suite et fin.) »

Il parle de la reine en cent endroits ; il raconte d’elle des histoires de ruelle et d’alcôve, et il les tient de source, dit-il, ayant pris soin de faire causer des dames d’atours ou même des valets de chambre et des domestiques qui lui ont tout dit. […] Là on trouve des ouvrages de tous les genres, de la tapisserie, des métiers de toutes sortes ; et, pendant qu’elle travaille, elle a la bonté de raconter ses lectures ; elle rappelle les endroits qui l’ont frappée, elle les apprécie.

796. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette (suite et fin.) »

La princesse écrit tantôt à Mme de Bombelles, tantôt à Mme de Raigecour, ses intimes amies ; elle cause sans réticence, avec familiarité, avec effusion et d’un ton dégagé, presque gai, presque leste, qui contraste singulièrement avec ce qu’elle raconte et avec tout ce qui l’entoure. […] La nuit du 4 août racontée par elle est d’une vivacité pittoresque ; quelques jours après, elle écrit ; « Samedi au soir, il a été décidé que l’on porterait au roi l’arrêté du 4 août, pour qu’il y campât sa sanction. » Les journées des 5 et 6 octobre sous sa plume se dessinent en traits d’une exacte et parlante réalité : ce qu’elles ont d’atroce y est montré, mais sans rien de chargé ; ce qu’il y a eu de bien s’y entremêle ; tout se succède et court.

797. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Mlle Eugénie de Guérin et madame de Gasparin, (Suite et fin.) »

Dans ce dialogue Lisette parle très bien en paysanne qu’elle est et dans sa gamme ; elle raconte son rêve, sa vision, une vision toute mystique, à la Bunyan. […] L’auteur dit que la vision de Lisette racontée par elle était à faire trembler, à faire pleurer.

798. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE SOUZA » pp. 42-61

A force d’or et de diamants, prodigués par la famille et les amis du dehors à l’un des geôliers, il était parvenu à s’évader et vivait dans une cachette sûre ; mais quelqu’un raconta devant lui que son avocat venait d’être arrêté comme soupçonné de lui donner asile : M. de Flahaut, pour justifier l’innocent, quitta sa retraite dès six heures du matin, et se rendit à la Commune où il se dénonça lui-même ; il fut peu de jours après guillotiné. […] Mademoiselle de Tournon est le développement d’une touchante aventure racontée dans les Mémoires de Marguerite de Valois.

799. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVe entretien. Littérature grecque. L’Iliade et l’Odyssée d’Homère » pp. 31-64

Denys de Thrace raconte ainsi comment elles furent recueillies : « À une certaine époque, dit-il, les poèmes d’Homère furent entièrement anéantis, soit par le feu, soit par un tremblement de terre, soit par une inondation ; et, tous ces livres ayant été perdus et dispersés de toutes parts, on n’en conservait que des fragments décousus ; l’ensemble des poèmes allait tomber entièrement dans l’oubli. […] Les traditions racontent et les anciens ont écrit qu’Orphée, le premier des poètes grecs qui chanta en vers des hymnes aux immortels, fut déchiré en lambeaux par les femmes du mont Rhodope, irritées de ce qu’il enseignait des dieux plus grands que les leurs ; que sa tête, séparée de son corps, fut jetée par elles dans l’Hèbre, fleuve dont l’embouchure est à plus de cent lieues de Smyrne ; que le fleuve roula cette tête encore harmonieuse jusqu’à la mer ; que les vagues, à leur tour, la portèrent jusqu’à l’embouchure du Mélès ; que cette tête échoua sur l’herbe, près de la prairie où Crithéis mit au monde son enfant, comme pour venir d’elle-même transmettre son âme et son inspiration à Homère.

800. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre I. La tragédie de Jodelle à Corneille »

Naturellement, selon les lois de l’éloquence et du lyrisme, leurs développements des situations particulières et des sentiments individuels tendent à l’universel, au lieu commun : d’autant mieux que, ne comprenant rien à la nature propre du drame, ils sont amenés fort logiquement à le prendre comme une allégorie morale, destinée à l’instruction : pourquoi raconterait-on ces choses extraordinaires, si ce n’est pour l’exemple ? […] Exploitant les anciens et les modernes, les poètes, les historiens, les romanciers, mais, manifestement, aimant mieux découper en scènes une action racontée, et fixer lui-même les éléments du drame, que de calquer son œuvre sur un modèle artistement construit, sans idolâtrie érudite ni engouement précieux, indépendant de Sénèque, très affranchi en somme des Italiens, et tout à fait ignorant des dramaturges espagnols, Hardy, avec ses six ou sept cents pièces, fut pendant une trentaine d’années le fournisseur habituel de l’Hôtel de Bourgogne.

801. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre IV. L’Histoire »

Thierry raconte la Conquête de l’Angleterre par les Normands : une demi-page de Guizot ramasse toutes les idées de ses quatre volumes. […] Dans ces longues séances aux bibliothèques qu’il a racontées, il préparait son Histoire de la conquête de l’Angleterre par les Normands, qui parut en 1825.

802. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « La Mare au diable, La Petite Fadette, François le Champi, par George Sand. (1846-1850.) » pp. 351-370

Il est bien encore que ce soit le petit Pierre qui raconte à Germain la mésaventure de Marie avec le fermier : en passant par la bouche de l’enfant, ce récit s’épure. […] Sous prétexte que c’est le chanvreur qui lui a raconté l’histoire à la veillée, elle garde le plus qu’elle peut des mots et des locutions qu’il employait.

803. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Mme du Châtelet. Suite de Voltaire à Cirey. » pp. 266-285

Il me suffit, à moi, de raconter et d’exposer fidèlement, de manière que chacun puisse profiter des choses de l’esprit et du bon langage, et soit à même de faire justice des autres parties toutes morales que je n’ai garde de dissimuler. […] Son secrétaire Longchamp nous a raconté dans le plus grand détail la manière dont il prit dès l’origine toute cette aventure, sa colère dès l’abord et sa fureur de se voir trompé, puis sa résignation à demi risible, à demi touchante.

804. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Étienne Pasquier. (L’Interprétation des Institutes de Justinien, ouvrage inédit, 1847. — Œuvres choisies, 1849.) » pp. 249-269

Il est comme saisi et transporté de l’ivresse de sa nouvelle condition paternelle ; son style cette fois s’allège et bondit : Puer nobis natus est, s’écrie-t-il, comme dans la messe de Noël, il me plaît de commencer cette lettre par un passage de l’Église, à l’imitation de nos anciens avocats en leurs plaidoiries d’importance… Je suis donc augmenté d’un enfant, et augmenté de la façon que souhaitait un ancien philosophe, c’est-à-dire d’un mâle et non d’une fille ; je dirois Parisien et non Barbare, n’étoit que ce nom sonne mal aux oreilles de tous… Et il raconte comment, par jeu et par un reste de superstition d’érudit, il a voulu chercher l’horoscope de ce fils, en ouvrant au hasard quelque livre de sa bibliothèque. […] Si l’on voulait raconter sa vie (ce que viennent de faire si bien ses derniers biographes), il faudrait parler en détail de son plaidoyer pour l’Université contre les Jésuites, et de la longue guerre où ce premier acte l’engagea, lui et sa postérité.

805. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Charles Perrault. (Les Contes des fées, édition illustrée.) » pp. 255-274

La préface de son premier tome, d’abord, est fort spirituelle ; il raconte de nouveau l’origine de la querelle, les injures que lui ont values les opinions exprimées dans le poème du Siècle de Louis le Grand. […] Il est bien certain que pour la matière de ces contes, de même que pour Peau d’Âne qu’il a mise en vers, Perrault a dû puiser dans un fonds de tradition populaire, et qu’il n’a fait que fixer par écrit ce que, de temps immémorial, toutes les mères-grands ont raconté.

806. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — I. » pp. 186-205

Il se plaît à raconter les stratagèmes, les ruses de diplomatie ou de guerre qu’il lui faut employer pour cela. […] Il racontait cela par hasard à quelqu’un devant Mme de Choiseul, et le lendemain il trouvait les douze figures sur sa table sans savoir d’où elles lui venaient.

807. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1880 » pp. 100-128

Puis au milieu de la conversation brisée, et sans suite, elle nous a raconté une visite, qu’elle avait faite dernièrement, pour forcer Flaubert à marcher, une visite à une amie, demeurant de l’autre côté de la Seine, et qui avait, ce jour-là, son dernier-né, posé sur la table du salon, dans une charmante bercelonnette rose : visite qui faisait répéter à Flaubert, tout le long du retour : « Un petit être comme celui-ci dans une maison, il n’y a que cela au monde !  […] * * * — Quelqu’un m’entretenait du goût d’art de Richard Wallace, achetant le cor de chasse de Saint-Hubert, non pour l’intérêt de l’objet, mais pour l’histoire qui s’y rapporte, et qu’il pourra raconter au prince de Galles, la première fois qu’il le lui montrera.

808. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre iii »

Le jeune Roland Engerand me raconte :‌ « Nous nous étions arrêtés un jour dans le village de Mareuil avant de relever le 20e corps dans les tranchées de Neuville-Saint-Vaast. […] » Toute une heure ce prêtre fiévreux m’a raconté de bien belles histoires.

809. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « Mme DESBORDES-VALMORE. (Pauvres Fleurs, poésies.) » pp. 115-123

le tendre poëte nous remet sur la mort de sa mère, sur ce legs de sensibilité douloureuse qui lui vient d’elle, et qui, d’abord obscur, puis trop tôt révélé, n’a cessé de posséder son cœur : Comme le rossignol, qui meurt de mélodie, Souffle sur son enfant sa tendre maladie, Morte d’aimer, ma mère, à son regard d’adieu Me raconta son âme et me souffla son Dieu Triste de me quitter, cette mère charmante, Me léguant à regret la flamme qui tourmente, Jeune, à son jeune enfant tendit longtemps sa main, Comme pour le sauver par le même chemin.

810. (1874) Premiers lundis. Tome II « Mort de sir Walter Scott »

Pourtant, son enfance connut toute la poésie de cette belle contrée, les courses aventureuses, les légendes qu’on racontait, et puis les souvenirs de Beattie, les chansons de Burns.

811. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre V. Résumé. »

De là un déluge de plaisanteries sur la religion ; l’un citait une tirade de la Pucelle ; l’autre rapportait certains vers philosophiques de Diderot… Et d’applaudir… La conversation devient plus sérieuse ; on se répand en admiration sur la révolution qu’avait faite Voltaire, et l’on convient que c’était là le premier titre de sa gloire. « Il a donné le ton à son siècle, et s’est fait lire dans l’antichambre comme dans le salon. » Un des convives nous raconta, en pouffant de rire, qu’un coiffeur lui avait dit, tout en le poudrant : « Voyez-vous, monsieur, quoique je ne sois qu’un misérable carabin, je n’ai pas plus de religion qu’un autre »  On conclut que la révolution ne tardera pas à se consommer, qu’il faut absolument que la superstition et le fanatisme fassent place à la philosophie, et l’on en est à calculer la probabilité de l’époque et quels seront ceux de la société qui verront le règne de la raison  Les plus vieux se plaignaient de ne pouvoir s’en flatter ; les jeunes se réjouissaient d’en avoir une espérance très vraisemblable, et l’on félicitait surtout l’Académie d’avoir préparé le grand œuvre et d’avoir été le chef-lieu, le centre, le mobile de la liberté de penser. « Un seul des convives n’avait point pris de part à toute la joie de cette conversation… C’était Cazotte, homme aimable et original, mais malheureusement infatué des rêveries des illuminés.

812. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Avertissement »

« Elle nous raconta, dit une élève de Saint-Cyr, que, lui ayant dit un jour (au petit duc du Maine, qu’elle élevait) d’écrire au roi, il lui avait répondu, fort embarrassé, qu’il ne savait point faire de lettres.

813. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Une âme en péril »

Ma plume, disciplinée de bonne heure, n’avait besoin ni de saint Hilaire ni de saint Sylvain pour frapper des maximes. » Il nous raconte qu’en 1870 il avait déjà écrit quinze cahiers de pensées, qui furent pillés par les Prussiens, et il ne nous cache pas que c’est là une grande perte.

814. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Le termite »

Ce roman nous raconte les gésines littéraires, les pénibles amours et les coliques néphrétiques du jeune Noël Servaise, écrivain naturaliste de son état.

815. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Silvestre, Armand (1837-1901) »

… Jean-Jacques raconte que, tout enfant, il allait se poster, à la promenade, sur le passage des femmes et que, là, il trouvait un plaisir obscur, mais très vif, à mettre bas ses chausses.

816. (1863) Molière et la comédie italienne « Préface » pp. -

Est-il né tout simplement dans les circonstances que raconte l’abbé Galiani ?

817. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Ronsard, et Saint-Gelais. » pp. 120-129

On raconte que Ronsard étudioit jusqu’à minuit ; & qu’en se couchant, il réveilloit Baïf, qui prenoit sa place.

818. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 27, que les sujets ne sont pas épuisez pour les poëtes, qu’on peut encore trouver de nouveaux caracteres dans la comedie » pp. 227-236

Les sujets qui sont encore intacts nous échappent, et nous lisons plusieurs fois l’histoire qui les raconte sans les remarquer, parce que le genie n’ouvre pas nos yeux ; mais ces sujets frapperoient d’abord le poëte qui auroit un genie propre à les traiter.

819. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 3, de la musique organique ou instrumentale » pp. 42-53

" Tite-Live raconte un fait très-propre à confirmer ce que dit Quintilien.

820. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Paria Korigan » pp. 341-349

En tant que si la femme qui a inventé… ou raconté ces histoires charmantes n’y mettait pas son nom, son véritable nom, elle pouvait oublier d’en mettre un.

821. (1881) Études sur la littérature française moderne et contemporaine

Elle raconte cette lecture dans ses Mémoires. […] On raconte que, recevant un jour un portrait de sa fille, Marie-Thérèse s’écria d’un ton amer et dur : « Au lieu du portrait d’une reine de France, j’ai reçu celui d’une actrice !  […] Ce grand’père qui raconte ainsi l’histoire de France a quatre-vingt-cinq ans, et il est aussi jeune, aussi vert que jamais. […] Joinville raconte qu’un jour le roi fit marquer de la sorte un bourgeois de Paris ; de violents murmures s’élevèrent dans la capitale et vinrent aux oreilles de Louis. […] L’imagination est plus vive dans son histoire de France racontée aux enfants que dans les sévères ouvrages de sa jeunesse et de sa maturité, mais la raison et le jugement sont restés les mêmes.

822. (1900) La vie et les livres. Cinquième série pp. 1-352

On y trouve des anecdotes curieuses, racontées avec une spirituelle bonhomie. […] Anatole France, nourri sur les quais, parmi les vénérables livres qui racontent des histoires anciennes, a déjà vu passer toutes ces figures. […] D’autres lui racontaient les symptômes de la maladie dont ils se croyaient atteints et le priaient de consulter pour eux quelque grand médecin de la capitale. […] Émile Pouvillon s’est raconté lui-même dans ses ouvrages sans le vouloir, peut-être sans le savoir, comme a fait George Eliot dans le Moulin sur la Floss. […] Il a raconté, pour son plaisir et pour le nôtre, les tribulations de l’Innocent et les mésaventures des Antibel.

823. (1891) Impressions de théâtre. Cinquième série

Le Partage et l’Hypocondriaque nous racontent des histoires d’héritages et de testaments. […] Mais, comme je vous le racontais tout à l’heure, j’ai appris à mes dépens qu’il ne faut point parler ainsi. […] Sforza lui raconte que c’est la reine qui a enlevé cet enfant et qu’elle l’a fait égorger au sortir de son lit, selon la coutume de Marguerite de Bourgogne. […] Charmeretz raconte que le malheureux a fait une maladie dont il a failli mourir, et qu’il est méconnaissable. […] C’est ce que la coquine vient raconter à son ancien amant, qui, tout à coup, se sent repris de goût pour elle.

824. (1925) Les écrivains. Première série (1884-1894)

On raconte qu’un jour le ministre avait chargé Maginard d’une mission spéciale, à laquelle la politique était tout à fait étrangère. […] Est-il possible de raconter cette existence presque surhumaine, de la résumer en quelques lignes ? […] Raconter ce drame dans ses détails ? […] Mais qu’on me permette de commencer par le commencement et de raconter l’histoire en ses touchants détails. […] L’histoire vaut qu’on la raconte et qu’on la commente.

825. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxviiie entretien. Littérature germanique. Les Nibelungen »

Quoi qu’il en soit, et sans rien altérer du tout, nous allons vous raconter ce grand poëme, en analysant ce que nous ne citerons pas et en citant ce qu’on ne saurait analyser. […] « Du bon temps de Sîfrit et des jours de sa jeunesse, on peut raconter bien des merveilles ; quelle gloire s’attachait à son nom, et combien son corps était beau ! […] « Écoutez les merveilles qu’on raconte du poids de cette pique : elle était forgée de quatre énormes masses de fer. […] Elle raconte à Hagene que Sîfrit, quand il tua le dragon au bas de la montagne, se baigna dans le sang du monstre qu’il venait d’immoler, mais qu’une feuille de tilleul étant tombée de l’arbre et s’étant collée sur son corps, entre les deux épaules, avait empêché le sang du dragon de couvrir cette partie de son corps et privé cette partie secrète de partager l’invulnérabilité des héros ; Hagene simula un grand zèle pour Sîfrit. […] Ce voyage, raconté dans tous ses détails par le poëte, s’accomplit non sans des dangers infinis, surtout au passage du Danube.

