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1036. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. FAURIEL. —  première partie  » pp. 126-268

Mme de Staël venait de publier son livre de la Littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales ; elle connaissait peu Fauriel et depuis très-peu de temps seulement. […] Rien ; car ils ne pourraient manquer de s’apercevoir alors que plusieurs opinions, essentiellement philosophiques, sont aujourd’hui consacrées par quelques institutions sociales ; que plusieurs idées journellement attaquées comme des abstractions vides de réalité ne sont que des conséquences plus ou moins immédiates de quelques principes de philosophie devenus des principes de politique. […] Quant au cercle de Mme de Staël, c’était autre chose, c’était la vie sociale dans toute sa diversité et son mélange, le jaillissement et la fertilité des idées dans tout leur éclat. […] Il ne voulait jamais occuper le lecteur de lui-même ; il se proposait uniquement de lui faire connaître le fond des objets et de dérouler à la vue, dans leur réalité obscure et mystérieuse, certains grands moments de décomposition et de transformation sociale, jusqu’à présent mal démêlés. […] Plusieurs historiens modernes ont attribué quelques avantages à ces invasions de races franchement barbares à travers les races latines corrompues ; ils en ont déduit des théories de renouvellement et comme de rajeunissement social moyennant cette espèce de brusque infusion d’un sang vierge dans un corps usé.

1037. (1898) XIII Idylles diaboliques pp. 1-243

Comme l’empire romain jadis, notre groupement social se meurt à la fois de pléthore et d’anémie sous un lacis de fonctionnaires inféodés à quelques gros mangeurs qui absorbent la vie de la race. […] Par ainsi nous élaborons le milieu sain où les causes de destruction et d’amollissement seront amoindries, où les déchets sociaux deviendront rares, où l’espèce pourra fournit à la sélection le plus grand nombre possible d’individus capables d’évoluer en vigueur vers un idéal encore plus haut. […] Il a exercé mon jugement et ma volonté ; et lorsqu’il m’a trouvé apte à jouer, dans la comédie sociale, le rôle pour lequel j’étais marqué, il m’a laissé continuer mon évolution tout seul, sachant que je ne dévierais pas, désormais, de la voie qu’il était en moi de suivre… Je lui ai donné beaucoup de mal, — sans doute autant que vous. […] Et puis le régime républicain assure à tous le vivre, le couvert et une équitable répartition des charges sociales. […] Laissez-moi parler… Le système social est établi de façon à sauvegarder le fruit de vos rapines.

1038. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Les nièces de Mazarin et son dernier petit-neveu le duc de Nivernais. Les Nièces de Mazarin, études de mœurs et de caractères au xviie  siècle, par Amédée Renée, 2e éd. revue et augmentée de documents inédits. Paris, Firmin Didot, 1856. » pp. 376-411

Le duc de Nivernais était, en effet, plus propre que personne à servir d’exemple ; à une époque où l’on se piquait avant tout d’être, non pas féroce, mais ce qu’on appelait un homme aimable et même un petit-maître, et en l’étant lui-même, il n’avait rien négligé de ce qui orne intérieurement l’esprit, il se préparait à devenir insensiblement raisonnable ; il savait toutes les langues vivantes, il lisait les auteurs étrangers et en tirait des imitations faciles ; il ne songeait qu’à embellir, à égayer honorablement une grande et magnifique existence, et, sans le savoir, il ménageait à son âme des consolations imprévues pour son extrême vieillesse, dans la plus violente crise sociale qui ait assailli les hommes civilisés. […] Ses opinions étaient modérées, éclairées, favorables à une amélioration sociale continue, et empreintes d’une philanthropie sincère : il exprimait bien la douce civilisation de Louis XVI.

1039. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME GUIZOT (NEE PAULINE DE MEULAN) » pp. 214-248

Quant au lien général et aux lois métaphysiques, il ne s’y aventure pas ; il est plus de tact que de doctrine, particulièrement occupé de l’homme civilisé, de l’accident social, et il s’en tient dans ses énoncés à quelques rapprochements pour lui manifestes, sûr, après tout, que les choses justes ne se peuvent jamais contrarier entre elles. […] Le livre de Mme Guizot restera après l’Émile, marquant en cette voie le progrès de la raison saine, modérée et rectifiée de nos temps, sur le génie hasardeux, comme en politique la Démocratie de M. de Tocqueville est un progrès sur le Contrat social.

