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1310. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. de Vigny. Œuvres complètes. — Les Poèmes. »

Michel-Ange est assez puissant pour tenir sous son pied l’opinion publique comme son glorieux patron tient le diable sous sa sandale d’or, mais la vue du sublime affranchit l’esprit et lui donne le courage de rejeter l’oppression de la plus colossale célébrité et par d’autres grandeurs, la mieux justifiée… Et cependant le poème de Moïse, qui me fait écrire de telles choses, en mon âme et conscience, n’est, à mes yeux, que le second en mérite des Poèmes de M. de Vigny.

1311. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. de Banville. Les Odes funambulesques. »

Il y est à deux mains, à deux pieds, de tout son corps, qui est toute son âme !

1312. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Auguste de Chatillon. À la Grand’Pinte ! »

Il porte la croix de la vie moderne sans la rejeter et sans la maudire, et il est plus calme, ce fils des preux, qui a tout perdu, fors l’honneur, et qui, par la poésie ou l’art, rentrera peut-être quelque jour dans l’héritage de gloire des ancêtres, il est plus calme que ce va-nu-pieds d’Hégésippe, qui n’a jamais rien eu que ses beaux pieds nus de pasteur grec.

1313. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre V. Des Grecs, et de leurs éloges funèbres en l’honneur des guerriers morts dans les combats. »

Eschine, avec toute l’éloquence d’un ennemi et d’un rival, s’écrie, dans le fameux discours qu’il prononça contre lui : « Comment, avec ces mêmes pieds qui ont si lâchement quitté leur poste dans le combat, as-tu osé monter sur la tribune pour y louer ces mêmes guerriers que tu as conduits à la mort ? 

1314. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXV. Des éloges des gens de lettres et des savants. De quelques auteurs du seizième siècle qui en ont écrit parmi nous. »

Nous avons vu les panégyristes le plus souvent au pied des trônes, dans les cabinets des ministres, sur les champs de bataille des conquérants, sur la tombe de tous les hommes puissants, vertueux ou coupables, utiles ou inutiles à la patrie.

1315. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre XI. De la géographie poétique » pp. 239-241

.… Ce sont les Grecs qui, chantant par tout le monde leur guerre de Troie et les aventures de leurs héros, ont fait d’Énée le fondateur de la nation romaine, tandis que, selon Bochart, il ne mit jamais le pied en Italie, que Strabon assure qu’il ne sortit jamais de Troie, et qu’Homère, dont l’autorité a plus de poids ici, raconte qu’il y mourut et qu’il laissa le trône à sa postérité.

1316. (1888) Études sur le XIXe siècle

Ainsi Améric Vespuce, le jour où Colomb posa le pied sur un sol nouveau, ignorait encore la découverte du continent auquel il devait donner son nom. […] On dirait qu’en se dressant sur la pointe des pieds on donnerait de la tête dans la voûte céleste… » Vous le voyez, M.  […] À peine le vieux patron est-il sur pied, qu’un nouveau malheur frappe la famille : Luca, le second fils, qui avait été pris à son tour par la conscription, est tué à Lissa. […] Il monte sur un bateau à vapeur, descend un canal, débarque et s’achemine à pied vers le village mystérieux, but de tant de désirs. […] Les maisons se multiplient : elles sont en bois verni ; voilà aussi des moulins aux fenêtres garnies de rideaux roses, des arbres dont le tronc est peint en bleu du pied jusqu’à la naissance des branches.

1317. (1929) Dialogues critiques

Ses lectrices n’en reviendront pas, qui, souvent, perdent pied dans les subtils enchaînements que lui fournit sans relâche sa faculté d’invention dialectique. […] Paul Oui, pour sauter par-dessus Hugo à pieds joints. […] Paul Oui, mais comment mettre sur le même pied celles de deux sortes si différentes ?

1318. (1858) Cours familier de littérature. V « XXXe entretien. La musique de Mozart (2e partie) » pp. 361-440

« En moins d’une heure je me trouvai à la porte de la maison paternelle ; au moment où mes pieds touchèrent la terre où j’avais eu mon berceau et où je respirai les tièdes haleines de ce doux ciel natal qui m’avait nourri, et qui m’avait donné l’aliment de la vie pendant tant de jeunes années, je fus pris d’un tremblement de tous mes membres, et une telle sensation de reconnaissance et de piété courut dans mes veines, que je restai pendant un certain temps immobile et comme incapable de tout mouvement, et je ne sais combien de temps je serais demeuré dans cet état si je n’avais entendu tout à coup, du haut du balcon, une voix qui sembla m’ébranler doucement le cœur, et que je crus reconnaître pour une voix anciennement connue de mon oreille. […] Elles se précipitèrent toutes avec la rapidité de la foudre par l’escalier, se jetèrent à l’envi à mon cou, m’étouffant presque de caresses, et, tout en me couvrant de leurs baisers, me conduisirent à mon pauvre père qui, en entendant retentir mon nom dans l’escalier, et surtout en me revoyant à ses pieds, était resté immobile et comme pétrifié pendant quelques instants. […] Peu après cette invasion dans la chambre, mon père rentra ; ce bon vieillard était chargé, au-delà de ses forces, de fruits et de bouquets dont mon lit fut à l’instant submergé par toute cette chère famille ; ils m’en couvrirent littéralement des pieds à la tête en poussant des cris de joie.

