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606. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Nouvelles lettres de Madame, mère du Régent, traduites par M. G. Brunet. — I. » pp. 41-61

Ils différaient tous trois dans leurs croyances ; je pris la quintessence de leurs opinions et m’en formai ma religion. » Dans cette religion catholique ainsi définie en gros, qu’elle crut et qu’elle pratiqua en toute bonne foi, il restait des traces et bien des habitudes de son premier culte. […] Elle avait gardé de lui et des autres réformateurs, jusqu’à travers sa conversion, une habitude d’invectives contre les ordres religieux de tout genre ; elle a, à ce propos, des sorties qui sont moins d’une femme que de quelque savant du xvie  siècle en colère ou de quelque docteur émancipé de la rue Saint-Jacques.

607. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Merlin de Thionville et la Chartreuse du Val-Saint-Pierre. »

Il était déiste ; mais son Dieu était très lointain ; il avait l’habitude de le nommer non pas l’Être suprême comme faisait Robespierre d’après Rousseau, mais le Créateur des étoiles fixes, le rejetant ainsi jusque par-delà les planètes. […] Il ne se borna point, dans sa confiance envers le jeune séminariste, à des préceptes de vie facile ; il n’hésita pas, se voyant seul avec lui, à reprendre ses habitudes intérieures : « Deux belles paysannes de dix-huit à vingt ans, l’une brune et l’autre blonde, que je n’avais pas même aperçues jusque-là, vinrent se placer le soir à la table du maître.

608. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Mémoires de l’abbé Legendre, chanoine de Notre-Dame secrétaire de M. de Harlay, archevêque de Paris. (suite et fin). »

Ce n’était là qu’un dire de société revêtu des plus grandes apparences ; mais bientôt de véritables éclats vinrent démasquer les habitudes d’un homme qui, dans sa profession et sa position élevée, aurait dû être doublement irréprochable. […] Il y était seul, l’après-midi qu’il mourut, avec son amie la duchesse de Lesdiguières, nièce du cardinal de Retz, et qui était sa dernière liaison ; quoique cette dame ne fût plus jeune, on n’avait pas laissé, par habitude, d’en médire.

609. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

Elle contracta dès lors une habitude de souffrance, qui attendrit par la suite son talent, mais qui passa irrémédiablement dans tout son être, Mlle Desbordes fut ensuite engagée au théâtre des Arts de Rouen pour remplir l’emploi des ingénuités ; elle y réussit beaucoup : elle était l’ingénuité même. […] Garat consent… Soit amour, soit habitude, soit le besoin de trouver là quelqu’un pour grogner, il désirait la ravoir près de lui.

610. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre III. Les tempéraments et les idées — Chapitre III. Montesquieu »

Mais elles ont des parties graves : Montesquieu a l’habitude de se mettre tout entier dans chacun de ses livres ; il ne sait pas réserver une partie de sa pensée. […] Ainsi l’habitude de penser par épigrammes ou par sentences passe chez lui en nature.

611. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Jules de Glouvet »

Et, par exemple, il y a des livres qui sont d’un artiste incomplet, où il serait facile de signaler des fautes et des lacunes, et qui plaisent néanmoins par la sincérité avec laquelle ils laissent transparaître l’homme qui les a composés, son caractère, son tour d’esprit, ses habitudes, sa condition sociale. […] S’il compose des romans, ses descriptions devront se ressentir de cette habitude professionnelle.

612. (1890) La fin d’un art. Conclusions esthétiques sur le théâtre pp. 7-26

Oui, un nombre excessif de Prudhommes et d’Homais ont la mauvaise habitude de ruminer devant le monde les proses indigestes de leur quotidien favori. […] Encore dans trente ans, il subsistera, de par la force acquise de l’habitude et l’influence gardée de la corporation, un reste de forme théâtrale.

613. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XX. La fin du théâtre » pp. 241-268

Oui, un nombre excessif de Prudhommes et d’Homais ont la mauvaise habitude de ruminer devant le monde les proses indigestes de leur quotidien favori. […] Encore dans trente ans, il subsistera, de par la force acquise de l’habitude et l’influence gardée de la corporation, un reste de forme théâtrale.

614. (1887) Discours et conférences « Réponse au discours de M. Louis Pasteur »

Littré associait de même à la vie militante les habitudes d’un bénédictin. […] Avec l’habitude que je peux avoir des choses de l’esprit humain, je suis amené à croire que M. 

615. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de lord Chesterfield à son fils. Édition revue par M. Amédée Renée. (1842.) » pp. 226-246

Je veux vous parler comme ferait un homme de plaisir à un autre, s’il a du goût et de l’esprit. » Et il s’exprime en conséquence, stimulant le plus qu’il peut le jeune homme vers les arrangements honnêtes et les plaisirs délicats, pour le détourner des habitudes faciles et grossières. […] La nature humaine est la même dans le monde entier ; mais ses opérations sont tellement variées par l’éducation et par l’habitude, que nous devons la voir sous tous ses costumes pour lier connaissance avec elle jusqu’à l’intimité.

616. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur Bazin. » pp. 464-485

Bazin lui-même était de ceux qui prennent tout d’abord dans leur esprit la mesure des autres, et qui peut-être souffrent un peu de ne pouvoir donner à l’instant la leur : il en résulte que, plus tard, trop tard, quand on leur accorde ce qui leur est dû, ils n’en savent pas gré, et ne répondent au succès qu’avec un demi-sourire ; l’habitude de l’ironie est contractée. […] Là où il était le mieux à rencontrer et à entendre, le plus à son avantage peut-être, c’était au Cercle des Arts, son lieu d’habitude, où il venait tard et où il se plaisait assez à parler quand un petit nombre de gens d’esprit l’environnaient.

617. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Histoire des travaux et des idées de Buffon, par M. Flourens. (Hachette. — 1850.) » pp. 347-368

Buffon, dès son lever chaque matin, avait l’habitude de se faire habiller et coiffer selon l’usage du temps ; il croyait que le vêtement de l’homme fait partie de sa personne. […] Dans l’habitude de la vie, Buffon affectait de respecter tout ce qui est respectable, et quand il était à Montbard, il observait même régulièrement les pratiques du culte : il était homme à y prendre part avec une sorte d’émotion sincère, par l’imagination et la sensibilité 50.

618. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mémoires et correspondance de Mallet du Pan, recueillis et mis en ordre par M. A. Sayous. (2 vol. in-8º, Amyot et Cherbuliez, 1851.) — I. » pp. 471-493

Né aux bords du lac de Genève en 1749, d’un père pasteur protestant, il fit ses études au collège et à l’académie de Genève ; il y contracta ses premières habitudes de justesse, son tour de dialectique et de raisonnement. […] Ce qui ressort des premiers travaux de ce jeune homme, déjà arrivé à l’âge de trente ans, c’est l’indépendance du jugement, l’habitude d’avoir son avis en toute matière sans en demander la permission à son voisin ; et le besoin d’exprimer cet avis hautement et devant le public.

619. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Œuvres de Louis XIV. (6 vol. in-8º. — 1808.) » pp. 313-333

Le pitoyable Louis XV, qui ne manquait pas d’esprit et dont on cite quelques mots piquants, avait dans l’habitude de la conversation des longueurs sans fin et du rabâchage ; c’était le style bourbonien dans ce qui était déjà son affaiblissement et son ramollissement. […] Le jeune roi vint, et il amena, il suscita avec lui sa jeune littérature ; il mit le correctif à l’ancienne, et, sauf des infractions brillantes, il imprima à l’ensemble des productions de son temps un caractère de solidité, et finalement de moralité, qui est aussi celui qui règne dans ses propres écrits et dans l’habitude de sa pensée3.

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