Pour qu’il ne soit pas dit que je ne cherche chez lui que les leçons aux grands et aux puissants, dans ce même Sermon sur l’honneur, où il énumère et poursuit les différentes sortes de vanités, il n’oublie pas les hommes de lettres, les poètes, ceux aussi qui, à leur manière, se disputent le renom et l’empire : Ceux-là pensent être les plus raisonnables qui sont vains des dons de l’intelligence, les savants, les gens de littérature, les beaux esprits. […] Il lui fallait la chute et la restauration des trônes, la révolution des empires, toutes les fortunes diverses assemblées en une seule vie et pesant sur une même tête : il fallait à l’aigle la vaste profondeur des cieux, et en bas tous les abîmes et les orages de l’Océan.
Il avait l’idée d’abord de pousser jusqu’en Orient et de voir l’empire des Turcs, « non par superstition », dit-il, comme la plupart de ceux qui y vont seulement pour visiter Jérusalem, mais pour s’instruire en ces années actives d’apprentissage et pour considérer la diversité des pays et des peuples. […] Il montre quel a été le bonheur de Henri IV, jusque dans ses traverses, puisqu’il en était si valeureusement sorti : Depuis son avènement au royaume (1589), il a employé huit années à le remettre à son obéissance ; lesquelles, quoique pénibles, ont été les plus heureuses de sa vie : car, augmentant sa réputation, il augmentait son État : le vrai heur d’un prince magnanime ne consiste pas à posséder longuement un grand empire qui ne lui serve qu’à se plonger dans les voluptés, mais bien à d’un petit en faire un grand, et à contenter, non son corps, mais son courage.
La camarera-mayor, la duchesse de Terranova, en allant au-devant de la reine, et en la recevant à la frontière, s’appliqua à l’instant même à établir son empire, à assiéger ce jeune esprit d’inquiétudes, à le remplir de préventions, et à multiplier autour de la personne royale les barrières de l’étiquette, pour que rien d’étranger ni de contraire à ses desseins n’y pénétrât. […] Sous l’empire de cette fantaisie lugubre, l’arrière-petit-fils de Charles-Quint, comme s’il eût voulu remonter tout le cours de sa race, se fit ouvrir les cercueils : celui de la reine sa mère qui fut ouvert le premier ne fit pas sur lui grande impression ; mais quand ce fut le tour de sa première femme, de cette jeune reine qu’il avait tant aimée, quand il revit ce visage altéré à peine et sa beauté encore reconnaissable à travers la mort, le coeur lui faillit, il recula en disant : « J’irai la rejoindre bientôt dans le Ciel. » — Et cette image suprême ne dut pas être étrangère à sa pensée, quand, peu après, lui le haïsseur des Français, il fit son testament en faveur de la France.
Il s’est donc attaché à notre grand tragique, et il s’est complu à démontrer en lui une âme et une intelligence essentiellement historique, pleine de prévisions et de divinations : non qu’il ait jamais supposé que le vieux poète, en s’attaquant successivement aux divers points de l’histoire romaine pendant une si longue série de siècles, depuis Horace et la fondation de la République jusqu’à l’Empire d’Orient et aux invasions d’Attila, ait eu l’idée préconçue d’écrire un cours régulier d’histoire ; mais le critique était dans son droit et dans le vrai en faisant remarquer toutefois le singulier enchaînement qu’offre en ce sens l’œuvre dramatique de Corneille, et en relevant dans chacune de ses pièces historiques, même dans celles qu’on relit le moins et qu’on est dans l’habitude de dédaigner le plus, des passages étonnants, des pensées et des tirades dignes d’un esprit politique, véritablement romain. […] Ce lutin dont parlait Molière, lorsqu’il voulait expliquer les inégalités de verve de Corneille, et duquel il disait encore plus poétiquement que plaisamment, qu’il venait, au moment où le pauvre grand homme était dans l’embarras, lui souffler à l’oreille quelques-uns de ses plus beaux vers et de ses plus belles scènes, pour disparaître la minute d’après, — ce lutin n’était autre, en bien des cas, que le Génie même de la République et de l’Empire, ce puissant fantôme évoqué sans cesse, et que les Brutus et les César avaient vu apparaître plus d’une fois dans leurs veilles ou dans leurs songes.
On a remarqué que les oraisons funèbres prononcées en France sur cette princesse, sans excepter celle de l’abbé de Boismont, ont été au-dessous du médiocre ; mais la grande et véritable oraison funèbre, la haute portraiture héroïque, c’est Frédéric qui l’a tracée, lorsque, dans son Histoire de la guerre de Sept Ans, il a représenté cette jeune souveraine, au lendemain de la perte de la Silésie, outrée et cherchant à se venger, s’appliquant à relever les forces et l’ascendant de son empire. […] L’empereur son époux, qui n’osait se mêler des affaires du gouvernement, se jeta dans celles du négoce… » Suivent quelques détails piquants et caustiques sur François Ier, cet époux tant adoré d’elle et si subordonné, qui, lui laissant tout l’honneur et toute la gloire de l’empire, s’était fait l’intendant, le fermier général, le banquier de la Cour, homme de négoce jusqu’à fournir au besoin en temps de guerre le fourrage et la farine aux ennemis eux-mêmes pour en tirer de l’argent ; puis reprenant le ton grave et sévère, Frédéric continue : « L’impératrice avait senti dans les guerres précédentes la nécessité de mieux discipliner son armée ; elle choisit des généraux laborieux, et capables d’introduire la discipline dans ses troupes ; de vieux officiers, peu propres aux emplois qu’ils occupaient, furent renvoyés avec ces pensions, et remplacés par de jeunes gens de condition pleins d’ardeur et d’amour pour le métier de la guerre.
Quelle fut sa part précise dans la politique extérieure du Consulat et des premières années de l’Empire ? […] — À quoi on peut répondre : Les plus avisés se trompent quelquefois ; Talleyrand put avoir ce jour-là un excès de zèle ; les Bourbons étaient bien loin en 1804, et Talleyrand était homme, à ce moment, à parier tout à fait et à risquer son va-tout du côté de l’Empire.
Il était parti du principe d’invention et du principe d’imitation ; l’hérédité ou reproduction des êtres sous l’empire des semblables, l’innéité ou reproduction des êtres sous l’empire des divers.
Ce que Lycurgue avait produit par ses lois en faveur de l’esprit républicain, la monarchie française l’avait opéré par l’empire de ses préjugés en faveur de la vanité des rangs. […] Quoique la littérature doive s’affranchir dans la république, beaucoup plus facilement que dans la monarchie, de l’empire du ton reçu dans la société, il est impossible que les modèles de la plupart des ouvrages d’imagination ne soient pas pris dans les exemples qui s’offrent habituellement aux regards.
Exceptons pourtant quelques coups de pinceau de Descartes dans ce petit Traité des passions (1649), où il fait voir ce qui se passe au fond de l’homme, considéré comme corps, quand il est sous l’empire des passions. […] S’agit-il de montrer ce qu’il en coûte à l’âme pour avoir cédé l’empire aux sens, il égale, par la force et la sévérité de ses tableaux, les grands moralistes du dix-septième siècle.
L’Empire, à qui elle avait confié ses destins, vacille. […] Les symbolistes avaient hérité de la génération d’écrivains du second Empire, le désintéressement de la chose publique.
Le Moyen Âge se faisait un Empire avec de vieux et très inexacts souvenirs. […] Le divin Sphérus d’Empédocle, où tout existe d’abord à l’état syncrétique sous l’empire de la [en grec], avant de passer sous celui de la Discorde, [en grec] (analyse), offre une belle image de cette grande loi de l’évolution divine.
Chapitre II : Philosophie politique de Tocqueville Lorsque M. de Tocqueville aborda la science politique, un très-grand nombre d’écoles ou plutôt de partis contraires et hostiles se partageaient, comme nous venons de le voir, l’empire des esprits. […] « Il ne restait plus qu’à choisir, disait-il, entre des maux inévitables ; la question n’était pas de savoir si l’on pouvait obtenir l’aristocratie ouladémocratie, mais si l’on aurait une société démocratique sans poésie et sans grandeur, mais avec ordre et moralité, ou une société démocratique désordonnée et dépravée, livrée à des fureurs frénétiques ou courbée sous un joug plus lourd que tous ceux qui ont pesé sur les hommes depuis la chute de l’empire romain. » Au reste, M. de Tocqueville, quand il propose et indique les remèdes qui lui paraissent nécessaires, se contente des indications les plus générales et n’entre pas dans les détails particuliers.
Quand cela serait, sa vérité ne lui aurait point donné l’empire. La moindre étude de l’histoire prouve que l’empire ne s’acquiert point ainsi.
Corneille avait trouvé dans un historien, Dion Cassius, qu’Auguste avait consulté un jour Agrippa et Mécène sur ce qu’il devait faire : rétablir l’ancien gouvernement républicain, ou organiser définitivement l’empire ?
Chateaubriand, Lamartine, Victor Hugo, la France même du second Empire, toute la France d’avant 1870 leur eût crié : « Courage !
Près d’elle Jupiter a placé cette Balance dans laquelle il pese la Nature, & qui tempérant les feux du soleil, alonge les nuits, & rend leur empire égal à celui du jour ».
Je ne parle pas de celle qui dit son rosaire, qui fait de sa cour un couvent, et qui n’est pourtant pas une petite femme ; mais de celle qui donne des lois à son pays qui n’en avait point ; qui appelle autour d’elle les sciences et les arts, qui fonde les établissemens les plus utiles, qui a su se faire considérer dans toutes les cours de l’Europe, contenir les unes, dominer les autres, qui finira par amener le polonais fanatique à la tolérance ; qui aurait pu ouvrir la porte de son empire à cinquante mille polonais, et qui a mieux aimé avoir cinquante mille sujets en Pologne ; car vous le savez tout aussi bien que moi, mon ami, ces dissidens persécutés deviendront persécuteurs, lorsqu’ils seront les plus forts, et n’en seront pas moins alors protégés par les russes.
La même raison qui doit obliger les poëtes à ne pas laisser prendre à l’amour un trop grand empire sur leurs heros, doit les engager aussi à choisir leurs heros dans des tems éloignez d’une certaine distance du nôtre.
