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506. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers. (Tome XII) » pp. 157-172

On lit dans une lettre de Napoléon à Berthier, du 19 septembre 1810 : Mon cousin, faites partir demain un officier porteur d’une lettre pour le prince d’Essling, dans laquelle vous lui ferez connaître que mon intention est qu’il attaque et culbute les Anglais ; que lord Wellington n’a pas plus de 18000 hommes dont seulement 15000 d’infanterie, et le reste de cavalerie et d’artillerie ; que le général Hill n’a pas plus de 6000 hommes d’infanterie et de cavalerie ; qu’il serait ridicule que 25000 Anglais tinssent en balance 60000 Français, etc. On comprend ce que ce mot de ridicule a ici de poignant ; ce fut le coup d’éperon qui fit partir Masséna.

507. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Louis XIV et le duc de Bourgogne, par M. Michelet »

Sa raillerie était d’autant plus cruelle qu’elle était plus spirituelle et plus salée, et qu’il attrapait tous les ridicules avec justesse. […] … Ce je ne sais quoi veut et ne veut pas ; il menace, il tremble ; il mêle des hauteurs ridicules avec des bassesses indignes.

508. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Daphnis et Chloé. Traduction d’Amyot et de courier »

Un merveilleux mythologique assez ridicule vient terminer le seul incident qui sépare les jeunes aidants… » Il n’y a rien précisément de ridicule dans le merveilleux mythologique si ingénieusement imaginé et si bien adapté à l’action.

509. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Poésies, par Charles Monselet »

Le caractère de Monselet, dès ses débuts, c’est le goût du naturel, un vif sentiment du ridicule. […] La Harpe a eu bien des querelles fâcheuses, il a eu des ridicules : il n’a pas fait de choses basses ; il est honnête, il est respectable, et le petit homme, quand il a parlé de ce qu’il savait, a été un maître. — Notre lignée, à nous critiques français, c’est Bayle, Despréaux ; au besoin j’y mettrais cent fois La Harpe plutôt que Fréron : celui-ci jamais.

510. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre X. De la littérature italienne et espagnole » pp. 228-255

Rien ne devait plaire davantage aux Italiens, que ce ridicule piquant jeté sur toutes les idées sérieuses et exaltées de la chevalerie. […] Leurs comédies ont beaucoup de cette gaieté bouffonne qui tient à l’exagération des vices et des ridicules ; mais on n’y trouve point, si l’on en excepte quelques pièces de Goldoni, la peinture frappante et vraie des vices du cœur humain, comme dans les comédies françaises.

511. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre premier. De l’amour de la gloire »

Ceux qui sous un tel ordre de choses sont nés dans la classe privilégiée, ont à quelques égards beaucoup de données utiles ; mais d’abord la chance des talents se resserre, et à proportion du nombre, et plus encore, par l’espèce de négligence qu’inspirent de certains avantages ; mais quand le génie élève celui que les rangs de la monarchie avaient déjà séparé du reste de ses concitoyens, indépendamment des obstacles communs à tous, il en est qui sont personnels à cette situation ; des rivaux en plus petit nombre, des rivaux qui se croient vos égaux à plusieurs égards, se pressent davantage autour de vous, et lorsqu’on veut les écarter, rien n’est plus difficile que de savoir jusqu’à quel point il faut se livrer à la popularité, en jouissant de distinctions impopulaires ; il est presqu’impossible de connaître toujours avec certitude le degré d’empressement qu’il faut montrer à l’opinion générale : certaine de sa toute puissance, elle en a la pudeur, et veut du respect sans flatterie ; la reconnaissance lui plaît, mais elle se dégoûte de la servitude, et rassasiée de souveraineté, elle aime le caractère indépendant et fier, qui la fait douter un moment de son autorité pour lui en renouveler la jouissance : ces difficultés générales redoublent pour le noble, qui dans une monarchie veut obtenir une gloire véritable ; s’il dédaigne la popularité, il est haï : un plébéien dans un État démocratique, peut obtenir l’admiration en bravant la popularité ; mais si un noble adopte une telle conduite dans un État monarchique, au lieu de se donner l’éclat du courage, il ne ferait croire qu’à son orgueil ; et si, cependant, pour éviter ce blâme, il recherche la popularité, il est sans cesse près du soupçon ou du ridicule. […] Mais non, pourrait-on dire, le jugement de la multitude est impartial, puisqu’aucune passion envieuse et personnelle ne l’inspire ; son impulsion toujours vraie, doit être juste ; mais par cela même que ces mouvements sont naturels et spontanés, ils appartiennent à l’imagination ; un ridicule détruit à ses yeux l’éclat d’une vertu ; un soupçon peut la dominer par la terreur ; des promesses exagérées l’emportent sur des services prudents, les plaintes d’un seul, l’émeuvent plus fortement que la silencieuse reconnaissance du grand nombre ; enfin, mobile, parce qu’elle est passionnée ; passionnée, parce que les hommes réunis ne se communiquent qu’à l’aide de cette électricité, et ne mettent en commun que leurs sentiments ; ce ne sont pas les lumières de chacun, mais l’impulsion générale qui produit un résultat, et cette impulsion, c’est l’individu le plus exalté qui la donne.

512. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Notes sur l’Ancien-Régime »

Elle vaut donc environ 300 000 livres Remiremont, dont l’abbesse est toujours une princesse du sang royal, l’un des monastères les plus puissants, les plus riches, les plus amplement dotés, est évalué officiellement au chiffre ridicule de 15 000 livres. […] (Telle est) l’éducation ridicule à tant d’égards que reçoivent en général les personnes de ce rang ; dès leur enfance, toujours suivies, aidées, escortées, prévenues, (elles) sont ainsi privées de la plus grande partie des facultés que leur a données la nature. » (Mme Campan, Mémoires, I, 18, 28.)

513. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre I. La lutte philosophique »

Le Parlement n’avait guère plus de force conservatrice que l’épiscopat : le zèle aveugle de ses magistrats le discréditait sans sauver la religion ni la société ; les Gilbert de Voisins, les Omer de Fleury, les Séguier, toujours prêts à requérir contre les Lettres anglaises, l’Encyclopédie, le Bélisaire, l’Emile, comme contre l’inoculation, le jésuitisme et l’ultramontanisme, avilirent leur compagnie par le ridicule qui s’attache aux violences impuissantes ; ils décuplèrent la puissance des œuvres qu’ils faisaient brûler au pied du grand escalier de leur palais. […] L’excellent Pompignan, le poète, ne réussit qu’à se faire donner un ridicule immortel, universel.

514. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Oscar Wilde à Paris » pp. 125-145

La crainte du ridicule les paralyse. […] Alcibiade, chez les Grecs, et Pétrone, chez les Romains, avaient essayé de remonter un courant de vulgarité, mais pour que cet état d’esprit, que l’on a nommé le dandysme, prît toute sa valeur et sa force cohésive, il y fallait des conditions spéciales et la mentalité singulière d’un peuple qui se fait gloire d’une vertu que Stendhal juge d’un ridicule stupide et dont Remy de Gourmont se moquait avec tant d’insistance.

515. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Mme de Graffigny, ou Voltaire à Cirey. » pp. 208-225

À table, Mme de Graffigny nous le fait voir charmant, attentif, servi d’ailleurs en prince, avec ses laquais et son valet de chambre derrière son fauteuil : Son valet de chambre ne quitte point sa chaise à table, et ses laquais lui remettent (au valet de chambre) ce qui lui est nécessaire, comme les pages aux gentilshommes du roi ; mais tout cela est fait sans aucun air de faste, tant il est vrai que les bons esprits savent en toute occasion conserver la dignité qui leur convient, sans avoir le ridicule d’y mettre jamais de l’affectation. […] Mme de Graffigny, qui voit bien tous les ridicules, apprécie en femme d’esprit ce bonheur-là.

516. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Observations générales, sur, l’art dramatique. » pp. 39-63

La tragédie partage avec l’épopée la grandeur et l’importance de l’action, et n’en diffère que par le dramatique seulement ; elle imite le beau, le grand ; la comédie imite le ridicule ; l’une élève l’âme et forme le cœur, l’autre polit les mœurs et corrige les dehors. […] La fable de la comédie consiste dans l’exposition d’une action prise de la vie ordinaire, dans le choix des caractères, dans l’intrigue, les incidents, etc., au moyen desquels on parvient à faire sortir le ridicule d’un vice quelconque, si le sujet est vraiment comique, ou à développer, divers sentiments du cœur, si le sujet n’est pas véritablement comique.

517. (1765) Essais sur la peinture pour faire suite au salon de 1765 « Paragraphe sur la composition ou j’espère que j’en parlerai » pp. 54-69

Rendre la vertu aimable, le vice odieux, le ridicule saillant, voilà le projet de tout honnête homme qui prend la plume, le pinceau ou le ciseau. […] Mais si nous avons permis à l’artiste de dépouiller ses figures, n’ayons pas la barbarie de l’asservir à un costume ridicule et gothique.

518. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « I »

Au surplus, mon titre n’était pas si ridicule, puisque mes contradicteurs eux-mêmes l’adoptent. […] Je n’entends rien, selon lui, à la littérature, ni à la critique, ni au roman ; mes œuvres sont nulles et mes théories ridicules.

519. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Le théâtre annamite »

Ceux-là du moins ne sont que des brutes ; ils ne sont pas ridicules.

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