Pour Mélanie, le Rédacteur du Mercure, malgré les défauts du plan, le peu d’énergie des caracteres, la langueur de l’action, le peu de vraisemblance des incidens, a eu beau s’armer de courage pour la comparer aux bonnes Pieces * de Racine, chacun s’est écrié : Fi de l’impertinent Journaliste ! […] Marmontel, Thomas, Gaillard, Condorcet, &cc. sont les Parangons de la belle Littérature ; il peut y affubler, tant qu’il voudra, de ses couronnes, les S.
Et nous restons sans lire, les yeux charmés, sur ces vilaines lettres de journal, où votre nom semble imprimé en quelque chose qui vous caresse le regard, comme jamais le plus bel objet d’art ne le caressera. […] L’Institut l’échappa belle, la censure avait retenu le frontispice du journal.
Une dame Autrice, se trouve dans une pièce du Mercure de juin 1726. » Dictionnaire néologique a l’usage des Beaux Esprits du siècle (1727), par l’abbé Desfontaines. […] Son vocabulaire technique comprenait les mots : passe, débutter, archet, roüet, boule, ais, mettre au beau ; boule fendue, dérobée, qui tient de la pierre, du fer, etc. ; crocheter, lever, lève, porte-lève, etc.
d) Personnages : a′) extérieur : * Simples ; beauté, laideur absolues ** Doubles ; beauté sinistre, laideur bonne *** Beaux costumes, belles loques, coloris b′) intérieur : * Âmes simples à répétition d’actes ** Âmes doubles à actes antithétiques *** Âmes doubles par volte-faces subites c) Sujets abstraits : a′) Vers à propos de rien, sujets nuls b′) Sujets indifférents, vers à propos de tout, versatilité c′) Développement de lieux communs d′) Humanitarisme, socialisme, optimisme, idéalisme et panthéisme vagues e′) Aspects grandioses, mystérieux ou bizarres, de la légende, de l’histoire ou de la vie.
» Dans le plus beau peut-être de ses dialogues, Platon, après avoir mis dans la bouche de Socrate une admirable démonstration de l’âme et de la vie future, fait parler un adversaire qui demande à Socrate si l’âme ne serait pas semblable à l’harmonie d’une lyre, plus belle, plus grande, plus divine que la lyre elle-même, et qui cependant n’est rien en dehors de la lyre, se brise et s’évanouit avec elle.
Oter aux jeunes gens la permission de s’inspirer, c’est refuser au génie la plus belle feuille de sa couronne, l’enthousiasme ; c’est ôter à la chanson du pâtre des montagnes le plus doux charme de son refrain, l’écho de la vallée… « Il m’a toujours semblé qu’il y avait autant de noblesse à encourager un jeune homme, qu’il y a quelquefois de lâcheté et de bassesse à étouffer l’herbe qui pousse, surtout quand les attaques partent de gens à qui la conscience de leur talent devrait, du moins, inspirer quelque dignité et le mépris de la jalousie. » Nous avons tenu à donner ces fragments dont la finesse et la vérité sont aujourd’hui trop oubliés des critiques et des auteurs. […] Les tendances générales nous semblent être : Le retour à la simplicité, à la tradition française qui compte autant avec l’avenir qu’avec le passé, au respect des formes syntaxiques ; l’abandon presque complet du vers-libre qui a pourtant donné de beaux poèmes ; le dédain des émotions factices ; le souci du fait social sans toutefois lui laisser la prédominance ; la Renaissance de la critique.
Tout beau, Pauline, il entend vos paroles ; Et ce n’est pas un Dieu comme vos dieux frivoles, Insensibles et sourds, impuissants, mutilés, De bois, de marbre ou d’or, comme vous le voulez ; C’est le Dieu des chrétiens, c’est le mien, c’est le vôtre ; Et la terre et le ciel n’en connoissent point d’autre. […] Ce mot, je suis chrétien, deux fois répété, égale les plus beaux mots des Horaces.
Les plus belles choses qu’un auteur puisse mettre dans un livre sont les sentiments qui lui viennent, par réminiscence, des premiers jours de sa jeunesse. […] On aura beau chercher à ravaler le génie de Bossuet et de Racine, il aura le sort de cette grande figure d’Homère qu’on aperçoit derrière les âges : quelquefois elle est obscurcie par la poussière qu’un siècle fait en s’écroulant ; mais aussitôt que le nuage s’est dissipé, on voit reparaître la majestueuse figure, qui s’est encore agrandie pour dominer les ruines nouvelles205.
Rencontré-je un beau point de vue ? […] La belle chose que j’aurais produite, si le talent de l’avocat eût répondu à la grandeur de la cause !
Ils peuvent en faire valoir les beaux endroits, en excuser les mauvais, comme ils peuvent aussi extenuer le mérite des plus beaux, soit en disant qu’ils sont pillez, soit en les mettant en paralelle avec les vers d’un autre poëte qui aura traité un sujet semblable.
J’abrège ; … je m’arrête ; … j’ai trop beau jeu. […] La belle image de M. […] Il a beau dire, plus on place haut le drame du supplice sur l’échafaud, plus l’univers est attendri : le respect se joint à la compassion ; ce sont deux douleurs ! […] J’ai trop beau jeu. […] Rousseau, comme la Nouvelle Héloïse, comme tout ce qui est beau dans l’art d’écrire.
Au lieu des personnes capricieuses, variables, ondoyantes du seizième siècle, je vois de belles et pures intelligences, auxquelles Descartes a transmis le secret de cette domination de l’âme sur le corps, de la raison sur la passion. […] Telle est en effet la force de cette méthode, telle en est la conformité avec l’esprit français, qu’il y eut, au temps de Descartes, des superstitieux de ce beau génie qui prirent pour le législateur même de la nature des choses celui qui ne faisait qu’en reconnaître les lois. […] Nous avons donné le plus bel exemple, dans le monde moderne, de cette propriété de la vérité, qui est de susciter dans l’esprit qui la possède le désir et le devoir d’en faire part aux autres. […] Ne calomnions pas même les écrivains faux, jusqu’à dire que, pouvant prétendre à la gloire de la vérité exprimée dans un beau langage, ils ont mieux aimé la notoriété qui s’attache aux scandales du talent. […] Bossuet suit Descartes dans son beau traité de la Connaissance de Dieu et de soi-même, ouvrage tout cartésien par ses principes et par son titre même.
Or, cherchez en ce temps-là de grandes et belles œuvres ! […] « Labourage et pâturage sont les deux mamelles de la France », dit Sully à son tour ; et on le voit tracer de grandes routes ombragées de beaux ormes, planter des mûriers, dessécher des marais, protéger les villageois contre les violences des gens de guerre et la rapacité des usuriers. […] Merveille d’ici-bas, chef-d’œuvre de notre âge, dit le berger à la bergère, et la bergère répond au berger : Beau chef-d’œuvre des cieux, agréable pasteur. […] Donnez à tous ces personnages un cœur si tendre, si tendre qu’ils tombent en pâmoison à la première émotion vive ; prêtez-leur avec prodigalité un talent merveilleux pour jouer de la flûte, composer de petits vers galants et débiter des madrigaux comme celui-ci : Si je dis qu’elle est la plus belle Des bergères de ce hameau, Je n’aurai rien dit de nouveau : Ce n’est un secret que pour elle. […] Dans ces rapports perpétuels avec des hommes ayant d’autres lois et d’autres mœurs, l’esprit s’élargit, apprend à supporter des idées nouvelles, à goûter des formes imprévues du beau ; l’amour-propre national y perd de sa naïve infatuation.
Jamais, même en Allemagne, je n’ai entendu une exécution chorale aussi belle. […] Pasdeloup furent acquis, on a eu beau jeu de se poser en avocat de Berlioz ou de Wagner. […] Parsifal est l’une de ces œuvres ; et je ne sais qu’une chose plus belle que Parsifal, c’est n’importe quelle messe basse, dans n’importe quelle église36. » VII : La mélodie de Wagner. […] Cela rappelle que l’ironie et le pastiche ont eu de beaux moments dans le monde du wagnérisme. […] Le grand père de Louis II ayant été le protecteur de la belle espionne Lola Montès, on surnomma même Wagner, « Lolus » Montes.
Parfois même, ce culte d’un amoralisme aisé, très favorable aux dilettanti, pousse des esprits blasés, las du bel air et des vices alanguis, jusqu’aux pires recherches, et l’on voit des romanciers originaux employer leur art ironique et subtil à écrire des romans déconcertants, comme le Bubu de Montparnasse dû à M. […] René Bazin, qui sont de beaux types de romans traditionalistes dont nous aurons à reparler. […] Maurice Barrès dans la trilogie des Déracinés, de l’Appel au soldat et de Leurs figures 3. » Nous admirons dans les Déracinés une belle langue, mêlant à une fine ironie un lyrisme contenu. […] Vigoureux et neuf, ce roman offre de belles images ; l’intérêt y est entretenu par une continuelle évocation des problèmes du temps présent : celui, surtout, de savoir si la civilisation à outrance, confinant à la cruauté froide des époques barbares, aura raison de la civilisation généreuse et policée née du christianisme. […] Mademoiselle Cloque, la Becquée, l’Enfant à la balustrade, le Bel avenir, ont apporté dans le roman moderne de mœurs provinciales une note très neuve.
Il se produisit, à ce moment, un phénomène assez singulier : sur la fin et comme à l’arrière-saison d’un siècle si riche par l’ensemble et la réunion des plus belles facultés de l’esprit et de l’imagination, on vit paraître plusieurs hommes distingués, et quelques-uns même éminents par certaines parties de l’intelligence, mais notablement privés et dénués d’autres facultés qui se groupent d’ordinaire pour composer le faisceau de l’âme humaine : — Fontenelle en tête, le premier de tous, une intelligence du premier ordre, mais absolument dénué de sensibilité ; La Motte, l’abbé Terrasson, qui l’un et l’autre, avec l’esprit très perspicace sur bien des points, raisonnaient tout à côté comme s’ils étaient privés de la vue ou du goût, de l’un des sens qui avertissent. […] Il fut pris sur le fait par un observateur malin, impitoyable, qui se montra cette fois injuste, comme il le fut, et d’une manière moins pardonnable encore, dans le portrait qu’il traça de Fontenelle sous le nom de Cydias ; mais l’injustice et l’extrême sévérité n’empêchent pas un portrait d’être ressemblant : au lieu d’être peint en beau on est peint en laid, voilà tout, et chacun vous montre au doigt. […] C’est bien lui qui, lorsqu’il crut devoir passer de l’étude de la morale à celle de la politique, et qu’il eut acheté pour cela une charge de Cour (celle de premier aumônier de Madame, mère du duc d’Orléans), ne considéra cette espèce de sinécure auprès d’une princesse restée à demi protestante, que comme une petite loge à un beau spectacle, comme une entrée de faveur pour approcher plus aisément ceux qui gouvernaient, et se mit à les regarder, à les étudier à bout portant, bientôt à les aborder et à les harceler de questions, en attendant qu’il les poursuivît, sous la Régence, de ses projets et de ses conseils.
Il célébrait les fêtes de la Cour avec beaucoup de régularité, en faisant faire le feu roulant à ces troupes-là ; outre cela, chaque jour on relevait la garde, c’est-à-dire que de chaque table on prenait les poupées qui étaient censées monter la garde ; il assistait à cette parade en uniforme, bottes, éperons, hausse-col et écharpe ; ceux de ses domestiques qui étaient admis à ce bel exercice étaient obligés d’y assister de même. » Dans l’état d’ivresse qui lui était habituel, il lui arriva plus d’une fois, vers ce temps, d’entrer chez la grande-duchesse et de tirer l’épée dans sa chambre, soit pour la menacer, soit sous prétexte de la défendre contre de chimériques ennemis : sans s’effrayer, elle le renvoyait cuver son vin et dormir. […] Je viens de dire que je plaisais, par conséquent la moitié du chemin de la tentation était faite, et il est en pareil cas de l’essence de l’humaine nature que l’autre ne saurait manquer ; car tenter et être tenté sont fort proches l’un de l’autre, et malgré les plus belles maximes de morale imprimées dans la tête, quand la sensibilité s’en mêle, dès que celle-ci apparaît, on est déjà infiniment plus loin qu’on ne croit, et j’ignore encore jusqu’ici comment on peut l’empêcher de venir. […] Et cependant il reste toujours très-singulier et très-peu explicable que de ce Soltikoff « beau comme le jour » soit sorti Paul Ier, cet autre grotesque, d’une ressemblance si frappante avec Pierre III, espèce de Lapon camus, rabougri, maniaque, violent, puéril, une sorte de caporal prussien qui semble taillé et calqué sur le modèle de son père putatif et officiel.