Le plaisir actuel qui domine les hommes avec tant d’empire qu’il leur fait oublier les maux passez et qu’il leur cache les maux à venir, peut bien nous faire oublier les fautes d’un poëme qui nous ont choquez davantage, dès qu’elles ne sont plus sous nos yeux.
Toutes les perceptions un peu rémunératrices de France sont occupées par des individus qui les ont méritées en fulminant au café, sous l’Empire, contre les articles 291 et suivants.
Là étaient rassemblés, de toutes les parties d’un empire vaste, libre, éclairé et prospère, la grâce et l’amabilité féminines, l’esprit et la science, les représentants de toute science et de tout art. […] Là, l’historien de l’empire romain pensait aux jours où Cicéron plaidait la cause de la Sicile contre Verrès, où, devant un sénat qui retenait encore quelque apparence de liberté, Tacite tonnait contre l’oppresseur de l’Afrique. […] The burning sun, the strange vegetation of the palm and cocoa-tree, the rice-field, the tank, the huge trees, older than the Mogul empire, under which the village crowds assemble, the thatched roof of the peasant’s hut, the rich tracery of the mosque where the imaun prays with his face to the Mecca, the drums and banners and gaudy idols, the devotee swinging in the air, the graceful maiden, with the pitcher on her head, descending the steps to the river-side, the black faces, the long beards, the yellow streaks of sect, the turbans and the flowing robes, the spears and the silver maces, the elephants with their canopies of state, the gorgeous palanquin of the prince, and the close litter of the noble lady, all those things were to him as the objects amidst which his own life had been placed, as the objects which lay on the road between Beaconsfield and Saint-James street. […] There were gathered together from all parts of a great, free, enlightened and prosperous empire, grace and female loveliness, wit and learning, the representation of every science and of every art. […] There the historian of the Roman empire thought of the days when Cicero pleaded the cause of Sicily against Verres, and when, before a senate which still retained some show of freedom, Tacitus thundered against the oppressor of Africa.
est-il un enfant du règne ou de l’Empire ? […] Il est le fils de la Révolution ; il est un enfant révolté de l’Empire ! […] Volontiers il ôterait à l’Empire et volontiers il ôte au roi de Juillet les gloires qui leur reviennent. […] La mort de cette femme complète bien des pertes qu’a déjà faites l’empire vermoulu de Napoléon Bonaparte. […] Ce long intervalle entre la Restauration et l’Empire, M.
La Méditerranée et la Grèce sont l’empire de la liberté et du mouvement, comme le haut plateau du monde indochinois est l’empire de l’immobilité et du despotisme23. […] Au lieu de cela, Constantinople a disputé, ergoté, subtilisé, et elle a succombé ; elle a eu le sort qu’elle méritait : elle n’était plus digne de l’empire, et l’empire lui a été enlevé. […] Elle enseigne encore que les empires comme les individus n’ont d’importance que par leur rapport au service de Dieu, c’est-à-dire au christianisme. […] Les actes les plus vulgaires comme les plus élevés s’accomplissent sous le regard et sous l’empire de la loi. […] Il a paru un moment avec la convention ; il a disparu à jamais avec l’empire.
Zola, je relèverai dans son livre une idée qui me paraît au moins discutable : l’auteur nous montre l’Empire vieilli, acclamé encore au plébiscite, mais « ayant affaibli l’idée de patrie, en détruisant la liberté ». […] » écrits sur nos murs, disent assez que ce n’est pas à l’Empire qu’il faut faire remonter ce blasphème qui serait un acte de folie chez des vainqueurs et qui peut prendre un autre nom dans la bouche des vaincus. […] mettre sous le nez d’un maréchal d’Empire des cochonneries ! […] Les défenseurs de l’empire, comme ses adversaires, se sont accordés à reconnaître que sa mort fut une perte irréparable pour, ce régime. […] Rien de plus juste ne pouvait être dit sur celui qui fut, sinon le fondateur du second Empire, du moins l’organisateur extraordinaire de son avènement.
Weiss, avait signalé, dès 1860, l’avènement du positivisme intellectuel dans la littérature du second Empire. […] Cette illusion s’exalta encore sous le second Empire. […] De même l’Éducation sentimentale, de Gustave Flaubert, suppose la révolution de 48 et le second Empire à ses débuts. […] Comment n’a-t-il pas entendu ce fondateur de l’Empire, si brutalement congédié, lui dire : « Qu’as-tu fait de mon œuvre ? […] Si je meurs, j’irai plus vite au ciel. » Chez l’un et chez l’autre, c’est la même certitude que le psychisme humain n’est pas dans la nature comme un empire dans un empire, que l’esprit procède de l’esprit, la pensée de la pensée, l’amour de l’amour.
L’Autriche, victorieuse des insurrections nationales qui Font mise aux prises avec les éléments disparates dont se compose son vaste empire, semble se rasseoir. […] Après le coup d’État du 2 décembre, chacun comprit qu’on était sur la pente d’un nouvel empire. […] « L’Empire était fait », comme l’avait dit un jour M. […] Lisez à part une page de l’histoire de la Révolution et de l’Empire ; vous n’y comprendrez rien si vous ne connaissez toute l’histoire antérieure de la Révolution et de l’Empire, et pour comprendre la Révolution ou l’Empire, encore vous faut-il connaître toute l’histoire de l’humanité. […] Le portrait de ce misérable, qui, après avoir été montagnard, est devenu courtisan et sénateur du premier empire, est d’une hideuse ressemblance.
histoire du consulat et de l’empire, par m. thiers. — le lutrin de boileau cité par schlegel. — découverte historique de m. monmerqué. — une longue suite de rois illégitimes en france. — le petit roi jean ier. — scepticisme historique. — badauds comme des byzantins. — propos de table de luther. — poetæ minores.
Il était érudit, studieux avec friandise, intimement versé dans Horace, dont il donnait d’agréables et familières traductions, sachant tant soit peu le grec, et par conséquent beaucoup mieux que les gens de lettres ne le savaient de son temps : car de son temps les gens de lettres ne le savaient pas du tout, et, quelques années plus tard, la génération littéraire suivante, dite littérature de l’Empire, et dont était M. de Jouy, sut à peine le latin.
Jay n’a nullement reculé devant la tâche obligatoire : il a pris M. de Montesquiou depuis son entrée sur la scène politique jusqu’à sa mort ; il a encadré, entre l’apparition et le décès de M. de Montesquiou, toute notre révolution, se rejetant, quand la vie du héros faisait faute, sur Castor et Pollux, sur la Convention et sur l’Empire, lançant son petit trait au passage contre les passions sinistres et contre la manie des conquêtes, manie qui n’est guère contagieuse apparemment.
Mais trop pressé déjà par le temps, trop appelé et tenté par la politique et par ses passions dévorantes, il se hâta de dresser le monument de son souvenir ; il fit ses personnages un peu roides ; il les drapa : au lieu de donner le ton cette fois, il semble avoir suivi lui-même le goût des peintres de l’Empire.
Édouard Fournier Tandis qu’il multipliait au grand jour, en s’en faisant gloire, les éditions de ses Messéniennes, si peu lisibles aujourd’hui, avec leur versification de l’Empire, où la phraséologie du rhéteur parle plus haut que le cœur du patriote, il cachait obscurément dans un recueil son admirable ballade l’Âme du Purgatoire ; dans le coin d’une note, sa romance de la Brigantine où Mme Pauline Duchambge la découvrit pour la mettre en musique ; et je ne sais où, son adorable pièce de Néra, que Scudo ramassait de même pour y appliquer une de ses plus pures mélodies.
Antérieures à Zeus lui-même, qu’elles dominaient par leur parenté avec le Destin, les Érynnies régnaient absolument dans leur sombre empire.
Puis, les moins perspicaces avaient fini par s’apercevoir du ridicule de cette soi-disant « Histoire Naturelle et Sociale d’une famille sous le Second Empire », de la fragilité du fil héréditaire, de l’enfantillage du fameux arbre généalogique, de l’ignorance médicale et scientifique profonde du Maître.
Zola, retenu dans le second empire, est une façon de Walter Scott. […] Sous l’Empire, il jugeait Napoléon III avec la sévérité d’un voisin à qui rien n’échappe. […] Et quels bienfaits la raison ne répandra-t-elle pas sur les hommes soumis à son tout-puissant empire ? […] Il est vrai que beaucoup d’officiers de l’Empire étaient rentrés dans les cadres. […] Il fréquentait, sous l’empire, le salon de madame d’Agoult, centre de l’opposition républicaine.
Plus tard, Zola intitulera une suite de récits : Histoire naturelle et sociale d’une famille sous le second Empire. […] Grasset se trouve, au cours de cette défense de sa province, avoir comme dressé une carte de l’empire scientifique. […] En voulant devenir une nation, les Français ont renoncé à être un empire. […] Il prêta seraient à l’Empire. […] L’Allemagne a de même comme sentiment dominateur la grandeur de l’empire allemand, la Russie la grandeur de la sainte Russie.
Si son sujet l’amène à méditer sur le néant des choses humaines, sur la mort, sur les révolutions des empires, sur la force de l’Eglise écrasant les hérésies, les images, les expressions fortes abondent sous sa plume. […] La partie la plus populaire de ce discours est la troisième, qui traite de la suite des empires. […] Ce magnifique tableau des grands empires qui ont rempli le passé, et qui ont eu tour à tour le gouvernement du monde, sans pouvoir en soutenir longtemps la gloire, ne rencontre ni indifférents ni incrédules. […] Aux remarques qu’il fait sur la nécessité de la fixer, de réprimer les bizarreries de l’usage et de tempérer « les dérèglements de cet empire trop populaire », on sent qu’il a dû se rendre le témoignage d’avoir bien mérité d’elle123. […] Ainsi, la lutte des protestants contre Rome lui cache la lutte de l’Allemagne contre l’Empire, et le sentiment de nationalité qui intéressait le sol lui-même à la victoire du protestantisme.
