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1601. (1907) Jean-Jacques Rousseau pp. 1-357

Car quel intérêt avait le clergé à faire des convertis, si ce n’était pour se faire des créatures et, par conséquent, les suivre et les aider ? […] J’eus beau vouloir unir tous nos intérêts ; cela me fut impossible. […] Tout le poussait de ce côté, son goût et son intérêt. […] Mais, prenant ses intérêts plus que lui-même, madame de Luxembourg et Malesherbes veulent que l’Émile soit publié régulièrement en France en même temps qu’en Hollande. […] La question est du plus haut intérêt.

1602. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Joseph de Maistre »

Les Discussions religieuses, qui font ce qu’elles peuvent pour se réveiller autour de nous, viennent rendre ou prêter à tout ce qui concerne le comte de Maistre une sorte d’intérêt présent que ce nom si à part et orgueilleusement solitaire n’a jamais connu, et dont il peut, certes, se passer. […] … Confondons les intérêts des deux États, et que les Français s’accoutument à se croire nos concitoyens. […] Il y aura intérêt à parcourir, à connaître par extraits ces pamphlets et brochures devenus très-rares, et qui même, sans une bienveillance toute particulière qui est venue au-devant de mes désirs, me fussent sans doute demeurés introuvables et inconnus. […] Le maire de Montagnole continue de prendre ses compatriotes par tous les bouts, par l’énumération de tous leurs griefs, en réservant pour le dernier coup l’intérêt de la religion catholique si cher aux populations. […] Cependant, quand il fit son rapport sur la liberté du culte, au nom des trois comités, il dit tout net que les intérêts de la religion étaient des chimères.

1603. (1924) Intérieurs : Baudelaire, Fromentin, Amiel

Ce sont précisément ces différences et ces hostilités qui me font prendre un vif intérêt à les associer ici. […] À partir de ce moment l’intérêt du récit porte sur Madeleine. […] L’intérêt du traditionalisme de M.  […] D’un côté la technique, l’intérêt, l’application à une œuvre ; de l’autre l’intuition, le désintéressement, la sympathie avec tout, l’unité de la vie assumée par une conscience dépersonnalisée. […] La nature veut l’intérêt, elle emploie la pensée à l’action, elle utilise la vie pour la vie.

1604. (1900) Molière pp. -283

Le public suivait avec un vif plaisir et un réel intérêt ces jeunes savants dont la parole était si sûre, si élégante et parfois si indépendante. […] Nous osons espérer que les dissentiments auxquels aujourd’hui, comme alors, elle pourrait donner lieu, n’ôteront rien, pour les lecteurs intelligents, à l’intérêt de l’exhumation que nous avons cru devoir en faire à leur adresse. […] Que si je viens à être découvert, je verrai, sans me remuer, prendre mes intérêts à toute la cabale, et je serai défendu par elle envers et contre tous. […] Ils nous offriront à la lecture une autre espèce d’intérêt qui nous échapperait au théâtre où nous songeons trop à chercher un divertissement, pour faire l’effort de nous instruire. Cet intérêt consistera dans l’étrangeté même des mœurs qui sont le fonds de leurs ouvrages.

1605. (1885) Le romantisme des classiques (4e éd.)

Soit qu’on chante sur un air nouveau la vieille chanson, soit qu’on mette sur un air ancien une chanson nouvelle, cela déjà peut raviver l’intérêt. […] ton intérêt ici me désespère ! […] Toujours est-il que, pour des esprits cultivés, un récit comme celui de la bataille du Cid, dans la pièce de Corneille, ou comme celui de la bataille de Salamine dans les Perses d’Eschyle, présente un intérêt bien autre, un intérêt tout de pensée et d’héroïsme, où l’imagination supplée aux sens, — ce qui est le procédé de l’art véritable. […] Car, pour le fond de la pièce, il est très mince, et, en vérité de peu d’intérêt : l’intrigue roule sur une méprise de nom, qui n’amène que des situations très froides. […] Nous devons aller jusqu’au cinquième acte retrouver un intérêt égal.

