Les Anglais ont une manière excellente de payer un dernier tribut à leurs grands ou à leurs aimables poètes : c’est de recueillir et de publier de chacun, au lendemain de sa mort, un choix de textes, de documents familiers, de lettres écrites ou reçues ; il en ressort une ressemblance vraie et définitive. C’est ainsi que la sœur du tendre et affectueux poète, Félicia Hemans, a publié Memoir of the life and writings of Mrs Hemans (1840). […] Valmore père et fils61 m’ont permis de jeter les yeux sur le trésor domestique tout intime, qu’ils ont pieusement conservé et mis en ordre, des papiers, notes et correspondance de cet autre tendre et passionné poète, Mme Desbordes-Valmore, qui unissait une délicatesse morale si exquise à un don de chanter si pénétrant, ou plutôt chez qui cette sensibilité et ce don ne faisaient qu’un. […] Une seconde et une troisième édition de ses Poésies (1820-1822) avaient dès ce temps marqué sa place au premier rang des femmes poètes. […] J’espère que le public vous en récompensera par l’admiration plus tendre qu’il accordera, — qu’il a déjà accordée à cette nature unique de femme poète. — Tout à vous de mon plus affectueux respect, Sainte-Beuve. » 62.
Les mêmes vers ne peuvent agir de même façon sur des gens qui ont du poète des conceptions si divergentes. […] Milton, le vieux puritain, avait fait antichambre presque aussi longtemps avant de prendre rang parmi les poètes appréciés de ce côté-ci de la Manche. […] Son dandysme, sa désinvolture moqueuse mêlée d’élans passionnés justifient ce surnom ; mais si l’on cherche des tirades ou des vers dérobés au poète anglais, on ne trouve à peu près rien. […] Italie, Espagne, France, Angleterre, Allemagne ont eu tour à tour leur âge d’or, leur grande époque ; comme les coureurs dont parle le poète, ces nations se sont passé de ’une à l’autre le flambeau de la vie. […] Aussitôt Charles IX et Henri III, mignons, raffinés et ligueurs, amis et ennemis de Richelieu, mousquetaires et frondeurs envahissent romans et drames ; l’école de Ronsard prête des rythmes aux romantiques, qui pétrarquisent et pindarisent comme les poètes de la Pléiade.
Que j’eusse alors, tout fier, porté comme au martyre, Après Roland, Charlotte et le poète André, Ma tête radieuse à l’échafaud sacré ! […] Mais revenons ; ce Joseph, qui se consumait ainsi sans foi, sans croyances, sans action ; cet individu malade qui suivait son petit sentier loin de la société et des hommes, avait commencé vers la fin de sa vie à renaître à une sympathie plus bienveillante, et à chercher les regards consolants de quelques amis poètes ; c’est ce qu’il fit de mieux et de plus profitable pour lui ; son cœur se dilata à leur côté ; son talent s’échauffa aux rayons du leur, et il dut à l’un d’eux surtout, au plus grand, au plus cher, le peu qu’il nous a laissé. […] Les individus illustres sont assurés de retrouver leur place dans cette prochaine association de l’art vers laquelle convergent rapidement toutes les destinées de notre avenir ; Victor Hugo y fournira une phase de plus, une période nouvelle de son génie ; Alfred de Vigny, merveilleux poète, y marchera d’un pied plus ferme sur cette terre dont il a été jusqu’ici trop dédaigneux. […] Qui veut comprendre un poète, doit le suivre dans l’ordre d’idées où son instinct le place de préférence : avant de juger son expression, il faut étudier les aspects qu’il a su découvrir, hors des voies battues par la foule.
Il faut remonter jusques à Homère, pour trouver un poëte de cette chaleur & de cet enthousiasme. […] Il s’en faut bien que les Anglois aient toujours eu la même opinion du poëte qu’ils placent au-dessus de tous les poëtes épiques. Milton devint aveugle & pauvre, comme Homère ; mais on ne l’égala jamais, de son vivant, au poëte Grec. […] Il ne fut pas en son pouvoir d’employer un Cowley, digne rival de Pindare & le chantre des infortunes de David ; un compte de Rochester, ce Juvénal Anglois ; un Waller, le Voiture & le Chaulieu de l’Angleterre ; le premier de cette nation qui, dans ses vers, ait consulté l’harmonie, ait cherché l’arrangement des mots & le goût dans le choix des idées ; ce poëte, qui, vivant à la cour avec soixante mille livres de rente ; cultiva toujours son talent pour les vers agréables & faciles ; le même qui, en ayant fait à la louange de Charles II, les lui présentant & s’entendant reprocher qu’il en avoit fait de meilleurs pour Cromwel, répondit au prince : Nous autres poëtes, nous réussissons mieux dans les fictions que dans les vérités.
On les plaçait au centre des armées : « Viens nous voir combattre et mourir, et tu nous chanteras. » Et le guerrier qui tombait percé de coups, tournait ses regards mourants vers le poète qui était chargé de l’immortaliser. […] Les Danois qui, sous le nom de Normands, ravagèrent la moitié de l’Europe et mirent deux fois le siège devant Paris, en s’embarquant pour aller exercer leur métier de conquérants ou de pirates, ne manquaient jamais de mettre dans leurs vaisseaux, avec leurs provisions, leurs armes et leurs tonneaux de bière, quelques scaldes ou poètes pour chanter leurs succès. […] Tel est surtout l’ouvrage d’un de ces Scandinaves, qui, au neuvième siècle, fut en même temps roi, guerrier, poète et pirate, et qui, pris en Angleterre les armes à la main, condamné à mourir dans une prison pleine de serpents, chanta lui-même son éloge funèbre. […] Ainsi une île qui n’est aujourd’hui qu’un amas de rochers brisés ou noircis par les volcans, et à travers lesquels on voit, de distance en distance, des cabanes et des troupeaux, quand tout le reste de l’Europe était barbare, a produit une foule de poètes.
Viennet est le poète du temps le plus agréable à l’Institut assemblé. […] Des poètes classiques, M. […] Viennet est fort instruit, ce qu’on ne saurait dire de tous les poètes.
Lucien Muhlfeld Ceux qui regrettent qu’on ait retrouvé seulement une dizaine des Mimes du poète Hérodas, liront avec plaisir les Mimes de Marcel Schwob, continueront de goûter un savant plaisir. […] Schwob, plus artiste à coup sûr qu’Hérodas, met dans ses récits une poésie et une mélancolie qui manquaient au poète de l’Île de Cos, lequel était volontiers jovial et « réaliste ». […] Mais les cadres, les sujets, et jusqu’aux tons de conversation du poète antique, voilà ce que s’est assimilé Marcel Schwob, avec l’aisance charmante d’un talent averti patient et heureux.
On doit à ce poëte l’invention des vers iambes ; mais elle fait sa honte. […] Les maximes pernicieuses, la morale infame que préchoit le poëte, & qu’il avoit soin d’accompagner d’une diction véhémente, énergique, achevèrent de le décrier. […] A l’égard de la partie chantée, l’instrument qui l’accompagnoit s’y conformoit servilement, & ne rendoit que les mêmes sons que le poëte musicien avoit entonnés.
Qui ne sent dans de tels vers l’amant sous le poëte ? […] C’était un descendant du chevalier Bayard, brave et aventureux comme son ancêtre ; lettré et poëte comme Ronsard, âme légère propre à se brûler à ce flambeau. […] Ces beaux vers de Ronsard auraient dû être l’excuse de la passion d’un poëte aussi épris, mais moins discret que lui. […] Le poëte Byron, qui descendait de lui par les femmes, a peint avec des couleurs de famille son ancêtre dans son poëme sombre et romanesque du Pirate. Le poëme n’approche pas de l’histoire ; toujours la nature, qui est le souverain poëte, dépasse la fiction par la vérité.
Même quand le poète veut s’affranchir de l’usage, les comédiens et surtout les comédiennes l’y plient bon gré mal gré. […] Dans les tournois poétiques, elle accorde la palme au poète le mieux disant. […] Comparez aux peintures du poète ce qui se passe dans certaines familles, surtout dans les familles jansénistes du temps, et vous verrez qu’il n’a eu qu’à idéaliser certains traits choisis dans la réalité. […] Comme il arrive toujours, les mœurs à leur tour réagissent sur la littérature et il est parfois difficile de décider quand les poètes et les romanciers prennent ou fournissent des modèles à la société environnante. […] Il est clair qu’en ces moments-là poètes et poètereaux, romanciers et conteurs, littérateurs de tout genre écrivent surtout en vue du soi-disant sexe faible qui a su adoucir et amollir à son image le prétendu sexe fort.
On est sûr de retrouver alors tout cela grandi, idéalisé dans les héros créés par les poètes. […] En revanche, les poètes célèbrent l’amitié, le dévouement entre compagnons d’armes. […] Ainsi l’état moral de la société féodale se reflète, sous ses deux faces contraires et inséparables, dans les types imaginés par les poètes. […] C’est à coup sûr l’impulsion du cœur, ce que le poète appelle les mouvements de la nature. […] Il me semble inutile d’insister : on voit assez comment l’état moral des trois époques trouve son expression chez les trois poètes.
On y sentirait par endroits le souffle éloquent et véhément de l’orateur, plus encore que la veine du poète. […] Le poète se retrouve ici avec son illusion. […] Il y a là l’élégie royale dans toute sa gloire, puis, tout à côté, le mystère d’un réduit riant et studieux couronné de rameaux, et propice au rêve du poète, au rêve de l’amant. […] Comisaire — Et maintenant, pour se soulager le cœur gros de dégoût, qu’on relise les derniers ïambes du poète ! […] Gabriel de Chénier, neveu des deux poètes.
Voilà, je pense, une affirmation capitale, venant d’un homme qui a fait le tour complet de l’histoire et de la vie, l’avis puissant d’un naturaliste et d’un poète : une saine vitalité, tel est son code et sa morale. […] Mon premier texte n’appartient pas à ces dernières années comme les suivants, puisqu’il date du 31 août 1837, mais je le donne en complément de quelques vers d’un poète américain, — M. […] Je l’emprunte au poète et sociologue anglais Edward Carpenter : «… Quant au gouvernement et à la loi établis par les hommes, ils disparaîtront ; car ce ne sont que les parodies, les substituts provisoires du gouvernement et de l’ordre intérieur. […] Roberts est aux États-Unis parmi les quatre ou cinq poètes les plus modernes d’inspiration. […] Nous voyons à travers le poète, l’artiste ou le savant, l’homme, l’homme de partout et de toujours, cet éternel vaincu dans la course du monde.
Le poète se laisse aller au cyclone. […] Le poète n’est pas un métaphysicien. […] Par elle, le poète rêve qu’il rêve. […] Quel poète, ce d’Esparbès ! […] Simon est un poète.
Un poëte de cour en cette cour est un bien petit personnage, sorte de joueur de luth à gages, obligé par son emploi de chanter respectueusement toutes les choses officielles, compagnon du petit chien pour lequel il fait des vers. […] Le poëte au dedans restait libre, et je crois que derrière ce retranchement impénétrable nulle servitude n’eût pu l’envahir. […] C’est qu’il était poëte. […] Deux ans après, la lecture d’une ode de Malherbe le ravit ; il ne lit plus autre chose, il passe les nuits à l’apprendre par coeur, il va déclamer son poëte à l’écart. […] C’est par ce côté et dans ce fond intime qu’il faut regarder La Fontaine, C’est par là que la vie d’un poëte vaut quelque chose.
Pour un poète allemand, aussi bien que pour un poète italien, pour un poète français, Unruh n’est pas d’Annunzio au Capitole, mais plutôt saint Pierre devant le temple de Vesta, que la basilique a renversé ! […] Nous avons bien vu, sinon sa poésie, le poète. […] En politique aussi bien que dans le domaine des poètes, l’avidité, l’activité de M. […] Quant au paysan vaudois, il lui reste au moins un poète. […] La poétesse était née en 1876.
Barbey d’Aurevilly, on ne connaît guère le poète, qui cependant est éblouissant. […] Trébutien, l’ami intime du poète, qui lui écrivit — le croira-t-on ? […] Mais c’est que toutes les facultés de ce rare talent se font équilibre et se tiennent d’une étroite manière ; et, même à l’occasion de ces feuilles légères des Memoranda, c’est ce talent tout entier qu’il convient d’évoquer… Quoi qu’il en soit des causes dont ces habitudes ont été l’effet visible, il est certain que, pareil à ce lord Byron qu’il aime tant, M. d’Aurevilly aura vécu dans notre dix-neuvième siècle à l’état de révolte permanente et de protestation continue… M. d’Aurevilly est, au plus beau et au plus exact sens de ce mot, un poète, — un créateur ; même sa poésie est aussi voisine de celle des Anglais que sa Normandie est voisine de l’Angleterre.
