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1619. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Contes de Noël »

Je ne sais ce que j’ai ; mais vraiment je n’ai guère le cœur à souper maintenant. […] Manger ça toute seule… ça durerait trop longtemps… Et puis ça me ferait trop gros cœur… Alors, Monsieur, si ça ne vous gênait pas… au lieu d’aller à la brasserie, nous rentrerions chez moi tout de suite… je ferais cuire le boudin et les crépinettes… Ça serait gentil et ça me ferait tant de plaisir !

1620. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XVII. Conclusion » pp. 339-351

vraiment, tu prends beaucoup de peine De tout mon cœur, bonjour. […] De tout mon cœur, bonjour.

1621. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préfaces de « Marion de Lorme » (1831-1873) »

Il fit ce que tout homme de cœur eût fait à sa place. […] Tout solitaire qu’il est, il s’associe du fond du coeur à la foule qui aime et salue ces beaux talents, honneur de la reprise actuelle de Marion de Lorme, MM. 

1622. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre V. Le mouvement régionaliste. Les jeunes en province » pp. 221-231

Charles Guérin, l’admirable et délicat poète du Cœur solitaire et de l’Homme intérieur, les noms de MM.  […] — Or j’ai fait desceller pour toi la tombe ancienne Où dorment les aïeux, où ma place m’attend, Et descendre moi-même au fond, pieusement, Ton cercueil de bois blanc sur les bières de chêne, Et j’ai pleuré…………………………… Puis, un jour, par hasard j’ai connu ton histoire, Pastoure qui chantais dans les seigles d’été, J’ai compris ton amour maternel, ta bonté, L’énigme de tes yeux qui hantait ma mémoire, Servante dont les doigts noueux étaient câlins… Je me sens aujourd’hui, sacrilège, ô servante, Dors, l’orgueil d’un poème est indigne de toi… Ô pays, le printemps va fleurir tes sous-bois : Les tourdelles déjà grapillent dans le lierre ; Plateaux et vous, blés noir, qu’un aïeul cultiva Terre dont j’ai compris la pauvreté hautaine C’est peut-être, en mon cœur, elle, qui réveilla L’atavisme endormi de ma race lointaine, L’orgueil des champs, l’orgueil des fruits, l’orgueil du sol Et dans le dernier fils des aïeux cévenols !

1623. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La défection de Marmont »

Rapetti a voulu que l’histoire en eût le cœur net sur Marmont. […] Une des plus grandes beautés de la nature humaine sur la terre, c’est de faire son devoir les yeux en larmes et pourtant de le faire d’un cœur ferme.

1624. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1866 » pp. 3-95

Oui, des sentiments si troubles, si complexes, si peu naturels, déconcertent toutes les notions que l’on a sur la famille, le mariage, le cœur humain ; en sorte que cet homme apparaît comme le sphinx des cocus. […] Les gens d’esprit, de génie, se tuant toute leur vie pour cette grosse bête de public, tout en méprisant, au fond de leur cœur, chaque imbécile qui le compose. […] Ce sont là des souvenirs qui font tressaillir… Il faut, pour s’intéresser au passé, qu’il nous revienne dans le cœur. […] « Nicolas, c’était un peu le type de l’ogre, reprend-elle, mais nuancé par des choses de cœur comme chef de famille. […] L’esprit, pour peu qu’on l’ait délicat, se soulève plus que le cœur contre ces pages, plus pleines encore d’inepties que de crimes.

1625. (1895) La science et la religion. Réponse à quelques objections

Aucun pontife ne l’a mieux senti que le pape Léon XIII, ni, l’ayant senti, ne l’a dit avec plus d’abondance de cœur et d’ardeur de persuasion. […] La préoccupation même de la foi détruit ainsi l’espérance en son cœur, et dans le naufrage de l’espérance sombre à son tour la charité28. […] — mais il y aura toujours, il y a toujours eu des moyens moraux d’atténuer ce que les conséquences de cette inégalité ont de plus troublant encore pour l’esprit que de douloureux pour le cœur. […] Berthelot. « La conscience est comme le cœur et il lui faut un au-delà !  […] Et dans une phrase ainsi conçue : « La Foi détruit ainsi l’Espérance en son cœur, et dans le naufrage de l’Espérance sombre à son tour la Charité » comment n’a-t-on pas vu qu’il était question de toute autre chose ?

