La liberté de conscience, entravée ou proscrite ailleurs, devait la choisir pour refuge. […] Mais que direz-vous de la liberté de croire ? […] Si vous jugez de la gravité d’un crime par le mal qu’il fait à sa victime, par la valeur du bien qu’il lui arrache, regarderez-vous l’infraction à la liberté de penser comme plus grave que l’attentat à la liberté de croire ? […] La loi divine de l’Évangile ne sera jamais, quoi qu’on fasse, hostile à la liberté véritable. […] Celle-là, nous le savons, se passe très bien de la liberté, et n’a rien de commun avec elle.
L’entière liberté du langage lui paraissait évidemment une condition absolue de la liberté de la pensée. […] Si ce philosophe un peu cynique n’avait pas eu le caractère aussi doux qu’il avait l’esprit caustique, il eût également revendiqué la liberté de l’invective et de l’insulte. […] Pour s’enquérir de la vérité, la foule n’a ni le temps, ni la capacité, ni le discernement, mais surtout elle n’a pas la liberté d’esprit qu’il faudrait. […] La liberté de l’individu, que Bayle réclamait tout à l’heure, se trouve ainsi limitée dans ses effets comme dans son principe. […] Elle étouffait le peu de liberté qui continuât de subsister encore sous l’empire de la tradition.
Bossuet apprécie dignement cette juste et forte proportion que portait en tout cette Grèce heureuse ; il loue chez elle la passion de la liberté et de la patrie comme s’il n’était pas l’auteur de la Politique sacrée. […] Sur l’idéal de la liberté chez les Grecs, sur leurs philosophes, sur leurs poètes même et sur Homère dont il interprète la mythologie par le côté principalement moral, il a des pages senties qu’il n’aurait jamais écrites avant 1670, avant de s’être retrempé, pour son préceptorat du Dauphin, aux vives sources de l’ancienne littérature profane. […] Il définit très-bien la liberté dure et pauvre du Romain qui ne ressemblait pas à la liberté brillante et polie de la Grèce.
Mais l’impossibilité ou il se trouve de rendre son original trait pour trait, lui laisse une liberté dangereuse. […] Objectera-t-on qu’il est à craindre que cette liberté ne dégénère en licence ? […] L’original doit y parler notre langue, non avec cette timidité superstitieuse qu’on a pour sa langue naturelle, mais avec cette noble liberté qui sait emprunter quelques traits d’une langue pour en embellir légèrement une autre. […] Quelquefois enfin j’ai pris la liberté d’altérer un peu le sens, quand il m’a paru présenter une image ou une idée puérile ; car ma juste admiration pour Tacite ne m’aveugle pas jusqu’au point de me fermer les yeux sur un petit nombre d’endroits où il me paraît au-dessous de lui-même.
La sienne l’était, — comme sa beauté, qui ne manquait ni d’éclat tapageur ni d’opulence charnue, mais qui n’avait ni distinction idéale, ni chasteté… C’était une beauté républicaine, taillée pour faire une déesse de la Liberté, aux puissantes mamelles, sur les autels de Notre-Dame, dans ces jours d’orgie révolutionnaire qui, pour elle, auraient été des jours heureux. […] Corinne austère, comme il convenait du reste à une fille de la Liberté. […] Elle avait le catarrhe de Facino Cane, dont sa poésie rappelait la clarinette ; mais sa vanité de bas-bleu rouge était plus forte que tous les rhumes, et elle se mit à promener majestueusement le sien, de Turin à Florence et de Rome à Naples et à Palerme, — poétique Ducantal de la liberté ! […] Mme Colet a beau, en effet, s’absorber dans l’adoration de la Liberté et de la Révolution italienne et se plonger en leurs délices, il faudrait bien des révolutions, les unes sur les autres, pour empêcher sa personnalité de remonter à la surface, et pour faire disparaître de ses livres, cette petite vanité de bas-bleu, qui y remonte toujours, comme sur l’eau dans laquelle on le noie, un petit chat, impossible à tuer !
Ces répétitions avaient lieu le plus souvent en l’absence de l’abbé et nous laissaient par conséquent pleine et entière liberté ; on en usait pour causer de tout autre chose que de la grammaire et du latin, et souvent pour composer des vers, Dieu sait quels vers ! […] Aussi, tandis que les deux prêtres se réjouissaient fort naturellement de ce que je regardais comme le plus grand de malheurs, me dérobai-je à eux le plus tôt que je pus, pour aller pleurer en liberté sur la montagne ce grand désastre.