Pierre Quillard est le plus caractéristique des poètes qui, tout en restant, pour la forme et le rythme, absolument fidèles à la technique parnassienne, se retrempent, pour le fond, dans les nouveaux courants poétiques. […] Ce sont les vers d’un poète très conscient et très réfléchi, et oui forment, si l’on peut dire, les colonnes du livre de M. […] [Poètes d’aujourd’hui (1900).]
C’est parce que cet exemple est particulièrement salutaire en un temps de désarroi et de lassitude comme le nôtre, que j’ai cru pouvoir donner à Roumanille une place dans ma modeste galerie, et montrer en lui, non pas le troubadour de légende, d’Opéra-Comique et de vignette, mais l’homme de bien, le poète de talent, se résignant à parler la langue de ceux qu’il veut convertir, et à renfermer sa popularité dans un étroit espace, pour la rendre plus utile et plus solide. […] C’est lui qui, avec Mistral, rallia les poètes, renouvela la langue et publia L’Armana prouvençau, dont le succès annuel ne s’épuise point. Poète, Roumanille laisse des merveilles : Li Margarideto et Li Sounjarello, qui ravissent les pauvres gens.
Il est incontestable qu’il n’est pas né Poëte ; & que, par conséquent, il ne le deviendra jamais. […] C’étoit peu d’avoir su imiter le plan & la marche de ce Poëte ingénieux, élégant & délicat, il falloit, comme lui, avoir le talent de donner de la vie & de l’intérêt aux tableaux qu’on vouloit présenter. […] La seule fois qu’il a rencontré la vérité, c’est quand il a dit que ce Poëte a une maniere à lui.
Quoique la force & l'élégance ne soient pas son caractere dominant, elle ne manque ni d'esprit, ni d'imagination ; elle est d'ailleurs quelquefois gaie, toujours honnête, & ne s'est attachée qu'à des sujets que tout Poëte peut traiter sans honte, & tout Lecteur lire sans remords. […] La plus ingénieuse de ses petites Poésies est une espece de Poëme lyrique, à qui le Poëte a donné le nom de Philosophisme. […] Elle fera juger du respect de ce Poëte pour la Religion, & de son mépris pour nos Philosphes.
Le poëte Grec récita ses vers aux Phocéens. […] Le poëte, réduit à la dernière indigence, se croit trop heureux. […] Le poëte juroit de poursuivre en tous lieux le grammairien.
Poètes et artistes se battent incessamment les flancs pour satisfaire cet instinct. […] Cela ne s’explique que par le penser confus du poète mystique. […] Mais la ressemblance de ces deux poètes avec le chef de l’école est pourtant éloignée. […] Les poètes emploient de plein droit l’une et l’autre forme. […] Ici le rabâchage imbécile de sons semblables inspire au poète un jeu de mots inepte.
Puissent les poètes et les romanciers me pardonner cette comparaison ! […] « On dit qu’il y a aujourd’hui trois poètes en France, écrivait M. […] Mais, en attendant, ils n’ont l’un et l’autre oublié que de caractériser le poète. […] quelles « figures grossissantes, propres aux poètes suprêmes, et à eux seuls » ? […] Et cela ne l’empêche pas d’être un grand poète, un très grand poète, l’un de nos plus grands poètes, mais cela l’empêche d’être « le plus grand », et « le plus grand de tous les siècles » ; — et cela vaut bien la peine d’être dit.
Les compatriotes du poète ont eu la piété de la conserver intacte. […] On multiplierait les preuves que le poète mort jeune, dont Musset parlait à Sainte-Beuve dans un billet célèbre, a été chez celui-ci, non seulement un poète très vivant, mais, osons le proclamer, un grand poète. […] Chez le poète primitif, ce don du chant était primitif aussi. […] Le poète n’a pu arriver à l’état lyrique. […] Un poète compliqué est une anomalie presque monstrueuse.
le plaisant projet d’un poète ignorant Qui de tant de héros va choisir Childebrand. […] — C’est le commencement, lui dit-il, de la première Ode du plus sublime de tous les poètes. […] Ils ont laborieusement écrit des volumes, sur quelques lignes que l’imagination des poètes a créées en se jouant. […] L’homme d’esprit qui parle ainsi ne sent pas Boileau poète, et, j’irai plus loin, il ne doit sentir aucun poète en tant que poète. […] Il n’y a de chaque vrai poète qu’un exemplaire.
Henri Heine, ce poète charmant et si digne d’être regretté, Henri Heine a pris acte de cette réaction en termes imposants que nous rappellerons, parce qu’allemand, poète et critique d’instinct, il est sur Hoffmann plus compétent que personne : « Les véritables penseurs — dit-il — et les natures poétiques, ne veulent plus entendre parler d’Hoffmann. […] L’illustre poète de l’Astrologue et de la Dame du lac n’hésita pas à déclarer alors que l’esprit d’Hoffmann lui semblait troublé, et que ses inventions n’étaient rien de plus que de moqueuses extravagances. […] Outre les sept Contes posthumes dont nous avons parlé, il contient la notice biographique par le conseiller Frédéric Rochlitz, qui fut publiée en 1822 par la Gazette de Leipzig, quelques traits sur la caractéristique d’Hoffmann, une correspondance de sa jeunesse, des extraits de son livre de notes, sa correspondance musicale, enfin des portraits et des dessins de ce singulier tohu-bohu vivant d’artiste, qui avait en lui trois aptitudes auxquelles il se suspendait tour à tour, ne sachant s’il devait être poète, musicien ou peintre, — embarras que, par parenthèse, n’éprouve point un homme de génie, dont la vocation est l’immaîtrisable élan de ses facultés ! […] Les Contes de Perrault sont une grande œuvre parce qu’il y a réellement de l’invention, malgré le style, dans cet ouvrage, et que le vers du poète est vrai : Perrault, tout plat qu’il est, pétille de génie.
Taine, en rendant justice aux nombreux et immenses mérites du poète dans La Fontaine, n’aurait-il pas dû insister davantage sur la qualité prédominante du génie qu’on pourrait appeler nonpareil, comme la nonpareille des Florides, et qui le fait unique dans la littérature française, — et, que dis-je ? […] Ce n’est pas tout que d’être un grand poète et un délicieux conteur. Il y a eu des conteurs et des poètes avant et depuis La Fontaine. […] Walter Scott, par exemple, un autre conteur et un autre poète, a parfois aussi une bonhomie charmante… mais c’est parfois, et La Fontaine l’a toujours. […] Comme jamais poète ne vécut plus que lui dans son rêve, au milieu du monde il était distrait et on se le montrait en souriant… Mais quand il tombait de son rêve, — et il avait plus l’habitude d’en tomber que d’en descendre, — il portait dans toutes les relations de la vie le charme de son génie bonhomme.
De poète je redevenais palefrenier…” Il était poète encore lorsque, débarqué à Antibes, il allait mêler ses larmes brûlantes aux flots de la Sorgue, en face du sombre rocher de Vaucluse, délicieuse solitude, dit-il, car il n’y a vu que l’ombre du souverain maître d’amour, et le souvenir de Laure de Noves lui a rappelé Louise d’Albany. […] Le poète y demeure deux mois, et aussitôt voilà les tragédies qui reprennent l’avantage sur les coursiers aux fières encolures. […] Encore palefrenier la veille, il redevient poète tout à coup dans sa villa de Colmar. […] Copions ici le jugement du poète de Brutus sur cette démarche. […] Le poète, réconcilié avec les rois par leur infortune, fit demander une audience à son ancien maître fugitif.
On a dit que c’était peut-être Moïse ; mais Moïse, d’après la Bible elle-même, n’était ni éloquent, ni poète ; il était surtout homme d’État, historien, législateur. Job a la langue du plus grand poète qui ait jamais articulé la parole humaine. […] Les hommes, en effet, n’ont plus de tels accents : Platon, Socrate, Cicéron sont pâles et énervés auprès de ce poète du désert et des vieux jours. […] Est-ce que Dieu, dans cette fable, n’est pas un aussi grand poète, un aussi grand dramatiste que l’Eschyle ou le Sophocle de ce commentateur ? […] Quel poète a donc chanté, ou gémi, ou crié ainsi ?
Cette publication a souffert de la réaction que la mémoire du poëte a eue à subir au lendemain de sa mort. […] Mon dessein n’est pas de revenir ici sur l’œuvre du poëte et du chansonnier. […] Je n’en pensais pas plus que je n’en ai dit alors sur les défauts mêlés aux mérites, et, ces réserves faites, ces correctifs apportés, et, si l’on veut, ces malices rendues, je restais dans ma mesure d’admiration et de respect pour le caractère de l’homme et pour le talent du poëte. […] L’âme publique du poëte n’est pas éveillée encore ; il lui fallut quelque temps pour s’orienter. […] Il évite, deux ans après, un écueil mortel pour un poëte, c’est de devenir un critique, un journaliste.
N’est-ce pas grâce à la forme prestigieuse que les poètes ont su leur donner, que la plupart des idées se sont imposées à notre conscience ? […] D’autant plus que cette expérience avait déjà été faite avec un égal succès sur le premier titulaire de cette chaire, Albert Richard, le poète vigoureux des grands jours de notre histoire nationale, le profond connaisseur des littératures du Midi qui savait par cœur toute la Divine comédie. […] Nous avons vu douze générations de penseurs se morfondre sur un problème insoluble, des sculpteurs s’acharner à donner à la pierre la forme de leurs rêves, des peintres incarner dans des corps à peine matériels leur vision intérieure, des poètes courir éperdus dans les régions surnaturelles. Le spectacle change : artistes, penseurs et poètes ne poursuivent plus maintenant que des objets tangibles. […] La réconciliation est complète entre l’homme et l’argile d’où il est sorti, l’idéal est descendu des régions inaccessibles où l’avait maintenu la foi naïve de nos premiers poètes, il est maintenant sur la terre, à portée de tous et dans toutes les choses sensibles.
Le poëte dont je voudrais donner idée est un petit poëte, un poeta minor par excellence ; mais il en tête de la série, tellement quel si l’on peut dire que Théocrite demeure le dernier des grands poëtes grecs, Méléagre, en mérite comme en date, est le premier des petits : il mène avec lui tout un cortège. […] On peut dire encore de ces courtes et vives saillies du poëte amoureux que ce ne sont que des étincelles, mais des étincelles arrachées à la foudre. […] Le poëte ne manque pas de jouer sur le mot, comme ferait tout galant auteur de madrigal ou de sonnet, comme fera Pétrarque lui-même. […] Le poëte se représente dans la situation d’un messager qui vient annoncer à celle-ci la mort de ses fils, croyant que c’est là tout son malheur ; mais tout d’un coup, et tandis qu’il parle, il est témoin de la mort des filles restées auprès de leur mère. […] Ici, dans ce printemps de Phénicie comme dans ceux d’Ionie et de Sicile, le spectacle se déroulait au complet sous un seul et même regard, et l’heureux poëte n’a fait que copier la nature.
Par exemple, ce que je vous ai fait remarquer en souriant : L’animal se sent agité De mouvements que le vulgaire appelle Tristesse, joie, amour, plaisir, douleur cruelle… Voilà, sans encore aborder son plaidoyer, voilà un premier jalon que le poète, j’allais dire que l’avocat, que le poète plante pour fixer les esprits sur cette idée à laquelle il tient. […] Il y a eu une grande école, c’est l’école de 1660, l’école de ces quatre grands poètes, au moins de ces quatre poètes dont trois sont très grands : Racine, Molière, La Fontaine et Boileau. […] Je citerai Nisard, qui, il faut lui en faire honneur, s’est aperçu, pour ce qui est des contemporains, d’une chose très vraie : c’est qu’un grand poète contemporain, Alfred de Musset, rappelait souvent La Fontaine et lui ressemblait. […] La Fontaine est cela, je l’ai reconnu assez loyalement et assez complaisamment devant vous, mais il est bien autre chose, et La Fontaine considéré comme poète, je ne dirai pas n’est pas traité dans le livre de Taine, non certes ; mais il y est insuffisamment traité. […] la raison chez les poètes !
