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766. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXI » pp. 87-90

Il y avait ici des circonstances aggravantes : le feuilleton de Janin était léger, inexact, hostile ; la rapidité même avec laquelle on l’a inséré (sans attendre le lundi d’habitude) était une hostilité et une désobligeance de plus ; mais un auteur a toujours mauvaise grâce à venir défendre son ouvrage critiqué et à dire : mon sonnet est fort bon. […] Il affecte de rappeler à Janin le temps où celui-ci logeait rue Madame dans la même maison que Harel et mademoiselle Georges (espèce de ménage établi), et venait en tiers sans troubler l’harmonie parfaite et par manière d’accompagnement. […] Je viens d’apprendre qu’il est décidé que Janin ne répondra pas ; ainsi Dumas va rester dans la position d’un bretteur qui se fend et qui n’a personne vis-à-vis. — La considération de Janin d’ailleurs n’y gagnera pas. — On n’a pas plus d’esprit que lui, mais c’est un mauvais enfant gàté.

767. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires de mademoiselle Bertin sur la reine Marie-Antoinette »

Que les hommes qui vivent dans une révolution, et qui en sont ou spectateurs éclairés ou acteurs principaux, lèguent à la postérité le dépôt fidèle de leurs souvenirs, c’est un devoir que nous réclamons d’eux ; que ceux mêmes qui, dans une situation secondaire, n’ont vu qu’un coin du vaste tableau et n’en ont observé que quelques scènes, nous apportent leur petit tribut de révélations, il sera encore reçu avec bienveillance ; et si surtout l’auteur nous peint l’intérieur d’une cour dans un temps où les affaires publiques n’étaient guère que des affaires privées, s’il nous montre au naturel d’augustes personnages dans cette transition cruelle de l’extrême fortune à l’extrême misère, notre curiosité avide pardonnera, agrandira les moindres détails ; impunément l’auteur nous entretiendra de lui, pourvu qu’il nous parle des autres ; à la faveur d’un mot heureux, on passera à madame Campan tous les riens de l’antichambre et du boudoir : mais que s’en vienne à nous d’un pas délibéré, force rubans et papiers à la main, mademoiselle Rose Bertin, modiste de la reine, enseigne du Trait galant, adressant ses Mémoires aux siècles à venir, la gravité du lecteur n’y tiendra pas ; et, pour mon compte, je suis tenté d’abord de demander le montant du mémoire. […] L’affaire du collier fait la partie principale du livre ; l’auteur était instruite de quelques particularités qui peuvent donner du poids à son témoignage : aussi par moments le ton y devient comme solennel, et c’est là que se trouve l’invocation aux siècles à venir.

768. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bouilhet, Louis (1821-1869) »

Et si bien cela, si fermement, que son heure est venue. […] Les sujets, les entrelacements, les rimes, tous les secrets de la métrique, il les possède ; aussi son œuvre fourmille-t-elle de bons vers, de ces vers tout d’une venue et qui sont bons partout, dans le Lutrin comme dans les Châtiments… On m’objectera que toutes ces qualités sont perdues à la scène, bref, qu’il « n’entendait pas le théâtre !  […] N’importe d’où qu’il vienne, ou de Chine on de France, ceci est assuré que le conte est délicieux et touche au chef-d’œuvre.

769. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre XII. Suite des machines poétiques. — Voyages des dieux homériques. Satan allant à la découverte de la création. »

Soudain, aux regards de Satan se dévoilent les secrets de l’antique abîme ; océan sombre et sans bornes, où les temps, les dimensions et les lieux viennent se perdre, où l’ancienne Nuit et le Chaos, aïeux de la nature, maintiennent une éternelle anarchie au milieu d’une éternelle guerre, et règnent par la confusion. […] Enfin une universelle rumeur, des voix et des sons confus viennent avec violence assaillir son oreille. […] « Esprits de l’abîme, leur dit-il, Chaos, et vous antique Nuit, je ne viens point pour épier les secrets de vos royaumes… Apprenez-moi le chemin de la lumière, etc. » Le vieux Chaos répond en mugissant : « Je te connais, ô étranger !

770. (1761) Salon de 1761 « Peinture — Vien » pp. 131-133

Psyché qui vient avec sa lampe surprendre et voir l’Amour endormi. […] Psyche n’est point cette femme qui vient en tremblant sur la pointe du pied ; je n’aperçois point sur son visage ce mélange de crainte, de surprise d’amour, de désir et d’admiration qui devrait y être. […] Ces gens-là n’ont jamais vu une mère qui vient la nuit voir son enfant au berceau, une lampe à la main, et qui craint de l’éveiller.

771. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre troisième. Découverte du véritable Homère — Chapitre III. Du temps où vécut Homère » pp. 260-263

Les viandes bouillies ne durent venir qu’ensuite, car elles exigent, outre le feu, de l’eau, un chaudron et un trépied ; Virgile nourrit ses héros de viandes bouillies, et leur en fait aussi rôtir avec des broches. Enfin vinrent les aliments assaisonnés. — Homère nous présente comme l’aliment le plus délicat des héros, la farine mêlée de fromage et de miel ; mais il tire de la pêche deux de ses comparaisons ; et lorsqu’Ulysse, rentrant dans son palais sous les habits de l’indigence, demande l’aumône à l’un des amants de Pénélope, il lui dit que les dieux donnent aux rois hospitaliers et bienfaisants des mers abondantes en poissons qui font les délices des festins . — 10. […] Nous pourrions même le rapprocher encore, car Homère parle de l’Égypte, et l’on dit que Psammétique, dont le règne est postérieur à celui de Numa, fut le premier roi d’Égypte qui ouvrit cette contrée aux Grecs ; mais une foule de passages de l’Odyssée montrent que la Grèce était depuis longtemps ouverte aux marchands phéniciens, dont les Grecs aimaient déjà les récits non moins que les marchandises, à peu près comme l’Europe accueille maintenant tout ce qui vient des Indes.

