C’était un mélange original de malice bourgeoise, et de mouvements littéraires, employés avec une aisance, un à-propos saisissants, et soutenus d’une mimique expressive : car Boileau jouait en perfection ses plaisanteries. […] Despréaux, avec une adresse perfide, se fait prier et supplier par un Père Jésuite de lui nommer l’unique moderne qui surpasse à son gré les anciens ; à ce nom de Pascal, si malignement retenu et brusquement lâché, stupeur du bon Père, qui gratifie d’une épithète injurieuse l’auteur des Provinciales ; là-dessus, voilà notre poète hors de lui, qui oublie son artificieuse ironie, et s’emballe à fond, criant, trépignant, et courant d’un bout de la chambre à l’autre, sans plus vouloir approcher d’un homme capable de trouver Pascal faux : cette merveilleuse page, dont je ne puis reproduire la couleur et la vie, donne la sensation de l’homme même : c’est bien lui, avec sa malice railleuse et sa sincérité passionnée, et toujours prenant trop au sérieux les idées pour s’en jouer avec la grâce indifférente de l’homme du monde, qui sacrifie sans hésiter n’importe quelle opinion à la moindre des bienséances. […] Il y venait dîner avec des amis communs et causer belles-lettres ; ou bien il amenait sa petite famille, et Boileau, dépouillant sa gravité, jouait avec les enfants aux quilles, où il se piquait d’être de première force, ou les menait promener dans le bois de Boulogne.
Quand, dans l’asile d’Earlswood, un imbécile peut répéter exactement une page de n’importe quel livre, lue bien des années auparavant et même sans la comprendre ; quand un autre sujet peut répéter à rebours ce qu’il vient de lire, comme s’il avait sous les yeux une « copie photographique des impressions reçues » ; quand Zakertorf joue, les yeux bandés, vingt parties d’échecs à la fois, sans regarder autre chose que des échiquiers imaginaires ; quand Gustave Doré ou Horace Vernet, après avoir attentivement contemplé leur modèle, font son portrait de mémoire ; quand un autre peintre copie de souvenir un Martyre de saint Pierre par Rubens avec une exactitude à tromper les connaisseurs, on devine bien que la conservation et la reproduction si exactes des impressions reçues doit avoir ses causes dans les organes. […] Supposez qu’une boîte à musique, capable de jouer plusieurs airs, tombe à terre pendant qu’elle en joue un et que le cylindre garni de pointes se mette à rouler avec une très grande rapidité, de manière à briser ou à altérer ses pointes : un air entier pourra disparaître sans que les autres soient atteints, Tous les mouvements réflexes qui répondent à l’association des mots grecs entre eux et avec les mots français correspondants peuvent se trouver paralysés, tandis que les systèmes de réflexes répondant au français, appris dès l’enfance et solidement imprimés dans le cerveau, peuvent résister à la commotion.
Son amant, un Américain nommé Peterson, tourmenté par le sang et qui n’a pris une maîtresse que sur ordonnance de médecin, la mène, comme unique distraction, tous les soirs, jouer aux dominos dans un café, avec toujours les mêmes figures de compatriotes. […] En revoyant ces endroits aimés, je me ressouviens des uns et des autres, et de mes petits compagnons et des petites demoiselles qui étaient alors mes camarades : les deux Bocquenet, dont l’aîné courait si fort, mais ignorait l’art des détours ; Antonin qui semblait un petit lion ; Bazin qui se plaignait toujours du sort et ne décolérait pas de perdre ; Eugène Petit, le frère de lait de Louis, qui nous jouait de la flûte dans le dortoir où nous couchions sous la même clef. Je n’oublie pas le très bénin Jupiter de notre bande, le roi constitutionnel de nos jeux, « le père Pourrat », le précepteur de Louis, qui avait l’intelligence de nous montrer parfaitement à jouer et le bon esprit de s’amuser avec nous, autant que nous, — affligé du seul défaut de nous lire sa fameuse tragédie intitulée : Les Celtes.
Or une représentation peut être en état de jouer utilement ce rôle tout en étant théoriquement fausse. […] Rien donc ne nous assure par avance qu’il y ait une sphère de l’activité sociale où le désir de la richesse joue réellement ce rôle prépondérant. […] Tout au moins, si, parfois, la nécessité l’oblige à y recourir, qu’il le fasse en ayant conscience de leur peu de valeur, afin de ne pas les appeler à jouer dans la doctrine un rôle dont elles ne sont pas dignes.
… La main des Parques blêmes De vos jours et des miens se joue également. […] Vous ne jouez, ni ne travaillez, ni ne vous souciez du ménage ; et, hors le temps que vos bonnes amies vous donnent par charité, il n’y a que les romans qui vous divertissent. […] « Cependant faites bien mes recommandations à notre marmot et dites-lui que, peut-être, j’amènerai de ce pays [de ce pays-là, du Limousin] quelque beau petit chaperon [c’est-à-dire quelque jeune fille coiffée du chaperon] pour le faire jouer et pour lui tenir compagnie. » Ceci encore n’est-il pas tout à fait du ton d’un mari aimable, badin, un peu taquin aussi, écrivant à sa femme, pour la faire sourire, pour la faire gronder un peu et pour qu’elle lise la chose à ses amis en riant et en disant : « quel impertinent !
Ce vent de la parole dont Villemain a joué toute sa vie, il en joue aujourd’hui pindariquement pour Pindare ; mais une vue réelle, un mot profond, une pensée qui attire une autre pensée, voilà ce qu’en six cents mortelles pages nous défions de trouver une fois. […] C’est toujours ce dictionnaire d’où il tombe, dans un certain ordre, des mots avec lesquels on fait du style et on joue la pensée, ce qui ravit les sots de voir qu’on peut se passer d’elle !
Fantasmagorie historique jouée, non sans prestige et sans puissance, avec une rapidité et quelquefois un éclat électrique, à l’aide de faits obscurs, vulgaires et même ennuyeux, ce remuement de chroniques oubliées et qui méritent de l’être est plus fatigant qu’instructif. […] Ferrari, les hommes sont les esclaves nés de circonstances incompréhensibles, s’ils ne sont rien de plus que les pièces d’un mystérieux échiquier où nulle main ne joue et qui est lui-même le jeu, — de misérables pions, incrustés parfois de qualités somptueusement inutiles, les faits sont brutaux et sont bêtes, et l’histoire n’a plus que des faits ! […] Il joue du chiffre avec une facilité prodigieuse dans son livre, sur les Révolutions italiennes, ce livre brillant où les chiffres eux-mêmes brillent comme de l’esprit, et dans lequel il suppute sept mille et quelques cents révolutions, qu’il appelle bravement l’état normal de l’Italie !
J’avais un moment imaginé de le faire jouer au billard. […] Enfin les routes sont pleines d’enfants qui jouent et gaminent, encouragés par le sourire tranquille de leurs parents. […] Lors des glorieuses de Juillet, mon père était très légitimiste, et il a joué à la hausse sur les Ordonnances ! […] Louis Blanc y fait sa première apparition avec son physique ecclésiastique, et dans une redingote qui joue la lévite. […] Une petite fille, qui a un minuscule sac au dos, avec un biscuit de mer, en guise de pain de munition, joue entre les jambes de son père.
Il y a un mysticisme divin ; il y a un mysticisme sans Dieu et, entre ces deux extrêmes, plusieurs nuances où les intelligences jouent à sauter de branche en branche, comme les oiseaux d’une forêt. […] Ecoute ceci que mourante elle serrait ma main sur sa joue Et me la baisait, fixant sur moi ses yeux. […] Ghil jouera faux pour mon imagination visuelle, et l’r et l’o, au lieu de sonner comme des cuivres glorieux, me donneront, si on les joint, l’ingénuité des petites flûtes. […] Ou, si je l’admets, ce sera comme jeu ; or, l’art ne joue pas ; il est grave, même quand il rit, même quand il danse. […] Zola regardait la lune se jouer sur l’onde azurée du ruisseau bordé de saules où Ninon, chantant une barcarolle, prend un bain sentimental.
Soit prudence, soit bonheur, il jouit parmi nous d’un privilège digne d’envie ; en ménageant une part de sa puissance, il a joué complètement le rôle qu’il avait rêvé ; il n’a rien à regretter. […] Si M. de Lamartine n’eût pas joué imprudemment avec la langue de la science et se fût contenté de la langue poétique, je n’aurais pour cette harmonie que des éloges, et je serais heureux de les prodiguer. […] M. de Lamartine, dans cette assez risible occasion, trouve moyen de jouer la fois le rôle de Louis XIV et le rôle de Dangeau. […] Hugo ignore, oublie, ou méprise l’histoire ; quelle que soit la conjecture à laquelle les spectateurs s’arrêtent, il est évident que l’histoire ne joue aucun rôle dans les drames de M. […] Pour peu qu’elle joue un second rôle pareil à celui de Marie de Neubourg, elle s’envolera vers les régions éthérées, et la France n’aura plus qu’à la pleurer.
J’ai recours à des comparaisons, ne trouvant pas de manière droite pour caractériser cette espèce de dépravation de l’art, où il y a moins d’art que d’artifice, moins de choses que de figures, et où l’esprit, faute d’avoir à s’employer au service de la raison et de la vérité, en arrive à jouer avec ses qualités comme avec ses défauts, et à s’amuser de soi-même. […] Le même Voiture jouait avec tant d’ardeur, dit Tallemant des Réaux, qu’il était forcé de changer de chemise toutes les fois qu’il sortait du jeu. […] Des comédiens de Clermont l’avaient joué sur le théâtre ; ils furent réprimandés99. […] Cependant Dom Japhet d’Arménie, composé et probablement représenté en 1653, se jouait encore en 1665, et comme on dit, en style de théâtre, faisait plus d’argent que Cinna 104. […] C’est grâce, sans doute à un comédien de beaucoup de verve, et de gaieté, Poisson, qui en jouait le principal rôle.
Il payait, par son poème d’Hèlèna, son tribut d’enthousiasme à la cause des Grecs ; en même temps, par les pièces de la Dryade, de Symètha, il jouait de la flûte sur le mode d’André Chénier, ressuscité depuis quelques années et mis en lumière. […] Cependant il n’y eut pas moyen pour lui de se méprendre plus longtemps sur l’impression générale, lorsque des amis l’eurent éclairé de toutes parts, comme on avait éclairé autrefois M. de Noyon ; mais ici il n’y avait rien eu de prémédité, comme cela avait eu lieu pour M. de Noyon, raillé et joué par l’abbé de Caumartin75 : la seule opposition sérieuse et réelle avait été dans la contradiction nécessaire et, s’il faut le dire, l’incompatibilité d’un esprit fin, net, positif, pratique, tel que celui de M. […] Les derniers vers, où il montre le pauvre mendiant, tout réconforté et encouragé par de bonnes paroles, se remettant à jouer et jouant mieux qu’il n’avait jamais fait, sont des plus heureux : Son regard attendri paraissait inspiré, La note était plus juste et le souffle assuré. […] le plus fort, à ce jeu, est aussi le plus faible : L’homme a toujours besoin de caresse et d’amour… Quand ses yeux sont en pleurs, il lui faut un baiser… Dalila pourtant, cette Dalila qui dort sur ses genoux, s’est cruellement jouée de lui ; elle s’est vantée, entre autres choses, de tout lui inspirer sans rien ressentir : A sa plus belle amie elle en a fait l’aveu : Elle se sait aimer sans aimer elle-même ; Un maître lui fait peur.