Mais le génie, en tout, a devancé la méthode ; il a eu des aperçus, des lueurs perçantes : le hasard a présidé aux plus beaux ouvrages. […] On nous apprend à aimer le beau, l’agréable, à avoir de la gentillesse en vers latins, en compositions latines et françaises, à priser avant tout le style, le talent, l’esprit frappé en médailles, en beaux mots, ou jaillissant en traits vifs, la passion s’épanchant du cœur en accents brûlants ou se retraçant en de nobles peintures ; et l’on veut qu’au sortir de ce régime excitant, après des succès flatteurs pour l’amour-propre et qui nous ont mis en vue entre tous nos condisciples, après nous être longtemps nourris de la fleur des choses, nous allions, du jour au lendemain, renoncer à ces charmants exercices et nous confiner à des titres de Code, à des dossiers, à des discussions d’intérêt ou d’affaires, ou nous livrer à de longues études anatomiques, à l’autopsie cadavérique ou à l’autopsie physiologique (comme l’appelle l’illustre Claude Bernard) !
69 » Et voilà comment (et je n’ai indiqué qu’une seule branche, — qu’aurait-ce été si je les avais suivies et examinées toutes une à une), voilà comment de dédain en dédain, de négligence en négligence, quand on avait le plus beau jeu qu’ait jamais tenu en main Pouvoir public, on a fini par perdre la partie au premier tour, car on est au second ; voilà comment du mépris de toutes ces fractions de l’opinion, d’abord isolées entre elles, et de leur addition ensuite, de leur union subite qui s’est trouvée faite un jour contre vous, voilà comment il est sorti un total inattendu ; voilà comment l’opinion s’est réveillée, comment, à travers toutes les difficultés et les obstacles d’élections si tiraillées, si travaillées administrativement, elle s’est fait jour jusqu’à pouvoir vous atteindre et s’imposer à vous. […] Mais enfin, qu’il y ait eu un jour un gouvernement qui ait fait à temps et jusqu’au bout sa réforme complète, son acte réfléchi de bon sens, de justice et de liberté, ce sera un bel exemple et qui ne s’est pas encore vu jusqu’ici. […] Tout le monde a lu ce discours éloquent, rempli de grandes vues et animé d’un beau souffle.
Les Latins nous donneront Lucrèce, et surtout son admirable Cinquième Livre, quelques discours de Cicéron, son Traité des Devoirs et ses Lettres, quelques traités de Sénèque et ses Lettres à Lucilius, Tite-Live, Tacite, Virgile, les beaux épisodes de Lucain, quelques morceaux d’Ovide et de Catulle. […] On ne s’embarrassera pas de lire les prétendus critiques pour qui le sujet annoncé n’est qu’un prétexte à tirer le beau feu d’artifice de leurs phrases, ni ceux que leurs matériaux écrasent et qui ne savent point dominer leur érudition. […] Vous conclurez alors que Molière n’a voulu en somme que montrer combien le monde s’accommode peu de la parfaite vertu, qui le gêne, et dont il se venge par le ridicule, et combien aussi l’humaine faiblesse en est peu susceptible, puisque dans la plus belle âme elle s’exagère, s’aigrit et s’attache à des riens.
Si, un beau jour, hors de la vie, nous nous trouvons face à face avec lui, dans son monde, eh bien, Dieu n’est pas assez mauvais diable pour nous en vouloir de l’avoir nié, quand nous n’avions aucune raison de l’affirmer. […] La nature n’a souci que de la vie : voilà ce qui est beau, naturellement beau.
Nos passions ne sont tyranniques qu’autant que nous les carressons, c’est notre foiblesse qui fait leur amorce, c’est notre complaisance qui les déifie ; l’oisiveté les nourrit, les enflamme, l’amour du travail les enchaîne, les amortit ; la dissipation augmente leur délire, étend leur racines ; la raison affoiblit l’enchantement ; & les beaux rayons de la gloire viennent enfin par leur éclat faire pâlir ces feux mensongers, comme à l’approche d’un jour pur se dissipent les horreurs d’un incendie qui jettoit une lueur affreuse parmi les ténébres. […] Donnerai-je ici la liste de ces beaux génies persécutés par elle, & qui contens dans leur noble independance ont rejetté tout esclavage, & ont opposé une ame inébranlable aux coups de l’adversité. […] Quel plus doux emploi pour une mere que de verser dans les ames neuves & tendres de ses enfans les premieres impressions du beau & du vrai.
Et là-dessus on débitera des maximes qu’on croira bien vraies, parce qu’elles seront bien triviales ; et on citera le beau passage de Cicéron sur l’avantage des lettres, dans son oraison pour le poète Archias ; et on croira cet avantage prouvé sans réplique ; car que répondre à un passage de Cicéron ? […] Cette médiocrité contente et tranquille, qui nourrit, doucement l’amour-propre, saut effrayer celui de personne, qui permet de se croire quelque chose sans trop de vanité, et aux autres de nous compter pour rien sans trop d’injustice, cette médiocrité d’or, pour appliquer ici une belle expression d’Horace, fait jouir ceux qui l’ont en partage d’une félicité obscure, et par là même plus assurée et plus durable. […] J’ai passé mes plus belles années à épuiser cette vaste collection ; que m’a-t-elle appris ?
Autrefois il y avait un vieux proverbe qui disait : « À beau mentir qui vient de loin ! […] Supposez que le plus intéressant, le plus plein et le plus brillant sans contredit des voyageurs du xixe siècle, le marquis de Custine, n’eût pas pris pour une vocation la paresse trop aristocratique et l’inquiétude trop troublante de son esprit, et qu’il nous eût donné moins de Voyages, nous aurions des œuvres sévères, creusées et profondes comme ce génie dépensé sur les chemins était capable d’en produire, et cela ne vaudrait-il pas mieux que les quelques belles pages au-dessus desquelles surnage, déjà obscurément, son nom ? […] Or, l’une de ces convictions, et même la plus forte, doit être assurément de croire qu’il possède, lui, Maxime du Camp, l’expression plastique, et la couleur, et la technique de l’auteur d’Émaux et Camées, et qu’il joue avec la puissance de son maître avec tout ce style, difficile à manier, d’un Dictionnaire des Arts et Métiers qui fait le beau !
… Alfred de Musset, le poète, le patricien et le dandy, lui, y serait tombé, et même il y serait tombé en faisant le beau, comme le Gladiateur antique. […] … Au lieu d’être simplement exquis, il aurait pu être profond et superbe, s’il eût été seul dans ce livre, et si l’auteur, qui a des ongles assez beaux et assez bien taillés pour être des griffes, avait appuyé davantage, de ces ongles-là, sur son sujet. […] Elle rebrousse chemin et revient à l’autre rive… C’est une merveille que ces conversations qui font revirer de bord cette jeune âme, et cependant l’amant est digne de la séduction qu’il pratique ; car il est beau, spirituel, fort en femmes, expérimenté et épris, sincèrement amoureux, — toutes les puissances !
Même quand on conçoit la relativité dans le second sens, on la voit encore un peu dans le premier ; car on a beau dire que seul existe le mouvement réciproque de S et S′ par rapport l’un à l’autre, on n’étudie pas cette réciprocité sans adopter l’un des deux termes, S ou S′, comme « système de référence » : or, dès qu’un système a été ainsi immobilisé, il devient provisoirement un point de repère absolu, un succédané de l’éther. […] Que le personnage de Morus, « assis bien tranquille », prenne la résolution de courir à son tour, qu’il se lève et qu’il coure : on aura beau soutenir que sa course est un déplacement réciproque de son corps et du sol, qu’il se meut si notre pensée immobilise la Terre, mais que c’est la Terre qui se meut si nous décrétons immobile le coureur, jamais il n’acceptera le décret, toujours il déclarera qu’il perçoit immédiatement son acte, que cet acte est un fait, et que le fait est unilatéral. […] Car elle avait beau être restreinte, c’est-à-dire limitée au mouvement uniforme, elle n’en était pas moins radicale, en ce qu’elle faisait de la mobilité une réciprocité.
Ainsi, multipliant leur fortune par la misère des autres, ils étendaient leur insatiable avidité aux bornes de la terre, demandant, au nom et sous l’autorité du prince, tout ce qui flattait leurs désirs, sans qu’il fût jamais permis de refuser ; les villes les plus anciennes étaient dépouillées ; des monuments qui avaient échappé au ravage des siècles, étaient conduits à travers les mers pour embellir les palais destinés à des fils d’artisans, et leur faire des habitations plus belles que celles des rois : ces oppresseurs en avaient d’autres sous eux qui les imitaient ; l’esclave avait son ambition comme le maître ; à son exemple, il outrageait, tourmentait, dépouillait, chargeait de fers, et pour s’enrichir, reversait sur d’autres le despotisme que son maître exerçait sur lui. […] Il nous reste encore un panégyrique dans cette langue, prononcé en l’honneur de Julien ; on y trouve de la noblesse dans les sentiments, quelques belles idées, et des défauts de goût. […] On a beau dire, je ne puis croire que sa politique seule fît sa superstition.
Il a un beau-frère qui possède une très belle propriété à Neuilly. […] » En effet, c’est une très belle selle de chien. […] Il fait un beau ciel de printemps, plein d’un jeune soleil, et tout caquetant du gazouillement des oiseaux. […] Sur un tel thème, pas une belle phrase, ou simple, ou éloquente, ou indignée. […] Parmi ces femmes, il en est une singulièrement belle, belle de la beauté implacable d’une jeune Parque.
Ah la belle âme ! […] La séance devait me fournir une belle note. […] Et il travaillait un temps pour le prince, ornant alors ses travaux de bois, de belles et riches matières, et en faisant de somptueux objets d’art que collectionnait le prince, et dont il faisait cadeau aux daïmio, ses amis. […] Dans le livre des Maisons vertes, je voyais une planche représentant des femmes du Yoshiwara, en contemplation devant la lune, par une belle nuit d’été, et l’écrivain du livre affirmait que ces femmes avaient un très remarquable sentiment poétique. […] À Barrès succède près de moi, le jeune Rosny, qui me dit être content du livre écrit, dans le moment, en collaboration avec son frère, que le livre est passionné, renfermant de la belle passion pas dramatique.
Les savants de l’Europe ont beau élever la voix pour célébrer ces anciennes nations, ils ne peuvent presque en parler que d’imagination, puisqu’ils ne les connaissent que par des étrangers qui, les ayant connues trop tard, n’en ont parlé que par occasion, et ont laissé beaucoup d’obscurités dans les fragments disparates qu’ils ont recueillis de leur histoire. […] D’ailleurs la poésie en est si belle, si harmonieuse, le ton aimable et sublime de l’antiquité y domine si continuellement, les peintures des mœurs y sont si naïves et si particularisées qu’elles suffisent pour rendre témoignage de leur authenticité. […] “Les six vertus, dit Han-Tchi, sont comme l’âme du Chi-King ; aucun siècle n’a flétri les fleurs brillantes dont elles y sont couronnées, et aucun siècle n’en fera éclore d’aussi belles.” […] L’impression générale qu’on reçoit de ce portrait est celle de la vénération volontaire pour cette bonté belle et pour cette jeunesse mûre et pourtant éternellement jeune. […] C’est à cette époque de sa vie active que se rapportent ses plus belles maximes et ses plus belles institutions.
Le monde moderne en sera plus fort et plus beau, et plus conforme au plan de Dieu, qui n’a pas fait de l’homme un fragment, mais un ensemble. […] Lié avec Atticus, riche Romain, voluptueux d’esprit, qui n’estimait les choses que par le plaisir qu’elles donnent, Cicéron se proposait de recueillir son modique patrimoine en Grèce, et de s’établir à Athènes pour y passer obscurément sa vie dans l’étude du beau, dans la recherche du vrai, dans la jouissance de l’art. […] Cicéron ne s’émut pas de ces railleries, et continua à se perfectionner en silence par le seul amour du beau et du bien. […] Vers le même temps, quoiqu’il eût déjà passé la soixantième année de sa vie, il répudia sa première femme Térentia, coupable de l’avoir négligé pendant ses disgrâces, et il épousa une de ses pupilles, très jeune, très belle, très riche, qu’un père mourant lui avait confiée. […] C’est là qu’il écrivit, sans relâche et sans lassitude, ses plus belles œuvres littéraires.
Dans le premier poème ils exigeaient simplement des Dieux, en paiement de Walhall, le trésor de leurs ennemis, les Nibelungs : ici, au contraire, c’est Freia, la déesse de la jeunesse et de la beauté qu’ils ont voulu gagner, « pour qu’une femme vienne habiter chez nous autres, pauvres géants, une femme belle et douce ». […] Je crois même que cette préoccupation du poème spécial qu’il avait en vue est un défaut dans ce beau livre, que Wagner nomme son Testament98, et que l’Œuvre d’art de l’avenir, écrit à un moment où le Ring est moins au premier plan de ses pensées, lui est sous plusieurs rapports supérieur. […] C’est le plus beau document que nous possédions sur l’auteur de l’Anneau du Niebelung. […] Ceux que la vérité seule passionne, et qui entourent les belles œuvres d’un respect religieux, ceux-là sont indifférents aux dates et aux individus. […] Les systématiques — discuteurs à froid, — les faux « emballés » — dont le fanatisme reste mesquin, — les charlatans aussi — que je ne mentionne ici qu’avec du rouge au visage pour eux — ceux enfin qui n’ont compris qu’à moitié et — de belles âmes, pourtant !
