Byron, par la nature particulière de son génie, par l’influence immense qu’il a exercée, par la franchise avec laquelle il a accepté ce rôle de doute et d’ironie, d’enthousiasme et de spleen, d’espoir sans borne et de désolation, réservé à la poésie de notre époque, méritera peut-être de la postérité de donner son nom à cette période de l’art : en tout cas, ses contemporains ont déjà commencé à lui rendre cet hommage.
« Il y a, dit Pellisson, dans tout le corps de l’ouvrage, je ne sais quoi d’honnête homme, tant d’ingénuité et tant de franchise, qu’on ne saurait presque s’empêcher d’en aimer l’auteur63. » C’est la gloire de Vaugelas qu’un contemporain ait fait de lui un éloge dont, après deux siècles, il n’y a rien à retrancher.
Mais il faut, en outre, que nous la fassions nôtre, et que nous ayons cette illusion qu’elle vient de nous, alors que toutes ses prescriptions nous arrivent pourtant du dehors et que nous n’oserions jamais, à moins de vouloir simuler la folie, parler d’un devoir qui ne nous serait pas recommandé par quelque autorité morale, ou qui, du moins, ne serait pas reconnu comme devoir possible par un certain nombre de nos contemporains.
La littérature va dévorant ses formes à mesure qu’elle les épuise ; elle doit toujours être contemporaine à la nation.
Il est le contemporain du passé sans cesser d’être moderne.
J’ai connu un homme qui, plus que personne, a appartenu à cette école ; pendant ses longues années de surnumérariat et d’apprentissage, pendant qu’il écrivait je ne sais combien de romans et de poésies qui jamais ne verront le jour, pendant qu’il lisait les maîtres de tous pays, pendant qu’il voyageait et qu’il allait demander à la nature les effluves fécondants qu’elle réserve à ceux qui veulent communier avec elle, il avait cru qu’il suffisait de posséder la Forme pour avoir le droit de parler à ses contemporains.
Tantôt il obliquera, comme fait souvent le drame contemporain ; il nous révélera, avec une habileté quelquefois sophistique, les contradictions de la société avec elle-même ; il exagérera ce qu’il peut y avoir d’artificiel dans la loi sociale ; et ainsi, par un moyen détourné, en dissolvant cette fois l’enveloppe, il nous fera encore toucher le fond.
N’abandonne pas ta chaîne, ne t’élève pas au-dessus, mais restes-y fermement attaché. » Assurément ni Turgot, ni Condorcet, ni Montesquieu, ni Vico, n’eussent accepté une pareille formule de fatalisme dans un siècle où l’on avait une foi si entière à l’influence des idées et à l’action des volontés, et qui a fini par un drame révolutionnaire bien différent de l’espèce d’évolution végétative dont parle Herder ; mais il suffit d’ouvrir tel livre de philosophie historique contemporaine pour se convaincre que les idées de Herder ont fait école parmi les historiens de notre temps.
. — Nous n’ignorons pas, en effet, le rôle que joue le concept d’adaptation dans la science contemporaine. […] Il y a en effet deux parts à faire dans le néo-vitalisme contemporain : d’un côté l’affirmation que le mécanisme pur est insuffisant, affirmation qui prend une grande autorité quand elle émane d’un savant tel que Driesch ou Reinke, par exemple, et d’autre part les hypothèses que ce vitalisme superpose au mécanisme (« entéléchies » de Driesch, « dominantes » de Reinke, etc.).
Nodier, dans les genres divers qu’il cultive, s’en tient volontiers à la chimie d’avant Lavoisier, comme il reviendrait à l’alchimie ou aux vertus occultes d’avant Bacon ; après l’Encyclopédie, il croit aux songes ; en linguistique, il semble un contemporain de Court de Gébelin, non pas des Grimm ou des Humboldt.
. — À présent, de l’individu, passez à la race ; c’est l’inverse qui arrive ; sans doute ici, les caractères communs sont beaucoup plus répandus dans l’espace et durent bien davantage dans le temps, puisqu’ils se rencontrent dans un nombre indéfini d’individus contemporains et se répètent à travers un nombre indéfini de générations successives.
L’homme de génie universel a pour contemporains tous ceux qu’il admire : c’est la société des fidèles à travers les temps.
C’était l’époque où madame Récamier, cherchant à amuser l’inamusable M. de Chateaubriand avec les hochets de sa propre gloire, faisait lire chez elle devant lui, et devant un auditoire trié avec soin, la tragédie de Moïse, essai dramatique du grand écrivain ; c’était l’époque aussi où M. de Chateaubriand faisait confidence de quelques pages de ses Mémoires secrets à quelques-uns de ses contemporains d’élite dans le salon ouvert à un seul battant de son amie ; on invitait à ces solennités un aussi grand nombre de privilégiés que l’exiguïté de l’appartement en pouvait contenir.
En cherchant plus tard le modèle après la théorie, il le trouva dans la résignation divinisée jusqu’à la mort ; c’est-à-dire dans le grand philosophe chrétien, le Christ : de là le second titre des Consolations internes, l’Imitation de Jésus-Christ ; de là aussi le nom que ses contemporains lui donnent lui-même, le docteur des consolations.