Le peuple de Florence, au lieu de répondre au cri de liberté, poursuivit dans les rues Giacomo Pazzi et les siens, auteurs d’un crime odieux et qui s’étaient trompés d’heure et de victimes. […] Ou le roi de Naples n’a que des intentions favorables à la république, comme il l’a souvent assuré, et comme quelques-uns l’ont cru, et il aspire même par sa conduite hostile envers vous à vous rendre service, plutôt qu’à vous priver de votre liberté ; ou, dans le fait, il veut la ruine de Florence. […] Si, au contraire, les projets du roi sont d’anéantir notre liberté, nous nous en apercevrons bientôt ; et il vaut mieux acquérir cette lumière par la ruine d’un seul que par celle de tous… D’un autre côté, comme j’ai joui au milieu de vous de plus d’honneurs et de considération sans doute que je n’avais droit d’en attendre, et que peut-être on n’en a accordé à aucun simple citoyen, je me crois plus particulièrement obligé qu’aucun autre à servir les intérêts de mon pays, même aux dépens de ma propre vie. […] Si leur ambition menaçait la liberté publique, je ne doute point que mes concitoyens ne s’unissent pour la défendre jusqu’à la dernière extrémité, et, je l’espère, avec autant de succès que nos ancêtres l’ont fait autrefois. […] Laurent, aussi soigneux de sa popularité que de son génie, usa de la liberté du carnaval pour composer des poésies dansantes dont les belles filles des campagnes de Florence venaient le remercier avec des guirlandes de fleurs en main devant son palais.
« Car je n’ignore pas, dit-il, quelle est l’influence exercée par la nature du pays et les faits antécédents sur les constitutions politiques, et je regarderais comme un grand malheur pour le genre humain que la liberté dût en tous lieux se produire sous les mêmes traits. » Un de ses premiers chapitres porte sur ce qu’il appelle le point de départ, sur l’origine même des divers États américains et l’esprit infusé en eux dès le commencement. […] Il nous montre donc, particulièrement dans la Nouvelle-Angleterre, les puritains, les émigrants de toute secte, persécutés ailleurs, venant là chercher asile, s’y réunissant dans certaines nécessités communes, dans certains droits primordiaux, et sauf quelques erreurs et préjugés inévitables, y pratiquant aussitôt l’alliance de l’esprit de religion avec l’esprit de liberté. […] Faut-il donc, pensais-je en lisant, quitter la patrie, pour que de tels résultats s’accomplissent, et n’y aura-t-il jamais, au sein du vieux monde, un moment où tous les vaincus, les blessés, les puritains des diverses opinions donneront l’exemple d’une union sur un terrain commun incontesté, et offriront un concours de bon sens vers une liberté pacifique et solide ?
Ils roulent sur la liberté, sur la servitude, sur la honte de tenir la vie d’un ennemi de la patrie, sur le déshonneur qu’il causerait à Athènes, s’il renonçait à être libre pour se faire esclave dans sa vieillesse. […] si je dois vivre, si les jours de Démosthène doivent être conservés, que mes conservateurs soient mon pays, les flottes que j’ai armées à mes dépens, les fortifications que j’ai élevées, l’or que j’ai fourni à mes concitoyens, leur liberté que j’ai défendue, leurs lois que j’ai rétablies, le génie sacré de nos législateurs, les vertus de nos ancêtres, l’amour de mes concitoyens qui m’ont couronné plus d’une fois, la Grèce entière que j’ai vengée jusqu’à mon dernier soupir ; voilà quels doivent être mes défenseurs ; et si, dans ma vieillesse, je suis condamné à traîner une vie importune aux dépens des autres, que ce soit aux dépens des prisonniers que j’ai rachetés, des pères à qui j’ai payé la dot de leurs filles, des citoyens indigents dont j’ai acquitté les dettes ; ce n’est qu’à ceux-là que Démosthène veut devoir : s’ils ne peuvent rien pour moi, je choisis la mort ; cesse donc de me séduire, etc. » J’aime ensuite à voir la pitié de dédain avec laquelle il regarde le courtisan qui le croyait sans défense, parce qu’il n’avait autour de lui ni armes, ni soldats, ni remparts, comme si le courage n’était pas la défense la plus sûre pour un grand homme. […] Quoiqu’alors la Grèce fût esclave des Romains, on se souvenait encore des sentiments que l’ancienne liberté inspirait ; et quand l’éloquence trouvait une âme noble, cette éloquence faisait revivre les idées des Miltiade et des Périclès ; c’est ainsi que dans la populace de Rome moderne, il y a eu des temps où l’on entrevoyait les descendants des Scipions.