III Ce qu’il y a de remarquable dans ce jeune homme, Wolfgang Mozart (la plus prodigieuse organisation musicale qui fut jamais), c’est que la musique et l’homme en lui ne sont, pour ainsi dire, qu’un seul être ; la musique est couchée avec lui dans son berceau, il balbutie à l’âge de trois ans, sur les genoux de son père ou de sa mère, des airs au lieu de paroles ; la musique joue avec lui sur tous les instruments sonores comme avec les jouets de ses premières années ; la musique écrit par sa main des sonates pour le clavecin, des fugues pour l’orgue des cathédrales ou des opéras pour les théâtres d’Italie dès son adolescence ; elle voyage avec lui de Milan à Naples, de Naples à Venise, de Venise à Vienne, de Vienne à Paris, enlevant à toutes ces langues, à tous ces climats, à toutes ces vagues, à tous ces vents, leurs harmonies, comme la brise, en parcourant la terre, lui enlève tous ses parfums pour s’embaumer elle-même. […] Dans la scène suivante, l’hôtesse, appelée un moment par l’arrivée d’autres voyageurs, disparaît ; elle revient bientôt, accompagnée d’une de ses servantes, à qui elle fait chanter un air allemand dont les paroles signifient : « J’aime un homme du pays d’Italie. » Le poète allemand Goethe n’est pas plus séduisant dans Marguerite, plus naïf dans Mignon ; d’Aponte joue sans préméditation le rôle de Faust et de don Juan, à son premier pas sur la terre des magies de la poésie et de l’amour. […] XIX Quant à Mozart lui-même, il n’était pas destiné par la nature à jouer longtemps ainsi avec les malignités du sort. […] Le diable se serait-il joué de moi dans mon enivrement ?
Ensuite, leur faim apaisée, la jeune fille et les suivantes détachent leurs voiles pour jouer au ballon. » Ici, nous dit M. […] Quelques familles dépaysées, pleines d’enfants, y jouent au soleil avec la misère, tandis que l’aînée des sœurs, qui garde la famille en l’absence du père et de la mère, belle quoique pâle et maigre sous ses haillons, regarde, adossée à la porte, le jeu des enfants, et suit de l’œil avec curiosité l’étranger qui lui demande l’adresse et la clef de ces labyrinthes. […] Les volets battent contre les murs ; un soleil pâle entre dans les enclos par dessus les haies ; les enfants jouent sur l’herbe au seuil de l’habitation de leurs mères ; tout présente à l’œil des visiteurs étonnés l’aspect d’une guinguette morte des environs de Paris, enclavée par hasard dans une enceinte, et où le silence et le recueillement d’un couvent ont succédé tout à coup au tumulte des fêtes, au cliquetis des verres et au bruit des instruments et des danses du peuple. […] La pleine clarté d’un beau jour entrait dans sa chambre par la fenêtre ouverte avec les bouffées de vent du printemps, qui jouait avec les rideaux, se concentrant sur sa mâle et athlétique figure !
Mais le sceptique qui prêche le paradis et l’enfer, auxquels il ne croit pas, au peuple qui n’y croit pas davantage, ne joue-t-il pas un rôle mille fois plus équivoque. « Amis, laissez-moi la jouissance de ce monde-ci, et je vous promets la jouissance de l’autre. » Voilà certes une bonne scène de comédie. […] Il est impossible d’aimer le peuple tel qu’il est, et il n’y a que des méchants qui veuillent le conserver tel, pour le faire jouer à leur guise. […] Honte à ceux qui fondent leurs espérances sur la stupidité, qui se réjouissent de la multitude des sots comme de la multitude de leurs partisans et croient triompher quand, grâce à une ignorance qu’ils ont faite et qu’ils entretiennent, ils peuvent dire : « Vous voyez bien que le peuple ne veut pas de vos idées modernes. » S’il n’y avait plus d’imbéciles à jouer, le métier des sycophantes et des flatteurs du peuple tomberait bien vite. […] Quand on joue sa tête pour sa pensée, il n’y a que les possédés de Dieu, les hommes entraînés par une conviction puissante et le besoin invincible de parler qui se mettent en avant.
c’est un mauvais homme… Il y a déjà six mois, j’écrivais à Flaubert : « Je crains que Sainte-Beuve, d’ici à quelque temps, ne nous joue quelque tour… » C’est lui qui a écrit à Nefftzer… il y a de son ami d’Alton-Shée dans tout cela. » Et avec une parole d’amertume sifflante : « Il m’écrivait, au Jour de l’an, que tout le confortable et le bien-être qui entouraient sa maladie, il me les devait… Non, on ne se conduit pas comme ça. » Et elle suffoque, elle étouffe, elle se bat la gorge avec le haut de sa robe brodée, qu’elle agite à deux mains, et des larmes, qu’elle dévore, lui montent dans la voix, que l’émotion étrangle par moments. […] On joue à de petits jeux d’esprit innocents et érotiques. […] En entrant, nous avons devant nous le profil perdu de l’accusé, à la pommette saillante qui fait une ombre sur sa joue. […] Un moment seulement, à l’interrogation du président, lui disant : « Vous avez joué le soir, suivant un témoin, avec une chance incroyable ?
Comme aujourd’hui elle va à la Comédie-Française entendre Molière et Racine parce qu’ils sont joués d’une façon continue. […] De par la différence des cerveaux, un enfant de quinze ans, si l’on le choisit intelligent (car on trouve que la majorité des femmes sont ordinaires, le plus grand nombre des jeunes garçons stupides, avec quelques exceptions supérieures), jouera adéquatement son rôle, exemple le jeune Baron dans la troupe de Molière, et toute cette époque du théâtre anglais (et tout le théâtre antique) où l’on n’aurait jamais osé confier un rôle à une femme. […] On joue aujourd’hui, comme il y a un an, en plein vent le Diable Marchand de Goutte et l’idée a été complétée au précédent Mercure. […] On devrait ne pas ignorer qu’il est à peu près prouvé aujourd’hui que jamais, au moins du temps de Shakespeare, on ne joua autrement ses drames que sur une scène relativement perfectionnée et avec des décors.
Le Portugais, dont la langue a toutes les magnificences de l’espagnol sans en avoir les défauts, a la supériorité dans l’aventure et dans l’audace ; il a joué sa fortune sur toutes les vagues de l’Océan. […] Boileau aurait pu l’imiter complétement et lui dérober le stylet sanglant de la satire politique : il avait pour cela assez d’âcreté dans la bile et de dégoût de l’humanité ; mais la satire politique était impossible à un poète qui ne voulait pas jouer sa tête contre un beau vers sous Louis XIV. […] Qu’à son gré désormais la Fortune me joue ; On me verra dormir au branle de sa roue ! […] Aussi est-il par excellence le poète des esprits ingénieux, mais médiocres, qui n’ont pas d’ailes et qui jouent terre à terre à la poésie, au lieu de se laisser emporter par elle dans son ciel ; Musa pedestris !
C’est ainsi que pour exalter Corneille, en qui il voit Eschyle, Sophocle, tous les tragiques grecs réunis, il sacrifie et diminue Racine ; c’est ainsi que, pour mieux célébrer l’époque de Louis XIII et de la régence qui succéda, il déprime le règne de Louis XIV ; que, pour glorifier les Poussin et les Le Sueur, dont il parle peut-être avec plus d’enthousiasme et d’acclamation que de connaissance directe et de goût senti et véritable, il blasphème et nie l’admirable peinture flamande ; il dit de Raphaël qu’il ne touche pas, qu’il ne fait que jouer autour du cœur, « Circum praecordia ludit ». […] Le propre de Bossuet est d’avoir ainsi du premier coup d’œil toutes les grandes idées qui sont les bornes fixes et les extrémités nécessaires des choses, et qui suppriment les intervalles mobiles où s’oublie et se joue l’éternelle enfance des hommes.
En santé et dès qu’il était tout à fait à lui-même, il avait besoin de joutes, de contradictions, de gageures, de palinodies, en un mot, de tout ce qui donne une petite comédie au public ; et comme on savait que ces sortes de querelles lui plaisaient et qu’il excellait à y jouer son rôle, on les faisait naître sous ses pas. […] Il s’émancipait et jouait tout de bon comme s’il n’avait pas été avec des princes.
Désaugiers chante on ne peut mieux, joue très bien dans ses chansons, et toutes paraissent bonnes dans sa bouche ; je n’ai point cet avantage, et, dans une maison étrangère où je ne serais pas bien soutenu, j’aurais tout à craindre d’une pareille rencontre. […] David d’Angers avait fait de lui un beau médaillon en marbre, et on le mit en loterie à 20 francs le billet ; la loterie, bien entendu, était toute au bénéfice du pauvre rapsode : « Si nous plaçons promptement ces billets, lui dit Béranger, vous aurez enfin de quoi renouveler cette maudite garde-robe qui s’en va toujours trop vite pour nous autres pauvres diables ; car je me rappelle le temps où je n’avais qu’un pantalon, que je veillais avec un soin tout paternel, et qui ne m’en jouait pas moins les tours les plus perfides.
Tantôt c’est la femme politique toute pure, sans la galanterie ou sans rien du moins qui y ressemble par la grâce, la femme politique âpre, active, ardente, desséchée comme la joueuse qui a passé des nuits autour du tapis vert, ayant besoin de tenir les cartes à tout prix et de jouer la partie de l’Europe pour ne pas mourir comme d’inanition, pour ne pas hurler d’ennui. […] Ses besoins d’aimer, ses ambitions d’intelligence, ses jalousies tendres qui se rassemblaient et s’accumulaient faute de mieux sur une tête chérie, ses soifs de Tantale qu’elle ne peut assouvir, ses accès de dévouement à la Décius qu’elle ne sait à quoi employer, ses colères à la Tarquin dans lesquelles elle abat impitoyablement tout ce qu’elle a dédaigné de cueillir et de respirer, tout cela s’épanche avec plus de naïveté qu’on n’aurait cru, et les ressorts humains, les mobiles naturels jouent fort distinctement devant nous, sans préjudice de la fibre religieuse fondamentale.
J’avais une part beaucoup plus active dans la conversation que je n’ai chez Mme de Staël ; j’animais les autres, je les faisais parler, et sentant qu’on était content de moi, je l’étais aussi. » Rien n’est plus naïf ; on voit jouer le fil de l’amour-propre, on saisit à nu le motif du jugement. […] C’est dans cet ensemble qu’elle excellait ; c’est cette trame diverse et mobile qu’elle agitait, qu’elle variait et recommençait sans cesse avec un art de magicienne ; c’est au cœur de cet orchestre où elle ne jouait pas seule, où elle tirait parti de tous, où elle devinait et occupait chacun, où elle associait les autres à son talent et se faisait pardonner sa supériorité en créant l’harmonie et en marquant l’accord jusque dans les dissonances, c’est là, dans son cercle à elle, qu’il fallait la voir ; et Byron, qui avait senti et noté le défaut, a aussi reconnu le charme et le triomphe.
