J’arrivai, mais à peine eus-je effleuré les bords Qu’un frisson douloureux me saisit tout le corps, J’étais en face de mon âme. […] Étoile, serais-tu — mon âme le devine — Si chère au penseur agité, Parce que Dieu te garde en sa droite divine Comme clef de l’Éternité ! […] La chute, comme on voit, doit être un peu oubliée dans les hymnes de cette jeune et belle âme. […] Voici, par exemple, une petite pièce qui a un bouquet d’anthologie chrétienne, autant qu’en un genre tout contraire une petite épigramme de l’anthologie grecque peut sentir son Hymette et son Musée : Le pèlerin Regardant une étoile au ciel épanouie, Un jeune homme marchait ; son léger manteau bleu Diminuait toujours : ce manteau, c’est la vie, Le voyageur c’est l’âme, et l’étoile c’est Dieu, Mais les essais de vers blancs, qui terminent le volume, ne sont pas heureux ; mais on n’échappe jamais tout à fait, dans cette langue française adoptive, à des accents du premier terroir.
Vous le savez, Messieurs, vous pouvez m’en croire, chers élèves, une âme mauvaise reste toujours fermée au sentiment de l’admiration. Il n’en est pas de même des âmes généreuses et nobles. […] L’âme ainsi élevée à cette hauteur ne consentira jamais à de vulgaires abaissements. […] » Et ce cri d’une âme indomptable l’accompagne jusqu’au terme de son pèlerinage.
Il y a des Rousseau-femmes à présent qui ne craignent pas de tirer sous les yeux du public les rideaux de leurs âmes et de leurs alcôves, sans honte pour elles ni pour leurs enfants, si elles sont mères, ni pour leurs maris, si elles sont mariées. […] Mais elle a beau me parler de l’héroïque sincérité de l’âme ardente et forte dont elle recommande le volume présent au public ; elle a beau m’exalter cette âme indépendante et fidèle, qui n’oublie aucun de ses amours en les variant et qui ne combat rien dans son âme par la très morale raison que le temps qu’on perd à combattre contre soi, on ne fait pas Corinne, si on fait Mme de Staël, je me connais trop en logomachie pour ne pas reconnaître les idées, les façons de dire, les affectations du bas-bleu moderne, cette espèce à part et déjà si commune et pour être infiniment touché du spectacle que me donnent, à la fin de cette préface sur laquelle on a compté, ces deux antiques Mormones du bas-bleuisme contemporain dont l’une couronne l’autre de roses à feuilles de chêne, avec un geste tout à la fois si solennel et si bouffon !
« Les pouvoirs et les forces — dit Taine — ne sont que des entités verbales et des fantômes métaphysiques. » C’est la négation absolue des facultés de l’âme, ou plutôt la négation de l’âme elle-même. […] Toutes ces constructions de sensations, toutes ces reviviscences d’images, toutes ces études d’hallucination, toutes ces dentelles d’analyses physiologiques faites au microscope, tous ces fils de la Vierge qu’on nous montre entre l’index et le pouce, toutes ces bluettes, en fin, qu’on veut nous donner et qu’on nous donne, c’est pour que nous ne puissions apercevoir du premier regard le but où l’on veut nous conduire, et ce but, c’est de réduire les plus grandes et les plus vivantes choses qu’il y ait dans le cœur et la tête de l’homme : Dieu, l’âme et le devoir, à n’être qu’une vile sensation, un ridicule bruit de sonnette dont on tire le cordon, en attendant qu’avec ce cordon on puisse les étrangler. […] Il nie l’âme ; il n’y en a pas.
Il ne se rétracta point ; mais, ce jour-là, il avait eu peut-être la dernière bonne pensée qui ait traversé sa pauvre âme. […] Tout fils qu’il est, comme nous, de cette pénétrante et éparpillante civilisation qui tend de plus en plus à se substituer à toutes les patries, et qui éteindra un de ces jours jusqu’aux sons du cor de l’enfant des Alpes, l’auteur des Hirondelles a entendu, dans sa pensée, ce Ranz, qui n’était pas ailleurs, des montagnes de la Judée muette, et il en a mis l’écho dans des vers capables de donner le mal du pays aux âmes lâches qui ne l’éprouvent plus. […] Le livre de Louis Wihl n’était pas des vers pour des vers, des arabesques faites habilement autour d’un sujet délibérément choisi, des colorations objectives : c’était un livre vrai, d’une évocation formidable, où l’Hébreu est un véritable Hébreu, et qui devait surtout remuer profondément les âmes de la même foi que l’auteur. […] On ne trouve pas, il est vrai, non plus, dans ces vers d’un enthousiasme austère et d’une tristesse ardente, le flot incessant de magnifiques images que roule le Livre Surnaturel, toujours allumé, comme le chandelier d’or à sept branches, devant la pensée du poète ; mais on y trouve l’âme, l’élancement, le plus beau mouvement de la poésie lyrique, — le mouvement haletant vers Dieu, — la brièveté forte, la flamme courte, tout cela sur un fond de grande naïveté orientale très étonnante venant d’une plume moderne.