Leur conclusion fut que, comme ils voyaient que le prince aîné ne pouvait pas vouloir du bien aux grands, que c’était à eux une imprudence de lui en faire, particulièrement un bien de cette nature, qui le mettait en pouvoir de leur faire tout le mal qu’il lui plairait ; et dans cette conjoncture, le parti le plus assuré était de faire tomber leur élection sur le puîné, Hamzeh-Mirza ; que ce jeune prince promettait beaucoup et donnait pour l’avenir de grandes espérances pour la grandeur de l’empire des Perses, et pour le présent il leur donnait sujet à tous de s’attendre à un doux repos, puisque, étant incapable des affaires, il leur en laisserait le maniement un fort long temps, qui ne pouvait être moindre que de douze ou quinze ans. […] » Surtout le reproche d’empoisonnement les mettait à la gêne ; car, bien que peut-être ils en fussent innocents, le soupçon en était si plausible, que cette accusation, toute fausse qu’elle était à leur égard, ne leur présentait pas une image de mort moins horrible que si elle eût été véritable, lorsque le prince qui succéderait à l’empire voudrait l’appuyer ; qu’au contraire, si l’on élisait le puîné, ils se maintiendraient sans peine dans le poste glorieux que leurs charges leur donnaient ; qu’ils auraient le loisir d’élever leurs familles et de faire des créatures ; qu’ils gouverneraient avec un pouvoir presque absolu, sous un enfant, un des plus grands empires de l’univers. […] Si cet eunuque qui fut envoyé en poste, il n’y a pas longtemps, à Ispahan, eût eu des ordres secrets contre Sefie-Mirza, dans le dessein de le rendre incapable de succéder à l’empire, n’en aurais-je rien découvert ; et le feu roi n’eût-il pas changé quelque chose à la condition de son second fils, qu’il eût désigné en ce cas-là pour monter sur le trône après lui ? […] Enfin, le premier ministre, soit qu’il fût plus ami de l’équité que les autres, comme cette manière d’agir noble et désintéressée qu’il avait toujours fait paraître auparavant le donnait à conjecturer, soit qu’il craignît qu’à son défaut quelque autre prît la parole, ce qui l’eût rendu criminel, puisqu’il lui appartenait de parler le premier, et qu’il le venait de faire lorsqu’il avait opiné si fort au désavantage de Sefie-Mirza ; ce premier ministre, dis-je, rompit le silence et commença à dire: « que véritablement, sur l’assurance infaillible que l’on aurait que le fils aîné d’Abas II ne serait plus en état de recevoir la couronne, l’assemblée pourrait, sans injustice, passer à l’élection du second fils ; mais, puisque maintenant Aga-Mubarik les assurait fortement que Sefie-Mirza n’avait perdu ni la vie, ni la vue, sans délibérer davantage, il le fallait élire: c’est pourquoi il lui donnait de tout son cœur sa voix et ses vœux, et protestait qu’il fallait tout de ce pas lui aller présenter le diadème et l’empire. » Les autres seigneurs, à ces paroles, perdirent courage, et n’eurent plus la force de soutenir bien ce qu’ils avaient commencé mal.
Les Romantiques sont venus, au matin de ce siècle, comme des fils enfiévrés et tumultueux de la Révolution et de l’Empire. […] Or, un tel empire moral, s’il a illustré la race, plus que la gloire des armes, n’a pas manqué de peser lourdement sur la pensée française. […] Résultat d’une crise sociale et d’un bouleversement historique, il eût dû bientôt disparaître, mais lorsque des idées sont nourries du riche sang du génie, lorsque des principes se trouvent mis en œuvre par des hommes de cette taille, les intelligences éprouvent de longues souffrances pour s’affranchir de leur empire. […] L’époque du second Empire a, fort à propos, fourni au romancier un cadre naturel, logique et approprié ; et c’est dans l’intervalle qui s’écoule entre le coup d’État et Sedan que nous assistons à cette odyssée moderne d’une famille démocratique, qui croît, se multiplie, se développe au milieu des rouages complexes et tumultueux de la société contemporaine. […] Oui, vous êtes la fleur insolente et abominable de cette Bourgeoisie qui, au travers des empires, des monarchies et des républiques, mène le peuple avec des mots quand, ignorant et aveugle, il est sage, avec du plomb quand, instruit et clairvoyant, il bouge ; cette Bourgeoisie qui a assassiné les princesses légitimes, Liberté, Fraternité, Justice, pour mettre à leur place et saluer de leurs noms sacrés on ne sait plus quelles immondes courtisanes, vieilles et fardées… oui, nous la démasquons en vous, cette Bourgeoisie exécrée, et elle s’offre ainsi à nos yeux avec une de ses caractéristiques les plus importantes, sa volonté d’ignorer la souffrance humaine hors de ses accidents particuliers, et ses pratiques égoïstes de charité individuelle inspirées par la crainte de la révolution ou de l’enfer, par le désir du paradis ou d’un siège à la Chambre, de popularité ou de gloire, par besoin d’excuse pour certaines faiblesses devant sa propre conscience ; elle s’offre à nous avec sa terreur de la justice absolue, de l’égalité absolue, proclamées il y a dix-huit cents ans par le Christ, il y a plus de cent ans par la France, et aujourd’hui dans le monde entier par tout ce qui a un cerveau et un cœur, justice et égalité qui ne seront d’ailleurs une loi sociale universellement acceptée que le jour où, les frontières disparues, les possédants n’auront plus l’excuse de la Patrie à défendre pour entretenir des armées qui ruinent les peuples et qui, aux jours où ils se lèvent pour sauvegarder leurs libertés menacées, les massacrent.
Puisque jadis, en des temps étrangement confus, l’Église avait triomphé de cette espèce d’éruption de l’instinct et de cette révolte de la nature, qui fut sans doute l’un des caractères essentiels de la Renaissance, et qu’elle avait même arraché l’empire de l’art au paganisme du xve siècle ; — puisque, cent cinquante ou deux cents ans plus tard, elle avait pu contrebalancer la redoutable influence du cartésianisme en l’absorbant, et même en s’en aidant pour développer ce qu’il y a de substance rationnelle dans son propre enseignement ; — et puisque, enfin, au début du siècle où nous sommes, elle n’avait pas refusé de traiter avec la Révolution, et qu’elle l’avait pu, sans rien abandonner de ses droits ni surtout céder de son dogme ; — pourquoi, dans un temps comme le nôtre, s’il y a dans sa tradition quelque vertu sociale, et qu’aucune considération de l’ordre temporel n’en gêne plus le libre développement, pourquoi n’essaierait-elle pas de se présenter aux peuples sous ce nouvel aspect d’elle-même, et pourquoi n’y réussirait-elle pas ? […] Ainsi fut accepté en France le premier Empire au lendemain d’une effroyable et sanglante anarchie ; ainsi furent acceptés les autres pouvoirs, soit monarchiques, soit républicains, qui se succédèrent jusqu’à nos jours. […] Nous n’en formerions pas moins, dans l’univers, en dépit de Spinoza, comme un « empire dans un empire. » Et ce nouveau déterminisme, ce déterminisme moral, étant la condition de l’humanité, n’aurait rien de commun avec celui qui « conditionne » les phénomènes des sciences physiques et naturelles. […] Nous, qui le croyons d’une certitude absolue, comment donc serions-nous étonnés ou choqués de ces paroles de l’encyclique Humanum Genus : « La nature humaine ayant été viciée par le péché originel, et, à cause de cela, étant devenue beaucoup plus disposée au vice qu’à la vertu, l’honnêteté est impossible si l’on ne réprime pas les mouvements tumultueux de l’âme et qu’on ne place pas les appétits sous l’empire de la raison… Mais les naturalistes nient que le père du genre humain ait péché, et par conséquent que les forces du libre arbitre soient en aucune façon débilitées ou inclinées vers le mal.
Gibbon y était venu d’Angleterre pour être plus libre dans ses jugements sur les religions et sur la société ; il y avait écrit, pendant une séance de dix ans, la grande histoire de la décomposition et de la transformation de l’empire Romain par le christianisme. […] « Je reviens à vous, femmes immolées toutes dans une mère si tendre, immolées toutes par l’attentat qui serait commis sur la faiblesse par l’anéantissement de la pitié ; c’en est fait de votre empire si la férocité règne, c’en est fait de votre destinée si vos pleurs coulent en vain ! […] Elle se trompait encore : Bonaparte haïssait la liberté et la république de toute l’ambition qui l’emportait vers l’empire.
Éloge de Racine Quand Sophocle produisait sur la scène ces chefs-d’oeuvre qui ont survécu aux empires et résisté aux siècles, la Grèce entière assemblée dans Athènes applaudissait à sa gloire ; la voix d’un héraut le proclamait vainqueur dans un immense amphithéâtre qui retentissait d’acclamations ; sa tête était couronnée de lauriers à la vue de cette innombrable multitude ; son nom et son triomphe, déposés dans les annales, se perpétuaient avec les destinées de l’état, et les Phidias et les Praxitèles reproduisaient ses traits sur l’airain et le marbre, de la même main dont ils élevaient les statues des dieux. […] Nul n’a manié avec plus d’empire un idiome souvent rebelle, ni avec plus de dextérité un instrument toujours difficile. […] Mais comment parler de Bérénice , sans admirer encore cette éloquence si touchante et si inépuisable, cette diction si flexible et si mélodieuse, qui exerce tant d’empire sur les coeurs et sur les sens ?
Sous le précédent Empire, il y a près de cinquante ans déjà, lorsque l’Université eut sa fondation et sa renaissance, bien des débris vivaient encore, bien des germes fermentaient qu’il suffisait de rapprocher et de mettre en contact pour qu’il en sortît des productions variées et puissantes. […] À l’époque où le christianisme s’élevait avec les barbares au-dessus de l’empire romain, l’Église était le flambeau de la science, l’espoir de la civilisation.
Beyle eut un mérite rare, incontestable : du sein de la littérature de l’Empire, qui retardait sur les grandes actions et des prodigieux événements contemporains, il sentit qu’une autre littérature devait naître. […] Viollet-le-Duc était un homme d’esprit, exact ; délicat, peu fécond, très-occupé d’ailleurs de fonctions administratives, qui avait précédé tout le monde dès le temps de l’Empire dans le goût des vieux auteurs français antérieurs à Malherbe et de la poésie du xvi siècle : le Catalogue qu’il a dressé de sa bibliothèque, et dans lequel il donne un aperçu de chaque auteur de sa collection, est un livre qui restera.