Dans ce court intervalle des affaires, ils jouaient au Tibulle ou à l’Anacréon. […] Ne parlez plus de vos grâces païennes : Je mets Thalie, Euphrosine, Aglaé, A cent piques des Parisiennes… Ailleurs, dans une pièce intitulée le Jeu de Boules (et ceci devient tout à fait anacréontique) : Près de Paphos, dans des bois solitaires, Les Jeux, les Ris et les Grâces légères Au cochonnet jouaient à qui mieux mieux.
Un soir, Mme de Motteville, le célèbre auteur de Mémoires, était dans le salon de la duchesse de Bouillon et s’oubliait à rêver, tandis qu’on jouait autour d’elle aux propos interrompus. […] » aurait demandé malignement la marquise dans le jeu qui se jouait, et chacun de répondre : « Le lierre. » Tous les regards se seraient portés alors sur Mme de Motteville qui avait du lierre dans ses cheveux.
Enfin l’étincelle même du génie en ce qu’elle a d’essentiel, il ne l’a pas atteinte, et il ne nous la montre pas dans son analyse ; il n’a fait que nous étaler et nous déduire brin à brin, fibre à fibre, cellule par cellule, l’étoffe, l’organisme, le parenchyme (comme vous voudrez l’appeler) dans lequel cette âme, cette vie, cette étincelle, une fois qu’elle y est entrée, se joue, se diversifie librement (ou comme librement) et triomphe. — N’ai-je pas bien rendu l’objection, et reconnaissez-vous là l’argument des plus sages adversaires ? […] Ce résumé, on peut le croire, ne terminait rien : la cohue d’opinions subsistait ; il y avait en ces jeunes têtes si doctes, si enivrées de leurs idées et si armées de la parole, excès d’intolérance, d’outrecuidance, c’était inévitable ; on s’injuriait, mais on ne se détestait pas ; les récréations, avec leur besoin de mouvement et d’exubérance physique, raccommodaient tout, et quelquefois le soir on dansait tous ensemble tandis que l’un d’eux jouait du violoncelle et un autre de la flûte.
En bannissant tous les principes de droiture et vérités reconnues, il se joue de tout traité et alliance. […] « … Il serait bien malheureux que le repos de l’Europe dépendît de deux puissances si connues dans leurs maximes et principes, même en gouvernant leurs propres sujets ; et notre sainte religion recevrait le dernier coup, et les mœurs et la bonne foi devraient alors se chercher chez les barbares. » Elle fait un léger mea culpa sur l’affaire de la Pologne, sur ce partage où l’Autriche s’est laissé induire (le mot est d’elle), en se liant avec ces deux mêmes puissances qu’elle qualifie si durement ; elle a l’air d’en avoir du regret ; et l’on entrevoit pourtant, par quelques-unes de ses paroles, que si pareille chose était à recommencer, et si l’Autriche, abandonnée d’ailleurs, n’avait point d’autre ressource qu’une telle alliance, elle pourrait encore la renouer sans trop d’effort et jouer le même jeu, en se remettant à hurler avec les loups : « Car je dois avouer qu’à la longue nous devrions, pour notre propre sûreté ou pour avoir aussi une part au gâteau, nous mettre de la partie. » La femme ambitieuse laisse ici passer le bout de l’oreille.
Or, je trouve que, dans ses griefs contre Rome, il n’y a rien dont l’abbé de La Mennais l’ancien, celui d’autrefois, celui même de l’Avenir, pour nous en tenir là, n’eût eu de quoi se jouer si on lui en avait fait matière à objection. […] On prendrait, d’après notre sèche discussion, une idée bien inexacte du dernier livre de M. de La Mennais, si l’on ne s’attendait pas cependant à y trouver un vrai charme de récit, et, sauf le deuil de la foi perdue, auquel peu de lecteurs seront sensibles, bien des richesses d’une grande âme restée naïve, La gaieté elle-même n’en est pas absente : je n’en veux pour preuve que cette page légère où se jouent toutes les grâces d’ironie d’une plume laïque et mondaine.
On se permet de plaisanter sur sa propre bassesse, sur ses propres vices, de les avouer avec impudence, de se jouer des âmes timides qui répugnent encore à cette avilissante gaieté. […] Un tour de force assez difficile, qu’on se permettait dans l’ancien régime, c’était l’art d’offenser les mœurs sans blesser le goût, et de jouer avec la morale, en mettant autant de délicatesse dans l’expression que d’indécence dans les principes.
Comme toujours, Rabelais ne provoquait pas de colères qu’il ne se sentît de force à braver : il ne jouait la partie qu’à coup sûr. […] La nature n’est pas pour lui l’inaccessible unité qui se joue à s’exprimer dans l’écoulement éternel de la trompeuse multiplicité.
Terre édénique où la faune et la flore sont uniquement bienfaisantes, où il n’y a ni poisons ni serpents, où les hommes ne travaillent ni ne peinent, où les petites filles rieuses passent leur vie à se couronner de fleurs et à jouer, toutes nues, dans les clairs bassins où tombent les citrons et les oranges. […] L’un d’eux tient le piano et joue du Chopin.
Voilà la vérité, déjà enclose dans le vieux mythe d’Orphée, bâtisseur de villes et autour de laquelle se jouait le caprice de sa dialectique. […] Paul Valéry, elle est plausible, Hugo n’avait-il pas émis la prétention de modeler son œuvre sur l’univers et n’est-ce pas l’éternel conflit du bien et du mal qui s’y joue, qui lui avait suggéré son procédé de l’antithèse ?
Le contresens avait une large part dans ces étranges créations, et j’espère montrer un jour le rôle qu’il a joué dans la formation de nos dogmes les plus essentiels ; ou plutôt l’esprit sans critique voulait à tout prix retrouver sa pensée dans le passé et arrangeait pour cela le passé à sa guise. […] Il avait été assez fin pour jouer tous les diplomates de l’Europe, assez hardi pour célébrer la messe de la liberté et se constituer schismatique ; mais, quand il s’agit d’une question théorique, il est un esprit faible et trouve tout simple que Nabuchodonosor ait été changé en bête, que l’âne de Balaam ait conversé avec son maître et que les diplomates du Concile de Trente aient été assistés du Saint-Esprit.
On y a peut-être fait jouer d’autres ressorts autrefois, il y a bien longtemps ; mais les peuples modernes seront plus longtemps encore comme il les a peints. […] Pour s’en guérir, il devrait suffire de relire dans les anciens éloges ces parties si applaudies autrefois : ce sont celles qui font tache aujourd’hui. — Mlle Mars disait un mot d’un grand sens, et qui a son application dans plus d’un art : « Comme nous jouerions mieux la comédie, si nous ne tenions pas tant à être applaudis !
Faisant allusion aux parades solennelles qui se jouent en ces jours de cérémonie et à toutes ces plates représentations de la comédie humaine, il écrivait à sa belle-sœur : Si Don Quichotte est à Rouen, Trivelin prince est ici ; ce sont là des farces que les gens de bon sens doivent bien mépriser ; mais il faut se laisser emporter au torrent, et, puisque le monde n’est que comédie, il faut prendre la queue de lapin et l’épée de bois comme les autres. […] Il peint avec énergie la jeunesse du Grand Siècle, celle qui ne sait plus plaisanter avec esprit, qui joue tout le jour avec fureur et qui s’enivre ouvertement ; il indique et assigne en moraliste et en politique les causes de ce changement général à la Cour.
Tous les grands acteurs qui avaient jusque-là joué les premiers rôles ayant été ou massacrés ou mis en fuite et dépopularisés, « la Convention, dit-il, et ses partis se trouvent dépourvus de gens à talents et à caractère, ou possédant un degré même médiocre de capacité administrative. […] Rien qu’à l’accent, il est évident qu’avec ce fonds d’humeur républicaine et cette conscience d’homme libre qui se retrouve à nu dès qu’on le presse trop au vif, Mallet du Pan en prend son parti ; il est à bout à la vue de tant de fautes, de sottises, et d’une partie d’échecs si mal jouée : « C’est un bonheur insigne, s’écrie-t-il ; de n’être rien qu’indépendant dans des conjonctures si désespérées, au milieu d’hommes qui ruineraient, par leur façon de faire, les conjonctures les plus favorables. » On voit à présent, sans qu’il y ait doute, quelle franche et particulière nature d’avocat consultant et de conseiller royaliste c’était que Mallet du Pan, ce paysan du Danube de l’émigration.
Le hardi cavalier sait qu’il a besoin des jambes de l’animal fougueux qui le porte ; mais il fait jouer à propos le mors et l’éperon. […] J’ai joué gros jeu.
Il aimait la musique, il chantait et faisait des couplets ; il savait jouer de la guitare, de la harpe surtout, alors dans sa nouveauté, et il portait dans ces amusements cet esprit d’invention qu’il eut en toutes choses. […] Pendant ce temps-là le Parlement Maupeou croulait ; on jouait Le Barbier de Séville à Paris ; Beaumarchais, relevé de son jugement avec pompe, saisissait tous les à-propos, toutes les occasions de faire bruit et fortune, épousait les causes à la mode, devenait l’approvisionneur et le munitionnaire général des États-Unis insurgés, et entrait, le vent en poupe et toutes voiles dehors, dans cette vogue croissante qui ne s’arrêta plus qu’après Le Mariage de Figaro.
Lu, ce n’est pas un moment admissible ; bien joué, il suffit que cela amuse. […] On juge que, le champ une fois ouvert aux conjectures, la malignité, l’envie, ou ce simple plaisir si naturel à tout homme de prendre son prochain en faute, se mirent de la partie et s’y jouèrent en tous sens.
Dans les livres de philosophie, on va chercher des idées générales, dans les romans réalistes des observations, dans les romans idéalistes de beaux sentiments, dans les poètes tout cela et de plus des inventions de rythme, des trouvailles de mélodie, d’harmonie, toute une technique, qui ici, a autant d’importance que le fond ; et de cette technique on ne jouit, à cette technique on ne se plaît, à cette technique on ne se joue amoureusement, que si soi-même on s’en est mêlé, que si on s’y est essayé, que si l’on en a mesuré les difficultés, que si l’on y a atteint soi-même à quelques petits succès relatifs ; comme il n’y a que les musiciens qui comprennent la musique, et les autres, quand ils croient y entendre quelque chose, sont des snobs, il n’y a que les hommes qui ont été un peu versificateurs qui comprennent les poètes. […] Ils avaient été inventés pour qu’on eût du plaisir à lire Virgile, pour qu’on ne le lût pas comme de l’Aulu-Gelle et par des gens qui savaient qu’ils goûtaient Mozart parce qu’ils avaient joué du violon, et Virgile parce qu’ils avaient fait des vers latins.
