Il y a ainsi à dire que l’intelligence exclusivement étalée décolore le monde, en refroidit le tableau et est trop sujette à le réfléchir par les aspects analogues à elle-même, par les pures abstractions et idées qui s’en détachent comme des ombres. […] M. de Rémusat, le plus doctrinaire assurément des rédacteurs du Globe par la subtilité de son esprit, par ses habitudes et ses liens de société, ne toucha longtemps que des sujets de pure littérature et de poésie ; ce qu’il faisait avec une souplesse bien élégante. […] Thiers, au début du National, développait sa théorie constitutionnelle, et venait professer Delorme comme résumé de son Histoire de la Révolution, ces articles ingénieux étaient regardés comme de purs jeux de forme et des fictions un peu vaines au prix de la grande question populaire et sociale ; et ce n’était pas M. […] Le psychologiste pur me fait l’effet du pêcheur à la ligne, immobile durant des heures dans un endroit calme, au bord d’une rivière doucement courante.
Il était grand et mince comme ceux qui ne tiennent au sol que par l’extrémité inférieure, les pieds, et qui semblent prêts à s’élever dans l’atmosphère ; il ne lui manquait de l’esprit pur que les ailes ; sa tête oblongue avait l’organe du spiritualisme pieux, une proéminence visible au sommet du crâne, cette coupole intérieure où les spiritualistes contemplent et adorent d’instinct la divinité de leur pensée. […] Je le voyais tous les jours ; il donnait, par pur intérêt de cœur, à ma santé encore frêle les soins d’une mère plus que d’un médecin. […] Nous montâmes plus haut faire aussi nos vendanges De rêves purs à l’âme et d’air sain aux poumons ; C’est que la poésie est une vigne d’anges, Qui mûrit et qu’on cueille à la cime des monts. […] Son visage, dont tous les délinéaments étaient nets, purs, minces, transparents comme un camée, avait la délicatesse d’une miniature ; mais il était sévère comme une pensée.
Il faut les chercher dans la solitude ; c’est là que naissent ces grandes passions, entre ciel et terre, telles que celles que nous avons à vous signaler dans cette âme appelée je ne sais comment dans la langue des purs esprits, appelée ici-bas Louis de Ronchaud. […] ce présent n’a qu’un jour ; ils habitent, dans la permanence de leurs pensées, avec les immortels de l’histoire et de l’art ; ils sont contemporains de tous les passés et de tous les avenirs ; ils sont les abstractions supérieures de notre infime personnalité ; ce qu’ils habitent le moins, c’est notre terre : leur conversation, comme dit l’Apôtre, est avec les esprits invisibles ; purs esprits eux-mêmes, ils sont imperméables à nos misères de fortune ou de vanité. […] les unes pures comme l’idéal, les autres descendant comme des étoiles trop près de terre, qui filent en s’éteignant dans nos horizons ? […] Il semble que des rayons du pur soleil d’Attique pénètrent de toute part ce style, comme il pénètre, au lever du jour, les marbres translucides du Parthénon pour les faire descendre dans l’œil fasciné du voyageur ignorant comme moi, et pour les faire exclamer d’enthousiasme : Voilà le vrai, voilà le beau, voilà la divinité des lignes, voilà l’habitation des dieux sur la terre !
Nous n’avons pas de poète chez qui l’amour soit plus pur de galanterie comme d’exagération romanesque, soit plus l’amour, pour tout dire. […] Ce que le poète, dans ces prouesses d’art pur, laisse échapper de sentiments délicats et d’aperçus fins sur la vie morale, fait regretter qu’il n’ait pas eu plus souvent besoin de tourner du dehors au dedans un œil qui voit si bien, et qu’il ait semblé parfois se servir de l’art, comme les Orientaux de l’opium, pour se dérober aux souffrances de la pensée. […] L’esprit se sent élevé par ces pures créations de l’art, alors même que le bon sens s’étonne de ce qui s’y mêle de critiques spécieuses contre des usages et des croyances que respectent tous les honnêtes gens. […] Arrivé au terme de cette trop rapide revue, la gloire de mon temps m’attire vers d’autres côtés, et je me sens pris d’un dernier doute sur le mérite d’un plan qui me force d’omettre tout ce qui n’est pas de pure littérature.