1606. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. BALLANCHE. » pp. 1-51

Ballanche en était venu à comprendre qu’indépendamment des passions et des intérêts contraires, il y avait chez les uns et les autres une doctrine radicalement contraire aussi sur la fondation de la société et par conséquent (qu’ils s’en rendissent compte ou non) sur l’origine du langage. […] Coëssin, l’homme d’une petite église, et qui avait intérêt pourtant à ne pas rompre avec la grande, se plaignait surtout de moi sous prétexte que, depuis que je l’avais qualifié de sectaire, on ne le recevait plus comme avant ni sur le même pied dans sa paroisse, et qu’il risquait de ne plus être admis à la sainte table en l’église des Petits-Pères, on comprendra toute l’énormité et le ridicule du procédé par lequel des hommes du parti politique avancé se faisaient les tenants de M. […] Fauriel parlait toujours de Mme Récamier comme étant la Béatrice de Ballanche, car son adoration pour elle rappelait l’amour de Dante pour la divine Béatrice : il devait y avoir eu une semblable étincelle d’amour céleste dans ces deux âmes. » Et plus loin, à une période bien plus avancée de la vie de Mme Récamier : « Le premier objet de son intérêt était M. de Chateaubriand ; mais elle avait d’autres amis, et M.

1607. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Charles Nodier »

Ces fines qualités de style se présageaient déjà vivement dans le Peintre de Saltzbourg, qui n’a plus guère conservé d’intérêt que par là. […] Le roman d’Adèle, que je rapporte à cette première époque de Nodier, s’ouvre avec intérêt et vie : il y a du soleil. […] Le préfet Jean de Bry lui portait intérêt ; le ministre Fouché associait son nom à des souvenirs oratoriens.

1608. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre premier. Les caractères généraux et les idées générales. » pp. 249-295

Ces caractères sont la portion uniforme et fixe de l’existence dispersée et successive, et cela seul suffirait à faire comprendre l’intérêt que nous avons à les dégager et à les saisir. […] Nous construisons l’utile, le beau et le bien, et nous agissons de manière à rapprocher les choses, autant que possible, de nos constructions. — Par exemple, étant données des pierres éparses et brutes, nous les supposons équarries, transportées, empilées à l’endroit où nous voulons habiter, et, conformément à l’idée du mur ainsi construit, nous construisons le mur réel qui nous préservera du vent. — Étant donnés les hommes qui vivent autour de nous, nous sommes frappés d’une certaine forme générale qui leur est propre ; nous remarquons à un plus haut degré, tantôt chez l’un, tantôt chez l’autre, les signes extérieurs de telle qualité ou disposition bienfaisante pour l’individu ou pour l’espèce, agilité, vigueur, santé, finesse ou énergie93 ; nous recueillons par degrés tous ces signes ; nous souhaitons contempler un corps humain en qui les caractères que nous jugeons les plus importants et les plus précieux se manifestent par une empreinte plus universelle et plus forte, et, s’il se trouve un artiste chez qui ce groupe de conditions conçues aboutisse à une image expresse, à une représentation sensible, à une demi-vision intérieure, il prend un bloc de marbre et y taille la forme idéale que la nature n’a pas su nous montrer. — Enfin, étant donnés les divers motifs qui poussent les hommes à vouloir, nous constatons que l’individu agit le plus souvent en vue de son bien personnel, c’est-à-dire par intérêt, souvent en vue du bien d’un autre individu qu’il aime, c’est-à-dire par sympathie, très rarement en vue du bien général, abstraction faite de son intérêt ou de ses sympathies, sans plus d’égard pour lui-même ou pour ses amis que pour tout autre homme, sans autre intention que d’être utile à la communauté présente ou future de tous les êtres sensibles et intelligents.

1609. (1890) L’avenir de la science « III » pp. 129-135

On parle beaucoup de l’accord de la raison et de la foi, de la science et de la révélation, et quelques pédants, qui veulent se donner une façon d’intérêt et de poser en esprits impartiaux et supérieurs, en ont fait un thème d’ambiguïtés et de frivoles non-sens. […] L’homme réfléchi, au contraire, calcule trop bien son intérêt et se demande avec le positif qu’il porte en toute chose si c’est bien réellement son intérêt de se faire tuer.