La maison est égayée par un enfant intelligent et beau, sur la figure duquel, se trouve, joliment mêlée, la ressemblance du père et de la mère. […] Et tout en humant l’eau odorante, il s’échappe à dire : « Au fait, je me suis procuré un beau morceau de jade ! […] Et la belle gravité de style que donne aux mouvements, aux attitudes, le danger du métier ! […] Cela ferait une assez belle image, dans un bouquin supérieur. […] Il a une si belle tête d’homme bon, d’apôtre scientifique.
La foule houleuse et de belle humeur témoignait bruyamment sa satisfaction du temps et du spectacle ; elle s’enquérait du nom des célébrités et des délégations de villes et de pays qui défilaient pour son plaisir ; elle admirait les monumentales couronnes de fleurs portées sur des chars ; elle applaudissait les fifres des sociétés de tir, déchirant les oreilles de leurs airs discordants ; elle saluait de rires ironiques Déroulède et son sérieux en redingote verte ; et pour mettre le comble à sa joie, il ne manquait que le blason des Benni-bouffe-toujours du cortège, — le lapin sauté et leur arme, — la colossale seringue de carton. […] La préface des Feuilles d’Automne, publiée en 1831, le montre hésitant, il avait noué des relations avec de jeunes et ardents républicains qui, pour l’attirer, le flattaient : ainsi la Biographie des contemporains de Rabbe, dit que « Hugo avait chanté les trois jours dans les plus beaux vers qu’ils avaient inspirés ». […] Il se signait dévotement devant la formule sacramentelle du romantisme : l’art pour l’art ; mais, ainsi que tous bourgeois ne songeant qu’à faire fortune, il consacrait son talent à flatter les goûts du public qui paie, et selon les circonstances il chantait la royauté ou la république, proclamait la liberté ou approuvait le bâillonnement de la presse ; et quand il était besoin d’éveiller l’attention publique il tirait des coups de pistolets : — le beau, c’est le laid est le plus bruyant de ses pétards. […] Victor Hugo a eu l’heureuse chance d’être beaucoup acheté, ce à quoi il tenait surtout, et d’être peu lu, il le sera de moins en moins, autrement il y aurait beau jour que le Siècle et Léo Taxil auraient été forcés de le laisser pour compte aux catholiques. […] Premier bourgeois. — Mettons en trois, car on exagère toujours, et c’est bien beau.
« Le cristal, l’émeraude ne sont rien auprès d’elle, ni les ornements les plus beaux. […] Mais il est beau de ne s’arrêter que devant Dieu, il est beau d’être égal à tout, excepté à celui qui ne saurait avoir d’égal. […] Cela serait beau, mais cela ne serait pas saint, car la volonté seule est sainte ; autrement le miroir qui réfléchit la lumière aurait autant de vertu que le feu qui la produit. […] L’humilité est le plus beau mot de Job et le plus saint mot de l’Évangile. […] Non, ce sont souvent des âmes très grandes et très altérées du beau idéal que leur grandeur et leur altération mêmes précipitent dans ces impiétés d’esprit.
Il avait beau dire : « J’aime toujours les lettres : elles m’ont fait plus de bien que je ne leur ai fait d’honneur », les lettres toutes seules ne lui suffisaient pas. […] Un jour Voltaire lui envoie le Jules César de Shakespeare et l’Héraclius de Calderon, à titre de farces ou de folies, pour le divertir et le mettre en belle humeur ; et Bernis répond par une lettre pleine de grâce et de sens : Notre secrétaire (celui de l’Académie) m’a envoyé l’Héraclius de Calderon, mon cher confrère, et je viens de lire le Jules César de Shakespeare : ces deux pièces m’ont fait grand plaisir comme servant à l’histoire de l’esprit humain et du goût particulier des nations. […] Il y a un bel endroit, et du côté de Bernis, dans cette correspondance. […] Il indique alors quelques ridicules du jour qui sont un sujet tout fait pour la moquerie : « Il est plaisant, dit-il, que l’orgueil s’élève à mesure que le siècle baisse : aujourd’hui presque tous les écrivains veulent être législateurs, fondateurs d’empires, et tous les gentilshommes veulent descendre des souverains. » Il finit surtout par un conseil que Voltaire a trop peu suivi, et qui, au lieu de cette ricanerie universelle à laquelle il s’abandonnait, aurait dû être le but idéal suprême du grand écrivain en ces années de sa vieillesse : Riez de tout cela et faites-nous rire, lui dit Bernis en lui développant son plan ; mais il est digne du plus beau génie de la France de terminer sa carrière littéraire par un ouvrage qui fasse aimer la vertu, l’ordre, la subordination, sans laquelle toute société est en trouble.
Je ne suis qu’en peine de retrouver de leurs vieilles thèses pour en achever un beau nombre, et puis j’aviserai après à ce que j’en dois faire, selon le dessein que j’en ai eu par ci-devant. […] Gui Patin est l’homme de ces colères ; il a des verves et des rages de parole tout à fait rabelaisiennes, mais sans rire ; il mord à belles dents et emporte la pièce. […] Notre doyen a aussi harangué en latin, en présence du plus beau monde de Paris. Enfin M. l’avocat général Talon donna ses conclusions par un plaidoyer de trois quarts d’heure, plein d’éloquence, de beaux passages bien triés et de bonnes raisons, et conclut que le Gazetier ni ses adhérents n’avaient nul droit de faire la médecine à Paris, de quelque université qu’ils fussent docteurs, s’ils n’étaient approuvés de notre faculté, ou des médecins du roi ou de quelque prince du sang, servant actuellement.
Investi de la sénatorerie de Caen dont le siège était à Alençon, Roederer s’y livra à l’étude du pays, et il fit un beau travail, un rapport sur l’état économique, moral et politique de ces provinces qui confinaient au foyer de la guerre civile et qui elles-mêmes en avaient été atteintes. […] Dès 1800 et vers les premières années de cette renaissance, quelques hommes de talent et de goût revinrent également au grand règne, mais par un sentiment prompt et vif d’admiration pour les chefs-d’œuvre, par l’adoption reconnue salutaire des doctrines, par l’attrait du beau langage et de l’éloquence ; les Fontanes, les Joubert, les Bausset obéirent à cet esprit et s’en firent les organes. Quand Roederer reviendra sous la Restauration à la belle littérature et à la société de Louis XIV, ce sera par un long détour et par un revers imprévu, en vertu d’une vue ingénieuse, fine, et moyennant tout un enchaînement d’idées ; il y reviendra à la manière de Fontenelle, non de Fontanes. […] Or, il crut remarquer que l’épouse chérie de Louis XII, Anne de Bretagne, avait fondé une école de politesse et de perfection pour le sexe : C’était, avait dit Brantôme, la plus digne et honorable reine qui eût été depuis la reine Blanche, mère du roi saint Louis… Sa cour était une fort belle école pour les dames, car elle les faisait bien nourrir et sagement, et toutes à son modèle se faisaient et se façonnaient très sages et vertueuses.
En un mot, la comtesse de Rochefort, tout ce beau monde des Forcalquier, peut-être Mme de Pompadour elle-même, qui était alors dans le premier éclat de son début, entreprirent le succès du livre de Duclos et le lui firent. […] Il était assez reçu autrefois que l’histoire devait être écrite en beau langage par quelque académicien, et qu’il fallait quelque abbé ou bénédictin de métier pour faire les recherches : on ménageait le bel esprit brillant et qu’on savait volontiers impatient de sa nature ; il ne venait qu’à la fin tout frais et tout reposé. […] Dans l’intervalle des phrases de Duclos que j’ai rapprochées, celui-ci a eu soin d’introduire un brillant éloge d’Agnès Sorel et un mot sur Jeanne d’Arc, qu’il appelle d’ailleurs une généreuse fille ; mais Agnès Sorel a tous les honneurs : Ce fut la maîtresse pour qui Charles eut la plus forte passion et qui fut la plus digne de son attachement : sa beauté singulière la fit nommer la belle Agnès… Rare exemple pour celles qui jouissent de la même faveur, elle aima Charles uniquement pour lui-même, et n’eut jamais d’autre objet dans sa conduite que la gloire de son amant et le bonheur de l’État. […] Louis XI, réfugié auprès du duc de Bourgogne, vit et habite à Gennep, que le duc lui a donné pour résidence, et qui était le plus beau pays de chasse qui fût dans la Flandre et le Brabant ; il y partage son temps entre la chasse, la promenade et la lecture.
Cette vivacité d’esprit dont je parle a cela de beau qu’elle éclaire ceux qu’elle touche, elle les pénètre d’évidence : on en aperçoit la sagesse et le vrai, d’une manière qui porte le caractère de ces deux choses, c’est-à-dire distincte ; elle ne fait point un plaisir imposteur et confus, comme celui que produit le feu de l’imagination ; on sait rendre raison du plaisir que l’on y trouve. […] Pourtant nous voilà bien avertis de l’idéal qu’il s’est choisi ; La Motte est pour lui le beau intellectuel, simple, majestueux, son Jupiter Olympien en littérature et son Homère : l’autre Homère, avec ses grands traits et ses vives images, n’est bon tout au plus qu’à débaucher les esprits. […] Sort-il du spectacle un jour de première représentation, il s’amuse à regarder passer le monde, les jolies femmes qui font les coquettes, les laides qui n’ont pas moins de prétention et qui trouvent moyen de faire concurrence aux jolies, les jeunes gens aussi, qui font les beaux ; il s’amuse à interpréter ce que signifient toutes ces mines qu’il voit à ces visages, ces grands airs et ces maintiens complaisants ; il leur fait tenir de petits discours intérieurs bien précieux, bien vaniteux, qu’il déduit par le menu : Ce petit discours que je fais tenir à nos jeunes gens, on le regardera, dit-il, comme une plaisanterie de ma part. […] qu’il naîtrait de beaux ouvrages, s’écrie-t-il, si la plupart des gens d’esprit qui en sont les juges tâtonnaient un peu avant de dire : Cela est mauvais ou Cela est bon !
Ainsi notre combat est une victoire, et la plus belle que nous puissions remporter, puisqu’elle assure la subsistance du peuple… » Ce n’était une victoire que dans ce sens-là : autrement la défaite, bien que des plus disputées, était trop réelle ; mais il s’agissait de maintenir le moral de la nation à la hauteur nécessaire. — Dans la Réponse qu’il fit à la dénonciation venue de Brest en mai 1795, et où on l’accusait d’en avoir imposé à la France dans son Rapport sur le combat du 13 prairial, Jean-Bon n’opposait sur ce point que deux mots dignes et nets qui sentent l’homme vrai, sûr de lui-même ; on ne devrait pas omettre non plus cette partie de la Réponse dans les pièces du procès. — Le petit recueil que nous réclamons, avec un résumé sensé et simple, sans exagération ni faveur, aurait pour avantage, toutes dépositions entendues, de clore le débat sur une question déjà bien avancée ; le fait de la glorieuse bataille du 1er juin et de la part honorable qu’y prit Jean-Bon se présenterait désormais aussi entouré d’explications et aussi appuyé de témoignages qu’un fait de guerre peut l’être32. […] En débarquant à Marseille, il trouva une tout autre France que celle qu’il avait laissée six ans auparavant : on était aux plus beaux jours du Consulat. […] C’était un beau spectacle que cette sortie et bien différente de la rentrée de l’escadre de Quiberon. — Point d’embarras ni de lenteur dans l’appareillement. […] Saint-André est sur ce beau vaisseau, mais s’il y a une affaire, il passera sur l’excellente frégate la Gentille, capitaine Canon, bon et brave b…, avec le général.
Mais la meilleure réponse que Jomini pût faire à toutes les récriminations exagérées et injustes, à tous les jugements prévenus dont il se sentait l’objet, c’était de continuer résolument ses grands travaux et de poursuivre, sans se laisser détourner, ses belles études militaires. […] Il aurait eu beau dire le contraire et faire le dédaigneux, il brûlait de reprendre la plume ; les doigts lui démangeaient, on peut l’affirmer. […] La Bruyère même eût été embarrassé de le définir exactement… (Et plus loin, après les entretiens d’Erfurt) : Je crus avoir jeté de la poudre aux yeux de mon rival de gloire et de puissance ; la suite me prouva qu’il avait été aussi fin que moi. » Napoléon, obligé de juger lui-même sa campagne de 1812 et de se condamner, se souvient à propos d’un beau mot de Montesquieu : « Les grandes entreprises lointaines périssent par la grandeur même des préparatifs qu’on fait pour en assurer la réussite. » Un trait fort juste sur Napoléon et qu’ont trop oublié ses détracteurs aussi bien que ses panégyristes, c’est que cette volonté de fer était souvent bien mobile comme celle de tous les joueurs passionnés, et qu’elle remettait souvent ses résolutions ultérieures les plus graves aux chances les plus fortuites. […] Voir sur la Marseillaise et le Chant du Départ ce qu’il dit tome II, page 146, — et aussi tome VI, page 214, un beau résumé de la campagne patriotique de 1794.