Je ne sais pas d’exemple plus propre à marquer la difficulté de condition qui est faite dorénavant aux poètes modernes, condition la plus opposée à celle des poètes de l’Antiquité, lesquels, avant l’institution de la critique, avaient pour eux et en faveur de leurs créations les bruits, les fables, les erreurs répandues dans l’air, pourvu qu’elles fussent touchantes et de nature à exciter l’intérêt. […] Mais les peuples d’humeur mobile et d’impression superficielle se mirent aussitôt à regretter à l’excès un prince que chacun bafouait la veille, et dont l’existence, si elle s’était prolongée, eût pu être pour eux un malheur et un fléau ; la pitié s’émut comme pour une victime ; les poètes qui ne cherchent que des thèmes le chantèrent ; on se plut à voir dans sa fin rapide un mystère de machiavélisme et de ténèbres. […] Et maintenant, poètes, romanciers, Vous voilà avertis : gardez-vous de l’histoire. […] Que si les types connus et répétés vous ennuient, rien n’est épuisé ; l’imagination et l’observation sont deux sources ; ayez vos types tout neufs, ayez-les à vous, et, par votre talent, faites-les aussitôt vulgaires ; opérez le miracle du poète et dites-leur : Vivez et marchez ! Mais l’histoire, chaque fois que vous voulez la toucher, consultez-la bien ; elle est jalouse ; respectez-la ; tôt ou tard, chez les modernes, elle se venge du poète qui l’a méconnue et lui inflige de sanglants démentis.
Elle avait eu aussi, bien tard, un goût très-vif et peut-être assez tendre pour notre ami le poète breton Brizeux, fugitif et toujours prêt à se dérober. […] Quel poète ! […] Jars, veut offrir au poëte une mélodie qu’il a faite sur ses paroles. […] Elle était bien la sœur du poëte en effet par la sensibilité et par le cœur, et aussi par une certaine simplicité primitive d’imagination. […] Saint-René Taillandier, qui l’entoura des plus tendres soins et le traita en poète et en frère.
On discutait passionnément les Poètes maudits. […] Il en venait de toutes sortes, des poètes chevelus et crottés, des gentlemen fleuris d’orchidées, des esthètes chargés d’orfèvreries, des demi-vierges à bandeaux plats, des bas-bleus évaporés. […] Son père, qui était poète, ami de Lamartine et de George Sand, fit sa première éducation et l’envoya ensuite achever ses études au collège de Confolens. […] « Il fit alors la connaissance de Maurice du Plessys, le poète gentilhomme, avec lequel il fonda le Décadent. […] Le hasard voulut qu’à l’époque qu’il fallait je fisse paraître les Poètes maudits, beaucoup pour Corbière et Mallarmé, mais surtout pour Rimbaud.
Prenons un autre exemple moins important : le poëte. […] Peut-on être un grand poëte sans une forte teinture d’histoire, de physique et de géographie ? […] Nos poètes Corneille et Racine, moins instruits, n’auraient pas été ce qu’ils furent. […] Voltaire sait beaucoup et nos jeunes poètes sont ignorants. […] La profession de poëte exige donc de longues études.
Louis Ratisbonne, exécuteur testamentaire et légataire de M. de Vigny pour les choses littéraires et poétiques, m’a fait savoir que mon article sur son ami lui avait déplu ; il me l’a témoigné autant qu’il a pu en faisant imprimer dans la Revue moderne du 1er avril 1866 une note de M. de Vigny à mon égard, trouvée dans ses papiers, non destinée assurément à la publicité, et de laquelle il résulte que le poète n’était pas absolument satisfait du premier Portrait de lui que j’avais tracé dans la Revue des Deux Mondes en 1835 : « S. […] -B. m’aime et m’estime, mais me connaît à peine et s’est trompé en voulant entrer dans les secrets de ma manière de produire… Il ne faut disséquer que les morts… Dieu seul et le poète savent comment naît et se forme la pensée. […] Consolez-vous, personne n’a vécu dans la familiarité de M. de Vigny, pas même lui. » Mais M. de Vigny manquait de mémoire le jour où il écrivait cette note, et je puis dire que je le connaissais alors et l’avais étudié assez à fond, comme poète du moins et comme artiste. […] Le reproche m’en a été fait, et, même pour ce dernier article de 1864, le bon sens de Buloz me l’a dit : « Vous le placez trop haut comme poète, et vous ne lui accordez pas assez comme romancier. » J’écris en ce moment comme on cause.
Pourquoi, par exemple, avec le grand poëte dont il s’agit et en le relisant, suis-je presque toujours dans la situation d’un homme qui se promènerait dans un jardin oriental magnifique où le conduirait un enchanteur ou un Génie, mais où un méchant petit nain difforme lui donnerait à chaque pas de sa baguette à travers les jambes, le Génie ne faisant pas semblant de s’en apercevoir ? […] Aujourd’hui même le moment ne me semble pas encore venu pour chercher et pour donner la clef de cette organisation d’artiste et de poëte qui est assurément la plus extraordinaire et la plus inattendue qu’ait vue paraître la littérature française . Que si ma pensée se reporte, non plus sur le poëte, mais sur l’homme auquel tant de liens de ma jeunesse m’avaient si étroitement uni et en qui j’avais mis mon orgueil, ressongeant à celui qui était à notre tête dans nos premières et brillantes campagnes romantiques et pour qui je conserve les sentiments de respect d’un lieutenant vieilli pour son ancien général, je me prends aussi à rêver, à chercher l’unité de sa vie et de son caractère à travers les brisures apparentes ; je m’interroge à son sujet dans les circonstances intimes et décisives dont il me fut donné d’être témoin ; je remue tout le passé, je fouille dans de vieilles lettres qui ravivent mes plus émouvants, mes plus poignants souvenirs, et tout à coup je rencontre une page jaunie qui me paraît aujourd’hui d’un à-propos, d’une signification presque prophétique ; je n’en avais été que peu frappé dans le moment même. […] Dans les premières années qui suivirent, il semblait que, sauf un peu plus de vivacité dans ce qui concernait les droits du poëte au théâtre, il fût resté dans cette même mesure.
Parce que la tribune aux harangues regorge de Démosthènes, parce que les rostres sont encombrés de Cicérons, parce que nous avons trop de Mirabeaux, ce n’est pas une raison pour que nous n’ayons pas, dans quelque coin obscur, un poëte. […] — Ceci n’est plus qu’une question de second ordre, la question de succès, la question du libraire et non du poëte. […] L’artiste, comme l’auteur le comprend, qui prouve la vitalité de l’art au milieu d’une révolution, le poëte qui fait acte de poésie entre deux émeutes, est un grand homme, un génie, un œil, ὀφθαλμός, comme dit admirablement la métaphore grecque. […] Ce sont enfin, sur la vanité des projets et des espérances, sur l’amour à vingt ans, sur l’amour à trente ans, sur ce qu’il y a de triste dans le bonheur, sur cette infinité de choses douloureuses dont se composent nos années, ce sont de ces élégies comme le cœur du poëte en laisse sans cesse écouler par toutes les fêlures que lui font les secousses de la vie.
Plusieurs de ces principes sont si vagues, qu’on peut soutenir également que le poëte les a suivis ou qu’il ne les a point suivis dans son ouvrage. L’importance de ces principes dépend encore d’une infinité de circonstances des temps et des lieux où le poëte a composé. […] Il est donc comme impossible d’évaluer au juste ce qui doit resulter des irrégularitez heureuses d’un poëte, de son attention à se conformer à certains principes, et de sa négligence à en suivre d’autres. […] Souvent il arriveroit encore qu’après avoir bien raisonné et bien conclu pour nous, nous aurions mal conclu pour les autres, et ces autres se trouveront être précisément les personnes pour qui le poëte a composé son ouvrage.
Le poëte a évidemment voulu peindre avant tout le pays et les mœurs ; la fable (si fable il y a), l’action romanesque qu’il a jetée à travers, n’est qu’un prétexte et tient peu de place, trop peu sans doute. […] Voici un passage du chant second ; le poëte, qui vient de décrire la défense d’un troupeau de bœufs contre un loup, s’écrie tout d’un coup, exprimant cet amour un peu sauvage et forcené pour sa Bretagne qui fait l’inspiration de son poëme : O landes ! […] Voici de ce volume une des jolies pièces, une de celles qui se peuvent citer (car toutes à beaucoup près ne sont pas dans ce cas) ; le poëte qui l’a intitulée Fatuité ne fait qu’y exprimer bien sincèrement sa manière d’être le plus habituelle, sa façon de vivre, de porter la tête et de respirer ; on y sent déborder à chaque mot l’orgueil de la vie.
Maurice Pottecher est un poète philosophe ; son drame philosophique plaira aux penseurs, car il fait penser, ce qui n’est jamais vulgaire. — Et n’y a-t-il pas là un vaillant effort ? […] Alfred Mortier Dans tels poèmes, dans certains de ses contes, j’ai trouvé un artiste magnifiant ses pensées dans la forme large et belle d’un symbole en intime communion avec la nature profondément sentie et non à l’aide des artificiels joyaux dont parent l’idée tant de modernes poètes. […] Depuis, la tendresse de cette âme de poète s’est élargie en un sentiment de sympathie et de sollicitude sociale.
[Anthologie des poètes français du xixe siècle (1887-1888).] […] Theuriet, las de marier éternellement Raoul avec Angélique, laissera reposer sa plume de romancier ; il reprendra sa plume de poète, il ira passer quelques mois dans le jardin de sa grand-tante tout fleuri d’œillets et de roses trémières, et il en rapportera un petit volume de vers qui — je vous le prédis — sera un chef-d’œuvre. […] Theuriet, nous la retrouvons, marquée d’une façon originale, dans certaines pages où le poète nous conduit dans sa maison de Talloire, en Savoie, et dans sa retraite de Nice, où il a déjà passé plus d’un hiver.
MOTHE, [Antoine Houdart de la] de l’Académie Françoise, né à Paris en 1672, mort dans la même ville en 1731 ; Bel-Esprit agréable, Ecrivain élégant, bon Poëte à certains égards, on trouveroit dans la diversité de ses Ouvrages de quoi former cinq ou six réputations préférables à celle d’un grand nombre de nos Littérateurs actuels, quoiqu’en embrassant trop de genres, il se soit montré foible dans presque tous, pour avoir méconnu ses talens. […] Il a beau étaler un enthousiasme apparent, on sent d’abord qu’il le contrefait plus qu’il ne l’éprouve ; il est moins Poëte que Versificateur ingénieux, & moins Versificateur que Moraliste. […] Ce Poëte a fait encore des Hymnes & des Cantates, qui prouvent que l’Ecriture Sainte, d’où elles sont tirées, n’a pas été mieux traitée que l’Iliade, & sont de nouveaux motifs pour nous confirmer dans l’idée que le génie de la Mothe n’étoit pas propre à la Poésie sublime.
Ce Journaliste ajoute encore, en parlant du même Poëme : « L’agrément des descriptions y fait disparoître la sécheresse des préceptes, & l’imagination du Poëte y sait délasser le Lecteur par des fables qui, quoique trop fréquentes, sont presque toujours riantes & bien choisies. […] L’élégant Traducteur de Virgile étoit bien capable de juger du mérite du Poëte qui a le plus approché de ce même Original, dont personne n’a mieux senti ni mieux rendu que lui toutes les beautés. […] Comment ont appris leur Langue M. de Voltaire, le propagateur de ce paradoxe, & M. d’Alembert qui semble se faire une loi de ne penser que d’après ce Poëte ?
L’auteur ne se dissimule, comme on voit, aucun des devoirs austères du poète dramatique. […] Autrefois le poète disait : le public ; aujourd’hui le poète dit : le peuple.
Si elles n’étaient que de simples vertus morales, imaginées par le poète, elles seraient sans mouvement et sans ressort. […] Les poètes modernes ont tiré une foule de traits nouveaux du caractère chevaleresque. […] Soliman même n’a tant d’éclat, que parce que le poète lui a donné quelques traits de la générosité du chevalier : ainsi le principal héros infidèle emprunte lui-même sa majesté du christianisme.
