Cela dit, prenons-le par ses bons côtés, par ses saillies qui souvent vont fort loin dans le vrai et dans le sérieux, prenons-le dans sa parfaite connaissance de la vie, du monde et des hommes. […] Cet aperçu (à moi presque aussi ignorant, il est vrai, que le prince) me paraît, à cette date, la justesse même. […] On voit le ton ; il y a du vrai et du faux ; mais la situation est vivement sentie, vivement caractérisée. […] Il est un sujet auquel il revient souvent, soit à propos de Besenval, soit à propos de La Harpe, toutes les fois qu’il en trouve l’occasion, c’est la reine Marie-Antoinette ; et chaque fois, inspiré par son cœur, par une imagination fidèle et émue, il nous la montre sous un vrai jour, avec ses ingénuités, ses étourderies innocentes, et dans tout l’éclat de sa figure « sur laquelle on voyait se développer, en rougissant, ses jolis regrets, ses excuses, et souvent ses bienfaits ». […] Il est vrai qu’en sortant de ses mains, elle mettait les siennes dans ses cheveux pour s’arranger à l’air de son visage.
Le vrai et le meilleur témoin est Lassay, qui a raconté en détail, et avec une admiration tendre, l’histoire de celle qu’il regretta toute sa vie. […] Sa douleur, comme toutes les vraies douleurs, est inépuisable dans l’expression et se complaît dans les redites. […] En m’éveillant, il vient se saisir de moi, et me serre le cœur avant que ma raison soit encore éveillée et m’ait appris la cause de ma douleur. » Tout cela est très vrai, d’un accent très senti, et vaut mieux que toutes les railleries du monde qui a commencé par en sourire, et qui a triomphé ensuite quand cette grande résolution n’a pas duré. […] Ces lettres de Lassay à la princesse sont assez jolies, mais pâles ; ce n’est point là le langage de la passion vraie : il a beau dire en dénouant et en s’éloignant : « Il vaut mieux que je meure et que vous viviez moins malheureuse. […] Il le croyait du moins, et récapitulant sa vie dans sa vieillesse, revoyant ses affections passées dans leur vrai jour, et ne comptant que celles qui méritaient de survivre, il disait : « La source de tous mes malheurs et ce qui ne se peut réparer, est d’avoir perdu une femme que j’avais choisie selon mon cœur, et pour qui j’avais tout quitté.
Une des remarques de cette judicieuse Logique, en effet, c’est que la plupart des erreurs des hommes viennent moins de ce qu’ils raisonnent mal en partant de principes vrais, que de ce qu’ils raisonnent bien en partant de jugements inexacts ou de principes faux. […] Les gens que vous avez le plus écoutés autrefois sont infiniment secs, raisonneurs, critiques, et opposés à la vraie vie intérieure5 : si peu que vous les écoutassiez, vous écouteriez aussi un raisonnement sans fin, et une curiosité dangereuse qui vous mettrait insensiblement hors de votre grâce, pour vous rejeter dans le fond de votre naturel. […] Habert, à faire un extrait de la vraie doctrine de saint Augustin, le Fénelon qui déclare « que les libertés de l’Église gallicane sont de véritables servitudes », qui craint la puissance laïque bien plus que la spirituelle et l’ultramontaine, et qui redoute le danger d’un schisme tout autant que l’invasion de la France, ce Fénelon n’est pas celui que les philosophes de l’âge suivant ont façonné et remanié à leur gré. […] [NdA] Ce jugement serait bien injuste si on l’appliquait à tous les hommes de Port-Royal, et surtout du premier Port-Royal ; il n’est vrai que si l’on a en vue la majorité des jansénistes du dehors. […] [NdA] Je ne dois pas, en écrivant, tout à fait oublier que Le Moniteur s’affiche au coin des rues ; voici toute la citation trop vraie ; je l’offre à ceux qui lisent dans la chambre : « Quand on est destiné à gouverner les hommes, il faut les aimer pour l’amour de Dieu, sans attendre d’être aimé d’eux, et se sacrifier pour leur faire du bien, quoiqu’on sache qu’ils disent du mal de celui qui les conduit avec bonté et modération. »