772. (1890) Dramaturges et romanciers

Rivière nous, savons d’où vient l’idée, et par conséquent nous savons où elle va. […] Quel nom je viens d’écrire là ! […] viennent absorber l’attention de la critique. […] Nous venons d’entendre une de ces leçons : éviter à tout prix d’être ennuyeux. […] Augier se trouvait engagé par le succès qu’il venait d’obtenir.

773. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins » pp. 185-304

J’attendis vingt ans les retours de sang-froid ; ils vinrent avec les retours d’accusation, les uns mérités, les autres, selon moi, injustes. […] Il venait d’écrire ainsi sans profondeur, sans philosophie, sans justice, une histoire de la Révolution qui n’était qu’une adulation à la Révolution elle-même. […] Dupin d’un républicain, d’un légitimiste, d’un orléaniste qui viendrait sur le champ de mort de l’empire écroulé, quoi faire ? […] On dit : la vérité viendra tôt ou tard. […] C’étaient les grognards de 1792 et de l’île d’Elbe conjurés contre la royauté qu’ils venaient d’acclamer quelques mois auparavant.

774. (1879) À propos de « l’Assommoir »

Les murs sont tapissés de vieil Aubusson ; le plafond — pareillement un vieil Aubusson  vient du château d’Amboise. […] Mais l’accident de Coupeau vient troubler cette paix, et la dégringolade commence. […] Pourvu que l’odeur n’en vienne. pas jusqu’à nous, qu’importe que le fumier s’élève et pourrisse à nos pieds ? […] c’est le rayon d’idéal qui, vient éclairer notre besogne quotidienne ! […] Le moment est venu où il répondait aux exigences de l’esprit : alors, il a régné sur la scène littéraire.

775. (1866) Nouveaux essais de critique et d’histoire (2e éd.)

Il vient d’un autre monde, et n’a pas de place dans celui-ci. […] Chaque doctrine naissante se crut obligée d’établir qu’elle venait à point, que les circonstances la réclamaient, que les hommes la désiraient, qu’elle venait sauver le genre humain. […] « Il venait presque journellement, dit M.  […] Il vient se jeter à ses pieds et les embrasse. […] L’hiver vint et fut horrible.

776. (1863) Causeries parisiennes. Première série pp. -419

Ce qu’il y a de certain, c’est qu’il n’est pas encore venu. […] Toute femme vient au monde avec son temps pris, sinon occupé. […] Ils viennent du Nord, ils viennent du Midi, ils traversent tous Paris. […] Ils sont venus, ils-sont repartis ; les rois viennent, les rois s’en vont ; c’est tout ce que j’y vois. […] Il paraît que c’est une idée qui n’était encore venue à personne.

777. (1895) Nos maîtres : études et portraits littéraires pp. -360

je n’ai point appris les subtils symbolismes, à l’école d’où je viens. […] parce que serait venu le soir meurtrier. […] Et de là, précisément, lui vient son étrange beauté. […] Et toutes deux il les a servies ; et de là vient que nous l’avons aimé si profondément. […] Il vient à elle, le cavalier rêvé : mais vite il la fatigue, et vite elle l’ennuie.

778. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

Il faut bien en venir pourtant aux hommages littéraires, à commencer par le plus magnifique et le plus royal de tous, celui de Lamartine. […] Nous lisions vos belles pages sur Jean-Jacques, lorsque votre lettre m’est venue. […] si la France venait à être retranchée de la carte, l’univers n’aurait plus ni cœur ni tête ; ce petit recoin pense et agit pour tout le monde. […] Elle venait d’avoir soixante-treize ans. […] Il ne s’agit pas de venir comparer les douleurs ; de rapport exact, de mesure commune entre elles, il n’y en a pas : chacun a tout son poids et tout son aiguillon de celle qu’il porte ; elles n’ont point, hélas !

779. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Appendice à l’article sur Joseph de Maistre »

Cet homme de bien et de bon conseil, que nous ne nommions pas, venait précisément de mourir le 16 juillet dernier, et aujourd’hui un écrivain lyonnais, bien connu par ses utiles et honorables travaux, M.  […] Aujourd’hui c’est M. de Maistre qui vient y joindre à l’improviste son autorité d’écrivain auquel, certes, la verve n’a pas manqué. […] Deplace, du 28 septembre 1818 : « Je reprends quelques-unes de vos idées à mesure qu’elles me viennent. […] Ils sont fort ébahis de ce nouveau système et ont peine à comprendre comment on peut proposer à Rome de nouvelles vues sur le pape : cependant il faut bien en venir là. » Il faut bien ! […] Pourtant quand je parcours ses judicieuses réserves sur Bacon, sur Locke en particulier, si foulé aux pieds par de Maistre, une remarque en sens contraire me vient plutôt à l’esprit, et si j’ai eu tort de l’omettre dans les articles consacrés à l’illustre écrivain, elle trouvera place ici en correctif essentiel et en post-scriptum.

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