Premièrement, il y a toujours eu dans toute religion, pour le poète et le philosophe, deux espèces de déités. […] Le poète trouve dans notre ciel des êtres parfaits, mais sensibles, et disposés dans une brillante hiérarchie d’amour et de pouvoir ; l’abîme garde ses dieux passionnés et puissants dans le mal comme les dieux mythologiques ; les hommes occupent le milieu, touchant au ciel par leurs vertus, aux enfers par leurs vices ; aimés des anges, haïs des démons ; objet infortuné d’une guerre qui ne doit finir qu’avec le monde. Ces ressorts sont grands, et le poète n’a pas lieu de se plaindre.
Suivant qu’on est plus ou moins sensible au coloris, ou bien à la poësie pittoresque, on place le coloriste au dessus du poëte, ou le poëte au-dessus du coloriste. […] Celui qui défend la superiorité du Poussin, ne conçoit pas donc qu’on puisse mettre au-dessus d’un poëte, dont les inventions lui donnent un plaisir sensible, un artisan qui n’a sçû que disposer des couleurs, dont l’harmonie et la richesse lui font un plaisir médiocre.
Virgile est le premier des poètes de cabinet. […] Il fut un poète officiel, un poète lauréat, un Tennyson. […] J’ai voulu signaler à nos poètes symbolistes un aïeul inattendu, mais authentique. […] Ce logicien est un poète. […] Il est même le seul de nos poètes qui soit de Paris à ce point.
Une harmonie des mots apparut possible, légitime : après la musique parlée des orateurs, naquit la musique écrite des poètes. […] Les poètes Parnassiens eurent la gloire de dédier pleinement le vers aux fonctions musicales. […] Cependant ils furent ouvriers d’une poésie prochaine, plutôt que poètes. […] Un jeune poète, M. […] Je ne puis apprécier davantage les œuvres nouvelles des poètes.
Voilà pourquoi il est si doux d’entendre un chant ; voilà pourquoi aussi, dans tous les temps et dans tous les lieux, les nations aiment leurs poètes et leurs musiciens. Le poète et le musicien sont les voix de ceux qui n’ont pas de voix, mais qui ont des cœurs et qui aiment à retrouver leurs impressions inexprimées dans ces vers ou dans ces notes en consonance avec leur âme. Les poètes sont les instruments sacrés sur lesquels les races humaines entendent résonner leurs propres mélodies. […] Tout le monde est poète lyrique en ces moments-là. […] Recherché pour son double talent de musicien et de poète, il fréquentait familièrement la maison du baron de Dietrich, noble Alsacien du parti constitutionnel, ami de Lafayette et maire de Strasbourg.
Ils se sont dit que, la musique devant traduire des émotions définies, les œuvres dramatiques des grands poètes antérieurs pouvaient leur fournir les indications les plus nettes et les plus belles des émotions à traduire. Méprisant donc, comme l’avait fait Wagner, les ineptes livrets de fabricants sans génie, ils ont pris pour sujets de leurs drames les drames les plus remarquables de nos poètes. […] Sans doute les grands poètes ont créé une vie plus haute et meilleure que d’autres ne pouvaient le faire : mais le musicien, pour exprimer pleinement par sa musique la vie émotionnelle d’un personnage, doit recréer entièrement ce personnage ; et il est à craindre que les inventions des grands poètes ne puissent pas être revécues aussi entièrement par lui que ses propres inventions. […] Quoique il ne fût jamais satisfait et cherchât toujours, tout le monde reconnaît pourtant que Platen a été comme aucun poète allemand, maître de la forme poétique, de la métrique et de la construction des vers. […] Quant aux sujets dramatiques, il trouve que les poètes allemands ne puissent pas assez dans le trésor des sujets mythologiques.
Nul poëte national comme Shakspeare. […] Un petit mot qu’on a déjà dit, qu’il faut répéter, explique tout : il était poëte, chose unique en France, et poëte de la même façon que les plus grands. […] Ils s’y développent, ils y agissent par leurs propres forces et d’eux-mêmes ; ils n’y sont point contraints par les passions ou les facultés qu’ils y rencontrent : ce sont des hôtes libres ; tout le soin du poëte est de ne point les gêner ; ils se remuent et il les regarde, ils parlent et il les écoute ; il est comme un étranger attentif et curieux devant le monde vivant qui s’est établi chez lui ; il n’y intervient qu’en lui fournissant les matériaux dont il a besoin pour s’achever et en écartant les obstacles qui l’empêcheraient de se former. […] Cela ne convient pas pour achever le portrait d’un poëte, surtout le portrait de celui-ci.
Les poètes ont pleuré à la vue d’un fleuve, ou d’une forêt immobile ; ils ont senti, comme les anciens prêtres de leur race, la vie sourde qui remplit ces êtres tranquilles. […] II Un poëte subsistait parmi tant d’orateurs, presque païen de coeur, et d’ailleurs si véritablement poëte qu’il pouvait se faire illusion et croire à des dieux morts. […] Pour un vrai poëte, pour La Fontaine, une couleur d’habit, un jappement de chien, un salon, un taudis, un Olympe, une perruque, tout a un sens et un intérêt. […] Ce qu’il fait au dehors, le poëte le fait au dedans ; il est mime ; il sent ce qu’il observe et tout ce qu’il observe, et les objets qui se peignent dans ses yeux les traversent pour aller jusqu’à sa sympathie, qui leur fait écho.
Dieu poète et musicien, Bacchus l’était presque autant qu’Apollon lui-même. […] Frappe cette Phrygienne qui prétend dominer les chants harmonieux du poète ; brûle ce roseau qui dessèche les lèvres, dont la voix criarde outrage le rythme et la mélodie, dont le corps a besoin de la tarière pour se façonner. […] De nouveaux poètes ont changé la forme du chant primitif, d’autres, avec le temps, viendront encore l’embellir. […] Les poètes y luttaient dans des concours solennels. […] Phrynicos avait mis en scène l’horrible désastre de Milet, l’alliée et la sœur d’Athènes ; il avait montré la ville pillée et incendiée par les Perses, ses défenseurs massacrés, l’oracle menaçant de Delphes accompli : « Les femmes de Milet laveront les pieds de beaucoup d’hommes à la longue chevelure. » Le peuple pleura à ce spectacle navrant ; mais, le lendemain, les yeux essuyés, il s’irrita contre le poète qui, par ces larmes brûlantes, avait ravivé sa plaie domestique ; il condamna Phrynicos à une amende de dix mines et interdit à jamais son drame.
Ovide le broda, et Musée, et d’autres, et hier encore, sans aucun doute, tel poète. Or, en même temps qu’Ovide, en même temps que Musée, en même temps, sans aucun doute, que tel poète d’aujourd’hui, — un rapsode inconnu, ignorant Ovide, Musée et tout ce qui est écrit, puisant dans une tradition strictement orale chantait, lui aussi, mais pour un autre public, « Héro et Léandre ». […] Adieu, ô mes père et mère, adieu tous mes amis, je m’en vais au ciel. » Une telle ballade ne provient ni des latins, ni des grecs, ni des poètes d’académie, ni d’aucune littérature écrite ; l’art en est très spécial, si spécial que nul poète, même un poète allemand, n’en pourrait faire un pastiche acceptable .
Les écrivains des réactions ne s’y trompent pas ; là où il y a de la révolution, patente ou latente, le flair catholique et royaliste est infaillible ; ces lettrés du passé décernent à la littérature contemporaine une honorable quantité de diatribe ; leur aversion est de la convulsion ; un de leurs journalistes, qui est, je crois, évêque, prononce le mot « poëte » avec le même accent que le mot « septembriseur » ; un autre, moins évêque, mais tout aussi en colère, écrit : Je sens dans toute cette littérature-là Marat et Robespierre. […] Les penseurs de ce temps, les poètes, les écrivains, les historiens, les orateurs, les philosophes, tous, tous, tous, dérivent de la Révolution française. […] Les écrivains et les poètes du dix-neuvième siècle ont cette admirable fortune de sortir d’une genèse, d’arriver après une fin de monde, d’accompagner une réapparition de lumière, d’être les organes d’un recommencement. […] Oui, génies, oui, poètes, philosophes, historiens, oui, géants de ce grand art des siècles antérieurs qui est toute la lumière du passé, ô hommes éternels, les esprits de ce temps vous saluent, mais ne vous suivent pas ; ils ont vis-à-vis de vous cette loi : tout admirer, ne rien imiter. […] Comme le déclarait il y a quarante ans tout à l’heure14 celui qui écrit ces lignes : les poètes et les écrivains du dix-neuvième siècle n’ont ni maîtres, ni modèles.
Sa majesté daigna même le nommer d’un voyage de Postzdam : elle lui rendit la clef de chambellan, & le cordon de l’ordre du mérite que ce grand poëte lui avoit remis, & qu’il ne perdit réellement que quelque temps après. […] Les chagrins, les infirmités du poëte redoublant, il fut assez heureux pour obtenir son congé ; mais toujours à des conditions très-flatteuses pour lui. […] Le poëte lui-même fut si touché dans ce moment qu’il écrivit à Paris, qu’en revoyant le roi de Prusse, il avoit retrouvé ce roi enchanteur. […] Cette illustre princesse est la même qu’ont immortalisé ses vertus & l’ode philosophique, qu’après sa mort le poëte a cru devoir lui adresser. […] L’exemple de ce grand poëte & les vers* d’Alain Chartier, sont une belle leçon : Le chagrin suit les cours ; fuis-les pour être heureux.
Il faut la main d’un poète ou d’un artiste pour l’en tirer. […] C’est un poète, sans ces cruelles et étincelantes agrafes qui pincent et retiennent la pensée dans leurs mordantes lèvres d’or, et par cette magnifique compression en font la poésie rythmique. […] Il a compris, lui qui est poète, que la plus profonde, la plus remuante poésie, c’est la poésie du passé ! […] La critique écrit le mot du poète : les plaisirs perdus sont les mieux sentis. […] Il est donc tenu d’être dans la vérité, même avant d’être artiste, avant d’être poète, avant d’avoir le talent qu’il a et de le manifester.
Cela est indiqué par le poète : « Suis-je un Satan ? […] Jean Richepin est, je crois bien, le plus latin de nos poètes français. […] Le banal, entre les mains d’un poète, grandit et devient l’« universel » ; et M. Jean Richepin est poète. […] Là encore le poète se montre grand conciliateur.
Les véritables historiens, à mon avis, ont été les poètes, parce qu’ils ont été les historiens de l’homme, du genre humain. […] Un sujet quelconque n’est pour le vrai poète que ce que la toile est pour le peintre habile. […] Tous les poètes qui ont suivi ont créé des événements plus ou moins analogues les uns aux autres, mais tous ont été fidèles à la sorte de vraisemblance du sujet ; tous ont été unanimes dans les caractères des personnages qui sont les héros de cette épopée romanesque. […] Ceci, pour le dire en passant, expliquerait assez bien l’unité de l’Iliade et de l’Odyssée, dans l’hypothèse de ceux qui pensent que ces poèmes ne sont pas l’ouvrage d’un seul homme, de l’homme qui s’est appelé Homère, c’est-à-dire le poète. […] En un mot, il ne faut pas que le poète participe à une croyance qui n’est point la sienne, et qui ne peut pas être celle de ses lecteurs.
Il semble que la voix du poète crie : “Voici les vengeurs !” […] En outre, il est plutôt poète rêveur, écrivain humoriste et fantaisiste que romancier proprement dit. […] Feydeau soit un poète. […] L’haleine du poète n’est pas longue, on le devine. […] « On ne lui avait jamais connu ni père ni mère, répond le poète.
N’est-ce pas affaire aux poètes de chez nous s’ils le voulaient ? […] » Mais les ennemis du poète étaient trop nombreux et trop acharnés. […] le délaissement du grand poète qui a oublié de mourir jeune ! […] Racine est, à mon avis, celui des poètes dramatiques qui a le plus réellement « inventé ». […] Le poète s’est appliqué à accumuler en sa faveur les circonstances atténuantes.
Il a, trop jeune, compris et senti trop de poètes et trop d’artistes. […] Mais le poète le sait : il ne suffit pas de voir pour montrer. […] Flaubert avait raison : c’était un grand poète. […] Les poètes mentent toujours un peu, quand ils s’adressent à des femmes. […] Personne, mieux que ce poète qui écrit en allemand, — je n’ai pas dit poète allemand, — n’a célébré la mélancolie épique des désastres qui suivirent l’enivrement des jours de gloire.