Ce radieux Arlequin intellectuel, qui avait beau être critique et professeur se retrouvait toujours Arlequin, et jouait de la batte de son esprit avec de si brillants et de si gracieux moulinets, regrettait que cette batte ne fût pas le sceptre qu’on aurait respecté, s’il avait pesé davantage. […] Sainte-Beuve préparait longuement sa leçon, il l’élaborait, la mâchait, la remâchait, la mastiquait et la répétait à des chaises rangées en rond, autour de lui, dans son triste salon chocolat ; tandis que Chasles jouait avec la sienne comme un chat avec un oiseau, et la débitait pétillante, avec des grâces félines et une voix qui n’était, par exemple, ni celle d’un chat ni celle d’un tigre, mais bien la voix la plus spirituelle, la plus mélodieuse et la plus caressante qu’on pût entendre.
Il y a bien, dans l’édition complète3, un volume de drames joués à diverses époques et même postérieurement à Grandeur et servitude militaires, et dont nous n’avons pas à nous occuper. […] Alfred de Vigny dit dans son journal que Shakespeare, le calme et puissant Shakespeare, étouffe dans le drame, et qu’on sent bien qu’il y étouffe ; eh bien, lui aussi, Alfred de Vigny, étouffait dans le drame de la vie, mais il le jouait si bien qu’on ne sent qu’aujourd’hui qu’il y étouffait !
Et que signifient, dans une histoire du théâtre sérieux, ces nombreuses pièces qui ne furent jamais jouées, parce qu’elles sont injouables ? […] Les emprunts que la tragédie du xviie siècle fit à Montchrétien et à Garnier sont quantité presque négligeable, quand on les compare avec le rôle que joua la pastorale, d’abord lyrique, puis enrichie d’éléments romanesques.
Nous laisserons la critique paresseuse ou indifférente noyer périodiquement les productions nouvelles dans un fleuve de banalités louangeuses et jouer son rôle de serinette. […] Pour peu que vous ayez fait jouer une comédie ou un vaudeville, vous tenez à votre titre d’auteur dramatique. — Homme de lettres ! […] Avant d’avoir joué le moindre bout de rôle dans les pièces de Mme Sand, elle était déjà connue comme patronne du Berri, où on l’invoque sous le nom de sainte Solange. […] Parfois elle emprunte l’éventail de Célimène, mais c’est toujours Elmire qui en joue. […] Le fait est que, si elle ne récite pas ses rôles — ce serait trop Conservatoire — elle ne les joue pas davantage : elle les croque.
Tout ce que je vis ce jour-là porta la visible empreinte de ces souvenirs ; il me semblait toujours qu’on fût occupé à jouer la Révolution française plus encore qu’à la continuer. […] Alors les hautbois se feront entendre et Ludovic, maître de la chapelle, jouera de l’orgue. […] On leur apprend à répéter des fables : La Cigale et la Fourmi, à jouer de pianos qu’on n’accorde jamais, et à n’avoir d’autres jouissances que celles des sens. […] Les agents anglais ont, en effet, joué un certain rôle dans les massacres de septembre. […] Deux cents pages sur sept cents sont consacrées au rôle joué par la population pendant cette année 1814 qui, mieux encore, je le répète, que 1870, doit être appelée l’année terrible.
On admire Shakespeare et Goethe, on se passionne pour Schiller, on ne joue assidûment que nos auteurs. […] Il visita deux fois l’Italie ; il y joua gros jeu et gagna toujours. […] Mais nous sommes ainsi nés, et il n’appartient qu’à nous de sourire et de nous jouer parmi les dérèglements. […] Il joue, il ne joue plus, il rejoue ; il parle sans cesse de se tuer et ne se tue jamais. […] C’est aussi toute la pièce où il joue le principal rôle.
On joua le jeu français de tout ou rien.
A ses côtés est une lyre, dont il joue par instants, pour accompagner ses chants d’insouciance et de plaisir.
Léopold, pour jouer son rôle d’héritier opulent et faire impression sur la belle et jeune voyageuse, ne parle que de dépenses folles, de plaisirs ruineux, et s’attire de la part de la dame, qui d’abord n’avait pas l’air d’écouter, la plus juste et la plus piquante leçon de morale sur l’emploi des richesses.
L’homme y est mêlé et y joue son rôle.
Nous voyons bien qu’il faut se résigner au rôle que nous jouons là-bas : mais nous ne pouvons nous dissimuler qu’il n’y a pas là de quoi être fiers.
Il s’agit de savoir quel rôle y jouent les grands hommes et quelle place doit leur être accordée.
Malebranche, est comparable à celui que Platon fait jouer à Socrate ; ce personnage a même un talent supérieur à celui du Grec, pour faire accoucher ses Auditeurs de vérités dont ils ne se doutoient pas, quoiqu’elles fussent en eux.
Les Anglo-Canadiens jouent au cricket, par exemple, sous le nom de Lacrosse-game.
Les usurpations, par exemple, jouent un tel rôle dans la construction des royautés au moyen-âge, et mêlent tant de crimes à la complication des investitures, que l’auteur a cru devoir les présenter sous leurs trois principaux aspects dans les trois drames : le Petit Roi de Galice, Eviradnus, la Confiance du marquis Fabrice.
Il avoit tout ce qu’il falloit pour bien jouer ce rôle ; une présomption démésurée ; la mémoire la plus extraordinaire.
Et voilà comment Veuillot est déshonoré, le pape humilié et l’Église romaine plongée dans un bien grand chagrin, par cette belle comédie du xixe siècle jouée contre le catholicisme par un petit de la Révolution !
Renan en qui venait précisément de se jouer cette crise.
C’était, pour ces femmes enfermées dans un monastère, un grand amusement que de jouer la comédie. […] Ceux qui ont vu jouer son Duc d’Enghien au Théâtre Libre savent ce que M. […] Ils lui jouaient beaucoup de méchants tours et ne parvenaient pas à le mettre en colère. […] Les échafauds à trois étages sur lesquels on jouait les mystères en donnaient une image sensible. […] Et puis, si, par impossible, il était parvenu à le faire, on n’aurait pu le jouer et c’eût été dommage.
Maurice Talmeyr a dépeint le rôle que joue à différents échelons de notre société la morphine, cet épouvantable engin de destruction que la science lui avait donné pour, engourdir ses heures de douleur. […] Nous promenions des drapeaux et nous chantions la Marseillaise, mais ils avaient leur seringuette dans leur, sacoche, se piquaient entre les étapes et écoutaient leurs musiques jouer les marches de Wagner. […] Un monsieur correct joua sa dernière composition musicale : le Chœur des mollusques pendant le Déluge. […] Je joue depuis quelque temps un jeu fort dangereux : parler sans cesse de mourir en continuant d’occuper la place que des jeunes gens de génie sont pressés de prendre ! […] Le génie joue avec l’erreur, comme l’enfance avec les serpents ; il n’en est pas atteint.
Heureusement que la nature ne joue pas souvent de pareilles farces aux hommes, par le canal de l’hérédité. […] Il est bien permis de jouer avec les sonorités des mots, avec leurs double et triple sens ; et il n’est pas toujours exact que ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement. […] A la Chambre, le contact avec les adversaires est tolérable parce qu’on a le loisir de leur jouer des tours et de leur parler franc. […] En fait, la foule n’a que des instincts, de simples réflexes, dont certains hommes habiles, et d’ailleurs sans génie, savent jouer. […] On peut se demander si le pithiatisme ne joue pas aussi un certain rôle là-dedans.
Souvent il joue gros jeu, mais que de fois il gagne ! […] Pourquoi donc se faire corrompu de si bonne heure, et se jouer avec ses vices, quand on quitte à peine les hochets du collège ? […] Je ne sais pas jouer avec ma plume. […] cet instrument de communication si souple, si populaire, avec lequel il joue si souvent, comme un enfant avec une arme à feu, sans en connaître la puissance. […] Un inconnu qui débuterait par une pièce comme Angelo ne serait pas joué six fois.
On raconte qu’un jour de grande fête, au sortir du dîner, le prélat étant à jouer avec des dames, après que le jeu eut duré assez longtemps, quelqu’un fit remarquer que c’en était assez pour un jour de grande fête, et qu’il fallait donner quelque chose à l’édification.
J’écarterai le nom respecté de M. le comte Molé, et je dirai à notre honorable confrère que les services que lui-même a rendus à cette époque difficile, le rôle qu'il y a joué, peuvent lui faire quelque illusion dans l’impression qui lui en est restée.
Dans le professeur on retrouvait encore le conteur, l’auteur comique ; il avait du bon comédien ; il lisait en perfection, avec un art infini, il jouait et dialoguait ses lectures.
Ce qu’il y a de plus difficile à supporter pour un joueur, ce n’est pas d’avoir perdu, mais de cesser de jouer.
Une pâle lumière verdâtre se joue sur les jeunes troupes entraînées au combat par l’exemple des aînés.
de première classe), vous aurez maintes occasions d’être secourables aux pauvres gens, de faire payer pour eux les riches, de réparer ainsi, dans une petite mesure, l’inégalité des conditions et d’appliquer pour votre compte l’impôt progressif sur le revenu Notaires (car il y en a ici qui seront notaires), vous pourrez être, un peu, les directeurs de conscience de vos clients et insinuer quelque souci du juste dans les contrats dont vous aurez le dépôt Avocats ou avoués, vous pourrez souvent par des interprétations d’une généreuse habileté, substituer les commandements de l’équité naturelle, ou même de la pitié, aux prescriptions littérales de la loi, qui est impersonnelle, et qui ne prévoit pas les exceptions Professeurs, vous formerez les cœurs autant que les esprits ; vous… enfin vous ferez comme vous avez vu faire dans cette maison Artistes ou écrivains, vous vous rappellerez le mot de La Bruyère, que « l’homme de lettres est trivial (vous savez dans quel sens il l’entend) comme la borne au coin des places » ; vous ne fermerez pas sur vous la porte de votre « tour d’ivoire », et vous songerez aussi que tout ce que vous exprimez, soit par des moyens plastiques, soit par le discours, a son retentissement, bon ou mauvais, chez d’autres hommes et que vous en êtes responsables Hommes de négoce ou de finance, vous serez exactement probes ; vous ne penserez pas qu’il y ait deux morales, ni qu’il vous soit permis de subordonner votre probité à des hasards, de jouer avec ce que vous n’avez pas, d’être honnête à pile ou face Industriels, vous pardonnerez beaucoup à l’aveuglement, aux illusions brutales des souffrants ; vous ne fuirez pas leur contact, vous les contraindrez de croire à votre bonne volonté, tant vos actes la feront éclater à leurs yeux ; vous vous résignerez à mettre trente ou quarante ans à faire fortune et à ne pas la faire si grosse : car c’est là qu’il en faudra venir Hommes politiques, j’allais dire que vous ferez à peu près le contraire de presque tous vos prédécesseurs, mais ce serait une épigramme trop aisée.
Disons cependant que la forte imagination de Marie de Magdala 1216 joua dans cette circonstance un rôle capital 1217.
