Bientôt le style jésuite va montrer dans toute leur difformité les œuvres d’une sensibilité qui a perdu conscience de ses propres manières d’être et se conçoit à l’imitation de modèles dont elle est impuissante à s’approprier l’âme secrète.
C’est par là qu’il se fera pardonner tout ce qu’il a de supérieur, et, par exemple, son style, qui est de premier ordre pour l’envergure, les articulations, la richesse des vocables, et toutes les qualités diaphanes et substantielles des grands maîtres.
Il s’est improvisé le Michaud de leur biographie universelle, et il leur offre à tous, les uns après les autres, deux lignes de son style pectoral.
Ce recueil de vers, fait par un artiste toujours inspiré, n’a pas cependant partout la même valeur poétique, et, je vous en préviens, ce n’est pas de celui qui joue avec son talent et son style et qui, par exemple, a écrit ces fameux : Sonnets gastronomiques, — lesquels ne sont, par parenthèse, que de brillantes et charmantes difficultés vaincues — ce n’est pas de cet artiste que je veux vous parler.
Il aima passionnément les lettres, écrivit l’histoire de son siècle en latin, fut admiré pour le style, peu renommé pour la vérité, plut aux uns, déplut aux autres, et fut accusé tour à tour de flatterie et de satire ; sort presque inévitable de tous ceux qui ont l’ambition et le courage d’écrire de leur vivant ce qui ne peut être écrit avec sûreté que cent ans après.
Ce style gracieux, mais inégal, ces mètres faciles et simples, nous rendent-ils la poésie hardie et savante de celui que les anciens avaient rangé parmi leurs grands lyriques ?
Quant au style, il est ce qu’il peut, il n’est pas formé encore, mais l’esprit va son train tout au travers. […] Je n’ai encore écrit que deux lettres ; mais, comme j’écris sans style, sans manière, sans mesure et sans travail, j’écris à trait de plume… » « À dix-huit milles de Patterdale, Ambleside, le 31. […] Nous revenons au séjour de Benjamin à Colombier ; il y concevait donc son livre sur les religions, il donnait son avis sur les écrits de Mme de Charrière et en épiloguait le style. […] « Pardonnez-moi le style désultoire de ma lettre », écrit-il quelquefois à Mme de Charrière : pour nous, bien plutôt nous l’en remercions. […] Mais comme il ne faut pas défigurer les chefs-d’œuvre des grands maîtres, je veux, avant de me livrer à ce travail, consulter le public et savoir si mon style et mes connaissances dans les deux langues pourront y suffire.
Son style est bref, mais clair et vibrant. […] … — Il me doit tout… Si je ne l’avais pas, rien que par mon style, remis en honneur, qui donc y penserait aujourd’hui ? […] Plusieurs poussèrent la littérature et la psychologie jusqu’à lui dénier toute espèce de talent et toute espèce de style. […] Au milieu de tous les styles, trop lourdement embrumés, ou surchargés d’inutiles détails, dont s’encombrent, à l’ordinaire, les jeunes revues, je remarquai le lien aigu et concis, élégant et sobre, d’une forme presque classique, d’un dessin net et souple ; un style, enfin. […] … Aujourd’hui, avec la liberté de la presse, il n’y a plus de finesse d’écrire, plus de style, plus rien !
Gautier chine son style, si j’ose dire. […] Son style est dans le tour. Et c’est un vrai style, et c’est à lui que Stendhal doit de conserver sa vogue. […] On peut mettre en parallèle, pour le don du grand style, Chateaubriand et Bossuet. […] Un style toujours pur nous est interdit.
La rectitude, l’austérité, la pesanteur, la sécheresse d’imagination des Latins n’ont aucun rapport avec la flexibilité, la liberté, la suavité, l’apparent décousu et la légèreté badine du style attique transporté tout chaud dans la langue de Cicéron et de Lucrèce par ce jeune homme de Venouse, ville de la grande Grèce. […] ses débris l’écraseront sans l’intimider, etc., etc. » Il s’élève dans cette ode stoïque et vertueuse à la hauteur d’Orphée ; l’expression répond à l’âme, le style est d’airain, il brave la foudre. […] Hafiz est amoureux comme Salomon ; il prend ses images et ses couleurs dans la voluptueuse Arabie ; Horace ne les prend que dans ses modèles grecs ; Hafiz est un inspiré de l’amour et de la divinité ; Horace, tout parfait qu’il soit de style, n’est qu’un littérateur accompli de Rome ; le premier, original comme la nature ; le second, académique comme la cour d’Auguste.
Celui du pape Clément XIV plaça Canova dans un style bien différent, mais presque au niveau de Michel-Ange. Nous disons style, et aucun mot n’exprime plus justement l’analogie de la plume avec le ciseau. […] XVI Citons d’abord ici une magnifique exposition des origines logiques de l’architecture et de la sculpture chez les grands peuples artistes de l’univers, par M. de Ronchaud ; on y aura tout de suite un exemple de ce style substantiel sans être lourd, savant sans être pédagogique, brillant sans être verni, qui forme le caractère du jeune écrivain.
Et non seulement son style peindra toujours, mais son rythme même peindra, parce qu’il sera toujours l’enveloppe de son idée ou de son image, pareil à l’argile qui dans les mains du mouleur prend toutes les formes. […] Quant à la poésie du style, en particulier, nous l’avons déjà fait autrefois dans un article inséré dans l’ancien Globe. — Voy. l’Appendice a la suite de ces Discours [De la poésie de style].
De là cette franchise de langage, ce cours naturel de son style, selon l’expression si juste de M. […] Si ce style manque de nerf, s’il n’est pas marqué de ces expressions de génie qui sont comme des pas que fait la langue vers sa perfection, c’est que la source unique de ces expressions est la raison découvrant les vérités générales, et se servant de l’imagination et de la sensibilité pour en donner des images qui demeurent. […] On ne s’attend guère à rencontrer, à cette date, un sentiment si vrai et si profond, exprimé avec la grâce du style de Montaigne.
Envisagée ainsi la critique littéraire n’est plus cet insipide exercice de rhétorique, où l’on distribue le blâme et l’éloge, où l’on donne des prix de composition et où l’on paraphrase sur le Beau en soi, cette splendeur du Vrai, mais une étude de critique matérialiste de l’histoire : dans les pages mortes l’analyste recherche non les beautés du style, mais les émotions des hommes qui les ont écrites et qui les ont lues. […] On ne peut s’expliquer l’exagération du style figuré de Chateaubriand, qui choquait les puristes, si l’on ne possède une idée de la langue courante des journaux et de la tribune13. […] Les néologismes et « les excès du style figuré » de Chateaubriand troublaient sa cervelle académique, au point de lui faire accepter Chactas et Atala pour des sauvages de père et mère et de l’empêcher de distinguer dans « le bon Monsieur Aubry », dans « le dévot Chactas… ce sauvage qui a fui sa rhétorique » et dans « la Zaïre du Meschacébé15 » des personnages de sa connaissance.