1626. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIV. La littérature et la science » pp. 336-362

. — C’est à peu près comme si l’on disait : Il n’y a plus de roses ; le printemps a rendu l’âme : le soleil a perdu l’habitude de se lever ; parcourez tous les prés de la terre, vous n’y trouverez pas un papillon ; il n’y a plus de clair de lune et le rossignol ne chante plus, le lion ne rugit plus, l’aigle ne plane plus ; les Alpes et les Pyrénées s’en sont allées ; il n’y a plus de belles jeunes filles et de beaux jeunes hommes ; personne ne songe plus aux tombes ; la mère n’aime plus son enfant ; le ciel est éteint ; le cœur humain est mort. » Le fait est que l’imagination est en l’homme une faculté non moins essentielle et immortelle que la raison ; et c’est pourquoi la poésie non seulement garde à côté et au-delà de la science son royaume inviolable, mais aussi sait puiser dans la science-même des éléments de vie et d’inspiration. […] Certes, il y a dans ces victoires et ces désastres de l’homme lancé à la conquête de l’inconnu assez de grandeur d’imprévu, de courage, de périls, d’aventures dramatiques pour faire vibrer le cœur d’un poète. […] Sully Prudhomme, dans son noble poème de la Justice, a condensé en un dialogue tragique l’antagonisme de ces deux voix que l’homme moderne entend retentir au fond de sa conscience ; l’une est celle de la science, implacable et sereine, qui renverse sans pitié les vieilles idoles, les croyances chères à l’enfance des peuples, les préjugés enracinés par une longue accoutumance ; l’autre est celle du cœur qui proteste, qui tantôt a peur de ce bouleversement, s’attendrit sur les choses détruites, proclame l’inutilité du savoir humain et conseille au chercheur de s’endormir dans le plaisir et l’insouciance, tantôt se révolte, taxe la science d’impie, l’accable d’invectives passionnées, l’accuse de désenchanter la vie, d’anéantir le bonheur et la vertu. […] Sans doute c’est à condition que le poète soit poète ; qu’il sache transformer des idées en émotions ; qu’il ne rime pas des formules techniques, mais les sentiments éprouvés par une âme enthousiaste ; qu’il ne se pique pas d’enseigner, mais qu’il travaille à suggérer des impressions  ; qu’il s’appuie sur les données fournies par les savants, mais pour s’élancer jusqu’à des élévations qui les dépassent ; qu’il soit en un mot capable de comprendre et d’appliquer ce précepte d’André Chénier : L’art ne fait que des vers ; le cœur seul est poète ; ou, mieux encore, qu’il se conforme à cette définition de l’art proposée par Tolstoï124 : « C’est un organe vital de l’humanité, qui transporte dans le domaine du sentiment les conceptions de la raison. » Ces conditions marquent une fois de plus la limite que la science ne peut franchir dans son alliance avec la littérature sans lui faire tort. […] On verrait, par exemple, comment les théories microbiennes d’un Pasteur, ses recherches sur les infiniment petits des corps ont pour pendant les fines études des romanciers analystes, les subtiles anatomies morales d’un Bourget coupant, comme on l’a dit, un cheveu en quatre, ses tentatives pour pousser ses délicates dissections jusqu’au plus menu détail, son talent à saisir et à rendre visibles les infiniment petits du cœur humain ; on verrait comment cette prédominance de l’esprit d’analyse se marque, dans l’érudition du temps, par des discussions acharnées sur un point ou une virgule, par une foule de travaux minutieux dont les auteurs fouillent à la loupe avec une patience infatigable quelque coin exigu du passé.

1627. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1855 » pp. 77-117

C’était sa vie passée qui lui repassait sous les yeux… elle savait par cœur les cheveux de tous ces gens-là. […] … Parce que j’ai changé tous les quinze jours d’opinion… Si je disais toujours la même chose, il n’y aurait plus d’intérêt, plus de curiosité de mon feuilleton… on me saurait par cœur, avant de me lire. » — Je lis dans un journal que Valentin, le dessinateur de L’Illustration, est mort d’une attaque d’apoplexie, à Strasbourg. […] Après quelques entraînements et quelques ardeurs, un immense mal de cœur moral nous envahit et nous donne comme le vomissement de l’orgie de la veille. […] Mes beaux petits souvenirs fanés reprennent la vie dans ma tête et dans mon cœur, comme un herbier qui refleurirait, et chaque coin du jardin ou de la maison est pour moi comme un rappel, une retrouvaille, et aussi comme la tombe de plaisirs qui ne recommenceront plus. […] * * * — L’amour dans le rêve qui est toujours charnel et toujours produit par un contact, un attouchement, a cela de curieux que, si vous prenez le sein d’une femme, c’est comme si votre cœur la pelotait et que dans la sensation sensuelle apportée par un songe aux gens, se mêle une idéalité d’une douceur, d’un céleste, d’un au-delà des sens physiques, d’un ravissement ineffablement spirituel.