Chez elle, on a une jeune fille rêveuse, sentimentale, la Fille de l’exilé de la cabane du lac ; elle a un noble et bel amant, le jeune Smoloff ; c’est lui qu’elle souhaiterait pour guide dans son pèlerinage, mais on juge plus convenable de lui donner un missionnaire ; elle finit par épouser son amant. […] M. de Lamartine, dans l’une de ses Harmonies, a célébré avec attendrissement ce retour de M. de Maistre, à qui, durant l’absence, une alliance de famille l’avait uni : Salut au nom des cieux, des monts et des rivages Où s’écoulèrent tes beaux jours, Voyageur fatigué qui reviens sur nos plages Demander à les champs leurs antiques ombrages, A ton cœur ses premiers amours ! […] Il admire, comme on le peut penser, les ouvrages de son illustre frère, et, en toute tolérance, sans ombre de dogmatisme, il semble les adopter naturellement comme l’ordre d’idées le plus simple du monde ; il trouve que le plus beau livre du comte Joseph est celui de l’Église gallicane. […] Il l’a dans la sienne : simplicité, pureté, modestie, honneur ; bel exemple des antiques mœurs jusqu’au bout conservées dans un esprit gracieux et une âme sensible !
La science originale et perçante d’un Schlegel, la digression inépuisable et spirituellement rapide d’un Benjamin Constant, faisaient déjà un beau fonds, sans compter ces hôtes de chaque jour qui y passaient, et qui, sous la baguette magique de la Muse du lieu, y revêtaient toute leur fraîcheur, y rendaient toutes leurs étincelles. […] Or, cette époque des xive et xve siècles était précisément la plus riche en chroniques de toutes sortes, et déjà assez française pour qu’en changeant très-peu aux textes, on pût jouir de la saveur et de la naïveté : naïveté relative et d’autant mieux faite pour nous, qu’elle commençait à soupçonner le prix des belles paroles. […] Rien alors ne se fait sans eux, et les plus grands coups, ce sont souvent eux qui les donnent19. » Quoi qu’il en soit des vues nouvelles que ce coin de la question, tardivement démasqué, ne peut manquer d’introduire dans l’histoire finissante de la maison de Bourgogne, l’effet des beaux récits de Jean de Muller et de M. de Barante subsiste ; l’impression populaire d’alors y revit en traits magnifiques et solennels que le plus ou le moins de connaissance diplomatique ne saurait détruire. […] Arrivé d’hier de Versailles, tout plein des habitudes du bel air, il mettait au service de la cause, les jours de combat, la plus brillante valeur, après quoi il ne se souciait guère de rien de sage ; et, pour ne citer qu’un trait qui le peint, un jour, après ce fatal passage de la Loire, qu’il avait surtout conseillé pour se rapprocher de ses vassaux, ayant trouvé au château de Laval une ancienne bannière de famille, une bannière des La Trémouille, bleu et or, il imagina de la faire porter devant lui.
Elle est la femme accomplie, comparable aux plus beaux exemplaires que l’Italie ait offerts : une Isabelle de Gonzague n’a pas eu un plus riche développement. […] On sent des souffles d’Italie, dans l’Heptaméron issu du culte de Boccace, et les anciens sont de moitié avec l’Italie dans le platonisme, qui concourt, avec la théorie courtoise et la tendresse mystique, à former l’idéal amoureux de la reine, dans la mythologie qui ne séduit plus par l’absurdité merveilleuse des faits, mais par son beau naturalisme et par sa vérité pathétique, dans une aisance enfin de la pensée, du sentiment, de tout l’être, qui soulève, anime, illumine la raideur rebelle des formes surannées. […] … Sous bel ombre, en chambre et galeries Nous pourmenans, livres et railleries. […] Le fait est considérable, et ce premier apport de l’Espagne ne pouvait être passé sous silence : car Amadis ne fut pas seulement au temps de François Ier et de Henri II le code des belles manières et de l’honneur mondain, il ranima le roman idéaliste, et devint le point de départ d’une évolution qui nous conduit, par d’Urfé et Mlle de Scudéry, jusqu’à George Sand et à Feuillet.
Qui reconnaîtrait le beau passage, Os homini sublime dédit, etc., dans cette version Et neanmoins que tout aultre animal Jecte toujours son regard principal Encore bas, Dieu à l’homme a donné La face haulte, et luy a ordonné De regarder l’excellence des cieux, Et d’eslever aux estoiles ses yeux. […] Or se mussoit Christine en un rocher Des Saxonnois, duquel saillit adonques Aussy entiere et belle que fut oncques. […] Quoi qu’il en soit, par quoi sommes-nous si près de Marot, dont trois siècles nous séparent, sinon par ce don charmant, le plus beau après le génie par l’esprit ? […] Cette belle, c’est Christine la Bergerette, la primitive Église, dont Marot fait l’histoire allégorique dans une ballade, opuscule ix.
Chacun sait qu’en France, durant ces trente-cinq années, tous les genres littéraires ont vu triompher avec éclat, sous le nom de réalisme ou de naturalisme, la tendance à subordonner le beau au vrai, l’art à la science. […] Il a beau être, à son origine et dans son essence, un élan spontané de ceux qui souffrent vers le mieux-être, vers une répartition plus équitable des jouissances matérielles et spirituelles entre tous les membres de la société ; il a beau être, à ce titre, une aspiration vers une cité future qui n’existe qu’en idée dans le cerveau d’un petit nombre de penseurs ; sous l’inspiration de Marx et de ses disciples, il change de figure ; il se pique de renoncer aux chimères, de ne relever que de la science ; il raille les visées humanitaires ; il affiche la haine du sentiment ; il se moque de la fraternité et autres « fariboles » ; il met tout son espoir dans la force, cette accoucheuse des sociétés en travail ; il bannit l’idéalisme de l’histoire comme de la formation de l’avenir ; il déclare que l’intérêt est le point de départ réel de tous nos actes. […] ― Fâcheuse subordination du beau à l’utile, ravalement de la littérature à de basses besognes, ont dit de leur côté les champions de l’art pour l’art, les élégants et dégoûtés partisans de ce que Victor Hugo appelle « l’art fainéant !
En mai 1667, le roi, avant de partir pour l’armée, avait envoyé un édit au Parlement, avec un préambule qu’on dit écrit de la belle plume de Pellisson ; il avait, par cet édit, reconnu une fille qu’il avait eue de Mme de La Vallière, et conféré à la mère le titre et les honneurs de duchesse. […] Qu’on juge de l’attente en pareille occasion : Cette belle et courageuse personne, écrit Mme de Sévigné, fit cette action comme toutes les autres de sa vie, d’une manière noble et charmante : elle était d’une beauté qui surprit tout le monde ; mais ce qui vous étonnera, c’est que le sermon de M. de Condom (Bossuet) ne fut point aussi divin qu’on l’espérait. […] Ceux qui ont écrit le récit de sa vie pénitente se sont plu à en citer des exemples singuliers, qui nous toucheraient trop peu aujourd’hui ; mais le principe qui les lui inspirait, et le but dont elle s’approchait par ces moyens, sont à jamais dignes de respect dans tous les temps, et de quelque point de vue qu’on les envisage : « J’espère, je crois et j’aime, disait-elle ; c’est à Dieu à perfectionner ses dons. » — « Espérer et croire, ce sont deux grandes vertus ; mais qui n’a point la charité n’a rien : il est comme une plante stérile que le soleil n’éclaire point. » Cette belle âme, réalisant désormais en elle les qualités de l’amour divin, se considéra jusqu’à la fin comme l’une des dernières devant Dieu : Je ne lui demande pas, disait-elle, de ces grands dons qui ne sont faits que pour les grandes âmes qu’il a mises dans le monde pour l’éclairer, je ne pourrais pas les contenir ; mais je lui demande qu’il incline mon cœur, selon sa parole, à rechercher sa loi, à la méditer nuit et jour. […] Je trouvai Mme de Montespan fort belle, surtout elle avait le teint admirable.
On a un bel article d’André Chénier, inséré dans le Journal de Paris (12 février), qui venge les mœurs, la langue et le goût, également outragés dans cette ridicule et révoltante préface de l’éditeur magistrat. […] L’orateur a beau être en cage, il se relève, il s’agite, et le cachot, tout sourd qu’il est, retentit. […] Après avoir tâché de faire vibrer chez son père la fibre noble et fière, il arrive au pathétique, et il trouve de beaux accents. […] Et ce même homme, vers ce même moment, après des mois de captivité, sentant la belle saison qui renaissait et qui le faisait, lui aussi, renaître en même temps que souffrir, jouissant enfin de quelque adoucissement qui consistait à se promener chaque jour depuis huit heures du matin jusqu’à neuf, écrivait à Sophie : « C’est bien court, mais je quitte sans regret le jardin, en pensant que je fais place à quelque malheureux compagnon de mon sort. » Ne sentez-vous pas dans cette parole simple l’homme humain et qui sait compatir, l’homme de Virgile et celui de Térence ?
Mon seul beau jour a dû finir, Finir dès son aurore ; Mais pour moi ce doux souvenir Est du bonheur encore : En fermant les yeux je revois L’enclos plein de lumière, La haie en fleur, le petit bois, La ferme et la fermière ! […] Il avait eu beau faire appel à toute la contrée de Brie et de Champagne, et s’écrier : Qu’il me vienne un public ! […] Les vautours en deviennent plus méchants de terreur, et s’entrebattent de plus belle. […] Tel nous apparaît Moreau avant la politique, avant la misère extrême, avant l’aigreur ; tel il se retrouva sans doute à l’heure expirante et aux approches du grand moment qui élève les belles âmes et les pacifie.
Dieu a beau être là, cela n’ôte rien, on l’a vu, à l’aigreur des critiques ; les plus grands esprits sont les plus contestés. […] Famien Strada a eu beau s’acharner sur Tacite, on le distingue peu de Fabien Spada, dit l’Épée de Bois, bouffon de Sigismond Auguste. Cecchi a eu beau déchirer Dante, on n’est pas sûr qu’il ne se nomme point Cecco. Green a eu beau colleter Shakespeare, on le confond avec Greene.
En un établissement abandonné où se baignèrent les belles d’il y a cinquante ans, au fond d’un vieux parc où les arbres montent tandis que s’affaissent les élégances humaines, je lis les Mémoires de Cora Pearlt. […] Rien ne berce mon cœur oppressé ni l’abri presque inespéré de ce manoir de Brestenbergw qui vous accueille avec ses fenêtres d’idylle et ses délicatesses de boiseries anciennes, ni au bout du lac cet antique fief prodigieux qui sommeille sur les eaux comme la Silhouette intacte d’un Géant-Chevalier ni tout près de moi la présence d’une amie attentive, née au pays des tulipes et qui portant au bout d’une longue tige un peu raide le délicieux calice de son visage, semble la sœur même de ces fleurs maladroites et belles. […] En 1912, Ludwig Rûbiner lance dans « Die Aktion » son fameux manifeste : « Le poète prend parti dans la politiquesac » Politique à ici la belle signification d’action spirituelle qui détruira un jour la néfaste mentalité officielle. […] Nous sommes animés d’une puissance de volonté qui nous permet d’espérer les plus belles destinées pour notre entreprise.
Voyez, sur la débilité de la langue écrite, Platon et saint Chrysostome, cités par M. de Maistre, et le beau commentaire que ce dernier a fait sur ces deux textes si remarquables. […] Michel-Ange, aveugle, cherchait à s’exalter en venant toucher le torse qu’il ne pouvait plus voir : qu’eût dit à ses mains inspirées le plus bel ouvrage d’orfèvrerie ? […] Maintenant, il faut l’avouer, il est trop tard pour revenir d’un préjugé qui nous fut si fatal ; qui trop longtemps a été classique, et qui peut-être, à cause de cela, a privé notre littérature de pouvoir s’enorgueillir d’une des plus belles productions de l’esprit humain, d’un poème épique. […] Ils ont mis des faits en beaux vers, et les ont isolés de toute tradition.
On assure qu’en allant choisir à ce moment le père Lacordaire, dont elle aurait pu se souvenir plus tôt, elle a songé à autre chose encore ; je veux dire qu’elle a désiré voir appliquer ce beau talent d’orateur à un sujet qui lui était particulièrement cher, au panégyrique d’un éminent académicien mort avant l’âge et enlevé dans la ferveur de ses œuvres. […] Mais il n’est jamais donné aux hommes de recommencer ainsi exactement leur vie ; le jeu serait trop aisé, la partie serait trop belle.