1610. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VI »

La musique allemande est un travail de serrurerie sans intérêt pour qui n’est pas un serrurier. […] Ayant et avouant d’autres ambitions, j’ai de longtemps renoncé l’art des théories et des critiques ; ces notes ne sont que des impressions, elles ne veulent pas être autres, elles ne peuvent avoir un intérêt qu’en tant qu’on les verra telles, — les impressions de quelqu’un qui aurait longuement fréquenté dans les œuvres très vénérables du maître musicien et quelques fois aurait médité aux trop urgents et redoutables problèmes des esthétiques. […] (Car la demie heure qui précède le Verwandlungsmusikah me paraît, avec quelques exceptions, une concession au commentaire anecdotique, et en dehors de l’œuvre, sans intérêt ; ou, plutôt, est-ce que je n’ai pas encore compris ce commencement du Parsifal ?)

1611. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1886 » pp. 101-162

Mardi 6 juillet Spuller, ce gros homme matériel, quand il parle de Gambetta, c’est avec une tendresse touchante, et cette tendresse apporte à ce qu’il dit, une éloquence de cœur, pleine d’intérêt. […] Là-dessus, sa femme fait l’aveu que les cirques, les clowns, les tours de force, n’avaient autrefois aucun intérêt pour elle, et que c’était seulement depuis qu’elle avait lu Les Frères Zemganno, que l’idéalité mise par le livre, dans ces réalités vulgaires, lui avait fait prendre un vrai plaisir à ces représentations ; — et elle ajoutait que la vision de certaines choses ne se faisait chez elle, que par la voix de l’art. […] Si quelqu’un fait un jour ma biographie, qu’il se persuade qu’il serait d’un grand intérêt pour l’histoire littéraire et la réconfortation des victimes de la critique des siècles futurs, de donner sur chacun de nos livres, les extraits les plus violents, les plus forcenés, les plus négateurs de notre talent.

1612. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Robert » pp. 222-249

De ce lieu jusqu’aux habitations des villes, jusqu’aux demeures du tumulte, au séjour de l’intérêt, des passions, des vices, des crimes, des préjugés, des erreurs, il y a loin. […] Il faut ruiner un palais pour en faire un objet d’intérêt ; tant il est vrai que quel que soit le faire, point de vraie beauté sans l’idéal. […] Ses accessoires sont sans intérêt.

1613. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Edgar Poe »

Retourné chez Legrand, Poe constate avec un horrible soupçon l’existence du mal qui dévore son ami, de ce mal sans nom et sans fièvre, et il apprend de sa bouche qu’il a compté sur l’aide de son dévouement à lui, pour une expédition secrète… Les détails de cette expédition, aussi étranges que le reste de l’ouvrage, redoublent l’intérêt de curiosité qui s’attache à un tel récit. […] Edgar Poe nous fait repentir de l’intérêt, de l’émotion, de la terreur, qu’il nous a inspirés, dès qu’il nous simplifie son histoire. […] Au milieu des intérêts haletants de ce pays de la matière, Poe, ce Robinson de la poésie, perdu, naufragé dans ce vaste désert d’hommes, rêvait éveillé, tout en délibérant sur la dose d’opium à prendre pour avoir au moins de vrais rêves, d’honnêtes mensonges, une supportable irréalité ; et toute l’énergie de son talent, comme sa vie, s’absorba dans une analyse enragée, et qu’il recommençait toujours, des tortures de sa solitude.

1614. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Roederer. — II. (Suite.) » pp. 346-370

Les paroles de Bonaparte, prises ainsi sur le vif, se rencontrent à tout instant dans les notes et papiers de Roederer, et leur donnent un incomparable intérêt. […] Roederer accepta et servit loyalement l’Empire ; il en reçut des honneurs et des dignités ; il eut, en 1815, ce sentiment vrai qui le rattacha, par intérêt national comme par devoir et reconnaissance, à l’empereur reparu ; mais son moment préféré et hors de comparaison fut toujours l’heure du Consulat.

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