Dans le domaine de la science pure, la chose est assez rare. […] L’appréciation des œuvres littéraires ou artistiques, qui est affaire de goût personnel, varie et ne peut cesser de varier d’un individu à un autre ; mais ce qui est affaire de science, pure question de fait, je veux dire l’analyse des caractères qui distinguent un ouvrage, le relevé des rapports qui l’unissent aux choses du même temps, voire même la connaissance des causes qui font varier d’une époque à l’autre le genre de beauté à la mode, tout cela s’élève lentement au-dessus de la discussion. […] La littérature pure n’a pas non plus échappé à cette féconde invasion de la science. […] Un style clair, qui vaut surtout par la logique, la précision des lignes, l’enchaînement serré des idées, qui n’admet guère que des épithètes abstraites et générales ; un théâtre où les personnages sont comme détachés de leur milieu et se meuvent dans un cadre vague, indéterminé, où ils se présentent presque comme de purs esprits dont les pensées et les sentiments méritent seuls l’attention ; des tragédies simples ; d’une structure rigide et géométrique, d’une sobriété de mise en scène qui montre qu’elles s’adressent à l’âme, non aux sens ; une littérature qui se concentre tout entière dans l’étude, de l’homme civilisé, qui ne daigne ou ne sait pas voir le reste de l’univers, qui ne connaît pas la campagne, qui soumet l’imagination, « la folle du logis », aux commandements de la raison, qui marche à pas comptés, d’une allure méthodique et posée.
Née d’une accumulation de phrases synonymiques qu’elle couronnait et résumait, prise comme un substitut de représentations directes possibles mais ternes, employée à la tâche de plus en plus difficile et de moins en moins réussie de figurer matériellement des idées plus obscures parce que plus creuses, elle finit par devenir le vêtement de purs fantômes intellectuels, à qui elle prête seule une existence apparente. […] Ce sont dans ces romans la Dea, de l’Homme qui rit, toute pureté, la duchesse Josiane, toute frivolité charnelle, Birkilphedro le perfide ; dans les Travailleurs, l’hypocrite Clubin, le noble Gilliatt ; dans les Misérables, Cosette, pure amante, Marius, le jeune premier type ; dans Quatre-vingt-treize, le marquis de Lantenac, Cimourdain, « l’effrayant homme juste » ; dans les drames, tous les amoureux d’Hernani à Sanche, et de Dona Sol à Rosa, tous les vieillards de Don Ruy à Frédéric de Hohenstaufen, plus quelques fourbes sans alliage. […] Hugo porte dans sa conscience non plus des pensées, mais de purs mots ; tout deviendra clair. […] Dans tous les précédents paragraphes, nous avons tenu tacitement pour acquis que la pensée pure de M.
Artistes en mots, et, puisque nous avons écrit ce mot-là, modistes de phrases, l’un est la modiste pur sang, l’autre n’est que l’industrielle. […] Pindare, en effet, n’est qu’un poète de rhétorique pure, qui a trouvé dans Villemain un critique de rhétorique, d’une rhétorique aussi complète que la sienne ; et le rhéteur en prose, qui s’est cru ému ou qui a voulu faire croire qu’il l’était, a rendu hommage, comme il le devait du reste, à son prince, le rhéteur en vers. […] C’est un livre qui, grâce à la renommée de son auteur, est bien heureux d’avoir sa place dans la publicité, car, s’il ne l’avait point, il ne se la ferait pas… Il est écrit comme Villemain sait écrire, de cette longue phrase cicéronienne, moins pure que l’antique et que Villemain émaille de ces prosopopées (ô Racine ! […] C’est toujours le style palement et froidement élégant de Villemain, ce style cultivé, travaillé, d’un goût sobre comme doit l’être l’indigence, ce style classique qui veut être pur comme la bégueule veut être vertueuse et qui souvent ne l’est pas plus qu’elle, ah !