Quelles furent les causes qui amenèrent un politique si profond, si ambitieux, si habile, émancipé et souverain depuis l’âge de quinze ans, initié dès lors aux plus grandes affaires, qui avait reçu coup sur coup en héritage des royaumes et des mondes, avait brigué et obtenu l’Empire, qui défendait, la Catholicité et aux frontières contre les mécréants, et au cœur contre les hérétiques, qui avec toutes ses couronnes recommençait presque la grandeur et l’universalité de la puissance de Charlemagne (moins, il est vrai, ce quartier du milieu qu’on appelle la France), — quelles raisons, dis-je, quels motifs véritables ramenèrent un jour à renoncer à tout cela en plein démêlé, en plein écheveau d’affaires, à se démettre à l’âge de cinquante-cinq ans, à se confiner dans un cloître, à vouloir y mourir ? […] Il rappela en commençant : « Qu’il y avait quarante ans que dans la même salle, dans le même lieu, et quasi à la même heure, il avait été émancipé du consentement de l’empereur Maximilien, son grand-père ; qu’il n’avait alors que quinze ans ; qu’en 1516 le roi catholique étant mort, il fut obligé de passer en Espagne l’année suivante ; qu’en 1519 il perdit l’empereur, son aïeul ; qu’alors il sollicita l’élection à l’Empire, non par ambition d’avoir plus de seigneuries, mais pour le bien de plusieurs de ses royaumes et pays, et principalement de ceux de par deçà ; que, depuis, il avait fait neuf voyages en Allemagne, six en Espagne, sept en Italie, dix aux Pays-Bas, quatre en France, deux en Angleterre, et deux en Afrique, sans compter ses visites en ses autres royaumes, pays et îles, lesquelles avaient été nombreuses, et son passage par la France en 1539, qui n’était pas la moindre de ses entreprises ; qu’il avait, dans ces divers voyages, traversé huit fois la Méditerranée et trois fois l’Océan… » Quarante années d’un semblable règne, de telles fatigues pour pourvoir à tout instant et subvenir à tant de royaumes et d’États disjoints, une santé détruite et dont le délabrement dans sa personne était visible à tous, justifiaient suffisamment une pensée de retraite depuis longtemps conçue, mais qu’il avait fallu ajourner jusqu’à ce que son fils eût atteint l’âge d’homme.
L’historien du Consulat et de l’Empire a tracé lui-même un tableau qui est dans toutes les mémoires. […] La lutte notamment entre l’Université et les établissements d’éducation ecclésiastique était flagrante dès la fin de l’Empire, et M.
En voici les dernières stances : Le Sommeil, aise de t’avoir, Empêche tes yeux de me voir, Et te retient dans son empire Avec si peu de liberté. […] Il flotte de Malherbe à Ronsard, il les associe, les confond l’un et l’autre dans ses hommages, tout en s’en éloignant ; il s’essaye en divers sens au gré de son humeur, de son inconstance ; sa théorie, si l’on peut employer un tel mot avec lui, est toute personnelle, tout individuelle : La règle me déplaît, j’écris confusément ; Jamais un bon esprit ne fait rien qu’aisément… J’approuve qu’un chacun suive en tout la nature ; Son empire est plaisant et sa loi n’est pas dure… Il développe encore cette idée avec une singulière vivacité dans l’épître à M.
Il y a en effet dans la vie et dans la pensée de Mme de Souza quelque chose de plus important que d’avoir lu Jean-Jacques ou La Bruyère, que d’avoir vu la Révolution française, que d’avoir émigré et souffert, et assisté aux pompes de l’Empire, c’est d’avoir été élevée au couvent. […] C’est le cri du cœur de bien des mères sous l’Empire, que Mme de Souza, par un retour sur elle-même et sur son fils, n’a pu s’empêcher d’exhaler.
L’empire, qui l’a jeté hors de France, lui fournit la matière des Châtiments (1853) : explosion puissante de satire lyrique. […] Il n’y a pas là de critique méthodique du programme politique et social de l’empire : et c’est tant mieux.
Né en 1799, il avait quinze ans à la chute de l’Empire ; il a donc connu et senti l’époque impériale avec cette clairvoyance et cette pénétration de coup d’œil particulière à l’enfance, et que la réflexion achèvera ensuite, mais dont rien n’égalera la jeune lucidité. […] Qui mieux que lui, par exemple, a peint les vieux et les belles de l’Empire ?
En racontant l’histoire de ce souverain habile et brave, qui « à la fortune médiocre d’un électeur sut unir le cœur et les mérites d’un grand roi », en nous parlant de ce prince « l’honneur et la gloire de sa maison, le défenseur et le restaurateur de la patrie », plus grand que son cadre, et de qui date sa postérité, on sent que Frédéric a trouvé son idéal et son modèle : ce que le Grand Électeur a été comme simple prince et membre de l’Empire, lui il le sera comme roi. […] On reconnaît là un ressouvenir de Lucrèce en quelques-uns de ses plus beaux vers : « Usque adeo res humanas vis abdita quaedam… » Napoléon, entreprenant la campagne de 1812, écrivait à l’empereur Alexandre : « J’ai compris que le sort en était jeté, et que cette Providence invisible, dont je reconnais les droits et l’empire, avait décidé de cette affaire comme de tant d’autres. » C’est la même pensée ; mais il y a dans l’expression de Napoléon un éclair de plus, il y a comme un reflet mystérieux rapporté du Thabor, et que la pensée de Frédéric n’a jamais.
Au milieu des jugements divers et contradictoires, plus souvent rigoureux qu’indulgents, qu’a provoqués la littérature de l’ancien Empire, la critique d’alors a toujours été exceptée, et elle a laissé une tradition de haute estime. Tâchons du moins que la critique littéraire, sous le jeune et nouvel Empire, ne paraisse pas trop au-dessous de ce qu’elle était sous l’ancien.
Une seule chose peut l’en empêcher, c’est que la Chine est un Empire, et même un Empire d’un certain despotisme, et que des femmes comme Mme Stern, des femmes de cette virilité fière, doivent à la forte décence de leurs mœurs, de ne parler que des Républiques !
Ce fut lui qui défendit Metz contre Charles-Quint, qui rendit Calais à la France, et combattit avec succès l’Espagne, l’Angleterre et l’Empire. […] En effet, qu’on suppose un orateur doué par la nature de cette magie puissante de la parole, qui a tant d’empire sur les âmes et les remue à son gré ; qu’il paraisse aux yeux de la nation assemblée pour rendre les derniers devoirs à Henri IV ; qu’il ait sous ses yeux le corps de ce malheureux prince ; que peut-être, le poignard, instrument du parricide, soit sur le cercueil et exposé à tous les regards ; que l’orateur alors élève sa voix, pour rappeler aux Français tous les malheurs que depuis cent ans leur ont causés leurs divisions et tous les crimes du fanatisme et de la politique mêlés ensemble ; qu’en commençant par la proscription des Vaudois et les arrêts qui firent consumer dans les flammes vingt-deux villages, et égorger ou brûler des milliers d’hommes, de femmes et d’enfants, il leur rappelle ensuite la conspiration d’Amboise, les batailles de Dreux, de Saint-Denis, de Jarnac, de Montcontour, de Coutras ; la nuit de la Saint-Barthélemi, l’assassinat du prince de Condé, l’assassinat de François de Guise, l’assassinat de Henri de Guise et de son frère, l’assassinat de Henri III ; plus de mille combats ou sièges, où toujours le sang français avait coulé par la main des Français ; le fanatisme et la vengeance faisant périr sur les échafauds ou dans les flammes, ceux qui avaient eu le malheur d’échapper à la guerre ; les meurtres, les empoisonnements, les incendies, les massacres de sang-froid, regardés comme des actions permises ou vertueuses ; les enfants qui n’avaient pas encore vu le jour, arrachés des entrailles palpitantes des mères, pour être écrasés ; qu’il termine enfin cet horrible tableau par l’assassinat de Henri IV, dont le corps sanglant est dans ce moment sous leurs yeux ; qu’alors attestant la religion et l’humanité, il conjure les Français de se réunir, de se regarder comme des concitoyens et des frères ; qu’à la vue de tant de malheurs et de crimes, à la vue de tant de sang versé, il les invite à renoncer à cet esprit de rage, à cette horrible démence qui, pendant un siècle, les a dénaturés, et a fait du peuple le plus doux un peuple de tigres ; que lui-même prononçant un serment à haute voix, il appelle tous les Français pour jurer avec lui sur le corps de Henri IV, sur ses blessures et le reste de son sang, que désormais ils seront unis et oublieront les affreuses querelles qui les divisent ; qu’ensuite, s’adressant à Henri IV même, il fasse, pour ainsi dire, amende honorable à son ombre, au nom de toute la France et de son siècle, et même au nom des siècles suivants, pour cet assassinat, prix si différent de celui que méritaient ses vertus ; qu’il lui annonce les hommages de tous les Français qui naîtront un jour ; qu’en finissant il se prosterne sur sa tombe et la baigne de ses larmes : quelle impression croit-on qu’un pareil discours aurait pu faire sur des milliers d’hommes assemblés, et dans un moment où le spectacle seul du corps de ce prince, sans être aidé de l’éloquence de l’orateur, suffisait pour émouvoir et attendrir ?
À part tout ce que le temps nous a ravi des premiers siècles de Rome, à part cette suite d’orateurs, cette voix publique de Rome, dont le souvenir s’est comme enseveli sous la ruine des Institutions qu’elle avait animées, Lucrèce et Cicéron, l’ami de Memmius et l’immortelle victime d’Antoine, demeurent sur les confins de la république à l’empire, comme ces débris de quelque admirable portique, ces colonnes impérissables qui précèdent et dominent les constructions belles encore, mais plus timides, des siècles suivants. […] Le poëte invoque ce dieu de l’hymen dont le culte et les symboles, conservés jusque dans la ruine du paganisme, devaient effrayer bientôt les mœurs chrétiennes, ou parfois même les altérer de son hardi mélange dans les pompes nuptiales de quelques riches néophytes : tant une licence consacrée d’âge en âge conservait d’empire !
Il n’est pas époux moins tendre, poëte moins gracieux ; et, ce qu’il y a d’immense dans cette puissance anglaise dont il était un des modérateurs, cet, empire absolu sur tant de millions d’hommes aussi opiniâtres dans leurs cultes indigènes que longtemps résignés dans leur obéissance, cette visite pastorale de Calcutta jusqu’à Bombay, parmi les souverainetés détruites, les idoles tolérées dans les temples et les anciens sultans reclus dans leurs palais, tout ce spectacle sans exemple dans le monde donne au pieux et charitable évêque une grandeur singulière. […] Ni la grandeur ni la politique du pouvoir ‘anglais dans l’Inde ne permettaient qu’il y eût un péril de martyre pour l’évêque, dont le zèle curieux parcourut même les contrées les moins soumises encore de ce vaste empire ; mais le sacrifice était dans cet effort même, dans les tristesses et l’activité dévorante de ce zèle trop faible encore pour tant de misères humaines.
