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786. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXIVe entretien. Chateaubriand, (suite.) »

Il avait tenté, en 1822, de mettre en loterie sa retraite de la Vallée-aux-Loups ; les ministres d’alors, quoique ses ennemis, n’avaient pas osé lui en refuser l’autorisation nécessaire ; mais on ne connaissait pas, en ce temps-là, la puissance des capitaux divisés pour former de grosses sommes : c’est la pluie dont les gouttes forment les rivières. […] La religion vraie, la morale pure, la paix nécessaire entre les hommes sont au prix de cette franchise religieuse et tolérante qui laisse à chacun sa foi, sans prêter à personne des armes pour opprimer la foi d’autrui. […] Cela était d’autant plus nécessaire, que des affaires d’argent perdu dans des affaires de bourses étrangères avaient, disait-on, compliqué et aggravé des affaires de cœur entre M. de Chateaubriand et une des personnes, objet de ses nombreux attachements.

787. (1892) Boileau « Chapitre I. L’homme » pp. 5-43

Un jour, à Bâville, on disputait sur l’amour de Dieu, et un père jésuite soutenait que dans la Pénitence la contrition n’est pas nécessaire, et que l’attrition, causée par la crainte de l’enfer sans amour de Dieu, suffit à la justification du pécheur. […] Dieu était nécessaire à sa raison ; et c’était le Dieu de sa raison qu’il adorait dans les Trois personnes du Dieu catholique. […] Il avait senti dès 1662 une difficulté de respirer, puis il était devenu asthmatique, et enfin en 1687 il perdait la voix, cette précieuse voix qui lui était si nécessaire pour disputer à l’Académie des Inscriptions contre le suffisant Charpentier à la voix de tonnerre.

788. (1920) Enquête : Pourquoi aucun des grands poètes de langue française n’est-il du Midi ? (Les Marges)

Qu’une atmosphère favorable soit nécessaire au développement de la première de ces qualités, cela n’est pas douteux, comme il n’est pas douteux que la seconde soit l’apanage des pays qui vécurent dans le rayonnement d’un centre de civilisation raffinée. […] Je suis forcé de vous envoyer un aveu d’incompétence et d’ignorance : comme a dit le poète : Je n’ sais pas, je n’ sais rien Je n’ sais rien, crénom d’un chien… Albert Erlande Je ne possède pas l’érudition nécessaire pour apprécier, comme elle m’en semble digne, la loi formulée par M.  […] Mais, si quelques-uns de nos meilleurs prosateurs (citons Montaigne, Montesquieu, Rivarol) sont des méridionaux, peut-être que cette spontanéité qui est nécessaire à la poésie, et qui fait qu’elle est plus une chose d’instinct que de raison, ne peut s’épancher que dans une langue dont les sons, la construction ont été mêlés à notre vie familière en ces années d’enfance où nous apprenons à sentir.

789. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — La déformation  »

Mais chez les peuples enrichis d’une littérature, la langue est d’autant plus stable que la littérature est plus forte, qu’elle nourrit un plus grand nombre de loisirs et de plaisirs ; à un certain moment, la tendance à l’immobilité ou les ondulations rétrogrades d’un langage rendent parfois nécessaire une intervention directrice dans un sens opposé, et l’aristocratie intellectuelle, au lieu de restreindre la part du nouveau dans la langue, doit au contraire souffler au peuple abruti par les écoles primaires les innovations verbales qu’il est désormais inapte à imaginer. […] Nous sommes habitués à lier certains sons à certains sens et à croire qu’il y a entre eux un rapport nécessaire. […] Mais comparution et parution, tout court, que l’on commence à rencontrer, prouvent du moins qu’il n’est pas nécessaire d’être du bas peuple pour changer les i en u.

790. (1707) Discours sur la poésie pp. 13-60

On a prétendu prouver qu’Homere s’étoit proposé d’instruire dans ses deux poëmes : que l’iliade ne tendoit qu’à établir que la discorde ruïne les meilleures affaires ; et que l’odissée faisoit voir combien la présence d’un prince est nécessaire dans ses etats. […] La nouveauté n’est pas moins nécessaire au sublime ; car il est de son essence de faire une impression vive sur les esprits, et de les frapper d’admiration. […] Mais qu’on y prenne garde, je me tiens toujours dans de justes bornes : je releve les obligations qu’on a aux anciens, et je me contente d’animer les modernes à une émulation que je crois nécessaire, et sans laquelle le génie refroidi se contenteroit toujours du médiocre.

791. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre vii »

L’ombre d’un clocher est nécessaire sur les toits du village, celle aussi d’un château. […] De même on peut prendre de l’action sur le paysan.Mais une chose est nécessaire, le contact. […] Il y avait en lui la paix surhumaine de s’être consacré exclusivement au Devoir tracé pour toute la vie, soit qu’elle fût remplie durant de longues années par le vaste labeur de la renaissance nationale et de la reconstruction de l’ordre français, soit qu’il dût tomber bientôt pour cette victoire qui était la condition nécessaire de nos espérances et, actuellement, la seule tâche qui importât.

792. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre VI. L’espace-temps à quatre dimensions »

Pour conserver au point de vue de l’observateur en S′ sa place centrale et pour préparer ainsi l’analyse que nous donnerons tout à l’heure de l’Espace-Temps, le détour que nous venons de faire était donc nécessaire. […] Et cela tient au double effet d’endosmose et d’exosmose entre le temps et l’espace, à l’empiétement réciproque de l’un sur l’autre, que semblent traduire les équations de Lorentz : il devient ici nécessaire, pour situer un point, d’indiquer explicitement sa position dans le temps aussi bien que dans l’espace. […] Le temps est pour moi ce qu’il y a de plus réel et de plus nécessaire ; c’est la condition fondamentale de l’action ; — que dis-je ?

793. (1894) Critique de combat

S’il comprend que la Révolution est nécessaire, il la voudrait calme et ordonnée comme un ballet bien réglé. […] La réforme de l’orthographe, c’est le complément logique et nécessaire de l’instruction obligatoire. […] Aux socialistes de préparer cette « destruction nécessaire !  […] Mais n’oublions pas que ce renouveau a pour condition préalable et nécessaire une transformation économique ! […] est-il nécessaire, est-il sage, est-il possible même de s’enfermer dans ce qui est, sans jamais songer à ce qui devrait être ?

794. (1864) Physiologie des écrivains et des artistes ou Essai de critique naturelle

Le Mystère de la Passion est rempli de ces amusants anachronismes, nécessaires pour interpréter le passé au présent, les faits anciens aux peuples nouveaux. […] Tandis que les langues du Midi abondent en formes variées, en voyelles sonores, en sons pleins et harmonieux, celles du Nord, comparativement plus pauvres et ne recherchant que le nécessaire, sont chargées de consonnes et d’articulations rudes. […] Mais ceci se rattache à toute une série de faits, qu’il est nécessaire d’indiquer au moins sommairement : l’hérédité physique et morale. […] Suivant lui, « les troubles cérébraux, chez les grands hommes, depuis les plus simples névroses jusqu’aux perturbations morales les plus graves, loin d’être un accident, sont des effets naturels, sinon nécessaires, de leur organisation. […] Et l’âme veut cette circulation parce qu’elle sait que le mouvement est nécessaire pour empêcher la corruption des humeurs et pour réparer les pertes ; de l’organisme.

795. (1899) La parade littéraire (articles de La Plume, 1898-1899) pp. 300-117

Il croit que l’honnêteté de l’âme est nécessaire à la beauté de l’œuvre. […] Il voudrait que l’on vît siéger au parlement nos philosophes et nos grands poètes, et il écrit : « Aucune voix, dans une démocratie, n’est plus nécessaire que ces voix graves et hautes qui dominent les passions éphémères des individus au nom des aspirations éternelles de la race. […] On a été pour eux très injustes, en leur refusant la moindre grâce, et il serait nécessaire, à présent qu’ils ont abandonné la lutte, de les replacer dans leur véritable situation. […] Au reste, était-il nécessaire de conférer le titre princier à Léon Dierx, que la nature avait fait prince dès sa naissance, à ce Poète-Roi en exil, prince du rythme et prince du verbe ? Était-il nécessaire, vraiment, d’ajouter à sa royauté véritable, authentique et absolue, une illusoire principauté ?

796. (1890) Le réalisme et le naturalisme dans la littérature et dans l’art pp. -399

Nous avons pris tout le temps nécessaire pour approfondir une étude d’un intérêt présent et qui a suscité dans ces dernières années d’éminents travaux, comme ceux de MM.  […] Parfois ; mais plus souvent encore expression nécessaire d’une philosophie qui devait se dégager peu à peu de la Renaissance. […] Est-il nécessaire de remonter dans le passé, même national, de chercher dans les ténèbres de l’histoire des faits qu’on dénature ? […] Ils ont jugé nécessaire de maintenir des catégories parmi les faits et des classes parmi les hommes. […] Quant aux incidents infimes qui se pressent pour former le train ordinaire de la vie, menus intérêts, accords et conflits de sentiments bourgeois, légitimes en leur médiocrité nécessaire, petits riens qui valent par le nombre, tout cela est négligé comme indifférent.

797. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIIIe entretien. Littérature politique. Machiavel (2e partie) » pp. 321-414

III Il y a donc une dualité nécessaire dans les papes ; l’une de ces dualités, le pape, appartient aux catholiques ; l’autre de ces dualités, le souverain, appartient à l’Italie. […] L’option, quoique nécessaire, était cruelle. […] À mesure que la dictature militaire était devenue moins habituelle et moins nécessaire, des consuls électifs avaient été cédés au peuple par la noblesse afin de limiter le despotisme des doges par des censeurs et des inquisiteurs. […] On nous laissa alors de la Savoie la partie militaire nécessaire à notre sécurité.

798. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (1re partie) » pp. 413-491

Pour cela, la permission du roi était nécessaire. […] Je m’y prends toujours à trois fois pour donner l’être à chacune de mes tragédies, et j’y gagne le bénéfice du temps, si nécessaire pour bien asseoir une œuvre de cette importance, qui, pour peu qu’elle vienne au monde contrefaite, a grand’peine ensuite à se redresser. […] Pour ce qui regarde votre sortie pour prendre l’air, qui est trop nécessaire à votre santé, le Saint-Père a eu la bonté de me laisser l’arbitre sur cet arrangement-là, moyennant quoi vous pouvez être tranquille sur ce point comme sur beaucoup d’autres choses qu’il ne me convient pas de traiter en détail avec vous. […] Monseigneur Lascaris, Cantini et moi, pensons à tout ce qui est nécessaire.

799. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (2e partie) » pp. 81-159

Je lui témoignai aussi que si son discours me semblait très fondé en ce qui regardait l’envoi d’un cardinal, je ne pouvais cependant pas tomber d’accord avec lui sur le choix de ma personne ; que je faisais volontiers abstraction de mon manque de talents et de qualités nécessaires ; mais qu’il existait un autre obstacle majeur qui m’empêcherait d’être désigné pour cette mission ; que si le proverbe si vis mittere, mitte gratum , si vous voulez envoyer, envoyez qui sera agréable, était vrai (comme il l’est du reste), je n’étais pas aimé, et cela apparaissait bien dans les lettres adressées de Paris et dans les conversations que tenaient les amis de la France à Rome. […] « Nous retournâmes quelques instants à l’hôtel ; nous fîmes à la hâte ce qui était nécessaire pour nous présenter convenablement, et nous allâmes, mes deux compagnons et moi, aux Tuileries. […] « Quand il eut terminé je pris la parole, et je répondis que nous étions accusés à tort de complot et de rébellion, crimes indignes de la pourpre et de notre caractère personnel ; que notre conduite avait été très simple et très franche ; qu’il était faux que nous eussions fait un secret de notre opinion à nos collègues intervenus, que nous leur avions même parlé à ce sujet, mais avec la mesure qui était nécessaire afin de nous garantir de l’accusation d’avoir cherché à recruter des prosélytes pour accroître le nombre des non-intervenants ; que si, malgré notre prudence, on nous traitait de la sorte, on nous aurait blâmés bien davantage si nous avions endoctriné ceux dont l’avis était contraire au nôtre ; qu’aucun d’eux ne pouvait nier de bonne foi que nous ne lui avions pas manifesté notre opinion et les motifs sur lesquels elle se basait ; que nous n’avions pas, il est vrai, fait des ouvertures au ministre des cultes, mais que nous étions allés chez le cardinal Fesch, auquel, comme à notre collègue et à l’oncle de l’Empereur, nous avions cru pouvoir parler avec plus de liberté et moins de publicité, justement pour envelopper la chose dans le mystère ; que le plus ancien d’entre nous lui avait confié, avec abandon et sincérité, notre détermination ; que nous lui avions aussi suggéré le moyen d’empêcher tout éclat, en le priant d’obtenir de l’Empereur qu’on ne nous invitât pas, et qu’il voulût bien se contenter de l’intervention de ceux qui étaient d’un avis différent du nôtre, et qu’on n’avait pas accepté ce moyen terme. […] On convint de l’exposer telle qu’elle était, en s’abstenant seulement de ce qui ne serait pas nécessaire.

800. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre onzième »

La critique est nécessaire ; et, tout compte fait, elle a plus souvent raison que tort. […] Et si vous ne parvenez à étouffer dans le cœur de l’homme le désir d’acquérir pour lui et les siens ; si vous ne lui liez les bras en présence des forces de la nature ; si vous ne pouvez empêcher que sa lutte avec elle, nécessaire sous peine de périr, ne suscite les arts et les sciences, et par eux la richesse ; comment, dans votre impuissance absolue d’anéantir la cause, supprimerez-vous ou modérerez-vous l’effet ? […] Par la même raison, s’il se décidait pour le bien, on avait imaginé de le récompenser, non en payement d’un devoir rempli, mais pour le porter à l’habitude de bien faire par l’appât d’une rémunération ; car il est si faible, et le bien si difficile, qu’on jugeait nécessaire d’appeler l’intérêt à l’aide du devoir. […] Quand il sera touché de ce goût du vrai que le païen Cicéron regardait comme la plus noble prérogative de l’homme ; quand, averti par son instinct, il soupçonnera que la connaissance du monde où il vit est nécessaire à son bonheur, ces premiers indices qui prouvent que l’âme est adulte, même dans les plus jeunes enfants, ne hâteront pas d’une heure le moment où Rousseau se résignera enfin à lui apprendre à lire.

801. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre III. Le roman » pp. 135-201

En résumé, le roman provincial peut sembler supérieur au roman parisien en ce qu’il n’emploie aucune habileté nécessaire pour atteindre le grand public. […] Aussi tous les procédés, même les plus énergiques, sont approuvés qui secouent la tristesse et le sommeil. — L’humoriste, s’il est nécessaire, agitera le squelette d’ivoire au festin de Trimalcion. […] L’exercice est nécessaire à l’intelligence comme aux muscles. […] Boylesve a symbolisé les angoisses d’un enfant devant la vie, son désir d’un idéal, et son cri douloureux et puéril vers la statue qui domine les foules, est la conclusion nécessaire, profonde et ne prouvant rien.

802. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVIII. J.-M. Audin. Œuvres complètes : Vies de Luther, de Calvin, de Léon X, d’Henri VIII, etc. » pp. 369-425

C’était cependant une idée heureuse que de mettre un quart de siècle entre soi et un homme pour le louer, quoiqu’il faille souvent davantage pour donner à la pensée le sang-froid nécessaire à la justice. […] Éternel écueil de cette tête éminente, le côté d’art qui attire Audin, ce côté sentimental et extérieur, a énervé, en bien des points, une sévérité nécessaire. […] Lorsque les prétentions révolutionnaires sont posées, un pouvoir doit-il consentir à une réforme, même nécessaire ? […] Figure de premier plan et nécessaire que cette fausse Vierge, mensonge de vertu et presque de génie, qui pensait par la tête de Burleigh et coagulait en vice froid les passions bouillantes de son père !

803. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 11-15754

Ainsi nécessaire, accidentel, possible, impossible, tout, nul, quelque, aucun, chaque, tel, quel, certain, ce, cet, cette, mon, ma, ton, ta, vos, vôtre, nôtre, & même le, la, les, sont de véritables adjectifs métaphysiques, puisqu’ils modifient des substantifs, & les font regarder sous des points de vûe particuliers. […] Au reste, il ne faut pas croire que dans les Langues qui ont des cas, il soit nécessaire de séparer l’adjectif du substantif ; car d’un côté les terminaisons les rapprochent toûjours l’un de l’autre, & les présentent à l’esprit, selon la syntaxe des vûes de l’esprit qui ne peut jamais les séparer. […] Mal nécessaire. […] Si je dis de quelqu’un qu’il s’est conduit avec, ou par, ou sans, ces prépositions font attendre leur complément ; au lieu que si je dis, il s’est conduit prudemment, &c. l’esprit n’a plus de question nécessaire à faire par rapport à prudemment : je puis bien à la vérité demander en quoi a consisté cette prudence ; mais ce n’est plus là le sens nécessaire & grammatical. […] Les seuls sens ne nous suffisent pas : car quel est l’homme du monde qui puisse examiner par lui-même toutes les choses qui sont nécessaires à la vie ?

804. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Nouvelles lettres de Madame, mère du Régent, traduites par M. G. Brunet. — II. (Fin.) » pp. 62-79

pourquoi lui-même ne se chargerait-il pas de former ce recueil complet, en ne négligeant rien de ce qui pourrait l’enrichir et l’éclairer du côté de l’Allemagne, et en n’y ajoutant en fait de notes et d’érudition française que ce qui serait nécessaire ? […] Nulle princesse n’avait, plus qu’elle, égard à ceux qui l’entouraient et la servaient ; « elle aimait mieux quelquefois se passer des assiduités nécessaires que d’en exiger qui eussent été trop incommodes aux autres ».

805. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le marquis de Lassay, ou Un figurant du Grand Siècle. — I. » pp. 162-179

Il avait en lui un ressort qui dérangeait le train de vie où il s’était mis et qui empêchait la suite, la persévérance nécessaire au plein succès. […] Lassay avait du goût pour les jardins et pour les bâtiments, comme il le prouva plus tard en accommodant l’hôtel Lassay, comme il l’avait déjà montré en petit dans sa jolie maison de retraite près des Incurables ; il avait le goût simple et uni, et avec peu il obtenait d’heureux effets : Je vous demande encore, disait-il à la maîtresse de cette villa de Bagnaia, de faire abattre, à hauteur d’appui, la muraille qui est devant vos fenêtres, car cette muraille vous donne une vue effroyable et vous en cache une fort belle ; et, si on prétend qu’elle est nécessaire pour votre maison, il n’y a qu’à faire un petit fossé derrière.

806. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Œuvres complètes de Buffon, revues et annotées par M. Flourens. » pp. 55-73

À part quelques mots de pure forme et de déférence, l’idée seule de la nature, c’est-à-dire des lois immuables et nécessaires limitant et enveloppant de toutes parts la force de l’homme, est ce qui règne chez Buffon. […] Quelques erreurs ne doivent pas nous empêcher de lui payer un juste tribut d’admiration, de respect et surtout de reconnaissance ; car les hommes lui devront longtemps les doux plaisirs que procurent à une âme jeune encore les premiers regards jetés sur la nature, et les consolations qu’éprouve une âme fatiguée des orages de la vie en reposant sa vue sur l’immensité des êtres paisiblement soumis à des lois éternelles et nécessaires.

807. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Journal du marquis de Dangeau — II » pp. 18-35

Vivez pour la consolation de vos sujets, et pour mettre le comble à votre gloire : ou plutôt, puisque vous êtes l’homme de la droite de Dieu, vivez, sire, pour la gloire et pour les intérêts de Dieu… Vivez pour consommer ce grand dessein de la réunion de l’Église de Dieu… Et comment, en entendant de telles paroles proférées par une telle bouche, en ces heures propices et attendries de la convalescence, le cœur de Louis XIV aurait-il douté, et n’aurait-il pas cru marcher dans la voie droite, dans la voie commandée et nécessaire ? […] Jusque dans les églises, on ne devra garder que l’argenterie convenable et nécessaire aux saints offices.

808. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — II » pp. 71-89

Hors cela, et dans ses guerres d’Italie, on le voit faisant tout pour ses soldats, aimé d’eux et possédant le secret de leur « mettre les ailes aux talons et le cœur au ventre », dès que l’un et l’autre étaient nécessaires. […] Le roi pourtant eut son avis, à lui, et démêla les qualités essentielles de son brave serviteur sous les défauts dont on le chargeait : « Le roi répondit qu’il avait toujours vu et connu que la colère et bizarrerie qui était en moi n’était sinon pour soutenir son service, lorsque je voyais qu’on le servait mal : or, jamais il n’avait ouï dire que j’eusse pris querelle avec personne pour mon particulier. » M. de Guise, favorable à Montluc, fit aussi cette remarque devant le roi, que le maréchal de Brissac se contredisait dans sa lettre, en déniant d’une part à Montluc l’ordre de talents nécessaires pour commander au nom du roi, et d’autre part en le louant si fort pour des qualités qui sont pourtant les principales en un homme de commandement, telles que d’être homme de grande police et de grande justice, et de savoir animer les soldats en toute entreprise : « Qui a jamais vu, ajoutait M. de Guise, qu’un homme doué de toutes ces bonnes parties n’eût avec lui de la colère ?

809. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Charron — II » pp. 254-269

C’est un reste d’école chez lui : il ne devine pas assez qu’un moment approche où il y aura accession ouverte et libre de tous les esprits sur quantité de questions, et que le philosophe et le vrai sage sera tenu, dans ses solutions, de compter de plus en plus avec le sentiment de ce grand nombre dont on fait partie soi-même, et avec cette philosophie irréfléchie, mais nécessaire, qui résulte de l’humaine et commune nature. […] Il accorde beaucoup à la piété, à la véritable, qu’il distingue soigneusement et en traits vigoureux d’avec la superstition ; puis il ajoute un avis nécessaire, dit-il, à celui qui prétend à la sagesse, qui est, d’une part, de ne point séparer la piété de la vraie prud’homie, et d’autre part, et encore moins, de ne les confondre et mêler ensemble : « Ce sont deux choses bien distinctes et qui ont leurs ressorts divers, que la piété et la probité, la religion et la prud’homie, la dévotion et la conscience : je les veux toutes deux jointes en celui que j’instruis ici… mais non pas confuses. » Le père Buffier, d’ailleurs très équitable envers Charron, a relevé ce passage en disant : « Une probité sans religion serait une probité sans rapport à la divinité et indépendante de la loi de Dieu.

810. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — I » pp. 298-315

La méthode du premier, de cet artificieux Bouillon, c’est de se rendre nécessaire de tous côtés, de nouer avec tous, puis de retenir tous les fils dans sa main, et de rester, en fin de compte, le maître et le moyenneur des situations. […] Bref, après la mort de Luynes, après bien des pourparlers semblables entremêlés aux coups de main, M. de Rohan, qui voit tout le peuple las de la guerre, à qui il ne reste pas de fourrage pour nourrir huit jours sa cavalerie très diminuée, et qui n’a plus aucun espoir de secours de la part des coreligionnaires étrangers, s’abouche avec le connétable de Lesdiguières pour rédiger un traité (octobre 1622) qui sauve et maintient les points principaux nécessaires au parti, et où ses propres intérêts aussi ne sont pas tout à fait oubliés : après quoi il n’est pas seulement pardonné par le roi, il a un éclair de faveur en Cour.

811. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La Margrave de Bareith Sa correspondance avec Frédéric — II » pp. 414-431

Ses lumières et son expérience, jointes à sa correspondance, peuvent le mettre en état de juger si on est effectivement dans l’intention d’abandonner le roi de Prusse à toute la rigueur de sa mauvaise destinée, en cas qu’il soit sans ressource, et si on veut détruire absolument une balance qu’on a jugée longtemps nécessaire. […] Nos mœurs et votre situation sont bien loin d’exiger un tel parti ; en un mot, votre vie est très nécessaire : vous sentez combien elle est chère à une nombreuse famille, et à tous ceux qui ont l’honneur de vous approcher.

812. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Les Caractères de La Bruyère. Par M. Adrien Destailleur. »

Son Discours de réception était fort attendu ; on prétendait qu’il ne savait faire que des portraits, qu’il était incapable de suite, de transitions, de liaison, de tout ce qui est nécessaire dans un morceau d’éloquence. […] Il montre très bien que le complément nécessaire de tout succès est la fureur des médiocres et des jaloux.

813. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Madame de Staël. Coppet et Weimar, par l’auteur des Souvenirs de Mme Récamier (suite et fin.) »

« S’il y a la guerre, au contraire, toute la France se réunira contre l’invasion étrangère, et si l’Empereur a un premier succès, comme il l’aura, l’orgueil national fournira à son vengeur toutes les ressources d’hommes et d’argent qui lui seront nécessaires. […] Même au plus fort de sa puissance, de l’usage exorbitant qu’il en faisait et qu’il proclamait nécessaire, il avait toujours dit que dans cinquante, ou soixante ans on pourrait gouverner autrement, mais que le temps n’était pas venu : jugea-t-il que ce temps, beaucoup plus rapproché qu’il ne l’avait pensé d’abord, était venu en 1815 ?

814. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vie de Jésus, par M. Ernest Renan »

La piété est une des affections de l’âme les plus douces et les plus nécessaires à son repos ; on doit en avoir dans toutes les religions… » Sismondi se le tint pour dit ; il revint à la prudence et rentra une partie de ses arguments. […] Et toutefois il a exprimé, en plus d’un endroit de ses écrits, des vœux de méditation individuelle et de hauteur solitaire, si fervents, si profondément sentis, il a marqué un tel désir d’idéal et une telle prédilection élevée pour les sommets infréquentés de la foule, que l’on conçoit très-bien qu’il ait pu, par moments, regretter aussi de ne pas vivre en des temps où cette lutte sur un terrain commun et public, cette bataille à livrer en plaine, ne lui aurait point paru nécessaire.

815. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Anthologie grecque traduite pour la première fois en français, et de la question des anciens et des modernes, (suite et fin.) »

Chacun se retrouve lui-même dans le poète, et, en réalité, il y a autant d’Homères qu’il y a de lecteurs d’Homère, comme un paysage est aussi divers qu’il y a de divers spectateurs. » Mais que de conditions ne sont-elles pas nécessaires pour bien lire, pour lire du plus près possible, et en se rapprochant de l’esprit qui les a inspirés, ces antiques poèmes, pour se dépouiller des sentiments acquis ou perfectionnés qui, à tout instant, font anachronisme avec ceux des personnages héroïques, et qui viennent créer comme un malentendu entre eux et nous ! […] Et encore, pour y revenir, quand on sait les chemins, quelle préparation est nécessaire !

816. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Observations sur l’orthographe française, par M. Ambroise »

62 Remarquez bien qu’il ne s’agit pas, pour que cette introduction soit plausible et motivée, de considérer uniquement si un mot de formation relativement récente est bon ou mauvais, s’il présente un sens agréable ou non : il s’agit simplement de savoir s’il a cours et s’il est nécessaire, s’il peut être suppléé par un autre plus ancien, son parfait équivalent. […] Si l’on cherchait des autorités, on aurait ici celle de Fénelon, si favorable à l’introduction des termes nouveaux dès qu’ils sont jugés nécessaires.

817. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamennais — Lamennais, Affaires de Rome »

Cette remarque est nécessaire pour expliquer et motiver, au premier coup d’œil, certaines parties de notre jugement auprès des personnes nombreuses qui ne connaissent M. de La Mennais que par ses plus récents écrits et qui même commenceront à le connaître par celui-ci tout d’abord. […] Du Fossé, voulant peindre dans le grand Arnauld cette colère de lion pour la vérité qui s’unissait en son cœur avec la douceur de l’agneau, nous dit naïvement : « L’exemple seul de Moïse, que Dieu appelle le plus doux de tous les hommes, quoiqu’il eût tué un Égyptien pour défendre un de ses frères, brisé par une juste colère les Tables de la Loi, et fait passer au fil de l’épée vingt-trois mille hommes pour punir l’idolâtrie de son peuple, fait bien voir qu’on peut allier ensemble la douceur d’une charité sincère envers le prochain avec un zèle plein d’ardeur pour les intérêts de Dieu. » En ne prenant les vingt-trois mille hommes et l’Égyptien tués qu’en manière de figure, comme il convient dans ce qui est de l’ancienne Loi, et en rapportant à l’abbé de La Mennais cette phrase de Du Fossé sur le grand Arnauld, je me rappelais bien que lui-même avait condamné ce dernier, et qu’il avait écrit de lui en le comparant à Tertullien : « Et Tertullien aussi avait des vertus ; il se perdit néanmoins parce qu’il manqua de la plus nécessaire de toutes, d’humilité.

818. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Réception de M. le Cte Alfred de Vigny à l’Académie française. M. Étienne. »

Notre siècle n’est plus celui des fades compliments ; la vie publique aguerrit aux contradictions, elle y aguerrit même trop : qu’à l’Académie du moins l’urbanité préside, comme nous venons de le voir, à ces oppositions nécessaires, et tout sera bien. […] Ce qu’il trouvera, ce ne sera pas sans doute ce que nous savons déjà sur la façon et sur l’artifice du livre, sur ces études de l’atelier si utiles toujours, sur ces secrets de la forme qui tiennent aussi à la pensée : il est bien possible qu’il glisse sur ces choses, et il est probable qu’il en laissera de côté plusieurs ; mais sur le fond même, sur l’effet de l’ensemble, sur le rapport essentiel entre l’art et la vérité, sur le point de jonction de la poésie et de l’histoire, de l’imagination et du bon sens, c’est là qu’il y a profit de l’entendre, de saisir son impression directe, son sentiment non absorbé par les détails et non corrompu par les charmes de l’exécution ; et s’il s’agit en particulier de personnages historiques célèbres, de grands ministres ou de grands monarques que le poëte a voulu peindre, et si le bon esprit judicieux et fin dont nous parlons a vu de près quelques-uns de ces personnages mêmes, s’il a vécu dans leur familiarité, s’il sait par sa propre expérience ce que c’est que l’homme d’État véritable et quelles qualités au fond sont nécessaires à ce rôle que dans l’antiquité les Platon et les Homère n’avaient garde de dénigrer, ne pourra-t-il point en quelques paroles simples et saines redonner le ton, remettre dans le vrai, dissiper la fantasmagorie et le rêve, beaucoup plus aisément et avec plus d’autorité que ne le pourraient de purs gens de lettres entre eux ?

819. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Jean Richepin »

On ne peut s’empêcher de sourire, après cela, des grands airs qu’il prend dans sa préface. « Je doute que beaucoup de gens aient le courage de suivre, anneau par anneau, la chaîne logique de ces poèmes, pour arriver aux implacables conclusions qui en sont la fin nécessaire. » Et dans l’impayable post-scriptum à Bouchor, où il pardonne noblement à son ami d’avoir repris subrepticement goût au mauvais vin de l’idéal, des illusions spiritualistes, de la foi en l’éternelle justice : « Je ne chercherai désormais qu’en moi-même mes templa serena. […] C’est un cas de jaunisse lyrique — et touranienne, l’indécence étant pour lui une des formes nécessaires du touranisme.

820. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre I : La politique — Chapitre II : Philosophie politique de Tocqueville »

M. de Tocqueville, l’un des premiers, sinon le premier, a soutenu à la fois ces deux principes : que la démocratie est la forme nécessaire de la société moderne, et que la démocratie doit avoir pour bases et en même temps pour limites toutes les libertés. […] « Il ne restait plus qu’à choisir, disait-il, entre des maux inévitables ; la question n’était pas de savoir si l’on pouvait obtenir l’aristocratie ouladémocratie, mais si l’on aurait une société démocratique sans poésie et sans grandeur, mais avec ordre et moralité, ou une société démocratique désordonnée et dépravée, livrée à des fureurs frénétiques ou courbée sous un joug plus lourd que tous ceux qui ont pesé sur les hommes depuis la chute de l’empire romain. » Au reste, M. de Tocqueville, quand il propose et indique les remèdes qui lui paraissent nécessaires, se contente des indications les plus générales et n’entre pas dans les détails particuliers.

821. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre II : La littérature — Chapitre III : La littérature du xviiie et du xixe  siècle »

On y apprendra comment l’amour de l’égalité devient la ruine de l’égalité même, s’il ne sait pas se renfermer dans ses vraies limites, si, non contents d’être égaux comme citoyens, nous voulons l’être comme fils et comme pères, comme jeunes et comme vieux, comme sujets et comme magistrats ; on apprendra encore combien l’obéissance à la loi est nécessaire dans un pays où la loi est faite par les citoyens eux-mêmes, comment la modération est le salut de tous les gouvernements, mais surtout des gouvernements populaires, enfin combien la probité est indispensable aux magistrats dans ces sortes de gouvernement. Si l’on peut trouver que Montesquieu obéit trop aux préjugés antiques en considérant la frugalité comme nécessaire aux démocraties, il lui faut accorder qu’une certaine mesure dans la jouissance, une certaine sobriété est la garantie de la liberté, et que là où l’on voit un amour désordonné des plaisirs des sens, la patrie et la loi courent bien risque de ne plus être que des objets de peu de prix.

822. (1912) Le vers libre pp. 5-41

. — Il est évident que tout grand poète ayant perçu d’une façon plus ou moins théorique les conditions élémentaires du vers, Racine a empiriquement ou instinctivement appliqué les règles fondamentales et nécessaires de la poésie et que c’est selon notre théorie que ses vers doivent se scander. […] Sous l’appel de l’émotion, les leitmotiv peuvent être précipités, ainsi on peut rimer en fin de vers et de la même rime une strophe ou diluer les rappels de sonorités à intervalles lointains dans le corps du poème, selon le sens et le goût, surtout d’après le sens (les rappels pour le sens sont nécessaires), mais aussi en arabesque, selon les timbres, les consonances, les allitérations, au gré du poète, à distance du machinalisme et de l’écholalie.

823. (1912) L’art de lire « Chapitre VIII. Les ennemis de la lecture »

Le livre n’est plus lu que morceau par morceau, vingt pages par vingt pages et c’est-à-dire, même quand il est lu, n’est plus lu du tout, puisque la continuité dans la lecture est nécessaire, non seulement pour juger d’un ouvrage bien fait, mais pour l’entendre. […] Il y a là, comme l’indique ce qui précède, une erreur nécessaire.

824. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Alfred de Vigny »

Vigny, poète toujours et cachant les injustices de sa poésie sous les formes les mieux fourbies du raisonnement, va jusqu’à dire, dans le délire partagé de Rousseau : « L’individu n’a presque jamais tort, l’ordre social toujours », et cela étonne d’un homme de ce temps et d’autant de soleil dans la pensée ; car, s’il était nécessaire de dresser des maximes absolues dans la grande casuistique de l’Histoire, ce serait le contraire, à coup sûr, de l’axiome de Vigny qu’il faudrait prendre pour la vérité ! […] L’idéal est, en effet, toujours nécessaire à un poète tel que Vigny, même quand il condescend à la prose et qu’il a quitté le sommet de l’invention poétique pour le plain-pied de cette vie chétive et de l’histoire.

825. (1929) Amiel ou la part du rêve

Il aimerait qu’en outre ce livre attirât des lecteurs au seul ouvrage d’Amiel qui en mérite de nombreux : le Journal intime, dont l’édition nécessaire est celle de M.  […] Mais à sa médiocre fortune une place de professeur apportait le complément et l’assiette nécessaire. […] Mais ces récriminations grondeuses, ce caractère « avenaire » sont des composants nécessaires de l’esprit civique genevois. […] Parce qu’elles trouvent en moi ce qui leur est nécessaire, la force de l’esprit, la délicatesse du cœur, la douceur, la discrétion et la fragilité. […] Austère, active, croyante, Amiel l’accepte et la vénère comme rappel nécessaire, nécessaire à un Genevois, de la lutte contre la nature.

