Déplacer quelques mystères qui semblaient extérieurs et transcendants pour les rendre immanents à l’homme ; transformer du mystère métaphysique en mystère psychologique ; ramener nos yeux du macrocosme vers le microcosme : c’est, à de certaines époques, l’œuvre nécessaire du philosophe. […] Notre inconscient, privé de l’air pur qui lui est nécessaire, s’affole.
Havet, vient de publier à son tour, en l’environnant de tous les secours nécessaires, explications, rapprochements, commentaires ; il a donné une édition savante, et vraiment classique dans le meilleur sens du mot. […] De tels réservoirs de hautes pensées sont nécessaires pour que l’habitude ne s’en perde point absolument, et que la pratique n’use pas tout l’homme.
Lorsqu’il eut été élu malgré lui archevêque de Cantorbéry le 6 mars 1093, pendant un voyage qu’il faisait en Angleterre (l’Angleterre alors et la Normandie n’étaient presque qu’un même pays depuis la conquête), Anselme ne trouva point en lui toutes les qualités et les ressources nécessaires à sa position nouvelle ; en gardant toutes ses vertus, il ne sut point les armer suffisamment pour les conflits et les combats du siècle ; cette haute dignité ecclésiastique de primat d’Angleterre, à laquelle il dut un surcroît de célébrité, un mélange d’éclat et de disgrâce, deux exils, des retours triomphants et bénis, et finalement sa canonisation peut-être, cette haute dignité nous le montre plutôt inférieur à lui-même et dépaysé dans les affaires, craintif, obstiné et indécis, débile sinon d’âme, du moins de caractère. […] Il me serait assez difficile de l’exposer dans les termes même où il le produit ; qu’il me suffise d’en donner l’idée, tel que plus tard on le retrouve chez Descartes ou chez Fénelon : c’est que par cela même que l’esprit humain peut concevoir l’idée d’un Être infini, parfait, et au-dessus duquel il n’en est aucun autre, il devient nécessaire, par là même, que cet Être parfait et infini existe.
Il est de toute évidence que la philosophie est nécessaire à l’historien de la philosophie, car, pour comprendre les systèmes, il faut avoir approfondi la science elle-même, et l’érudition ne suffît pas ; mais une intervention indiscrète et exagérée de la philosophie dans l’histoire elle-même a un double inconvénient : le premier, c’est de fausser les systèmes, le second, c’est de rendre l’histoire inutile. […] Pour couper cette objection dans sa racine, il est nécessaire de creuser un peu loin.
Le temps est nécessaire pour entrer dans la barbarie comme pour en sortir : ainsi on peut dire qu’il faut des traditions, même pour parvenir à l’état de décadence, et surtout pour s’y maintenir. […] Je suis persuadé que cette sorte d’éloquence aura plus d’éclat, plus de mouvement, plus de puissance, que n’en a jamais eu l’éloquence analogue, chez les Grecs, chez les Romains, chez les Anglais : il y a, dans la contexture et le génie de la langue française, une raison invincible, une logique nécessaire, une clarté constitutive, un sentiment de goût et de convenance, qui apportent peut-être quelques obstacles à la passion désordonnée, mais qui contiennent l’enthousiasme sur les limites où il deviendrait vertige, et qui doivent être très favorables à la discussion calme, solennelle, animée.
. — Au moment où la France s’acheminait vers une longue décadence (d’ailleurs utile et nécessaire à d’autres points de vue), l’Italie, débarrassée de certaines contingences par son malheur même, créait Pétrarque, marchait à la Renaissance, et se préparait par là une gloire nouvelle et des raisons nouvelles de servitude. […] Privée de vie nationale, elle n’a pas vécu toutes les étapes de l’évolution normale ; elle a connu les brutalités des conquérants, mais non point les relativités nécessaires de sa propre réalité, puisque pendant des siècles elle n’a pas eu de réalité à elle.
Elle était nécessaire à Shakespeare. […] Un coup d’œil jeté sur les affaires du poëte prouve aussi qu’il commençait à porter, dans les détails de son existence, cette régularité, cet ordre nécessaire à la considération. […] Quelquefois même de longs espaces de temps sont nécessaires pour que la révolution qu’a commencée un homme supérieur accomplisse son cours et ramène vers lui le monde. […] Aucune de ses actions ne s’est terminée sans rendre nécessaire l’action qui la suit ; elles s’annoncent et s’attirent l’une l’autre, forçant ainsi l’imagination de marcher en avant, pleine de trouble et d’attente. […] Aussi qui pourrait dire qu’un intervalle de huit jours, placé, s’il eût été nécessaire, entre les promesses de Joad et leur accomplissement, eût rompu l’unité d’impression qui résulte de l’invariable constance de ses projets ?
Le choix des hommes leur est à peu près égal, et ils prendraient volontiers même les moins bons au préjudice des meilleurs, tant ils sont persuadés qu’ils sont l’homme seul, l’homme nécessaire et qui suffit à tout dans la situation donnée.
Il n’existe de connexion nécessaire entre les défauts et les beautés, que par la faiblesse humaine, qui ne permet pas de se soutenir toujours à la même hauteur.
… Je laisse de côté les agréments prévus que nous réservent les six mois de la fête : la mêlée meurtrière des voitures et des piétons le long des boulevards — déjà impraticables aujourd’hui de cinq à sept heures ; pas un fiacre libre, plus une place dans les restaurants ni dans les brasseries ; l’enchérissement de toutes les choses nécessaires à la vie ; le Parisien accablé de maux, dépossédé de Paris, outlaw dans sa propre ville envahie par les barbares… Le dehors te fait peur : si tu voyais dedans !
Et pour qu’à leur tour les Effrontés et le Fils de Giboyer aient obtenu au répertoire leur place définitive, que leur manque-t-il autre chose que ce recul du temps, toujours plus ou moins nécessaire aux comédies de mœurs, qu’il remet au point dans la perspective du passé ?
Il est mort plein de jours, en possession d’une immense sympathie publique, et je ne veux, certes, contester aucune de ses vertus domestiques ; mais je nie radicalement le poète aux divers points de vue de la puissance intellectuelle, du sentiment de la nature, de la langue, du style et de l’entente spéciale du vers, dons précieux, nécessaires, que lui avaient refusés tous les dieux, y compris le dieu des bonnes gens, qui, du reste, n’est qu’une divinité de cabaret philanthropique.
La considération de la gouvernante lui paraît déjà nécessaire pour préparer les peuples à respecter un prince appelé à es gouverner.
En ce genre d’innovation, il ne convient, selon moi, d’adopter que ce qui est vraiment nécessaire, que ce qu’imposent, comme des faits acquis, les progrès de la science et de la critique.