1319. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLIe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Troisième partie de Goethe. — Schiller » pp. 313-392

Le premier de ses remèdes était la prière ; il tournait leur pensée vers le Médecin suprême, et priait volontiers avec eux au pied de leur lit. […] La vie se retirait peu à peu de lui comme le rayon du soir, dans la galerie du Vatican, se retire d’abord des pieds, puis du buste, puis de la tête de l’Apollon de marbre, rougi par les roses des plus hautes clartés du soleil couchant. […] C’est ce qui fait que le Laocoon expire avec beauté sous les nœuds et sous les morsures du serpent ; que Niobé meurt belle sur les cadavres de ses enfants percés par les traits du dieu de l’arc ; que le Christ de Michel-Ange rayonne sur la croix d’une divinité morale pendant que les clous transpercent ses mains et ses pieds ; son sang ruisselle de ses blessures, mais son âme ne sent que la sainte beauté de son sacrifice.

1320. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre onzième »

J’ai dévoilé mon intérieur tel que tu l’as vu, ô Éternel… Que chacun de mes semblables se découvre à son tour au pied de ton trône avec la même sincérité, et puis qu’un seul te dise, s’il ose : Je fus meilleur que cet homme-là !  […] Il cheminait, gambadait, atteignant avant les autres le sommet des montagnes, et mangeant de fort bon appétit112. » Plus que sexagénaire, il étonnait Bernardin de Saint-Pierre par sa vigueur, faisant à pied le tour du bois de Boulogne, sans qu’à la fin de cette promenade il parût fatigué113. […] Il est tout à la petite fleur qu’il découvre au pied d’un buisson, et qu’il rangera le lendemain dans son herbier.

1321. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1864 » pp. 173-235

Il y a vraiment, dans ce moment-ci, un engouement des célébrités défuntes, un amour des riens laissés par elles, qui ressemble à un culte des saintes reliques, — et je ne désespère pas de voir bientôt, vendre aux Commissaires-priseurs, l’empreinte des doigts de pied d’un peintre illustre sur ses dernières chaussettes. […] En revenant à pied, il nous entretient spirituellement des choses et des gens de son temps, nous raconte la vente qu’il conclut, au prix de 600 francs, d’un roman du général Hugo, le père de Victor Hugo, qui s’appelait La Vierge du monastère… Il nous dit ensuite le brusque saut de fortune qu’il fit, presque du matin au soir, lors de son succès de la Villeliade, passant d’un déjeuner de trois sous, et d’une chambre qui n’avait de lumière que par la porte, à une richesse de près de 40 000 francs, à un appartement de 500 francs par mois, à une toilette en argent, achetée au Palais-Royal chez Barbichon Walter… Puis soudain, il nous exalte la beauté merveilleuse, la beauté divinement ingénue de la princesse Mathilde à quatorze ans, lorsqu’il la rencontra, pour la première fois, chevauchant en amazone, à Florence. […] Elle est le matin, en jupe noire, en camisole blanche avec dessus un fichu jaune, le terrible fichu de la fille soumise, — souvent les pieds nus dans ses pantoufles.

1322. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1887 » pp. 165-228

Dimanche 6 février Daudet frappé de la dureté, du coupant, que Mounet apportait au rôle de Roumestan, et ne trouvant chez lui rien du mutable et de l’ondoyant, que Montaigne attribue à l’homme du Midi, et ne rencontrant quoi que ce soit de l’homme sensuel, flou, attendrissable, qu’il a montré dans son héros, copié, des pieds à la cervelle, sur le catholique du Midi, lors des dernières répétitions, jeta soudain à son acteur : « Mounet, est-ce que vous êtes calviniste ?  […] Grelet, qui déjeunait avec nous, a parlé du corps des femmes japonaises, de l’exquise délicatesse de leur buste et de leur gorge, mais signalait chez toutes l’absence des hanches et du reste, et l’inclinaison en dedans de leurs jambes et de leurs pieds, par l’habitude qu’elles ont de se traîner à terre. […] Mercredi 7 septembre La marquise de Beaulaincourt, la ci-devant marquise de Contades, contait aujourd’hui, que les deux fois qu’elle avait dîné, dans sa vie, à côté de Talleyrand, les deux fois, Talleyrand avait parlé de la mauvaise conformation physique de Mme de Staël, pour laquelle M. et Mme Necker avaient été obligés de faire fabriquer un tourne-cuisses, à l’effet de lui ramener les pieds et les jambes en dehors.

1323. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — III. Le Poëme épique, ou l’Épopée. » pp. 275-353

Ils ne vouloient point voir que Perrault, dans le fond très-impartial, balançant également les beautés & les défauts, sans aucune acception ni des personnes, ni des siècles, ne fouloit point aux pieds les objets de leur idolâtrie, mais qu’il rectifioit leur culte. […] Quelle mutilation dans cet endroit où le poëte Grec personifie les prières, où l’on reconnoît ces filles du maître du tonnerre à la tristesse de leur front, à leurs yeux remplis de larmes, à leur marche lente & incertaine, placées derrière l’injure, l’injure arrogante, qui court sur la terre d’un pied léger, levant sa tête audacieuse . […] Boileau regardoit les romans sur ce pied-là, & fit tout ce qu’il put pour les décrier au milieu du dernier siècle : c’étoit le temps où ils étoient le plus en vogue : parce qu’on avoit vu quelques écrivains y réussir, tous les autres se flattoient d’en faire de même.

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