Notre style si exact et si net ne dit rien _au-delà_ de lui-même ; il n’a pas de perspective ; il est trop artificiel et trop correct pour ouvrir des percées jusqu’au fond du monde intérieur, comme fait la langue des artistes ou des simples, telle qu’on la trouve dans l’_Imitation_ ou dans Shakspeare. […] Alfred de Musset est le seul qui, depuis La Fontaine, ait retrouvé des vers de ce genre, une douzaine de mots ordinaires, assemblés d’une façon ordinaire et qui ouvrent un monde.
La cause est précisément que les mots, bornés à leur objet propre, ne sollicitent pas l’esprit à penser au-delà de leur sens, ne lui ouvrent point de vue sur des choses inexprimées ; la phrase n’a ni dessous ni profondeurs ; mettant toute sa richesse en dehors et comme en étalage, ne tenant rien en réserve, elle est toisée, prisée d’un coup d’œil : il y manque ces groupes d’images et d’idées, qui, surgissant derrière les mots, saisissent l’esprit et transforment la lecture distraite des yeux en une avide curiosité de toute l’âme. […] Et ces phrases de prose ne doivent-elles pas ce qu’elles ont de pénétrant et de profond aux mots abstraits, qui, n’emprisonnant point l’imagination dans une réalité particulière, lui ouvrent par là même de plus vastes horizons ?
Ils admirent la délicate harmonie des nombres et des formes ; ils s’émerveillent quand une découverte nouvelle leur ouvre une perspective inattendue ; et la joie qu’ils éprouvent ainsi n’a-t-elle pas le caractère esthétique, bien que les sens n’y prennent aucune part ? […] Entre ces mille chemins qui s’ouvrent devant nous, il faut faire un choix, au moins provisoire ; dans ce choix, qui nous guidera ?
Rien ne ressemble moins à un café où il se passe quelque chose ; mais ne vous arrêtez pas, traversez la salle, suivez ce groupe qui entre ; descendez l’escalier qui plonge au sous-sol ; ouvrez la porte qui se présente. […] Il suffit d’ouvrir les yeux pour se rendre compte qu’un souci d’art a pénétré presque dans les détails familiers de notre vie quotidienne.
Bacchus, plus puissamment que tout autre dieu, ouvrait l’âme à ces enthousiasmes. […] Inventeur pourtant comme Thespis, il n’en était pas moins ouvert aux idées nouvelles.
Le voyageur qui se hasardait au-delà de Delphes, et qui franchissait les forêts vertigineuses du mont Cnémis, croyait voir partout, la nuit venue, s’ouvrir et flamboyer l’œil des cyclopes ensevelis dans les marais du Sperchius. […] Montrer dans le burg les trois choses qu’il contenait : une forteresse, un palais, une caverne ; dans ce burg, ainsi ouvert dans toute sa réalité à l’œil étonné du spectateur, installer et faire vivre ensemble et de front quatre générations, l’aïeul, le père, le fils, le petit-fils ; faire de toute cette famille comme le symbole palpitant et complet de l’expiation ; mettre sur la tête de l’aïeul le crime de Caïn, dans le cœur du père les instincts de Nemrod, dans l’âme du fils les vices de Sardanapale ; et laisser entrevoir que le petit-fils pourra bien un jour commettre le crime tout à la fois par passion comme son bisaïeul, par férocité comme son aïeul, et par corruption comme son père ; montrer l’aïeul soumis à Dieu, et le père soumis à l’aïeul ; relever le premier par le repentir et le second par la piété filiale, de sorte que l’aïeul puisse être auguste et que le père puisse être grand, tandis que les deux générations qui les suivent, amoindries par leurs vices croissants, vont s’enfonçant de plus en plus dans les ténèbres.
Ce second volume ouvre par le plus beau des Apologues de La Fontaine, et de tous ses Apologues. […] Que de grâces et de naturel dans la peinture qu’il fait de cette faiblesse, si naturelle aux hommes, d’ouvrir leur âme à la moindre lueur d’espérance !
Nos ancêtres, dit Cassiodore, ont appellé musique muette celui des arts musicaux, qui montre à parler sans ouvrir la bouche, à dire tout avec les gestes, et qui enseigne même à faire entendre par certains mouvemens des mains comme par differentes attitudes du corps, ce qu’on auroit bien de la peine à faire comprendre par un discours suivi ou par une page d’écriture. […] saltare et gestum agere, s’emploïent si bien indistinctement, qu’on disoit danser une piece dramatique pour dire la réciter sur le théatre, et cela, non-seulement en parlant des représentations des pantomimes, qui joüoient sans ouvrir la bouche, comme nous le dirons tantôt, mais même en parlant des représentations des tragédies ou des comédies ordinaires dans laquelle la récitation des vers faisoit une partie de l’execution de la piece.
Voulez-vous ouvrir l’écrin de ce génie-femme ? […] Quelqu’un qui, sans savoir que ses livres sont d’elle, les ouvrirait au hasard, y reconnaîtrait, à toute ligne, l’âme d’une femme, la pensée d’une femme ; et même, dans les plus passionnés, dans ceux-là que des moralistes sévères ont trouvés presque coupables, il y a cependant un accent de pureté, de sincérité et de tendresse, d’amour pour tous les sacrifices, de respect pour tous les enthousiasmes, qui révèle bien toute la femme qu’elle fut.
Ernest Hello devrait toucher ; prétintaille de rhétorique plaquée au front du livre le plus contraire à la rhétorique, c’est-à-dire à toute convention dans les idées et dans le style… Le titre d’un livre doit engager à l’ouvrir, — comme le regard d’une femme inconnue doit donner l’envie de la connaître et de lire dans le cœur qui a ce regard… Tel n’est point le titre que M. […] Je n’en connais pas qui voie les choses sous un angle de lumière plus hardiment ouvert et plus large.
Pour le savoir, il faut ouvrir le livre même. […] Renée ne le reconnaît pas : « La raison d’État — nous dit-il — n’avait pas toujours été une religion pour Richelieu… Sa foi datait de son entrée au ministère. » Mais un homme aussi apte et aussi accoutumé aux choses de l’Histoire que l’auteur de Madame de Montmorency ne sait-il donc pas à quel point la Fonction ouvre, élargit et élève le regard, et que de ce sommet de la Fonction on voit ce qu’on ne voyait pas encore du bas de la vie ?
Esprit ouvert, cœur ouvert, main ouverte à tous les amis !
Dernièrement, un homme peu connu dans les lettres, mais auquel la Revue des Deux-Mondes ouvrit les deux battants de sa publicité, M. […] Là où il avait percé l’horizon, à ce qu’il semblait, jusqu’à sa dernière limite, il en creusait un autre encore qui s’ouvrait dans les profondeurs du premier.
Armand Silvestre … J’ai ouvert un livre de vers bien fait pour ajouter sa musique au parfum de ces fleurs lointaines.