Je ris encore en pensant que j’ai passé, il y a quelque temps, deux heures avec vous sans vous rien dire de votre bel article sur Racine, et je venais d’en parler toute la matinée à quatre personnes de différentes opinions, à qui je disais ce que j’en pense. […] Victor Hugo, et à côte de lui dans la sphère littéraire, est peut-être la plus à même aujourd’hui de bien juger M. de Vigny, l’ayant vu de tout temps et connu très anciennement dès les plus belles années : « J’ai lu et relu votre Étude sur de Vigny.
Une fois entré sous le patronage des hommes distingués qui l’adoptèrent, l’idée ne lui vient jamais d’en sortir, de s’en détacher ; il ne se dit pas que leur ombre, un moment tutélaire, lui est funeste en se prolongeant, que, s’il n’y prend garde, toutes ces belles fleurs et ces palmes du lauréat ne produiront jamais leur fruit : Nunc altæ frondes et rami matris opacant, Crescentique adimunt fœtus uruntque ferentem53. […] De nobles débris du xviiie siècle étaient présents ; la salle n’avait jamais vu plus d’affluence en ses beaux jours ; évidemment il y avait une extrême attente.
La vie de campagne, la vie patriarcale de famille dans ces belles provinces qu’arrose la Saône, les hautes herbes qui ploient sous l’aquilon, les bois dont le murmure et l’ombre sont au maître, les entretiens des pâtres autour des feux allumés, ces rayons de soleil couchant sur les fléaux, les socs de charrue et les gerbes des chars, ces ombres allongées des moulins monotones, toutes ces douces géorgiques de notre France ont une beauté forte et reposée qui égale à nos yeux la splendeur blanchissante du Golfe de Gênes et les autres tableaux enchantés que l’Italie a inspirés au poète. […] La Bénédiction de Dieu dans la solitude unit à cette belle réalité de notre sol et de notre nature une sorte de religion salubre qui passe de tous les objets à l’âme, qui la pénètre et la rend saine.
Les premiers qui écrivent et parlent une belle langue, se laissent charmer par l’harmonie des phrases ; et Cicéron ni ses auditeurs ne sentaient pas encore le besoin d’un style plus fort d’idées. […] Lucain n’écrivit que pour ranimer par de grands souvenirs les cendres de la république ; et sa mort attesta le péril d’un si beau dessein.
Que l’on vous demande si vous aimez de même façon votre mère, votre chien, votre bel habit, et votre poète favori, vous direz non sans doute : mais quant à dire la différence de ces affections et de ces goûts, quant à en distinguer la nuance et la portée, vous en seriez bien empêché, n’est-il pas vrai ? […] Sans elle, on aura beau s’abreuver de toutes les rhétoriques, se consumer sur les sujets particuliers qui s’offriront, on n’arrivera jamais qu’à se souvenir et à amplifier ; on n’aura jamais une façon d’écrire naturelle et personnelle.
Il y a aujourd’hui un beau phénomène littéraire qui rappelle un magnifique moment du xvie siècle. […] On reprend le mot sceptique de Voltaire : « Quand on est aimé d’une jolie femme, on se tire toujours d’affaire », mais on épingle à côté cette pensée de Joubert qui va devenir l’évangile symboliste : « Les beaux vers sont ceux qui s’exhalent comme des sons ou des parfums. » La querelle des idéalistes et des réalistes s’y poursuit.
N’oublions pas pour la gloire du beau sexe les Institutions physiques de Mme. du Chatelet, en deux volumes in-4°. : ouvrage qui étonne par l’immensité des calculs, & par les connoissances de la femme ïllustre qui les a faits. […] Ces mémoires, avec quelques autres ouvrages qui y appartiennent, sont une des plus belles collections qui puissent entrer dans un cabinet.
… vous riez ; mais, à votre avis, la chaumière de Quintus n’est-elle pas plus belle aux yeux de l’homme qui a quelque tact de la vertu, que ces immenses galeries où l’infâme Verrès exposait les dépouilles de dix provinces ravagées ? […] Que celui qui a de l’or puisse avoir des palais, des jardins, des tableaux, des statues, des vins délicieux, de belles femmes ; mais qu’il ne puisse prétendre sans mérite à aucune fonction honorable dans l’état ; et vous aurez des citoyens éclairés, des sujets vertueux.
Il s’agissait de délivrer un tombeau, le tombeau de celui qui racheta la nature humaine, le seul tombeau qui n’aura rien à rendre à la fin des temps, pour me servir d’une belle expression de M. de Chateaubriand. […] Il faut bien savoir admirer tout ce qui peut développer dans l’homme des sentiments élevés, tout ce qui peut lui fournir l’occasion de beaux sacrifices ; mais il faut être juste aussi : et il n’est pas moins vrai que cette gloire, acquise en dernier lieu, au prix de tant de sang, n’a servi qu’aux vastes triomphes d’un aventurier.
Malheureusement (car c’est ce mot-là que Marmont fait toujours écrire) on ne sauve pas son honneur comme un drapeau qu’il est beau de rapporter en pièces. […] Le duc de Raguse aurait un fils, et son fils serait un héros, qu’il pourrait pleurer en lisant ces grandes et belles paroles en face de la tombe de son père, mais qu’à coup sûr il ne les reprocherait jamais à la sévérité de l’historien !
Monselet est plus rassis, et d’un sybaritisme qui n’est pas celui de l’ardent et beau soupeur aux cheveux bouclés de la Maison-d’Or. […] Ce tableau représente, en un verger sacré, Un vieux pâtre taillant une flûte, entouré D’un beau groupe d’enfants aux têtes attentives, Qui se pressent, muets, dans des poses naïves.
Il est difficile que dans les plus beaux temps de la Grèce, on ait rendu ces honneurs à un homme médiocre ; d’un autre côté, Aristote n’en parlait qu’avec mépris : Il est honteux de se taire, disait-il, lorsqu’Isocrate parle. […] Quoi qu’il en soit, jamais peut-être orateur, dans aucun pays, ne traita un si beau sujet.
Dans ces premiers temps où l’esprit humain n’avait point tiré de l’art d’écrire, de celui de raisonner et de compter, la subtilité qu’il a aujourd’hui, où la multitude de mots abstraits que nous voyons dans les langues modernes, ne lui avait pas encore donné ses habitudes d’abstraction continuelle, il occupait toutes ses forces dans l’exercice de ces trois belles facultés qu’il doit à son union avec le corps, et qui toutes trois sont relatives à la première opération de l’esprit, l’invention ; il fallait trouver avant de juger, la topique devait précéder la critique, ainsi que nous l’avons dit page 163. […] Enfin, pour goûter, pour juger des saveurs, ils disaient sapere, quoique ce mot s’appliquât proprement aux choses douées de saveur, et non au sens qui en juge ; c’est qu’ils cherchaient dans les choses la saveur qui leur était propre : de là cette belle métaphore de sapientia, la sagesse, laquelle tire des choses leur usage naturel, et non celui que leur suppose l’opinion.
. — Alors ce fut une grande merveille — que la salle à boire — pût résister aux deux taureaux de la guerre, — et qu’il ne croulât point à terre — le beau palais. […] Ils ont beau être brutaux, épais, bridés par des superstitions enfantines, capables, comme le roi Knut, d’acheter pour cent talents d’or le bras de saint Augustin ; ils ont l’idée de Dieu. […] Leur grandiose et leur sévérité les mettent à son niveau ; ils ne sont pas tentés, à l’exemple des peuples artistes et bavards, de remplacer la religion par le conte agréable ou beau. […] Mais cet esprit exclu du sentiment du beau n’en est que plus propre au sentiment du vrai. […] Ces Normands ont beau s’être altérés, francisés ; d’origine et par quelque reste d’eux-mêmes ils sont parents de leurs vaincus.
Puisque l’homme, en traversant des latitudes différentes, voit changer en même temps la terre et les astres, suivant la belle expression du poète élégiaque Garcilaso de la Vega, les voyageurs devaient, en pénétrant vers l’équateur, le long des deux côtes de l’Afrique et jusque par-delà la pointe méridionale du Nouveau Monde, contempler avec admiration le magnifique spectacle des constellations méridionales. […] La facilité avec laquelle, sous les tropiques et sous les latitudes très méridionales, on peut, dans les beaux jours, suivre distinctement le mouvement des comètes, est un argument en faveur de cette conjecture. » IV « L’agroupement en constellations nouvelles des étoiles situées près du pôle antarctique appartient au xviie siècle. […] Ces contrastes singuliers, l’éclat plus vif dont brille la Voie lactée dans plusieurs points de son développement, les nuées lumineuses et arrondies de Magellan qui décrivent isolément leur orbite, enfin ces taches sombres, dont la plus grande est si voisine d’une belle constellation, augmentent la variété du tableau de la nature et enchaînent l’attention des observateurs émus aux régions extrêmes qui bornent l’hémisphère méridional de la voûte céleste. […] X Quant à moi, — si j’avais, non pas le génie des découvertes que M. de Humboldt n’avait évidemment pas reçu du ciel, mais l’aptitude patiente et infatigable aux études physiques que cet homme, remarquable par sa volonté, a manifestée pendant quatre-vingt-douze ans d’existence ; Et si je possédais, comme lui, la notion exacte et complète de tous les phénomènes dont l’univers est composé, de manière à me faire à moi-même et à reproduire pour les autres le tableau de l’universelle création, je commencerais par une humble invocation à genoux à l’auteur caché de ce Cosmos à travers lequel il me permet, sinon de l’entrevoir, du moins de le conclure ; et une belle nuit d’été, soit sur les vagues illuminées de l’Océan qui me porte aux extrémités de l’univers, soit sur un sommet neigeux du Chimboraço, soit sur un rocher culminant des Alpes, je tomberais à ses pieds ; je laisserais sa grandeur, sa puissance, sa bonté, me pénétrer, m’échauffer, m’embraser, comme le charbon de feu qui ouvrit les lèvres du prophète, et je lui dirais en face de ses soleils, de ses étoiles, de ses nébuleuses et de ses comètes : « Toi qui es ! […] Sous la forme matière, cette œuvre est très grande et assez belle pour que ses investigateurs lui aient donné à faux le nom de science.
Ce serait de trouver un amoureux d’art, plein de goût et de discrétion, n’ayant en conséquence qu’une vague ressemblance avec feu Chauchard ; il adresserait, sous le voile de l’anonymat, un chèque copieux au littérateur, dénué de millions et de relations, qui se serait contenté d’écrire un beau livre, pour sa joie personnelle, et qui n’aurait employé aucuns moyens louches et malpropres afin de décrocher a timbale d’argent doré. […] Les pensions d’État, à vie, et insaisissables, seraient l’idéal de tout littérateur, comme de tout homme ; c’est du trop beau et bien plaisant socialisme impraticable. […] Cela fera de plus dignes hommes et de plus beaux livres que tous les prix Goncourt. […] Ces humbles choses vaudront mieux pour le maintien du beau travail que la somme retentissante et toute cette publicité d’affaire de foire. […] Mais voilà-t-il pas un bien beau résultat et dont les fondateurs et les distributeurs de prix peuvent se montrer fiers ?
La préface des Vies des hommes illustres (1550) est entièrement profane, sauf quelques belles paroles sur Dieu, que le catholicisme, renouvelé par la Réforme, a pu seul inspirer. […] Je viens d’indiquer un des plus beaux titres d’Amyot : c’est d’avoir fourni des matériaux à Montaigne, et contribué ainsi à former cet excellent esprit. […] La Fantaisie, beau mot grec francisé par l’école de Ronsard, caractérise le tour d’esprit imité des Grecs ; Montaigne et l’école qui s’inspire du tour d’esprit latin le remplacent par la Raison, la sagesse, le sapere d’Horace140, l’unique secret de l’art d’écrire, lequel ne fait qu’un avec l’art de conduire sa vie. […] Par l’effet de cette autre paresse d’intelligence dont se plaint aussi Montaigne, ou dont il se vante, une demi-vérité de Sénèque le secouait bien plus vivement qu’une belle scène de Térence ou un beau morceau de Cicéron.