Voici donc encore un poëte, un de ceux que l’adversité semblait devoir éteindre, et qu’elle a seulement excités. […] Pellissier montre combien le poëte est peu disposé à s’abuser sur des productions qui sont, avant tout, pour lui, des consolations secrètes, des épanchements solitaires : nous ne craindrons point, après M. […] « C’est ainsi que je me serais offert aux yeux de l’observateur, non comme un écrivain, non comme un poëte, mais comme un exemple des sensations et des idées d’un homme qui n’a reçu d’autres leçons que celles du malheur.
Non seulement Dorat peut être regardé comme le Pere commun des Poëtes de son temps ; il fut encore Poëte lui-même, & bon Poëte, si l’on en juge par quelques-uns de ses Vers Grecs & Latins qui le firent surnommer par ses contemporains, le Pindare Moderne ; car alors on ne louoit que par comparaison. […] Ce Poëte étoit né, sans contredit, avec les dispositions les plus heureuses.
En faisant abstraction du génie particulier des deux poètes, et ne comparant qu’homme à homme, il nous semble que les personnages de la Jérusalem sont supérieurs à ceux de l’Iliade. […] Ainsi, à mesure que la société multiplia les besoins de la vie, les poètes apprirent qu’il ne fallait plus, comme par le passé, peindre tout aux yeux, mais voiler certaines parties du tableau. […] Et, d’un autre côté, le poète chrétien, plus heureux qu’Homère, n’est point forcé de ternir sa peinture en y plaçant l’homme barbare ou l’homme naturel : le christianisme lui donne le parfait héros.
Il est pourtant extraordinaire qu’avec tant d’avantages les poètes chrétiens aient échoué dans la peinture du ciel. […] C’est pourquoi les poètes ont mieux réussi dans la description des enfers ; du moins l’humanité est ici, et les tourments des coupables nous rappellent les chagrins de notre vie ; nous nous attendrissons sur les infortunes des autres, comme les esclaves d’Achille, qui, en répandant beaucoup de larmes sur la mort de Patrocle, pleuraient secrètement leurs propres malheurs. […] Nous couronnerons ce que nous avons dit sur ce sujet par une vue générale de l’Écriture : c’est la source où Milton, le Dante, le Tasse et Racine ont puisé une partie de leurs merveilles, comme les poètes de l’antiquité ont emprunté leurs grands traits d’Homère.
Un homme sans génie, mais qui a lû beaucoup de vers, peut bien, en arrangeant ses reminiscences avec discernement, composer une épigramme qui ressemblera si bien à celles de Martial, qu’on pourra la prendre pour être de ce poëte. Mais un poëte, qui après s’être diverti à composer un treiziéme livre de l’éneïde, seroit assez hardi pour l’attribuer à Virgile, n’en imposeroit à personne. Muret a bien pû faire prendre six vers qu’il avoit composez lui-même pour six vers de Trabea, poëte comique latin, qui vêquit six cens ans après la fondation de Rome.
Taine oppose à la fable philosophique, sera celle où le poète ne courra pas tout droit à son but moral, où il s’oubliera et se complaira à animer ses personnages, à les faire parler, à les rendre vraisemblables et vivants. […] Le poète aura l’air, par moments, de n’y plus songer ; elle lui échappera même quelquefois en mouvement touchant, en effusion de tendresse, comme dans une idylle, comme dans une élégie ; Les Deux Pigeons, critiqués par La Motte, sont le chef-d’œuvre de ce genre libre et de cette espèce d’épopée en petit : La Fontaine en est l’Homère. […] On a beau dire, il y a là un désaccord trop criant entre le procédé critique et l’idée aimable que suggère le poète. […] Aussi aimerais-je que, lorsqu’on écrit sur un auteur (et j’entends surtout parler d’un poète ou d’un artiste, d’un auteur de sentiment ou d’imagination), on se le figurât présent et écoutant ce que nous en disons. […] Il faut avant tout respecter les formes de l’esprit chez les critiques comme chez les poètes.
Il avisa bientôt dans la foule un homme à gants frais : c’était Michel, une manière de poète. […] Il se trouva que si l’un était une manière de poète et d’artiste, l’autre personne était une grande dame, une femme de qualité, et de ce qu’on appelle le faubourg Saint-Germain. […] « Le poète ne voulait pas de ces plumes de paon. […] La Fantaisie est la reine du monde. » C’est l’artiste et le poète qui parle. […] La femme du monde a bien vite senti qu’elle avait affaire à un poète, à un artiste, à un homme d’une autre race.
C’est à Dryden et à Milton qu’on donne exclusivement le titre de poètes. […] Un seul poète comique marche l’égal des Sophocle et des Corneille : c’est Molière. […] poètes, enfants de la nature, amis de l’homme et de la vérité ! […] Sa Muse, encore enfant, ignorait l’art du poète, fruit du travail et du temps. […] que le poète chrétien est bien plus favorisé dans la solitude où Dieu se promène avec lui !
Ils ne se conduiront jamais en poètes affamés. […] J’ai toujours dit que les poètes étaient matérialistes. […] Il s’est trouvé une douzaine de critiques pour décerner un brevet de grand poète à M. de Banville. — Pauvre poète ; ces articles-là valent le fameux billet de la Châtre. […] Gozlan n’aime pas les vers. « Plus de poètes ! […] pour le poète des Harmonies qui abreuva notre âme de volupté !
Elle veut, comme le poète mourant, plus de lumière. […] Le poète est le rêveur. […] Je négligerai de même l’œuvre du poète. […] Elle est commune à la plupart de nos jeunes poètes. […] Les poètes nouveaux ont fait beaucoup de ces meilleurs vers-là.
L’illustre poëte reçut cet abbé comme il a coutume de recevoir tous ceux qui ont une espèce de célébrité. […] On accusa même cet abbé, prosateur excellent, mais poëte détestable, d’avoir inséré des vers de sa façon dans une édition de la Henriade. […] Ce contraste frappe surtout ceux qui savent tant de traits honorables pour ce grand poëte. […] Le poëte auroit dû les mépriser.
Il est vrai aussi — et c’est là son excuse — que par cela même que Dumas fils est plus spécialement auteur dramatique, il est forcément voué à l’idée commune, la seule qui réussit pleinement au théâtre, et que, de toutes les idées communes, la plus sympathique à ce public de Sganarelles passés, présents ou futurs, qui remplissent nos salles de spectacle, c’est l’idée du mari… trompé, ce double type, comique ou tragique, à volonté, pour le poète. […] D’un autre côté, la Critique pourrait admettre encore que si Alexandre Dumas fils n’avait pas cette puissance de détails qu’ont les grands inventeurs dans l’ordre du roman comme Balzac, il était bien capable — lui qui passe pour l’esprit le plus dramatique de notre temps quand il s’agit de mettre en œuvre une idée quelconque, lui qui fait de l’arrangement d’un drame une espèce de création, lui, enfin, l’orthopédiste dramatique qui redresse les enfants mal venus, mal bâtis, bossus ou bancroches, et qui dernièrement a failli faire de ce talent-là une industrie, — de tailler quelque chose de grand, de profond et de nouveau, dans l’idée commune de son roman que lui ont soufflée ses habitudes de théâtre, et de se rattraper de son impuissance radicale de romancier sur son habileté de grand poète dramatique, puisqu’on dit qu’il l’est ? […] Le poète dramatique qui devait au moins se montrer, se prouver, dans ce roman sans valeur de roman, ne s’est point attesté dans son œuvre. Au poète dramatique il faut des situations et des caractères, et des implications formidables entre ces caractères et ces situations.
Le pays où Homère chanta, où Orphée institua des mystères, où l’architecture éleva des temples dont nous allons encore admirer les ruines, où le ciseau de Phidias semblait faire descendre la divinité sur le marbre ; ce pays où l’air, la terre et les eaux avaient, aux yeux des habitants, quelque chose de divin, et où chaque loi de la nature était représentée par une divinité, dut produire un grand nombre d’hymnes en l’honneur des dieux qu’on adorait ; mais la plupart de ces hymnes furent défigurées par des fables et des contes de fées, faites pour les poètes et les peintres : elles amusaient le peuple et révoltaient les sages. […] Tandis que les poètes et le peuple défiguraient ainsi la divinité en la célébrant, les initiés dans leurs mystères lui rendaient un hommage plus pur et plus digne d’elle. […] Nous avons des hymnes des Romains, ou du moins quelques morceaux dans leurs poètes, qui nous en donnent une idée3 ; mais nous n’avons rien de ce genre qui nous peigne la divinité d’une manière éloquente et forte. […] une fête établie pour la révolution des siècles, l’idée de la divinité pour qui tous les siècles ensemble ne sont qu’un moment, la faiblesse de l’homme que le temps entraîne, ses travaux qui lui survivent un instant pour tomber ensuite, les générations qui se succèdent et qui se perdent, les malheurs et les crimes qui avaient marqué dans Rome le siècle qui venait de s’écouler, les vœux pour le bonheur du siècle qui allait naître ; il semble que toutes ces idées auraient dû fournir à un poète tel qu’Horace, une hymne pleine de chaleur et d’éloquence ; mais plus un peuple est civilisé, moins ses hymnes doivent avoir et ont en effet d’enthousiasme.
Rêverie d’un poète françaisbq Un poëte français contemporain, exclu de toute participation aux déploiements de beauté officiels, en raison de motifs divers, aime, ce qu’il garde de sa tâche pratiquée ou l’affinement mystérieux du vers pour de solitaires Fêtes, à réfléchir aux pompes souveraines de la Poésie, comme elles ne sauraient exister concurremment au flux de banalité charrié par les arts dans un faux-semblant de civilisation. — Cérémonies d’un jour qui gît au sein inconscient de la foule : presque un Culte ! […] Jusqu’à Lessing, l’histoire de la littérature allemande n’a guère à recenser que des œuvres qui sont la mise en application de doctrines, Lessing est lui-même le plus frappant exemple de ce souci continuel de la théorie qui semble hanter les poètes de sa race. Les poètes de l’époque classique ont pris au moins autant de peine pour déterminer la direction de leur génie que pour en réaliser les conceptions. […] Selon Marchal, c’est donc « moins un musicien qu’un fondateur de religion, poète par surcroît, qui est offert par Mendès à la curiosité de Mallarmé (…) » (p. 171). Il semble également que le poète ait lu l’ouvrage de Paul Lindau, Richard Wagner, paru au début de l’année 1885.
Celui-ci ne saurait être mieux désigné que par le mot d’Auguste, sur le poète Térence, qu’il appelait un demi-Ménandre. […] Ainsi déjà deux coups portés à la fois, l’un au chef d’armée le plus en crédit, l’autre au poète le plus en réputation. […] De cette révolution naquirent les fables que les poètes latins traduisirent d’Épicharme et de ses imitateurs. […] arrêtez, s’il vous plaît, il faut avoir pitié des pauvres poètes ! […] On sent que la justesse d’esprit du poète égalait la droiture de ses intentions morales.
L’imagination du poète s’éveille. […] Le poète a demandé au garçon « de quoi écrire ». […] Et puis, ce jeune poète connaissait le secret des paroles magiques. […] Les poètes ne sont pas méchants et, au fond, ils sont fort habiles. […] C’est la marque des vrais poètes, de tous ceux qui n’ont pas attendu la venue de M.
Il y avait Parny et d’autres poètes ou conteurs qu’il ne nomme pas. […] Nous disions : Voilà les poètes, voilà les inspirés ! […] Poète inspiré, poète sans étude et sans habileté… L’habileté est, en ce monde perverti, ce que Banville a détesté le plus vivement. […] c’est que le peuple n’a pas encore trahi la confiance des poètes. […] Le poète sifflé de César se venge.
Bataille, quand Marcel Schwob le préfaçait, était un poète délicat et incertain. […] Bataille sont d’un poète. […] La réputation de poète qu’avait. […] Ce poète supposé n’atteint jamais le lyrisme. […] Toulet est un poète — est fertile en inventions d’une immatérielle fantaisie.
Dans nos vieux poètes, nos romanciers et nos trouvères, le sentiment du printemps, du renouveau, est toujours très-vif, très-frais, très-abondamment et très-joliment exprimé. […] L’église et l’allée des Pamplemousses ne valent pas, assure un récent voyageur, la description qu’en a donnée notre poëte. […] Sans parler du poète Robbé qui se mêlait d’avoir des idées là-dessus, plus d’un chaud partisan se déclara pour le système des marées, la fonte des glaces, l’allongement du pôle. […] Quiconque est sensible de cœur, quiconque est né voyageur par instinct ou poëte, lit un jour Bernardin et est initié par lui. […] Bernardin n’était nullement poëte en vers ; son amitié avec Ducis ne l’induisit jamais à quelque épître ou pièce légère.