On conçoit d’ailleurs ces dissidences naturelles et cette sorte d’antipathie instinctive entre une école scientifique tout analytique et précise, et une autre qui ne se refusait ni l’éclat ni les couleurs ; mais d’Alembert se laissait emporter à ses préventions personnelles lorsqu’il disait à propos des systèmes de Bailly et de Buffon qu’il associait dans sa pensée : « Supplément de génie que toutes ces pauvretés ; vains et ridicules efforts de quelques charlatans qui, ne pouvant ajouter à la masse des connaissances une seule idée lumineuse et vraie, croient l’enrichir de leurs idées creuses… » Dans la familiarité de la correspondance et lorsqu’il n’est point retenu par le public, d’Alembert s’abandonne souvent ainsi à des injustices presque injurieuses, dites d’un style assez commun. […] Il est et sera inébranlable sur certains principes d’égalité et de bon sens équitable, qui sont et resteront vrais à travers toutes les fluctuations successives, principes conquis une fois pour toutes et sur lesquels repose désormais l’ordre moderne ; il ne se trompe pas en appréciant ces premiers et grands actes du tiers état auxquels il eut l’honneur de participer, de présider : « Voilà ce qu’elles ont fait seules, dit-il des Communes par opposition aux deux autres ordres privilégiés et résistants ; voilà ce qui fut la base de la Constitution française. […] » Tout cela est vrai encore. […] Mais combien il est vrai qu’il connaissait peu les hommes et qu’il n’avait pas le talent de démêler, de saisir avec rapidité ceux qui cachaient des trames et des arrière-pensées suspectes ! […] Je ne sais ce qu’on pouvait y gagner, car il n’est que trop vrai que Bailly, condamné à mort par le Tribunal révolutionnaire, et conduit le 12 novembre 1793 au Champ-de-Mars, lieu désigné pour son exécution, eut à y subir des outrages inaccoutumés, et devant lesquels la mort elle-même n’est plus qu’un bienfait.
La Bruyère, qui avait vu les Condé, les La Rochefoucauld, les Retz, les Rancé, tous ces convertis de la Fronde, disait en son temps : « Il ne faut pas vingtannées accomplies pour voir changer les hommes d’opinion sur les choses les plus sérieuses, comme sur celles qui leur ont paru les plus sûres et les plus vraies. » C’est l’épigraphe à mettre à la vie de Lamennais. […] Si pour lui, dans l’ordre intellectuel, le vrai est tout entier d’un côté et le faux de l’autre, dans l’ordre moral le bien absolu, à ses yeux, est également tout d’un côté, et le mal du côté opposé ; à droite les bons, à gauche les méchants ; les agneaux séparés des boucs, pas de mélange ! […] Il est d’un naturel, en effet, d’un sincère, d’une intrépidité sans égale, d’une imprudence à faire peur ; il justifie ce mot de l’abbé Frayssinous sur lui (seule réponse à tant d’injures) : « Cet homme d’une candeur effrayante… » Il justifie cet autre mot de son frère, l’abbé Jean, qui le nomme de son vrai nom : « Dieu l’a fait soldat ! […] Nous nous en allons vers notre vraie patrie, vers la maison de notre père : mais, à l’entrée, il y a un passage où deux ne sauraient marcher de front, et où l’on cesse un moment de se voir : c’est là tout. » A Mme de Senfft encore, au moment où il agitait de publier les Paroles d’un Croyant (19 février 1834) : « Vous allez entrer dans le printemps, plus hâtif qu’en France dans le pays que vous habitez (Florence) : j’espère qu’il aura sur votre santé une influence heureuse : abandonnez-vous à ce qu’a de si doux cette saison de renaissance ; faites-vous fleur avec les fleurs. […] Or, cela est vrai de l’esprit étrange et puissant dont nous parlons.
