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1275. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Appendice. Discours sur les prix de vertu »

On affectait de ne voir dans l’estimable fondateur, lorsqu’on sut son nom, qu’un homme de gloriole, un courtisan du public, à l’affût de tous les petits succès. […] Loin de moi les phrases pompeuses, lors même que j’en saurais faire ! […] Je sais aussi de sa domestique, qui le sert depuis quarante ans, qu’elle lui a donné tous ses gages pour l’aider dans une heure de détresse au sujet d’un payement. » Voilà une domestique qui pourrait aussi être proposée pour un prix de vertu. […] à ces guerriers noblement ambitieux qui auraient bien voulu entrer, enseignes déployées, dans une capitale conquise, mais qui, faute de ce complet triomphe, savent s’arrêter et signer la paix après une victoire. […] Ceux-là, ils ressemblent à de sages diplomates qui savent concéder ce qui convient à l’esprit d’une époque, ce que l’opinion réclame, et qui estiment après tout qu’une trêve à très longue échéance équivaut à une bonne paix.

1276. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [IV] »

Il serait curieux de savoir en quels termes : le dossier du Dépôt de la guerre est des plus minces pour cette période, et muet sur ce qui nous intéresse. […] On sait quelle importance l’Empereur attachait à ces états de situation ; il ne s’endormait jamais sans les lire. […] Était-ce une raison pour qu’à l’épreuve il ne sût point conduire une troupe au feu ? […] On lui attribua ainsi qu’à Moreau un principe que les Alliés parurent s’être fait dès ce moment, à savoir, de combattre le moins possible Napoléon en personne, mais d’attaquer partout ses lieutenants en son absence. […] Les Français, ceux qui n’ont habité que la France, ne savent pas ce que c’est que la Suisse ni qu’un Suisse.

1277. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. DE BALZAC (La Recherche de l’Absolu.) » pp. 327-357

Crébillon fils en son temps eut aussi une telle prise sur l’imagination de certaines femmes, qu’une jeune dame anglaise, dit-on, s’affolant de lui après une lecture de je ne sais quel roman, accourut tout exprès pour l’épouser. […] En un mot, cet en est partout employé à faux par M. de Balzac ; il y trouve je ne sais quelle particulière douceur, et l’introduit jusque dans certaines locutions qui n’en ont que faire. […] Heureux qui, dans sa vie laborieuse et du fond mélangé de ses œuvres, sait réaliser un peu d’or pur ! […] Je lui avais rendu autrefois quelques petits services littéraires, des conseils pour ses romans, pour son style, que sais-je ? […] Je sais une femme qui a pour mari un homme de génie ou qu’elle croit tel (ce qui revient au même), et dont elle craint de n’être pas assez aimée ; cette femme a été séduite à Balzac par Mme Claës.

1278. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mémoires sur la mort de Louis XV »

On n’en savait qu’imparfaitement des nouvelles, et par celles qui transpiraient on jugeait le roi seulement incommodé d’une légère indisposition. […] Il savait qu’il lui déplaisait et, sans s’en embarrasser, il n’agissait pas plus contre elle qu’en sa faveur. […] J’ai bien plus joui depuis, quand j’ai su le vrai motif de sa conduite, d’avoir empêché la visite qu’il voulait favoriser. […] Ceux-ci sortirent de la chambre du roi, et l’annoncèrent à la famille royale en disant qu’enfin on savait ce qu’était la maladie, qu’elle était bien connue, que le roi était préparé à merveille, et que cela irait bien. […] On ne voyait point dans Paris de gens inquiets courir, s’empresser, s’arrêter, pour savoir de ses nouvelles.

1279. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIII. La littérature et la morale » pp. 314-335

L’une soutient que la littérature, ayant pour but unique le beau et ainsi sa fin en elle-même, n’a rien à voir avec la morale, n’a nullement à se soucier de savoir si elle pousse au bien ou au mal. […] Mais l’historien n’a point à faire un choix entre ces conceptions diverses ; il aura rempli tout ce qu’on est en droit d’attendre de lui, s’il a su relever les effets littéraires différents qui en découlent. […] On sait après cela quels livres ont influé sur un groupe d’esprits et en quel sens ils ont agi. […] Je sais des contes dévots abondants en scènes scabreuses qui jurent étrangement avec l’intention et les conclusion édifiantes. […] Reste à savoir en quels cas et en quelle mesure ces forces font du bien ou du mal.

1280. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Roederer. — III. (Fin.) » pp. 371-393

Sachons que Roederer était aidé dans l’application par Delambre et par Cuvier. […] Je sais toujours la position de mes troupes. […] S’il n’y a personne pour faire de la poudre à canon, je sais la fabriquer ; des affûts, je sais les construire ; s’il faut fondre des canons, je les ferai fondre ; les détails de la manœuvre, s’il faut les enseigner, je les enseignerai. En administration, c’est moi seul qui ai arrangé les finances, vous le savez… Il y a des principes, des règles qu’il faut savoir… Moi, je travaille toujours, je médite beaucoup. […] On ne saurait se dissimuler qu’il a une façon dépenser particulière, une tournure métaphysique portée dans les choses, un goût de paradoxe ingénieux : ç’a été la forme de son esprit.