Le grand poète n’avait cessé d’être de loin son « étoile polaire ». […] Les premiers écrivains ou poètes de l’Allemagne étaient à lui. […] Les poètes étrangers furent pervertis par cette doctrine plus grande que nature. […] Le philosophe disparut en lui devant le poète. […] « Poète romantique, mort en 1845.
Le voleur d’un coffre-fort, Clément, ayant versifié le récit de son vol, ses couplets furent chantés dans les cabarets, attirèrent l’attention de la police, et le voleur poète fut arrêté. […] On se contente parfois d’invoquer, pour prouver la décadence, le souci extrême que poètes et prosateurs montrent de la forme et du mot, souci qui prime celui des idées. […] Cet état dure jusqu’à ce que la bonne et saine vie, prenant le dessus, réagisse contre les influences stérilisantes ; de vrais poètes se produisent, entraînant avec eux toute leur génération. […] Et pour ce qui est du but extérieur, — moralisateur ou utilitaire, — que le poète peut se proposer, nous dirions volontiers avec Schopenhauer : l’intention n’est rien dans l’œuvre d’art. La moralité du poète doit être aussi spontanée que son génie, elle doit se confondre avec son génie même.
— Jasmin, le poëte d’Agen, est allé faire visite aux Champenois, à Épernay où son fils est établi ; il y a été fêté et a répondu par une jolie chanson française (il faut savoir pour le piquant que son fils est à la tête d’une fabrique de bouchons pour les vins de Champagne). […] Je ne sais qui a dit qu’il était plus véritablement de l’école d’Horace que M. de Lamartine : ce n’est que vrai. — D'ailleurs, il est le rhapsode triomphal du Midi et y remporte des succès qui semblent fabuleux de loin, mais qu’explique le caractère de ces populations en même temps que celui du poëte. […] Dans cette séance tout-à-fait grandiose, il était entouré (entr'autres notabilités) de six évêques, venus là pour consacrer l’œuvre pie du poëte.
La muse de Laprade était la plus divine des statues, mais une statue ; le poète était le grand statuaire de notre siècle, un Canova en vers taillant la pensée en strophes, un sculpteur d’idées. […] M. de Laprade possède au plus haut degré ce qui manque trop à des poètes de ce temps, distingués, mais courts ; il a l’abondance, l’harmonie, le fleuve de l’expression ; il est en vers comme un Ballanche plus clair et sans bégayement, comme un Jouffroy qui aurait reçu le verbe de poésie. […] [Poètes et romanciers (1888).]
Comment Moliere, Auteur seulement de trois ou quatre Pieces achevées, Auteur de tant d’autres, dont le dénouement est si peu naturel, & les défauts si sensibles ; comment avec une Prose si négligée, des Vers peu exacts, des caracteres outrés, est-il parvenu à se faire regarder, à juste titre, comme le premier Poëte Comique de tous les Théatres connus ? […] Est-il douteux que si la fortune de ce Poëte eût été plus indépendante, il n’eût mieux travaillé ses Pieces, & ne nous eût laissé plus de Chef-d’œuvres & moins de Farces ? […] Ne vaudroit-il pas mieux attendre patiemment qu’il reparût un Poëte comique, que d’accueillir si bénignement tant de Pieces bâtardes, propres tout au plus à étouffer le germe de la seule génération que le vrai goût puisse avouer ?
Si l'on apperçoit quelques défauts dans ses Odes, pour peu qu'on se connoisse en Poésie, on est tenté d'en accuser plutôt l'impuissance de l'Art, que celle du Poëte. […] Jamais la Poésie fut-elle plus touchante, plus attendrissante, plus majestueuse, que lorsqu'elle anime les différens tableaux que le pinceau du Poëte y a tracés ? […] Quel est le Poëte de nos jours qui ne voudroit pas avoir fait l'Epître aux Muses, l'Epître à Thalie, celle qui est adressée au P.
Ainsi ceux qui n’ont point de pente vers une passion, ne conçoivent point que les fureurs dont le poëte remplit ses scenes, et qu’il expose comme les suites naturelles d’un emportement dont-ils n’ont jamais senti les accès, soïent exposées suivant la verité : ou bien les suites d’une semblable passion leur paroissent les pures saillies de l’imagination dereglée d’un poëte exagerateur : ou bien les personnages d’une piece cessent de les interesser. […] Les transports forcenez d’un ambitieux, au desespoir qu’on lui ait préferé pour remplir un poste éminent et l’objet de ses desirs, celui de ses rivaux qu’il méprisoit davantage, peuvent donc bien interesser vivement ceux qui sçavent par leur propre experience que la passion que le poëte dépeint peut exciter dans le coeur humain ces mouvemens furieux : mais toutes ces agitations, que quelques écrivains nomment la fievre d’ambition, toucheront foiblement les hommes à qui leur tranquillité naturelle a permis de se nourrir l’esprit de reflexions philosophiques, et qui plusieurs fois se sont dit à eux-mêmes que les personnes qui distribuent les emplois se déterminent souvent dans tous les païs et dans tous les tems par des motifs injustes ou frivoles.
Hérodote lui-même est encore un poète par l’ordonnance de la composition et l’allure générale du récit. […] comme dit un autre poète, « nous sommes trop pleins du lait de l’humaine tendresse ». […] Un poète est toujours poète, et dans le xviiie siècle tout entier vainement chercheriez-vous l’ombre d’un poète. […] Qui des deux permit au poète la plus fière attitude et la plus noble, ou de Frédéric ou de Louis XV ? […] l’avenir est entrevu, la note est donnée ; c’est tout ce que l’on demande à des poètes de transition.
Il faut songer encore qu’avec les idées d’un penseur il a les délicatesses et les rêveries d’un poëte. […] Béranger, qui se croyait ou se disait le poëte du peuple, en a fait autant. […] Pitt, l’autre pensionnaire du gouvernement, le troisième poëte lauréat, convertis zélés, anglicans décidés et conservateurs intolérants. […] C’est un poëte crépusculaire. […] N’est-ce point là une vraie vie de poëte ?
II C’est un grand danger pour un poëte que de savoir trop bien son métier ; sa poésie montre alors l’homme de métier et non le poëte. […] Sans doute Pope avait le mécanisme plus brillant et plus agile ; mais cette habileté de main ne suffit pas pour faire un poëte, même un poëte de boudoir. […] Comment de gaieté de cœur un poëte a-t-il pu traîner son talent parmi de telles images, et contraindre ses vers si ingénieusement tissés à recevoir ces immondices ? […] Je laisse là l’enlumineur, le machiniste, l’entrepreneur d’effets littéraires, et je vais chercher le poëte ailleurs. […] Il faut la voir dans Rubens, il est le peintre et le poëte du climat plantureux et humide ; mais on la découvre aussi chez les autres, et, dans cette magnificence de Thompson, dans ce coloris surchargé, luxuriant, grandiose, on retrouve quelquefois la grasse palette de Rubens.
Il n’apparaît guère cependant chez les poètes, que pour être indignement bafoué. […] On comprend les cris de révolte que le poète place dans la bouche de son Prométhée ; Job, sur son fumier, en pousse d’aussi forts. […] C’est la parole du poète ou du philosophe, cette langue de feu qui défie sa foudre et qui saura détruire ce qu’elle a créé. […] Autant que Bacchus lui-même, Hermès est multiple et contradictoire ; des contes ont travesti ses symboles ; les poètes l’ont défiguré à plaisir. […] Au libre esprit de Prométhée, à sa fierté indomptable, le poète oppose la bassesse d’un dieu subalterne, sicaire et pourvoyeur d’un despote.
Poète veut dire créateur ; ils étaient donc poètes, et telle fut la sublimité de leurs conceptions qu’ils s’en épouvantèrent eux-mêmes, et tombèrent tremblants devant leur ouvrage. […] De même les premiers hommes, incapables de former l’idée abstraite du poète, du héros, nommèrent tous les héros du nom du premier héros, tous les poètes, etc. […] Voilà l’âge d’or, tant célébré par les poètes, l’âge où les dieux règnent sur la terre. […] À travers les concetti ordinaires aux poètes de cette époque, on y démêle un sentiment vrai : « Douces images du bonheur, venez encore aggraver ma peine ! […] Et grâce à vos louanges, ô noble poète, déjà fameux, déjà antique de son vivant, il vivra aux âges futurs, l’infortuné Vico !
Quant au personnage même de l’héroïne, quelques circonstances précieuses et consolantes dans la vie du poëte avaient rehaussé encore et achevé de perfectionner les traits. […] Ainsi vont se modifiant en perspectives diverses les œuvres du poëte. […] Il n’a pas été d’abord philosophe et métaphysicien, et ensuite poëte ; sa conception et sa forme se tiennent de plus près et ont une bien réelle harmonie. […] » s’écrie dans l’Orphée notre poëte théosophe ; or, cette voix, M. […] Ballanche a bien fait de rester poëte.
Son entretien avait la soudaineté, l’émotion, l’accent des poètes, avec la bienséance de la jeune fille ; elle n’avait, à mon goût, qu’une imperfection, elle riait trop ; hélas ! […] Le roi lui-même était un lettré et un poète. […] La jeune femme poète sentit dans son bonheur obscur le contrecoup de la chute des rois. […] Madame Roland n’aurait pas mieux su mourir pour son honneur d’épouse ou pour son honneur de poète. […] Ce tronçon brisé d’armes politiques ne sied pas sur une tombe de poète, encore moins sur une tombe de femme.
C’est de là que datent les premiers détails intéressants qui nous aient été transmis sur l’enfance du poëte. […] Un régulier lui disputa ce prieuré ; un procès s’ensuivit, auquel personne n’entendit rien ; et Racine ennuyé se désista, en se vengeant des juges par la comédie des Plaideurs qu’on dirait écrite par Molière, admirable farce dont la manière décèle un coin inaperçu du poëte, et fait ressouvenir qu’il lisait Rabelais, Marot, même Scarron, et tenait sa place au cabaret entre Chapelle et La Fontaine. […] Nourri des livres sacrés, partageant les croyances du peuple de Dieu, il se tient strictement au récit de l’Écriture, ne se croit pas obligé de mêler l’autorité d’Aristote à l’action, ni surtout de placer au cœur de son drame une intrigue amoureuse (et l’amour est de toutes les choses humaines celle qui, s’appuyant sur une base éternelle, varie le plus dans ses formes selon les temps, et par conséquent induit le plus en erreur le poëte). […] La scène se passe sous un péristyle grec un peu nu, et je me sens déjà moins disposé à admettre le sacrifice de sang et l’immolation par le couteau sacré, que si le poëte m’avait transporté dans ce temple colossal où Salomon, le premier jour, égorgea pour hosties pacifiques vingt-deux mille bœufs et cent vingt mille brebis. […] Des critiques sans portée ont abusé du droit de le citer pour modèle, et l’ont trop souvent proposé à l’imitation par ses qualités les plus inférieures ; mais, pour qui sait le comprendre, il a suffisamment, dans son œuvre et dans sa vie, de quoi se faire à jamais admirer comme grand poëte et chérir comme ami de cœur.
Il en faut mettre. » Voilà un premier avertissement qu’il se donne à lui-même et qu’il donne aux poètes de son temps. […] Il y a eu, vers 1640 environ, il y a eu une négresse très jolie qui a fait l’admiration de tout Paris et qui a été chantée par plusieurs poètes. […] La Fontaine n’est pas assez connu comme poète élégiaque lyrique. […] Voilà comment les poètes terminent leurs romans. […] Le récit est interrompu par une réflexion ou plaisante, ou badine, ou satirique du poète, ceci très fréquemment.