Mais il faut voir comme Vallot, qui a si bien et si vigoureusement traité cette maladie mortelle, s’applaudit, comme d’un coup de maître, de l’effet de son généreux remède (le vomi-purgatif dont il nous indique le composé), de cette « généreuse purgation » dernière qui sauve le roi, le laissant bien faible, il est vrai, ayant du coup été purgé vingt-deux fois et n’ayant vomi qu’à deux reprises. […] Fagon, comme tous les vrais disciples d’Hippocrate, triomphe des théories préconçues et des mauvaises doctrines, tour à tour régnantes, par l’observation pratique et le tact. […] Louis XIV mangeait beaucoup ; ce lui était une nécessité sans doute pour se soutenir ; c’était aussi, pour l’appeler de son vrai nom, une gourmandise et une intempérance. […] Le roi et feu Monsieur aimaient beaucoup les œufs durs. » Fagon nous donne l’aperçu d’un souper du roi déjà vieux (1709), qui répond bien à un tel dîner ; il est vrai que cela avait toutes les peines du monde à passer : « La variété, dit-il, des différentes choses qu’il mêle le soir à son souper avec beaucoup de viandes et de potages, et entre autres les salades de concombres, celles de laitues, celles de petites herbes, toutes ensemble assaisonnées comme elles le sont de poivre, sel, et très fort vinaigre en quantité, et beaucoup de fromage par-dessus, font une fermentation dans son estomac, etc. » Si tel était un souper ou un dîner ordinaire de Louis XIV, il est curieux de voir quelles étaient ses diètes, quand on le mettait au régime ; par exemple (1708) : « Le roi, fatigué et abattu, fut contraint de manger gras le vendredi, et voulut bien qu’on ne lui servit à dîner que des croûtes, un potage aux pigeons, et trois poulets rôtis ; le soir, du bouillon pour y mettre du pain, et point de viandes… Le lendemain, il fut servi comme le jour précédent, les croûtes, un potage avec une volaille, et trois poulets rôtis, dont il mangea, comme le vendredi, quatre ailes, les blancs et une cuisse ! […] Mais un autre jour, il en est tout autrement : les choses se sont passées, il est vrai, avec un peu moins de sobriété : « Le cours de cette médecine, dit à un endroit Fagon (fin de cette même année 1708), fut brusquement arrêté par le dîner du roi, qui mangea beaucoup, et entre autres choses, outre les croûtes, le pain mitonné en potage et les viandes fort solides, combla la mesure à son dessert avec des vents faits avec du blanc d’œuf et du sucre, cuits et séchés au four, force confitures et des biscuits bien secs ; ce qui joint à quatre grands verres en dînant et trois d’eau sortie de la glace, après dîner, donna sujet au roi de se plaindre, après avoir travaillé trois heures avec M. de Pontchartrain, qu’il se sentait faible et qu’il avait de la peine à marcher. » Notez cependant que, s’il a trop dîné, il n’en a pas moins travaillé ses trois heures.
C’est un point sur lequel on ne peut lâcher pied sans que l’économie même de notre histoire moderne française soit bouleversée, et la vraie notion du progrès confondue. […] Tout cela est vrai, et, comme M. […] Vauvenargues est un moraliste vrai, naturel, qui n’est pas dupe, et qui de plus a le mérite que n’ont pas les autres de donner impulsion et direction. […] Après cela, il est bien vrai que ce n’est pas sous forme et figure.de moraliste que se produit le plus essentiellement l’étude et la connaissance de l’homme au xviiie siècle, avant et après 89. […] Mais qu’on n’aille pas dire, à cause de cette inévitable imprévoyance mêlée à tant d’espérances légitimes et depuis justifiées, que le xviiie siècle, dans son ensemble comme dans son élite, ne reste pas incomparablement supérieur à la seconde moitié du xviie siècle par les lumières et la connaissance de l’homme vrai, de l’homme moderne en société, de l’homme civil, religieux, politique, tel qu’il sort et se prononce dans les cahiers des États-Généraux, et tel qu’il se retrouve, somme toute, après le naufrage même, au temps du Consulat : ce serait substituer un préjugé littéraire à un fait positif, à une vérité historique incontestable.