826. (1788) Les entretiens du Jardin des Thuileries de Paris pp. 2-212

Il est certain que s’il est nécessaire dans un vaste royaume, il n’est pas moins essentiel d’y mettre des bornes. […] Nous ne sommes plus dans ces temps heureux où les champs produisoient d’eux-mêmes les choses nécessaires à notre subsistance. […] Ce pourroit être à la vérité sur des lits qui ne seroient ni chers, ni précieux, mais qu’importe si le luxe est réellement nécessaire dans un vaste Royaume. […] … Cela n’est pas nécessaire ; puisqu’il ne voit que des femmes qui se portent bien, ne lui suffit-il pas d’être aimable ? […] Ceux-là, me repliqua-t-il, recevroient annuellement leur portion de bled & de denrées, nécessaires à la vie champêtre.

827. (1895) Nos maîtres : études et portraits littéraires pp. -360

Leurs sujets, c’était le prétexte nécessaire, comme à un musicien le libretto de l’opéra. […] Une consciente logique a créé le thème, avec — mais rien au-delà — son expansion nécessaire. […] Et il a vu que la théorie de l’évolution avait, au point de vue politique, deux conséquences nécessaires. […] Une fabrique d’Ases, d’hommes nouveaux, pourra être constituée : on développera, par sélection, chez les hommes diversement prédisposés pat l’évolution antérieure, les organes nécessaires à leur bonheur, nécessaires au bonheur de tous. […] Ce n’est pas qu’elle y ait mis plus d’invention ni plus de recherche qu’il n’était nécessaire.

828. (1859) Moralistes des seizième et dix-septième siècles

Un éclaircissement est ici nécessaire. […] Le scepticisme, à cette époque, fut une réaction, sinon nécessaire, du moins naturelle. […] Ce principe, nécessaire dans toutes les sciences d’observation, l’est doublement dans l’étude de l’homme. […] Ici Dieu est nécessaire ; son idée revient, quoi qu’on fasse ; la mort ramène sur la scène ce grand nom, et avec lui revient la morale, non celle du tempérament, mais celle de la perfection. […] Faire le mal au-dehors, estimer, aimer le bien au-dedans est une sorte de sagesse peu nécessaire à préconiser en présence de l’infirmité humaine.

829. (1887) Discours et conférences « Appendice à la précédente conférence »

Ces sortes de distinctions sont nécessaires, si l’on ne veut pas que l’histoire soit un tissu d’à peu près et de malentendus.

830. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre premier. Impossibilité de s’en tenir à l’étude de quelques grandes œuvres » pp. 108-111

S’il est vrai que chaque époque se forge de la sorte des dieux mortels à son image et maltraite ou ignore des hommes de valeur réservés à l’admiration des générations suivantes, il est nécessaire de réduire le rôle excessif attribué trop fréquemment à ces fortes individualités qui dominent du haut de leur gloire le siècle où elles ont vécu.

831. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 211-219

Les rêveries de nos Philosophes sur l’origine du monde, la formation de la matiere, les propriétés du mouvement, &c. sont exposées, dans ces Lettres, avec un tel art, que les notions élémentaires de la Physique ne sont pas même nécessaires au Lecteur, pour saisir l’ensemble des systêmes philosophiques & en sentir toute l’absurdité.

832. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre IV »

La vénerie et le blason possèdent des langues entièrement pures et d’une beauté parfaite ; mais il m’a semblé plus curieux de choisir comme type de vocabulaire entièrement français celui d’une science plus humble, mais plus connue, celui de l’ensemble des corps de métier nécessaires à la construction d’une maison.

833. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre IX »

C’est ainsi qu’il faut que la langue dévore tous les mots étrangers qui lui sont nécessaires, qu’elle les rende méconnaissables : qui, sans un tel hasard, en supposant que le mot eût vécu, aurait jamais retrouvé early dans lirlie ?

834. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Troisième faculté d’une Université. Faculté de droit. » pp. 506-510

Mais ce qu’il ne faut point perdre de vue, c’est que les parties d’éducation publique qui paraîtront superflues dans ce moment pourront devenir nécessaires avec le temps ; à mesure que le grand ouvrage de la civilisation s’avancera, les intérêts divers, les relations entre les sujets se multiplieront, et c’est cet avenir que Sa Majesté Impériale doit prévénir par sa sagesse, si elle redoute d’abandonner la suite de ses projets à l’ignorance ou aux caprices de la folie.

835. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre V. Première partie. Les idées anciennes devenues inintelligibles » pp. 106-113

La Chambre de 1815, qui a été l’objet de tant d’éloges et de tant de critiques, eut cela de remarquable qu’elle représentait très bien le mouvement des opinions françaises, qu’elle représentait très bien aussi cet état d’anxiété, de trouble, d’incertitude, résultat nécessaire de la lutte des mœurs et des opinions.

836. (1936) Histoire de la littérature française de 1789 à nos jours pp. -564

Aujourd’hui la vie et la grandeur de la cause méritent qu’on fasse l’effort nécessaire pour en retrouver les précédents, les titres, dans une œuvre dont on ne peut dissimuler qu’elle est devenue pesante. […] L’étude de ces beautés relatives n’est pas moins nécessaire. » Rôle de Schlegel. […] L’idée du nouveau pouvoir spirituel nécessaire à l’humanité dans la vie nouvelle où la Révolution la pousse, voilà la création propre de Saint-Simon, transmise par lui à Auguste Comte et Renan. […] Lamartine, qui a généralement été un juge de sa poésie plutôt partial contre lui, a toujours distingué dans son œuvre poétique la qualité exquise et la quantité nécessaire. […] Triomphe et refus de Lamartine appartiennent aujourd’hui non plus à des générations qui se succèdent et se contredisent, mais à des catégories coexistantes et nécessaires de la complexe poésie, la catégorie de l’inspiration et la catégorie de la technique.

837. (1928) Les droits de l’écrivain dans la société contemporaine

C’est là un raisonnement qui fait complètement abstraction de la vie sociale et de son hypocrisie nécessaire. […] Il en résulte que pour toute publication, une double autorisation est nécessaire et qu’en tout cas il faut le consentement de l’auteur de la missive. […] L’hypocrisie sociale n’était pour lui, de son vivant, qu’un moyen de défense nécessaire et respectable. […] C’est donc un texte nouveau qui est nécessaire ici27. […] Il n’est pas nécessaire de légiférer à nouveau — grands dieux !

838. (1889) Les artistes littéraires : études sur le XIXe siècle

Les motifs de l’infériorité incontestable qui s’attache à ce procédé de composition se comprennent d’ailleurs presque instinctivement, sans qu’il soit nécessaire de les analyser. […] La sauvagerie est nécessaire, tous les quatre ou cinq cents ans, pour revivifier le monde. […] Sans vouloir discuter ici, faute de la compétence nécessaire, la thèse de M.  […] Chez le créateur de Bouvard et Pécuchet, ce détachement nécessaire demeura perpétuellement impossible. […] Si tous les règlements, — quels qu’ils soient, impératifs ou restrictifs, — ne doivent produire en matière d’art que des résultats néfastes, était-il nécessaire d’en ressusciter d’anciens et d’en promulguer de nouveaux ?

839. (1893) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Cinquième série

Tantôt plus lent et tantôt plus pressé, plus fort ou plus doux, plus impétueux ou plus languissant, il est dans l’ode ou dans l’élégie, comme le souvenir de leur alliance avec la musique, et à ce titre, il fait une partie nécessaire de la notion ou de la définition même du lyrisme. […] Est-il nécessaire de faire observer maintenant qu’en effet, de quelque côté que l’on tourne les yeux, c’est au même but, prosateurs ou poètes, que nous voyons alors tendre tous les écrivains ? […] Utile, ou nécessaire même, à sa date — car je ne voudrais certes ni la nier, ni la diminuer, et au lieu de parler de Malherbe, si je parlais de Ronsard, on le verrait bien, — il était temps, entre 1610 et 1630, que l’influence de l’Italie cessât enfin de nous opprimer. […] Mais il ne l’a pas fait, pour la raison qu’il vient de nous dire, parce qu’il n’aimait pas à parler de ce qu’il savait mal, et puis, et surtout parce que rien n’était au fond moins nécessaire à son dessein. […] Était-ce qu’il crût bien nécessaire, comme on l’a prétendu, de réfuter le paradoxe de Descartes sur les animaux machines ?

840. (1922) Nouvelles pages de critique et de doctrine. Tome I

Il possède, à son service, le temps nécessaire à ces préparations dont Dumas fils disait qu’elles sont la moitié de l’art du théâtre. […] Des nouvelles de Mérimée, nous avons le droit de dire qu’elles sont toutes nécessaires, tant l’auteur et l’homme ne font qu’un chez lui. […] Le large coup de brosse y est nécessaire, et le fignolage du miniaturiste serait ici le pire des défauts. […] Il est nécessaire qu’elles ne soient ni incorrectes ni lâchées. […] Il est nécessaire que le fait ait une valeur.

841. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre V. Du jeu, de l’avarice, de l’ivresse, etc. »

Cet état devient quelquefois tellement nécessaire à ceux qui l’ont éprouvé, qu’on voit des marins traverser de nouveau les mers, seulement pour ressentir l’émotion des dangers auxquels ils ont échappé.

842. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « La Solidarité »

Les liens nécessaires ou consentis qui vous unissent à vos camarades et à vos maîtres, vous ne les connaissez guère que par leur douceur, vous ne luttez que pour des palmes innocentes, vous n’avez pas à gagner votre pain les uns contre les autres ; vous avez, tout naturellement, des idées, des intérêts, des plaisirs communs.

843. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Des avantages attachés à la profession de révolutionnaire. » pp. 200-207

(À la vérité, ce n’est point par une nécessaire liaison d’idées, mais par une rencontre accidentelle, que nous voyons les doctrines révolutionnaires associées chez nous au matérialisme le plus franc et le plus cru : car celui-ci pourrait aussi bien, et même mieux, avoir pour conclusion, en politique, la monarchie absolue ; et c’était, notamment, l’avis de l’Anglais Hobbes.

844. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXVI. Jésus au tombeau. »

Il arriva portant une ample provision des substances nécessaires à l’embaumement.

845. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre VIII » pp. 70-76

La qualification de naïf, que Corneille donne au style de ses interlocuteurs, style fort différent de celui des personnages de Molière, qui est aussi estimé naïf, m’a paru rendre nécessaires quelques observations sur la naïveté.

846. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XVI, les Érynnies. »

L’Espion et le Bourreau ont toujours passé pour des êtres nécessaires à l’ordre social ; ils n’en sont pas moins mis au ban des hommes, excommuniés de toute relation et de tout accueil ; ces satellites du salut public sont les réprouvés de la société qui s’en sert.

847. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre cinquième. »

N’est-il pas plaisant de supposer que ce soit un effet nécessaire et une suite naturelle de la royauté, de n’avoir d’égard ni pour les choses ni pour les personnages ?

848. (1887) La Terre. À Émile Zola (manifeste du Figaro)

Il est nécessaire que, de toute la force de notre jeunesse laborieuse, de toute la loyauté de notre conscience artistique, nous adoptions une tenue et une dignité en face d’une littérature sans noblesse, que nous protestions au nom d’ambitions saines et viriles, au nom de notre culte, de notre amour profond, de notre suprême respect pour l’Art.

849. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre quatrième. Du cours que suit l’histoire des nations — Chapitre VI. Autres preuves tirées de la manière dont chaque forme de la société se combine avec la précédente. — Réfutation de Bodin » pp. 334-341

Lorsque les citoyens sont ainsi devenus étrangers à leur propre pays, il est nécessaire que les monarques les dirigent et les représentent.

850. (1922) Gustave Flaubert

Tout cela fait le temps nécessaire à l’être nouveau d’Emma pour se former à l’intérieur d’elle-même, et sortir à la lumière quand le moment sera venu. […] D’abord l’illusion dans le temps, qui est le propre du désir, et qui est d’ailleurs aussi nécessaire à la vie que l’eau aux plantes. […] Et il ne resta du procès que le bruit nécessaire pour assurer le succès du roman lorsqu’il parut en volume chez Michel Lévy. […] L’œil du critique et l’œil du reconstructeur sont l’un et l’autre nécessaires à sa vision binoculaire. […] Mais c’étaient là déjà des moments nécessaires de la Bovary.

