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662. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat (suite.). Guerre des Barbets. — Horreurs. — Iniquités. — Impuissance. »

« Il faut, disaient encore les auteurs de cette lettre éloquemment résignée et presque aussi apostolique que politique, il faut subir les lois de la Providence divine qui, par les révolutions, met la foi de ses enfants à l’épreuve pour leur détacher les cœurs de ce monde, afin de chercher avec d’autant plus d’ardeur la patrie et cité permanente du Ciel. Il est vrai que le bras de Dieu, qui vous a soutenus dans les guerres passées, n’est pas encore raccourci ; mais si vous faites réflexion qu’un puissant roi s’est joint aux forces de votre prince, que les provisions, les officiers et l’union vous manquent, et que même vos obstinations vous feront abandonner de tous les princes et des États protestants…, vous ne pouvez pas espérer que la Providence divine, qui n’agit pas miraculeusement comme autrefois parmi les Israélites, veuille faire de vos ennemis ce qu’elle fit de Sennacherib ; et la parole de Dieu vous apprend que de se jeter dans les dangers sans prévoir humainement aucun moyen d’en sortir, c’est tenter Dieu qui laisse périr ceux qui aiment témérairement le danger… » On peut se figurer l’effet que dut produire la lecture d’une telle épître sur un auditoire mêlé de personnes timides, de vieillards, de femmes et d’enfants.

663. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre III. Les tempéraments et les idées — Chapitre III. Montesquieu »

En effet, elle faisait faire un grand pas à l’explication rationnelle des faits historiques ; elle écartait les hypothèses de législateurs fabuleux ou d’une Providence divine, et commençait à faire apparaître, dans le chaos des institutions humaines et la confusion des mouvements sociaux, le net déterminisme des sciences naturelles. […] Montesquieu est un esprit absolument fermé au sens du divin.

664. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Jules de Glouvet »

Et nous avons enfin entièrement connu à quel point la terre est belle, douce, mystérieuse, maternelle et divine. […] Et c’est aussi une idée grande et belle d’avoir fait de l’innocent un juge et un justicier, d’avoir fait briller dans ce cerveau trouble une seule lumière, la conscience, qui apparaît alors comme quelque chose de primordial, d’inexpliqué, de divin.

665. (1894) Propos de littérature « Chapitre II » pp. 23-49

Pour arriver à mieux, il renie la maternelle nature : le peintre agence des lignes qui n’obéissent plus à la divine concordance ; le littérateur écrit « la Justice » et paraît oublier que le vers est rythme et image. […] La parabole du grain de sénevé est un symbole dans l’Évangile ; mais, telle que le catéchisme nous l’enseigne, à savoir : « le grain de la pensée divine germera dans le cœur des hommes et l’on en verra grandir l’arbre immense de l’Église universelle dont les rameaux couvriront toute la terre », — elle devient une allégorie.

666. (1887) Discours et conférences « Réponse au discours de M. Louis Pasteur »

Cette base commune de toutes les œuvres belles et vraies, cette flamme divine, ce souffle indéfinissable qui inspire la science, la littérature et l’art, nous l’avons trouvé en vous, Monsieur ; c’est le génie. […] L’œuvre divine s’accomplit par la tendance intime au bien et au vrai qui est dans l’univers ; je ne sais pas bien si je suis spiritualiste ou matérialiste.

667. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Madame de La Tour-Franqueville et Jean-Jacques Rousseau. » pp. 63-84

On se sent humilié pour ce qu’on appelle talent humain ou génie, de penser que c’est à partir de ce temps que Rousseau a écrit quelques-unes de ses plus divines pages, les premiers livres des Confessions, la cinquième promenade des Rêveries. […] Son amour était celui de l’idéale beauté, du fantôme auquel lui-même prêtait, vie et flamme : c’était ce fantôme seul, tiré de son sein, et formé d’un ardent nuage, qu’il aimait, qu’il embrassait sans cesse, à qui il donnait chaque matin ses baisers de feu, sur qui il plaçait, en les rassemblant, ses rares souvenirs de bonheur ; et quand il se présenta une femme réelle qui eut l’orgueil de lui montrer l’objet terrestre de son idéal et de lui dire : Je suis Julie, il ne daigna point la reconnaître ; il lui en voulut presque d’avoir espéré se substituer à l’objet du divin songe.

668. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Mlle de Lespinasse. » pp. 121-142

mon ami, c’est moi ; et ce malheur, c’est vous qui le causez, et cette âme de feu et de douleur est de votre création… Et à travers ces déchirements et ces plaintes, un mot charmant, le mot éternel et divin, revient à bien des endroits, et il rachète tout. […] le divin temps qu’il faisait !

669. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Montesquieu. — I. » pp. 41-62

Un trait d’Homère, un vers de Virgile, fondus rapidement dans sa pensée, lui paraissaient la mieux achever et la consacrer sous forme divine. […] Il avait un divin exemplaire en lui : il a élevé un temple, la foule y a couru.

670. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre quatrième. L’expression de la vie individuelle et sociale dans l’art. »

Dans la précision des assemblages, la rareté des éléments, le poli de la surface, l’harmonie de l’ensemble, n’y a-t-il pas une vertu intrinsèque, une espèce de force divine, quelque chose d’éternel comme un principe ? […] Point de broderies ni d’ornements : un péplum jeté sur le corps de la déesse ; mais ce vêtement forme des plis infinis, dont chacun a une grâce qui lui est propre et qui pourtant se confond avec la grâce même des membres divins.

671. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — Analyse esthétique »

L’Hamlet, la Divine Comédie, la symphonie en ut dièse mineur, une cathédrale gothique, le Bon Samaritain de Rembrandt, sont des œuvres excitantes à un haut degré parce qu’elles sont tristes, et dénuées cependant de tristesse, parce qu’elles n’ont de la douleur que le choc et non la blessure. […] L’application de ce principe à la musique, par exemple, ou à un poème comme la Divine Comédie serait malaisée.

672. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre II : La littérature — Chapitre II : La littérature du xviie  siècle »

Ce n’est pas qu’il faille dédaigner l’Art poétique de Boileau ; les conditions saines et solides de toute poésie y sont vivement exprimées ; mais j’ai besoin, après l’avoir lu, et pour ne pas oublier que la poésie est chose divine et légère, de relire la Lettre à l’Académie française de Fénelon. […] Ne saisissant pas l’origine historique et tout humaine du spectacle qu’il avait devant les yeux, Bossuet n’en vit que la beauté idéale, et crut y reconnaître une œuvre divine.

673. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Saint-Simon »

VIII C’est, en effet, un olifant qui sonne la fin de la monarchie, — de cette monarchie qui a duré plus qu’aucune monarchie du monde, parce qu’elle était fondée sur le principe divin de la paternité et de la famille, et qui allait mourir par les bâtardises ; car toutes les bâtardises s’appellent comme l’abîme appelle l’abîme. […] C’était impie, — un crime de lèse-nation, de lèse-principe, de lèse-divinité, c’est-à-dire de lèse-paternité divine au premier chef !

674. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Bossuet. Œuvres complètes publiées d’après les imprimés et les manuscrits originaux, par M. Lachat. (suite et fin) »

Les glorieuses bassesses du christianisme, tel est son sujet ; il est, en parlant ainsi, dans le plus vrai sens et dans le plus vif du christianisme ; il nous en dit le secret, il nous en fait toucher du doigt la clef de voûte au moral, au sens divin.

675. (1874) Premiers lundis. Tome I « A. de Lamartine : Réception à l’Académie Française »

Il y a six ans, M. de Lamartine était ce qu’il est aujourd’hui : il avait publié ses admirables Méditations et son Dernier chant de Child-Harold ; l’impression de cette divine poésie était toute fraîche et vive dans les âmes.

676. (1823) Racine et Shakspeare « Chapitre III. Ce que c’est que le Romanticisme » pp. 44-54

Le poète romantique par excellence, c’est Le Dante ; il adorait Virgile, et cependant il a fait la Divine Comédie, et l’épisode d’Ugolin, la chose au monde qui ressemble le moins à l’Énéide, c’est qu’il comprit que de son temps on avait peur de l’enfer.

677. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre III. Buffon »

Il écarte le miracle, l’intervention divine, il affirme le déterminisme des phénomènes : cela, paisiblement, sans tapage, sans violence.

678. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « George Sand. »

Sans aucun doute, elle nous a appris à l’aimer avec une tendresse plus abandonnée, la Nature bienfaisante et divine qui apporte à ses fidèles l’apaisement, la sérénité et la bonté.

679. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Guy de Maupassant »

Et, à mesure que son coeur s’amollit et que s’y ouvre la divine fontaine des larmes, il apprend aussi la pudeur.

680. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Mallarmé, Stéphane (1842-1898) »

Il conçut le poème une musique, non l’inarticulé balbutiement dont chaque flot sonore meurt perpétuellement au seuil de l’inexprimé, mais la vraie, l’idéale musique abstraite, dégageant le rythme épars des choses, douant d’authenticité, par la création divine du langage, notre séjour au sein des apparences fugaces.

681. (1890) L’avenir de la science « XX »

Or ces facultés sont de très peu de valeur : elles ne rendent ni meilleur, ni plus élevé, ni plus clairvoyant dans les choses divines ; tout au contraire.

682. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XII. Ambassade de Jean prisonnier vers Jésus  Mort de Jean  Rapports de son école avec celle de Jésus. »

En voyant cependant son école se continuer assez longtemps encore parallèlement aux églises chrétiennes, on est porté à croire que, malgré sa considération pour Jésus, Jean ne l’envisagea pas comme devant réaliser les promesses divines.

683. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Milton, et Saumaise. » pp. 253-264

Les Anglois lui donnent le surnom de divin, & c’est principalement à cause de son Paradis perdu.

684. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Seconde Partie. De l’Éloquence. — Éloquence du barreau. » pp. 193-204

En défendant aux avocats de faire le fond de leurs études de tant de livres inutiles à leur profession, ils les bornèrent à l’étude des loix naturelle, divine & humaine ; loix anciennes & nouvelles ; loix païennes & chrétiennes ; loix étrangères & loix du royaume.

685. (1867) Le cerveau et la pensée « Avant-propos »

» Dans le plus beau peut-être de ses dialogues, Platon, après avoir mis dans la bouche de Socrate une admirable démonstration de l’âme et de la vie future, fait parler un adversaire qui demande à Socrate si l’âme ne serait pas semblable à l’harmonie d’une lyre, plus belle, plus grande, plus divine que la lyre elle-même, et qui cependant n’est rien en dehors de la lyre, se brise et s’évanouit avec elle.

686. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 33, de la poësie du stile dans laquelle les mots sont regardez en tant que les signes de nos idées, que c’est la poësie du stile qui fait la destinée des poëmes » pp. 275-287

C’est pour inventer des images qui peignent bien ce que le poëte veut dire, c’est pour trouver les expressions propres à leur donner l’être, qu’il a besoin d’un feu divin, et non pas pour rimer.

687. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIe entretien. Biographie de Voltaire »

Il les flattait dans leurs systèmes et dans leurs vices d’esprit pour les captiver dans son parti philosophique ; il avait le respect humain de sa haute raison avec les correspondants athées ; il leur livrait l’immortalité de l’âme et la providence divine pour les enrôler par cette tactique détestable dans une coalition commune contre les superstitions humaines. […] Son règne est annoncé par la voix des oracles, Son trône est cimenté par le sang des martyrs ; Tous les pas de ses saints sont autant de miracles, Il leur promet des biens plus grands que leurs désirs ; Ses exemples sont saints, sa morale est divine ; Il console en secret les cœurs qu’il illumine ; Dans les plus grands malheurs il leur offre un appui, Et si sur l’imposture il fonde sa doctrine C’est un bonheur encor d’être trompé par lui ! […] Non, le Dieu qui m’a fait ne m’a point fait en vain ; Sur le cœur des mortels il mit son sceau divin, Il m’a donné sa loi puisqu’il m’a donné l’être.

688. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre III. Pascal »

Par l’une, il soumettait à Dieu la vie intérieure de l’individu, par l’autre, la conduite universelle du monde ; par l’une et l’autre, il faisait échec à la raison et la courbait sous une force divine, impénétrable et irrésistible. […] Jansénius tira de saint Augustin une doctrine rigoureuse, assez approchante du calvinisme : tandis que l’orthodoxie romaine admettait une coopération mystérieuse de la liberté humaine à la grâce divine dans l’œuvre du salut332, Jansénius333 supprimait le libre arbitre pour donner tout à la grâce, et enseignait la prédestination, qui sépare les élus et les damnés de toute éternité par un décret absolu et irrévocable de Dieu. […] Si donc on traite la religion comme un fait, les miracles, les évangiles comme des faits, la raison, critiquant ces réalités sensibles, pourra y faire apparaître avec évidence un élément surnaturel et surhumain : l’action divine, insaisissable en elle-même, sera atteinte dans ses manifestations historiques.

689. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Hugo, Victor (1802-1885) »

On se taisait, le livre sous les draps ; et quand, effrayés encore, nous reprenions la page interrompue, c’était divin ce mystère et ce tremblement. […] Phidias, le Ministre de France en Grèce transmet à Victor Hugo le salut fraternel des poètes et des sculpteurs divins de l’Acropole. […] Or maintenant, au fond du Palais ineffable, Qui pour tapis a les espaces constellés, Innombrables autour de la Divine Table Les Poètes des temps futurs sont assemblés.

690. (1878) La poésie scientifique au XIXe siècle. Revue des deux mondes pp. 511-537

Mais croyez-vous donc que ces vieux poètes eux-mêmes, que Virgile ou l’Aveugle divin, s’ils renaissaient aujourd’hui, négligeraient d’étendre la main, leur savante main, sur ces trésors ? […] Chaque découverte est comme une révélation inattendue de l’unité, poursuivie à travers la variété et même la contradiction apparente des phénomènes ; les lois nous paraissent être les éléments indestructibles de la trame divine des choses. […] Car l’ordre nécessaire, ou le plaisir divin, Fait d’un même sépulcre un même réfectoire À d’innombrables corps, sans relâche et sans fin.

691. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « H. Forneron » pp. 149-199

L’esprit divin n’y a point passé. Et cette histoire du xvie  siècle relève absolument de l’esprit divin. — Je me soucie bien qu’on m’appelle mystique ! […] Mais Forneron n’a pas assez dégagé la Cause des hommes qui l’ont souillée ou trahie ; il n’a rien entendu à la grandeur divine de la Cause.

692. (1898) Essai sur Goethe

Quelques-uns l’attaquèrent avec une extrême violence, en lui opposant les œuvres d’autrefois : « Ô divin Sophocle ! […] C’est là aussi ce qui peut expliquer que les hommes au cœur tendre se tournent vers la Mère de Dieu, lui vouent, à l’exemple de Sannazar, leur vie et leur talent, comme au type de la femme vertueuse et belle, et n’aient fait que jouer en passant avec l’Enfant divin. […] et nous voyons bientôt qu’il est un homme, soumis à toutes les faiblesses des hommes : son « olympisme » n’ennoblit pas sa nature, et ne peut faire illusion qu’à lui-même sur la part de divin qu’elle renferme. […] Il dépassait les proportions humaines ; ou plutôt, les siennes étaient si parfaites qu’elles le rapprochaient du divin, sans qu’il perdît cependant sa qualité d’homme. […] Ô divin Sophocle !

693. (1884) Les problèmes de l’esthétique contemporaine pp. -257

Dissipez-la, vous ferez peut-être fuir ses rêves, et parmi eux ce rêve divin, la beauté ; peut-être n’y a-t-il de poésie que dans ce qu’on soupçonne sans le voir. […] Pour ne prendre qu’un exemple, combien la science de nos jours, en analysant les métaux en fusion dans les étoiles, n’a-t-elle pas flétri ces « fleurs des cieux » où les anciens voyaient des êtres divins et immortels ! […] Cette idée de l’infini, identique à celle du divin, vaut bien le merveilleux classique et les décors fripés de l’Olympe. […] Le sentiment du divin, lui aussi, a subi des changements si considérables qu’il est inutile d’insister à cet égard : quelle évolution depuis Homère jusqu’au christianisme ! […] M. de Banville sur ce point se montre moins logique que ce maître : selon lui, l’art de trouver la rime est un don surnaturel, divin (les athées, par parenthèse, en seraient exclus).

694. (1853) Portraits littéraires. Tome II (3e éd.) pp. 59-300

Pour peu qu’on ait le goût des analogies, il est facile de surprendre un air de famille entre les parties graves du dialogue et les tercets de la Divine Comédie. […] Hormis l’Intelligence divine, nulle intelligence ne peut savoir et enseigner qu’à la condition d’ignorer et de taire les vérités qui n’appartiennent pas directement au sujet de l’étude et de la leçon. […] Ils ont cru que le génie tout entier se réduit à l’apothéose du caprice, et ils se sont glorifiés dans leur ignorance, comme s’ils eussent aperçu, en fermant les yeux, une lumière divine. […] Se mêler au mouvement réel des affaires serait profaner la majesté divine de sa pensée ; mais il se tient prêt à distribuer ses conseils. […] Ne lui parlez pas de la gloire qui a couronné ses premiers poèmes ; ne lui parlez pas du plaisir de régner par la seule puissance de l’imagination ; du haut des régions divines qu’il habite, il ne vous entendrait pas.

695. (1856) Articles du Figaro (1855-1856) pp. 2-6

Murger, moins ambitieux, ne remontait pas au-delà d’Homère ; mais il démontrait péremptoirement aux bohèmes de lettres contemporains qu’ils étaient les héritiers naturels du divin Mélésigène. — Chose singulière ! […] Weill, parodiant un vers d’Horace, d’affirmer qu’on naît et qu’on ne devient pas homme de lettres, et il part de là pour entonner un dithyrambe en l’honneur de « ce forçat divin, presque toujours martyr de la société humaine ». […] La vérité divine se mettait à pleuvoir sur la tête du public, et le parterre était littéralement submergé sous une avalanche de Cris d’angoisse, de Cris d’épouvante et de Cris de détresse. — Voilà un apôtre, celui-là ! […] Mademoiselle Judith a la suavité de contours et la pureté linéaire d’un chef-d’œuvre de l’art grec. — Mais il lui manque cette expression de divin contentement et d’auguste sérénité qui rayonne dans les créations du ciseau païen. […] C’est la mélancolie qui doit se dégager d’une saine et forte lecture ; j’entends cette mélancolie robuste, qui n’a rien de commun avec l’énervement de l’esprit. — Voyez plutôt la belle pécheresse du désert, la Liseuse du divin Allegri.

696. (1772) Discours sur le progrès des lettres en France pp. 2-190

Depuis ce Poëte divin, quelle foule de grands hommes la Grèce n’a-t-elle pas produits ? […] Disons plus, ces deux langues ont été conservées de préférence à celles de tant d’autres peuples contemporains, parce que la Providence, en permettant qu’elles servissent de barrière contre l’ignorance, les avoit destinées en même temps à transmettre les oracles des divines Ecritures, & à devenir l’une & l’autre par ce moyen, la langue universelle de toutes les Nations éclairées par la lumière de l’Evangile(*). […] Un jargon barbare succéda à la langue divine des Homère & des Virgile, des Démosthène & des Cicéron. […] Ce spectacle aussi intéressant que sublime, qui frappoit sans cesse leurs sens, élevoit leur esprit jusqu’à leur divin Auteur, & leurs premiers ouvrages n’ont été que des Cantiques de reconnoissance à sa gloire. […] N’avons-nous pas vu la majesté de la Scène Lyrique souillée par de pitoyables Bouffons, dignes à peine des tréteaux d’Italie, tandis que l’Orphée de nos jours faisoit retentir le temple de l’harmonie de ses divins concerts.

697. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre premier. Aperçu descriptif. — Histoire de la question »

Mal préparé, par son caractère et ses études, aux recherches psychologiques, de Bonald a pourtant observé sur lui-même l’existence de la parole intérieure, et il l’a décrite avec des détails nouveaux, mais en des termes dont l’excessive précision nuit parfois à la parfaite exactitude ; puis, après cette description sommaire, il s’est hâté d’employer sa découverte, d’une part à une sorte de restauration de la maïeutique de Socrate et de la réminiscence de Platon, d’autre part à la déduction du célèbre paradoxe de l’institution divine de la parole. […] Egger parle de « sonnet bouddhiste » et d’aspiration au « nirvana » : voir en effet le premier quatrain (« Dans la sphère du nombre et de la différence,/ Enchaînés à la vie, il faut que nous montions,/Par l’échelle sans fin des transmigrations, / Tous les degrés de l’être et de l’intelligence »), puis les deux tercets qui commencent par le vers cité (« Le silence, l’oubli, le néant qui délivre,/ Voilà ce qu’il me faut ; je voudrais m’affranchir /Du mouvement, du lieu, du temps, du devenir ; // Je suis las, rien ne vaut la fatigue de vivre, / Et pas un paradis n’a de bonheur pareil, / Nuit calme, nuit bénie, à ton divin sommeil »). […] Puisqu’elle est mystérieuse, sans doute elle est divine ; mais l’entendement divin voit-il entre les mots et les idées des ressemblances qui échappent à nos esprits imparfaits ? ou bien chaque mot est-il associé à une idée par un acte arbitraire de la volonté divine 48.