Un poète, qui, en faisant des vers, imite un autre poète sans bien s’en rendre compte, et qui refait des hémistiches déjà faits, est dit avoir des réminiscences. […] Mme Dufrenoy était un vrai poète par l’âme, par la passion, par le sentiment du rythme et de l’harmonie ; elle avait de la composition, du dessin jusque dans l’élégie : par malheur, l’éclat du style a manqué à ses inspirations et à sa flamme. […] Pouvait-elle se douter que cette palette du plus pur, du plus réputé classique et du plus lauréat des poètes d’alors, paraîtrait bientôt pâle, effacée et insuffisante de couleur ? […] Il est l’un des rares Français qui virent lord Byron ; il le visita à Gênes, recueillit la conversation qu’il eut avec le noble poète, et reçut même de lui une lettre qu’il publia dans le temps et qu’il reproduit aujourd’hui. […] Byron lui paraît un grand poète, mais M. de Jouy reste pour lui notre premier prosateur.
Notez que cette belle passion, qui éclate à certains moments chez quelques poètes anciens, s’est tue pendant des siècles et des siècles. Elle semble se réveiller chez les poètes de la Pléiade française, mais imitée, apprise, affaiblie ; ce n’est vraiment qu’un reflet. […] Tout cela fait à ses livres une figure à part, ce qui est l’essentiel et ce qui suffirait à me les faire goûter, quand même cet homme de loi lettré et ami des champs ne serait point, par-dessus le marché, un poète bien authentique. […] M. de Glouvet écrit quelquefois comme un poète ému et qui trouve sa langue sans trop y songer ; plus souvent comme un magistrat qui a des lettres. […] Si M. de Glouvet n’est peut-être pas partout un écrivain accompli, il s’est montré, comme j’ai dit, poète en plus d’un endroit, et, une fois, poète puissant dans le Berger.
Il faut se souvenir avant tout que, le 15 mai 1840, la Revue des deux mondes publia, avec une notice de George Sand qui y servait de préface, un magnifique fragment d’un poète mort l’année précédente à vingt-neuf ans, Georges-Maurice de Guérin. […] Aujourd’hui c’est la sœur de ce poète, et en tout digne de lui par l’imagination comme par le cœur, qui, morte à son tour, vient livrer, par les soins d’amis pieux, le parfum de son âme et de ses secrets épanchements. […] Hippolyte Morvonnais, un poète breton de ses amis, vers élevés de douce inspiration et de ferme structure, mais qui rappellent un peu trop Victor Hugo dans ses Feuilles d’Automne. […] … » L’originalité de Maurice de Guérin n’était pas là ; elle était dans un sentiment de la nature, tel qu’aucun poète ou peintre français ne l’a rendu à ce degré, sentiment non pas tant des détails que de l’ensemble et de l’universalité sacrée, sentiment de l’origine des choses et du principe souverain de la vie. […] Elle aussi était poète ; elle avait le génie des mélancolies et le don des images, chaste Lucile, plus fidèle et aussi funèbre, et qui devait survivre à son René.
Au lieu de fulminer contre les défauts du poète, ces défauts qui sautent aux yeux, pourquoi ne pas nous intéresser à lui ? […] Mais le jour viendra, troupe mal née et criminelle, que moi, retourné pourtant aux côtés de ma dame, je te ferai sentir si je suis poète ! […] Certes, cet homme de haut talent et, jusqu’à un certain point, de génie, de noble aspect et « d’une figure avantageuse » (ainsi en parlent ceux qui l’ont vu et qui ne songeaient point à faire, comme aujourd’hui, des caricatures à tout propos) ; cet homme à l’âme ardente, élevée, d’un esprit libre, d’un caractère indépendant et fier, qui n’avait pu se plier à la vie de Turin, et qui n’hésita pas, en renonçant à son pays, à sacrifier les deux tiers de sa fortune pour se mieux dévouer à l’objet de son culte ; le poète qui, dans la Dédicace de Myrrha, s’étonnant d’avoir tant tardé à nommer publiquement celle qui l’inspire, lui disait : « Ma vie ne compte que depuis le jour qu’elle s’est enlacée à ta vie » ; un pareil homme méritait que la comtesse d’Albany, déçue et frappée dans sa destinée, crût elle-même s’honorer par un tel choix, et ne pas perdre, même aux yeux du monde, en échangeant royauté contre royauté. […] Mme d’Albany, bien italienne en cela, n’eut point d’autre pensée, elle n’y mit pas plus d’art et de façon, dès qu’elle eut remarqué le poète et compris son amour. […] Elle y resta fidèle, et à quarante années d’intervalle, quatorze ans après la mort d’Alfieri, recevant de je ne sais quel poète une Dédicace pompeuse, elle remerciait en répondant avec modestie que la comtesse d’Albany ne la méritait pas, et elle ajoutait, en parlant d’elle-même, ce mot dont elle aurait voulu faire comme la devise de toute sa vie : « Elle n’a d’autre mérite que d’avoir été l’amie d’un homme supérieur. » Je continuerai, à la suite de M.
Il ressort surabondamment de tous ces témoignages qu’il n’y avait plus rien du poëte, presque plus rien de l’homme de lettres dans Racine mourant : le chrétien seul, et le chrétien selon Port-Royal, survivait et chassait toute autre pensée. […] Ce qu’il y a de bien certain, c’est que si chez celui-ci, vers la fin, le poëte était tout à fait fondu dans le chrétien, il se retrouvait tout entier, toujours armé et sur le qui-vive, toujours irritable en Despréaux. […] Autrefois, durant la période littéraire régulière, dite classique, on estimait le meilleur poëte celui qui avait composé l’œuvre la plus parfaite, le plus beau poëme, le plus clair, le plus agréable à lire, le plus accompli de tout point, l’Énéide, la Jérusalem, une belle tragédie. […] Le plus grand poëte pour nous est celui qui, dans ses œuvres, a donné le plus à imaginer et à rêver à son lecteur, qui l’a le plus excité à poétiser lui-même. Le plus grand poëte n’est pas celui qui a le mieux fait : c’est celui qui suggère le plus, celui dont on ne sait pas bien d’abord tout ce qu’il a voulu dire et exprimer, et qui vous laisse beaucoup à désirer, à expliquer, à étudier, beaucoup à achever à votre tour.
Weiss oublie de nous le dire Il déclare un peu plus loin que, seul parmi les poètes du XIXe siècle, Augier « trouverait grâce devant La Fontaine et Parny ». […] Et ce n’est point un lapsus, car ailleurs il appelle Parny « l’un des poètes les plus absolument poètes de la littérature européenne…, Parny, ce délice ! […] Nous voyons un peu après que « Perrault contraste avec l’ensemble du XVIIe siècle en ce qu’il est en ses contes un poète de la maison, des choses familières, domestiques, intimes, comme de l’enfance ». […] Car enfin ose me soutenir que tes pirates saxons, avec ces affreux chants de guerre dont tu as infesté tonHistoire de la littérature anglaise, sont plus poètes que Regnard ! […] Je n’aurai pas la candeur d’objecter qu’entre la sauvage hypocondrie d’un vieux poète saxon et l’esprit de Regnard il y a de la place ; que vraiment on peut rêver quelque chose au-delà des fantaisies un peu courtes de Crispin, une vision, un sentiment de la vie et des choses qui nous heurte d’une toute autre secousse et nous insinue un tout autre charme ; qu’enfin il y a des gens qui ne sont point des barbares et que pourtant les vers du Légataire ne plongent point en extase ni ne mettent sens dessus dessous.
Elle fut assaillie d’orages dès le berceau, Comme si, dès ce temps, la Fortune inhumaine Eût voulu m’allaiter de tristesse et de peine, ainsi que lui fait dire un vieux poète dans je ne sais quelle tragédie. […] Elle s’y accoutuma au sein de la cour la plus polie, la plus savante, la plus galante d’alors, y brillant en sa fleur naissante comme l’une des plus rares merveilles et des plus admirées, sachant la musique et tous les arts ( divinae Palladis artes ), apprenant les langues de l’Antiquité, soutenant des thèses en latin, commandant des rhétoriques en français, jouissant de l’entretien de ses poètes et leur faisant rivalité avec sa propre poésie. […] Quand Marie Stuart perdit subitement son mari (5 décembre 1560), et que, veuve à dix-huit ans, il fut décidé qu’au lieu de rester en son douaire de Touraine, elle retournerait en son royaume d’Écosse pour y mettre ordre aux troubles civils qui s’y étaient élevés, ce fut un deuil universel en France dans le monde des jeunes seigneurs, des nobles dames et des poètes. […] C’est un poète (Ronsard) qui a parlé de l’or de ses cheveux annelés et tressés , et les poètes emploient, on le sait, les mots un peu vaguement. […] Chastellard, comme on sait, était un gentilhomme de Dauphiné, musicien, poète, et du cortège des serviteurs et des amoureux de la reine, qui d’abord l’agréait assez.
Le poëte ne doit pas exiger du spectateur une foi aveugle et qui se soumette à tout. […] Le spectateur se prête sans peine à la croïance qui avoit cours dans les tems où l’évenement que le peintre et le poëte répresentent est arrivé. […] Ce grand poëte y exprime trop ingenieusement, par une composition allegorique, le merite de l’intercession des saints, dont les prieres procurent souvent aux pecheurs le tems et les moïens de se repentir. […] Il n’est pas necessaire d’inventer son sujet ni de créer ses personnages, pour être reputé un poëte plein de verve. On merite le nom de poëte en rendant l’action qu’on traite capable d’émouvoir, ce qui se fait en imaginant quels sentimens conviennent à des personnages supposez dans une certaine situation, et en tirant de son genie les traits les plus propres à bien exprimer ces sentimens.
Feuillet comme le premier des poètes et des romanciers de la génération présente. […] Il n’entendra jamais la musique des sphères célestes, il n’est et ne sera jamais véritablement artiste ou poète. […] Que sont la plupart des poètes anglais contemporains ? […] Qu’est-ce que le plus grand poète de l’Italie moderne, le noble et malheureux Leopardi ? […] Son style, qui est celui d’un vrai poète, sait peindre avec esprit et nuancer avec finesse sans subtilité.
Au reste, il y a à la fois de l’esprit et de la poésie à supposer que le nectar, si vanté par les poètes, n’est autre chose que la louange. […] Voilà un de ces traits qui caractérisent un poète supérieur à son sujet ; nul n’a su s’en jouer à propos comme La Fontaine. […] Ce n’était pas un poète comme La Fontaine qui pouvait oublier de mettre une musette dans le coffre-fort du berger. […] Les deux derniers vers : Quiconque en pareil cas se voit haï des cieux, Qu’il considère Hécube, il rendra grâce aux dieux ; sont excellens ; mais la moralité qu’ils enseignent est énoncée d’une manière bien plus frappante dans une fable de Sadi, fameux poète persan ; la voici : « Un pauvre entra dans une mosquée pour y faire sa prière : ses jambes et ses pieds étaient nus, tant sa misère était grande ; et il s’en plaignait au ciel avec amertume. […] J’ai déjà observé qu’il n’était point le poète de l’héroïsme, mais celui de la nature et de la raison ; et la raison peut-elle être plus blessée qu’elle ne l’est, par l’entreprise de cet aventurier ?
Et les départements restent seuls avec leurs poètes patois. […] — Est-il possible de se laisser émouvoir par un poète qui donne — dans ses vers — sa vie pour sa bien-aimée, et refuse un manchon de trente francs à sa femme ! […] C’est l’éloignement de Paris, direz-vous, c’est sa séquestration volontaire en province, qui ont conservé au poète de Psyché cette pureté de pensées qu’on tache si vite à Paris. […] Et ici surgit la question matérielle que j’indique en passant : Qui payera les œuvres des romanciers, des poètes de localité ? […] Y a-t-il un éditeur à Besançon, pour faire vivre le romancier de Notre-Dame, le poète des Feuilles d’automne ?
Les philosophes, les poètes, les critiques semblent avoir réuni leurs efforts pour le chasser ; je tremble qu’ils n’y réussissent ! […] Les poètes l’accusent de n’être bon, comme Chrysale, qu’à faire bouillir le pot et le renvoient dans la cuisine de Martine ou à l’école de Philaminte. […] Un critique trace les règles de l’épopée ; un poète les met en pratique et « accouche lentement d’un poème effroyable » : c’est la Pucelle, de Chapelain, où nous commençons à trouver du bon. […] Je connais un poète qui a copié de sa main, pour les faire lire à un ami, quatre colonnes consacrées à son livre dans un feuilleton ; mais il avait retranché le blâme. […] Présentez à une Revue une pièce de poésie, la poésie est de mauvaise défaite, et la Revue a ses poètes en titre.