Comparez un moment au jardin royal de Versailles, bien nivelé, bien taillé, bien nettoyé, bien ratissé, bien sablé, tout plein de petites cascades, de petits bassins, de petits bosquets, de tritons de bronze folâtrant en cérémonie sur des océans pompés à grands frais dans la Seine, de faunes de marbre courtisant les dryades allégoriquement renfermées dans une multitude d’ifs coniques, de lauriers cylindriques, d’orangers sphériques, de myrtes elliptiques, et d’autres arbres dont la forme naturelle, trop triviale sans doute, a été gracieusement corrigée par la serpette du jardinier ; comparez ce jardin si vanté à une forêt primitive du Nouveau-Monde, avec ses arbres géants, ses hautes herbes, sa végétation profonde, ses mille oiseaux de mille couleurs, ses larges avenues où l’ombre et la lumière ne se jouent que sur de la verdure, ses sauvages harmonies, ses grands fleuves qui charrient des îles de fleurs, ses immenses cataractes qui balancent des arcs-en-ciel !
Il y rencontre d’abord un bel enfant qui joue avec un lionceau, et qui est son fils et celui de Çakountala. […] Et je dois dire aussi que la comédie de Kâlidâsa a été fort agréablement, sinon jouée, du moins psalmodiée. […] Il ne devait revenir que lorsqu’on ne jouerait plus la pièce, tant elle le dégoûtait. […] Ils joueront avec ses jouets. […] C’est qu’à ce jeu le mieux sera toujours de ne pas jouer quand on n’y est pas forcé.
Mais la Guerre des Dieux joua un mauvais tour à sa gloire, comme le Sopha à celle de Crébillon le fils. […] Quant à la comédie intitulée : Quitte pour la peur, second ouvrage théâtral d’Alfred de Vigny, elle fut donnée le 30 mai 1833, après la Maréchale d’Ancre, jouée le 25 juin 1831 ; Chatterton fut représenté le 12 février 1835. […] À l’heure où l’âme française semblait vide d’espoir et d’héroïsme, où les passions, même coupables, défaillaient comme des sexes de vieillards, où le seul excès était celui de la débauche bête et du rire sans joie, il osa écrire, il osa faire jouer un drame en vers, un drame d’amour et de gloire ! […] Il en dérive, certes, car on est toujours le fils de quelqu’un ; mais Héraclès, né de Zeus, lui joua de fort vilains tours, entre autres la délivrance de l’homme. […] et je ne pense point que les vers-libristes aient formé seulement le médiocre dessein de se dérober à un effort ; il ne faut jamais, quand on veut gagner le beau, enjeu suprême, « jouer la facilité ».
A la « Musique », sur la décente place de la Gare, à Charleville, il joue à l’étudiant fêtard ; il est heureux de nous l’apprendre, en vers, et s’il nous affirme, avec preuves à l’appui, qu’« on n’est pas sérieux quand on a dix-sept ans », c’est qu’il n’en a pas seize tout à fait, et cela veut dire simplement que sa jeunesse commence à lui faire du bruit. […] Et j’ai joué de bons tours à la folie… » Il interroge son sang. […] Tandis que passe et le frôle, dans la fraîcheur émouvante, de la forêt, la foule des nymphes et des faunes, le sculpteur taille le vase dans le marbre ; et l’une des nymphes, nue et belle, lui met sur la joue sa bouche tiède, et sur ses mains il sent le souffle chaud des satyres, et la terre exhale des parfums affolants. […] Dans les vergues, des singes jouaient avec des noix d’or. […] La Nature est devenue mystérieuse et presque inquiétante d’avoir accueilli dans ses retraites où les Satyres jouaient, dolent et doux, le songe des jours… Un poème, dans ce recueil charmant, est d’une particulière puissance, l’Homme et la Sirène.
Quelques planches représentant des femmes faisant jouer des marionnettes sur un petit théâtre. […] Il avait joué avec Niô, la statue colossale de l’entrée du temple, il avait joué une partie par laquelle, s’il perdait, il serait privé de la chance de tout gain au jeu pendant trois ans ; mais, si Niô perdait, il lui donnerait sa force physique pendant trois ans. […] Plus loin encore, c’est le sensuel Kiyomori, en présence de la femme de Minamoto, une main sous la joue, tristement réfléchissante dans une pose d’accablement. […] Cette éruption qui a fait pousser sur la droite du Fouzi-yama un petit mamelon, amène une planche caricaturale où un Japonais explique à un Japonais, affligé d’une énorme loupe à la joue, qu’il est arrivé à la montagne ce qui est arrivé à sa joue. […] Peinture qu’on sent faite d’après nature, sur un morceau de soie entièrement recouverte de gouache, et qui joue la peinture à l’huile.
s’écrie-t-il d’une voix tonnante, en couchant en joue le maître de la maison… Et maintenant, Morati, viens avec moi ! […] Elle lui jouait des tours de créole déchaînée et de bourgeoise maligne. […] Il jouait aux barres avec elle à Saint-Cloud ! […] Il jouait au billard, tandis que ses soldats crevaient de faim, d’inaction et de rage. […] Trois cents d’entre eux sont acteurs et jouent la comédie devant les femmes de l’empereur.
Soixante-trois nuits de suite, la pièce fut jouée parmi un tonnerre de rires ; les dames firent écrire les chansons sur leurs éventails, et l’actrice principale, dit-on, épousa un duc. […] On y joue avec les vérités générales ; on en retire agilement quelqu’une du monceau des faits où elle gît cachée, et on la développe ; on plane au-dessus de l’observation dans la raison et la rhétorique ; on se trouve mal et terre à terre tant qu’on n’est pas dans la région des idées pures. […] Je dis que nous devons nécessairement abroger ces violents actes oppressifs ; ils doivent être rappelés, vous les rappellerez, je m’y engage d’honneur ; vous finirez par les rappeler, j’y joue ma réputation ; je consentirai à être pris pour un idiot, si à la fin ils ne sont pas rappelés ! […] Sans doute il y a de l’écume sur ses remous, il y a de la bourbe dans son lit ; des milliers d’étranges créatures se jouent tempêtueusement à la surface ; il ne choisit pas, il prodigue ; il précipite par myriades ses imaginations pullulantes, emphase et crudités, déclamations et apostrophes, plaisanteries et exécrations, tout l’entassement grotesque ou horrible des régions reculées et des cités populeuses que sa science et sa fantaisie infatigables ont traversées. […] Dubois, qu’on fait tomber dans le ruisseau. — Ces jeunes filles si correctes vont voir jouer Love for Love de Congreve ; les parents ne craignent pas de leur donner miss Prue en spectacle. — Voyez aussi par contraste le personnage du capitaine anglais, si rustre ; il est l’hôte de Mme Duval, et la jette deux fois dans la boue ; il dit à sa fille : « Molly, je vous conseille, si vous faites quelque cas de mes bonnes grâces, de ne plus avoir un goût à vous, en ma présence. » — Le changement est surprenant, depuis soixante ans.
Mais du moment que ces volontés sont organisées, elles imitent un organisme ; et dans cet organisme plus ou moins artificiel l’habitude joue le même rôle que la nécessité dans les œuvres de la nature. […] Devenue pleinement concrète, elle coïncide avec une tendance, si habituelle que nous la trouvons naturelle, à jouer dans la société le rôle que nous y assigne notre place. […] Au sortir d’une crise rhumatismale, on peut éprouver de la gêne, voire de la douleur, à faire jouer ses muscles et ses articulations. […] Si celui qui a reçu un soufflet tend l’autre joue, que devient la justice, sans laquelle il n’y a pourtant pas de charité ? […] Lorsque Kant nous dit qu’un dépôt doit être restitué parce que, si le dépositaire se l’appropriait, ce ne serait plus un dépôt, il joue évidemment sur les mots.
. — La flamme gigantesque joue — contre le ciel même. » Les dieux périssent tour à tour dévorés par les monstres, et la légende céleste, lugubre et grandiose ici comme l’histoire humaine, annonce des cours de combattants et de héros.Nulle crainte de la douleur, nul souci de la vie. […] Les femmes des chefs vinrent près d’elle, et chacune pour la consoler lui conta ses propres peines, toutes les calamités des grandes dévastations et de l’antique vie barbare. « Alors parla Gjaflogd, — sœur de Gjuki : — « Je sais que sur la terre — je suis entre toutes la plus dénuée de joie. — De cinq maris — j’ai souffert la perte, — et aussi de deux filles, — de trois sœurs, — de huit frères ; — pourtant me voilà, et je survis seule. » — Alors parla Herborgd, — reine de la terre des Huns : — « Moi j’ai à raconter — un deuil plus cruel. — Mes sept fils, — dans la région de l’Est, — et mon mari le huitième — sont morts dans la bataille. — Mon père et ma mère, — mes quatre frères, — le vent a joué avec eux — dans la mer. — Le flot a battu — le plancher de leur vaisseau. — Moi-même j’étais forcée de recueillir leurs corps, — moi-même j’étais forcée de veiller à leur sépulture, — moi-même j’étais forcée — de faire leurs funérailles. — Tout cela, je l’ai souffert — en une année, — et pendant ce temps, — nul d’entre les hommes — ne m’a apporté de consolation. — Cependant j’étais enchaînée — et captive de guerre, — quand six mois de cette année se furent écoulés. — J’étais forcée de parer — la femme d’un chef de guerre — et de lui attacher sa chaussure — chaque matin. […] Alors les gens commencèrent à dire de ce joueur de harpe, qu’il savait si bien jouer de la harpe que les bois dansaient et que les pierres se remuaient au son, et que les bêtes sauvages accouraient à lui et restaient là comme si elles eussent été apprivoisées, si tranquilles que, quand même des hommes ou des chiens venaient contre elles, elles ne les évitaient pas. […] Alors le joueur de harpe devint très-triste, si bien qu’il ne pouvait plus demeurer avec les autres hommes ; mais il allait dans les bois, et s’asseyait sur les montagnes, la nuit comme le jour, et pleurait et jouait de la harpe ; alors les bois se remuaient et les rivières s’arrêtaient, et nul cerf ne fuyait les lions, et nul lièvre les chiens ; et nulle bête ne ressentait peur ou haine des autres, à cause de la douceur du son. […] Enfin, voici Orphée devant Pluton : « Quand il eut longtemps et longtemps joué de la harpe, alors parla le roi des habitants de l’enfer.
Les femmes y jouent le principal rôle. […] On ne me conseillait pas de l’emmener, crainte d’avanie et de quelque méchant tour qu’il avait tout l’air de me jouer. […] C’est que le jour précédent, le roi s’étant enivré, comme il avait de coutume de faire presque tous les jours depuis plusieurs années, il se mit en fureur contre un joueur de luth, qui, à son gré, n’en jouait pas bien, et commanda à Nesr-Ali-Bec, son favori, fils du gouverneur d’Irivan, de lui couper les mains. […] Dès que les présents eurent passé, les tambours, les trompettes et plusieurs autres instruments commencèrent à jouer. […] Les cascades jouaient ; les eaux faisaient un charmant murmure, et toute la cour y était dans un ordre et dans une pompe admirables.