J’adhère au jugement commun ; je ne revendique que la liberté de mes motifs. […] Il avait à concilier, dans l’histoire, la liberté et la prescience. […] Tout est petit, fragile et caduc, si vous regardez la prescience divine ; mais tout est grand, si vous regardez la liberté humaine. […] S’il a été bon que ces deux principes se disputassent à qui donnerait sa forme à l’esprit français, il importait néanmoins que la discipline fût victorieuse de la liberté, le général du particulier, la tradition du sens propre. […] Voilà pourquoi la liberté spéculative, qui paraît être un droit naturel, y a toujours été contenue, quelquefois opprimée, aux époques mêmes où les gouvernements y toléraient d’autres libertés en apparence aussi considérables.
En même temps qu’il se montrait si ombrageux sur la liberté de la tribune, il paraît avoir été beaucoup plus coulant sur la liberté des journaux et sur celle même des théâtres. Dans son admiration pour Louis XII, il s’est plu à développer ce point de vue d’une entière liberté accordée à la scène. […] C’est alors que, retiré absolument des affaires, au seuil d’une robuste vieillesse, vivant de préférence en sa charmante habitation du Bois-Roussel (dans l’Orne), au milieu des libertés champêtres ou des joies de la famille, il se livra à ses goûts d’étude et de société combinés, et à la composition d’ouvrages moitié littéraires, moitié historiques, où il se développa avec une originalité entière. […] En étudiant l’histoire de France, il a cru découvrir, dit-il, qu’à la fin du xve siècle et au commencement du xvie , ce qu’on appelle la Révolution française était consommé, que la liberté reposait sur une Constitution libre, et que c’était Louis XII, le Père du peuple, qui avait accompli tout cela.
Il mourut bientôt après : je crus que c’était à propos pour sa gloire et la liberté ; mais les événements m’ont appris à le regretter davantage : il fallait le contre-poids d’un homme de cette force pour s’opposer à l’action d’une foule de roquets et nous préserver de la domination des bandits. » Or, Bosc avait cru bien faire en remplaçant l’expression si énergique : « impulser une assemblée », par cette autre qui n’a plus le même sens : « en imposer à une assemblée », et en mettant : « prendre la peine », au lieu de : « prendre le soin. » M. […] On sait qu’arrivée à la place du supplice, et déjà sur la planche fatale, elle fit un geste vers une statue colossale de la Liberté qui avait été dressée pour la fête du 10 août dernier, et elle prononça ces paroles mémorables : « Ô Liberté, que de crimes on commet en ton nom ! » ou encore. : « Ô Liberté, comme on t’a jouée ! […] mon ami, dit-elle à un autre prisonnier, je vais mourir pour la patrie et la liberté : n’est-ce pas ce que nous avons toujours demandé ?
Aussi aurais-je lieu de me sentir quelque peu inquiet de l’entreprise où je me hasarde, si je ne me trouvais rassuré par la liberté de parler davantage en poète qu’en critique. […] Son isolement au milieu de l’inattention contemporaine lui permettait, nous semblait-il, toute liberté. […] Si l’on s’en tient au sens étroit et étymologique, presque rien si l’on passe outre, cela peut vouloir dire individualisme en littérature, liberté de l’art, abandon des formules enseignées, tendances vers ce qui est nouveau, étrange, bizarre même ; cela peut vouloir dire aussi idéalisme, dédain de l’anecdote sociale, antinaturalisme. […] C’est bien ce désir de liberté et cette préoccupation d’idéalisme qui caractérisent l’art littéraire moderne. […] C’est cet esprit d’indépendance et de liberté qu’ils portèrent dans une question qui, sous une apparence technique, touche à la Poésie même, puisque, en Poésie comme en tout art, les moyens d’expression sont la condition même de ce qu’on exprime.
Dieu a enfermé la liberté de l’homme dans une aire circonscrite par la parole. […] La poésie transporte dans un monde idéal, c’est-à-dire dans un monde où les limites de la liberté de l’homme, de ses facultés, de ses prérogatives, de son intelligence, sont moins restreintes par l’état de déchéance ; dans un ordre de choses où la pureté des formes et de l’expression a moins été altérée par les passions et les sentiments mauvais. […] Milton peignit l’homme dans son état d’innocence, puis déchu de cet état primitif par le mauvais usage de sa liberté. Homère peignit l’homme luttant avec ses seules forces contre les limites de la liberté, assignées par l’état de déchéance. […] Tant que dura la liberté chez les Grecs, ces peuples menaient une vie publique, qui supposait peu le loisir de la lecture.