Par malheur, pour l’art sérieux, il n’en est pas ainsi ; et, si le poëme épique du moyen âge, en France, n’a pas abouti, ne s’est pas réalisé en un chef-d’œuvre, il est bien plus vrai encore de dire que le Mystère, le drame religieux et sacré, ne s’est finalement résumé et épanoui chez nous dans aucune œuvre vraiment belle et digne de mémoire. […] Je ne tiens pas à prendre en défaut mes savants confrères qui ont tant à me renseigner sur ces sujets un peu ingrats, où notre légèreté se rebute aisément ; mais eux-mêmes, je le leur demande, n’ont-ils pas commencé à me faire querelle tout les premiers, en me reprochant d’anciens jugements un peu trop absolus peut-être, que je crois vrais pourtant dans le fond, et que je suis prêt d’ailleurs à modifier, à amender, autant que mon goût mieux informé pourra y consentir ? […] Il eût été plus neuf et plus vrai de le montrer jusqu’alors probe et assez austère, mais poussé au crime par le seul sentiment d’envie, en le compliquant, s’il le fallait, d’avarice, deux sentiments qui ne sont pas incompatibles avec des qualités sèches et sévères. […] J’ai tenu à rétablir les vrais termes et à fixer nos mesures, pour en finir, une bonne fois, avec ces rapprochements et avec ces défis que nous jettent de temps en temps à la tête les moins prudents parmi les estimables érudits qui se sont occupés de ces rapsodies curieuses. […] Didron, ce vrai pionnier du moyen âge, n’a cessé d’être un provocateur et un promoteur utile et des plus méritants dans cette branche de recherches qui semblent aujourd’hui arrivées à leur terme.
C’est le christianisme de Channing, de Chalmers, sans aucune marque calviniste expresse : il a réduit le christianisme à ses éléments les plus simples, les plus essentiels ; mais il lui garde expressément son caractère divin, surnaturel ; il le laisse entouré et glorifié des prophéties, prises au vrai sens, et des miracles ; il ne souffre aucune amphibologie sur la personne même du Christ, il voit en lui l’homme-Dieu et ne permet point qu’à cette nature divine on substitue, à aucun degré, le plus sage, le plus saint, et fût-ce même le plus divin des hommes. […] Le sage et le critique qui a d’avance purgé son esprit de toutes les idoles et de tous les fantômes se dit à lui-même et ces choses-là et beaucoup d’autres, et il ne continue pas moins, chaque jour et à chaque instant, de servir à sa manière l’avancement de l’espèce, d’étudier, de chercher le vrai, le vrai seul, de s’y tenir sans le forcer, sans l’exagérer, sans y ajouter, et en laissant subsister, à côté des points acquis, tous les vides et toutes les lacunes qu’il n’a pu combler. […] J’admets comme un droit naturel et universel la liberté de la pensée ; mais, parce qu’elle est essentiellement libre, elle n’est pas indifféremment vraie, et ceux-là seuls qui pensent comme moi sont, pour moi, dans la vérité et appartiennent à la même société intellectuelle, c’est-à-dire à la même Église que moi. […] Je mets seulement mon honneur à les comprendre tous, sauf à préférer en définitive celui qui, toute expérience faite et toutes illusions dissipées, me paraît le plus vrai