Le fait est qu’à un certain jour toutes ces belles dames de cœur, ces nobles et chevaleresques valets de carreau, avec lesquels on jouait si franc jeu, se retournent ; on s’était endormi en croyant à Hector, à Berthe ou à Lancelot ; on se réveille dans ce cabinet même dont parle Mme de Sévigné, et on n’aperçoit de tous côtés que l’envers. […] Si les Maximes peuvent sembler, à leur naissance, n’avoir été qu’un délassement, un jeu de société, une sorte de gageure de gens d’esprit qui jouaient aux proverbes, combien elles s’en détachent par le résultat, et prennent un caractère au-dessus de la circonstance ! […] Il jouerait à tout instant et sa vie et l’univers pour une imagination, pour un caprice, pour l’éclair d’un désir.
C’est un point lumineux dans ce demi-jour des premières années où tout est confondu, plaisirs, espérances, regrets, et où les souvenirs sont brouillés et incertains, parce qu’aucune pensée ne les a gravés dans la mémoire ; amour charmant qui ne sait pas ce qu’il veut, qui se prend aux yeux bleus d’une fille comme le papillon aux roses du jardin par un instinct de nature, par une attraction dont il ne sait point les causes et dont il n’entrevoit pas la portée ; innocent besoin d’aimer, qui plus tard se changera en un désir intéressé de plaire et de se voir aimé ; passion douce et sans violence, rêve en l’air ; première épreuve d’une sensibilité qui se développera plus tard ou qui plutôt s’éteindra dans des passions plus sérieuses ; petite inquiétude de cœur qui tourmente souvent un jeune écolier, un de ces enfants aux joues roses que vous croyez si insouciant, mais qui déjà éprouve des agitations inconnues, qui étouffe, qui languit, qui se sent monter au front des rougeurs auxquelles la conscience n’a point part. » — La grâce facile où se jouera si souvent la plume de Charles Labitte se dessine déjà dans cette page délicate où je n’ai pas changé un mot. […] Si jamais la chaire s’est vue réellement l’unique ou du moins le principal foyer de ce qui a depuis alimenté la presse et la tribune aux époques révolutionnaires, ce fut bien alors en effet ; c’est de la chaire que partait le mot d’ordre, que se prônait et se commentait, au gré de la politique, le bulletin des victoires ou des défaites ; quand il fallut faire accepter aux Parisiens la désastreuse nouvelle d’Ivry, le moine Christin, prêchant à deux jours de là en fut chargé, et il joua sa farce mieux que n’aurait pu le plus habile et le plus effronté des Moniteurs. […] Bernard ne chercha pas moins querelle à notre ami, qui n’était coupable que d’avoir suivi, dans le partage des rôles, les données constamment transmises, et de s’y être joué, comme on fait en lieu sûr, avec quelque complaisance. — Mais qui nous prouve que Pithou a réellement écrit la harangue de d’Aubray, que Passerat et Nicolas Rapin ont fait les vers, que Florent Chrestien… ?
Après avoir entendu « romantisme » au sens d’« originalité », il entend de nouveau, sans le dire, « originalité » au sens de « romantisme » ; et il semble que cette confusion, volontaire ou non, joue à sa critique plus d’un méchant tour. […] Esther, histoire de sérail, conte des Mille et une nuits, conte naïf, sanglant et par endroits sensuel, transformé par Racine en une tragédie élégiaque et pieuse, propre à être jouée dans un couvent par de petites pensionnaires, est assurément une œuvre singulière, étrangement complexe, avec ses « couleurs contrariées et harmoniques » comme dans un « merveilleux tapis d’Orient copié par les Gobelins »58. […] » disait le vieux Corneille en voyant jouer Bajazet, et peut-être qu’en effet, si Roxane agit et sent à peu près comme une femme de harem, Acomat comme un vizir, et parfois Bajazet comme un homme d’Orient, leur allure et leur langage n’ont pas grand’chose de turc pour des esprits non prévenus.
Sardou sur le témoignage de gens qui l’avaient vu jouer, était un fort médiocre comédien. […] Mes genoux ploient encore, et ma tête est courbée comme la tienne, sous des larmes encore bien amères. » Les mots soulignés dans ce passage l’ont été par Marceline elle-même. — En 1838, le ménage Valmore est venu jouer à Milan. […] Dans un coin du salon, on jouait au whist ; dans un autre coin, on causait, ou l’on s’amusait au jeu des petits papiers, quiproquos ou bouts-rimés.
Je vois ces contradictions avec une évidence si absolue que je jouerais là-dessus ma vie, et par conséquent mon salut éternel, sans hésiter un moment. […] Ce ne sont pas eux qui ont ajouté la qualification : Est de fide à la suite de tant de propositions insoutenables, Une des pires malhonnêtetés intellectuelles est de jouer sur les mots, de présenter le christianisme comme n’imposant presque aucune sacrifice à la raison, et, à l’aide de cet artifice, d’y attirer des gens qui ne savent pas ce à quoi au fond ils s’engagent. […] Voici un enfant qui n’agit encore que par impulsion et imitation ; et c’est à cet âge qu’on lui fait jouer sa vie ; une puissance supérieure l’enlace dans d’indissolubles liens ; elle poursuit son travail en silence, et, avant qu’il commence à se connaître, il est lié sans savoir comment.
Maintenant (prélude du troisième acte), ce motif est joué seul et développé pour s’éteindre dans la résignation ; mais, en même temps et comme de loin, les cors font résonner le chant solennel par lequel Hans Sachs salue Luther et la Réformation, et qui au poète a acquis une incomparable popularité. […] Ne joue pas Wagner qui veut ; il faut le connaître à fond et être un musicien consommé, pour parvenir à la perfection d’exécution et d’interprétation que nous avons constatée dimanche dernier, et que l’on a obtenue d’un orchestre composé, à deux ou trois exceptions près, exclusivement d’amateurs. […] On a entendu et applaudi tour à tour des fragments du Tannhauser, de Lohengrin, des Maîtres chanteurs, de la Valkyrie, de la Tétralogie, voire du Parsifal, la dernière création Wagnérienne, dont le prélude a été joué d’une façon admirable.
Puis la petite maison aux chambres, grandes comme les chambres de Pompéi, vous fait toucher le cadre étroit, où se joue la vie de ce petit peuple. […] Zola, parlant de l’insuccès du Bouton de rose, joué il y a une dizaine de jours, s’écrie : « Cela me rajeunit… Cela me donne vingt ans… Le succès de L’Assommoir m’avait avachi… Vraiment, quand je pense à l’enfilade de romans qui me restent à fabriquer, je sens qu’il n’y a qu’un état de lutte et de colère, qui puisse me les faire faire ! […] Ils sont là, penchés sur le papier, avec une figure qui peine, avec un grand pli à la joue, et l’avancement de leur grosse bouche sérieuse.
Enfin ce mathématicien du fantastique, cet esprit imperturbablement logique sur les confins du rationnel, sait, quand il lui convient, rester court au bord d’un développement dernier, et, quelque fait à demi dévoilé laissé dans l’ombre, jouer de la suggestion de l’insinuation, des réticences et des symboles. […] Il est sans doute de ceux qui se jouent de l’homme et le font résonner « de sa note la plus basse au sommet de sa voix ». […] Nous avons montré avec quel calme supérieur Poe analyse ses caractères, déduit ses plans, combine le coloris de son style, les proportions de son œuvre, la réticence de ses dénouements, dose d’une main savante les deux forces passionnelles dont il joue, l’horreur et la curiosité.
I La plupart des sociologues croient avoir rendu compte des phénomènes une fois qu’ils ont fait voir à quoi ils servent, quel rôle ils jouent. […] Les dogmes religieux du christianisme n’ont pas changé depuis des siècles ; mais le rôle qu’ils jouent dans nos sociétés modernes n’est plus le même qu’au moyen âge. […] Toutefois, il résulte de tout ce qui précède qu’ils jouent dans la vie collective et, par suite, dans les explications sociologiques un rôle prépondérant.
Rappelez-vous le vieux Gobseck dans Balzac, faisant jouer le jour dans les diamants de la comtesse de Restaud. […] Taine lui-même, en dépit de sa méthode, a des manières de faire jouer le jour dans les faits et les opinions historiques. […] Je ne crois pas qu’on ait jamais appliqué de main historique un plus rude soufflet sur la joue de ce grand dadais de Suffrage universel, qui se croit fait pour gouverner le genre humain.
Gustave Flaubert I9 L’Éducation sentimentale a été un livre fameux, comme Salammbô, avant de paraître ; car, depuis Madame Bovary, on n’a jamais manqué de jouer à l’avance du cornet à bouquin des journaux en l’honneur de Flaubert et de ses œuvres. […] Aucun homme vulgairement et passablement organisé ne pourra prendre un intérêt quelconque à ces apparitions grotesques, qui ne font rire que de l’auteur qui a pu les inventer, et qui se succèdent, sans raison d’être et sans s’arrêter une minute, pendant quatre cents pages, lesquelles finissent par jouer cruellement sur les nerfs. […] pour avoir l’idée des niaiseries d’enfançon d’un livre qui joue au grave, et qui n’est qu’une solennelle puérilité.
Bien qu’il s’élève quelquefois contre la templomanie, il y mêle encore un peu trop d’autels, de statues et d’allégories selon le goût du temps ; mais il y a, dans les jolis dessins où il se joue, des plans et des devis tout naturels et pour toutes les fortunes : Je ne voudrais point, dit-il, faire venir l’ombre et l’eau dans mon jardin, que j’abandonnerais pour les chercher ailleurs. […] C’est ainsi qu’il construit son Tibur selon le rêve d’une médiocrité dorée ; mais, si vous êtes riche, il travaille sur d’autres frais ; il vous proposera les colonnes, les marbres, les galeries avec dôme de cuivre doré ou terrasses en plomb, tout un ordre de fabriques à la romaine : « Et je veux que tout cela soit éloigné l’un de l’autre dans un grand espace, et joue avec l’eau, le gazon et les plus beaux chênes. » Je ne veux, par ces citations, que rendre le sentiment qui circule dans tout ce qu’a écrit le prince de Ligne sur les jardins.
Chapelle est, des deux, le personnage le plus littéraire, et qui joue son rôle parmi les illustres du grand siècle. […] Routiers, voyageant en Suisse (1761), est déjà un disciple de Rousseau ; il cache son nom, il déguise sa condition, c’est un peintre de portraits, et qui fait semblant de chercher des pratiques pour vivre ; les honnêtes gens qui le prennent au mot se donnent de la peine pour lui en procurer ; en un mot, il joue à l’Émile de Jean-Jacques, et avec cela il imite à sa manière Chapelle et Bachaumont.
Tout se tient et s’explique : la politique avec tous ses ressorts joue devant nous, et nous assistons au fur et à mesure au travail de l’histoire. […] Il en triomphe par force, par adresse, car il n’est pas si violent qu’on le dit ; il fait si bien, il joue si serré qu’il y a tel moment, à la Paix d’Aix-la-Chapelle (1668), où Turenne est obligé de le louer devant le roi, et où Colbert le remercie.