C’est d’abord et surtout en lui donnant des leçons de beau langage. […] Ô l’admirable instrument que la science pour couper les ailes à l’imagination, pour tout flétrir en décomposant tout, pour tarir la source des émotions d’où jaillissent les beaux vers ! […] Quand on parlait à Victor Hugo de cette mort prochaine, il se mettait à rire et répondait122 : « Force gens de nos jours, volontiers agents de change et souvent notaires, disent et répètent : La poésie s’en va. — C’est à peu près comme si l’on disait : Il n’y a plus de roses ; le printemps a rendu l’âme : le soleil a perdu l’habitude de se lever ; parcourez tous les prés de la terre, vous n’y trouverez pas un papillon ; il n’y a plus de clair de lune et le rossignol ne chante plus, le lion ne rugit plus, l’aigle ne plane plus ; les Alpes et les Pyrénées s’en sont allées ; il n’y a plus de belles jeunes filles et de beaux jeunes hommes ; personne ne songe plus aux tombes ; la mère n’aime plus son enfant ; le ciel est éteint ; le cœur humain est mort. » Le fait est que l’imagination est en l’homme une faculté non moins essentielle et immortelle que la raison ; et c’est pourquoi la poésie non seulement garde à côté et au-delà de la science son royaume inviolable, mais aussi sait puiser dans la science-même des éléments de vie et d’inspiration. […] J’ai connu dans ma jeunesse un professeur de rhétorique qui se vantait à ses élèves d’ignorer les quatre règles élémentaires de l’arithmétique, et l’on sait le mot de ce géomètre qui disait après la représentation d’une belle tragédie : Qu’est-ce que cela prouve ?
Pour le dire en passant, la belle action du colonel gagnerait beaucoup à s’accomplir entièrement à ses propres frais. […] Une très belle scène, d’un comique amer, d’une étude savante et poignante, va réparer cet échec. […] Son invective est belle, elle est éloquente, elle a soulevé les applaudissements. […] Un chapitre défectueux vaut mieux qu’un excellent appendice ; une scène mal faite, mais sortie directement de l’idée première, est préférable à une belle scène greffée après coup. […] Il menait le train du luxe aristocratique, il jouait, à son Cercle, avec des partenaires qui portent les plus beaux noms de la France ; il siégeait aux conseils des grandes administrations avec les chefs de l’industrie et de la finance.
Au reste, on a discuté ce beau morceau, avec la dernière rigueur, dans la dernière édition de Despréaux, à cause de l’excellence de l’auteur ; mais les critiques qu’on en a faites, toutes bonnes qu’elles puissent être, ne tournent qu’à la gloire des talents admirables d’un illustre écrivain, qui, dès l’instant qu’il commença de donner ses tragédies au public, fit voir que Corneille, le grand Corneille, n’était plus le seul poète tragique en France. […] Ainsi, peut-être, pourrait-on conserver la vraisemblance et faire un beau jeu de théâtre ; mais alors, il faudrait éviter de confier ces rôles à ces acteurs présomptueux et ignorants, qui s’imaginent faire tout admirablement, et qui, quoiqu’ils ne sachent rien faire bien, ne prennent conseil que de leur insuffisance. […] Jamais un monologue ne fait un bel effet que quand on s’intéresse à celui qui parle, que quand ses passions, ses vertus, ses malheurs, ses faiblesses font dans son âme un combat si noble, si attachant, si animé, que vous lui pardonnez de se parler à soi-même. […] Voyez la belle scène du Cid, où Rodrigue vient demander la mort à son amante : N’épargnez point mon sang ; goûtez sans résistance La douceur de ma perte et de votre vengeance. […] Ce n’est que dans une grande passion, que dans l’excès d’un grand malheur ; qu’il est permis de ne pas répondre à ce que dit l’interlocuteur ; l’âme alors est toute remplie de ce qui l’occupe et non de ce qu’on lui dit : c’est alors qu’il est beau de ne pas répondre.
On retranche quelque chose au bien ; on brise l’Apollon, la Vénus de Milo, le poème du vrai, du bon et du beau, et voilà le mal ! […] Toujours Guelfe et toujours Gibeline, y dit-il, sans possibilité, tirée de l’analyse des faits, d’être autre chose, et nous avons cité avec assez d’applaudissement la belle formule : « Pape désarmé. […] Seulement ces monstres d’une goutte d’eau ont beau être affreux à dégoûter de leur étude et à nous faire briser le microscope à travers lequel on les voit, ils n’ont jamais pour le lecteur qu’un intérêt très secondaire, et on peut leur appliquer une observation qui est de M. […] Ferrari où cette puissance de caractérisation a le plus marqué son empreinte, est le chapitre sur Venise, complet dans son ensemble, comme un poème, et beau de détail, comme des vers. […] Il compose les séries et les décompose, et on reconnaît dans l’agilité de ce beau joueur d’échecs historiques, je ne sais quoi du phalanstérien des vieux jours.
Il a oublié que partout où le sentiment baisse, le paganisme, qui n’est pas de l’histoire et de l’archéologie, mais bel et bien de la nature humaine éternelle, le paganisme remontait ! […] Pauvre petit nerveux, bien élevé de ce temps, qui aime les belles choses agréables, et sa maîtresse par-dessus le marché, parce qu’elle est une de ces belles choses-là ; mais enfant toujours, et enfant gâté, révolté ou docile, apaisé ou furieux, et qui ne devient pas plus homme sous l’étreinte de la Peine, parce qu’il n’a ni une conviction, ni une idée sur laquelle il s’appuie pour lui résister ! […] Il eût été plus beau, et d’une vérité bien autrement fière, de montrer qu’on ne se démarie pas, et que le mariage est d’essence indissoluble, et plus fort que toutes les révoltes du cœur et ses imbéciles divorces ! […] Les pressentiments de Catherine, sa fuite épouvantée sur ce cheval ardent et méchant, qu’elle ne mène pas et qui la cahote sur sa selle ; l’étendue des neiges autour d’eux, le tocsin qui sonne dans la nuit, les torches qu’on voit courir à l’horizon, la chute de cette fille, qui n’est pas taillée pour être une amazone, mais une ménagère de Flandre, qui va peut-être mourir dans ce chemin, de fatigue, de froid et de peur, et qu’on ramasse et qu’on rejette sur sa selle, presque inanimée, au galop du cheval qui l’emporte, tout cela est haletant, effaré, sinistre, et, sans la grossièreté du misérable coquin auquel elle s’est donnée, serait peut-être tragique et beau.
Et, au sujet de ce bois exploité, j’aurais mille belles anecdotes qui me sont arrivées, soit avec Frosino de Panzano, soit avec d’autres qui voulaient m’acheter de cette coupe ; et Frosino, entre autres, en envoya prendre un certain nombre de cordes (carlate) sans m’en prévenir, et sur le prix il voulut me retenir 10 livres florentines que je devais, disait-il, depuis quatre ans, et qu’il m’avait gagnées au jeu de criccrac chez Antoine Guicciardini. […] J’irai avec la Barbera, belle chanteuse de Florence : préparez-nous, à moi et à la Barbera, une chambre chez ces moines. » Le pape, rougissant enfin de négliger un tel serviteur de ses intérêts, le charge de surveiller et d’achever les fortifications de Florence. […] Bientôt ces empereurs d’Orient, distraits de l’Italie ou déshérités de ses plus belles provinces, se bornent à posséder Ravenne, Mantoue, Padoue, Bologne, Parme, se maintiennent quelques années dans l’indépendance ; mais bientôt les Toscans eux-mêmes (Étrusques) sont subordonnés aux Lombards, barbares d’origine, italianisés de mœurs ; les papes, à qui Théodose cède entièrement Rome, par indifférence pour la possession de ces ruines, s’accroissant en importance par l’autorité spirituelle du pontificat sur ces barbares christianisés par leur chef, Rome devient capitale sacrée en face de Ravenne, capitale profane. […] Tandis que ceci se passe au nord de l’Italie, les Sarrasins occupent en maîtres tout le midi et le littoral de l’Italie depuis Gênes jusqu’aux Calabres ; Rome, incapable de défendre ces plus belles contrées de l’Italie méridionale, se console en parodiant l’ancienne république, maîtresse du monde entre les murs croulants de la ville de Romulus et des Césars. […] La dynastie bourbonienne rentre en Sicile ; Murat gouverne en héros et en administrateur ce beau royaume ; il y laisse des souvenirs de gloire et de bonté qui ne sont pas un parti, mais une estime.
Bossuet ne se révoltera pas contre le bel usage et contre l’Académie : il en suivra de son mieux les décisions, il se retranchera dans son âge mûr certaines familiarités, certaines trivialités ; il éclaircira et francisera quelque peu sa construction. […] Aussi les plus belles sont-elles celles où il parle des gens qu’il a connus et aimés, de Madame ou du prince de Condé. […] Les cinq ou six chapitres que Bossuet consacre à la philosophie de l’histoire ancienne sont vraiment beaux. […] Au travers de la controverse, l’histoire ressuscite le passé ; les hommes apparaissent : Calvin, Luther, Bucer vivent dans des portraits où l’on reconnaît la main d’un ennemi, mais d’un ennemi singulièrement clairvoyant ; il y a surtout un admirable livre où les angoisses, les incertitudes de Mélanchthon sont exposées, et qui est d’un bout à l’aulte une des plus belles études d’âmes qu’on ait faites. […] Il développait de belles périodes, avec une exubérance cicéronienne : le malheur était qu’une fois entré dans un tour, il n’en sortait plus, il le représentait avec insistance, jetant toutes ses phrases dans le moule qu’il avait d’abord choisi.
Offenbach, en faisant chanter à Mlle Schneider le Sabre de mon père, creva les belles phrases du romantisme et rétablit la réalité au théâtre. […] Histoire d’un moine Espagnol, beau garçon et éloquent orateur ; il s’énamoure d’une religieuse, la débauche ; subit la torture, est enfermé dans un in pace, évoque Satan, ressuscite des morts, parcourt la terre, comme le Juif errant, pourchassé par des diables. […] Il est des années que j’enlève des foires d’Allemagne de fort belles parties de littérature brute, que je fais dégrossir à Paris, dans un atelier de traduction. […] La sensible Malvina s’empresse d’imiter les hommes politiques ; elle oublie son serment et aime sir Edmond, beau, brave, mélancolique, etc… mais fort libertin ; il trompe sans scrupules plusieurs Malvinas simultanément […] Mais la nature qu’on avait sous la main, qu’on voyait tous les jours, n’était pas la vraie, la belle nature qui transportait les âmes ; il fallait pour cela une nature nouvelle, inconnue.
Elle a beau s’installer dans l’âme, elle a beau être devenue maîtresse de la maison, elle n’en reste pas moins une étrangère. […] Ici personnages et situations sont soudés ensemble, ou, pour mieux dire, les événements font partie intégrante des personnes, de sorte que si le drame nous racontait une autre histoire, on aurait beau conserver aux acteurs les mêmes noms, c’est à d’autres personnes que nous aurions véritablement affaire. […] Notre regard saisirait au passage, sculptés dans le marbre vivant du corps humain, des fragments de statue aussi beaux que ceux de la statuaire antique. […] Nous avons cette impression au sortir d’un beau drame. […] Nous aurons beau donner à ces sentiments des noms généraux ; dans une autre âme ils ne seront plus la même chose.
Pendant sa convalescence, en même temps qu’il se faisait lire quelque beau morceau de son histoire par Racine et Despréauxg, ou qu’il s’amusait à voir des médailles avec le père de La Chaise, le roi revoyait et corrigeait les constitutions de Saint-Cyr : Vos constitutions ont été examinées, écrivait Mme de Maintenon à Mme de Brinon qui les avait dressées ; on a retranché, ajouté et admiré. […] On continua d’y jouer quelquefois les belles tragédies faites pour la maison, mais on les joua entre soi, sans témoin du dehors et sans qu’aucun homme (fût-il un saint) y assistât. […] Mais ce qui est beau dans cette fatigue, c’est son zèle, son feu, son ardeur dernière d’utilité et de semence pour autrui.
Biot que l’Académie lui avait donné pour commissaire, et sous les yeux duquel il avait à répéter l’expérience décisive d’un de ses beaux mémoires, au moment où le résultat annoncé se produisit, M. […] Les premières fois que j’eus l’honneur de causer avec lui, je crus m’apercevoir que, si on le laissait faire, il aimait assez la méthode de Socrate, c’est-à-dire à vous supposer quelque idée fausse que souvent vous n’aviez pas, et à se donner le plaisir de la réfuter en se faisant naturellement la belle part, — un peu comme Béranger. […] Ce qui est vraiment beau pour un savant et ce qui mérite d’être envié en effet de tous ceux qui ont connu les plaisirs de l’esprit, c’est qu’il se maintint constamment frais et dispos d’intelligence, et qu’il vécut, presque jusqu’à la dernière heure de la vie de la pensée.
« Je connais combien je suis loin de ce que l’homme peut atteindre, et de ce que moi-même j’eusse désiré dans ces moments d’énergie où l’on ne sent que l’élévation du beau sans songer aux entraves terrestres. L’imagination voit un ciel d’une pureté parfaite ; mais quand l’œil veut en faire l’épreuve en quelque sorte, on découvre par degrés dans toutes ses parties ces vapeurs plus ou moins épaisses qui affaiblissent et décolorent les plus beaux jours, et qui les décolorent précisément afin que l’œil puisse trouver quelque repos. […] « Ou enfin mettrai-je au-dessus de tout la douce température, le beau ciel, l’aspect de la mer immense, et y aura-t-il quelque chose de solennel dans la paix de mes derniers jours ?