1281. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — II » pp. 112-130

M. d’Argenson désirait depuis longtemps savoir avec précision vers quoi on le voulait diriger, afin de s’y préparer et de se rendre digne de l’emploi par l’étude approfondie et le travail : il était de cette nature d’esprits probes qui n’aiment à traiter et à raisonner des choses qu’après s’en être instruits à fond. […] La louange me déconcerte encore plus que le blâme ; je peux me retrancher dans quelque retour favorable contre le blâme, mais à la louange je ne sais plus comment soutenir cela. […] Il n’a pas médité un moment le bien public ; il y a toujours apporté de l’indifférence ; il n’en a pris que quelques traits par-ci par-là, chez les uns et chez les autres, comme je sais quelques racines grecques que j’ai prises je ne sais où. […] Ils en savent jusque-là, que l’amour, vient d’estime. […] J’ai vu alors chez lui une joie maligne et vive, quoiqu’il soit de mes amis ; le bon air aujourd’hui est de se réjouir de l’incommodité des autres, et de s’attrister de leur bien’être. » On ne saurait un meilleur commentaire à Gresset.

1282. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Benjamin Constant. Son cours de politique constitutionnelle, ou collection de ses divers écrits et brochures avec une introduction et des notes, par M. Laboulaye »

Mais il s’agit aujourd’hui de Benjamin Constant, et de savoir si, en remettant en lumière ses écrits, c’est bien une résurrection qu’aura opérée M.  […] On en sait aujourd’hui sur son compte autant que sur celui de Chateaubriand, et par des témoignages écrits de sa main. […] Je ne savais donc trop que faire de mon enthousiasme pour la République. » On n’est pas plus spirituel. […] Je ne sais quoi, à son approche, glaçait l’enthousiasme. […] Je ne savais pas, quand je parlais ainsi, qu’indépendamment de son Introduction toute théorique, M. 

1283. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [II] »

oui, je sais ! […] On sait l’affreuse difficulté de cette bataille, où l’on donna en plein dans une armée solide, déterminée à une défense offensive et munie d’une artillerie supérieure. […] On ne savait encore qui était vainqueur, ni même s’il y avait un vainqueur, et qui ferait retraite le lendemain. […] Quoique mon cheval fût hors d’état d’avancer même au pas, je savais l’impossibilité de faire aucune objection ; je partis. […] Restait la difficulté de savoir quelle route suivre.

1284. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. J. J. AMPÈRE. » pp. 358-386

Mais ce que savaient les auditeurs assidus, les témoins et les juges les plus rapprochés de l’enseignement de M. […] Ampère le savent), elle n’a jamais péri. […] On a dit quelque part que le poëte, c’est celui qui ne sait pas, mais qui devine, qui sent et qui rend. […] Ampère, on retrouve à tous moments celui qui devine sous celui qui sait. […] Il avait su l’être également, après M.

1285. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Le comte de Ségur »

On sait l’attitude inaltérable de Lauzun au pied de l’échafaud, celle de Narbonne au milieu des rigueurs fameuses de cette retraite glacée. […] M. de Ségur sait nous intéresser à ce jeu dont il nous montre au doigt point par point le dessous ; il en ranime à ravir dans son récit le divertissement et les mille circonstances. […] On sait que la glorieuse impératrice n’avait pas seulement des pensées hautes, et qu’elle conserva jusqu’au bout le don des caprices légers. […] Je ne sais qui a dit de Nicole qu’il réussissait particulièrement dans les sujets moyens qui ne fourniraient pas tout à fait la matière d’un sermon. […] Il sait le mal, mais il y glisse plutôt que d’enfoncer, et il vous incline au mieux, au possible.

1286. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre I. Roman de Renart et Fabliaux »

On y trouve tous les dialectes, depuis le pur picard jusqu’à je ne sais quel jargon italianisé, toutes les sortes de tons et d’esprits comme tous les degrés du talent. […] L’esprit sous toutes ses formes, dans tous ses emplois, industrie, adresse, ruse, mensonge, charlatanisme, hypocrisie, sophisme, que sais-je encore ? […] Renart, le héros de toute l’œuvre, ce génie malfaisant, est glorifié en somme parce qu’il sait éluder les conséquences de ses méfaits. […] Bon nombre sont anonymes ; des auteurs qu’on connaît, sauf Rutebeuf, on ne sait rien que le nom, et souvent le pays d’origine ; ils sont Français. […] Ils ont su esquisser un vilain, faire parler une commère : surtout, et c’est par là qu’ils ont donné l’illusion de la vérité, ils ont eu le sens des mœurs d’exception et des mœurs ignobles.

1287. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre douzième. »

Puis il s’élève un mortel privilégié, à qui Dieu donne l’instinct qui devine que cette matière est prête, et le génie qui sait la façonner. […] C’est à lui, en effet, qu’il faut faire honneur d’avoir su le premier présenter la morale sous la forme d’un genre ou d’un art. […] Qui sait ? […] Si, par vanité ou faute d’esprit, nous ne savons pas l’y trouver, nos amis s’en chargeront. […] Je défierais le critique le plus exercé, s’il ne sait pas l’endroit de mémoire, de reconnaître à qui appartient une pensée exprimée en perfection.

1288. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « La duchesse du Maine. » pp. 206-228

Cette révolution que La Bruyère faisait ainsi entrevoir sous forme d’un accord à l’amiable et d’une transaction, n’a pas été si paisible, on le sait. […] Pour l’excellence du langage, pour l’esprit, pour l’avidité de savoir, elle s’annonça de bonne heure ; elle avait, comme son frère, des étincelles de l’esprit du grand aïeul. […] Il trouva cette coterie à Sceaux, et, à force de mouvement et d’invention, il sut la remplir, durant plus de vingt-cinq ans, de l’idée de son mérite et de sa sublimité. […] Elle combinait on ne sait trop comment la dévotion avec toutes ses pratiques galantes, bucoliques et mythologiques. […] Malgré ce goût de l’esprit et des gens qui en avaient le plus, on ne saurait dire pourtant que l’influence de la cour de Sceaux ait été profitable aux lettres, ni qu’elle ait rien inspiré.

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