Le devoir fait, la tâche remplie, l’enfant continuait de vaquer à ses rêves ; il est évident, à lire ces pages de description détaillée et comme attendrie, que l’enfance de Dominique n’est pas une fiction de l’auteur, et qu’il y a là-dessous une réalité vive et sensible, prise sur le fait et étudiée d’après nature ; on y sent l’observation de quelqu’un qui a vécu au sein de la campagne, qui a vu passer bien des fois et repasser sur sa tête le tour des saisons, qui en sait les harmonies et les moindres mystères : « Chaque saison nous ramenait ses hôtes, et chacun d’eux choisissait aussitôt ses logements, les oiseaux de printemps dans les arbres à fleurs, ceux d’automne un peu plus haut, ceux d’hiver dans les broussailles, les buissons persistants et les lauriers. […] Dans les profondeurs des feuillages, sur la limite du jardin, dans les cerisiers blancs, dans les troènes en fleur, dans les lilas chargés de bouquets et d’arômes, toute la nuit, — pendant ces longues nuits où je dormais peu, où la lune éclairait, où la pluie quelquefois tombait, paisible, chaude et sans bruit, comme des pleurs de joie, — pour mes délices et pour mon tourment, toute la nuit les rossignols chantaient. […] il suffira d’une année et que Dominique ait atteint ses dix-sept ans, que Madeleine en ait dix-huit, pour que le rayon arrive, à elle d’abord et à sa beauté dans sa fleur première, à lui ensuite et à son cœur qu’un soudain regard vient éclairer. […] C’est à la tombée de la nuit : « le bois sombre de quelques meubles anciens se distingue à peine, l’or des marqueteries ne luit que faiblement ; des étoffes de couleur sobre, des mousselines flottantes, tout un ensemble de choses pâles et douces y répand une sorte de léger crépuscule et de blancheur, de l’effet le plus tranquille et le plus recueilli ; l’air tiède y vient du dehors avec les exhalaisons du jardin en fleur ; mais surtout une odeur subtile, plus émouvante à respirer que toutes les autres, l’habite comme un souvenir opiniâtre de Madeleine ».
Plusieurs des fleurs que voit naître Pomone Au sein fécond des vergers renaissants Ne doivent point un tribut à l’Automne : Tout leur destin est de plaire au Printemps. […] On retrouverait en lui partout et dans le meilleur sens l’élève des jésuites et du Père Du Cerceau ; quand les jésuites ne se mêlaient pas de théologie, mais seulement de littérature, ils avaient de ce genre d’esprit dont Gresset représente la fleur la plus brillante et la plus mondaine : il suffit de nommer Commire, Cossart, Rapin, Porée, Bougeant et tant d’autres. […] le brillant tout entier a péri, la fleur du pastel est dès longtemps enlevée, et on ne distingue plus rien de la poussière première à ces ailes fanées du papillon. […] Gresset, dans son séjour d’Amiens, s’était extrêmement préoccupé, comme font volontiers les écrivains retirés en province, du néologisme qui s’introduisait en quelques branches du langage : « Il avait été frappé justement, mais beaucoup trop, dit Garat dans sa Vie de Suard, du ridicule d’une vingtaine de mots qui avaient pris leurs origines et leurs étymologies dans les boutiques des marchandes de modes, même dans les boutiques des selliers. » Il en forma comme le tissu de son discours ; toutes ces locutions exagérées dont il s’était gaiement raillé vingt-cinq ans auparavant dans le rôle du jeune Valère : Je suis comblé, ravi, je suis au désespoir, Paris est ravissant, délicieux, il les remit là en cause, il fit d’une façon maussade comme la petite pièce en prose à la suite du Méchant ; et tandis que Suard plaidait avec tact pour la raison, alors dans sa fleur, et pour la philosophie, Gresset souligna pesamment des syllabes, anticipant l’office que nous avons vu depuis tant de fois remplir à feu M.
Il manque à cette nature saine, droite, habile, frugale et laborieuse de Franklin un idéal, une fleur d’enthousiasme, d’amour, de tendresse, de sacrifice, tout ce qui est la chimère et aussi le charme et l’honneur des poétiques natures. […] Il y a une fleur de religion, une fleur d’honneur, une fleur de chevalerie, qu’il ne faut pas demander à Franklin.
. — Les Fleurs de la Passion (1900) […] Kahn lui-même, s’il ne nous offre pas aujourd’hui de ces étranges fleurs orientales à la tige flexible dont nous fûmes étonnés, a tressé dans l’ombre un bouquet composite, non sans grâce.
Et d’ailleurs quel est le pauvre pâtre, enivré de fleurs et ébloui d’étoiles, qui ne s’est écrié, au moins une fois en sa vie, en laissant tremper ses pieds nus dans le ruisseau où boivent ses brebis : — Je voudrais être empereur ! […] Son œuvre, prise dans sa synthèse, ressemblerait à la terre ; des productions de toute sorte, une seule idée première pour toutes les conceptions, des fleurs de toute espèce, une même sève pour toutes les racines.
Le vin jaillit à flots sous les baguettes qui frappent les rochers ; des explosions de fleurs et de fruits couvrent les broussailles. […] Au fort des mêlées, il chasse les guerriers qui l’assaillent, comme les moustiques de leurs jungles, en les éventant d’une longue fleur. […] La fleur de la terre reverdissait en lui. […] Mais elle retient de force le petit bien-aimé, le couronne de fleurs, et fait de lui toutes ses joies. » — Zeus, pris pour arbitre, décida qu’Adonis appartiendrait quatre mois à Cypris, quatre mois à Perséphone, et quatre mois à lui-même. […] On pleurait en lui les fleurs fanées, les délices finies, les jeunesses brisées, les amours éteints avant l’heure.
