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489. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 15 janvier 1887. »

  Tout le futur du mal gît dans l’Or. […] Et le héros, vaincu par le futur, se livre A l’ineffable mal d’être grand et de vivre. […] Wagner a substitué le drame musical à l’opéra ; nous devons considérer sa théorie comme démontrée, ses conquêtes comme définitives ; ne nous épuisons pas à des œuvres bâtardes, confuses, où l’ancien esprit s’accommode tant bien que mal aux formules nouvelles. […] La vaccination est, à ce qu’il nous dit, la cause de la plupart de nos maux ; les savants qui croient à la propagation des maladies infectieuses par ces bacilles sont des niais que les essais infructueux ce M. 

490. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Lawrence Sterne »

C’est avec cette poitrine délabrée qu’il prêcha ses sermons à ses deux paroisses, jusqu’à l’âge de quarante-sept ans, sans penser à mal ni à Tristram. […] Mal marié, comme Byron d’ailleurs, Sterne, séparé de sa femme, ne la traita jamais de Clytemnestre, comme Byron la sienne, et l’accabla des générosités les plus touchantes. […] Mais nous disons, nous, que si le livre en question est de la main, il n’est point de la tête de Sterne ; que s’il est sorti, ébauche maigre, informe, mal venue, du portefeuille qui l’avait chastement gardé, il ne l’est pas de la plume divine qui a versé la vie, le sourire et les larmes, partout où elle s’est appuyée ! […] Et c’est de là, c’est de cette hauteur de mosquée, que l’Imagination, enlevée par un mot, culbute et retombe dans les vulgaires détails de la vie et de la pensée d’un petit ministre anglican « en culottes de soie noire », et qui a mal à la poitrine !

491. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXVIII et dernier. Du genre actuel des éloges parmi nous ; si l’éloquence leur convient, et quel genre d’éloquence. »

En parlant des maux, ne vous attendrirez-vous pas sur ceux qui les ont soufferts ? […] Malheur à vous, si les intérêts des États, si les maux des hommes, si les remèdes à ces maux, si la vertu, si le génie, si tout ce qu’il y a de grand et de noble, vous laisse sans émotion, et si en traitant tous ces objets vous pouvez vous défendre à vous-même d’être éloquent ? […] Qu’ainsi, dans l’ordre politique, l’orateur se pénètre des grands rapports du prince avec les sujets, et des sujets avec le prince ; qu’il sente avec énergie et les biens et les maux des nations ; que, dans l’ordre moral, il s’enflamme sur les liens généraux de bienfaisance qui doivent unir tous les hommes, sur les devoirs sacrés des familles, sur les noms de fils, d’époux et de père ; que dans ce qui a rapport aux talents, il admire les découvertes des grands hommes, la marche du génie, ces grandes idées qui ont changé sur la terre la face du commerce, ou celle de la philosophie, de la législation et des arts, et qui ont fait sortir l’esprit humain des sillons que l’habitude et la paresse traçaient depuis vingt siècles.

492. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XVI. »

On peut rêver à plaisir le pouvoir absolu ; on peut le prétendre un mal nécessaire, dans certain état du monde. […] « Déjà deux fois Monésès, deux fois la troupe de Pacorus brisa nos efforts mal propices ; et elle triompha d’ajouter à ses petits colliers une nouvelle proie. […] Jaillissant d’une telle source, le mal s’est répandu sur le pays et sur le peuple. […] Ce progrès en mal d’une génération sur l’autre, cette enchère de perversité dans les âges qui devaient suivre, de César à Auguste et d’Auguste au dernier des Césars, n’était-ce pas l’horoscope de l’empire et la fatalité de cette puissance sans droit et sans barrière ?

493. (1857) Réalisme, numéros 3-6 pp. 33-88

Restif ne peut pas être regardé comme un réaliste, mais je considère son étude comme utile aux réalistes ; Restif a vu quelque chose ; il a mal vu, il a surtout mal rendu ce qu’il voyait, mais je crois que Restif nous a donné Balzac ! […] * *   * On dit partout beaucoup de mal de M.  […] — Ce n’est pas déjà si mal, dit Mariette. […] Où sera le mal ? […] C’est la même manière de juger du modelé, de la couleur ; et un mélange de bien et de mal contre divers artistes.

494. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MARIA » pp. 538-542

Le blocus nous tenait, mais sans trop se poursuivre ; Dans ce mal d’habitude, on se remit à vivre ; La nature est ainsi : jusque sous les boulets, Pour peu que cela dure, on rouvre ses volets ; On cause, on s’évertue, et l’oubli vient en aide ; Le marchand à faux poids vend, et le plaideur plaide ; La coquette sourit. […] dis-je à cette mère empressée à conclure, Vous venez vendre ainsi la plus belle parure De votre enfant ; c’est mal.

495. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Béranger, Pierre-Jean de (1780-1857) »

Béranger a joué le rôle le plus perfide, le plus coupable et le plus vil ; qu’il doit figurer au premier rang de ceux qui ont fait du mal à l’humanité, à leur époque et à leur pays ; que ce mal, il l’a fait sciemment, froidement, non pas par entraînement et par passion… mais avec calcul, en versant la goutte de poison là où il savait qu’elle serait plus corrosive et plus meurtrière et en prenant pour auxiliaire, dans son œuvre criminelle, tout ce que l’esprit de parti a de plus bas, de plus méchant et de plus bête.

496. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 11, des ouvrages convenables aux gens de génie et de ceux qui contrefont la maniere des autres » pp. 122-127

On connoît mal la supériorité d’un coursier sur un autre coursier, quand ils fournissent une carriere trop courte. […] On est surpris en voïant ces tableaux, mais c’est qu’un peintre, qui ne manquoit pas de talens, ait si mal emploïé ses veilles, et qu’un seigneur genois ait fait un si mauvais usage de son argent.

497. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre I. Succès de cette philosophie en France. — Insuccès de la même philosophie en Angleterre. »

 » — Il n’importe, et la jolie femme, bien conduite, va philosopher sans le savoir, trouver sans effort la définition du bien et du mal, comprendre et juger les plus hautes doctrines de la morale et de la religion  Tel est l’art du dix-huitième siècle et l’art d’écrire. […] Rousseau aussi est un artisan, un homme du peuple mal adapté au monde élégant et délicat, hors de chez lui dans un salon, de plus mal né, mal élevé, sali par sa vilaine et précoce expérience, d’une sensualité échauffée et déplaisante, malade d’âme et de corps, tourmenté par des facultés supérieures et discordantes, dépourvu de tact, et portant les souillures de son imagination, de son tempérament et de son passé jusque dans sa morale la plus austère et dans ses idylles481 les plus pures ; sans verve d’ailleurs, et en cela le contraire parfait de Diderot, avouant lui-même « que ses idées s’arrangent dans sa tête avec la plus incroyable difficulté, que telle de ses périodes a été tournée et retournée cinq ou six nuits dans sa tête avant qu’elle fût en état d’être mise sur le papier, qu’une lettre sur les moindres sujets lui coûte des heures de fatigue », qu’il ne peut attraper le ton agréable et léger, ni réussir ailleurs que « dans les ouvrages qui demandent du travail482 »  Par contre, dans ce foyer brûlant, sous les prises de cette méditation prolongée et intense, le style, incessamment forgé et reforgé, prend une densité et une trempe qu’il n’a pas ailleurs. […] Sa démonstration se noue, maille à maille, pendant un, deux, trois volumes, comme un énorme filet sans issue, où, bon gré, mal gré, on reste pris. […] Nul n’est si sensible aux vices et aux maux de la société présente. […] Quel débouché pour les facultés comprimées, pour la riche et large source qui coule toujours au fond de l’homme et à qui ce joli monde ne laisse pas d’issue   Une femme de la cour a vu près d’elle l’amour tel qu’on le pratique alors, simple goût, parfois simple passe-temps, pure galanterie, dont la politesse exquise recouvre mal la faiblesse, la froideur et parfois la méchanceté, bref des aventures, des amusements et des personnages comme en décrit Crébillon fils.

498. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre II. Les bêtes »

Elle nous représente encore des hommes, c’est-à-dire des affaires sérieuses et des passions tristes ; elle nous touche de trop près ; son contrecoup est si fort qu’il nous fait mal. […] Il ne s’inquiète point de l’avenir ; il pourvoit au présent, et subit le mal patiemment quand le mal le rencontre. […]     Tout était en commun, plaisir, peine, souffrance     Ce qui manquait à l’un, l’autre le regrettait ;     Si l’un avait du mal, son ami le sentait ;     Si d’un bien, au contraire, il goûtait l’espérance. […] Dès que leur expédition militaire est consommée, ils se séparent, et retournent à leur silence et à leur solitude. — Enfin, désagréable en tout, la mine basse, l’aspect sauvage, la voix effrayante, l’odeur insupportable, le naturel pervers, il est odieux, nuisible de son vivant, inutile après sa mort. »135 Voilà bien de la colère, et il faut croire que les moutons de Montbard étaient mal gardés. […] Sous les os pesants de cette tête mal formée, l’intelligence est comme durcie.

499. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXIXe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 129-192

Le chef des sbires n’est qu’un homme léger, débauché et corrompu, qui ne refuse rien à ses passions quand on lui offre les moyens de les satisfaire, mais qui, de sang-froid, ne ferait pas le mal si on ne lui présentait pas le mal tout fait. […] car cela n’aurait été ni juste, ni reconnaissant ; le mal pour le bien, est-ce que cela se doit penser seulement ? […] — Je sais, lui avait dit l’évêque, que cette superstition pieuse est dans le pays de Lucques une opinion populaire que rien ne peut extirper dans les campagnes ; mais c’est la superstition de la vertu et de l’amour conjugal, utile aux mœurs ; il n’y a aucun mal à y condescendre pour la fidélité des époux et surtout pour le salut des condamnés. […] Ses yeux, en me regardant à la dérobée, pendant qu’elle pouvait être entrevue de nous en passant et repassant, étaient tellement voilés de larmes mal contenues, qu’on ne pouvait les voir que comme on voit une pervenche mouillée à travers les gouttes d’eau au bord de la source. […] me répondit la voix dans ma conscience, c’est que si je me sauvais derrière lui, le bargello et sa femme, si bons et si hospitaliers pour moi, seraient perdus, et qu’on les soupçonnerait certainement d’avoir été corrompus par nous, à prix d’argent, pour tromper la justice, et le moins qui pourrait leur arriver serait le déshonneur, la prison, et qui sait, peut-être la peine perpétuelle pour prix de leur charité pour moi, le mal pour le bien !

500. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre V. Le Séminaire Saint-Sulpice (1882) »

Je dis mal : il avait la critique très exercée en tout ce qui ne tient pas à la foi ; mais la foi avait pour lui un tel coefficient de certitude, que rien ne pouvait la contrebalancer. […] Que j’ai bien senti combien ces grands maux sont au-dessus de tout remède humain et que Dieu s’en est réservé le traitement, manu mitissima et suavissima pertractans vulnera mea, comme dit saint Augustin, qu’on s’aperçoit bien avoir passé par cette filière, à la façon dont il en parle ! […] Un an après, le mal que je croyais passager avait envahi ma conscience tout entière. […] Mon directeur, qui, avec les meilleures intentions du monde, me conseillait mal, n’était plus auprès de moi. […] J’espère n’hésiter jamais sur ce point, et, quels que soient les maux que la Providence me réserve encore, je croirai toujours qu’elle me mène à mon plus grand bien possible par le moindre mal possible.

501. (1894) Études littéraires : seizième siècle

Ce Père Joseph de Louis XI n’aurait point si mal fait comme Éminence grise de Richelieu. […] La vie pratique, et ce n’est pas un mal, est loin d’être modelée sur la vie intérieure. […] Elle avait, en ses commencements, à côté du mal le remède, et le remède beaucoup plus fort, pour un temps, que le mal. […] Les protestants, qu’il y traitait mal, ripostèrent. […] Ronsard a pâli sur l’antiquité, sur des textes rudes, mal établis du reste, et obscurs.

502. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Première série

Cela peut être le sentiment d’un chroniqueur qui lit vite et mal. […] C’est le péché, c’est le mal, elle et ce qu’elle inspire, l’amour ! […] Et s’ils l’avaient mal fait, par hasard ? […] La vie, en somme, n’a pas trop mal servi M.  […] Et le mal n’a fait que croître depuis ses premiers romans.

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