C'est pour cela que j’aimais mieux envoyer ma critique parlée en Suisse2. » C'est dans un sentiment analogue qu’il alla un jour écrire à Liége le livre sur Chateaubriand et son groupe littéraire sous l’empire.
On a ainsi dans la fortune et la destinée d’un simple couvent-pensionnat de quoi rêver sur les empires.
Au bruit des succès croissants des coalisés, la Convention proclame en vigueur sur tout l’empire les mesures extraordinaires que le pouvoir militaire applique aux villes en état de siège, et les exagère encore, proportionnant leur portée à une si large étendue.
M. de Persigny qui, il y a neuf ans, présentait à la signature de l’empereur un plan d’inventaire sommaire de toutes les Archives de l’Empire et organisait ce travail qui n’a cessé depuis de se poursuivre et qui vient de produire ses premiers résultats imprimés, a compris où est le point de la difficulté et suggéré un moyen qui peut être d’un utile exemple.
Quant au « poète » sentimental, qui est l’autre face de ce « poète » philosophe, je pense qu’il a déjà rejoint dans l’ingrate mémoire des hommes les faiseurs de romances du premier Empire, et Reboul et Dupaty ; ses tendresses sucrées, sirupeuses, sont vaines en effet, et cet amant eut sans doute toujours la tête chenue.
Saige, archiviste aux Archives de l’Empire, à l’obligeance de qui je dois d’avoir pu y recueillir quelques précieux renseignements.
Racine était courtisan quand Titus, se séparant de Bérénice, retraçait à Louis XIV le courage qu’il avait montré, l’empire qu’il avait eu sur lui-même, en éloignant Marie Mancini, dont il était fort amoureux et qu’il avait en la fantaisie l’épouser ; mais par cet acte de courtisan, il remplissait habilement un devoir de citoyen, et concourait avec Bossuet à dégager le jeune prince des chaînes de madame de Montespan, et à l’armer de sa propre vertu contre une passion désordonnée.
C’est-là ce qui forme son essence ; c’est-là le but qu’elle se propose ; c’est-là ce qui la rend si agréable, si intéressante, & ce qui a de tout temps établi son empire sur les ames sensibles.
Il est certain qu’on ne peut trop louer son courage à fronder le ridicule philosophique, & à s’opposer à l’empire du mauvais goût.
Au reste, pour les empires comme pour les littératures avant peu peut-être l’Orient est appelé à jouer un rôle dans l’Occident.
Néron prétendoit avoir sur le Parnasse le même rang qu’il occupoit dans l’empire.
Quel dommage qu’il n’ait rien voulu dire de ces bergères transformées par leurs vertus en bienfaisantes divinités ; de ces Geneviève qui, du haut du ciel, protègent, avec une houlette, l’empire de Clovis et de Charlemagne !
Heureux les peintres et les poëtes, qui ont plus d’empire sur leur génie que les autres, qui sortent de leur enthousiasme en quittant le travail, et qui n’apportent point dans la societé l’yvresse du Parnasse.
Puisque la loi de causalité a été vérifiée dans les autres règnes de la nature, que, progressivement, elle a étendu son empire du monde physico-chimique au monde biologique, de celui-ci au monde psychologique, on est en droit d’admettre qu’elle est également vraie du monde social ; et il est possible d’ajouter aujourd’hui que les recherches entreprises sur la base de ce postulat tendent à le confirmer.
Quoi qu’il en soit, on ne peut disconvenir qu’Adam n’ait été souverain du monde, comme Robinson de son île, tant qu’il en fut le seul habitant ; et ce qu’il y avait de commode dans cet empire était que le monarque, assuré sur son trône, n’avait à craindre ni rébellions, ni guerre, ni conspirateurs. » Telle est la froide bouffonnerie qui ouvre le Contrat social.
II Figurez-vous donc qu’au lieu du précieux, compendieux et sérieux Armand Baschet, qui ne rirait pas pour un empire, nous eussions ici affaire à quelque génie plein d’abandon et de sincérité, à quelque grand caricaturiste historique, — car un caricaturiste peut être un historien, puisque la caricature n’est qu’une certaine manière de regarder la vérité, — figurez-vous donc, par exemple, un esprit comme Thomas Carlyle, que je regarde comme l’Hogarth de l’Histoire, tombant sur l’histoire de Baschet, le Dangeau posthume de Louis XIII, et demandez-vous quels effets grotesques et charmants et quelle conclusion de savoureuse moralité humaine il aurait tirés de ce conte de La Fontaine historique, qui fut une réalité, et, pour les gens intéressés à l’achèvement de ce mariage resté en l’air, la plus plaisante des mélancolies !
Il était fait pour le Sénat du Consulat et de l’Empire où il trouva sa place véritable. […] Doutez-vous qu’il n’eût pas, au moins, voulu arracher à l’Autriche ses provinces allemandes, annexer le Danemark, pousser l’Empire jusqu’à Varsovie ? […] Mais la moitié des officiers de la Révolution et de l’Empire en avaient autant. […] Donc il prend part aux dernières guerres de l’Europe contre l’empire français. […] Considéré comme maréchal de l’Empire et parent de Napoléon, il était impossible.
Elle lui céda un empire illimité. […] Celle-ci remplit la seconde moitié du dix-huitième siècle et aucune voix ne lui dispute l’empire. […] Toute institution qui lui ôte tout ou partie de cet empire sans bornes consacre une violence. […] C’est d’une bien autre sorte d’empire féminin que nous parlons Julie l’inaugure. […] Mais qui ne voit le péril de laisser accaparer par un génie d’une subjectivité aussi despotique l’empire des idées générales ?
Ton empire est égal à l’empire des dieux, Et qui pourrait te voir sans te rendre les armes Ou bien serait sans âme, ou bien serait sans yeux. […] Aussi vous voyez combattre pour vous et répandre leur sang pour votre empire ces mêmes hommes qui, traités avec hauteur, se fussent révoltés. […] Que n’en coûte à son bras l’empire des Persans. […] Il s’agit de choisir entre une femme et l’empire du monde. […] À deux reprises, il se dit prêt à lâcher l’empire et à fuir au bout du monde avec sa maîtresse.
Car il faut tenir compte du décalage de quelques années, entre la morne et fatale Exposition de 1900 et la grande guerre, comme du décalage des débuts, entre le Directoire et l’assiette de l’Empire. […] Les guerres interminables de l’Empire avaient fauché, presque aussitôt, les éléments jeunes et enthousiastes. […] Sans doute il y eut, pendant le second Empire et quelques années de la troisième république, les boulevardiers. […] Il a sévi sous le premier Empire comme jamais. […] Car le premier Empire a caporalisé les Facultés et les Sciences et gravement amoindri, sinon tué, le goût des recherches originales, hors des sentiers battus.
Nous ne verrons que Jésus-Christ : nous le verrons naître miraculeusement, frapper & détruire l’empire Romain, idolâtre dans ce moment ou partagé entre deux maîtres il en avoit plusieurs liés par des mariages, & cependant ennemis. […] Nous verrons Constantin, adorer la pierre prédite par Daniel, lui soumettre sa personne & son empire ; donner la croix pour enseigne victorieuse aux armées Romaines, vainqueur de tous ses conquérans ; vaincu lui-même, sans le secours des armes, par le Dieu-homme fondateur d’un empire éternel. […] Nous verrons Rome chrétienne, après la destruction de Rome idolâtre, porter son empire, tout spirituel, beaucoup au-delà des limites des quatre empire prédits ». […] Il donna bulles sur bulles pour étendre l’empire des réguliers ; mais il trouva toujours de l’opposition en France de la part de l’université. […] On les comparoit à Enée, arrivant en Italie, & fondant un empire avec une poignée de Troyens, malgré tous les obstacles.
Son caractère conciliant rendoit son autorité supportable : l’autre, n’ayant pas les mêmes talens, voulut exercer le même empire & souleva toute la nation. […] Il fallut, conformément aux loix & aux usages de l’empire, s’adresser à un tribunal. […] Vous êtes venus dans mon empire, non pour l’éclairer, mais pour y brouiller. […] Ils ajoutent qu’elle les estime encore, & que ce sont eux qui, dans l’empire le plus vaste & le plus florissant, conservent les restes du christianisme. […] Aussi les nations étrangères, chez qui l’usage a plus d’empire que parmi nous, comprenoient encore, il n’y a pas long-temps, la chirurgie sous le nom de médecine.
Ces impressions sont si vives sur certaines natures prédisposées à l’effet de la musique que ces natures doivent se sevrer sévèrement de ce plaisir, qui dépasse leur puissance de sentir, afin de conserver l’équilibre de leur raison et l’empire sur leurs passions. […] Il chanta d’abord Jupiter, qui abandonna le séjour des dieux (tel est l’empire du tout-puissant amour). […] « Sous l’empire de ce chant, la vanité du roi s’éveille dans sa pensée ; il livre de nouveau toutes ses batailles ; trois fois il défait ses ennemis, trois fois il retue les morts ! […] « Malgré l’abominable temps qu’il fait, nous avons déjà été à un concert chez le comte Collalto ; la comtesse Sinzendorff nous a conduits chez le comte Wilschegg et chez le vice-chancelier de l’Empire, comte de Collorédo, où nous avons trouvé les ministres et toutes les grandes dames de Vienne, avec lesquelles nous avons causé.
C’est plutôt dans un autre sens que la guerre est à l’origine des empires. […] Ainsi se formèrent jadis les grands empires asiatiques. […] Quand le vainqueur concède aux populations subjuguées une apparence d’indépendance, l’assemblage dure plus longtemps : témoin l’empire romain. […] Il s’agira d’un empire à exercer, non pas sur les hommes, mais sur les choses, précisément pour que l’homme n’en ait plus tant sur l’homme.