Ravenel)254 elle ne se nommait pas ainsi : son père s’appelait Cordier ; mais, ayant été obligé de s’expatrier pour quelque cause qu’on ne dit pas, il laissa en France sa femme jeune et belle qui reprit son nom de famille ( Delaunay ), et la fille, à son tour, prit le nom de sa mère qui lui est resté. […] Sa première éducation avait été solide, recherchée, brillante ; ce couvent de Saint-Louis à Rouen, où elle passa ses plus belles années, était « comme un petit État où elle régnoit souverainement. » Elle aussi, elle avait eu sa cour, sa petite cour de Sceaux dans ce couvent de Saint-Louis où M. […] Elle les observait à l’aise et aussi à ses dépens dans cette petite cour de Sceaux, absolument comme on observe de gros poissons dans un petit bassin : « Les Grands, écrivait-elle à Mme du Deffand, à force de s’étendre, deviennent si minces qu’on voit le jour au travers : c’est une belle étude de les contempler, je ne sais rien qui ramène plus à la philosophie. » Les scènes avec la duchesse de La Ferté et les aventures à Versailles sont d’un excellent comique et du meilleur goût, du plus franc, du plus simple ; cela va de pair avec la plaisanterie des Mémoires de Grammont.
Avec un grand fracas de formules hautaines, et de métaphores ambitieuses, à travers de prodigieuses ignorances et des audaces inouïes d’affirmation arbitraire, faisant défiler magnifiquement tous les âges, et se grisant de la couleur ou du son des noms propres, Hugo posait l’antithèse du beau et du laid, du sublime et du grotesque ; et, en les opposant, il les unissait dans l’art. […] Il démolissait les lois du goût, les règles des genres, leur division surtout et leur convention, tout ce qui s’opposait à la libre et complète représentation de la nature, saisie eu ce que chaque être possède de caractéristique, beau ou laid, il n’importe. […] Lefevre-Deuinier (1797-1857) se plaça aux côtés de Vigny et de Hugo par le recueil qui contenait le poème du Parricide (IS23) : bel exemple du naufrage complet d’une grande réputation littéraire.
Ce n’est point à dire que la science ne puisse pas être utile aussi bien que belle ; mais elle est belle avant d’être utile, ou même sans être utile. […] Sans doute tout n’est pas fait encore le monde oriental, malgré les beaux travaux de MM.
Tous renonçaient au lot des belles actions. C’est ici que La Fontaine abandonne son auteur pour approprier la morale de ce conte à l’âge et à l’état du prince auquel il est adressé ; mais l’auteur italien n’en use pas ainsi : il poursuit son projet ; et quand Ulysse, pour amener ses gens à l’état d’hommes, leur parle de belles actions et de gloire, voici ce que l’un d’eux lui répond : « Vraiment nous voilà bien. […] Ce vers, dont le tour est très-hardi, est fort beau pour exprimer la rapidité avec laquelle Louis XIV fit plusieurs conquêtes, celle de la Franche-Comté, par exemple ; le secret du roi avait été impénétrable jusqu’au moment où l’on se mit en campagne.
Monsieur Calliachy Candiot, mort vers l’année 1708, professeur en belles lettres dans l’université de Padoüe, prétend que l’art des pantomimes fut plus ancien qu’Auguste, mais il prouve mal son opinion. […] Il aura fallu que les premiers pantomimes, pour être goûtez par les spectateurs, s’en fissent entendre, et nos comédiens, pour être plus aisément entendus, auront commencé par executer en déclamation muette les plus belles scénes des pieces dramatiques les plus connuës. S’il se formoit des pantomimes à Paris, ne conçoit-on pas qu’ils débuteroient par executer dans leur jeu muet les belles scénes du Cid et des autres pieces les plus connuës, en choisissant celles où l’action demande que le comédien prenne plusieurs attitudes singulieres, qu’il fasse plusieurs gestes faciles à remarquer, et qu’on puisse reconnoître aisément quand on les voit faire sans entendre le discours dont ils sont l’accompagnement naturel.
Les plus beaux dévouements qui puissent honorer la nature humaine venaient consoler l’âme ; les pensées nobles et généreuses trouvaient un asile dans de grands caractères ; la religion et les croyances sociales recevaient d’illustres témoignages jusque sur les échafauds de la terreur ; de magnanimes protestations éclataient même dans les tribunes élevées par les crimes et les factions. […] Ne disons cependant point comme ce preux chevalier qui mérita si bien d’être roi du beau pays de France, ne disons point, Tout est perdu, fors l’honneur ; n’avons-nous pas sauvé plus que l’honneur, puisque nous avons sauvé, non point celles de nos institutions qui avaient vieilli, et qui étaient destinées à périr, mais celles d’où devaient naître nos institutions futures ; puisque nous avons sauvé ce qui toujours flatta le plus les nations, une existence qui se perd dans la nuit des temps ; une existence qui, pour nous, est antérieure à toutes les sociétés actuelles ; une existence de quatorze siècles ; puisque nous avons sauvé enfin notre magistrature sur l’Europe ? […] Le père de famille est revenu au milieu des siens ; il est revenu, envoyé par la Providence, pour consacrer nos droits, pour nous remettre en pleine possession de tant de belles prérogatives que nous étions menacés de perdre, à cause du mauvais usage que nous en avions fait ; dès lors nous avons pu jouir sans trouble d’une émancipation de fait, qui est devenue, par cette haute investiture, une émancipation légale.
Qu’on lise les belles pages de Volney, de Bernardin de Saint-Pierre et de M. de Chateaubriand, et qu’on voie si elles ne portent pas le caractère des lieux où elles furent écrites, et si, pour ainsi dire, le ciel qui les inspira ne s’y réfléchit pas tout entier. […] Denis nous transporte dans les bocages d’Otahiti, séjour charmant de la poésie et de la volupté, où le navigateur oublie l’Europe et la patrie ; soit qu’aux bords sacrés du Guige, il nous retrace les caractères des beaux lieux qu’il arrose, la plénitude de la végétation, des villes au sein des forêts, (les gazelles et les biches auprès du buffle et du tigre, l’éléphant sauvage et sa vaste domination sur les hôtes des bois, et ses guerres sanglantes contre des armées entières de chasseurs ; soit qu’accomplissant cette fois toute sa mission, il nous montre la littérature portugaise passant du Gange au Tage, et qu’il présente les fables des Indiens, et leurs riantes allégories, et leurs croyances si douces et si terribles tour à tour ; alors, en s’adressant aux poètes, il est poète lui-même ; sa pensée, singulièrement gracieuse, s’embellit encore d’une expression dont l’exquise pureté s’anime des couleurs orientales.
L’amour de la campagne, qui a inspiré tant de beaux vers, prend chez les Romains un autre caractère que chez les Grecs. […] C’est l’homme tel qu’on le voit, tel qu’il se montre ; ce sont les fortes couleurs, les beaux contrastes du vice et de la vertu ; mais on ne trouve dans l’histoire ancienne, ni l’analyse philosophique des impressions morales, ni l’observation approfondie des caractères, ni les symptômes inaperçus des affections de l’âme.
C’est un des plus beaux exemples d’acrobatie intellectuelle que je connaisse, un des plus suivis, des mieux exempts de lassitude ou de distraction. […] Ce signe est un de ceux auxquels on reconnaît les belles œuvres.
On a beau dire, pour l’excuser, qu’il falloit se prêter au goût de la Nation pour la galanterie ; l’Homme de génie ne reçoit des loix que du génie même, ou plutôt il se sert des ressources de son génie, pour tout rappeler aux vrais principes. […] Mithridate, Phédre, Britannicus, ne le cedent point aux plus beaux chef-d’œuvres de Corneille, & Athalie sera toujours placée par les Connoisseurs au dessus de Cinna.
. — Pourquoi vouloir parfaire un instrument avec lequel les Poètes ont doté l’Art des plus belles œuvres de génie ? […] ces vers — l’habitude venue — se martellent avec une facilité combien déplorable, encore aggravée par la richesse de la rime : sonorités de cuivres éclatantes et belles, mais monotones.
Dès que la cabale opposée l’eut pénétré, les amis de Pradon lui conseillèrent de le prévenir en traitant le même sujet, & de ne pas manquer une si belle occasion de triomphe. […] On eut l’indignité de substituer aux vers les plus heureux des vers plats & ridicules ; jalousie horrible, partage des ames noires & lâches ; mais jalousie renouvellée depuis en différentes occasions par des écrivains obscurs & forcenés ; jalousie semblable à celle de ces peintres scélérats, dont les mains odieuses défigurèrent les plus beaux morceaux de le Sueur.
Ce beau raisonnement, cette logique de l’enfance, il sympathise avec les rats. […] Nous faisons cas du beau, nous méprisons l’utile.
Cette belle créature, qui se croit invincible, en raison même de sa faiblesse, ne sait pas qu’un seul mot peut la subjuguer. […] Aussi Milton appelle-t-il la femme, fair defect of nature, « beau défaut de la nature. » La manière dont le poète anglais a conduit la chute de nos premiers pères mérite d’être examinée.
Quelque avantage que l’éloquence procurât à Rome, quelque lustre qu’une belle voix donne à l’éloquence, Ciceron ne veut pas qu’un orateur se rende l’esclave de sa voix, ainsi que le faisoient ces comédiens, me autore nemo… etc. […] Après avoir parlé du régime dont on usoit et des remedes dont on se servoit pour avoir la voix plus belle, il raconte que Neron après qu’il fut de retour de son voïage de Gréce, avoit tant d’attention à sa voix, qu’il faisoit beaucoup de remedes afin de la conserver, et que pour l’épargner il ne voulut plus, lorsqu’il faisoit une revûë des troupes, appeller, suivant l’usage des romains, chaque soldat par son nom.
Le fils de Racine avait beau être un sot, relativement à son père, tout le monde, est-ce piété filiale ? […] Or Mme Marie-Alexandre Dumas, qui n’a point de nom en religion, et qui n’oublie pas en public de prendre celui de son père, est Dumas et n’est que Dumas de pied en cap, depuis la pointe de ses beaux cheveux qu’elle n’a probablement pas coupés, jusqu’à la pointe de ses bottines, si elle en porte encore, au lieu de sandales !
Vaultier, né pour la rhétorique, sensible à ce bien dire si vain, dut être pour les phrases et les beaux parleurs de la Gironde, et il faillit payer de sa tête son goût pour eux. Il n’échappa au lieu commun de la mort du temps qu’en s’engageant dans la marine, et l’ironie qui gouverne le monde fit du professeur de beau langage, du doux Ionien de la rhétorique que nous avons connu, un matelot à bord du Brûle-Gueule… Je n’oserai jamais dire un rude matelot !
trop universitaire de la Sorbonne, pour vous enseigner, philosophe et artiste, et poëte, la sagesse et la beauté. » C’est un beau programme. […] La belle antiquité conçut avec raison l’immolation de l’animal destiné à être mangé comme un acte religieux. […] Le résultat du travail obscur de mille paysans, serfs d’une abbaye, était une abside gothique, dans une belle vallée, ombragée de hauts peupliers, où de pieuses personnes venaient six ou huit fois par jour chanter des psaumes à l’Éternel. Cela constituait une assez belle façon d’adorer, surtout quand, parmi les ascètes, il y avait un saint Bernard, un Rupert de Tuy, un abbé Joachim. […] Alors je me réfugie dans le passé, dans le xvie siècle, le xviie , dans l’antiquité ; tout ce qui a été beau, aimable, juste, noble me fait comme un paradis.
Qui ne connaît l’expression que Raphaël en a donnée dans une lettre célèbre à Baldassare Castiglione : Essendo carestia di belle donne, io mi servo di certa idea che mi viene nella mente ? […] Nous le comptons, avec raison, pour l’un de nos grands écrivains, et l’Institution chrétienne est un des beaux livres du xvie siècle. […] Mais quant à la forme, aucun livre n’est beau, dans sa sévérité monumentale, d’une beauté moins « esthétique », pour ainsi dire, ou plus logique que le sien. […] C’est ce que personne, avant Amyot, ne nous avait montré ; et si l’on s’étonnait là-dessus qu’un simple traducteur doive occuper une place aussi considérable dans l’histoire de la littérature de son temps, il suffirait de rappeler que ses « belles, riches et véritables peintures » ont éveillé la vocation de Michel de Montaigne. […] — La Pléiade a encore enseigné à la poésie, et même à la prose française, le « pouvoir intrinsèque » des mots, c’est-à-dire, qu’en toute langue, et indépendamment de ce qu’ils signifient, il y a de « beaux » mots et de vilains mots. — De quelques exagérations des romantiques à ce sujet [Cf.