851. (1892) Essais sur la littérature contemporaine

Mieux encore : parmi ces conventions, c’est elle qui travaille à débrouiller les nécessaires d’avec les arbitraires. […] Mais est-il bien nécessaire d’être « chrétien » pour penser comme lui ? […] Il n’est pas nécessaire qu’un roman soit littéraire, non plus qu’un drame. […] et d’autres qualités, ou d’autres conditions encore ne sont-elles pas nécessaires ? […] Voyons comment on pourra concilier ce que ces exigences, toutes les trois nécessaires, offrent d’abord de contradictoire.

852. (1876) Romanciers contemporains

Reybaud peut avoir raison en ce qui concerne le théâtre où certains grossissements sont parfois nécessaires. […] Rien ne s’y trouve de ce qui serait superflu, rien n’y manque de ce qui est nécessaire. […] Plus de logique et de bonne foi serait nécessaire. […] Cela, il le fallait, et ce trait était nécessaire. […] Il est nécessaire que ce pendant soit irréprochable.

853. (1895) Hommes et livres

Tout n’est pas nécessaire encore, déjà plus rien n’est inutile. […] Leur apparition simultanée fut-elle fortuite ou nécessaire ? […] C’est une réhabilitation complète, mais une réhabilitation discrète, mesurée, conduite avec autant de goût que d’érudition ; et par-dessus tout une réhabilitation nécessaire. […] Ces grandes agitations des habiles politiques ne dirigent ni ne détournent le cours nécessaire des choses. […] Il recommande la vérité du décor, mais il n’admet que le décor nécessaire, qui explique et soutient l’action.

854. (1891) Essais sur l’histoire de la littérature française pp. -384

La réciprocité latente de l’un à l’autre de ces deux éléments y est nécessaire. […] Il n’a pas étudié autant qu’il était nécessaire pour le bon emploi de son talent, le génie de sa langue et les ressources qu’elle offre. […] où est l’opinion si nécessaire à une femme ? […] Il est bien certain qu’il eut le sang-froid nécessaire pour se mésallier dans un intérêt d’ambition et de bonheur domestique. […] Il proposa la banqueroute au Régent, dès ayant la mort de Louis XIV, comme légitime et nécessaire.

855. (1857) Réalisme, numéros 3-6 pp. 33-88

L’intrigue amoureuse est la partie effacée ; l’amour est-il partout nécessaire ? […] » s’écriait-il quelquefois ; que d’argent nécessaire ! […] Il ne se contente que des vues philosophiques qui ramènent tout savoir relatif à un savoir absolu, et qui affermit dans l’esprit humain, toute expérience en la basant sur le nécessaire. […] Si on demande au réaliste : Pourquoi fais-tu ce qui est bien, et subis-tu ce qui est nécessaire ? […] Le vrai idéaliste n’abandonne la nature et l’expérience que parce qu’il n’y trouve pas l’immuable et le nécessaire inconditionnel après lesquels la raison le fait cependant aspirer.

856. (1892) Les idées morales du temps présent (3e éd.)

Ils rendent nécessaire l’immortalité ; c’est grâce à eux que le découragement moral et le scepticisme pratique peuvent être invinciblement réfutés. […] Le royaume des cieux, en tant que monde régulièrement organisé où se poursuivront nos existences personnelles, n’est nécessaire qu’aux simples d’esprit ; aussi leur est-il réservé. […] Une foi religieuse, ramenant la loi à des origines surnaturelles et l’étayant sur des promesses de récompenses ou de peines pour la vie future, apparaît comme le fondement et la sanction nécessaires de la morale. […] M. de Vogüé, lui, a su prendre le recul nécessaire pour se mettre au point. […] En d’autres termes, on se fabrique couramment sa petite morale personnelle, bonne pour soi et les siens, adaptée aux besoins particuliers de sa conscience, avec les adoucissements et les exceptions nécessaires.

857. (1906) La rêverie esthétique. Essai sur la psychologie du poète

Pour savoir ce que nous en devons penser, quelques mots d’explication sont nécessaires. […] Nous croyons avoir déterminé l’ensemble des conditions nécessaires et suffisantes pour que se produise l’impression poétique. […] Même considéré tel qu’il est, sans qu’il soit nécessaire de se faire illusion sur son compte, l’homme a sa noblesse et sa dignité. […] Mais encore une fois, il est des cas où la réflexion est nécessaire. […] A plus forte raison sera-t-il nécessaire de multiplier les indications quand on en arrivera à des rythmes absolument nouveaux.

858. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) «  Chapitre treizième.  »

Cette fréquentation assidue des auteurs anciens était nécessaire même à Bossuet, comme elle l’a été à tous les écrivains du dix-septième siècle. […] Cette connaissance nous est si nécessaire, qu’il fallait bien qu’elle fût à la main de chacun. […] La monarchie absolue n’a été en France le meilleur des gouvernements qu’aussi longtemps qu’elle a été nécessaire. […] L’amour pur substituait au christianisme populaire une sorte de christianisme de conférences secrètes et mystérieuses, un christianisme de beaux esprits, faisant leur nécessaire de ce qu’ils déclaraient n’être pas utile à tout le monde, et qualifiant eux-mêmes leur piété de piété distinguée. […] C’est pour ce grand combat que la Providence met au monde, à certaines époques, des hommes supérieurs en qui se personnifient les deux principes, et c’est parce que ce combat est nécessaire et inévitable que tout combattant de bonne foi y est innocent.

859. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxiiie entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff »

Cependant, je crois nécessaire d’observer que, connaissant la difficulté d’un travail de ce genre, je ne me serais peut-être point décidé à l’entreprendre si l’auteur lui-même ne m’y avait encouragé. […] Quant à passer en revue les diverses pièces de ce recueil, je ne le crois point nécessaire : le lecteur saura fort bien, sans mon secours, distinguer celles qui sont les plus dignes de fixer son attention. […] — Qu’on prenne les dispositions nécessaires.… relativement à Théodore, dit Arcadi Pavlitch, à demi-voix et d’un air parfaitement dégagé. […] Il prit en conséquence une telle quantité de linge, de vêtements, de parfums, de coussins et de nécessaires de toute espèce, qu’un Allemand économe en aurait eu très-certainement pour plus d’un an. […] Je crois nécessaire de faire à ce propos la remarque suivante : depuis que la Russie existe, tous ceux qui s’y sont enrichis ont une barbe démesurée.

860. (1898) Émile Zola devant les jeunes (articles de La Plume) pp. 106-203

C’est pourquoi la venue de Zola était si nécessaire. […] Émile Zola nous a montré que cela n’était pas nécessaire de douer les personnages vulgaires de surnaturelles qualités pour leur donner de l’attrait dramatique, mais que chaque créature, si minime qu’elle soit, contient une parcelle de beauté. […] Et aujourd’hui que nous pouvons la juger avec le recul nécessaire, la préface des Rougon-Macquart apparaîtra, aux yeux de tous, comme une date considérable : « Je veux expliquer, y dit M.  […] Pour se faire une idée véritable du jeu des passions humaines, il est nécessaire de tenir compte des moteurs qui les déterminent, du mécanisme subtil des organes, des accidents nerveux, des crises physiologiques. […] Après les avoir proférées contre la foule, pourquoi immédiatement reconnaître à celle-ci le droit de consacrer le génie bafoué la veille sans qu’assez de temps ait mis entre elle et l’œuvre le lointain nécessaire ?

861. (1899) Préfaces. — Les poètes contemporains. — Discours sur Victor Hugo pp. 215-309

Elles ne pourront qu’être reproduites avec des atténuations nécessaires. […] Le poète, le créateur d’idées, c’est-à-dire de formes visibles ou invisibles, d’images vivantes ou conçues, doit réaliser le Beau, dans la mesure de ses forces et de sa vision interne, par la combinaison complexe, savante, harmonique des lignes, des couleurs et des sons, non moins que par toutes les ressources de la passion, de la réflexion, de la science et de la fantaisie ; car toute œuvre de l’esprit, dénuée de ces conditions nécessaires de beauté sensible, ne peut être une œuvre d’art. […] Il est mort plein de jours, en possession d’une immense sympathie publique, et je ne veux, certes, contester aucune de ses vertus domestiques ; mais je nie radicalement le poète aux divers points de vue de la puissance intellectuelle, du sentiment de la nature, de la langue, du style et de l’entente spéciale du vers, dons précieux, nécessaires, que lui avaient refusés tous les dieux, y compris le dieu des bonnes gens qui, du reste, n’est qu’une divinité de cabaret philanthropique. […] Dans le monde de l’art, en effet, la recherche latente ou consciente de cet accord définitif constitue le travail interne, nécessaire, de tout esprit bien doué. […] L’époque organique de notre littérature s’ouvre alors, très remarquable assurément par l’ordre et la clarté, mais réfractaire en beaucoup de points à l’indépendance légitime de l’intelligence comme aux formes nouvelles qui sont l’expression nécessaire des conceptions originales.

862. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre septième. Les altérations et transformations de la conscience et de la volonté — Chapitre deuxième. Troubles et désagrégations de la conscience. L’hypnotisme et les idées-forces »

Mais, au point de vue général de la philosophie, l’idée du sommeil n’est pas pour cela, comme le croit l’école de Paris, un simple « reflet » de mouvements organiques qui pourraient aussi bien exister sans aucun contenu mental ; il y a là deux parties d’un même tout également nécessaires, et on n’a pas le droit de déclarer que l’une ou l’autre est un reflet superflu. […] James ont établi par l’expérimentation que, durant ce premier stage de l’hypnotisme que les Anglais appellent le stage « alerte », le temps nécessaire au sujet pour réagir à l’égard d’une stimulation extérieure diminue, et l’intensité liminale est plus faible. […] L’hypnotisé peut avoir l’acuité de l’ouïe nécessaire pour entendre un ordre qui lui est donné par la parole intérieure. […] Chez l’hypnotisée, il y a après le réveil la forte persuasion de l’absence nécessaire d’une personne, jointe à l’exaltation de toutes les autres sensations ; de là un trouble de la synthèse, qui rejette dans la pénombre l’image réelle de la personne présente, l’efface même par une sorte de paralysie partielle. […] Du trouble de l’un ou de l’autre des organes cérébraux nécessaires à la fonction complexe du langage résulte une forme déterminée d’amnésie : surdité verbale (on ne comprend plus les mots que l’on entend), cécité verbale (on ne comprend plus les mots qu’on voit écrits), aphasie motrice (on ne sait plus articuler les mots), aphasie graphique (on ne sait plus les écrire).

863. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre II. La parole intérieure comparée à la parole interieure »

On sait que, suivant Bain, la sensation tactile-musculaire ou son image est un élément nécessaire de tous les faits intellectuels139: nous craignons que l’esprit de système ne l’ait entraîné, sur le point qui nous occupe, à une observation peu rigoureuse140. […] Ce que je nie, c’est que l’image tactile soit un élément nécessaire de la parole intérieure et doive, en conséquence, entrer dans la définition de ce phénomène ; d’ordinaire, elle est absente, et cette absence est d’autant plus la règle que la parole intérieure mérite mieux son nom, qu’elle est mieux constituée à l’état de compagnon inséparable de la pensée. […] Pour élucider ce point, une courte digression sur la perception externe est nécessaire : Les faits ou états de conscience forment une succession continue ; leur totalité, c’est nous-même ; ce qui est hors de la conscience étant comme s’il n’était pas, je suis la totalité des choses ; elle forme une série successive qui ne se distingue pas de la série de mes états, et elle est par là soumise, sans exception et avant tout, à la forme du temps. […] Le sens commun lui-même n’est pas l’état primitif de l’âme ; le dualisme du moi et du non-moi suppose un travail de l’esprit ; avant que l’esprit ait acquis la force et l’expérience nécessaires pour accomplir ce travail, l’esprit est idéaliste ; il n’y a pour lui qu’un être, dont il saisit confusément l’unité en même temps que la diversité, et cet être unique, puisqu’il est seul et puisqu’il est un, c’est lui-même. […] Une solution, sinon complète, du moins simple et séduisante, du problème, serait de considérer l’étendue comme toujours donnée à l’esprit avec certains états, et de lui attribuer la vertu de susciter le jugement de perception externe ; la présence de l’étendue dans un état étant alors la condition nécessaire et suffisante de la perception externe, on pourrait dire qu’elle est le signe de l’extériorité, et la perception externe serait la conclusion d’un syllogisme : Ce phénomène est étendu ; — or tout étendu m’est étranger ; — donc ce phénomène n’est pas mien.

864. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. DE VIGNY (Servitude et Grandeur militaires.) » pp. 52-90

M. de Vigny crut toutefois qu’un détour était encore nécessaire, et il s’adressa à l’Othello de Shakspeare pour une première initiation du public, tandis que M. […] L’auteur énonce, sur l’état arriéré des armées, sur leur transformation nécessaire, des idées miséricordieuses et équitables, les vues d’un philosophe militaire qui a profité de toutes les lumières de son temps et qui s’est souvenu de Catinat. […] Les nouveaux venus sont si nouveaux, les héritiers de la dernière heure sont si mal informés de tout le contenu et des précédents de l’héritage, la vie du passé est tellement prompte à s’évanouir ou à ne laisser que de vagues traces d’elle-même, que j’ai cru bon et nécessaire, en présence d’une dénégation étrange, d’insister ici sur une de ces traces et de réveiller quelque idée d’un groupe et d’un moment si chèrement mémorables à ceux qui en firent partie, et à jamais dissipés. — Deux lettres seulement encore : « Avril 1830.

865. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIIe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (1re partie). Littérature scientifique » pp. 221-288

IV Cependant Alexandre, ayant tout préparé en Prusse pour son immense pensée, alla, en 1799, à Paris, enrôler avec lui un Français distingué, Amédée Bonpland, et partit avec lui pour l’Espagne, afin d’y solliciter de la cour de Madrid les faveurs nécessaires à l’accueil qu’il désirait obtenir des vice-royautés de l’Amérique, et d’y saisir l’occasion d’un passage que la France, en guerre avec l’Angleterre, ne lui offrait pas. […] Alexandre, à la chute de l’empire français, reçut du roi de Prusse, indépendamment des sommes nécessaires à solder les préparatifs d’un voyage en Perse, en Chine, au Thibet, vingt-quatre mille livres de rente pendant la durée de ce grand voyage. […] Il tenta alors d’obtenir de la cour de Prusse trop obérée les subventions nécessaires à la publication de son premier voyage.

866. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre cinquième »

Et, chose remarquable du plus rocailleux de nos poètes, l’impression dernière qui nous reste des vers de Rhadamiste et Zénobie, est une impression d’harmonie : tant il est vrai que cette qualité, au lieu d’être un don personnel, est l’effet nécessaire de toutes les autres qualités du langage réunies. […] Cette part nouvelle faite à l’action et au spectacle rendait nécessaire une double réforme du théâtre. […] Les événements n’y sont pas nécessaires comme dans l’histoire, et la moralité n’en a rien de plus imposant que celle d’un roman.

867. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Edgar Allan Poe  »

À cette imagination minutieuse, qui conçoit avec le même détail des états d’âme directement perçus, et des scènes, des lieux, des suites de pensées imaginaires, — qui est constituée par conséquent plutôt par la vue nette de rapports vraisemblables et logiques, que par une acuité spéciale d’observations, — Poe associe la déduction des incidents, la notion des conséquences probables ou nécessaires que peut ou doit avoir toute donnée. […] Valdémar, ce dénouement horrible, algébriquement nécessaire, les données fantastiques admises, où un phtisique magnétisé dans son agonie, laissé tel après sa mort pendant sept mois, puis soumis aux passes contraires, « dans l’espace d’une minute et même moins, se déroba, s’émietta, se pourrit absolument sous mes mains. […] Les incidents nécessaires à la vraisemblance sont pressés en une intrigue purement logique, altérés, choisis et raffinés au point de paraître agiter une planète chimérique, au soleil plus pâle, aux nuits plus claires que la nôtre.

868. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Crétineau-Joly »

Ces hommes, d’ailleurs, consommés dans la connaissance de ce qui fait la force, n’avaient pas encore jugé nécessaire d’entrouvrir les sources précieuses qu’ils possédaient seuls et qu’ils avaient tenues si longtemps fermées pour des raisons bien supérieures aux vues de l’habileté humaine. […] S’il était nécessaire de répondre par un grand nom à des scrupules que nous traitons comme ils le méritent, c’est-à-dire avec beaucoup de respect, nous citerions le cardinal Baronius. […] Est-il nécessaire de le prouver ?

869. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre VI. L’effort intellectuel »

Ne trouverait-on pas dans la représentation elle-même, dans les réactions intérieures qu’elle accomplit, dans la forme, le mouvement et le groupement des états plus simples qui la composent, tout ce qui est nécessaire pour distinguer la pensée qui se laisse vivre de la pensée qui se concentre et qui fait effort ? […] Cette implication réciproque, et par conséquent cette complication intérieure, est chose si nécessaire, elle est si bien l’essentiel de la représentation schématique, que le schème pourra, si l’image à évoquer est simple, être beaucoup moins simple qu’elle. […] Ce que nous voyons de la phrase lue, ce que nous entendons de la phrase prononcée, est tout juste ce qui est nécessaire pour nous placer dans l’ordre d’idées correspondant : alors, partant des idées, c’est-à-dire des relations abstraites, nous les matérialisons imaginativement en mots hypothétiques qui essaient de se poser sur ce que nous voyons et entendons.

870. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gibbon. — I. » pp. 431-451

Il se borna dans sa défense à ce qui était strictement nécessaire, et il évita ce qui eût pu enflammer. […] Il fait voir que la connaissance véritable de l’Antiquité est le résultat d’un ensemble très varié, très détaillé, sans lequel on ne fait qu’entrevoir les beautés des grands classiques : « La connaissance de l’Antiquité, voilà notre vrai commentaire ; mais ce qui est plus nécessaire encore, c’est un certain esprit qui en est le résultat ; esprit qui non seulement nous fait connaître les choses, mais qui nous familiarise avec elles et nous donne à leur égard les yeux des anciens. » Il cite des exemples tirés de la fameuse querelle des anciens et des modernes, et qui prouvent à quel point, faute de cette connaissance générale et antérieure, des gens d’esprit comme Perrault ont décidé en aveugles de ce qu’ils n’entendaient pas. — Il y a, chemin faisant, des vues neuves et qui sentent l’historien.

871. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — I. » pp. 204-223

Le défaut de Duclos, dans ce monde élégant qui en souffrait quelquefois, est très finement noté par M. de Forcalquier : Ce qui lui manque de politesse, dit-il, fait voir combien elle est nécessaire avec les plus grandes qualités : car son expression est si rapide et quelquefois si dépourvue de grâce qu’il perd, avec les gens médiocres qui l’écoutent, ce qu’il gagne avec les gens d’esprit qui l’entendent. […] Les hommes de ce caractère se croient capables de tout… Les plus grandes affaires, celles du gouvernement, ne demandent que de bons esprits : le bel esprit y nuirait, et les grands esprits y sont rarement nécessaires.

872. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Bourdaloue. — II. (Fin.) » pp. 281-300

On y verrait que dans le sermon Sur la sévérité de la pénitence, prêché le quatrième dimanche de l’Avent en 1670, Bourdaloue, après avoir montré dans le premier point que la sévérité est nécessaire, et dans le second qu’elle doit pourtant se tempérer toujours de consolation et de douceur, n’avait paru d’abord accorder quelque chose aux docteurs jansénistes que pour le leur retirer ensuite plus expressément. […] Mille affaires me détournent et m’empêchent de travailler autant que je le voudrais à ma perfection, qui néanmoins est la seule chose nécessaire.

873. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « De la poésie de la nature. De la poésie du foyer et de la famille » pp. 121-138

Cette poésie touchante, familière et pure, a aussi tenté, de nos jours, quelques hommes de talent en France, et je suis loin de ne pas les estimer à leur prix : toutefois la veine principale et la source vive ont été surtout en Angleterre, et j’aimerais à ce que nos auteurs en fussent mieux informés, non point pour aller l’imiter et la vouloir directement transporter chez nous, mais pour se mieux pénétrer des conditions nécessaires à ce genre d’inspirations et pour s’y placer, s’il se peut, à l’avenir. […] L’esprit qui réclame un divertissement nécessaire devrait se tourner vers les écrivains d’une plus solide qualité, dont les traits bien ménagés et le style classique donnent à la vérité un lustre et font sourire la sagesse.

874. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Le journal de Casaubon » pp. 385-404

Enfin ces auteurs et chefs d’une réformation, à d’autres égards nécessaire, je les vois s’accorder si peu entre eux qu’ils sont l’un pour l’autre comme des loups dévorants. […] [NdA] Ce mot de Henri IV, de ce roi vraiment tutélaire et qui sentait à quel point il l’était, rappelle les belles paroles de Richelieu, en son testament politique, sur la vigilance nécessaire au chef d’un État et sur la gravité de la charge dont il porte le poids à toute heure, la ressentant d’autant plus qu’il est plus habile : « Il faut dormir comme le lion, sans fermer les yeux… Une administration publique occupe tellement les meilleurs esprits, que les perpétuelles méditations qu’ils sont contraints de faire pour prévoir et prévenir les maux qui peuvent arriver les privent de repos et de contentement, hors de celui qu’ils peuvent recevoir voyant beaucoup de gens dormir sans crainte à l’ombre de leurs veilles et vivre heureux par leur misère. »

875. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet »

Il avait conscience et il se rendait parfaitement compte de cette unité si nécessaire de direction et d’emploi. […] Il se persuadait, disait-il, que la solitude, la tranquillité, le mystère même, étaient nécessaires aux méditations du talent.

876. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Mémoires de madame Roland »

Ce qu’il y a de certain, c’est qu’au gré des amis de l’auteur, Bosc ne prit point encore assez de précautions ; car, au milieu de remerciements et d’éloges mérités, on lui reprocha non seulement d’avoir laissé « des redites qu’il eût été aussi facile que nécessaire d’éviter », mais encore de n’avoir pas émoussé ou retiré certains traits cruels et injustes. […] Encore une fois, mettons-nous à la place de ces premiers éditeurs : il n’est pas un seul d’entre nous qui, chargé au lendemain de la mort d’un ami célèbre de mettre en ordre ses papiers et d’en tirer la matière d’une publication réclamée et opportune, ne prenne garde, n’hésite plus d’une fois en vue même d’une mémoire respectée, ne conçoive des scrupules et n’estime quelques retranchements nécessaires, provisoirement du moins.

877. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat. »

Quoi de plus logique et de plus nécessaire qu’il n’ait pas voulu de lui pour son major et son alter ego ? […] Le duc de Mantoue désirait, en cédant la citadelle de Casal, non la ville ni le château, que l’on crût qu’il avait la main forcée, et à cette fin, pour lui servir d’excuse envers ses voisins, Espagnols ou Italiens, il était nécessaire qu’on fît montre de rassembler en Dauphiné un corps de troupes fort supérieur à celui qu’on réunissait effectivement.

878. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Exploration du Sahara. Les Touareg du Nord, par M. Henri Duveyrier. »

C’est un point commercial nécessaire. […] À la différence des marabouts arabes qui attendent leurs clients à domicile, les marabouts des Touâreg, pour peu qu’ils veuillent exercer de l’influence sur leurs contribules ou concitoyens, sont obligés, comme des missionnaires, de se rendre partout où leur intervention est nécessaire.

879. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre IV. L’Histoire »

Il faut voir avec quelle sûreté d’analyse, et quelle subtilité habile à se déguiser sous une sévère exactitude, Guizot étudie les quatre éléments de la société du moyen âge : aristocratie féodale, Église, royauté, communes, en conduit les relations et les progrès, de façon à faire apparaître le régime de 1830 comme le couronnement nécessaire et légitime de toute l’Histoire de France. […] Tout cet effort aboutissait en somme à faire de 1789 et de 1830 la revanche de la conquête franque : 1830 devenait le complément nécessaire de 1789, le terme glorieux de tout le développement national.

880. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Alphonse Daudet, l’Immortel. »

Quoiqu’il ne soit qu’un imbécile, il connaît certainement les méthodes de vérification des manuscrits ; il n’est point nécessaire d’être un aigle pour les savoir et les appliquer… L’Académie peut bien faire encadrer l’autographe de Rotrou, parce qu’elle n’y regarde pas de très près, parce qu’elle est un corps et que les corps sont toujours bêtes. […] C’est à nous de faire ou de supposer les liaisons nécessaires.

881. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Campagnes d’Égypte et de Syrie, mémoires dictés par Napoléon. (2 vol. in-8º avec Atlas. — 1847.) » pp. 179-198

Si simple que soit le style de Pascal, et quoiqu’on ait eu raison de dire que, « rapide comme la pensée, il nous la montre si naturelle et si vivante, qu’il semble former avec elle un tout indestructible et nécessaire », ce style, dès qu’il se déploie, a des développements, des formes, du nombre, tout un art dont le secret n’est pas celui du héros qui court à sa conquête. […] Il ne faut pas en conclure qu’on doive les détruire ; ils sont, au contraire, nécessaires.

882. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le père Lacordaire orateur. » pp. 221-240

Lacordaire s’était fait le raisonnement que voici : La société, à mes yeux, est nécessaire ; de plus, le christianisme est nécessaire à la société ; il est seul propre à la maintenir, à la perfectionner : donc le christianisme est vrai, non pas d’une vérité politique et relative, comme l’admettent bien des gens, mais d’une vérité supérieure et divine : toute autre vérité secondaire serait un compromis et une sorte de malentendu indigne et de la confiance de l’homme et de la franchise de Dieu.

883. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Lettres de la marquise Du Deffand. » pp. 412-431

Concluez de là que vous m’êtes aussi nécessaire que ma propre existence, puisque, tous les jours, je préfère d’être avec vous à être avec tous les gens que je vois : ce n’est pas une douceur que je prétends vous dire, c’est une démonstration géométrique que je prétends vous donner. […] On a dit d’elle qu’en fait de lectures, elle ne s’était jamais rien refusé que le nécessaire.

884. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Mme du Châtelet. Suite de Voltaire à Cirey. » pp. 266-285

L’illusion lui semble nécessaire ; elle veut qu’on se la donne ; que, loin de la dissiper, « on épaississe le vernis qu’elle met sur la plupart des objets ». […] Mme du Châtelet croit les passions nécessaires au bonheur ; à défaut de passions, elle demande au moins des goûts.

885. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur de Balzac. » pp. 443-463

Quelques paroles de cette autorité me sont nécessaires ; elles sont comme les colonnes immuables et sacrées que je tiens seulement à montrer du doigt dans le lointain, pour que notre admiration même et notre hommage de regret envers un homme d’un merveilleux talent n’aillent pas se jouer au-delà des bornes permises. […] En admirant le parti qu’ont su tirer souvent d’eux-mêmes des hommes dont le talent a manqué des conditions nécessaires à un développement meilleur, souhaitons à l’avenir de notre société des tableaux non moins vastes, mais plus apaisés, plus consolants, et à ceux qui les peindront une vie plus calmante et des inspirations non pas plus fines, mais plus adoucies, plus sainement naturelles et plus sereines.

886. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Madame de Maintenon. » pp. 369-388

Il semble pourtant que, des deux, ce fut lui encore qui l’aima le plus, ou, du moins, à qui elle était le plus nécessaire. […] Près de quitter le moribond, elle voulut pourtant que son confesseur vît le roi et lui dît s’il y avait espoir qu’il reprît le sentiment. — « Vous pouvez partir, lui dit le confesseur, vous ne lui êtes plus nécessaire. » — Elle le crut, et elle obéit, partant aussitôt de Versailles pour Saint-Cyr.

887. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Le président de Brosses. Sa vie, par M. Th. Foisset, 1842 ; ses Lettres sur l’Italie, publiées par M. Colomb, 1836. » pp. 85-104

Il conçut l’idée d’un ouvrage qui pût sourire à ce grand homme (comme on disait alors) par l’assemblage de connaissances nécessaires à l’exécution. […] Par exemple, quand il passe en Dauphiné, il dira de l’Isère : « Nous passâmes ensuite à l’embouchure de l’Isère, rivière infâme s’il en fut jamais : c’est une décoction d’ardoise. » Et à Marseille : « On trouve en cette province, à chaque pas, l’agréable et jamais le nécessaire ; aussi, à vous parler net, la Provence n’est qu’une gueuse parfumée . » À propos d’une danseuse qu’il voit à Vérone, et qui surpasse tous les maîtres en entrechats : « De sorte, ajoute-t-il, qu’à l’égard de la légèreté, la Camargo est auprès d’elle une danseuse de pierre de taille. » Parlant du Giorgione à Venise, et le comparant, pour le coloris, à ce qu’est Michel-Ange pour le dessin, il dira : « Ces deux maîtres sont les czars Pierre de la Peinture, qui en ont banni la barbarie ; mais ce n’a pas été sans férocité. » Et en débarquant à Livourne : « Figurez-vous une petite ville de poche, toute neuve, jolie à mettre dans une tabatière, voilà Livourne. » Je cite ces mots au hasard, non comme des mots (car quelques-uns pourraient sembler maniérés, s’ils étaient faits pour être détachés et mis en relief), mais comme faisant partie du mouvement et du pétillement d’esprit ordinaire au président de Brosses.

888. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre troisième. Le souvenir. Son rapport à l’appétit et au mouvement. — Chapitre deuxième. La force d’association des idées »

Dans la tête de Franklin, le paratonnerre était préparé d’avance, et l’accident en apparence fortuit, en réalité nécessaire, qui y lit se joindre les idées d’étincelle électrique et de foudre, introduisit dans le monde des idées une espèce nouvelle et viable. […] Rappelons-nous, en effet, que le plaisir est le plus ordinairement précédé ou accompagné d’une certaine peine due au besoin et à la non-satisfaction d’une tendance : si la souffrance n’est pas la condition nécessaire du plaisir, elle en est du moins un antécédent habituel, et, au point de vue organique, il n’y a guère d’acquisition de force qui n’ait été précédée d’un manque de force.

889. (1897) Préface sur le vers libre (Premiers poèmes) pp. 3-38

. — Il est évident que tout grand poète ayant perçu d’une façon plus ou moins théorique les conditions élémentaires du vers, Racine a empiriquement ou instinctivement appliqué les règles fondamentales et nécessaires de la poésie et que c’est selon notre théorie que ses vers doivent se scander. […] En somme, le vers libre serait l’aboutissement nécessaire du poème en prose, créant une poésie à côté, des proses et des cantiques, à côté de la loi et des liturgies.

890. (1900) La province dans le roman pp. 113-140

Il n’est presque pas de ministre ou de politicien parvenu, fût-il de l’esprit le plus médiocre et le plus vulgaire, qui ne puisse lire, dans l’entrefilet consacré aux « hommes du jour », aux « instantanés », aux « célébrités et actualités », qu’il n’est pas seulement doué de toutes les qualités qui fondent les réputations durables, pas seulement génial, populaire, nécessaire au pays, mais, ce qui flatte bien autrement le héros de l’heure présente, qu’il est « une personnalité éminemment parisienne ». […] Il y a des hommes et des femmes, en grand nombre, qui trouvent que le bonheur n’a pas de patrie nécessaire, que la joie et le souci d’une fortune à faire ou à augmenter, d’une famille à élever, d’une âme à ennoblir, d’une place à tenir dans l’amitié de quelques-uns et dans l’estime de tous, suffisent amplement à remplir les heures et à les rendre brèves.

891. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre II : M. Royer-Collard »

. — Les fleuves ne remontent pas vers leur source ; les événements accomplis ne rentrent pas dans le néant. » Il disait à la Sorbonne : « A mesure que la réflexion retire la causalité que l’ignorance avait répandue sur les objets, les volontés locales, exilées du monde matériel, sont successivement rassemblées et concentrées par la raison en une volonté unique, source commune de toutes les volontés contingentes, cause première et nécessaire que la pensée de l’homme affirme sans la connaître, et dont elle égale le pouvoir à l’étendue, à la magnificence, à l’harmonie des effets qu’elle produit sous nos yeux. » Il invente des expressions superbes, qu’on n’oublie plus, images puissantes qui condensent sous un jet de lumière de longues suites d’abstractions obscures. […] Cette propriété représentative n’est point une supposition gratuite de quelques philosophes ; c’est une découverte nécessaire que chaque homme, chaque jour, fait en soi-même.

892. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXVI. Des oraisons funèbres et des éloges dans les premiers temps de la littérature française, depuis François Ier jusqu’à la fin du règne de Henri IV. »

Et qui, en voyant sur presque toute l’étendue de la terre, les hommes si malheureux, tant de fléaux de la nature, tant de fléaux nés des passions et du choc des intérêts, le genre humain écrasé et tremblant, éternellement froissé entre les malheurs nécessaires, et les malheurs que l’indulgence et la bonté auraient pu prévenir, peut se défendre d’un attendrissement involontaire, lorsqu’il voit s’élever un prince qui n’a d’autre passion et d’autre idée, que celle de rétablir le bonheur et la paix ? […] Il remonta à l’origine et à la première institution de la chevalerie, et la représenta comme une institution politique, militaire et sacrée, aussi nécessaire pour la défense que pour le gouvernement des États, et qui demandait dans un guerrier l’accord de la probité et du courage, des vertus et de l’honneur.

893. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXIII. »

Il était obligé d’entendre les raisonnements de légistes et même de missionnaires anglais qui croyaient nécessaire de permettre encore les immolations volontaires des veuves, pour ne pas rendre plus fréquents ces affreux sacrifices. […] Mais ce zèle même, si consumant pour la faiblesse du corps, cette ferveur ingénue qui semblait un don de l’Église primitive, s’alliaient en lui aux vues les plus hautes sur le mouvement de la race humaine ici-bas et le progrès nécessaire de l’Évangile.

894. (1856) Leçons de physiologie expérimentale appliquée à la médecine. Tome I

La première chose à faire dans l’étude d’une fonction, c’est donc d’étudier le phénomène dans l’organisme vivant, en imaginant et instituant toutes les expériences nécessaires pour l’analyser dans chacun de ses éléments. […] Nous pourrions vous parler d’autres moyens de dosage, mais j’aime mieux y revenir plus tard, si nous le trouvons nécessaire. […] Cette expérience suffirait à elle seule pour faire admettre, comme conclusion naturelle et nécessaire des faits, que le sucre se produit dans le foie. […] Cette exubérance de matière sucrée qui se produit ainsi dans l’organisme, au moment de la digestion, amène à sa suite d’autres phénomènes très importants, et sur lesquels il est nécessaire d’insister. […] Mes expériences me conduisirent d’abord à reconnaître que la présence de cette matière sucrée était indispensable à la production du ferment, qu’elle formait le milieu nécessaire à son développement.

895. (1874) Premiers lundis. Tome I « M.A. Thiers : Histoire de la Révolution française Ve et VIe volumes — I »

De là encore l’emprunt forcé, le cours forcé des assignats, le taux forcé des denrées ou maximum ; toutes conséquences nécessaires dérivant des mêmes besoins, concourant au même but.

896. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. Laurent (de l’Ardèche) : Réputation de l’histoire de France de l’abbé de Montgaillard  »

La première tâche était facile autant que nécessaire.

897. (1874) Premiers lundis. Tome I « Deux révolutions — I. L’Angleterre en 1688 et la France en 1830 »

Mais, si on allait plus avant, si on parlait de ces similitudes extérieures, les unes nécessaires et dans l’essence de toute Révolution analogue, les autres purement capricieuses et accidentelles, pour arriver à des conséquences logiques et pour conclure politiquement de la situation anglaise en 1688 à la situation française en 1830, on se méprendrait fort ; on embrouillerait le point de vue actuel, qui est d’une clarté admirable ; et comme cette confusion et cette méprise sont assez ordinaires depuis quelques jours, nous croyons utile de prémunir là-dessus certains esprits amoureux de ressemblances.

898. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre VI. De l’envie et de la vengeance. »

Sans doute, ce serait un héroïque oubli, mais il est tellement nécessaire que, même en jugeant son étonnante difficulté, on a besoin de l’espérer encore.

899. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Pour encourager les riches. » pp. 168-175

Quand je dis « nous »… Mais, comme dit Figaro, il n’est pas nécessaire de tenir les choses pour en raisonner… « Malheureux les riches !

900. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Merrill, Stuart (1863-1915) »

Sans doute, est-il, là-bas, des tâches nécessaires — révolte, gestes de justice — qu’il ne faut point délaisser : Ô mon Dieu, je m’agenouille au coin du feu ; Et j’ose vous demander où est mon vrai devoir : Est-ce dans la joie de votre création, ô Dieu, Ou là-bas dans la ville où le soleil est noir ?

901. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Retté, Adolphe (1863-1930) »

Il n’y est rien qui ne soit d’une nécessaire éloquence.

902. (1911) La valeur de la science « Deuxième partie : Les sciences physiques — Chapitre VII. L’Histoire de la Physique mathématique. »

L’hypothèse des forces centrales contenait tous les principes ; elle les entraînait comme des conséquences nécessaires ; elle entraînait et la conservation de l’énergie, et celle des masses, et l’égalité de l’action et de la réaction, et la loi de moindre action, qui apparaissaient, il est vrai, non comme des vérités expérimentales, mais comme des théorèmes ; et dont l’énoncé avait en même temps je ne sais quoi de plus précis et de moins général que sous leur forme actuelle.

903. (1887) Discours et conférences « Discours à l’Association des étudiants »

Ne croyons jamais être nécessaires à la partie ; il suffit qu’à un jour donné nous puissions lui être utiles.

904. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. James Mill — Chapitre II : Termes abstraits »

C’est là ce que nous appelons l’idée d’une étendue infinie, et que quelques-uns appellent idée nécessaire ; ce qui signifie simplement que l’idée d’une portion en plus s’éveille nécessairement, c’est-à-dire par association indissoluble, et que nous ne pouvons l’empêcher.

905. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XII » pp. 100-108

Pour bien saisir cette opposition d’esprit et de mœurs, il est nécessaire de se faire une idée juste des trois partis opposés, à commencer par celui de la cour et de la Fronde qui servirent de modèle à la multitude ; viendra ensuite l’étude de la société d’élite ; et enfin celle des précieuses.

906. (1818) Essai sur les institutions sociales « Préface » pp. 5-12

La liberté nécessaire au gouvernement est exprimée, je l’avoue, d’une manière trop absolue, et M. 

907. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Le voltairianisme contemporain »

Il a été discuté par d’autres avec une impartialité trop sereine pour qu’il soit nécessaire d’y revenir.

908. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Préface » pp. -

Pour les égaler désormais, il sera nécessaire de les surpasser.

909. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « Introduction »

Cochin, à qui je ne crains pas de m’associer en cette occasion — de s’inspirer dans les questions religieuses du principe supérieur de la tolérance… Je dis que sur ce point vous pouvez compter à la fois et sur la vigilance du gouvernement pour maintenir les droits de l’État, et sur l’esprit nouveau qui l’anime (Applaudissements répétés au centre et à droite)… Cet esprit nouveau, c’est l’esprit qui tend, dans une société aussi profondément troublée que celle-ci, à ramener tous les Français autour des idées de bon sens, de justice et de charité qui sont nécessaires à toute société qui veut vivre… » (Vifs applaudissements sur les mêmes bancs.

910. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXII. Des éloges des hommes illustres du dix-septième siècle, par Charles Perrault. »

Il est nécessaire, sans doute, et l’ordre de la société, fondé sur la politique et sur les lois, demande que ces distinctions subsistent pendant la vie ; mais des cendres renfermées dans des tombeaux, deviennent égales.

911. (1890) Dramaturges et romanciers

Tous les éléments nécessaires à cette fusion existent, mais elle-même n’est pas accomplie. […] Mille nuances, nécessaires à l’explication des caractères, devront être supprimées. […] Malgré les coupures obligées et les transformations nécessaires, la charmante conception de M.  […] Feuillet, a-t-on imprimé, c’est que pour faire un beau mariage et se pousser dans un certain monde, il est nécessaire de faire d’abord le sacrifice de ses opinions. […] Une réaction était dès lors nécessaire, et on la sentait partout dans l’air à cette époque.

912. (1895) Les confessions littéraires : le vers libre et les poètes. Figaro pp. 101-162

D’abord, ils sont nécessaires qui donc nous lirait ? […] Si donc, sans instruction préalable, ces simples arrivent à donner des sensations poétiques semblables à celles données par ceux qui savent, il est à présumer qu’un réveil poétique se fera et que renaîtra la chanson populaire, laquelle — seul, pour le moment — le Nord conserve… Cela amènera la décentralisation et cela même est nécessaire pour la vie, pour l’art : indispensable. […] Le Symbolisme seul, qu’on affecte assez généralement, aujourd’hui, de dédaigner, pourrait donner à toutes les tendances, à toutes les individualités le jeu nécessaire à leur expression, leur développement, à la seule condition de s’entendre (mais ? […] Si vous perdez la rime, il devient donc nécessaire de forger des rythmes plus « nombreux » et plus originaux. […] Les rapports de la Musique et de la Poésie sont trop évidents pour qu’il nous soit nécessaire d’exposer les raisons qui nous incitèrent à joindre à cette enquête l’avis de l’une de nos premières personnalités musicales.

913. (1912) Pages de critique et de doctrine. Vol I, « I. Notes de rhétorique contemporaine », « II. Notes de critique psychologique »

Barbey d’Aurevilly n’eut pas le loisir nécessaire à cette épopée. […] Par suite, tous les développements de leur nature vous apparaissent comme nécessaires. […] L’extrême sincérité de la notation et l’extrême sérieux de la réflexion lui sont également nécessaires. […] Condamnons la littérature à thèse, genre essentiellement faux ; distinguons-en la littérature à idées, genre légitime, genre nécessaire. […] Ils avaient eu l’horreur de ses excès, sans se rendre compte qu’un lien de conséquence nécessaire unissait 93 et 89.

914. (1905) Propos littéraires. Troisième série

Il n’y a point pour cela imitation scolaire, contrefaçon commerciale ou servitude : cela arrive, mais n’est point nécessaire. […] C’est la main forte et impérieuse de Ronsard et de quelques-uns de ses compagnons qui ont donné au lecteur français cette habitude nécessaire. […] Il l’a bien appliqué là où il était nécessaire, ou, au moins, très opportun. […] À ce point de vue, se demander si elle est bonne ou mauvaise est sans doute nécessaire, et la question de moralité reparaît et se pose. […] Donc « dans l’exercice de l’amour » était nécessaire.

915. (1927) Des romantiques à nous

Dans l’ordre pratique, cet abaissement général de ses perspectives devait avoir pour logique et nécessaire résultat le matérialisme. […] Je ne crois pas davantage que cette brusque augmentation du savoir humain ait eu pour conséquence nécessaire l’éclipsé de l’idée religieuse, prise en ce qu’elle a de général. […] Mais ses partisans eux-mêmes doivent reconnaître que, en pratique, dans l’Etat moderne, cette entière indépendance du pouvoir civil est notamment la garantie la plus nécessaire de la liberté de conscience et de la paix religieuse entre citoyens. […] Avec le soleil de l’idée divine, soleil qui n’entrait d’ailleurs dans cette école que pâli aux verres gris et opaques de Kant, s’en sont allés tous ses rayons, et surtout le plus doux : la poésie, plus nécessaire, en un sens, que la morale elle-même. […] Et il apparut nécessaire, pour la sauver d’un inique naufrage, de la nettoyer de ses impuretés.

916. (1898) XIII Idylles diaboliques pp. 1-243

Il est d’ailleurs nécessaire qu’il agisse de la sorte au lieu d’imiter l’animal. […] Il pense, enfin, que, vu son mérite, l’Indicible lui confiera, à lui seul, les éléments nécessaires à la formation d’un autre monde qui, — je puis vous l’affirmer, — sera remarquable. […] Fais le nécessaire et fais vite, car le temps me presse : tout croule autour de moi — et je me sens si vieux ! […] L’humanité se l’inventa aux jours où, à cause des souffrances nécessaires qu’elle eut à subir pour son développement, — souffrances nées de son désir du mieux, de ses efforts vers le mieux, — elle s’effrayait devant l’énigme du monde. […] On n’y a ajouté que les raccords nécessaires à la clarté du dialogue.

917. (1803) Littérature et critique pp. 133-288

Une main divine, dit-elle, conduit l’homme dans les recherches nécessaires à son existence, et l’abandonne à lui-même dans les études d’une utilité moins immédiate. […] Que de faits semblables s’offrent en lisant l’histoire, et que de conséquences on peut en tirer contre ces progrès nécessaires de l’esprit humain, qui a suspendu sa marche, et qui a même rétrogradé à tant d’époques différentes ! […] L’auteur nous y dit que, pour bien écrire l’histoire, la philosophie n’est point nécessaire. […] Mais peut-être on ne trouvera pas la même justesse dans toutes les observations de M. de Chateaubriand, ou du moins quelques-unes ne seront admises qu’avec des restrictions nécessaires. […] Quelques traits de ce personnage avaient été indiqués dans les prophètes, mais d’une manière assez vague pour que l’auteur moderne, en le peignant, eut toute la liberté nécessaire à l’invention poétique.

918. (1940) Quatre études pp. -154

Empédocle est une force primitive, un hymne vivant à la création, une émanation de l’Être nécessaire et éternel. […] Quarante années d’acclimatation avaient été nécessaires. […] Les passions sont chez les hommes des vents qui sont nécessaires pour mettre tout en mouvement, quoiqu’ils causent souvent des orages40. […] Quoique les vents causent toutes les tempêtes, et tous les malheurs de la mer, ils sont pourtant nécessaires à la navigation. […] « Prédicateurs, qui voulez me ramener à la vertu, dites-moi qu’elle est indispensablement nécessaire, mais ne me déguisez pas qu’elle est sévère et pénible.

919. (1928) Quelques témoignages : hommes et idées. Tome I

Cet antagonisme nécessaire à toute œuvre dramatique vient en dernier. […] Il est nécessaire que l’auteur se soit fait par réflexion, ou par instinct, toute une philosophie à l’occasion de l’histoire qu’il raconte. […] Elle est nécessaire pour comprendre comment procédait le génie de Pasteur. […] C’est la perfection de l’art, et vous ne saisissez l’art nulle part, tant chaque mot est nécessaire d’une nécessité profonde, absolue. […] Une mise au point est donc nécessaire pour celui qui veut interpréter ces documents, pourtant sincères, je le répète, mais pas complètement.

920. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (3e partie) » pp. 5-96

Je ne pus m’empêcher de lui rappeler quelques Allemands haut placés auxquels, dans un âge avancé, n’avaient paru en aucune façon manquer ni l’énergie ni la dextérité que la jeunesse possède, qualités qui leur étaient nécessaires pour diriger des affaires de toute sorte très importantes. […] Et après les supplices que l’on endure, on n’est pas dédommagé par le plaisir que l’on éprouverait à voir la nature humaine et les caractères humains représentés avec exactitude ; il n’y a dans son livre ni nature ni vérité ; ses personnages principaux ne sont pas des êtres de chair et de sang, ce sont de misérables marionnettes, qu’il manie à son caprice, et auxquelles il fait faire toutes les contorsions et toutes les grimaces qui sont nécessaires aux effets qu’il veut produire. […] En conséquence, il ne se demande pas si tel livre de la Bible peut jeter de la lumière dans l’esprit, s’il renferme de hautes leçons de moralité, s’il offre des exemples d’une noble existence : l’important pour lui, c’est dans les livres de Moïse l’histoire de la chute, qui rend nécessaire le Sauveur ; dans les prophètes, les allusions qui sont faites au Désiré ; dans les évangiles, le récit de son apparition sur cette terre, et de sa mort sur la croix, qui expie nos péchés. […] » Il croit que la sagesse des opinions s’épure, en montant par le loisir, l’étude, l’aisance, la philosophie, de classe en classe sociale, et que la division du travail est aussi nécessaire dans l’œuvre du gouvernement libre que dans les œuvres manuelles de l’artisan ; il pardonne donc une aristocratie intellectuelle dont il est lui-même le premier exemple, et il recommande à ses disciples d’en tenir compte.

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