Le passé, lié tout entier à la cause de la religion, y conservait son empire. […] Les cités héroïques furent toutes gouvernées aristocratiquement ; les rois des familles soumirent leur empire domestique à celui de leur ordre. […] Car ce sont deux lois naturelles : Qui ne peut se gouverner, obéira, — et, aux meilleurs l’empire du monde. […] C’est après ces épurations sévères que Dieu renouvela la société européenne sur les ruines de l’empire romain.
Roi de ses passions, il a ce qu’il désire : Son fertile domaine est son petit empire, Sa cabane est son Louvre et son Fontainebleau ; Ses champs et ses jardins sont autant de provinces Et, sans porter envie à la pompe des princes, Se contente chez lui de les voir en tableau. […] Mais le lieu commun est grandement traité ; il y est même rehaussé vers la fin ; et, allant au-delà d’Horace, Maynard, pour détacher son ami des ambitions périssables, montre que ce ne sont pas seulement les hommes, ni les cités, ni les empires qui doivent finir ; ce ne sont là que de petits débris : ce ciel physique lui-même, ce théâtre de tant de splendeurs, dit-il, finira, et il aura son jour de ruine : Le grand astre qui l’embellit Fera sa tombe de son lit.
Tel nous apparaît Maine de Biran dans ce volume, au point de départ ; quinze et vingt ans après, et par le seul mouvement continu de sa pensée, il en était venu à déplacer totalement son point de vue, à le porter, en quelque sorte, de la circonférence au centre, à tout rendre (et même au-delà) à la force intime et à la volonté : L’art de vivre, écrivait-il en 1816, consisterait à affaiblir sans cesse l’empire ou l’influence des impressions spontanées par lesquelles nous sommes immédiatement heureux ou malheureux, à n’en rien attendre, et à placer nos jouissances dans l’exercice des facultés qui dépendent de nous, ou dans les résultats de cet exercice. […] Sous l’Empire il fut sous-préfet de Bergerac, puis député au Corps législatif, et en cette qualité il prit part en 1813, avec MM.
« Elle recevait avec dignité et politesse. » Heureusement un autre poète, qui fut présenté à la comtesse en 1810 ou environ, et qui l’a revue plus tard, nous a donné d’elle un portrait plus vrai, et qui répare l’injustice du précédent : « Rien, nous dit M. de Lamartine en son VIIe Entretien, rien ne rappelait en elle, a cette époque déjà un peu avancée de sa vie, ni la reine d’un empire, ni la reine d’un cœur. […] Et nos maréchales d’Empire, nos veuves de généraux illustres, qu’ont-elles dû faire, privées la plupart de bonne heure du héros dont elles étaient fières de porter le titre et le nom ?
La vérité des relations et des intrigues de cour et de société sous l’Empire, sous la Restauration, sous Louis-Philippe, on la raconte, on en cause avec quelques-uns des demeurants et des bien informés, on ne l’a pas encore écrite ou du moins mise au jour. […] Il cherche une mesure entre ses regrets pour l’Empire tombé et ses goûts pour la liberté renaissante.
Leur autorité fut brisée et le souvenir de leur empire quasi tyrannique contribua puissamment à jeter les esprits dans l’extrême opposé. […] Au nom de ce principe, nous pouvons approuver les formes les plus différentes : la phrase ample et majestueuse de Bossuet déroulant les destinées des empires et le caquetage vif, sautillant, coupé, le style parlé de Marivaux analysant les menus états d’esprit d’une jeune fille ; les vers aisés, inégaux et sinueux, qui se moulent avec tant de souplesse sur la pensée de La Fontaine, et les larges vagues de mélodieux alexandrins où se berce mollement la rêverie de Lamartine.
L’esprit que Mme Geoffrin apportait dans le ménagement et l’économie de ce petit empire qu’elle avait si largement conçu, était un esprit de naturel, de justesse et de finesse, qui descendait aux moindres détails, un esprit adroit, actif et doux. […] En un mot, elle nous offre un abrégé d’empire qui subsiste au moyen de récompenses et de peines.
Lepitre, où l’on faisait de bonnes études, et où l’on prenait en même temps je ne sais quel avant-goût de royalisme jusque sous l’Empire. […] Combien de fois ne l’ai-je pas rencontré l’après-midi, le soir, aux boulevards, sous les arcades Rivoli, toujours seul, jouissant incognito de son empire !
Cette Notice, lue dans la dernière séance publique de l’Académie des inscriptions, a ramené l’attention sur un homme respectable et excellent, original de mœurs et de caractère, bon de nature, fin pourtant, rude et brusque d’accent et de ton, qui a eu, au début de l’Empire, le plus grand succès tragique d’alors (Les Templiers), qui, depuis, a créé toute une érudition (l’étude du provençal classique et de ce qui en dépend), l’a établie et organisée d’une manière féconde, et s’est véritablement illustré par ce vaste et sagace labeur. […] Thiers, dans son XVIIIe volume de l’Histoire du Consulat et de l’Empire, a noté un second jour parlementaire mémorable dans la vie politique de M.
Retz nous le dit, et Tallemant, qui était du voyage et de sa compagnie, nous le confirme expressément : « Il le faut bien louer d’une chose, dit Tallemant, c’est qu’à Rome, non plus qu’à Venise, il ne vit pas une femme, ou il en vit si secrètement que nous n’en pûmes rien découvrir. » Avec cela il s’appliquait à relever cette modestie de passage d’une grande dépense, de belles livrées, d’un équipage très cavalier ; et un jour, pour soutenir le point d’honneur et plutôt que de céder le terrain dans un jeu de paume, il fut près de tirer l’épée avec sa poignée de gentilshommes contre toute l’escorte de l’ambassadeur de l’Empire. […] Maintes fois, il le reconnaît lui-même, il manquait de bon sens dans les déterminations, et il est des circonstances où il se reproche de n’en avoir pas eu un grain ; il était sujet à des éblouissements, à des coups d’imagination dont savent se préserver les hommes de qui la pensée doit guider et gouverner les empires.
C’était le même enfin qui, dans ce fameux Exegi monumentum, parlant de la Seine, s’était écrié d’un ton de prophète : Mais tant que son onde charmée Baignera l’empire des lys, ……………………………… Elle entendra ma Lyre encore D’un roi généreux qui l’honore Chanter les augustes bienfaits ! […] Ces jeux d’esprit trouvaient beaucoup de curieux et d’oisifs qui s’en amusaient chaque matin sous le Consulat et sous l’Empire.
livrez-vous à votre fureur, je ne vous accuse point d’ingratitude, vous ne me devez point votre existence, vous ne tenez point de moi votre empire ! » — D’où il s’ensuivait que l’Assemblée nationale lui devait son existence, qu’elle avait reçu uniquement de lui son empire, et qu’elle était une fille ingrate et dénaturée autant que les filles du roi Lear ; pauvre vieux roi, un peu plus errant toutefois que ne l’était M.
Grâce au ciel le grand roi n’a pas eu assez d’empire sur ce merveilleux génie pour polir et discipliner cette imagination biblique et orientale, naïve et sublime. […] N’avait-il pas, lui aussi, le besoin de régner, le goût du pouvoir absolu, une involontaire répulsion contre tous ceux qui s’affranchissaient de son empire ?
Dans une telle science, il n’y a point de tradition ni d’héritage, il y a des établissements successifs de conquérants chassés et remplacés les uns par les autres, comme dans les anciens empires de l’Asie, sans qu’aucun d’eux réussisse à fonder un empire définitif.
Il vient, pour ainsi dire, faire sa partie dans ce chœur funèbre de son empire ; et il s’associe par la forme et par l’accent de ses paroles aux lamentations dont il est accueilli. […] splendeur de l’empire persan, gloire des guerriers, grandeur qu’a moissonnée le dieu !
. — Vingt empires dorment dans les tombeaux qu’ils nous ont creusés. » Voilà qui s’appelle parler de soi, et sinon croire, au moins ne pas douter.
Un signe extérieur (et l’empire des signes est grand) contribuait à l’entretenir.
L’ordre s’organisant avec l’Empire, la liberté revenant avec la Restauration, un jugement philosophique et moral sur la poésie d’Horace, un touchant et cordial éloge du feu duc Matthieu de Montmorency, ont tour à tour fourni aux développements de l’orateur et aux applaudissements de l’auditoire.
Lerminier s’est emparé, pour sa bonne part, de cet empire vacant ; il n’a fléchi ni bronché un seul instant sous la tâche immense.
Boutaric, j’ai pu dépouiller une multitude de documents manuscrits, la correspondance d’un grand nombre d’intendants, directeurs des aides, fermiers généraux, magistrats, employés et particuliers, de toute espèce et de tout degré pendant les trente dernières années de l’Ancien Régime, les Rapports et Mémoires sur les diverses parties de la maison du roi, les procès-verbaux et cahiers des États généraux en cent soixante-seize volumes, la correspondance des commandants militaires en 1789 et 1790, les lettres, mémoires et statistiques détaillées contenus dans les cent cartons du Comité ecclésiastique, la correspondance en quatre-vingt-quatorze liasses des administrations de département et de municipalité avec les ministres de 1790 à 1799, les rapports des conseillers d’État en mission à la fin de 1801, la correspondance des préfets sous le Consulat, sous l’Empire et sous la Restauration jusqu’en 1825, quantité d’autres pièces si instructives et si inconnues, qu’en vérité l’histoire de la Révolution semble encore inédite.
Confessons, nous, les aînés, que ce néo-romantisme des jeunes gens a peut-être bien élargi et attendri en nous le vieil esprit positiviste hérité de la littérature du second Empire et qui eut, voilà quinze ans, son expression suprême dans le naturalisme.
Il imagina l’histoire d’une famille sous le second Empire.
Il n’a sur eux aucun empire.
Du fond de sa grotte de Bethléem, il voyait la chute de l’Empire romain : vaste sujet de réflexions pour un saint anachorète !
Bientôt les mœurs se dépravent ; l’empire de la raison s’étend ; le discours devient épigrammatique, ingénieux, laconique, sentencieux ; les arts se corrompent par le raffinement.
Mais les hommes n’ont pas le même empire sur leur imagination que sur leurs jambes.