C’est le concours des philosophes et des poètes qui perfectionne les langues ; c’est aux philosophes qu’elles doivent cette universalité de signes qui rend une langue le tableau de l’univers ; cette justesse qui marque avec précision tous les rapports et toutes les différences des objets ; cette finesse qui distingue tous les progrès d’actions, de passions et de mouvements ; cette analogie qui dans la création des signes les fait naître les uns des autres, et les enchaîne comme les idées analogues se tiennent dans la pensée, ou les êtres voisins dans la nature ; cet arrangement qui, de la combinaison des mots, fait sortir avec clarté l’ordre et la combinaison des idées ; enfin cette régularité qui, comme dans un plan de législation, embrasse tout et suit partout le même principe et la même loi. Mais, d’un autre côté, ce sont les poètes qui donnent aux langues l’éclat, le mouvement et la vie ; ce sont eux qui, étudiant la marche passionnée des idées, apprennent aux signes des idées à se passionner de même. Les poètes parcourent dans la nature tout ce qui donne des impressions ou agréables, ou fortes, et transportent ensuite ces beautés ou ces impressions dans le langage ; ils attachent par une sensation un corps à chaque idée, donnent aux signes immobiles et lents la légèreté, la vitesse ; aux signes abstraits et sans couleur, l’éclat des images ; aux êtres qui ne sont vus et sentis que par la pensée, des rapports avec tous les sens. Ainsi ce serait aux philosophes à construire l’édifice des langues, à en jeter les fondements, à en fixer les proportions et la hauteur, comme les poètes en sont, pour ainsi dire, les décorateurs et les peintres. C’est ce concours des poètes et des philosophes qui donna à la langue des Grecs sa perfection et sa beauté.
Sans doute, il sait se déguiser de toutes les ambitions et il lui arrive de représenter le poète ou le critique comme un cabotin, aux lumières, est le roi ou l’honnête conseiller. […] Les innombrables critiques qui saluèrent en Mendès un poète firent, presque tous, une cour intéressée à cette puissance des bureaux de rédaction. […] [Henri de Régnier] Henri de Régnier essaya d’être un poète noble et réussit à être un versificateur facile et symétrique. […] Mais tout à coup éclate ce couac anachronique : « Il a dû naguère, à Guernesey, s’amuser beaucoup des journaux religieux, qui annonçaient, avec une douce charité chrétienne, que, frappé par Dieu dans son orgueil, Victor Hugo venait d’être atteint de folie. » Et Claretie nous raconte encore, en plein 1902 : « On entourait le poète qui, souriant devant cette mort, qui n’est heureusement pas près de le toucher, disait parfois avec sa gaîté robuste : — Il est peut-être temps de désencombrer mon siècle. » Que contiennent ces vieux articles mal repeints que Claretie et Fasquelle nous vendent honnêtement pour du neuf ?
Il suffisoit au ministre, pour exciter les talens, d’encourager ce grand poëte & de faire tomber sur lui les graces. […] Il eut la politique de mettre ce poëte au nombre des cinq qu’il faisoit travailler à des drames sur ses idées & sur ses plans, distribuant à chacun un acte, & finissant, par ce moyen, une pièce en moins d’un mois. […] Il accepta celle de Scudéri, de cet écrivain le fléau de la raison, du goût & de ses lecteurs, de cet odieux & boursoufflé chantre d’Alaric ou de Rome sauvée, de ce poëte si fécond & si stérile, ridiculisé par Despréaux & tant d’autres. […] Ce poëte au-dessus de la critique, comme au-dessus de son siècle & de ses rivaux, donna son consentement.
C’étoit la coûtume, suivant Donat, que celui qui avoit composé la déclamation d’une piece mit son nom à la tête avec le nom du poëte qui l’avoit écrite, et le nom du principal acteur qui l’avoit jouée. […] Sur tout la déclamation des cantiques ou monologues qui s’executoit d’une façon très-singuliere, et que nous expliquerons, n’étoit jamais mise en musique par le poëte, mais par des hommes consommez dans la science des arts musicaux, et qui faisoient leur profession de faire representer les pieces dramatiques composées par d’autres. […] Racine aussi grand declamateur que grand poëte, lui avoit appris à baisser la voix en prononçant les vers suivants, et cela encore plus que le sens ne semble le demander. […] Mais l’art des représentations théatrales où nos jeunes gens avoient pris un grand goût se perfectionna avant peu : d’abord on récitoit des vers faits sur le champ, mais bien-tôt on apprit, continuë Tite-Live, à faire des pieces suivies, et du temps du poëte Andronicus la récitation de quelques-unes de ces pieces se trouvoit déja être mesurée, et l’on en écrivoit déja la note pour la commodité des joüeurs de flutes.
Au contraire le poète, qui meurt d’amour ou de jalousie, revient à la vie dès que sa passion, reflétée dans le miroir de sa conscience, s’est objectivée en ses strophes. […] Chez les poètes, chez les artistes de tous ordres, que possède à quelque degré le Génie de la Connaissance, il existe une tendance à faire de leurs émotions des spectacles, et, cette transformation de leur activité les dispense parfois de la satisfaire, d’une façon durable, sous sa première incarnation. C’est dans ce sens qu’il faut entendre la remarque de Nietzsche, « les poètes savent toujours se consoler »19.
Dans le tableau précédent, par exemple, on peut soupçonner que la scène, au lieu de se passer en action entre Ulysse et Pénélope, eût été racontée par le poète. […] L’art d’écrire semble avoir suivi l’art de la peinture : la palette du poète moderne se couvre d’une variété infinie de teintes et de nuances ; le poète antique compose ses tableaux avec les trois couleurs de Polygnote.
Il y avait des poètes ; il y avait plusieurs grands poètes, et d’autres. […] Le poète recourt alors aux mystiques espérances. […] Survient un grand poète. […] Il n’avait pas deviné cette frénésie à laquelle s’abandonne la poétesse. […] Il traite, en poète raffiné, un sujet littéraire.
Il eut un jour maille à partir avec Santeul, autre poète de tempérament, qui accompagnait le prince de Condé aux États de Bourgogne : ils se prirent de bec et ne se réconcilièrent qu’en buvant. […] Ces crâneries de poètes nous sont connues : quand ce ne sont pas des gasconnades à la Lormian, ce sont des entêtements à la Lemierre. […] Et contre Des Fontaines d’abord, sa bête noire : — c’est l’éternelle guerre du poëte contre son critique. Piron avait eu à se louer de lui, on l’a vu, à l’occasion de la Métromanie ; ils n’étaient pas ensemble en très-mauvais termes, et Des Fontaines n’abusait pas trop du permis de chasse que le poète lui avait donné. […] Rousseau à Racine fils, où le poète exilé se félicitait d’avoir Piron en visite à Bruxelles : « Je possède ici, depuis quelques jours, un de mes compatriotes au Parnasse, M.
Paul Bourget, je distingue un jeune poète de talent, M. […] [Nos poètes (1888).]
. ; poète) [Bibliographie] Au seuil du Paradis (1895). […] [L’Année des poètes (1895).]
Notre poète est uniquement féru d’une poétesse de la Basse-Bretagne, Mériadec Kersic, avec qui il correspond en vers dans le Mercure. […] Le poète n’est presque jamais avare ou cupide. […] Cette comédienne a été mise au monde pour ce poète. […] Voici, je pense, comment l’œuvre a dû se construire dans l’esprit du poète. […] Il est même le seul de nos poètes qui soit de Paris à ce point.
Charles Fuster C’est toute la vie d’une âme, d’une âme de poète assoiffée d’idéal, débordant de tendresse ; — ce sont ses aspirations, ses rêves, ses douleurs. [L’Année des poètes (1896).]
Vers elle monte le pur encens de l’a poétesse et son appel éploré, en strophes légères, harmonieuses, vêtues de nuages, auréolées d’azur. [L’Année des poètes (1894).]
Elle révèle à la fois un érudit, un puriste et un poète mystique sans affectation. [L’Année des poètes (1897).]
» Puis le poëte se plaint de l’amertume des temps et interjette un modeste appel à la postérité ! […] Et le Dante, qu’était-il donc, sinon un poëte armé qui combattait pour une cause nationale ? […] En tête, le poëte, celui que Dieu a baisé au front, l’élu ! […] Un jour, dans quelque cent ans d’ici, un poëte sera peut-être appelé à gouverner un grand État. […] « Le poëte a charge d’âmes !
Auguste Lacaussade Il publia un volume de vers, les Ailes du rêve, où, dans une forme qui témoigne de l’étude approfondie de tous les poètes contemporains, se rencontrent de nombreuses pièces pleines de grâce et de charme. [Anthologie des poètes français du xixe siècle (1887-1888).]
Il n’y a point d’aussi grand poëte qui ait eu l’imagination aussi étroite ; il ne peut pas se métamorphoser en autrui. […] Seul le poëte subsiste, exprimé dans son personnage. […] Si Goëthe a été le poëte de l’univers, Byron a été le poëte de la personne, et si le génie allemand dans l’un a trouvé son interprète, le génie anglais dans l’autre a trouvé le sien. […] C’est ici que le diabolique poëte enfonce sa griffe la plus aiguë, et c’est dans nos faibles qu’il a soin de l’enfoncer. […] Byron s’épuisait, du moins le poëte s’épuisait en lui.
Mme Emma di Rienzi est un poète de l’Amour. […] [L’Année des poètes (1895).]
Un vrai poète, celui-là, d’inspiration franche et naturelle ! [L’Année des poètes (1893).]
Alphonse Lemerre Fils d’un pasteur vaudois, Frédéric Monneron est mort à l’âge de vingt-quatre ans, laissant des vers qui « ne sont que des fragments inachevés et comme des souffles épars de son âme », mais qui cependant dénotent qu’il y avait en lui le germe d’un vrai poète. [Anthologie des poètes français du xixe siècle (1887-1888).]
Quand septembre apparu délivrait de la ville Le grave Parlement assis depuis dix mois, Bâville se peuplait des hôtes de son choix, Et, pour mieux animer son illustre retraite, Lamoignon conviait et savant et poëte. […] J’aime ces questions, cette vue inquiète, Audace du critique et presque du poëte. […] Tout poëte aujourd’hui vise au parlementaire ; Après qu’il a chanté, nul ne saura se taire : Il parlera sur tout, sur vingt sujets au choix ; Son gosier le chatouille et veut lancer sa voix.
Auguste Lacaussade Comme poète, M. […] De ce nombre, il convient de citer les Cuirassiers de Reischoffen et le Maître d’école, ce dernier ouvrage surtout, dont un autre poète a dit qu’il était « le plus beau cri de douleur qu’ait poussé la patrie française pendant son martyre de 1870 ». […] [Anthologie des poètes français du xixe siècle (1887-1888).]
Lemercier, c’est de représenter le poète comique conduisant une intrigue réelle, faisant agir des personnages et les peignant à mesure qu’ils agissent. […] [Les Poètes français, publiés par Eug. […] Philarète Chasles Népomucène Lemercier, le probe et vigoureux poète.
Il est impossible, dit on, de composer de meilleurs vers à moins que d’être poëte. […] Plus méprisé à mesure qu’il est plus connu, son nom dévient enfin l’appellation dont le public se sert pour désigner un méchant poëte. […] De même un jeune poëte ne profite de la lecture de Virgile et d’Horace qu’à proportion des lumieres de son génie, à la clarté desquelles il étudie les anciens, pour ainsi dire.
Livius Andronicus, poëte célebre et qui vivoit à Rome environ cinq cens quatorze ans après sa fondation, et environ six vingt ans après qu’on y eut ouvert les théatres, joüoit lui-même dans une de ses pieces. […] Il dit, en parlant de ce poëte. […] Les comédiens, dit-il, en parlant des pieces de Térence, prononçoient eux-mêmes les dialogues, mais les cantiques étoient mis en modulation non point par le poëte, mais par un habile musicien.
Charles Fuster Rimes franches, voilà un des meilleurs recueils récents, un de ceux où nous trouvons, largement répandue, cette qualité essentielle du poète, cette qualité qui semble en train de se perdre : le lyrisme. […] [L’Année des poètes (1896).]
Charles Morice Le très jeune homme qui a fait ces vers (Les Trêves) est un poète, et je saine avec joie cette allégorie ancienne de l’art comparé à un temple, qui resterait une « allégorie ancienne » si elle n’avait été inspirée au poète par le pressentiment de la grande réalité religieuse et moderne de la beauté en soi.