Le morose abbé de Mably, qui voyait tout en noir et ne pouvait surtout rien approuver dans un ministre, ne voulut jamais croire à l’heureuse solution de cette affaire qui avait eu, à l’origine, le caractère d’une machination, et il disait de son ton bourru à Malouet : « Monsieur, je me connais un peu mieux que vous en hommes et en ministres, attendu que je vous ai précédé dans le monde d’une quarantaine d’années ; je vous annonce donc nettement qu’avant deux ans vous êtes un homme perdu. » Malouet, loin de se perdre, sortit de là apprécié et prisé à sa vraie valeur. […] Ma jeunesse rêveuse aimait autrefois à y chercher un avant-goût de ces biographies intimes, de ces romans vrais, dont j’essayais d’accréditer le genre87. […] Ce qui est vrai, c’est qu’il y a profit et plaisir à suivre Malouet dans ce voyage d’exploration en Guyane, dans ses visites chez les principaux colons, à les écouter, comme il fit lui-même, exposant chacun leurs observations pratiques. leurs expériences variées et concordantes sur ce sol trompeur qui rendait si vite, mais qui s’épuisait si promptement ; à le suivre encore dans ses courses à travers les forêts, à noter, chemin faisant avec lui, de curieux phénomènes d’histoire naturelle concernant les fourmis, les serpents, les singes, et en général sur les mœurs des animaux, qui, n’étant gênés par rien dans ces vastes solitudes, y forment librement des groupes et y atteignent atout le mode relatif de sociabilité dont ils sont capables. Les Indiens de ces contrées, les Galibis, se rencontrent naturellement au premier plan du tableau : ils sont présentés sous un jour vrai, sans engouement ni dénigrement, avec leurs qualités comme avec leurs défauts. […] Il n’est pas moins vrai qu’autant il est simple et naturel qu’un invalide, soldat sous Louis xiv, soit allé vieillir et mourir très tard à la Guyane (n’y ayant d’extraordinaire en cela que la longévité du personnage), autant il est singulier qu’un sauvage, un pur Natchez, soit venu à la Cour de Louis xiv et s’y soit vu admis dans la familiarité des grands hommes, pour retourner ensuite s’ensauvager de nouveau dans ses solitudes.
Cette suite, chez M. de Lamartine, ne se compose encore, il est vrai, que d’un seul poëme, mais qui a tout déjoué. […] Les réflexions abondent, et je parlerai comme Job, dans l’amertume de mon cœur : cette négligence, cette prodigalité des beaux vers jetés sans aucun soin ni respect est-elle donc de la vraie humilité ? et quelle est, je vous le demande, la vraie charité, ou celle qui jetterait du haut de son char une poignée de louis au nez du pauvre, ou celle qui s’approche de lui, passe et repasse deux fois, le considère et lui met dans le fond de la main un louis, un seul louis d’or, qu’elle y renferme avec étreinte, le laissant immobile et pénétré ? […] Alors il n’y avait qu’un homme ou plutôt un demi-dieu, Louis XIV, le Roi, qui fût en scène de la tête aux pieds, et il y restait, il est vrai, depuis le lever jusqu’au coucher, dans toutes les situations les plus privées, depuis la chemise que lui présentaient ses gentilshommes, jusqu’à ses amours dans les bosquets que célébraient les peintres et que roucoulaient les chanteurs. […] La conclusion de tout ceci est triste ; un grand trouble, en achevant ce volume et en repassant mes propres impressions, m’a saisi ; on doute de soi ; les notions du beau et du vrai se confondent : y a-t-il telle chose qu’un art, et n’est-ce pas chimère que d’y croire et de s’y dévouer ?