1040. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Hugo, Victor (1802-1885) »

Chacun de ses ouvrages signale un perfectionnement très sensible dans l’instrument littéraire ; mais tous, pourtant, sont empreints d’un commun caractère : ils procèdent plutôt de la pensée solitaire et recueillie, écoutant au-dedans d’elle-même les voies confuses de la rêverie et de l’imagination, que d’un besoin logique de systématiser sous la forme épique et dramatique les développements d’une passion observée dans la vie sociale ou d’une anecdote compliquée d’incidents variés. […] Leconte de Lisle Quelles que soient les causes, les raisons, les influences qui ont modifié sa pensée ; bien qu’il se soit mêlé ardemment aux luttes politiques et aux revendications sociales, Victor Hugo est, avant tout, et surtout, un grand et sublime poète, c’est-à-dire un irréprochable artiste, car les deux termes sont nécessairement identiques.

1041. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Victor Hugo »

Mais quant à la moralité de ce livre, dans lequel tout ce que le monde respecte à juste titre : les grandeurs sociales, les pouvoirs, les royautés, les aristocraties, les religions, les législations sévères, tout ce qui fut l’honneur de l’Histoire, est insulté, — systématiquement et résolument insulté, — je n’hésiterai point à dire qu’elle est basse. […] Les sentiments de l’envieux social, les flatteries aux peuples et même aux canailles, — cette aristocratie renversée des peuples, — par ce flatteur de tous les gouvernements, les uns après les autres, et à qui il ne restait plus qu’à flatter cela aussi pour être complet, circulent et respirent dans toutes les pages de ce roman, qui n’est peut-être qu’un prétexte à déclamations pourpensées au lieu d’être un livre d’imagination de bonne foi… Ah !

1042. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le président Jeannin. — II. (Suite.) » pp. 147-161

Villeroi, comme médecin social, a le sentiment juste des crises, des situations et des bons instants qu’il importe de saisir : Monsieur, dit-il en s’adressant à M. de Bellièvre dans son Apologie, c’est grande imprudence de perdre l’occasion de servir et secourir le public, principalement quand elle dépend de plusieurs ; car il advient rarement qu’elle se recouvre, parce qu’il faut peu de chose à faire changer d’avis à une multitude.

1043. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Mélanges de critique religieuse, par M. Edmond Scherer » pp. 53-66

Lamennais, en prédisant un tel renouvellement social, a l’air de s’oublier, il ne s’oublie pas ; car il est le précurseur, le saint Jean-Baptiste, ou le saint Jean évangéliste de cette révélation nouvelle, il est la trompette éclatante, et pour qui ne hait rien tant que le silence, c’est là un rôle assez grand.

1044. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. (suite.) »

Ç’a été de tout temps l’office de la poésie d’enregistrer un à un chaque bienfait social universel.

1045. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Frochot, Préfet de la Seine, histoire administrative, par M. Louis Passy. »

Je m’engage, sous la responsabilité de ma tête, à les démentir. » Telle alors, dans cette crise sociale, se montra plus d’une femme de cœur sous l’inspiration même du péril : s’il y eut bien des furies, il y eut aussi partout des Romaines et des héroïnes.

1046. (1875) Premiers lundis. Tome III « Sur le sénatus-consulte »

Il faut bien se dire qu’il devra y avoir par tout le corps social, par toute la machine administrative de haut en bas et jusque dans les dernières branches, circulation d’un même esprit, d’une même intention, sans quoi tout ira mal, sans concert, avec décousu et tirage en sens inverse, comme ce qui s’est fait précédemment, comme ce qui se fait encore tous les jours.

1047. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre II. De l’ambition. »

Une révolution suspend toute autre puissance que celle de la force ; l’ordre social établit l’ascendant de l’estime, de la vertu : les révolutions mettent tous les hommes aux prises avec leurs moyens physiques ; la sorte d’influence morale qu’elles admettent, c’est le fanatisme de certaines idées qui n’étant susceptible d’aucune modification, ni d’aucune borne, sont des armes de guerre, et non des calculs de l’esprit.

1048. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre III. De la vanité. »

Une femme ne peut exister par elle ; la gloire même ne lui servirait pas d’un appui suffisant, et l’insurmontable faiblesse de sa nature et de sa situation dans l’ordre social, l’a placée dans une dépendance de tous les jours dont un génie immortel ne pourrait encore la sauver.

1049. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre VII. Induction et déduction. — Diverses causes des faux raisonnements »

C’est la source de beaucoup de faux raisonnements : comme lorsque, sous le prétexte de l’égalité naturelle de tous les hommes, on prétend abolir toutes les inégalités et même toutes les différences sociales.

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