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245. (1856) Cours familier de littérature. II « VIIe entretien » pp. 5-85

Ce monde, qui a commencé lui-même, finira, parce qu’il a commencé ; mais personne ne connaît ni sa vieillesse dans le passé, ni sa longévité dans l’avenir, excepté celui qui compte d’avance le nombre des révolutions de soleil dans les cieux, et le nombre des pulsations du pouls dans l’artère de l’homme. […] Mais, semblable à César à son heure suprême, Qui du manteau sanglant s’enveloppa lui-même, Quel que soit le destin que couve l’avenir, Terre, enveloppe-toi de ton grand souvenir ! […] Il n’est point d’avenir égal à ta mémoire ! […] Les républicains auraient été, aux yeux de l’avenir, les incendiaires du vieux monde. […] Que l’avenir me démente si j’ai tort, mais que les patriotes sérieux de l’Italie ne m’accusent pas !

246. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Fénelon. Sa correspondance spirituelle et politique. — II. (Fin.) » pp. 36-54

Un jour il apprend que le duc de Bourgogne, parlant moins en prince et en fils de roi qu’en pénitent et en homme qui sort de son oratoire, a dit que ce que la France souffrait alors, en 1710 (et elle souffrait, en effet, d’horribles maux), venait de Dieu qui voulait nous faire expier nos fautes passées : « Si ce prince a parlé ainsi, écrit Fénelon au duc de Chevreuse, il n’a pas assez ménagé la réputation du roi : on est blessé d’une dévotion qui se tourne à critiquer son grand-père. » Dans tout ceci, je n’ai d’autre dessein que de rappeler quelques traits de la piété noble, élevée, généreuse, à la fois sociable et royale de Fénelon, sans prétendre en tirer (ce qui serait cruel et presque impie à son égard) aucune conséquence contre l’avenir de son élève chéri, contre cet avenir qu’il n’a point été donné aux hommes de connaître et de voir se développer. […] Je trouve dans une lettre de lui à Mme de Montberon, alors qu’il approchait de la cinquantaine (1700), une peinture bien fine et bien circonstanciée de cet état insipide, aride, désabusé, où il se trouve : « Pour moi, je suis dans une paix sèche, obscure et languissante, sans ennui, sans plaisir, sans pensée d’en avoir jamais aucun ; sans aucune vue d’avenir en ce monde ; avec un présent insipide et souvent épineux… » Ces instants d’aridité et de dégoût, chez Fénelon, se peignent avec des traits qui font encore que son ennui ne ressemble pas à un ennui vulgaire.

247. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Maucroix, l’ami de La Fontaine. Ses Œuvres diverses publiées par M. Louis Paris. » pp. 217-234

Je continue : Il rit de ces prudents qui, par trop de sagesse, S’en vont dans l’avenir chercher de la tristesse             Et des soucis cuisants : Le futur incertain jamais ne l’inquiète, Et son esprit content, toujours en même assiette, Ne peut être ébranlé, même des maux présents. […] Mais c’est à Reims, sa dernière et véritable patrie, c’est au benoît préau qu’il en revient toujours, à la jolie maison qu’il se fait arranger et qu’on lui prépare (« Car j’aime la jeunesse, dit-il, aussi bien en maison qu’en autre chose ») ; c’est à son jardin, à ces allées qu’il y veut « toujours propres, toujours nettes et sablées comme celles de Versailles pour le moins » ; c’est à tout cela que va de lui-même son désir et son vœu : « La contrainte n’est pas mon fait, je n’aime que la liberté ; je ne l’ai pas haïe jusques ici, je l’aimerai à l’avenir encore davantage. » Il le redit de mille agréables façons : Somme toute, notre cher, les honneurs sont beaux, mais la liberté est admirable. […] Tous ces souvenirs servent à fixer l’image de Maucroix, et le recommandent dans l’avenir.

248. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Œuvres de M. P. Lebrun, de l’Académie française. »

. — Notre Lebrun reçut donc en plein le coup de soleil de l’Empire, et du premier jour il se consacra d’un cœur tout français et reconnaissant à en célébrer les gloires : Aigle, je m’attache à ton aile : Emporte-moi dans l’avenir ! […] Lebrun ne passa pas moins de neuf belles saisons, jouissant du bonheur présent, anticipant en idée l’avenir, prenant volontiers sa paresse pour de l’étude, préparant de longues œuvres, se jouant à de moindres essais, se laissant aller à l’inspiration du moment, s’oubliant peut-être parfois en d’autres doux songes et en des erreurs qui valent mieux que la gloire. […] j’étais jeune, plein d’avenir, ou du moins d’espérance ; mon cœur surabondait d’une continuelle joie, …, Je ne comptais que des heures sereines. » Quant aux descriptions en vers de ces lieux et de ces temps, et du charme particulier qui s’y attache, je ne puis que les indiquer à tous ceux qu’attire la vérité de l’impression : lisez le Hêtre sur l’écorce duquel le poète a gravé un nom ; c’est une pièce qu’on dirait de la dernière manière de Fontanes ; — lisez cette autre pièce plus grave, plus méditative, l’If de Tancarville, cet if dix fois séculaire, contemporain des premiers barons normands, et devant lequel le poète en contemplation s’écrie : Oh !

249. (1911) La valeur de la science « Troisième partie : La valeur objective de la science — Chapitre XI. La Science et la Réalité. »

La loi étant une relation entre l’antécédent et le conséquent, nous permet également bien de déduire le conséquent de l’antécédent, c’est-à-dire de prévoir l’avenir et de déduire l’antécédent du conséquent, c’est-à-dire de conclure du présent au passé. […] Les calculs qu’il pourra faire ainsi ne pourront pas lui enseigner que la loi de Newton cessera d’être vraie dans l’avenir, puisque cette loi est précisément son point de départ ; ils ne pourront pas davantage lui apprendre qu’elle n’était pas vraie dans le passé. Encore en ce qui concerne l’avenir, ses éphémérides pourront être un jour contrôlées et nos descendants reconnaîtront peut-être qu’elles étaient fausses.

250. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Éloges académiques de M. Pariset, publiés par M. Dubois (d’Amiens). (2 vol. — 1850.) » pp. 392-411

Il semblait croire pourtant que l’avenir, un avenir très lointain, réparerait pour l’humanité tous les maux du présent ; il combinait dans une certaine mesure le désabusement et la chimère. […] Dans l’éloge de Portal, voulant faire allusion au charlatanisme si connu dont ce médecin avait usé d’abord pour se mettre en renom, Pariset, après l’avoir couronné de tous les éloges, ajoute à la fin que « son seul tort, peut-être, a été, dans ses premières années, de prendre l’avenir en défiance, de ne pas croire à l’effet naturel de ses talents, et d’avoir voulu attacher des ailes à sa fortune ».

251. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Béjot, Alfred »

Rien de plus poétique, rien de plus dramatique, quand on songe que les Rimes maladives d’Alfred Béjot ne sont pas la forme fantaisiste d’une fiction cérébrale, un symbole d’une âme seulement douloureuse, mais qu’elles constituent le testament authentique d’un jeune écrivain mort plein d’avenir, à trente ans.

252. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Gaubert, Ernest (1880-1945) »

Et je détache, avec plaisir, des Poèmes de légende et d’amour, ces quelques vers : Et notre barque, aux flots menteurs de l’Avenir, Sous le ciel fastueux connue un dais de parade, Flottera, s’attardant et lente, vers la rade Où s’égrènent les chansons grêles des cigales, Où l’ombre des palmiers frêles, sur l’eau tranquille, Tisse au soir glorieux un manteau de silence Comme un rêve d’amour épandu sur les lies, Plein d’un chant nostalgique et doux de fiancées Dont les ailes du soir ont pris la douceur blanche.

253. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 août 1885. »

Chronique : Akedysseril36 Richard Wagner nous apparaît un Précurseur à l’Œuvre d’Art de l’avenir : en ses ouvrages poétiques et ses théoriques, il eut cette intelligence de l’Art complexe et unifié, où (après plusieurs siècles !) s’emmêleront, infiniment affinées, toutes les anciennes formes de l’expression artistique ; il a compris, et il a osé ; il nous a montré la définition et l’exemple de l’Art totalbp, parfait, vers lequel, isolément et obscurément, nous marchons, de si loin ; son œuvre est un signal pour les générations futures, — pour des époques si distantes, que Wagner est, plutôt que le Précurseur à l’Art de l’avenir, son Prophète. […] Cette littérature, fondamentalement Wagnérienne, est née, où réellement vit une pleine sensation de l’être, — où, dans les mots, des visions tout plastiques éclatent, ces musiques sonnent, — où, obsédé d’images, obsédé de sonorités, et décrivant littérairement, le poète a senti son idée vue, et en a oui les harmoniques accordances, — où flottent, étrangement, à travers les rayonnements et les enchantements des phrases, les paysages et les mélodies que le Wagner de l’avenir aurait dites en dessins et en orchestrations : une littérature Wagnérienne, cette littérature, absolument suggestive, — moins simple, moins précise, moins large, moins grandiose que l’art de Wagner, — plus hermétique ! […] Wagner, avec l’art de l’avenir, n’a d’ailleurs pas fait autre chose qu’une application expérimentale de la physiologie intuitive, qui faisait son génie, et d’où l’on pourrait tirer dès à présent les lois fondamentales de l’expérimentation esthétique.

254. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre septième. L’introduction des idées philosophiques et sociales dans la poésie. »

Ceux qui n’ont pas assez de force pour se refaire un avenir ferment les yeux au passé. […] L’homme, en qui Dieu travaille, Change éternellement de formes et de taille : Géant de l’avenir à grandir destiné, Il use en vieillissant ses vieux vêtements, comme Des membres élargis font éclater sur l’homme    Les langes où l’enfant est né. […] Voir notre Irréligion de l’avenir, p. 362. […] Voir notre Irréligion de l’avenir.

255. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Du docteur Pusey et de son influence en Angleterre »

Selon nous, ce besoin d’unité si profond, si consenti qu’il a fait son nom dans la langue et que le mot d’unitéisme se rencontre sous toutes les grandes plumes de ce temps, cache l’avenir d’une philosophie qui remonte vers la religion. […] qui prouvait seulement, comme l’a remarqué un historien, la différence d’agir du protestantisme au xvie  siècle et du protestantisme au xixe , et surtout le besoin retrouvé de l’union après la séparation consommée, c’est-à-dire, dans une donnée étroite encore mais qui finira par s’élargir, l’influence de cette idée d’unité qui tourmente la pensée universelle, et que Dieu a répartie dans tous les vents qui soufflent actuellement sur le monde, comme une semence de l’avenir. […] À une époque comme la nôtre, où les gouvernements bâtis sur la crainte s’écroulent sous la main des peuples devenus hommes qui veulent les remplacer par les gouvernements de l’amour, rentrer dans la grande communion chrétienne, — car les communions protestantes sont plutôt des dispersions chrétiennes que des communions, — reprendre nécessairement les sentiments de charité qu’engendre la foi catholique dans les âmes et leur faire jouer dans la politique de son avenir le rôle qu’a joué, dans celle de son passé, le sentiment d’un égoïsme inflexible, ce serait là un de ces spectacles qui ferait tomber l’imprécation de bien des lèvres et rallierait bien des cœurs. […] Du reste, ce n’est pas seulement l’Angleterre qui attire et captive l’attention des hommes vigilants aux yeux desquels l’état du catholicisme, en Europe, est la question de l’avenir comme il fut la question du passé.

256. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préface des « Chansons des rues et des bois » (1865) »

À un certain moment de la vie, si occupé qu’on soit de l’avenir, la pente à regarder en arrière est irrésistible.

257. (1890) L’avenir de la science « Sommaire »

Il faut en appeler à l’avenir. […] Ignorer pour que l’avenir sache.

258. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XIX. Progression croissante d’enthousiasme et d’exaltation. »

Prenez mon joug sur vos épaules ; apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez le repos de vos âmes ; car mon joug est doux, et mon fardeau léger 888. » Un grand danger résultait pour l’avenir de cette morale exaltée, exprimée dans un langage hyperbolique et d’une effrayante énergie. […] La grandeur de ses vues sur l’avenir était par moments surprenante.

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