Elle s’y accoutuma dès lors à romancer toute chose et à n’aller au vrai de rien. […] Après sa sortie de France et ses voyages à l’étranger, Mme de Genlis, rentrée à l’époque du Consulat, publia, de 1802 à 1813, quelques ouvrages qui tiennent à sa veine sentimentale et romanesque plus qu’à sa veine pédagogique, et dont quelques-uns ont obtenu un vrai succès : les Souvenirs de Félicie, première esquisse agréable, qu’elle a délayée depuis dans ses intarissables Mémoires ; une nouvelle qui passe pour son chef-d’œuvre, Mademoiselle de Clermont, et quelques romans historiques, La Duchesse de La Vallière, Madame de Maintenon, Mademoiselle de La Fayette : ce fut son meilleur moment. […] Pour faire un vrai portrait de Louis-Philippe, il faudrait le surprendre dès cette première éducation et dans l’extrait de Journal qu’on a publié de lui (1790-1791), et qui en est la suite naturelle. […] De curieuses lettres de Mme de Flahaut, écrites de Bremgarten en Suisse (janvier et février 1795), nous attestent le vrai des sentiments du prince à cette époque et la vivacité soudaine de sa première réaction contre Mme de Genlis2. […] L’auteur se pique d’être vrai avant tout ; cette vérité n’est ici qu’une phrase sentimentale de plus.
Heureusement que, dans mon sommeil, je ne rêve pas souvent de ces situations désagréables, autrement j’en viendrais à redouter ce qui fait maintenant mes seules heures de repos… Et tous ceux qu’on lui recommande sont, notez-le bien, « des officiers expérimentés, braves comme leur épée, pleins de courage, de talents et de zèle pour notre cause, en un mot, dit-il, de vrais Césars, dont chacun doit être une acquisition inestimable pour l’Amérique ». […] La correspondance de Franklin, en ces années, est d’une lecture des plus agréables et des plus douces : l’équilibre parfait, la justesse, l’absence de toute mauvaise passion et de toute colère, le bon usage qu’il apprend à tirer de ses ennemis mêmes, un sentiment affectueux qui se mêle à l’exacte appréciation des choses, et qui bannit la sécheresse, un sentiment élevé toutes les fois qu’il le faut, un certain air riant répandu sur tout cela, composent un vrai trésor de moralité et de sagesse. […] Franklin répond par cette lettre que je donnerai en entier, puisque, mieux que tout ce que je pourrais dire, elle exprime le vrai rapport où il est avec les philosophes du xviiie siècle, et le point par où il s’en sépare : J’ai lu votre manuscrit avec quelque attention. […] J’ai, il est vrai, par-ci par-là un petit remords en réfléchissant que je perds le temps si paresseusement ; mais une autre réflexion vient me soulager, en murmurant tout bas à mon oreille : « Tu sais que l’âme est immortelle : pourquoi donc serais-tu chiche à ce point d’un peu de temps, quand tu as toute une éternité devant toi ? […] Laissant aller sa pensée sur les espérances et les craintes, sur les perspectives de chance diverse, de bonheur ou de malheur, qui animent ou tempèrent les joies de la famille, il disait encore, en citant le mot d’un poète religieux (le docteur Watts) : Celui qui élève une nombreuse famille, tant qu’il est là vivant à la considérer, s’offre, il est vrai, comme un point de mire plus large au chagrin ; mais il a aussi plus d’étendue pour le plaisir.
À côté du cabinet, la caisse, une caisse grillée, une vraie caisse, où se tenait le caissier Lebarbier, le petit-fils du vignettiste du xviiie siècle, que nous avions retiré avec Pouthier des bas-fonds de la bohème. […] Et cependant c’est parfaitement vrai. […] Alors c’était une défense maladroite de Rachel « qui ne se serait pas plainte », ce qui était inutile à dire si cela était vrai, ainsi que je le crois. […] Sa femme, une vraie paysanne, ne sait ni lire ni écrire. […] Sur le banc, dans des poses ratatinées, sept à huit vieillardes, de vraies sibylles, et mises avec des loques de spectres, les genoux ramassés sous les corps voûtés, et sur les genoux un gueux au-dessus duquel se croisent leurs deux mains, comme les deux mains qui sont sur les tombeaux.