Il s’amuse ce jour-là, on ne sait pourquoi, à jouer le grand seigneur. […] Ce n’est plus l’humeur voyageuse qui s’égaye et qui se joue en mille désirs de courses errantes et vagabondes, ce n’est plus la curiosité jeune et dans sa légère ivresse, c’est le sentiment historique profond, qui se prononce et se déclare, c’est une admiration pleine de deuil pour la plus grande cité qu’ait portée la terre et qu’elle a presque tout engloutie.
Ils sont doux les baisers d’enfant / il me semble qu’un lis s’est posé sur ma joue. […] Cet état de langueur a bien des charmes, et ce mélange de verdure et de débris, de fleurs qui s’ouvrent sur des fleurs tombées, d’oiseaux qui chantent et de petits torrents qui coulent, cet air d’orage et cet air de mai font quelque chose de chiffonné, de triste, de riant, que j’aime… » Ne reconnaissez-vous pas le paysagiste d’instinct, qui se joue et qui s’essaye, sans maître, et auquel il faudrait bien peu de chose, — seulement un cadre, plus grand, — pour devenir, un maître en son genre, et lutter peut-être avec notre grand paysagiste du Berry ?
(un grenadier couchant en joue un cavalier autrichien ou russe.) — Mon lieutenant, c’est un conscrit ! […] Il était le premier, en d’autres moments, à en convenir : « On me loue de ma facilité, disait-il, mais on ne sait pas que j’ai été douze et quinze nuits sans dormir et en ne pensant à autre chose qu’à ce que je vais faire ; quand je me mets en face de ma toile blanche, mon tableau est achevé ; je le vois. » Et Charlet disait également d’Horace, avec ce tour narquois qui était le sien : « On se figure qu’il est toujours à faire de l’escrime d’une main, de la peinture de l’autre ; on donne du cor par ici, on joue de la savate par là.
Elle vivait, elle plaisait, elle se jouait aux enchantements de la vie : on n’écrit pas les riens, les mille inventions fugitives, les dissipations, les plaisirs. […] Elle serait disposée à le mieux comprendre et à tirer de lui meilleur parti que Louis XVI qui n’entend rien à cette nature puissante d’homme public, de tribun éloquent, et au double rôle qu’elle est obligée de jouer dans le temps même où elle se donne.
Il prétendait aussi ne point payer de droits d’entrée pour ses viandes à la barrière, et il y eut un jour, à ce propos, une histoire qui a été racontée diversement, mais où, dans tous les cas et même en en rabattant, il est certain que les gens du prince jouèrent un peu trop du fouet à l’égard d’un commis. […] Le poète eut occasion de le solliciter pour faire jouer une de ses pièces, et il s’en loua vivement ; il fut enchanté de son accueil : « Mais comment, Madame ?
C’était un lundi ; il avait dix ans ; il jouait sur la place. […] Le troisième nous transporte au haut d’une maison dont la façade est peinte en couleur bleu de ciel ; dans sa petite chambre, sous la tuile, Jasmin, qui n’est qu’apprenti encore, à la lueur d’une lampe dont le reflet se joue aux feuilles du tilleul voisin (toujours de gaies images), Jasmin passe une partie de ses nuits à lire, à rêver, à versifier déjà.
On suivrait à la trace cette succession illustre, depuis Mme de Maintenon, Mme de Lambert, Mme du Deffand (après qu’elle se fut réformée), Mme de Caylus et les jeunes filles qui jouaient Esther à Saint-Cyr, jusqu’à la maréchale de Beauvau20, qui paraît avoir été l’original de la maréchale d’Estouteville dans Eugène de Rothelin, jusqu’à cette marquise de Créquy qui est morte centenaire, nous dit-on, et dont je crains bien qu’un homme d’esprit ne nous gâte un peu les Mémoires21. […] Le couvent joue un très-grand rôle en ces deux compositions, ainsi qu’on l’a vu déjà dans Adèle de Sénange.
Un jour, une après-midi, pendant que sa mère, au sortir du dîner, sommeillait dans son fauteuil, comme il lui arrivait souvent (et c’étaient ses meilleures heures de repos), la jeune fille, Christel249, rêveuse, attentive au rayon de premier printemps qui perçait jusqu’à elle ce jour-là et jouait dans la chambre, rangeait d’une main distraite les lettres reçues, la plupart à distribuer, quelques-unes (pour les châteaux des environs) à garder poste restante. […] Le printemps revenait ; avril, dès le matin, perçait avec sa pointe égayée, et les rayons autour des bourgeons, et les oiseaux à la vitre, se jouaient comme au jour où Christel, il y avait juste un an, avait remarqué les lettres fatales pour la première fois.
Dans les séminaires grands et petits, il est instamment recommandé aux élèves de jouer et d’être gais : cela détourne de mal faire, de penser à mal et même de penser. […] L’abîme s’est élargi, j’en ai peur, entre ceux qui croient et ceux qui ne croient pas, et, quand ceux-ci ne sont pas installés dans la négation absolue, ils se jouent dans un scepticisme curieux et parfaitement tranquille.
Petite fille qui joue avec ses poupées et qui leur donne sa propre nature, Paule, Mauricette ou Henriette range gentiment les idoles et leur prête des phrases jolies. […] C’est le pitre forain excellent à faire la parade, à recevoir les gifles sur une joue trop rouge pour rougir et à espérer courbé les coups de pied au cul : pourquoi faut-il qu’il rêve des élégances du jeune premier et qu’il s’acharne à parler avec une recherche plus comique que ses lazzis ?
Seulement, sans se donner trop de peine, il remportait tous les prix à la fin de l’année ; il avait sa tragédie sur le chantier, comme tout bon rhétoricien ; il jouait des scènes d’Iphigénie avec un de ses camarades, aujourd’hui professeur de droit à Dijon, tous deux (l’Achille et l’Agamemnon) habillés en fantassins de ligne, et y allant bon jeu, bon argent. […] Souvent l’orateur joue sur les mots ; il se crée des définitions et en conclut ensuite ce qui serait précisément à prouver.
… J’admirais hier au soir la nombreuse compagnie qui était chez moi ; hommes et femmes me paraissaient des machines à ressort qui allaient, venaient, parlaient, riaient, sans penser, sans réfléchir, sans sentir ; chacun jouait son rôle par habitude : Mme la duchesse d’Aiguillon crevait de rire ; Mme de Forcalquier dédaignait tout ; Mme de La Vallière jabotait sur tout. Les hommes ne jouaient pas de meilleurs rôles, et moi j’étais abîmée dans les réflexions les plus noires : je pensais que j’avais passé ma vie dans les illusions ; que je m’étais creusé moi-même tous les abîmes dans lesquels j’étais tombée ; que tous mes jugements avaient été faux et téméraires, et toujours trop précipités, et qu’enfin je n’avais parfaitement bien connu personne ; que je n’en avais pas été connue non plus, et que peut-être je ne me connaissais pas moi-même.
Il semble qu’entre les poètes français La Fontaine seul ait, en partie, répondu à ce que désirait Fénelon lorsque, dans une lettre à La Motte, cet homme d’esprit si peu semblable à La Fontaine, il disait : « Je suis d’autant plus touché de ce que nous avons d’exquis dans notre langue, qu’elle n’est ni harmonieuse, ni variée, ni libre, ni hardie, ni propre à donner de l’essor, et que notre scrupuleuse versification rend les beaux vers presque impossibles dans un long ouvrage. » La Fontaine, avec une langue telle que la définissait Fénelon, a su pourtant paraître se jouer en poésie, et donner aux plus délicats ce sentiment de l’exquis qu’éveillent si rarement les modernes. […] Parlant de certaines familiarités et de certaines caresses que fait, selon lui, le Père céleste aux âmes redevenues petites et simples, Fénelon, par exemple, dira : « Il faut être enfant, ô mon Dieu, et jouer sur vos genoux pour les mériter. » Des théologiens ont cherché querelle à ces expressions et à d’autres pareilles, au point de vue de la doctrine ; un bon goût sévère suffirait pour les proscrire.
Il n’était pas d’humeur à jouer le rôle débonnaire d’un Stanislas. […] et ne paraît-il pas qu’il y a un certain je ne sais quoi qui se joue avec mépris des projets des hommes ?
Les premiers livres, pourtant, sont d’un intérêt moindre ; il s’amuse visiblement à imiter parmi nous Pline le Jeune ou Politien, qui ont laissé des recueils de ce genre ; il se propose des sujets, des thèmes, auxquels il se joue. […] M. le chancelier s’en contriste : tous les autres y prennent plaisir (1561). » Il gémit de ce vertige presque universel ; il sent que le peuple et la classe moyenne n’ont rien à gagner à ces querelles d’ambitieux qui se servent des passions et des croyances de tous pour arriver à leurs propres fins et se supplanter l’un l’autre : « S’il m’étoit permis de juger des coups, écrit-il, je vous dirois que c’est le commencement d’une tragédie qui se jouera au milieu de nous, à nos dépens ; et Dieu veuille qu’il n’y aille que de nos bourses !
Je ne voulais point être aimée en particulier de qui que ce fût ; je voulais l’être de tout le monde, faire prononcer mon nom avec admiration et avec respect, jouer un beau personnage, et surtout être approuvée par des gens de bien : c’était mon idole. […] Ici, on aura beau épuiser toutes les explications et les artifices de l’apologie, on ne fera jamais que Mme de Maintenon (car elle en eut le titre vers ce temps), installée par Mme de Montespan, prenant intérêt en apparence à sa passion et à toutes les vicissitudes qui y survenaient, lui écrivant encore le 13 mars 1678 : « Le roi va revenir à vous, comblé de gloire, et je prends une part infinie à votre joie », n’ait pas joué à un certain moment un jeu double, et n’ait pas conçu une idée personnellement ambitieuse.
Son début poétique fut un certain Portrait d’Iris, que Quinault trouva si joli qu’il s’en fit honneur auprès d’une demoiselle dont il était amoureux : Ses cheveux longs et noirs, luisants et déliés, Par boucles épandus et galamment liés, Ombragent doucement la fraîcheur de sa joue… Ce sont, en un mot, de ces vers à ravir Quinault et à mettre Boileau hors de lui. […] Il les raille à merveille, et se joue de ces renommées de savants acquises à grand fatras.
De ces deux ambitions, l’une fait la modeste et est en réalité plus sage ; l’autre paraît plus sincère : après tout, ce ne sont que deux manières différentes de jouer à la reine quand on ne l’est pas. […] Elle s’était rendu compte à l’avance de tout ce néant humain ; elle se dit, en sachant ses ennemis triomphants et ses amis consternés, qu’il n’y avait pas lieu à tant s’étonner ; que ce monde n’était qu’une comédie où il y avait souvent de bien mauvais acteurs ; qu’elle y avait joué son rôle mieux que beaucoup d’autres peut-être, et que ses ennemis ne devaient pas s’attendre à ce qu’elle fût humiliée de ne le plus représenter : « C’est devant Dieu que je dois être humiliée, disait-elle, et je le suis. » Après avoir quitté la France, où Louis XIV mourait et où le duc d’Orléans, qu’elle avait pour ennemi déclaré, devenait le maître, elle alla habiter Rome, son ancienne patrie, la ville des grandeurs déchues et des disgrâces décentes.