Comme on ne peut supposer que Baudelaire ait crayonné son portrait par pure amitié, il faut admettre qu’il avait plus d’intelligence que de talent et qu’il fit, au temps de sa jeunesse, des promesses pour lui impossibles à tenir.
Tiercelin publia son premier volume de vers : Les Asphodèles, œuvre qui, dit un critique, « est éclose dans l’atmosphère très catholique de l’ancienne famille bretonne à laquelle appartenait le poète, et qui est comme le pur reflet de ses impressions premières ».
Alexandre Boutique Bon sens et logique, ces frère et sœur… syntaxe remarquable et, par conséquent, clarté… recherche du trait de caractère, de préférence à la charge vaudevillesque et aux ridicules de pure extériorité… Tous mots trouvant le mot et ne cousinant point avec le calembour, ce parent pauvre… enfin, ce que tant de chansonniers négligent — sans préjudice d’ailleurs pour leur succès à l’interprétation : une composition rigoureuse tenant compte de trois points, sans quoi il n’est pas d’œuvre en aucun genre, depuis l’article jusqu’au drame ; une facture éloignant toute idée de ces nuls couplets dits — ô ironie !
La pensée première de ce livre n’est pas une vue particulière : c’est ma foi aux grandes traditions classiques alors que sa ferveur était pure de toute arrière-pensée offensive, et que je songeais plus à en jouir qu’à la défendre.
Il y eut là, tout au sortir de l’enseignement de Malherbe, dans notre poésie française lyrique, une veine trop peu abondante, trop tôt distraite et interrompue, mais très pure, très française, neuve, élevée et douce : il en est resté quatre ou cinq odes au plus, mais dignes d’Horace, qu’on y retrouve imité sans servilité et avec génie, et bien faites surtout pour enchanter et inspirer, comme cela a dû être, la jeunesse de La Fontaine. […] J’indiquerai également, comme sorties du même courant et de la même source, comme inspirées par un semblable et pur amour de la campagne, les belles et douces stances de Lamartine dans ses secondes Méditations poétiques : « Ô vallons paternels ! […] On trouverait difficilement la trace directe du maître dans ses autres disciples ; ils sont élégants, mais faibles, et, à la seconde génération, les plus purs, comme Segrais, dérivent vers le bel esprit.
Sa langue même si pure se répandait sur ces jeunes personnes qui l’écoutaient, et sa grâce inimitable se renouvelait avec naturel dans leur bouche. […] C’est de la diction de Racine en prose, du Massillon plus court et plus sobre, toute une école pure, nette, parfaite, dont était le duc du Maine ; une jolie source, plus vive du côté des femmes, bien que peu fertile. […] Cette Histoire rappelle assez bien la manière dans laquelle le cardinal de Bausset a écrit la vie de Fénelon : c’est un courant de narration égal et pur.
Je dis que pendant trois générations successives Voltaire a été sainement apprécié de quelques-uns, bien que ces jugements soient comme en pure perte et qu’ils n’aient pu se consolider encore et s’établir parmi tous. […] Mais ces deux volumes contiennent de nouveaux témoignages de son esprit et de ses grâces, et sont généralement assez purs de ses excès. […] Chacun de ses rayons dans sa substance pure Porte en soi les couleurs dont se peint la nature ; Et, confondus ensemble, ils éclairent nos yeux, Ils animent le monde, ils emplissent les cieux… Ainsi cette excursion fort inutile de Voltaire dans les mathématiques, et qui allait devenir une fausse route, ne fut pas tout à fait perdue : elle lui servit du moins à composer cette belle épître2. — « Je suis bien malade, écrivait-il à Thieriot en août 1738, Newton et Mérope m’ont tué. » Ni l’un ni l’autre ne le tuèrent.