De la source, sa cuvette, La fleur faisant un miroir, Dit « bonjour » à la fauvette Et dit au hibou « bonsoir. » Est-elle aimable, cette fleur, et spirituelle ! […] Et le frais papillon, libertin de l’azur, Qui chiffonne gaîment une fleur demi-nue, Si je viens à passer dans l’ombre, continue ; Et si la fleur se veut cacher dans le gazon, Il lui dit : « Es-tu bête ! […] Nous avions pris la fleur du panier ; maintenant nous allons prendre partout. […] Son esprit met le poing de Han d’Islande sur ces cristaux et sur ces fleurs.
Sans y mettre tant de façons, revoyons-la un moment, vivante et dans sa fleur, sous ce règne de Louis XVI, pendant les dix heureuses années qui précédèrent la plus terrible des révolutions. […] C’est une belle fleur qui règne sur son gazon, près de sa source : on s’y assoit avec lui et on la respire. […] Que devenir en effet, que faire, en avançant dans la vie, quand on a mis toute son âme dans la fleur de la jeunesse et dans le parfum de l’amour ?
La jeune fille de treize ans s’essaya, non plus à des couplets, mais à de vraies pièces de vers, à des idylles sur les diverses fleurs ; il y avait grand emploi, comme on peut croire, du langage mythologique. […] Il y a un moment unique où toutes les pensées, tous les rêves chastes et poétiques à la fois, se rencontrent dans l’âme de la jeune fille, de la jeune femme ; c’est à la veille ou au lendemain du jour qu’embaume pour elle la fleur d’oranger. […] L’un, dès les premiers tons de sa lyre animée, A senti sa voix frêle et son chant rejeté, Comme une vierge en fleur qui voulait être aimée Et qui perd sa beauté.
Le lac, l’horizon, les arbustes, les fleurs, voilà donc tout ce qui reste du petit canton de trois ou quatre lieues où Jésus fonda son œuvre divine. […] Dans ce pays, où la végétation était autrefois si brillante que Josèphe y voyait une sorte de miracle la nature, suivant lui, s’étant plu à rapprocher ici côte à côte les plantes des pays froids, les productions des zones brûlantes, les arbres des climats moyens, chargés toute l’année de fleurs et de fruits 403 dans ce pays, dis-je, on calcule maintenant un jour d’avance l’endroit où l’on trouvera le lendemain un peu d’ombre pour son repas. […] De petits promontoires, couverts de lauriers roses, de tamaris et de câpriers épineux, s’y dessinent ; à deux endroits surtout, à la sortie du Jourdain, près de Tarichée, et au bord de la plaine de Génésareth, il y a d’enivrants parterres, où les vagues viennent s’éteindre en des massifs de gazon et de fleurs.
C’est vraiment une chose effrayante, la consommation qu’on fit de cette dernière fleur depuis quelques années ! […] Les sensations flottent à fleur d’âme et ne pénètrent pas. […] Certains balbutient, certains s’attristent et se replient sur eux-mêmes, certains s’épanouissent comme des fleurs. […] Au moment de la floraison, maints insectes — surtout les abeilles — transportent le pollen d’une fleur à l’autre. […] Serai-je autorisé pour cela, à soutenir que ces fleurs sont supérieures à celles que je semai la première année ?
Elle nous le montre au plus beau moment du voyage, à son plus haut soleil du matin, au midi de l’été et de la journée, dans la fleur entière d’un talent et d’un cœur déjà épanouis. […] car ni le sommeil, ni le printemps dans son apparition soudaine n’est aussi doux, ni les fleurs ne le sont autant aux abeilles qu’à moi les Muses me sont chères. […] Et la violette aussi est noire, et la fleur d’hyacinthe est gravée ; mais tout de même elles sont comptées les premières dans les couronnes. […] Couronne la coupe de la fleur empourprée de la brebis (c’est-à-dire d’une bandelette de laine rouge), afin que j’immole par magie l’homme aimé qui m’est si accablant. […] Le duvet de leur menton était plus blond que la fleur d’hélichryse, leurs poitrines étaient bien plus luisantes que toi-même, ô Lune !
Les abeilles recueillent la cire sur les fleurs : elles tirent la propolis des fleurs des arbres. […] L’abeille prépare donc la cire avec des fleurs comme je l’ai dit, mais une preuve qu’elle ne compose point le miel, et qu’elle recueille celui qui tombe, c’est que ceux qui ont des ruches les trouvent pleines de miel en un jour ou deux, et que d’ailleurs, quand on leur a ôté leur miel en automne, elles n’en font plus de nouveau quoiqu’il y ait encore des fleurs. Cependant, n’ayant plus de nourriture, puisqu’on leur a ôté leur miel, ou n’en ayant qu’une petite quantité, elles ne manqueraient pas de faire de nouveau miel si elles le composaient du suc des fleurs. […] L’abeille fait sa récolte sur les fleurs qui sont en calice, et en général sur toutes celles qui ont un suc doux. […] Un organe semblable à la langue lui sert à rassembler les sucs de ces fleurs et elle les emporte.
La fleur incline sa tête au souffle du zéphyr, et semble lui dire : « Zéphyr importun, laisse-moi reposer, laisse-moi rafraîchir ma tête dans la rosée du ciel, dont la nuit m’a couverte. […] Là brille la fleur de la montagne : elle balance sa tête au souffle des zéphyrs ; là croît le chardon solitaire dont la chevelure blanchie est le jouet des vents. […] Nous étions deux fleurs qui croissions dans la fente du rocher ; et nos têtes, chargées de rosée, souriaient aux rayons du soleil. Les fleurs étaient deux, mais leur racine était unique. […] L’image de son fils, qui périt à la fleur de ses ans, vient se retracer à sa pensée.