Il eut l’âme d’un guerrier, et il aima la pompe et la mollesse ; il fut humain dans sa législation, et barbare dans sa politique ; il pardonna des injures, et fit égorger ses parents et ses amis ; il donnait par humanité, et laissait piller les provinces par faiblesse. […] Toutes les fois qu’un homme à grand caractère est à la tête d’une nation, les esprits s’agitent, les âmes s’élèvent, les lettres et les arts ou fleurissent, ou renaissent, ou font effort pour renaître, ou suspendent leur chute. […] Il est étonné que son héros, avec si peu de forces, ait tenté une guerre si importante : « Assurément, lui dit-il, vous avez quelque intelligence secrète avec l’âme universelle et divine, qui daigne se manifester à vous seul, tandis que nous, ce sont des dieux subalternes et du second ordre qui sont chargés de nous conduire. » Ensuite il ne peut comprendre qu’il se soit trouvé dans l’univers des hommes qui aient eu l’audace de résister à Constantin : « Eux qui auraient dû, lui dit-il, céder, je ne dis pas à la présence de votre divinité, mais en entendant seulement prononcer votre nom. » Bientôt après, ce lâche orateur fait un crime à son héros d’avoir combattu lui-même, et de s’être mêlé au milieu des ennemis, d’avoir par là, dit-il, presque causé la ruine de l’univers. […] Et si l’on n’a l’âme tout à fait dénaturée ou par le despotisme, ou par la servitude, peut-on, en lisant de pareils éloges, ne point maudire jamais et l’orateur qui les a donnés, et le prince qui les a soufferts ?
Car les arts qui parlent aux sens peuvent être pervertis, s’ils ne remontent sans cesse à la source divine de l’âme ; et l’image impérieuse du beau moral les protège autant qu’elle les élève. Loin de ce tumulte impur des fêtes de Néron, si l’âme poétique palpitait encore, c’était dans quelques vers obscurs et mélancoliques de Perse, mort à trente ans, ou dans quelques indiscrets élans de Lucain, tué, plus jeune encore, par la tyrannie qu’il avait cru pouvoir impunément flatter. […] Philosophe avec plus d’imagination que de force d’âme, il devait se plaire et d’abord s’appuyer quelque peu à ces arts élégants, préludes et distractions d’une cour homicide. […] « Ô toi, dit-il, soit que, porté à travers les cieux sur le char de la gloire, à la hauteur où montent les grandes âmes, tu dédaignes la terre et te ries des tombeaux, soit que tu habites, aux bords élyséens, le bocage de paix où s’assemblent les guerriers de Pharsale, et que les Pompée et les Caton accompagnent ton noble chant ; soit que, fière et sacrée, ton ombre ignore le Tartare, et que tu entendes de loin les supplices des méchants, et n’aperçoives que derrière toi Néron, pâle sous le regard irrité de sa mère, apparais-nous dans ton éclat !
Comme diversion à ses graves volumes d’histoire, et pour se délasser, il ne cessait, en attendant, de se nourrir des ouvrages français du jour ; il les lisait dans leur primeur et en disait son sentiment avec intérêt, avec âme. […] Son temps était pris, son âme était comblée. […] Mais Jessie fait ce que font toutes les femmes, et bien des hommes aussi : elle commence par mettre dans sa religion tout ce qu’il y a de mieux dans une belle âme comme la sienne ; puis elle croit que c’est le caractère de la religion en général, et que toutes les religions y participent. […] Je deviens plus religieux, mais c’est d’une religion tout à moi, c’est d’une religion qui prend le christianisme tel que les hommes l’ont perfectionné et le perfectionnent encore, non tel que l’esprit sacerdotal l’a transmis… » C’est vers ce temps que, dans sa correspondance avec Mme Mojon, avec Mlle de Sainte-Aulaire, avec Channing, il nous découvre tout un côté nouveau de son âme. […] Cependant, quand d’autres le raillaient là-dessus, il les reprenait avec vérité, en faisant remarquer que « le bonheur de 30,000 âmes est aussi important que celui d’un grand État. » Son économie politique, telle qu’il l’avait adoptée et qu’il la prêchait en dernier lieu, est toute particulière et le caractérise.
