Catinat, enfant de Paris, élevé dans une obscure maison de la rue de Sorbonne, aimait sa ville natale, son quartier, l’approbation de ses voisins et proches ; nourri dans ces besoins et ces habitudes d’estime, il porta au milieu des camps un principe d’honnêteté, de rectitude et de scrupule que rien n’altéra jamais. […] Catinat, averti aussitôt par M. de Boufflers du succès de l’entreprise, se hâta de le rejoindre ; il conduisait lui-même un corps de troupes, et en traversant les terres de Madame de Savoie, il s’attacha, selon son habitude, à réparer les désordres inévitables qu’on avait causés en pays ami, mais qui cette fois étaient bien légers.
Pour moi, je reste froid ; je ne puis entrer dans cette émotion à la lecture : l’habitude n’y est pas. […] Lorsque les lèvres de la religieuse s’entrouvrent, elles laissent passer un mot court, une sorte de note monotone, comme le bruit d’une goutte d’eau qui tomberait à intervalles réguliers des parois de quelque grotte humide dans cette flaque qui n’a jamais réfléchi la lumière. » Je ne sais si l’habitude que nous autres catholiques avons des couvents m’abuse, mais il me semble qu’il y a dans cette peinture minutieuse, étonnée et un peu effrayée, de l’émerveillement naïf et un peu d’exagération.
Son caractère d’écriture n’est pas fort bon ; le plus fâcheux est qu’un peu par paresse et distraction, un peu aussi, à ce qu’on croit, par la faute de ses maîtres d’écriture, elle a contracté l’habitude d’écrire on ne peut pas plus lentement. […] Après deux années de ce rôle assez ingrat et infructueux, il écrivait (mai 1772) : « Le mauvais ton des alentours, l’habitude de ne recevoir ni correction ni même avis du roi et de M. le Dauphin, les seules autorités légales et convenables pour Mme la dauphine, enfin l’éloignement de 300 lieues, voilà à mon avis les causes du peu d’effet des lettres de réprimande.
Quoi qu’il en soit de ces deux habitudes d’écrire, Casimir Delavigne excellait dans la première, et il en offre les plus purs et les plus constants exemples, les derniers que notre littérature puisse avec orgueil citer à la suite des modèles. […] La comédie qu’il donna sous ce titre (la Popularité), et dans laquelle il revint un peu à sa manière des Comédiens, est pleine de vers ingénieux, élégants, bien frappés, qui, comme ceux du Méchant, de la Métromanie, se sentent assez du genre de l’épître, mais n’en sont pas moins chers, dans cette modération de goût, aux habitudes de la scène française.
Ceci, joint à l’habitude de se réprimer en dehors et à l’aisance de la femme du grand monde qui reprenait vite le dessus, la ramenait tout à fait au type adouci de la Restauration. […] Mme Roland juge sévèrement Kersaint dans ses Mémoires ; elle n’aimait pas en lui certaines habitudes de mœurs du gentilhomme ; mais nous, postérité, nous aimons à marier leurs noms généreux, consacrés dans la même cause.
Il faut nous défaire pour juger ses idées de toutes nos habitudes d’abstraction et d’analyse. […] Rien de plus achevé, de plus neuf que ces petites pièces, la Mémoire, l’Habitude, les Chaînes, la Forme : il faudrait citer presque tout le recueil.
Le Figaro l’abandonne, et lui ne s’indigne pas ; il comprend : « J’admets très bien, pour un journal, la nécessité de compter avec les habitudes et les passions de sa clientèle. » Quoi, même lorsqu’il s’agit de ce qui apparaît à tes yeux naïfs la grande bataille de ton siècle, tu admets qu’on sacrifie la justice à un intérêt personnel et que, s’étant jeté volontairement dans la lutte, on s’enfuie à la pensée du risque, abandonnant sans armes ses compagnons de combat. […] Ils ne songent qu’à nous courber davantage vers la terre en nous alourdissant, nous, à qui notre pauvreté permet encore l’habitude droite et les regards dirigés vers le ciel, d’autant de besoins misérables que les riches.