826. (1826) Mélanges littéraires pp. 1-457

Il racontait souvent, à ce sujet, une anecdote : Ayant mené le fils d’un lord à cette école, les pauvres orphelins lui proposèrent de jouer avec eux. […] Dans les siècles gothiques (comme les vieilles ballades le racontent), vivait autrefois un berger. […] Ce chef raconta à M.  […] Vous aurez beau raconter ses œuvres de la manière la plus touchante, vous ne peindrez jamais que son humanité ; sa divinité vous échappera. […] Il est digne de remarque qu’il a raconté aussi la faute de son maître.

827. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. FAURIEL. —  première partie  » pp. 126-268

Fauriel racontait ce souvenir en présence de M. […] Comme circonstance piquante ayant trait à cette même époque, il racontait qu’il avait été chargé pendant quelque temps de faire le rapport sur le marquis de Sade. […] Il avait raconté un jour devant M. […] Fauriel s’était aperçu que, tandis qu’il racontait, l’auditeur avide prenait au crayon des notes dans son chapeau. […] Voulant raconter la vie et les aventures de jeunesse de Lope, M.

828. (1911) Études pp. 9-261

Elle parlait sagement, elle racontait ses épreuves sans déchaînement, sans éclat. […] Chouisky216 raconte le carnage où le tsarévitch a trouvé la mort. […] qu’à nous la raconter, Michel avait rendu son action plus légitime. […] Il raconte l’histoire d’une âme détachée. […] Mais Gide l’a racontée.

829. (1862) Notices des œuvres de Shakespeare

Un jour, il lui racontait avec tristesse qu’il avait perdu un jeune page qu’il aimait, et qui lui était très-nécessaire. […] Cette histoire est racontée comme véritable par Girolamo della Corte ; il assure avoir vu plusieurs fois le tombeau de Juliette et de Roméo, qui, s’élevant un peu au-dessus de terre et placé près d’un puits, servait alors de lavoir à la maison des orphelins de Saint-François, que l’on bâtissait en cet endroit. […] Mais Porrus raconte tout ce qu’il sait de Faunia, et montre les bijoux qu’il a trouvés auprès d’elle. […] Quant à l’épisode du comte de Glocester, Shakspeare l’a imité de l’aventure d’un roi de Paphlagonie, racontée dans l’Arcadia de Sidney ; seulement, dans le récit original, c’est le bâtard lui-même qui fait arracher les yeux à son père, et le réduit à une condition semblable à celle de Lear. […] Un recueil de nouvelles françaises, intitulé Roger-Bontemps en belle humeur, raconte la même aventure, mais à l’avantage du chrétien, et c’est le sultan Saladin qui est le juge.

830. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Gabriel Naudé »

Ces Rose-Croix se rattachaient sans doute à la société de frères que Bacon dit avoir existé à Paris, et dont il raconte une séance228. […] Voulant montrer que Louis XI n’était pas du tout aussi ignorant qu’on l’a prétendu et que l’a dit surtout le léger historien bel-esprit Mathieu, il reprend le côté littéraire de l’histoire de ce règne ; c’est un prétexte pour lui d’y rattacher une foule de particularités sur les livres, sur le prix qu’on y mettait dans les vieux temps, de raconter au long la renaissance des lettres et de discuter à fond les origines de l’imprimerie introduite en France précisément sous Louis XI. […] Ruiné et criblé de dettes, on lui conseillait d’écrire ses Mémoires et de raconter tant de choses curieuses qu’il savait sur la haute société, dans laquelle il avait passé sa vie ; un libraire de Londres lui promettait bien des guinées pour cela ; quelques amis même le pressaient : « Non, c’est impossible, répondit le comte : je ne trahirai jamais des gens avec qui j’ai diné. »  — Le comte d’Orsay et Gabriel Naudé ! […] Parmi les ruses les plus permises, il faut mettre celle que raconte Rossi dans la lettre où il parle des acquisitions de Naudé à Rome en 1645.

831. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (2e partie) » pp. 409-488

Elle m’y racontait souvent, pour me distraire, Son enfance, et les jeux de mon père, son frère, Que je n’ai pas connu ; car je naquis en deuil, Et mon berceau d’abord posa sur un cercueil. […] « Peu après qu’il eut quitté tout à fait son pays natal, nous trouvons Virgile de retour du voyage de Brindes, raconté par Horace, que ce voyage soit de l’année 715 ou 717. […] « À ce que je viens de dire que Virgile était décoré de pudeur, il ne serait pas juste d’opposer comme une contradiction ce qu’on raconte d’ailleurs de certaines de ses fragilités : “Il fut recommandable dans tout l’ensemble de sa vie, a dit Servius ; il n’avait qu’un mal secret et une faiblesse, il ne savait pas résister aux tendres désirs.” […] « C’est à Virgile qu’il appartient de chanter les rivages d’Actium chers au soleil, et les flottes victorieuses de César ; il va naître quelque chose de plus grand que l’Iliade. » « Properce se trompait ; une légende nationale en très beaux vers ne pouvait jamais égaler ni l’Iliade ni l’Odyssée, nées d’elles-mêmes dans l’âge de foi et par l’organe du dieu des poètes. — L’Énéide était l’ouvrage de l’art, — Homère était la nature. » XVII Ici, mon cher Sainte-Beuve, vous nous racontez la mort prématurée de Virgile, qui succombe à cinquante-deux ans à Brindes, en revenant de Grèce, où il était allé perfectionner l’Énéide, et sa tombe à Naples, au pied du Pausilippe, et en face du plus beau et du plus doux paysage de la Campanie.

832. (1899) Les industriels du roman populaire, suivi de : L’état actuel du roman populaire (enquête) [articles de la Revue des Revues] pp. 1-403

Bernard, Georges Malet, Charles Canivet, Émile Bergerat, Albert Cim et le vigoureux romancier Lucien Descaves ont raconté des anecdotes fort piquantes sur le désouci artistique de ces grands abatteurs de besogne et sur leur aptitude exceptionnelle à détailler quotidiennement des monceaux de copie, sans savoir la veille ce qu’ils auraient à exprimer le lendemain. […] Sur la manière dont procèdent, en ces sortes de marchés, les grands seigneurs de la corporation, on en raconte d’assez fortes. […] que me racontez-vous ? […] Et cependant vos romanciers racontent tout cela et nos journaux populaires ont soin de les traduire pour notre édification… Veuillez croire, à mes sentiments distingués.

833. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 juin 1886. »

A vrai dire, il n’y a point d’autre analogie entre les deux versions que celle du « conte », Aussi Siegfried est-il le héros de l’opéra primitif, et non pas Wotan, et Wagner croyait pouvoir tout condenser dans la Mort de Siegfried, il est beaucoup question des dieux, dans l’ancien livret, on les invoque constamment, mais on ne les voit pas ; les Nornes, les Filles du Rhin, des chœurs de Walküres se chargent de nous raconter ce qu’il nous est indispensable de savoir sur les événements antérieurs. […] (Proposition évidente et rigoureuse, peut-être vraie) On raconte que le jeune Hercule, en un temps sans doute fort lointain, allait, souriant et robuste, par les campagnes bleues du royaume de Mythologie. […] Mais on raconte que le jeune Hercule, ce Siegfried des légendes plus lascives, ne fut point ému grandement par ces professions de foi : il s’était assis au bord du chemin, et il s’écria, regardant les deux jeunes femmes qui lui paraissaient maintenant plus séduisantes et jolies, sous une lueur tiède : « Hélas, je n’ai point appris les subtils symbolismes, à l’école d’où je viens. […] Mais plutôt je veux vous voir toujours l’une et l’autre, car vous êtes gracieuses ainsi que des amantes, et j’aime les onduleuses musiques de vos voix. » On raconte qu’il les fit s’asseoir, auprès de lui ; longuement il leur murmurait des paroles caressantes, tandis que les baignait l’harmonieuse ténèbre d’une nuit royale.

834. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Malherbe et son école. Mémoire sur la vie de Malherbe et sur ses œuvres par M. de Gournay, de l’Académie de Caen (1852.) » pp. 67-87

On raconte que Malherbe conçut un peu de jalousie de Racan pour cette belle stance ; et Boileau disait que, pour avoir fait les trois derniers vers, il donnerait les trois meilleurs des siens : ce que Daunou, qui n’entend bien que la prose, ne comprend pas. […] On a le recueil des Lettres de Maynard qui nous racontent en style fleuri ses occupations, ses tracas, ses inquiétudes.

835. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Roederer. — I. » pp. 325-345

Raconter en détail les travaux de Roederer à la Constituante, ce serait en grande partie repasser toute l’histoire de cette Assemblée même. […] Roederer, dans sa Chronique des cinquante jours, a fait ce qu’il y a de mieux à défaut du burin vengeur : il a raconté le vrai, jour par jour, par ordre chronologique, « sans art, sans arrangement, sans ambition d’effet oratoire, logique, dramatique, romantique ».

836. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gibbon. — II. (Fin.) » pp. 452-472

Guizot raconte qu’il a passé par trois sentiments successifs au sujet de l’ouvrage de Gibbon. […] Mme de Genlis (une assez méchante langue, il est vrai) nous le dit ; elle raconte que Gibbon épris de Mme de Crousaz, depuis Mme de Montolieu (l’auteur des romans), et s’étant un jour oublié jusqu’à tomber à ses pieds, fut assez mal reçu dans sa déclaration ; mais on avait beau lui dire de se relever, il demeurait à genoux. — « Mais relevez-vous donc, monsieur ! 

837. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — II » pp. 316-336

Il est ensuite obligé de raconter la défaite de Soubise, aux prises dans l’île de Ré avec les forces royales, sa résistance plus ou moins désespérée, et, dans tous les cas, moins acharnée que celle des sept braves, et sa fuite en Angleterre avec ce qu’il peut sauver de vaisseaux. […] Quelque chose de ce sentiment austère et contristé se réfléchit dans la page suivante, où M. de Rohan, après avoir raconté la reddition de La Rochelle le 28 octobre (1628), ajoute du ton de fermeté et de fierté qui lui est propre : La mère du duc de Rohan et sa sœur4 ne voulurent point être nommées particulièrement dans la capitulation, afin que l’on n’attribuât cette reddition à leur persuasion et pour leur respect, croyant néanmoins qu’elles en jouiraient comme tous les autres ; mais comme l’interprétation des capitulations se fait par le victorieux, aussi le conseil du roi jugea qu’elles n’y étaient point comprises, puisqu’elles n’y étaient point nommées : rigueur hors d’exemple, qu’une personne de cette qualité, en l’âge de soixante-dix ans (et plus), sortant d’un siège où elle et sa fille avaient vécu trois mois durant de chair de cheval et de quatre ou cinq onces de pain par jour, soient retenues captives sans exercice de leur religion, et si étroitement qu’elles n’avaient qu’un domestique pour les servir, ce qui, néanmoins, ne leur ôta ni le courage ni le zèle accoutumé au bien de leur parti ; et la mère manda au duc de Rohan, son fils, qu’il n’ajoutât aucune foi à ses lettres, pource que l’on pourrait les lui faire écrire par force, et que la considération de sa misérable condition ne le fît relâcher au préjudice de son parti, quelque mal qu’on lui fît souffrir.

838. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Vie de Maupertuis, par La Beaumelle. Ouvrage posthume » pp. 86-106

Maupertuis, jeune, ancien capitaine de cavalerie, converti à la géométrie et aux sciences, eut alors son moment d’éclat et de faveur, surtout lorsqu’au retour de son voyage dans le Nord, où il était allé vérifier par ses mesures la forme assignée à cette région de la terre par Newton, il eut incidemment tant de choses à raconter sur les Lapons et les Lapones. […] Helvétius racontait que c’était à Maupertuis qu’il devait de s’être fait littérateur ; car, traversant une après-midi le jardin des Tuileries, il vit le brillant académicien tellement entouré et caressé des plus jolies femmes, qu’il en conclut qu’il fallait aussi devenir célèbre pour être adoré du beau sexe.

839. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « L’abbé de Marolles ou le curieux — II » pp. 126-147

Il nous raconte quelque temps après (dans sa préface des Histoires des anciens comtes d’Anjou, 1681), qu’un ami à qui il avait fait cadeau d’un de ces rares exemplaires de son Athénée ne put se résoudre à lui en faire compliment à cause des vers qu’il y avait entremêlés, et que ce même ami à qui il donna à lire quelques jours après sa version en vers du prophète Daniel s’excusa de lui en dire un seul mot, prétextant que sa vue était très affaiblie. […] On racontait mainte histoire plaisante sur Marolles.

840. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. De Pontmartin. Causeries littéraires, causeries du samedi, les semaines littéraires, etc. »

Un critique, qui est encore plus légitimiste que religieux, tel que M. de Pontmartin, devrait être, ce semble, plus courtois qu’un autre, et M. de Pontmartin, l’est en effet souvent ; il raconte lui-même agréablement qu’on lui a reproché trop de facilité et de complaisance de jugement, et de se montrer trop coulant à dire : « Beau livre, charmant livre, excellent livre !  […] Et il le raconte, il l’analyse avec vivacité, bonne grâce, une veine de malice ; il glisse et n’appuie pas.

841. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Mémoires de l’abbé Legendre, chanoine de Notre-Dame secrétaire de M. de Harlay, archevêque de Paris. (suite et fin). »

On racontait aussi qu’un soir que l’archevêque rentrait seul de l’île Saint-Louis (où logeait Mme de Bretonvilliers) par le Pont-Rouge, ou plutôt une nuit qu’il s’en revenait en chaise de la rue de Grenelle, c’est-à-dire de chez La Varenne, vers la Croix-Rouge, il avait été attendu par huit hommes munis de flambeaux, lesquels, sous prétexte de lui faire honneur, l’avaient accompagné en pompe jusqu’à l’archevêché, non sans le haranguer au préalable et lui adresser tout le long du chemin mille compliments dérisoires. […] On racontait qu’autrefois en sortant d’un couvent de Pontoise où il avait rendu visite à l’abbesse, Mme de Guenegaud, M. de Harlay était tombé dans un bourbier où il avait perdu son cordon d’or.

842. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette »

À un moment, cette reine fière, sensible, élégante, bonne au fond et d’un cœur bienfaisant, s’aperçut avec douleur, avec indignation, qu’elle était méconnue, calomniée, outragée même du peuple de Paris ; qu’elle était impopulaire : Versailles était alors bien loin de Paris, et tout ce qu’on en racontait en mal était accueilli avidement et grossi à l’envi par la crédulité ou par la haine. […] … » C’est à elle de parler, de raconter tout ce voyage avec les impressions qu’elle y mêle et avec cette vivacité, ce mouvement de jeune fille qui était alors une des grâces et l’un des enchantements de sa personne : « Les grandes scènes ont commencé au Rhin ; on m’a conduite dans une île où j’aurais été bien heureuse d’être un peu seule comme Robinson pour me recueillir, mais on ne m’en a pas laissé la liberté ; on m’a comme emportée dans une maisonnette dont un côté était censé l’Allemagne, l’autre la France ; à peine m’a-t-on laissé le temps de faire une prière et de penser à notre bonne chère maman et à vous tous, mes bien-aimés du petit cabinet ; les femmes se sont emparées de moi, — m’ont changée des pieds à la tête. — Après cela, sans me laisser respirer, on a passé dans une grande salle, on a ouvert le côté de France, et l’on a lu des papiers : c’était le moment où mes pauvres dames devaient se retirer ; elles m’ont baisé les mains et ont disparu en pleurant.

843. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres inédites de F. de La Mennais »

Il nous racontait son origine bretonne et, par les femmes, quelque peu irlandaise, origine qui jette un certain jour sur la nature de son génie, son enfance presque sauvage, ses études solitaires au bord do la mer, sa passion pour le cheval, la chasse, les armes, et son audacieux défi à Surcouf, le fameux corsaire qui faisait trembler l’océan Indien : sa jeunesse opulente (?) […] Ils méritent d’être donnés en entier et sont le plus éloquent commentaire de ce qu’a raconté de ce Concile national M. d’Haussonville au tome iv de l’Église romaine sous le premier Empire « (La Chesnaie, 1811.) — Gratien arrive et me remet tes paquets. — Comme la Providence se joue des passions humaines et de la puissance de ces hommes qu’on appelle grands !

844. (1887) Discours et conférences « Réponse au discours de M. Louis Pasteur »

Littré nous a raconté qu’un jour, sa mère, une petite vieille débile, avec de beaux yeux, cheminant à côté de lui dans une rue de Paris, fut brutalement poussée par un ouvrier qui ne voulait pas se déranger. […] Il nous a raconté comment, étant à Lion-sur-Mer, sur la plage, deux messieurs vinrent à passer : « Voilà Littré, dit l’un deux. — Littré !

/ 1898