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607. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre V. Un livre de Renan et un livre sur Renan » pp. 53-59

c’est ce qui donne à chacun son motif de vivre… au plus bas degré, la morphine et l’alcool. » Ibsen a dit le mensonge vital, moins allègrement. […] L’état des esprits sous Louis VI, comment sous son règne on vivait, on mangeait, on priait, cela est étudiable. — Mais, hors la certitude scientifique, il y a la probabilité.

608. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Renan — I »

Renan s’est résumé excellemment quand il a dit : « Spinoza, étant libre-penseur, se regarda comme obligé de vivre en saint. » Aphorisme fort judicieux ! […] vivent les absurdités, les imprudences intellectuelles !

609. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVe entretien. Alfred de Vigny (2e partie) » pp. 321-411

En d’autres termes : vaut-il mieux vivre désarmés devant l’Europe ou désarmés devant soi-même ? […] Par exemple, comme je n’ai que mon épaulette pour vivre, je reprendrai mon bataillon après, c’est mon devoir. […] dans huit jours vous n’y penserez plus, reprit-il avec sa voix enrouée ; c’est quelque chose que d’être seul, allez, dans des temps comme ceux où nous vivons. […] C’est un vilain pays, de tout mon cœur, je vous le dis ; mais moi, qui suis une vieille peau de loup desséchée au soleil, j’y vivrais comme un seigneur. […] Et à présent je ne sais comment vous pouvez croire que je regrette rien, quand je suis avec vous pour vous aider à vivre, ou pour mourir avec vous si vous mourez.

610. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCIXe entretien. Benvenuto Cellini (1re partie) » pp. 153-232

Il me mit aussitôt de l’or et de l’argent entre les mains, et, quand la journée fut finie, il me conduisit à sa maison, où il vivait honnêtement avec une femme fort belle et ses enfants. […] Il était fils d’un Romain qui vivait de ses rentes. […] J’eus plusieurs bombardiers sous mes ordres : il m’assigna une paye et des vivres, et me recommanda de continuer comme j’avais commencé. […] Le cardinal Cornaro m’envoya une quantité de vivres, avec lesquels je me régalai avec mes amis ; ensuite, la nuit étant venue, nous allâmes nous coucher. […] il ne se soucie ni de vivre ni de mourir, et il est plus hardi que lorsqu’il n’était point malade.

611. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXXXIXe entretien. Littérature germanique. Les Nibelungen »

Si vous aimez à vivre, descendez vite de ma barque sur le rivage. […] Elle transporta à l’autre bord en une fois cinq cents hommes et plus avec leur suite, les vivres et leurs armes. […] Aussi longtemps que je vivrai, il n’y aura ni oubli, ni composition, il faut que vous me le payiez tous, s’écria la femme d’Etzel. […] Le Dieu du ciel nous laissera encore vivre heureux quelque temps. […] Hagene et Kriemhilt vivent encore ainsi que Gunther, le roi de Worms, frère de Kriemhilt.

612. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Quelques documents inédits sur André Chénier »

Il semblerait qu’avant ce moment d’explosion publique et de danger où il se jeta si généreusement à la lutte, il vécût un peu en dehors des idées, des prédications favorites de son temps, et que, tout en les partageant peut-être pour les résultats et les habitudes, il ne s’en occupât point avec ardeur et préméditation. […] Ce végétal est mangé par quelque animal ; alors ils se transforment en sang et en cette substance qui produira un autre animal et qui fait vivre les espèces… Ou, dans un chêne, ce qu’il y a de plus subtil se rassemble dans le gland. […] Le jeune homme se perd dans un tas de projets comme s’il devait vivre mille ans. […] si tu ne viens pas seule ici, chaque aurore, Rêver au peu de jours où j’ai vécu pour toi, Voir cette ombre qui t’aime et parler avec moi, D’Élysée à mon cœur la paix devient amère, Et la terre à mes os ne sera plus légère. […] Il y aurait à compléter peut-être, sur plusieurs points, les renseignements biographiques ; quelques personnes qui ont connu André vivent encore ; son neveu, M.

613. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXIe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (2e partie) » pp. 305-367

Mirabeau lui-même, s’il eût encore vécu, n’aurait pu siéger dans le conseil de la Révolution épuré de tous ses talents. […] J’appris qu’il vivait encore, qu’il s’était réconcilié avec l’Église au temps des rétractations, et qu’il était, depuis longues années, curé de la commune de Bessancourt, dans le département de Seine-et-Oise. […] La seconde femme de Danton, qu’il avait épousée à l’âge de quinze ans, vivait à l’époque où j’écrivais les Girondins, et vit, je crois, encore aujourd’hui. […] Fils de royaliste, royaliste moi-même de naissance, de tradition, d’éducation, pendant mes jeunes années, si Robespierre n’était pas mort, mon père n’aurait pas vécu, et toute ma famille aurait été victime de son système de rénovation de la France par l’extermination. […] Il paraissait vivre dans l’aisance, quoique dans la solitude.

614. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIVe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 257-320

Demidoff, le père, qui vivait alors à Florence dans une opulence sans limites, entretenait dans son palais une troupe de comédiens français très distingués, et un orchestre italien réunissait, une fois par semaine, chez lui, tout ce que la cour, la ville et le corps diplomatique renfermaient de spectateurs. […]vivent-ils ? […] Lui et son frère, qui est mort jeune, et qui était mon mari, s’occupaient l’hiver, comme avaient fait leurs pères et leurs oncles, à façonner des zampognes, que les bergers de la campagne de Sienne, des Maremmes et des Abruzzes, leur achetaient dans la saison des moissons, quand ils allaient se louer, pour les récoltes, aux riches propriétaires de ces pays, pour rapporter de quoi vivre l’hiver à la cabane. […] LXV Nous vivions ainsi, monsieur, dans le travail, en santé, en bon accord et en joie, dans notre petit domaine indivis entre nous. […] Nous avions perdu notre gagne-pain en hiver, et mes faibles bras et les bras affaiblis du pauvre Antonio ne suffisaient qu’à peine à cultiver un peu de maïs et de millet, assaisonné de lait de chèvre pour les petits.… Qu’aurions-nous fait sans les châtaignes pour vivre, le pauvre infirme et moi ?

615. (1892) Boileau « Chapitre I. L’homme » pp. 5-43

L’homme s’y peint, avec son caractère original, et comme peu d’écrivains ont été plus sincères que celui-là, on se prépare, en le regardant vivre, à mieux comprendre sa poésie et sa critique. […] Plus tard, on le trouve installé chez Dongois le greffier : il y vivait le jour, et avait pour la nuit une chambre au cloître Notre-Dame chez le chanoine Dreux. […] Il eût cru s’amoindrir et ravaler son art, s’il en avait vécu. […] Racine et Boileau étaient dans la première jeunesse, l’un brûlant de passion, l’autre content de vivre et d’être libre, ami du rire et des malins propos. […] Il vécut pour ainsi dire sur la frontière de la société noble, sans bouder, mais sans s’insinuer, se tenant à sa place, dans son monde, par indépendance tout à la fois et par respectueuse modestie.

616. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre V. Le roman romantique »

Le monde et la vie n’ont pas de sens : et comment vivre sans savoir pourquoi l’on vit ? […] Aurore Dupin commence à écrire vers 1831, lorsque, séparée de son mari, elle doit se procurer des ressources pour vivre. […] Pour solder ses dettes et vivre, Balzac dut produire incessamment. […] Balzac est incomparable aussi pour caractériser ses personnages par le milieu où ils vivent. […] En 1831, elle vient vivre à Paris (cf. p. 943, n. 1).

617. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre I. Le broyeur de lin  (1876) »

J’aspirais à revenir à ma vieille ville sombre, écrasée par sa cathédrale, mais où l’on sentait vivre une forte protestation contre tout ce qui est plat et banal. […] Ces nobles de campagne avaient autrefois certains privilèges qui les aidaient à vivre un peu différemment des paysans ; tout cela s’était perdu avec le temps. […] La pauvre fille vivait ainsi dans une solitude absolue. […] Il est probable que le vicaire ne s’aperçut de rien, tant nos prêtres vivent à cet égard dans le convenu, dans une sorte de résolution de ne pas voir. […]  » Le vieux vécut encore quelques années, mourant peu à peu, toujours renfermé chez lui, ne causant plus avec le vicaire.

618. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Villemain » pp. 1-41

Et il ne le fut pas seulement par ses fonctions officielles à l’Académie, il le fut de plus par le consentement de cette bonne fille d’Opinion publique, qui a parfois un jour de complaisance sur lequel un homme peut vivre aisément… une éternité. […] Quand il ne fut plus jeune (on pourrait même écrire un autre mot), il vécut toujours sur les premiers succès de sa jeunesse et de sa petite jeunesse, comme disait avec tant de grâce M. de Talleyrand. […] Villemain a vécu… et probablement a mieux aimé vivre, car il nous a offert, pendant un demi-siècle, le spectacle de la plus inaltérable et de la plus curieuse prospérité littéraire. […] Les œuvres dont elle est ornée ne sont pas d’une telle splendeur qu’elles puissent faire baisser les yeux à toute une génération, suivie de ses petits, car la renommée de Villemain n’a reçu, il faut bien en convenir, aucune atteinte du temps qu’il a vécu. […] Or, comme la vie des hommes les plus superficiels a beaucoup plus d’unité qu’on ne croit, Villemain est mort comme il a vécu.

619. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Émile Zola »

Zola est trop absolument matérialiste pour n’être pas un démocrate, et surtout quand j’ai vu, dès les premières pages, le héros du livre revenir de Cayenne, d’où il s’est sauvé, pour vivre caché dans ce Paris qui engouffre également tous les crimes et toutes les misères. […] Ce meurt-de-faim et ce-meurt-de-peur, ramassé dans le chemin, aux barrières, par une maraîchère dont la voiture a failli l’écraser, est porté sur des feuilles de chou et des monceaux de navets à la Halle, près de laquelle vivent son frère et sa belle-sœur, ces charcutiers qui sont le grand intérêt du volume de M.  […] Et quelle force plus grande que le catholicisme a jamais gêné davantage la lâcheté des hommes, qui voudraient vivre animalement au courant de leurs sensations ? […] Marat vivait bien dans une cave ! […] Dépravé par son sujet, il parle, en ce roman de L’Assommoir, comme les personnages qui y vivent.

620. (1892) Sur Goethe : études critiques de littérature allemande

qu’est-ce que vivre pour eux ? […] Mais il aida ceux qui ne pouvaient plus vivre à mourir plus doucement. […] Que de temps perdu pour agir et pour vivre ! Et n’est-ce pas vivre qui est la première affaire des vivants ? […] N’importe, il vivra auprès de Lénore, et il accepte.

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