Tous les jours, au soleil levant, eux et les ulémas de Gama el-Azhar prirent l’habitude de se rendre au palais avant l’heure de la prière. […] — Non, ce peuple est trop étranger à nous, à nos habitudes ; il lui faut des chefs.
Elle avait pourtant un ami vrai, Formont ; un ami d’habitude, le président Hénault, et assez de liaisons du monde pour combler une autre existence moins exigeante ; mais le tout ensemble ne suffisait au plus qu’à distraire la sienne. […] … J’admirais hier au soir la nombreuse compagnie qui était chez moi ; hommes et femmes me paraissaient des machines à ressort qui allaient, venaient, parlaient, riaient, sans penser, sans réfléchir, sans sentir ; chacun jouait son rôle par habitude : Mme la duchesse d’Aiguillon crevait de rire ; Mme de Forcalquier dédaignait tout ; Mme de La Vallière jabotait sur tout.
Le premier grand homme a fait son devoir avec ampleur et majesté, selon son habitude, et il a passé outre. […] On y saisit, comme si l’on y était, les habitudes de penser et de sentir, et l’accent juste de cette fine nature.
Son rare bon sens corrigea ce que cette première éducation pouvait avoir d’un peu trop idéal et de trop poétique ; il n’en garda que cette habitude heureuse de tout faire et de tout dire avec fraîcheur et gaieté. […] Dans l’habitude et la continuité de son style, Montaigne est l’écrivain le plus riche en comparaisons vives, hardies, le plus naturellement fertile en métaphores, lesquelles, chez lui, ne se séparent jamais de la pensée, mais la prennent par le milieu, par le dedans, la joignent et l’étreignent.
La velléité de publier peut quelquefois leur venir, mais l’occasion manque, la modestie l’emporte, l’habitude de se contenir prend le dessus. […] Si j’avais pourtant à le faire, je dirais que, malgré des fautes trop fréquentes et de mauvaises habitudes de goût, jamais peut-être la vraie matière poétique en circulation n’a été plus abondante, jamais la main-d’œuvre plus vulgarisée, et plus à la portée de ceux qui en abusent comme de ceux qui en sauront profiter.
Mme de Maintenon est inaccessible ; elle garde dans sa grandeur des habitudes de vie étroite et particulière : c’est comme un reste de prude dans une personne de si parfait agrément. […] Par un reste d’habitude, elle se mit à y gouverner la maison du roi et de la reine d’Angleterre, pour y gouverner quelque chose.
Entreprend-il de se justifier auprès de la Commune de Paris des sots griefs qu’on lui impute, comme d’avoir accaparé des armes, d’avoir des souterrains dans sa maison du boulevard, même d’avoir trompé autrefois les Américains par ses fournitures, il dira ingénument, en imitant les gageures et les défis à l’anglaise : Je déclare que je donnerai mille écus à celui qui prouvera que j’aie jamais eu chez moi, depuis que j’ai aidé généreusement l’Amérique à recouvrer sa liberté, d’autres fusils que ceux qui m’étaient utiles à la chasse ; Autres mille écus si l’on prouve la moindre relation de ce genre entre moi et M. de Flesselles… Je déclare que je paierai mille écus à qui prouvera que j’ai des souterrains chez moi qui communiquent à la Bastille… Que je donnerai deux mille écus à celui qui prouvera que j’aie eu la moindre liaison avec aucun de ceux qu’on désigne aujourd’hui sous le nom des aristocrates… Et je déclare, pour finir, que je donnerai dix mille écus à celui qui prouvera que j’ai avili la nation française par ma cupidité quand je secourus l’Amérique… Cette façon de tout évaluer en argent me paraît déceler un ordre de sentiments et d’habitudes qui était nouveau en littérature, et qui s’y naturalisa trop aisément. […] Dans l’habitude, il est de la langue de Mercier autant et plus que de celle de Voltaire.