Renan avait connu une crise de conscience, je crois qu’il faudrait la chercher un peu plus tard, quand il a terminé son essai sur l’Avenir de la Science et qu’après quelques tentatives, il se détermine à se conformer à la conduite dictée par les anciens : « Le philosophe doit sacrifier aux dieux de l’Empire. » Ce que Pascal formulait : « Il faut avoir une pensée de derrière la tête et juger du tout par là, en parlant cependant comme le peuple. » Cet aphorisme constitue le point essentiel du « renanisme » ; c’est à l’adopter que le maître put hésiter, parce qu’il avait l’amour de la vérité et qu’il dut lui en coûter de la taire à demi, comme il fit le plus souvent, dès sa trentième année.
Ainsi partout l’intérêt public a dicté les éloges ; chaque nation a loué ce qui était utile à ses besoins ou à ses plaisirs ; on a loué la piraterie chez les Scandinaves, le brigandage chez les Huns, le fanatisme chez les Arabes, les vertus douces et les talents chez les peuples civilisés, la chasse ou la pêche chez les sauvages, la navigation chez les habitants des îles ; mais il y a une qualité qui partout a toujours été également louée, c’est celle qui a créé toutes les révolutions, qui bouleverse tout, qui assujettit tout, qui soutient les lois et qui les combat, qui fonde les empires et qui les détruit, à qui tout est soumis dans la nature, et devant qui l’univers et les panégyristes seront éternellement prosternés : la force.
Étant consul sous Nerva, il prononça l’éloge funèbre de Virginius ; c’est ce même général qui avait refusé trois fois l’empire, qui par là déplut aux armées, dont il méprisa la haine, qui les fit obéir en dédaignant leurs présents, et qui vécut tranquille et respecté sous six empereurs, quoiqu’il n’eût tenu qu’à lui d’être à leur place.
Il est bien vrai que, durant ces années de long et sérieux travail, Mlle de Meulan avait de plus en plus appris à se vouer au vrai, à le croire utile, à le défendre, à se passionner au moins indirectement pour lui, en cherchant querelle à toute erreur, et aussi à régler chaque acte de sa vie sévère par l’empire, déjà religieux, de la volonté et de la raison. […] Celle qui, à vingt-cinq ans, avait débuté par se faire personne d’un certain âge ou même douairière du Marais, entre non moins exactement, à mesure qu’elle vieillit, dans les divers personnages de ce petit monde de dix à quatorze ans, en y apportant une morale saine, la morale évangélique, éternelle, qui s’y proportionne sans s’y rapetisser. « Son idée favorite, son idée chérie, est-il dit dans la préface d’une Famille, c’était que la même éducation morale peut et doit s’appliquer à toutes les conditions ; que, sous l’empire des circonstances extérieures les plus diverses, dans la mauvaise et dans la bonne fortune, au sein d’une destinée petite ou grande, monotone ou agitée, l’homme peut atteindre, l’enfant peut être amené à un développement intérieur à peu près semblable, à la même rectitude, la même délicatesse, la même élévation dans les sentiments et dans les pensées ; que l’âme humaine enfin porte en elle de quoi suffire à toutes les chances, à toutes les combinaisons de la condition humaine, et qu’il ne s’agit que de lui révéler le secret de ses forces et de lui en enseigner l’emploi. » Comment Mme Guizot, de raison un peu ironique, d’habitudes d’esprit un peu dédaigneuses qu’elle était, se trouva-t-elle conduite si vite et si directement à cette idée plénière de véritable démocratie humaine ? […] Au reste, la raison de Mme Guizot, qui a pied dans le fait même, admet, pressent les cas d’insuffisance et en avertit : « Je le vois plus clairement chaque jour, dit Mme d’Attilly, la jeunesse est de tous les âges de la vie celui que l’enfance nous révèle le moins ; une influence indépendante du caractère la domine avec un empire contre lequel on peut d’avance lui donner des forces, mais sans prévoir de quelle manière elle aura à s’en servir. » Mme Guizot relève en un endroit une assertion de mistress Hannah More sur la nature déjà corrompue des enfants, et elle la combat.
Car je le demande à tout homme sensé, et qui ne vit pas sous l’empire d’une révélation religieuse, comment peut-on être sûr et certain de ces points si fort controversés qui ont fait le doute et quelquefois le tourment des plus grands esprits ? […] Depuis Hippocrate et Galien jusqu’à Broussais, la médecine, quand elle a été sous l’empire d’une idée philosophique, s’est constamment trompée… C’est seulement quand ils se sont livrés à l’observation pure et simple, ou à l’expérimentation, que ces grands hommes du passé ont produit leurs impérissables travaux. […] Or, c’est sous l’empire de cette philosophie de montre, trop docilement acceptée de l’Université, que semble avoir été conçu et motivé l’arrêté ministériel.
L’empire romain devait naître et mourir en peu de temps. […] L’Allemagne, vaste entrepôt des débordements de peuples de l’Orient ou du Nord délayés dans les peuples incohérents de la Germanie, devait se constituer en empire fédéral pour la guerre, en individualités nationales indépendantes pour la paix : république de monarchies où l’unité était impossible dans la forme, parce que l’unité manquait dans l’esprit. […] Rousseau, constitutionnelle sous ses Mirabeau, démagogique sous ses Danton, républicaine et sanguinaire sous sa Convention, conquérante et despotique sous son Napoléon, insatiable de liberté sous sa dynastie légitime, agitée et indomptable sous sa dynastie élective de 1830, sublime, mais épouvantée d’elle-même, sous sa seconde république, rejetée par terreur de l’utopie sous l’épée d’un second empire ; prête à tout ce qui peut la grandir, la sauver, l’illustrer ou la perdre ; ni républicaine, ni constitutionnelle, ni monarchique, ni théocratique, mais changeante, révolutionnaire et contre-révolutionnaire selon les temps ; nation de volte-face pour faire face, sous toutes les formes, à tous les événements, pour rester grande !
C’était l’époque de l’empire ; c’était l’heure de l’incarnation de la philosophie matérialiste du 18e siècle dans le gouvernement et dans les mœurs. […] Aucune plume, aucun pinceau ne pourrait décrire l’impression que ce seul regard donne à l’œil et à l’âme ; sous nos pas, dans le lit du torrent, au milieu des champs, autour de tous les troncs d’arbres, des blocs immenses de granit rouge ou gris, de porphire sanguin, de marbre blanc, de pierre jaune aussi éclatante que le marbre de Paros, tronçons de colonnes, chapiteaux ciselés, architraves, volutes, corniches, entablements, piédestaux, membres épars et qui semblent palpitants, des statues tombées la face contre terre, tout cela confus, groupé en monceaux, disséminé en mille fragments, et ruisselant de toutes parts comme les laves d’un volcan qui vomirait les débris d’un grand empire ! […] Ma conviction est que nous sommes à une de ces grandes époques de reconstruction, de rénovation sociale ; il ne s’agit pas seulement de savoir si le pouvoir passera de telles mains royales dans telles mains populaires ; si ce sera la noblesse, le sacerdoce ou la bourgeoisie qui prendront les rênes des gouvernements nouveaux, si nous nous appellerons empires ou républiques : il s’agit de plus ; il s’agit de décider si l’idée de morale, de religion, de charité évangélique sera substituée à l’idée d’égoïsme dans la politique ; si Dieu dans son acception la plus pratique descendra enfin dans nos lois ; si tous les hommes consentiront à voir enfin dans tous les autres hommes des frères, ou continueront à y voir des ennemis ou des esclaves.
Bacchus a levé en masse les peuplades de son empire démoniaque pour envahir l’Inde. […] Mais en Grèce même, tandis que le Bacchus Thébain règne et triomphe au grand jour, un symbolisme secret travaille sur lui et pour lui dans l’ombre ; il lui creuse un empire occulte aussi vaste que son royaume extérieur. […] Ce n’est que sous l’Empire qu’il osa recommencer ses orgies, marquées de nouveau par des catastrophes.
Tous les arts sont unis : les sciences humaines N’ont pu de leur empire étendre les domaines, Sans agrandir aussi la carrière des vers. […] Tout cela est l’œuvre de l’âme se sentant elle-même, prenant conscience de sa liberté, un monde où viennent expirer les lois qui régissent le reste de l’univers : Espace intérieur, inviolable empire Qu’un refus du vouloir barre même au Destin. […] Chateaubriand et son groupe littéraire sous l’Empire, t.
Dans cet empire de la nécessité qui régit le monde, qui enveloppe et enserre toutes les créatures de ses liens indissolubles, quelle part peut être faite à la prétendue liberté des actes humains ? […] Si l’homme ne disparaît point entre les deux puissances qui se disputent l’empire sur sa volonté, du moins son initiative personnelle, son autonomie propre, semblent s’effacer tantôt sous la pression de la force diabolique, tantôt sous l’irrésistible impulsion de la grâce divine. […] Quand il semble que notre raison nous a délivrés d’une croyance qu’elle traite de préjugé, ce préjugé rentre obstinément dans la pratique, et y reprend tout son empire.
Aussi malheureuse que notre politique, dessaisie de l’empire matériel du monde, notre littérature laisse perdre par ses fautes l’empire intellectuel qui était notre patrimoine incontesté. […] Alors comme aujourd’hui, le cri des conservateurs, demandant qu’on se repliât sur le passé, partait de Moscou, où résidait l’historiographe de l’Empire. […] Nul souverain ne fit plus et plus délicatement pour les gens de talent qui honoraient son empire ; ils vivaient matériellement de ses bienfaits ; seulement ils mouraient de langueur dans l’air raréfié de cet empire. […] Grâce à la munificence impériale, l’incorrigible nomade put voyager, s’expatrier pour respirer à l’aise en dehors de l’empire. […] Dans les universités de l’Empire, où le chiffre des admissions avait été limité, et jusque dans les séminaires, on proscrivit l’enseignement de la philosophie.
Ni les actions ni les discours de l’homme sauvage, ou récemment en société, ne seront pareils à ceux de l’homme policé : ces différences entre les individus existent entre les races humaines par la suite des temps, et entre les nations par l’empire dei gouvernements établis. […] Dans ces grandes luttes, on revoit les traits distinctifs des empires ou des républiques qui eurent des vertus pour fondement constitutionnel : ceux-là conservent encore des mœurs tendantes à leur régénération ou à leur perfectionnement : en cela leur destin intéresse, et mérite la mémoire que lui assure la poésie qui le consacre. […] L’Arioste décrit l’histoire de l’invasion des Maures et des Sarrasins infidèles dans le saint empire de Charlemagne. […] J’avais créé sa religion et ses lois philosophiques après l’avoir créé lui-même ; il me fallut encore créer les localités de son empire. […] Il se plonge d’abord dans les enfers, il y fonde un empire, il y bâtit un Pandémonium, il y crée des êtres fantastiques dont les mouvements attachent la curiosité, et se fraie des routes imaginaires au sein d’un orageux chaos.