1628. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Romans et nouvelles » pp. 3-80

Ils se perdent de gaieté de cœur ! […] Vivant au xixe  siècle, dans un temps de suffrage universel, de démocratie, de libéralisme, nous nous sommes demandé si ce qu’on appelle « les basses classes » n’avait pas droit au Roman ; si ce monde sous un monde, le peuple, devait rester sous le coup de l’interdit littéraire et des dédains d’auteurs, qui ont fait jusqu’ici le silence sur l’âme et le cœur qu’il peut avoir. […] L’inconnu de ce que nous allions voir, la terreur d’un spectacle vous déchirant le cœur, la recherche de ce visage au milieu d’autres corps, l’étude et la reconnaissance de ce pauvre corps, sans doute défiguré, tout cela nous a fait lâches comme des enfants. […] » Une passion, des passions à la fois de toute la tête, de tout le cœur, de tous les sens, et où se mêlaient toutes les maladies de la misérable fille, la phtisie qui apporte de la fureur à la jouissance, l’hystérie, un commencement de folie. […] Et mon ambition, je l’avoue, serait que mon livre donnât la curiosité de lire les travaux sur la folie pénitentiaire 9, amenât à rechercher le chiffre des imbéciles qui existent aujourd’hui dans les prisons de Clermont, de Montpellier, de Cadillac, de Doullens, de Rennes, d’Auberive ; fît, en dernier ressort, examiner et juger la belle illusion de l’amendement moral par le silence ; que mon livre enfin eût l’art de parler au cœur et à l’émotion de nos législateurs.

1629. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Émile Zola »

Zola, toute cette cochonnaille, qu’il nous étale et dont il nous repaît, et dont il finit par nous donner le mal au cœur, c’est de l’art. […] Il a fini par bien poser, et d’aplomb, son archet sur les cordes de son violon, et il nous a joué cet air horrible de Thérèse Raquin qui fait saigner le cœur et l’oreille, et que nous allons entendre au théâtre pour qu’il les y fasse saigner mieux. […] Il est la consolation par la Nature, cette brute de Nature, qui continue indifféremment à produire des brutes comme elle, quand nous avons le cœur brisé ! […] Émile Zola — et pour moi ce n’est pas un éloge — doit être tenu pour le réaliste le plus accentué, le plus résolu, le plus systématiquement exaspéré d’une littérature qui n’a de cœur pour rien et mal au cœur de rien… Ni MM. de Goncourt, qui ont commencé la triste chaîne du Réalisme contemporain, ni Flaubert et tant d’autres, par lesquels elle a passé pour aboutir à M. 

1630. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIIe entretien. Phidias, par Louis de Ronchaud (2e partie) » pp. 241-331

Enfin la lassitude de tes bonnes pensées finissant par atteindre jour à jour, par atrophier ton cœur, et par t’assimiler ce mot de Brutus : Vertu, tu n’es qu’un nom ! […] Le spectacle de tant de désertions politiques à l’ennemi par tant de serviteurs des Bourbons déchus me soulevait le cœur ; je ne voulus pas les imiter : je voyageai en Asie pour voir de plus loin ou pour détourner mes yeux de tant de bassesses. […] L En approchant, convaincu par la lecture de la beauté du monument, j’étais étonné de me sentir froid et stérile ; mon cœur cherchait à s’émouvoir, mes yeux cherchaient à admirer. […] Le poète, au contraire, et j’entends par poète tout homme qui crée des idées, en bronze, en pierre, en prose, en paroles ou en rythmes ; le poète remue ce qui est impérissable dans la nature et dans le cœur humain. […] J’erre tout le jour, muet, dans ces ruines, et je rentre l’œil ébloui de formes et de couleurs, le cœur plein de mémoire et d’admiration !

1631. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre quatrième »

Il remettait entre les mains de ce saint homme au cœur tout frémissant encore des passions vaincues de la veille ; et c’est peut-être sous l’impression des premières douceurs que la parole de M. de Sacy avait fait couler dans son âme, qu’il écrivait sur un parchemin, en manière de mémorial, ces mots si pathétiques : « Joie, joie, pleurs de joie ! […] Les mots n’y sont plus seulement des chiffres qui fixent l’esprit, ce sont des paroles sonores qui font vibrer toutes les cordes du cœur. […] Je voudrais voir juger avec le cœur seul un homme qui a volontairement habité avec la souffrance, et qui, à l’exemple du Christ, a voulu, par sa mort au monde, racheter quelques-uns d’entre nous. […] Maintenant, n’est-ce pas lui rendre un hommage que son cœur eût dédaigné, que de parler avec louanges de la profondeur d’esprit qui se révèle dans ses Pensées ? […] Ce n’est plus l’esprit curieux dont parle Arnauld, mais l’ardent solitaire qui sentait, dans son cœur et dans sa foi, les blessures faites par ces odieuses maximes à la nature, à la raison, à la piété.

1632. (1929) La société des grands esprits

Le cœur ne s’y oppose point... De là les fameuses formules : « Le cœur a ses raisons… Dieu sensible au cœur » etc… Du reste, il est un peu difficile de savoir quel sens le mot prend dans Pascal. […] Au cœur, la contemplation de la voûte céleste suggère l’idée de Dieu ; à l’esprit, la science. […] Un rationaliste subsiste pourtant chez ce Jean-Jacques, virtuose de la « mélodie du cœur ». […] Chez lui, dit-il, rien pour le cœur.

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