698. (1920) Action, n° 2, mars 1920

La grâce, quel mot divin en tous sens : dans la grâce, il y a le don et la volupté du don. […] Au plus haut de la courbe, ce mot divin est le mot du sacrifice ravissant qui sourit : c’est la croix du sourire. […] Un esprit divin confère la divinité à tout ce qu’il pense. […] Le divin poète fait bien tout ce qu’il fait et il le sait. […] Max, tu es voué, hélas, au passage perpétuel des écoles rigides, parce que tu es trop voisin, tu es un gardien trop fidèle de la mobilité infinie des empreintes divines.

699. (1929) Les livres du Temps. Deuxième série pp. 2-509

La scène où Michel-Ange apprend la mort de Raphaël et pleure cet enfant divin atteint au sublime. […] Comme les vieux gnostiques, ils associaient les femmes à la célébration des offices divins. […] Avec un amour désespéré, ce maudit, toujours marqué pour le service divin, ramassait les épis dédaignés ». […] L’amour divin, c’était pour lui la haine de la nature. […] Beata, c’est l’idéaliste, l’élue, qui sait découvrir sous les apparences transitoires l’essence éternelle et divine.

700. (1866) Nouveaux essais de critique et d’histoire (2e éd.)

Lorsque Racine écrivit le rôle divin de Monime, il ne trouva point une émotion plus contenue, plus délicate et plus profonde. […] Il y reçoit sa première éducation, il y jouit des embrassements de ses parents divins. […] Ainsi étendue, elle atteignit l’universel et demanda au monde divin le bien suprême que lui refusait le monde terrestre. […] On voit des qualités, des attributs divins, même des attributs d’attributs devenir des dieux. Le breuvage qu’on offre aux dieux, la prière, l’hymne, toutes les parties du culte finissent elles-mêmes par se transformer en forces divines, en êtres divins qu’on invoque et qu’on révère.

701. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre sixième »

Nulle heure de beau temps ses orages n’essuie, Et sa grâce divine endure en ce tourment Ce qu’endure une fleur que la bise ou la pluie Bat excessivement. […] Ô vraiment divine aventure Que ton respect fasse marcher Les astres contre leur nature87 ! […] Par un secret de l’art, d’une grande déesse J’oppose les attraits à ceux de ma comtesse, Et des charmes divins, dans l’opposition, Je fais voir la confusion. […] Ce jour-là il n’y eut plus d’un côté des penseurs, et de l’autre des poètes : le poète fut le plus divin des penseurs. […] Sentiez-vous, dites-moi, ces violents transports Qui d’un esprit divin font mouvoir les ressorts ?

702. (1868) Curiosités esthétiques « V. Salon de 1859 » pp. 245-358

Dans ces jours déplorables, une industrie nouvelle se produisit, qui ne contribua pas peu à confirmer la sottise dans sa foi et à ruiner ce qui pouvait rester de divin dans l’esprit français. […] Quelque écrivain démocrate a dû voir là le moyen, à bon marché, de répandre dans le peuple le goût de l’histoire et de la peinture, commettant ainsi un double sacrilège et insultant à la fois la divine peinture et l’art sublime du comédien. […] Cependant, pour revenir à ce que je disais tout à l’heure relativement à cette permission de suppléer que doit l’imagination à son origine divine, je veux vous citer un exemple, un tout petit exemple, dont vous ne ferez pas mépris, je l’espère. […] Apollon et les Muses, fantômes impérieux, dont les formes divines éclatent dans la pénombre, surveillent vos pensées, assistent à vos travaux, et vous encouragent au sublime. […] Tel est le rôle divin de la sculpture.

703. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet (suite.) »

L’ange Gabriel ne nous eût pas fait plus de plaisir avec ses formes divines que cette espèce de Sangrado quand il nous apparut. […] Qu’est-ce que de la peinture et les grands maîtres, lorsqu’on traite directement avec la nature, et une nature toute divine, toute poétique !

704. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Madame de Krüdner et ce qu’en aurait dit Saint-Évremond. Vie de madame de Krüdner, par M. Charles Eynard »

Elle n’a pas alors moins de trente-sept ans ; elle les déguise avec art sous une grâce divine que les femmes mêmes sont forcées d’admirer ; mais elle sent que le moment est venu d’appeler à son aide les succès de l’esprit et de prolonger la jeunesse par la renommée. […] Plus la terre s’enfuit sous nos pas, plus je méprise, plus je hais ce que les hommes ambitionnent, et plus j’ai de pouvoir sur leur cœur. » La voilà telle qu’elle était dès l’origine : régner sur les cœurs, en se déclarant une misérable créature ; voir à sa porte servantes et duchesses, comme elle dit, et empereur ; se croire en toute humilité l’organe divin, l’instrument choisi, à la fois vil et préféré, que lui faut-il de plus ?

705. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Octave Feuillet »

Il enseigne à Jeanne, comme un simple Bellac, « le sens divin des choses ». […] Celui qui ne se croit pas obligé par un pouvoir extérieur et divin peut fort bien se sentir obligé par lui-même, par une irréductible noblesse de nature, par une générosité instinctive.

706. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre premier »

L’esprit français s’attachant ainsi à l’esprit ancien, c’est Dante conduit par Virgile, son doux maître, dans les cercles mystérieux de la Divine Comédie. […] Pareils à ces Juifs dont parle Pascal, qui gardaient d’autant plus fidèlement le dépôt des divines promesses, qu’ils en comprenaient moins le sens, les catholiques, du fond de leur ignorance, avaient défendu la tradition sans la comprendre, par les vaines arguties de la scolastique et par la violence.

707. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVIII. Formule générale et tableau d’une époque » pp. 463-482

Cependant sous cette immobilité voulue, sous ce règne paisible de l’ordre et de la discipline, contre lesquels Molière et La Fontaine sont à peu près les seuls à regimber parfois, le mouvement de la vie continue quand même ; la monarchie de droit divin est à son apogée ; mais l’apogée est toujours voisin du déclin ; l’Eglise catholique, son alliée, a infligé une cruelle défaite à ses adversaires ; mais toutes deux, par l’excès même de leur tyrannie, provoquent le réveil de l’esprit de liberté ; en matière littéraire aussi, quoique le joug y soit moins lourd à porter, l’époque suivante verra déjà des essais, tout au moins des velléités d’émancipation. […] Les mots de la langue et les genres littéraires sont divisés en nobles et en roturiers, de même que l’homme est coupé en deux parties, l’une toute animale et l’autre presque divine, de même que la France est séparée en ordres et en castes.

708. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « V »

C’est une volupté quasi divine que de relire aujourd’hui les prophéties grotesques de nos vieux Nostradamus, dont plusieurs, présentement, font assaut de platitudes et de palinodies pour effacer leurs vilenies anciennes. […] Ainsi, ce n’est pas mon amitié pour Wagner que vous blâmez mais ce que vous appelez l’excès de cette amitié et mon penchant naturel à revêtir des hommes faits de boue de qualités divines.

709. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Goethe et de Bettina, traduites de l’allemand par Sébastien Albin. (2 vol. in-8º — 1843.) » pp. 330-352

Aussi cet amour ne faisait nullement son tourment à elle, mais plutôt son bonheur : « Je sais un secret, disait-elle : quand deux êtres sont réunis et que le génie divin est avec eux, c’est là le plus grand bonheur possible. » Et il lui suffisait le plus souvent que cette réunion fût en idée et en esprit. […] Le grand compositeur, sourd, misanthrope, amer pour tous, fut pour elle, dès la première visite, ouvert, confiant, abondant en bonnes et magnifiques paroles : il se mit aussitôt au piano, et joua et chanta, à son intention, ses chants les plus divins.

710. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — II. (Suite.) Janvier 1830-mars 1831. » pp. 105-127

Carrel dit quelque chose d’approchant de la seconde réalité, essentielle encore, selon lui, à toute constitution politique qui dérive de la Révolution bien comprise : ce second pouvoir, c’est une certaine aristocratie, qui tient de l’ancienne noblesse et qui se rapporte assez exactement à la classe des grands propriétaires : « Nous la transformerons en pairie, dit-il, et nous vivrons bien désormais avec elle. » Cet article, un peu enveloppé à cause du but, est d’ailleurs plein de sens et fait bon marché des doctrines abstraites ou mystiques en sens inverse, tant de celle du droit divin que de celle des disciples de Rousseau : Que si, croyant nous pousser à bout, vous nous demandez où réside enfin suivant nous la souveraineté, nous vous répondrons que ce mot n’a plus de sens ; que l’idée qu’il exprime a disparu par la Révolution comme tant de choses ; que nous ne voyons nulle utilité à la vouloir ressusciter ; que le peuple n’a plus besoin d’être souverain et se moque d’être ou non la source des pouvoirs politiques, pourvu qu’il soit représenté, qu’il vote l’impôt, qu’il ait la liberté individuelle, la presse, etc. ; enfin le pouvoir d’arrêter une administration dangereuse en lui refusant les subsides, c’est-à-dire l’existence même. […] C’est cette rapidité d’exécution, cette puissance, et pour ainsi dire cette inspiration de mouvement, qui partent de l’instinct supérieur à l’art et presque divin qu’on appelle génie.

711. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre sixième. La volonté — Chapitre premier. Existence de la volonté »

Quant à la volonté inconsciente, que M. de Hartmann charge d’exécuter les décrets de la volonté consciente, elle est aussi miraculeuse que la chiquenaude divine. […] Ce sont deux aveugles qui se portent secours et qui, à eux deux, trouvent moyen de se diriger, et même d’y voir avec une clarté infaillible. — Cette théorie fantastique est bien inférieure à l’hypothèse de l’assistance divine : au moins le dieu de Descartes n’est pas aveugle.

712. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Vien » pp. 74-89

C’est une figure de Raphaël pour la pureté qui est merveilleuse, pour la noblesse et pour le caractère de tête qui est divin. […] Quel est sur cette tête l’effet de la présence divine ?

713. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Sainte-Beuve. Les Poésies de Joseph Delorme, Les Consolations, les Pensées d’août. »

J’ai connu autrefois une femme qui disait « j’ai honte » avec un si divin accent, quand il y avait de la honte à avoir, qu’elle s’en faisait une pudeur ! […] À la désolation du Werther indécis qui agaça la languette de son pistolet, mais qui ne lira pas, à la sauvagerie hagarde du solitaire de la plaine crayeuse de Montrouge, qui, le soir Venu, s’apprivoisait sous les réverbères des faubourgs, a succédé la convenance sociale, religieuse et poétique, d’un faiseur de vers voués au blanc et qu’on peut donner sans inconvénient aux jeunes filles qui n’ont pas besoin d’être consolées… La seule convenance que je n’y trouve pas, c’est l’emploi abusif et presque insolent des images empruntées à ce que nos Évangiles ont de plus divin pour dire… quoi ?

714. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Appendice. — Post-scriptum sur Alfred de Vigny. (Se rapporte à l’article précédent, pages 398-451.) »

Les hommes ne peuvent ouvrir ce fruit divin et y chercher l’amande… » M. 

715. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. Mignet : Histoire de la Révolution française, depuis 1789 jusqu’en 1814. 3e édition. »

Lui aussi ne voit dans une révolution qu’un acte unique et fatal régulièrement accompli en plusieurs temps marqués ; seulement, au lieu d’en mesurer la durée d’après la succession naturelle des passions humaines, il la mesure d’après la succession supposée des pensées divines.

716. (1874) Premiers lundis. Tome I « Victor Hugo : Odes et ballades — I »

Lorsqu’il est las de chanter aux hommes, c’est au sein de Dieu qu’il va se reposer des fatigues et des dégoûts du message : Je vous rapporte, ô Dieu, le rameau d’espérance ; Voici le divin glaive et la céleste lance : J’ai mal atteint le but où j’étais envoyé.

717. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre IX. De l’esprit général de la littérature chez les modernes » pp. 215-227

Depuis qu’on est deux dans la vie domestique, les communications de l’esprit et l’exercice de la morale existent toujours, au moins dans un petit cercle ; les enfants sont devenus plus chers à leurs parents par la tendresse réciproque qui forme le lien conjugal ; et toutes les affections ont pris l’empreinte de cette divine alliance de l’amour et de l’amitié, de l’estime et de l’attrait, de la confiance méritée, et de la séduction involontaire.

718. (1897) La crise littéraire et le naturisme (article de La Plume) pp. 206-208

Cette ferveur mystique qui nous anime à l’égard de la divine et maternelle matière, notre religion de la vie quotidienne, des Travaux et des Jours, nous en investirons le cœur des Humbles.

719. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Vielé-Griffin, Francis (1864-1937) »

La nature, dont le vrai rôle est d’être toujours le rythme de l’art, apparaît réellement chez lui inspiratrice divine, source et mère d’émotion, en qui convergent toute chanson et tout cœur.

720. (1897) Manifeste naturiste (Le Figaro) pp. 4-5

Pour nous, épris seulement des divines muses, nous fatiguerons notre énergie à chanter les exploits des hommes et à célébrer les fêtes du travail.

721. (1765) Essais sur la peinture pour faire suite au salon de 1765 « Tout ce que j’ai compris de ma vie du clair-obscur » pp. 26-33

Réfléchissez-y un moment, et vous concevrez que le corps d’un prophète enveloppé de toute sa volumineuse draperie, et sa barbe touffue, et ces cheveux qui se hérissent sur son front, et ce linge pittoresque qui donne un caractère divin à sa tête, sont assujettis dans tous leurs points aux mêmes principes que le polyèdre.

722. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Edmond About » pp. 63-72

Agiter une badine sifflante, faire de la crème fouettée en battant son sujet avec l’extrémité d’une cravache, fût-elle sculptée par mademoiselle de Fauveau, tout cela, malgré la désinvolture de la chose, n’est point de l’ironie comme il en faudrait pour nous débarbouiller de nos dernières badauderies sur la Grèce, après un enchantement de tant de siècles, et pour nous empêcher désormais d’être émus en lisant les vers divins qui commencent le poème du Giaour.

723. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Topffer »

C’est pour cela que sa gaieté, savoureuse et probe, n’est presque jamais nuancée de tristesse, comme celle de Sterne, qui porte sous les arcades sourcilières de l’observateur les ombres dormantes des plus divines mélancolies.

724. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Hebel »

Contrairement à la coutume divine qui fait chanter presque tous les poètes comme chantèrent les Templiers, — dans les supplices, — Hebel fut constamment heureux.

725. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre VII. De la physique poétique » pp. 221-230

Admirons en tout ceci la Providence divine qui, nous ayant donné comme pour la garde de notre corps des sens, à la vérité bien inférieurs à ceux des brutes, voulut qu’à l’époque où l’homme était tombé dans un état de brutalité, il eût pour sa conservation les sens les plus actifs et les plus subtils, et qu’ensuite ces sens s’affaiblissent, lorsque viendrait l’âge de la réflexion, et que cette faculté prévoyante protégerait le corps à son tour.

726. (1894) La bataille littéraire. Septième série (1893) pp. -307

La vie était l’unique manifestation divine. […] Hérold me rappellera toujours involontairement ce vers, médiocre, il est vrai, mais qu’une divine mélodie enveloppe de son or : Rendez-moi ma patrie, ou laissez-moi mourir ! […] Ainsi s’accomplit la chute des âmes qui viennent du divin Éther. […] Si dans son amour effréné de la matière, elle perd le souvenir de son origine, l’étincelle divine qui était en elle et qui aurait pu devenir plus brillante qu’une étoile, retourne à la région éthérée, atome sans vie — et l’âme se désagrège dans le tourbillon des éléments grossiers. […] Et voilà pourquoi le jeune Platon sans avoir formulé sa doctrine, ne sachant même pas qu’il serait philosophe un jour, avait déjà conscience de la réalité divine de l’Idéal et de son omniprésence.

727. (1891) La vie littéraire. Troisième série pp. -396

Elles ont une grâce naïve, une gaucherie divine de statues qui consentent à faire les poupées, et l’on est ravi de voir ces petites idoles jouer la comédie. […] Mais c’est un poète, et par là il est divin. […] Comme sincèrement je croyais avoir surpris le plan divin ! […] Quand ils le possèdent, ils se donnent la mort, connaissant qu’il n’est qu’un trésor vraiment désirable, l’infini divin. […] Mais sommes-nous jamais sûrs de l’atteindre, cette divine vérité ?

728. (1899) Arabesques pp. 1-223

Les autres s’inspirent de l’observation, se réclament de la Révolution et considèrent que le jeu des lois naturelles suffit à déterminer l’homme et l’univers sans qu’il soit besoin d’invoquer un moteur divin pour les expliquer. […] Diderot, Voltaire, Rousseau avaient tracé la voie à nos pères avec, à son entrée, ces mots au sens divin : Justice, Liberté. […] À peine si parfois, quand la brise s’élève un peu, l’on ouït les charmes chuchoter aux chênes attentifs que le soleil divin fait bouillonner leur sève et les chênes répondre tout bas aux charmes tressaillants qu’il est doux de vivre. […] Éperdus et fendant la bleue immensité, Vous qu’enivrent les pleurs et que l’amour dévore, Allez, divins oiseaux, mes rêves, par l’aurore, Boire en pleine lumière, ivres de liberté9 ! […] On a tout essayé ; droit divin, gouvernement aristocratique, avec castes ou sans castes, gouvernement électif, etc., on n’a jamais rien obtenu de satisfaisant.

729. (1929) Critique et conférences (Œuvres posthumes III)

Les mathématiques, par exemple, tout en l’effrayant (à juste titre peut-être, souvenons-nous), comme elles sont encore enseignées, je crois, l’attiraient par leur précision divine. […] U, cycles, vibrements divins des mers virides, Paix des pâtis semés d’animaux, paix des rides Que l’alchimie imprime aux grands fronts studieux. […] La divine imagination de Shakespeare l’a généralement représentée sous une forme idéalisée et impersonnelle, telle Lady Macbeth, qui figure l’Ambition, Desdémone, l’être passif, la femme modeste, Ophélie, la jeune fille, au songe chaste : toutes sont des types — et combien différentes des femmes de Racine ! […] Mais puisque le cours de cet article me ramène logiquement au divin Racine, comme l’appelle Victor Hugo dans la hautaine préface de « Cromwell », Racine est à la fois, un grand poète et le plus éloquent des causeurs et jamais lassant : Bon Dieu non ! […] Les meilleurs écrivains de ce siècle, Chateaubriand, Hugo (dont j’ai cité le divin Racine), Sainte-Beuve, qui écrivit l’ode les larmes de Racine, nos plus récents poètes, nos revues littéraires les plus avancées (ainsi disent-elles) en fait d’esthétique, chacun parmi nous et partout chante les louanges de sa gloire.

730. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIIe entretien. Littérature politique. Machiavel » pp. 241-320

Tardo non furon mai grazie divine  ; « Les grâces du ciel ne se font jamais attendre. » « Je parle ainsi parce qu’il me semblait avoir non pas perdu, mais égaré vos bonnes grâces, car vous avez tant tardé à m’écrire que je ne pouvais interpréter la cause de ce silence… J’ai craint qu’on ne vous eût prévenu contre moi en vous disant que j’étais un mauvais économe… J’ai été tout réconforté par votre dernière lettre du 23 du mois passé ; j’y ai vu avec bien du plaisir que vous ne vous occupiez plus qu’à votre aise des affaires d’État. […] Il explique avec une sagacité véritablement divine la pensée ou la passion des personnages, rois, consuls, magistrats ou peuple, qui amenèrent, dans tel ou tel but, telles ou telles vicissitudes dans les destinées du peuple romain ; il montre comment de l’événement accompli devait nécessairement découler tel autre événement par la seule fatalité des grands esprits, la fatalité des conséquences ; il refait l’histoire romaine tout entière avec une lucidité rétrospective qui éclaire mille fois mieux les faits que l’historien romain lui-même. […] » XV Dans un chapitre qui semble écrit par Bossuet, Machiavel démontre, par les exemples de Moïse, de Cyrus, de Romulus, de Thésée et d’autres fondateurs de dynastie, que plus ils sont partis d’en bas, plus ils ont dû tout à leur mérite, plus ils ont pu s’affermir dans leur élévation ; mais que sans la fortune, qui n’est que la prédisposition du peuple, et sans l’occasion, qui est la condition nécessaire et divine de toute grandeur, ils n’auraient pu que rêver leur ambition, jamais l’accomplir.

731. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre quatrième »

Il voit pourtant la source divine où il aspire à se rafraîchir ; il la voit avec la foi, et il pourrait en prendre les ailes pour aller d’un seul essor y apaiser ses ardeurs douloureuses. […] Du fond de l’humilité la plus absolue, il lie sa cause à la bonté de Dieu par des rapports si invincibles, qu’il rend évidentes les dispositions de la Providence divine à son égard ; et, s’il m’est permis de me servir de mots si profanes, il l’enchaîne dans ses propres attributs, comme il enchaînerait un juge dans les devoirs et les responsabilités de sa charge. […] C’est que le doute de Pascal est au fond de toutes les âmes élevées, trop raisonnables pour borner l’usage de la raison à l’art de rendre la vie heureuse, et qui portent cette marque de l’origine divine, qu’elles ne se peuvent point contenter du bonheur de la terre.

732. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 novembre 1885. »

. — Entre ces deux extrêmes il y avait une lacune ; il manquait la divine Psyché, ce que nous appelons : l’ame ; je veux dire cette aspiration de l’être spirituel à la pureté, à la bonté, à la perfection qui, seule, peut ennoblir la nature inférieure, l’attirer peu à peu vers les hauteurs de la spiritualité et de l’intelligence divine. […] — Dans Lohengrin, inspiration merveilleuse, le monde divin apparaît, l’ange se révèle dans le héros.

733. (1888) Impressions de théâtre. Première série

Mounet-Sully a rendu, avec une poésie qui ne peut guère être dépassée, la figure du héros adolescent, d’essence supérieure et quasi divine. […] Qu’est devenu cet orgueil, cette joie fière de braver les lois divines et humaines, qui faisait toute sa vertu ? […] Et Andromaque respire si bien la divine jeunesse du poète ! […] C’est d’abord parce qu’elle a la beauté, et que la beauté est divine. […] Son époux, armé de la lyre divine, va la redemander aux royaumes infernaux.

734. (1882) Essais de critique et d’histoire (4e éd.)

Elle lui met devant les yeux, comme modèle et comme souveraine, une beauté idéale, souffrante, passionnée, tendre, au sourire terrible ou gracieux, parfois divin, mais maladive et boiteuse. […] Platon peintre pense, comme Platon philosophe, que l’idée divine et immortelle qui fait notre âme témoigne de son origine. […] Mais cette moquerie est fine, ces piqûres sont légères, et ce sourire, divin ou ironique, est toujours délicat et charmant. […] Leur sérénité divine ne descend pas jusqu’à l’action et n’a pas besoin de regard. […] La doctrine du droit divin a péri.

735. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome II pp. 1-419

La fidélité la plus scrupuleuse, l’interprétation la plus littérale ne réussirait pas à rendre le charme divin qui respire dans chaque vers. […] Écrit en tercets, comme la Divine Comédie, il soutient sans désavantage la comparaison. […] Bien qu’elle soit divisée en octaves, l’imitation du style de la Divine Comédie n’échappera sans doute à personne. […] Il veut emprunter aux tercets de la Divine Comédie leur concision biblique, et il prend l’obscurité pour la concision. […] Giusti imite le style de la Divine Comédie, comme Paul-Louis Courier imitait le style d’Amyot et de Montaigne.

736. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre I. Le Roman. Dickens. »

Elle fabrique, comme Ruth, un objet utile, très-utile, puisque demain elle vendra dix sous ; mais cet objet est une rose épanouie, dont les frêles pétales s’enroulent sous ses doigts comme sous les doigts d’une fée, dont la fraîche corolle s’empourpre d’un vermillon aussi tendre que celui de ses joues, frêle chef-d’œuvre éclos un soir d’émotion poétique, pendant que de sa fenêtre elle contemple au ciel les yeux perçants et divins des étoiles, et qu’au fond de son cœur vierge murmure le premier souffle de l’amour. […] Dans son tourment, sur son lit de pierres, il l’a contemplée, et le tendre et touchant regard de la divine étoile a calmé, par sa sérénité mystique, l’angoisse de son esprit et de son corps. « J’ai vu plus clair, dit-il, et ma prière de mourant a été que les hommes puissent seulement se rapprocher un peu plus les uns des autres, que lorsque moi, pauvre homme, j’étais avec eux. —  Ils le soulevèrent, et il fut ravi de voir qu’ils allaient l’emporter du côté où l’étoile semblait les conduire. […] Présenter un sentiment comme divin, incliner devant lui toutes les institutions, le promener à travers une suite d’actions généreuses, chanter avec une sorte d’inspiration héroïque les combats qu’il livre et les assauts qu’il soutient, l’enrichir de toutes les forces de l’éloquence, le couronner de toutes les fleurs de la poésie, c’est peindre la vie qu’il enfante comme plus belle et plus haute que les autres, c’est l’asseoir bien au-dessus de toutes les passions et de tous les devoirs, dans une région sublime, sur un trône, d’où il brille comme une lumière, comme une consolation, comme une espérance, et attire à lui tous les cœurs. […] Vous trouverez de charmants ou sérieux portraits de femmes : celui de Dora, qui reste petite fille dans le mariage, dont les mutineries, les gentillesses, les enfantillages, les rires, égayent le ménage comme un gazouillement d’oiseau ; celui d’Esther, dont la parfaite bonté et la divine innocence ne peuvent être atteintes par les épreuves ni par les années ; celui d’Agnès, si calme, si patiente, si sensée, si pure, si digne de respect, véritable modèle de l’épouse, capable à elle seule de mériter au mariage le respect que nous demandons pour lui.

737. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre dixième. Le style, comme moyen d’expression et instrument de sympathie. »

Agrafe autour des seins nus     De Vénus Pressant l’écharpe divine, Ou serrant le baudrier     Du guerrier Contre sa forte poitrine. […] La rime est un lien inattendu entre deux images ou idées, qui fait que l’une s’unit à l’autre en un mariage divin ; en un mot, elle est un accord qui symbolise pour l’oreille tous les autres accords. […] Où donc le vieux saint Paul, haranguant les Romains, Suspendant tout un peuple à ses haillons divins ? […] En lisant ou écoutant, vous êtes-vous aperçu que Romains rime avec divins, Madeleine avec humaine, rajeunie avec vie ?

738. (1904) Essai sur le symbolisme pp. -

S’oublier une minute, nouveau Narcisse, dans la contemplation de soi, à l’ombre des fontaines de la Vie, prêter l’oreille au murmure continu de l’Être qui s’égoutte au bord du Temps, c’est permettre à la Nature de nous renvoyer notre image, jusque-là ignorée ; c’est souffrir que notre âme se révèle chantante, alors que le martèlement de nos pas, le long des chemins de l’existence tumultueuse, risquait à jamais d’étouffer ses divines harmoniques. […] Cette poésie, la vraie, la pure, dont pas n’est besoin de donner d’exemples parce qu’on saura bien en trouver dans les chœurs des tragiques grecs, dans la Divine Comédie, dans Shakespeare, dans Wordsworth, dans Victor Hugo, — cette poésie possède le droit de s’asseoir aux côtés de la métaphysique sa sœur et peut se définir une métaphysique manifestée par des images et rendue sensible au cœur 19. […] Il est clair, comme j’ai tendu à le montrer au début de cette étude, qu’il existe un fond permanent grâce auquel l’Iliade, la Divine Comédie, Andromaque, demeureront toujours actuelles. […] Voir plutôt les Pouranas indous et les Psaumes hébraïques ; le Prométhée d’Eschyle et le De natura de Lucrèce ; la Divine Comédie de Dante et le Paradis perdu de Milton ; quoi encore ?

739. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXVIII » pp. 266-276

La philosophie moderne a bien de la peine à ne pas oublier naturellement cette charité qui est le cœur du christianisme en son sens divin.

740. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Poésies d’André Chénier »

Et puis, c’est rarement en son nom qu’il parle : c’est au nom des maîtres, de ces poëtes divins et délicats dont il est plein et dont il nous sert les exquises reliques.

741. (1874) Premiers lundis. Tome I « Diderot : Mémoires, correspondance et ouvrages inédits — II »

Il y a toujours sans doute beaucoup de tendresse et de douce intimité dans les lettres du philosophe à sa maîtresse ; mais la passion éclatante, épurée, et par moments sublime, a disparu dans une causerie plus molle, plus patiente, plus désintéressée ; les nouvelles, les anecdotes, les conversations sur toutes choses, s’y trouvent comme auparavant ; une analyse ingénieuse et profonde du cœur y saisit toujours et y amuse ; mais la verve de l’esprit supplée fréquemment à la flamme attiédie de la passion ; un gracieux commérage, si l’on peut parler ainsi, occupe et remplit les heures de l’absence ; on s’aime, on se le dit encore, on ne sera jamais las de se le dire ; mais par malheur les cinquante ans sont là qui avertissent désagréablement le lecteur et le désenchantent sur le compte des amants ; les amants eux-mêmes ne peuvent oublier ces fâcheux cinquante ans qui leur font l’absence moins douloureuse, la fidélité moins méritoire, et qui introduisent forcément dans l’expression de leurs sentiments les plus délicats, je ne sais quelle préoccupation sensuelle qui les ramène à la terre et les arrache aux divines extases de l’âme où s’égare et plane en toute confiance la prodigue jeunesse.

742. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — Poésie — I. Hymnes sacrées par Édouard Turquety. »

Étoile, serais-tu — mon âme le devine —     Si chère au penseur agité, Parce que Dieu te garde en sa droite divine    Comme clef de l’Éternité !

743. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Jules Laforgue » pp. 36-47

Jean-Baptiste Rousseau est venu, depuis, se réclamer de l’esprit divin et Vigny a attesté le caractère sacré du poète.

744. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre IV » pp. 38-47

« C’était, dit-il, une femme admirable. » Voiture l’appelle divine.

745. (1899) Le monde attend son évangile. À propos de « Fécondité » (La Plume) pp. 700-702

Et si quelques-uns d’entre nous ont des sentiments plus sincères, plus divins, n’oublions point que la plupart se contentent d’une calme existence, d’une médiocrité apathique et d’une fortune restreinte, vulgaire et mesurée.

746. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Balzac, et le père Goulu, général des feuillans. » pp. 184-196

Phyllarque ou le prince des feuilles, enivré de ses succès, crut, en se vengeant, avoir rempli la vengeance divine.

747. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — M. de Voltaire, et l’abbé Desfontaines. » pp. 59-72

L’indignité de ces manœuvres lui fit maudire, plus d’une fois, comme le Tasse, Apollon & toutes ses inspirations divines.

748. (1765) Essais sur la peinture pour faire suite au salon de 1765 « Mes petites idées sur la couleur » pp. 19-25

Voilà le souffle divin qui les anime.

749. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XI. Mme Marie-Alexandre Dumas. Les Dauphines littéraires »

Alexandre Dumas et Théophile Gautier sont, en effet, des rois littéraires de ce temps, sinon de droit divin, du moins de suffrage universel.

750. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Philippe II »

Il n’a rien entendu à la grandeur divine de la Cause ; il n’a vu que l’indignité de ses serviteurs.

751. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Alexandre Dumas fils » pp. 281-291

Dumas tous deux par l’absence de principes, de moralité littéraire, de philosophie supérieure, l’un, le père, fut l’inspiration, — non pas la divine, non !

752. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Avellaneda »

Si le grand estropié qui fut Cervantes resta malheureux jusqu’à sa dernière heure, broyé par la Misère, cette divine marâtre qui pétrit si bien le génie et l’imbibe de ses meilleurs parfums, au moins son œuvre eut-elle, après sa mort, le bonheur qu’il ne connut pas, lui, pendant sa vie.

753. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Louis Wihl »

Sans doute, il y a entre les poésies de la Bible et les poésies des Hirondelles la différence de l’inspiration divine à l’inspiration humaine, — à l’inspiration chétive d’un homme seul ; mais celle-ci est si vraie qu’elle en contracte un sérieux réellement plein de grandeur.

754. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Paul Meurice » pp. 231-241

L’auteur de Césara 25, le prêtre de l’Église Hugo, est aussi, par la même occurrence, l’apôtre de cette autre Église humanitaire qui flambe neuf et va remplacer incessamment la vieille religion divine qui avait suffi jusque-là aux plus forts et aux plus nobles esprits, mais qui ne suffit plus maintenant, même aux plus imbéciles… Or, c’est dans les intérêts de cette religion humanitaire que l’auteur de Fanfan la Tulipe, laissant là les amusettes du théâtre où il s’est oublié si longtemps, s’est mis à écrire cette grande pancarte, qui aura plusieurs cartons, et qu’il appelle Les Chevaliers de l’Esprit, titre un peu vague.

755. (1868) Curiosités esthétiques « III. Le musée classique du bazar Bonne-Nouvelle » pp. 199-209

Le divin Marat, un bras pendant hors de la baignoire et retenant mollement sa dernière plume, la poitrine percée de la blessure sacrilège, vient de rendre le dernier soupir.

756. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre II. Des éloges religieux, ou des hymnes. »

Le pays où Homère chanta, où Orphée institua des mystères, où l’architecture éleva des temples dont nous allons encore admirer les ruines, où le ciseau de Phidias semblait faire descendre la divinité sur le marbre ; ce pays où l’air, la terre et les eaux avaient, aux yeux des habitants, quelque chose de divin, et où chaque loi de la nature était représentée par une divinité, dut produire un grand nombre d’hymnes en l’honneur des dieux qu’on adorait ; mais la plupart de ces hymnes furent défigurées par des fables et des contes de fées, faites pour les poètes et les peintres : elles amusaient le peuple et révoltaient les sages.

757. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XVIII. Siècle de Constantin. Panégyrique de ce prince. »

Il est étonné que son héros, avec si peu de forces, ait tenté une guerre si importante : « Assurément, lui dit-il, vous avez quelque intelligence secrète avec l’âme universelle et divine, qui daigne se manifester à vous seul, tandis que nous, ce sont des dieux subalternes et du second ordre qui sont chargés de nous conduire. » Ensuite il ne peut comprendre qu’il se soit trouvé dans l’univers des hommes qui aient eu l’audace de résister à Constantin : « Eux qui auraient dû, lui dit-il, céder, je ne dis pas à la présence de votre divinité, mais en entendant seulement prononcer votre nom. » Bientôt après, ce lâche orateur fait un crime à son héros d’avoir combattu lui-même, et de s’être mêlé au milieu des ennemis, d’avoir par là, dit-il, presque causé la ruine de l’univers.

758. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre V. Du gouvernement de la famille, ou économie, dans les âges poétiques » pp. 174-185

Thésée fonde Athènes en élevant l’autel des malheureux, nom bien convenable à ceux qui erraient auparavant, dénués de tous les biens divins et humains que la société avait procurés aux hommes pieux.

759. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XVII. »

Car les arts qui parlent aux sens peuvent être pervertis, s’ils ne remontent sans cesse à la source divine de l’âme ; et l’image impérieuse du beau moral les protège autant qu’elle les élève.

760. (1913) Les idées et les hommes. Première série pp. -368

Il est ce Gottfried, la nature ; il est la spontanéité que l’art ne doit pas accabler ; il est toute la divine liberté de la vie, sa vérité. […] Ils fondèrent un institut de frères et une congrégation de religieuses : la colline fleurit de pensée divine et de prospérité. […] Il y a une semaine de la Passion pendant laquelle il subit, comme un halluciné, mais dans la réalité concrète, le détail du supplice divin. […] Les cathédrales n’étaient que la réalisation quasi spontanée du rêve divin qui animait les foules. […] Elle donnait aux poèmes d’Homère un charme de divin miracle : l’Iliade et l’Odyssée étaient le premier épanchement poétique d’une Grèce inaugurale.

761. (1905) Études et portraits. Portraits d’écrivains‌ et notes d’esthétique‌. Tome I.

Qui enlèverait du miel composé par le génie de l’auteur de René le parfum pris à l’âme de sa sœur, à celle de Pauline, — lis frémissants et si vite fanés, — risquerait de faire évaporer le plus délicat arôme du divin mélange.‌ […] Viens y cacher l’amour et ta divine faute.‌ […] Ils ont à la bouche des proverbes divins. […] Alexandre, tout divin qu’il fût par tant de côtés, n’était pas exempt d’une nuance au moins de ce défaut. […] Taine ait consacré quelques pages au divin Shelley, qui fut un solitaire, et une longue étude à Byron, qui a si fortement traduit les cœurs de ses contemporains.

762. (1803) Littérature et critique pp. 133-288

Une main divine, dit-elle, conduit l’homme dans les recherches nécessaires à son existence, et l’abandonne à lui-même dans les études d’une utilité moins immédiate. […] La simplicité de l’Écriture est celle d’un antique prêtre, qui, plein de toutes les sciences divines et humaines, dicte, du fond du sanctuaire, les oracles précis de la Sagesse. […] On retrouve, en effet, dans cette description, les élans passionnés d’une âme tendre qui portait l’amour divin jusqu’à l’excès ; mais ce morceau n’est pas le seul où l’auteur a répandu l’esprit du christianisme. […] La fille du maître des Dieux, la Sagesse divine elle-même se soumet sans murmures à tous les opprobres de la servitude, et les ennoblit par une pieuse résignation. […] Les esprits tournés à la contemplation religieuse doivent sans doute se passionner pour tous les grands spectacles qui leur parlent de la puissance divine.

763. (1894) Études littéraires : seizième siècle

Cette religion, avec une essence première excellente, puisqu’elle est divine, a contre elle qu’elle est une religion humaine. […] Il ne doit y avoir dans une religion que du divin. […] Il n’y a de divin que Dieu. […] On tergiverse, on dit : Nos mérites ne sont rien si Dieu n’y ajoute ; mais ils valent avec l’aide divine. […] Il a l’esprit théologique, et un cœur qui n’a pas le goût du divin.

764. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE LA FAYETTE » pp. 249-287

A un fonds de tendresse d’âme et d’imagination romanesque elle joignait une exactitude naturelle, et, comme le disait sa spirituelle amie, une divine raison qui ne lui fit jamais faute ; elle l’eut dans ses écrits comme dans sa vie, et c’est un des modèles à étudier dans ce siècle où ils présentent tous un si juste mélange. On a récemment cherché, en réhabilitant l’hôtel de Rambouillet, à en montrer l’héritière accomplie et triomphante dans la personne de Mme de Maintenon ; un mot de Segrais trancherait plutôt en faveur de Mme de La Fayette pour cette filiation directe où tout le précieux avait disparu ; après un portrait assez étendu de Mme de Rambouillet, il ajoute incontinent : « Mme de La Fayette avoit beaucoup appris d’elle, mais Mme de La Fayette avoit l’esprit plus solide, etc. » Cette héritière perfectionnée de Mme de Rambouillet, cette amie de Mme de Sévigné toujours, de Mme de Maintenon longtemps, a son rang et sa date assurée en notre littérature, en ce qu’elle a réformé le roman, et qu’une part de cette divine raison qui était en elle, elle l’appliqua à ménager et à fixer un genre tendre où les excès avaient été grands, et auquel elle n’eu qu’à toucher pour lui faire trouver grâce auprès du goût sérieux qui semblait disposé à l’abolir. […] … Elle a eu raison pendant sa vie, et elle a eu raison après sa mort, et jamais elle n’a été sans cette divine raison, qui étoit sa qualité principale… Elle n’a eu aucune connoissance pendant les quatre jours qu’elle a été malade… Pour notre consolation, Dieu lui a fait une grâce toute particulière, et qui marque une vraie prédestination : c’est qu’elle se confessa le jour de la petite Fête-Dieu, avec une exactitude et un sentiment qui ne pouvoient venir que de lui, et reçut Notre-Seigneur de la même manière.

765. (1860) Cours familier de littérature. IX « XLIXe entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier » pp. 6-80

Elle posa involontairement, pendant trente ans, comme un divin modèle d’atelier voilé, devant tous les yeux et devant tous les cœurs de deux générations d’adorateurs enthousiastes, mais désintéressés de sa possession ; elle fut statue et jamais amante ; elle resta intacte sur son piédestal au milieu de l’encens qui fumait et des bras tendus pour la recevoir ; elle n’en descendit qu’au tombeau. […] La divine statue n’était descendue jusque-là pour personne de son piédestal ; l’audace de prétendre à une préférence ne se présentait à l’esprit de personne, comme si une telle préférence eût été quelque chose de trop divin pour un mortel.

766. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Robert » pp. 222-249

Je m’entretiendrais de la vanité des choses de ce monde, si je lisais au-dessus de la tête d’une marchande d’herbes, au divin Auguste, au divin Néron , et de la bassesse des hommes qui ont pu diviniser un lâche proscripteur, un tigre couronné. […] Je suis inspiré par le souffle divin de l’artiste, agnosco veteris… etc. ; c’est un mot qui réveille en moi une grande pensée.

767. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Edgar Poe »

de ceux qui se laissent effrayer par les hardiesses de la bizarrerie, mais la bizarrerie d’Edgar Poe manque justement de cette sincérité qui fait de l’originalité une chose divine. […] Machiavélique côté de son génie, qui touche ici à la rouerie profonde du jongleur, et où le poète, le poète, ce Spontané divin, expire dans les exhibitions affreuses du charlatan et du travailleur américain ! […] L’Edgar Poe de Morella, de Ligeia et du Corbeau, offrit, dans le pays le plus goulu de phénomènes, le spectacle phénoménal du génie mathématique de la déduction la plus voulue et de la combinaison la plus acharnée qui ait peut-être jamais existé dans cette créature divine, parce qu’elle est spontanée, qu’on appelle un poète, et il le poussa, ce génie de la recherche et de la déduction, jusqu’aux recroquevillements du logogriphe et aux énormes charades de quelques-uns de ses Contes.

768. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres de Virgile »

Un grand et admirable érudit, un complet humaniste et un critique supérieur, Heyne, avait repris à temps, un siècle à peine après le Père de La Rue, toutes les questions concernant le divin poète qui n’avait cessé d’être présent et bien connu ; et précisément à la même époque où Wolf méditait ou proclamait sa révolution sur Homère, Heyne achevait de donner sa seconde, puis bientôt sa troisième édition du Virgile monumental où tout est rassemblé, éclairci, prévu en quelque sorte, et où il semble qu’il n’y ait plus que d’insignifiants détails à ajouter ou à corriger. […] Certes, lorsqu’il est si difficile d’exceller en une seule partie, je ne puis assez admirer la force presque divine de ton esprit qui a su embrasser tant et de si grands sujets, que ce qui suffirait à plusieurs pour éterniser leur nom se rencontre réuni en toi seul.

769. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Chateaubriand, Vie de Rancé »

Je ne crois pas que je m’abuse, il me semble que la pensée divine, si elle se ménage l’entrée dans les cœurs mortels, doit le faire souvent par ces voies si paisibles et si unies, et qu’après les grands coups portés il lui suffit, pour gagner à elle, de ces simples et divins enchantements. 

770. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « PENSÉES FRAGMENTS ET LETTRES DE BLAISE PASCAL, Publiés pour la première fois conformément aux manuscrits, par M. Prosper Faugère. (1844). » pp. 193-224

O souffle divin ! […] Diane montre pour les maux des humains toute la pitié qui est compatible avec son essence divine ; mais il y a néanmoins dans ses paroles je ne sais quelle empreinte d’une sérénité céleste… Il faudra bien convenir ici que les Anciens ont quelquefois deviné les sentiments chrétiens, c’est-à-dire ce qu’il y a de plus aimant, de plus pur et de plus sublime dans l’âme. » En adhérant aux observations exquises de l’excellent critique, j’avouerai pourtant qu’une chose m’a frappé, au contraire, en lisant ce morceau, en assistant à cette intervention compatissante de la plus chaste des divinités : c’est combien on est loin encore du christianisme, je veux dire du Dieu fait homme et mort pour tous.

771. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIIe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis »

Leur architecture dite cyclopéenne, où la main de l’homme conserve dans ses ouvrages l’empreinte monumentale et divine de la force des temps et de la rusticité de la nature, l’élégance dorienne de leurs ruines de temples, le dessin inexpliqué de leurs vases, plus grecs que la Grèce elle-même, et aussi naïfs que l’âge primitif de l’homme, tout cela atteste qu’une science inconnue de l’humanité civilisée a coulé aux bords de l’Arno des rochers de la Toscane. […] Parmi les lettres de Ficino, on en trouve une de son vénérable protecteur, dans laquelle la trempe d’esprit de ce grand homme, et son ardeur à acquérir des connaissances, même dans l’âge le plus avancé, se peignent avec une grande vivacité. « Hier, dit-il, j’arrivai à Careggi, non pas tant avec le projet d’améliorer mes terres que de m’améliorer moi-même. — Venez me voir, Marsile, aussitôt que vous le pourrez, et n’oubliez pas d’apporter avec vous le livre de votre divin Platon sur le souverain bien. — Je présume que vous l’aurez déjà traduit en latin, comme vous me l’aviez promis ; car il n’y a pas d’occupation à laquelle je me dévoue avec autant d’ardeur qu’à celle qui peut me découvrir la route du vrai bonheur.

772. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Victor Hugo, Toute la Lyre. »

ou même m’incite à me réfugier dans la pensée délicate ou dans le tendre cœur des poètes qui me sont chers : mais son Verbe m’écrase. « Une âme violente et grossière », comme l’a appelée Louis Veuillot, soit ; mais une bouche divine… Et, ici, ce m’est un grand bonheur que d’autres, plus habiles que moi, M.  […] Et quant à Lamartine, rien n’est plus beau que ses beaux vers, par la fluidité et à la fois par la plénitude, par quelque chose d’involontaire et d’inspiré*par le large et libre essor, par l’aisance souveraine et toute divine.

773. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre douzième »

L’école encyclopédique avait essayé de l’ôter à l’homme, soit en lui prouvant qu’il est sans prises pour le saisir, soit par une affectation de faux respect, en niant la Providence divine, sous prétexte de ne pas la commettre avec les désordres du monde physique et les misères du monde moral. […] Il voit des desseins où il a plu à la pensée divine de rester inexplicable, et des lois manifestes où il n’y a que des énigmes dont le sens nous sera éternellement caché.

774. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Appendice »

Cette lecture de Job me ravit ; j’y trouve tout mon cœur ; là est le divin de la poésie, j’entends la haute poésie. […] Je pris pour mon partage cette vérité qui est le Dieu caché ; je me consacrai à sa recherche, renonçant pour elle à tout ce qui n’est que profane, à tout ce qui peut éloigner l’homme de la fin sainte et divine à laquelle l’appelle sa nature.

775. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Chateaubriand homme d’État et politique. » pp. 539-564

Dans une des plus remarquables pièces des Harmonies (« Novissima Verba »), ce mélodieux poète célèbre l’amour et déclare qu’il n’y a rien dans le monde que lui : Femmes, anges mortels, création divine, Seul rayon dont la vie un moment s’illumine ! […] Et il ajoute, parlant toujours des femmes et de l’amour : Quand vous vous desséchez sur le cœur qui vous aime, Ou que ce cœur flétri se dessèche lui-même ; Quand le foyer divin qui brûle encore en nous Ne peut plus rallumer la flamme éteinte en vous, Que nul sein ne bat plus quand le nôtre soupire, ………………………………………………… Alors, comme un esprit exilé de sa sphère Se résigne en pleurant aux ombres de la terre, Détachant de vos pas nos yeux voilés de pleurs, Aux faux biens d’ici-bas nous dévouons nos cœurs.

776. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre II. Des poëtes étrangers. » pp. 94-141

Les Italiens l’appellent divin, mais c’est une divinité cachée ; peu de gens entendent ses oracles ; il a des commentateurs ; c’est peut-être encore une raison de plus pour n’être pas compris. […] Il semble faire un portrait fidéle & parfait de la toute-Puissance divine, autant qu’il est possible à la foiblesse humaine de s’élever jusqu’à elle au travers de cette poussiere, qui comme un nuage nous environne de toutes parts.

777. (1899) Le roman populaire pp. 77-112

ils ont, de plus, la certitude d’être entendus lorsqu’ils élargissent l’horizon terrestre et qu’ils expriment un sentiment religieux ; entendus non pas d’une élite, mais du peuple encore pénétré de christianisme, et qui conserve, de ses origines, un idéal divin mêlé à tous les appétits humains. […] Je suis sûr que les artistes qui vivaient au moyen âge, Dante quand il écrivait sa Divine Comédie, les auteurs de nos poèmes nationaux et de ceux des nations voisines, les bâtisseurs d’églises, d’hôtels de ville, de maisons corporatives, les sculpteurs, les peintres, les musiciens, avaient présente à l’esprit cette idée fraternelle, et dédiaient en secret leur œuvre à tout le peuple chrétien.

778. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. LOUIS DE CARNÉ. Vues sur l’histoire contemporaine. » pp. 262-272

Son christianisme actif le sauve peut-être en cela de quelques-unes des tendances de son esprit ; il croit avec ferveur au progrès social, au travail ininterrompu de l’esprit divin dans l’humanité ; il énumère sans ambiguïté les résultats ou instruments acquis et déjà victorieux, la presse, le jury, le principe électif. « Je suis tellement convaincu, » s’écrie-t-il quelque part, « du triomphe définitif des principes de 89, que je ne les considérerais pas comme compromis pour longtemps, quand, par suite de vicissitudes placées en dehors de nos prévisions, je verrais les Prussiens campés de nouveau dans la cour du Louvre, et les chevaux de l’Ukraine se désaltérer aux bassins de marbre des Tuileries. » Historiquement, et en tout ce qui concerne le mouvement, les phases et les hommes de la Restauration, les jugements de M. de Carné nous semblent approfondis et satisfaisants, du moins dans leur ensemble et eu égard à son point de vue.

779. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Relation inédite de la dernière maladie de Louis XV. »

C’est de la sorte seulement qu’on s’explique bien la chute des vieilles races, et la facilité avec laquelle, au jour soudain des colères divines et populaires, l’orage les déracine, sans que la voix tardive des sages, sans que les intentions les plus pures des innocentes victimes, puissent rien conjurer.

780. (1874) Premiers lundis. Tome II « E. Lerminier. De l’influence de la philosophie du xviiie  siècle sur la législation et la sociabilité du xixe . »

La première partie de l’ouvrage nouveau contient quatre grands portraits, ou plutôt quatre statues, Montesquieu, Voltaire, Diderot, Rousseau, qui n’ont jamais apparu avec plus de jeunesse divine et de majesté.

781. (1874) Premiers lundis. Tome II « Henri Heine. De la France. »

Souvent, le soir, regardant quelque coin de ciel, des toits lointains, çà et là un rare feuillage, je me suis dit qu’un tableau qui retracerait exactement cette vue si simple serait divin ; puis j’ai compris que cette fidélité entière était impossible à saisir directement ; que mon émotion résultait du tableau en lui-même et de ma disposition sentimentale à le réfléchir ; que, de l’observation directe de l’objet, et aussi de la réflexion modifiée de cet objet au sein du miroir intérieur, l’art devait tirer une troisième image créée qui n’était tout à fait ni la copie de la nature, ni la traduction aux yeux de l’impression insaisissable, mais qui avait d’autant plus de prix et de vérité, qu’elle participait davantage de l’une et de l’autre19.

782. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Verhaeren, Émile (1855-1916) »

Sa violence divine s’est muée en douceur.

783. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre II. Enfance et jeunesse de Jésus. Ses premières impressions. »

Là aussi, sur cette terre où dorment le charpentier Joseph et des milliers de Nazaréens oubliés, qui n’ont pas franchi l’horizon de leur vallée, le philosophe serait mieux placé qu’en aucun lieu du monde pour contempler le cours des choses humaines, se consoler de leur contingence, se rassurer sur le but divin que le monde poursuit à travers d’innombrables défaillances et nonobstant l’universelle vanité.

784. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre onzième. »

Avait l’âme toute divine.

785. (1767) Salon de 1767 « Sculpture — Pajou » pp. 325-330

C’est celle qui verse aux dieux l’ambroisie, ce breuvage qui alume dans les âmes divines une joie éternelle, et elle est ennuyée et triste.

786. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Les Philippiques de la Grange-Chancel »

Ces Philippiques 36 effroyables, ces furies lyriques, insinuées d’abord dans l’opinion comme un secret, puis y détonant comme une indiscrétion, n’étaient pas d’un pauvre poète obscur, plein de courage et de génie, qui aurait eu le temps de mourir de faim avant qu’on eût entendu s’élever sur sa lyre la voix divine de la justice.

787. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « La Bruyère » pp. 111-122

Or, pour la transition, un seul rapport suffit ; mais pour l’agrégation, il en faut mille ; car il faut une convenance naturelle, profonde et complète. » Ainsi défendu, quoiqu’il n’eut pas besoin de défense, La Bruyère, accepté et magnifié à tous les titres de moraliste, de philosophe, d’observateur et d’écrivain, manquait de cette page de critique qui épure la gloire d’un homme en la passant au feu d’un ferme regard, car dans la gloire, dans ce lacryma-christi de la gloire, telle que les hommes la font et la versent, il y a encore des choses qu’il faut rejeter du verre, — pour que l’ivresse en soit divine !

788. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « I. Saint Thomas d’Aquin »

Cela mutile saint Thomas, le géant d’ensemble, qui concentra dans une colossale unité la science divine et la science humaine.

789. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « V. Saint-René Taillandier »

Telles sont la philosophie et l’histoire de cet optimiste faux chrétien qui croit, dit-il, à la Providence divine, comme il croit à la destinée, comme il croit à ce dix-neuvième siècle, qui a réveillé l’infini, comme à la science, comme à tout, et qui a le mysticisme de toutes ces sornettes contemporaines, lesquelles formeront un jour une logomachie à faire pouffer de rire nos descendants !

790. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Lefèvre-Deumier »

C’est tout simplement divin ; car le talent qui circule dans cette composition charmante est divinisé par la douleur.

791. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Roger de Beauvoir »

Il y a longtemps que je crois Roger de Beauvoir du bois saignant, comme les arbres de la forêt du Tasse, dont on fait les flûtes divines qui sont les poètes.

792. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Th. Gautier. Émaux et Camées »

Théophile Gautier est le plus puissant limeur de cette littérature volontaire qui croit trop, mais enfin qui croit que l’effort humain l’emporte, en fait de poésie, sur la divine spontanéité.

793. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « M. Paul Bourget »

Il y a l’inspiration de la foi religieuse, telle qu’elle est, par exemple, dans le livre divin (sans métaphore) des Harmonies, de Lamartine, Mais à côté, en descendant, il faut avouer que le scepticisme, quand il écrit de pareils vers, pénètre bien avant dans nos âmes !

794. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XIX. »

Je t’en supplie, divin guide !

795. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Première série

Et l’on pourrait presque dire aussi qu’il n’a jamais exprimé de sentiments, sinon le sentiment de joie, d’allégresse, de vie divine qui répond à la perception abondante et aisée des belles lignés et des belles couleurs. […] Il nous offre, dans un siècle pratique et triste, l’exemple extravagant d’un homme qui n’a vécu que de mots, comme les divines cigales se nourrissent de leur chant. […] Il y a chez sa Mélissandre, si raffinée pourtant, quelque chose de la large vie animale et divine du Centaure de Maurice de Guérin. […] La sérénité de cette vie impersonnelle et, en un sens, divine se communique à nous par une sorte d’aimantation. […] Lui reprocherons-nous de s’amuser pour son compte tout en divertissant le divin impresario ?

796. (1900) La culture des idées

La forme particulièrement chrétienne de l’amour chaste, dégagé de toute idée de plaisir physique, est l’amour divin, tel qu’on le voit s’épanouir dans l’exaltation mystique des contemplateurs ; c’est vraiment l’amour pur, puisqu’il ne correspond à rien de définissable, c’est l’intelligence s’adorant soi-même dans l’idée infinie qu’elle se fait d’elle-même. […] On concédera difficilement que Fra Angelico n’employa pas de brun dans son Couronnement parce que cette couleur, « composée de noir et de rouge, de fumée obscurcissant le feu divin », est satanique ; pas de violet, pas de gris, pas d’orangé : parce que le violet dit le deuil ; le gris, la tiédeur ; l’orangé, le mensonge. […] Biblis, amoureuse de son frère, puis changée en fontaine, c’est la Sapience divine ; Cadmus, le frère qui la rebute, c’est encore le peuple Juif. […] L’huile de douceur et le vinaigre d’aigreur, qu’on met par parties égales dans la salade, sont l’image de la miséricorde et de la justice divines. […] Les vrais dieux, il faut peut-être qu’ils aient d’abord vécu ; leur choix sera alors dicté au peuple par l’idée qu’il se fait de l’état divin, c’est-à-dire de l’état héroïque.

797. (1911) Visages d’hier et d’aujourd’hui

… Mais il était heureux, en effet ; on ne tardait pas trop à s’en apercevoir : une gaieté enfantine, et de qualité presque divine, l’animait bientôt, dès qu’il entrait en sécurité. […] Divine Bontemps était une petite fille qui avait une singulière énergie de tendresse ; mais elle regardait l’aveu de ses sentiments comme un péché. […] Les héroïnes de Maurice Donnay ne sont pas divines ; elles ne sont pas perverses non plus. […] L’amour maternel et l’amour divin sont ici unis étroitement. […] Le divin Platon l’eût complimenté, qui disait que le premier devoir d’un esprit soucieux de vérité, c’est la purification.

798. (1895) De l’idée de loi naturelle dans la science et la philosophie contemporaines pp. 5-143

Cependant, pour établir la valeur effective des mathématiques, ce même Descartes a cru nécessaire de recourir à l’immutabilité et à la véracité divines. […] Descartes lui-même n’y parvient qu’en recourant, comme à un Deus ex machina, à la véracité divine. […] De plus, nous avons une tendance naturelle à rapporter nos sensations à des choses étendues comme à leur cause ; et, en vertu de la véracité divine, cette tendance doit faire loi pour nous. […] C’était donc une doctrine classique que celle qui rapprochait le fixe et le divin, et l’on conçoit que ce point de vue soit encore celui de beaucoup d’esprits. […] Pour résoudre cette difficulté, il ne faut rien moins que toute la métaphysique cartésienne, aboutissant à la confiance en la véracité divine.

799. (1891) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Première série

Ils doivent être soumis moralement à la vérité divine, dont l’Église a le secret. […] Comme homme, il ne l’est pas ; il est un animal ennemi : tel est l’ordre humain ; il faut qu’il le soit comme participant à Dieu, comme communiant dans la pensée divine, pour qu’il y ait au moins une image de l’ordre divin réalisée sur la terre. […] Reste que le fait initial soit divin, comme toute invention dite humaine. […] Ce n’est pas autre chose que le droit divin de l’homme […] Sur quoi s’appuie ce droit divin de l’homme que Constant établit comme la loi même de la société ?

800. (1898) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Deuxième série

Qu’est-ce, en effet, qu’une souveraineté, soit nationale, soit individuelle, substituée à la souveraineté, divine dans sa source, du peuple ou du genre humain ? […] Le christianisme ne s’est pas dérobé à cette loi, ce qui prouve assez qu’elle est divine. […] De décider si le Dieu homme a une double volonté, l’une divine, l’autre humaine. […] Il est si profondément déiste qu’il ne saurait admettre, non seulement que le divin soit d’invention humaine, ce n’est plus déisme, mais même que quoique ce soit qui touche au divin ; que quoi que ce soit qui a un caractère religieux, soit chose du même ordre qu’un fait civil. […] Qui rassemblera dans un symbole nouveau ces fragments de la législation divine et humaine ? 

801. (1888) La vie littéraire. Première série pp. 1-363

Il ne croit à rien et il s’efforce de goûter les délices dont l’amour divin remplit les âmes pieuses. […] C’est un livre spirituel qui satisfait mieux l’amour divin que la curiosité humaine. […] Il juge les plus vieux poèmes d’après des règles qu’il tient pour immuables et divines. […] Ce divin Jules passait alors de durs moments. […] Il sait qu’elle est bonne, qu’elle est nécessaire, qu’elle est divine puisqu’elle est naturelle.

802. (1897) La vie et les livres. Quatrième série pp. 3-401

Mais il a ce que nul apprentissage ne saurait donner : le don des larmes, la divine pitié, non pas la pitié facile dont s’accommode le quiétisme mondain ou la rhétorique politicienne, mais celle qui s’arme de colère et d’ironie pour dénoncer le mal et appeler le bien. […] Malheur à celui, malheur à celle dont le chemin n’est point fleuri de fleurs divines par les souffrances et par les délices de la fidélité passionnée ! […] Son cœur, épanoui d’espérance, défiait la force des choses de vaincre jamais la puissance invincible de son amour… L’exégèse de l’historien, élégante et sobre, vraiment digne d’un tel sujet, suivait, sans la troubler, la musique du divin poème. […] Longtemps les effigies divines, les reliques des ancêtres, les œuvres délicates des ciseleurs et des peintres, les armes prises aux barbares d’Asie, étincelèrent au soleil. […] Aussitôt un joyeux tonnerre retentit dans le ciel serein et la foudre tomba dans le temple, sans faire de mal à Phidias, qui reconnut à ce signe que le divin modèle était content.

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