En contraste de Mme de Gercourt et d‘un abbé de sa connaissance, qui joue un fort vilain rôle dans le roman, l’auteur place un curé tolérant dans le genre de celui de Mélanie, plus occupé de la morale que du dogme : cette morale, il faut en convenir, à l’examiner de près, paraîtrait un peu relâchée, et Mme de Genlis, si elle avait répondu, aurait pu prendre sa revanche. […] Mme Gay jouait elle-même très bien la comédie en société ; elle aimait à la diriger ; elle était un régisseur excellent.
Je ne doute pas qu’avant que le romantisme eût régénéré le lyrisme, la poésie, auparavant dite légère, ne tirât sa minime raison d’être que de la difficulté vaincue ; ne pouvant être émouvant, ni poétique, on était ingénieux ; on jouait à un jeu de bague avec chances égalisées pour tous par la règle. […] Il me semblait insuffisant de mettre au sonnet la tête en bas, de jouer sur le rythme, d’agrandir les perspectives de la symétrie.
Il a compris et il a dit, en de rudes apostrophes, quel rôle dissolvant l’argent — le nitrate d’argent — jouait dans la désorganisation, dans la désagrégation de la société bourgeoise. […] S’il n’a point l’œil assez vaste, le regard assez puissant, pour voir, d’ensemble, la société qui s’agite à ses pieds, il s’attachera à en étudier la fraction qui, par son importance sociale, son intelligence, son éducation, le rôle qu’elle a joué a le plus d’affinités avec lui-même.
Peut-être la gloriole des uns joue-t-elle de la fausse honte des autres pour les amener à ne rien conserver pour soi. […] Le lièvre, ce psychologue avisé, n’ignore pas que l’orgueil est le plus grand ressort des êtres pensants et il en joue magistralement vis-à-vis de ses dupes.
Le comte de P. est de pure invention, et, en effet, quoiqu’il semble d’abord un personnage important, l’auteur s’est dispensé de lui donner aucune physionomie, et ne lui fait non plus jouer aucun rôle.
La pièce d’Adolphe Dumas (Mademoiselle de La Vallière), jouée à la Porte Saint-Martin, rentre dans le genre échevelé et dans le drame à orgie.
À leur tête, le roi, qui a fait la France en se dévouant à elle comme à sa chose propre, finit par user d’elle comme de sa chose propre ; l’argent public est son argent de poche, et des passions, des vanités, des faiblesses personnelles, des habitudes de luxe, des préoccupations de famille, des intrigues de maîtresse, des caprices d’épouse gouvernent un État de vingt-six millions d’hommes avec un arbitraire, une incurie, une prodigalité, une maladresse, un manque de suite qu’on excuserait à peine dans la conduite d’un domaine privé Roi et privilégiés, ils n’excellent qu’en un point, le savoir-vivre, le bon goût, le bon ton, le talent de représenter et de recevoir, le don de causer avec grâce, finesse et gaieté, l’art de transformer la vie en une fête ingénieuse et brillante, comme si le monde était un salon d’oisifs délicats où il suffit d’être spirituel et aimable, tandis qu’il est un cirque où il faut être fort pour combattre, et un laboratoire où il faut travailler pour être utile Par cette habitude, cette perfection et cet ascendant de la conversation polie, ils ont imprimé à l’esprit français la forme classique, qui, combinée avec le nouvel acquis scientifique, produit la philosophie du dix-huitième siècle, le discrédit de la tradition, la prétention de refondre toutes les institutions humaines d’après la raison seule, l’application des méthodes mathématiques à la politique et à la morale, le catéchisme des droits de l’homme, et tous les dogmes anarchiques et despotiques du Contrat social Une fois que la chimère est née, ils la recueillent chez eux comme un passe-temps de salon ; ils jouent avec le monstre tout petit, encore innocent, enrubanné comme un mouton d’églogue ; ils n’imaginent pas qu’il puisse jamais devenir une bête enragée et formidable ; ils le nourrissent, ils le flattent, puis, de leur hôtel, ils le laissent descendre dans la rue Là, chez une bourgeoisie que le gouvernement indispose en compromettant sa fortune, que les privilèges heurtent en comprimant ses ambitions, que l’inégalité blesse en froissant son amour-propre, la théorie révolutionnaire prend des accroissements rapides, une âpreté soudaine, et, au bout de quelques années, se trouve la maîtresse incontestée de l’opinion À ce moment et sur son appel, surgit un autre colosse, un monstre aux millions de têtes, une brute effarouchée et aveugle, tout un peuple pressuré, exaspéré et subitement déchaîné contre le gouvernement dont les exactions le dépouillent, contre les privilégiés dont les droits l’affament, sans que, dans ces campagnes désertées par leurs patrons naturels, il se rencontre une autorité survivante, sans que, dans ces provinces pliées à la centralisation mécanique, il reste un groupe indépendant, sans que, dans cette société désagrégée par le despotisme, il puisse se former des centres d’initiative et de résistance, sans que, dans cette haute classe désarmée par son humanité même, il se trouve un politique exempt d’illusion et capable d’action, sans que tant de bonnes volontés et de belles intelligences puissent se défendre contre les deux ennemis de toute liberté et de tout ordre, contre la contagion du rêve démocratique qui trouble les meilleures têtes et contre les irruptions de la brutalité populacière qui pervertit les meilleures lois.
De loin en loin seulement, en hiver, quelque voisin venait jouer au piquet ou à la brisque.
Des leitmotivs se jouent de page en page.
Il était grand citoyen encore quand il profitait du redoublement de faveur obtenu par l’Amphitryon, pour obtenir du roi la permission de jouer ce Tartuffe, prohibé par arrêt du parlement, et dont le roi lui-même avait refusé pendant deux années de permettre la représentation.
Quelques Gens de Lettres, sans doute intéressés à ce qu’elle ne fût point jouée, ont crut devoir lui opposer l’autorité, au défaut du talent, arme plus convenable cependant à des Génies qui rougiroient de subsister autrement que par eux-mêmes.
Les deux orateurs vouloient subjuguer Philippe, père d’Alexandre, & plus grand homme que son fils ; & le rusé monarque joua les deux orateurs.
Il envoya sa tragédie aux comédiens, qui n’ont jamais pû la jouer, & au libraire Didot, qui n’a jamais pû la vendre.
Son amour-propre lui fit jouer toute sa vie un rôle pour lequel il n’était point fait, et auquel il était fort supérieur.
Qu’importe que Thémistocle sache ou ne sache pas jouer de la lyre ?
Il peut jouer avec succès un rolle sur la scene veritablement plus ou moins long, et plus ou moins important.
Assurément, le temps est encore loin où elle pourra jouer ce rôle efficacement ; pourtant, c’est à la mettre en état de le remplir un jour qu’il nous faut, dès maintenant, travailler.
Figurez-vous un enfant qui, de naissance, n’aimerait pas la musique et que, par autorité paternelle, on aurait fait jouer du violon pendant dix ans : il ne pourrait plus passer devant un marchand d’instruments de musique.
Quand la question est ainsi posée, et elle l’est par la nature des choses, il n’est pas permis de rester froid, de tenir en suspens la décision de sa pensée et de jouer à une impartialité supérieure qui ne serait que l’impartialité de l’embarras.
Tout au moins, si elle voulait jouer à ce petit mystère du « pseudonyme » qu’on perce toujours, il fallait attacher à cette composition si féminine un nom de femme ; car c’est une femme qui parle toujours dans ces Récits de la Luçotte 34, et monsieur Paria Korigan n’est que le nom d’un personnage auquel la Luçotte adresse ses Récits.
une larme, qui coulait, roulait en perle le long de sa joue, cependant qu’elle penchait avec douleur, qu’elle penchait vers la terre son front pensif. […] Zola, qui vécut en Provence assez longtemps pour en connaître le grand soleil, admire cette reconstruction du vrai où la scène réelle se joue toute vibrante de l’originalité du romancier, ce don du style qui est Le sang même de l’œuvre et se confond avec le don de vie. […] Fils et petit-fils de tambourinaires, il ne jouait jamais que des airs chevrottés par les grand’mères aux veillées ; et il ne savait, il ne se lassait pas. […] Dans tous les cas, arrangez-vous pour la bien jouer, car si par votre faute le monde vient à se douter de ce qui s’est passé ici, je vous le jure par ce que j’ai de plus sacré, je vous tuerai comme un chien ! […] Pour les mieux tromper, nous jouerons les raffinés de politesse ; quand ils diront quelque chose, applaudissons-les.
Pour mettre le comble à ces perfections, elle a le bras et le visage épilés, et elle joue parfaitement de la cithra. […] Mais l’excentricité de Sylvie n’est que jouée ; c’est au fond une femme très raisonnable, — à ce que dit M. […] Madame de Valvèdre surtout ne joue guère le rôle que l’auteur lui assigne-et qu’il développe pour elle sous forme de commentaire. […] Connaissez-vous beaucoup de drames, anciens ou modernes, où la fatalité ait joué un plus grand rôle ? […] Il n’est pas possible d’admettre qu’un droit d’entrée d’un franc ait pu empêcher un homme raisonnable d’aller à la Bourse s’il y avait affaire ou même s’il était tenté d’y jouer, en supposant qu’un homme raisonnable pût être tenté de jouer à la Bourse.
L’orchestre joue du Lecoq… Ne vous semble-t-il pas entendre, après dîner, un causeur, qui a vu et retenu, évoquer en quelques traits pour votre plus grande satisfaction toute une époque disparue ? […] Tout le monde joue-t-il son rôle, et se fait-il commun et inconséquent de peur de paraître fou ? […] » Mais dans la phrase précédente, répondant à d’anxieuses préoccupations, il venait de dire : « Si tu savais combien la volupté joue peu de rôle dans cette envie qui me tient quelquefois de mener une vie différentefa ». […] Sur la joue qu’elle aperçoit de profil, Clymène remarque un pli qui tantôt n’y était pas. […] Et c’est parce que l’originalité de Proust était en profondeur — parce que celle-ci constituait l’arrière plan qui vaquait à sa sûreté — qu’il pouvait se permettre de jouer si librement à la surface et avec toutes les surfaces.
Il fait jouer l’Hetman. […] Ce besoin d’idéal qui le dévore lui a joué d’assez méchants tours, c’est à lui qu’il faut attribuer la chute de ses œuvres dramatiques…. […] Richepin s’évertua à jouer les Schaunard ; ce fut un Schaunard asiatique, truculent et somptueux. […] On se sépara : tout le monde avait bien joué son rôle, et Rougeville maintenant ne doutait plus du succès6. […] On ne joue pas plus cavalièrement avec l’échafaud.
Quand il s’agit de jouer un tour, la judiciaire de Sainte-Beuve n’est jamais faussée. […] Quel incessant contraste de lumière s’y joue ! […] C’est ainsi que naguère, à Orange, Iphigénie fut jouée entre deux averses. […] Les deux plus jeunes jouent aux cartes. […] Sous les platanes sans feuilles, les gars jouent aux boules, les enfants courent et piaillent.