De côté, sur ces tablettes odorantes, voilà les livres choisis, les maîtres essentiels du goût et de l’âme, et quelques exemplaires somptueux où se retrouvent encore tous les noms de l’amitié, les trois ou quatre grands noms de cet âge. […] Cette alternative de doute et de foi a fait longtemps de ma vie un mélange de désespoir et d’ineffables délices. » Voilà en ces deux mots l’histoire religieuse d’une âme qui est le type complet de beaucoup d’âmes venues depuis. […] On veut tout savoir sur le point de départ des grandes âmes avant-courrières. […] À ce collége de Dol, la troisième année de séjour fut marquée par la révolution d’âme et de sens qu’amena la puberté. […] À côté du penchant voluptueux, voilà tout aussitôt l’idée de l’honneur qui s’éveille : « car, ainsi que le remarque le poëte, les passions ne viennent jamais seules ; elles se donnent la main comme les Furies ou comme les Muses. » L’honneur donc (et nous citons toujours), l’honneur, cette exaltation de l’âme qui maintient le cœur incorruptible au milieu de la corruption, ce principe réparateur près du principe dévorant, allume en cette jeune âme un foyer qui ne va plus s’éteindre, et qui sera peut-être son principal autel.
Tel fut le sort de ce roman d’Eudore et de Cymodocée, épitaphe des prétentions du génie humain à ressusciter le poëme épique dans un siècle où il n’y avait plus de foi que dans le raisonnement des âmes pieuses et dans l’avenir des idées fortes. […] Elle me confondait avec sa propre vie, Voyait tout dans mon âme ; et je faisais partie De ce monde enchanté qui flottait sous ses yeux, Du bonheur de la terre et de l’espoir des cieux. […] Chateaubriand fut l’éloquent corrupteur du bien même ; il ne se borna pas à assurer la liberté des âmes, il voulut leur asservissement. […] Chateaubriand se tut, mais il ressentit l’injure au fond de son âme. […] Et il eut même ces talents divers à un degré qui se fait reconnaître de lui-même, qui devient sa conscience dans l’âme d’autrui, qui réfute toutes les critiques, qui renverse toutes les jalousies et qui fait dire à tout un siècle : Il est grand !
Cousin a été froid… comme l’âme d’un philosophe. […] L’âme de Mme de Longueville, dont il ne voit que les surfaces et les attitudes extérieures, M. […] L’étude sur la duchesse de Chevreuse porte les marques des troubles profonds de l’esprit et de l’âme du ci-devant philosophe. […] Cousin, qui veut lui donner la sombre grandeur d’un crime et qui prend une peine infinie à nous démontrer qu’elle était l’âme d’une conspiration, ayant pour objet l’assassinat de Mazarin. […] âmes aussi fortes que tendres qui, après avoir jeté tant d’éclat, avez voulu vous éteindre dans l’obscurité et le silence ; enseignez-moi à sourire comme vous à la solitude, à la vieillesse, à la maladie, à la mort !
Joubert, « cette âme qui avait rencontré un corps et qui s’en tirait comme elle pouvait », est un document humain aussi bien que Mme Bovary, ce corps qui a rencontré une âme et qui s’en débarrasse comme elle peut. […] Jamais âme plus basse n’habita un corps moins poétique. […] D’un côté, elle s’attache surtout à la peinture du vice, à la laideur morale, à la maladie répugnante à voir du corps ou de l’âme ; de l’autre, elle emprunte de préférence les sujets de ses peintures aux classes inférieures de la société. […] Que l’homme ait une âme ou non, qu’il soit libre ou non, il a en tout cas l’illusion de l’âme et l’illusion de la liberté. […] Les écrivains utiles à la France, ceux aussi qui prendront sur elle un durable empire, ceux qui l’aideront à se relever et auront place dans sa reconnaissance, ce sont les écrivains qui lui referont une âme virile.
Au-delà, l’âme était tout aussi inconnue. » Il aboutit logiquement à l’ascétisme, au dégoût de la chair, à cause de « l’impossible union des âmes par les corps ». […] En revanche, l’amour des âmes continue après la mort. […] Tagore et montrer lui aussi une âme profondément religieuse. […] Ces jeunes catholiques d’aujourd’hui ont des âmes d’inquisiteurs. […] Ouvrez votre Bible et songez à votre âme !
Proust s’appuie tacitement, et sans bien s’en rendre compte peut-être, sur une vision purement phénoméniste de l’âme. […] À aucun moment il ne semble ressentir cette inspiration qui permet de pénétrer dans une âme et de se l’asservir. […] Son sort était lié à l’avenir, à la réalité de notre âme dont elle était un des ornements les plus particuliers, les mieux différenciés. […] Et ils prennent ainsi une sorte de vérité qui les dépasse ; ils deviennent un moment de l’âme humaine, une forme générale du sentiment. […] Son sort était lié à l’avenir, à la réalité de notre âme dont elle était un des ornements les plus particuliers, les mieux différenciés.