Ce sont ces deux choses, avec l’Empire, qu’il a toujours le plus détestées. […] L’Empire romain a-t-il été conquis par les Barbares ? […] Il y eut un refroidissement vers la fin de l’Empire. […] dit votre femme un peu étonnée ; car la vérité a toujours un certain empire. […] L’Empire fit une nouvelle noblesse et ne rétablit pas l’ancienne.
Les prêtres ne s’y sont pas trompés, et pour assurer leur empire ils n’ont jamais demandé que le monopole de l’éducation. […] L’immensité semble se peupler de ceux qui, un jour ou l’autre, ont pensé ou agi sous leur empire. […] « Les orphelins du monde entier se tournent vers toi, mère délaissée de tant d’empires morts ! […] Veuillot un empire dont il ne peut se défendre. […] Ceux-ci sont les habiles, les vrais convertisseurs dont le lecteur subit l’empire sans défiance, et qui réforment en charmant.
Ce ne fut qu’en 1870, quand l’Empire fut tombé, que sa chaire lui fut rendue. […] À aucun moment elle ne fut plus marquée que dans les dix dernières années du second Empire. […] Son premier volume a indigné les admirateurs de l’ancien régime, les trois suivants ceux de la Révolutionnes deux derniers ceux de l’Empire. […] Il comptait y ajouter l’histoire de l’Empire, mais les circonstances vinrent encore ici disposer de lui. […] N’en gardons pas les charges, si nous n’en voulons pas les avantages. » Néanmoins ses sentiments contre l’Empire étaient très vifs.
(9) C’est dans les rangs les plus bas, que le point de vue sous lequel il faut juger les Empires, se trouve souvent le plus avantageux, parce que ce point de vue est ordinairement le plus net. […] Fier de l’empire absolu qu’il aura pris sur l’ancien (aujourd’hui trop usé) il étalera des beautés hardies & pittoresques, que l’on sacrifie ordinairement en faveur de quelques regles frivoles, fondées sur la routine, appui des faibles Auteurs & fléau de l’art. […] Comme le génie, par son éclat & son ascendant, rompt le sentiment d’égalité, naturel à chaque être, quoique ses effets soient paisibles & utiles à la société, l’homme vulgaire s’indigne de cette supériorité qui semble attribuer à un seul homme une sorte d’empire sur ses semblables. […] L’empire de l’opinion n’est-il pas assez vaste pour que chacun puisse y habiter en repos (55). […] L’empire de l’usage & de la mode doit céder à la simple appercevance d’une maniere plus large, plus grande, plus neuve, plus hardie ; telle que la vérité l’indique & l’exige.
J’ai été inoculée, aucun événement ne peut donc me faire tomber de ma place, et j’ai douze ans d’empire assurés. […] Pendant l’émigration, et dans le temps qu’il voyageait en Italie, M. de Meilhan fut appelé en Russie par l’impératrice Catherine qui, sur sa réputation et d’après la lecture de ses ouvrages, voulait faire de lui son historien et celui de son empire.
On n’en était pas là encore ; on était à l’affût de ses fautes, qui ne se faisaient jamais attendre ; on n’eût pas été fâché de voir qu’il baissât de talent et d’esprit, et à tout hasard on s’empressait de le dire ; l’ouvrage peu agréable intitulé : Annales de l’empire offrait un prétexte, et à ce propos d’Argenson écrivait (juillet 1754) : L’on m’avait dit qu’il paraissait fort baissé dans cet ouvrage, et véritablement il devrait l’être, Voltaire ayant soixante ans et son corps ayant été le théâtre de tant d’agitations. Cependant je trouve ici du grand comme de la chaleur, surtout les derniers cahiers de ce second volume où il décrit l’état de l’empire sous Léopold, Joseph et Charles VI.
Est-ce à dire, comme l’illustre historien de l’Empire l’a écrit à l’occasion de la rédaction de l’Acte additionnel, que sa plume était la meilleure du temps, comme celle de Napoléon était la plus grande ? […] Il m’a avoué qu’il ne joue que pour cela. » — C’est cruel, mais c’est joli, et c’est vrai. — On a publié depuis peu la Correspondance de Sismondi avec la comtesse d’Albany ; es jugements sur Benjamin Constant, et qui remontent au temps de l’Empire, y sont d’accord avec les nôtres
Elle n’arriva à sa pleine et entière autorité, à son empire absolu, que graduellement. […] Tous ceux qui ont parlé d’elle, les Ségur, les Lévis, le prince de Ligne, Mme de Genlis, sont unanimes à lui reconnaître cet empire absolu et sans appel sur tout ce qu’il y avait de distingué dans la jeunesse des deux sexes ; elle contenait les travers, tempérait l’anglomanie, l’excès de familiarité, la rudesse, ne passait rien à personne, ni une mauvaise expression, ni un tutoiement, ni un gros rire ; « la plus petite prétention, la plus légère affectation, un ton, un geste qui n’auraient pas été exactement naturels, étaient sentis et jugés par elle à la dernière rigueur ; la finesse de son esprit, la délicatesse de son goût ne lui laissaient rien échapper » ; attentive à ce qu’il ne passât aucun courant d’air de la mauvaise compagnie dans la bonne, elle retardait, pour tout dire, le règne des clubs et maintenait intacte l’urbanité française, à la veille du jour où tout allait se confondre et s’abîmer.
Royer-Collard vivait à Paris au commencement de l’Empire dans un quartier central, du côté de la rue Montmartre (si je ne me trompe) ; sans être trop solitaire ni renfermé, il cherchait à se défendre des visites importunes. […] Quoiqu’ayant été préfet de police sous l’Empire, il avait, par ses tout premiers antécédents de conseiller dans l’ancien Parlement de Paris sous Louis XVI, par la mort de son père immolé sur l’échafaud et par tous ses liens de famille ou de jeunesse, une teinte royaliste très-suffisante pour figurer sur un très-bon pied dans la Chambre nouvelle.
L’art romain, l’architecture qui s’impose avec la domination romaine aux municipes et aux provinces de l’Empire, reste généralement uniforme et stationnaire pendant les premiers siècles : ce n’est qu’en repassant en Grèce, en retournant à son berceau et en devenant byzantine, que cette architecture subit une transformation, une évolution nouvelle. […] Mais l’Empire, en se transportant à Byzance, rend au génie grec, subtil, raisonneur, inventeur, son ascendant et sa supériorité : dès lors, la Grèce byzantine va prendre la tête des arts, et mettre sa marque et comme sa signature à un style nouveau.
Autrefois, du temps de l’Empire romain, il y avait des rhéteurs ou sophistes qui couraient les provinces et les villes, et dont quelques-uns, par leurs tours de force et leur dextérité de parole, obtenaient de prodigieux succès. […] Sans doute, à ce métier de prêcheur un peu nomade, il faut quelque condescendance parfois, quelque concession au goût du jour et à Celui des lieux où l’on passe ; mais ce n’est point pourtant le cas des sophistes de l’Empire romain qui, eux, traitaient de purs thèmes de rhétorique et faisaient des déclamations, soutenant au besoin le pour et le contre, prêts à plaider, par exemple, devant les Troyens, et pour leur complaire, que l’antique Ilion n’avait jamais été prise par les Grecs, sauf à plaider la thèse contraire devant les Argiens.
M. de Canouville, un homme de la société, que les gens de mon âge ont connu, et qui avait été attaché à la cour du premier Empire, racontait l’anecdote suivante. […] On lit dans l’Histoire du Consulat et de l’Empire, tome vii, p. 372, au récit de la bataille d’Eylau : « Napoléon se hâta de dépêcher le soir même du 7 février plusieurs officiers aux maréchaux Davout et Ney pour les ramener l’un à sa droite, l’autre à sa gauche… » — « C’est une erreur, dit M. de Fezensac, en ce qui concerne le maréchal Ney ; il ne reçut aucun avis et ne sa doutait pas de la bataille, quand je le joignis le 8, à deux heures dans la direction de Creutzburg. » 41.
La chute de l’Empire et la Restauration apportèrent de notables changements dans la destinée de Lamartine. Il était né et avait grandi dans des sentiments opposés à la Révolution : il n’avait jamais adopté l’Empire et ne l’avait pas servi.
Il a transféré son siége d’empire de Rome à Byzance. […] … Son nom sur mes lèvres expire ; Quel vent a moissonné la rose de l’Empire ?
Successivement nommé au Corps législatif, à l’Institut, au Conseil d’État et au Sénat, grand maître des cérémonies sous l’Empire, nous le perdons de vue à cette époque au milieu des grandeurs qui le ravissent aux lettres, mais non pas à leur amour ni à leur reconnaissance : une élégie de madame Dufrenoy a consacré le souvenir d’un bienfait, comme il dut en répandre beaucoup et avec une délicatesse de procédés qui n’était qu’à lui. […] Ce fut à coup sûr une noble action que de se refuser à quelques instances plus pressantes ; le libraire-éditeur ne lui demandait qu’un quatrième volume qu’il aurait intitulé Empire.
L’établissement social, comme l’établissement politique, s’est formé sous l’empire de l’instinct aveugle. […] Un jour viendra où la raison éclairée par l’expérience ressaisira son légitime empire, le seul qui soit de droit divin, et conduira le monde non plus au hasard, mais avec la vue claire du but à atteindre.
Encore une fois, ce n’est point le mariage qui est la gloire de madame de Maintenon, c’est le désintéressement, c’est le sacrifice de son amour, c’est le vertueux usage de l’empire qu’il lui donnait sur le cœur du roi pour le remettre dans ses devoirs : et c’est à l’honnêteté morale de madame de Maintenon, à celle de sa société tout entière, à la considération et aux aimables qualités qu’elle tenait de ses nobles amies, qu’est due la gloire que j’ai pris plaisir à célébrer. […] Le roi, gardant toutes ses troupes, quand l’Empire d’Espagne, la Hollande, licenciaient les leurs, « fit de la paix, dit Voltaire, un temps de conquête ».