Les œuvres sont belles ou elles ne le sont pas ; si elles le sont, elles ne le peuvent être qu’absolument ; si elles ne le sont pas, elles sont nulles et comme non avenues. […] Car Voltaire, en vérité, comme on dit, nous la donne belle là-dessus, et M. […] « Il y a sans doute des lois naturelles, mais cette belle raison corrompue a tout corrompu. […] Vous savez qu’elle n’est jamais si belle que quand elle s’anime, et jamais elle ne fut si animée. […] Tout ce que l’on peut dire de l’hôtel de Rambouillet, c’est que la nature, en dépit des beaux sentiments, n’y perdait pas ses droits.
voilà notre Xavier, s’écria le plus gros avec un bel accent bourguignon. […] Le beau uhlan ! […] nous l’avons échappé belle ! […] Curel avait traité le cas d’un homme qui s’aperçoit que sa femme aime, non pas lui, mais une « belle image ». […] Il risquait de se salir les mains, d’être précipité du marchepied qu’il voulait atteindre, La belle affaire !
Elles ne se sont jamais réunies chez les peuples modernes aussi complètement ni dans une aussi belle harmonie que chez les Grecs. […] Robin Hood et la belle Marianne, le lord de Misrule, le Cheval de bois, n’avaient point disparu. […] Rien n’est beau pour l’homme qui ne doive ses effets à certaines combinaisons dont notre jugement peut toujours nous donner le secret quand nos émotions en ont attesté la puissance. […] C’est au contraire par une impression unique que Shakespeare, du moins dans ses plus belles compositions, s’empare, dès le premier instant, de la pensée, et, par la pensée, de l’espace. […] De là résulte une impression fausse qui, plus d’une fois, a nui à l’effet des plus beaux ouvrages.
L’apostrophe à la Vertu qui termine cette pièce a droit d’être placée parmi les plus beaux mouvements de poésie lyrique. […] Mais il a eu beau faire : l’évidence a été plus forte que sa volonté, et les Chants du crépuscule ont frappé tous les lecteurs par leur confusion. […] Hugo a rencontré pour chacune de ses œuvres une attention unanime, un auditoire courageux, désintéressé, clairvoyant, tel enfin que pourrait le souhaiter le plus beau génie. […] C’est un beau roman qui tient dignement sa place près de Marianna. […] Quelques grandes pensées exprimées en beau langage, quelques sentiments généreux présentés avec clarté suffisent à défrayer, dans ces conditions, le triomphe d’une soirée.
On y rencontre de tems en tems de belles pensées, de solides réfléxions, & des descriptions fort vives. […] Cet Ecrivain a l’imagination belle, l’expression noble, une éloquence admirable. […] * Il ne se livre pas trop aux beaux endroits, & ne néglige jamais ceux qui ne le sont point. […] Il est vrai que c’est plûtôt un panégyrique qu’une histoire ; il ne montre son héros que par les beaux côtés, il l’excuse en tout & il en fait presque un saint. […] Cet historien, trop servile imitateur des anciens, leur a dérobé leurs meilleures réfléxions, & leurs plus beaux tours.
La critique a beau jeu d’exiger, sous toute espèce de forme d’imagination, des qualités supérieures, dont il lui serait fort incommode, souvent, de fournir le modèle après la théorie. […] Il y a les choses belles, vraies, instructives, émouvantes. […] C’est un choix excellent, aux yeux de quiconque sait le beau résultat de ces lectures populaires, que j’invoquais et auxquelles il s’est dévoué. […] En attendant, vous avez disqualifié ceux qui usurpent ce beau titre ; soyez-en loué et remercié, pour le Peuple et pour les Lettres. […] Et c’est parce que sa pièce renferme des beautés de premier ordre, qui sont de simples beautés dramatiques, par exemple les fiançailles de l’ingénieur devant le puits de la catastrophe, que son éloquent plaidoyer, par moment beau comme du Bossuet, arrive au public.
Retiré pendant neuf années dans la belle solitude de Vatolla, il suivit en liberté la route que lui traçait son génie, et se partagea entre la poésie, la philosophie et la jurisprudence. […] Il a fallu que j’employasse le prix d’un beau diamant, que je portais au doigt, à payer l’impression et la reliure. […] L’argument est très beau : Elle a enseigné par l’exemple de sa vie la douceur et l’austérité (il soave austero) de la vertu. […] Comme le mal que nous voyons dans les autres nous frappe vivement, et nous reste profondément gravé dans la mémoire, il devient une règle d’après laquelle nous jugeons toujours ce qu’ils peuvent faire ensuite de beau et de bon. […] Ajoutez à cette liste des ouvrages latins de Vico, un grand nombre de belles inscriptions.
J’ai eu beau lire, je n’ai point trouvé en eux les tyrans ruraux que dépeignent les déclamateurs de la Révolution. […] Un autre gentilhomme veuf passe ses jours à boire, vit dans le désordre avec ses servantes, et met les plus beaux titres de sa maison à couvrir des pots de beurre » […] Paris et la cour deviennent donc le séjour obligé de tout le beau monde. […] Faute de le connaître, ils l’oublient ; ils lisent la lettre de leur régisseur, puis aussitôt le tourbillon du beau monde les ressaisit, et, après un soupir donné à la détresse des pauvres, ils songent que cette année ils ne toucheront pas leurs rentes. — Ce n’est pas là une bonne disposition pour faire l’aumône. […] Très belle lettre de Joseph de Saintignon, abbé de Domèvre, général des chanoines réguliers de Saint-Sauveur et résident.
VI Qu’on lise attentivement aujourd’hui ce livre merveilleux dont Fontenelle disait : « Le plus beau livre écrit par la main des hommes, puisque l’Évangile n’en est pas ! […] Ce beau livre m’a toujours été si présent à l’esprit, le pasteur de campagne en a parlé deux fois dans mon poème pastoral de Jocelyn : Livre obscur et sans nom, humble vase d’argile, Mais rempli jusqu’au bord des sucs de l’Évangile, Où la sagesse humaine et divine, à longs flots, Dans le cœur attiré coulent en peu de mots ; Où chaque âme, à sa soif, vient, se penche et s’abreuve Des gouttes de sueur du Christ à son épreuve ; Trouve, selon le temps, ou la peine ou l’effort, Le lait de la mamelle ou le pain fort du fort, Et, sous la croix où l’homme ingrat le crucifie, Dans les larmes du Christ boit sa philosophie ! […] Quelle que soit notre pensée sur les dogmes, si diversement interprétés, du christianisme, il nous est impossible de ne pas reconnaître que, comme corps de philosophie pratique et de philosophie morale, le christianisme a franchement, énergiquement et saintement promulgué ou adopté la philosophie réelle, c’est-à-dire la philosophie de la douleur méritoire ou expiatoire ; et ajoutons ici la plus belle, car le sacrifice est plus beau que la jouissance, excepté aux yeux d’un épicurien. […] La nature cherche à se procurer ce qu’il y a de précieux et de beau, et elle a horreur de ce qui est vil et grossier ; mais la grâce se plaît aux choses simples et abjectes, ne dédaigne point ce qu’il y a de plus dur, et ne refuse pas de porter les habits les plus usés. […] Mais donnez à l’homme la conviction que se résigner humblement à la volonté de Dieu est plus beau que vouloir soi-même, et que la suprême sagesse est d’accepter ce que Dieu veut : voilà une sagesse, voilà une force nouvelle, voilà un progrès !
L’un disant : « C’est beau, cette architecture gothique, ça élève l’âme ! » Et aussitôt celui qui faisait le Garçon s’écriait tout haut, au milieu des passants : « Oui, c’est beau et la Saint-Barthélemy aussi, et les Dragonnades et l’Édit de Nantes, c’est beau aussi ! […] Nous causons ce soir de la vie antédiluvienne qu’on doit mener ici, une vie qui ne doit pas avoir plus de conscience d’elle-même que la conscience du sable dans le sablier… Et comme, en causant, nous tripotons quelques bibelots achetés ici, Saint-Victor nous conte à ce sujet le plus beau trait d’amour et de bibeloterie qui soit : Charles Blanc rapportant à sa maîtresse, de Copenhague à Paris, un service à thé de porcelaine de Saxe, — sur ses genoux. Au cimetière, parmi les cénotaphes chargés d’armoiries, une tombe d’Américaine portant ce beau cri de guerre de la foi : Resurgam. […] Cette gracieuse tête renversée par le sommeil sur l’oreiller du bras, l’ombre calme de ces yeux clos, le sourire de cette bouche d’où semble s’exhaler un souffle, la mollesse et la tendresse de ces joues détendues par le repos : c’est le tranquille et beau sommeil de l’humanité au sortir des mains du Créateur.
» Au milieu de l’égoïsme, de la crasserie générale de l’humanité, il y a par-ci, par-là, chez quelques individus de beaux mouvements de générosité. […] Rodin fait tourner sur les selles, les terres, grandeur nature, de ses six otages de Calais, modelés avec une puissante accusation réaliste, et les beaux trous dans la chair humaine, que Barye mettait dans les flancs de ses animaux. […] Je n’ai pu m’empêcher de lui dire, qu’il devrait écrire ce qu’il parlait, qu’il ferait quelque chose de très beau littérairement, et même de très utile, à la mémoire de son ami. […] C’est vraiment beau, le manque de jugement personnel du Parisien éclairé, asservi absolument au jugement du journal qu’il lit. […] En fait de portraits, un beau portrait de Napoléon au pont d’Arcole, par Gros, délavé dans cette huile couleur d’ambre, qu’affectionnait la peinture de Rubens, et le portrait de Denon par Prud’hon, d’un merveilleux modelage, et dont la pâleur rosée a quelque chose de la fleur d’un pastel.
Les bonnes pièces sont en France, et les belles salles en Italie. […] La disproportion d’âge, et les dangers auxquels une comédienne jeune et belle est exposée, rendirent ce mariage malheureux ; et Molière, tout philosophe qu’il était d’ailleurs, essuya dans son domestique les dégoûts, les amertumes, et quelquefois les ridicules, qu’il avait si souvent joué sur le théâtre. […] Molière fut le premier qui fit sentir le vrai, et par conséquent le beau. […] On ne songeait pas que si une tragédie est belle et intéressante, les entractes de musique doivent en devenir froids ; et que si les intermèdes sont brillants, l’oreille a peine à revenir tout d’un coup du charme de la musique à la simple déclamation. […] L’oreille est aussi plus flattée de l’harmonie des beaux vers tragiques, et de la magie étonnante du style de Racine, qu’elle ne peut l’être du langage propre à la comédie ; ce langage peut plaire, mais il ne peut jamais émouvoir, et l’on ne vient au spectacle que pour être ému.
Page si belle ; vision si profonde de misère et de bonté, si révélatrice du lien qui unit la bonté et la souffrance, et encore de cette vérité troublante et contradictoire, que la société est fondée sur l’injustice et que l’injustice est la condition de la vertu qui permet au monde de durer, — que M. […] … Rien, il n’y a rien de certain, excepté le néant de tout ce que je conçois et la majesté de quelque chose d’auguste que je ne conçois pas… » Oui, cela est beau, mais d’une beauté qui nous était déjà, si je ne m’abuse, on ne peut plus connue et familière. […] Et, de rencontrer chez eux des choses qui sont belles exactement de la même manière que les belles choses de chez nous, j’éprouve un plaisir que double la surprise et qu’attendrit la reconnaissance. […] Les jeunes gens sont moins sensibles à la belle forme latine, moins choqués de l’absence de cette forme chez les étrangers.
La volition n’avait point disparu, mais elle était sans efficacité… L’eau de rose dont ta tendresse avait humecté mes lèvres, au moment suprême, me donnait de douces idées de fleurs, — fleurs fantastiques infiniment plus belles qu’aucune de celles de la vieille terre…. […] Sur le pâle buste de Pallas, juste au-dessus de la porte de ma chambre ; Et ses yeux ont toute la semblance de ceux d’un démon qui rêve, Et la lumière de la lampe glissant sur lui, jette son ombre sur le sol ; Et mon âme hors de cette ombre qui gît flottante sur le sol, Ne sera soulevée, jamais plus, En ces artifices, les plus apparents, Poe se montre l’homme de toutes les ruses littéraires, habile à composer et à stiller d’une main sûre la délicate émotion qui transporte le lecteur hors de lui-même, et le charme en une vie étrangère plus intense et plus belle. […] Le Corbeau, Ulahme, Lénor sont les réquiems d’une belle morte. […] Il semble que l’artiste pour son écrit le plus bref ou le plus étendu, avant ressenti, puis envisagé un effet émotionnel à produire, s’étant calmé même de la sorte d’excitation purement intellectuelle que lui a causée l’invention des moyens, s’est mis à l’œuvre la tête aussi libre qu’un mathématicien notant une belle démonstration, ou un biologiste sur le point d’écrire un mémoire concluant. […] La continuelle malchance qui le poursuivit et l’accabla, qui le contraignit, homme de rêve noblement inapte à toute tâche mercantile, aux mesquines coquineries de la vie besoigneuse, lui interdisant de dépenser sa fougue en de belles débauches et son inconstance en des caprices somptueux, le fit ne remplir de sa carrière que la part idéale, incomplètement et au prix de quelles souffrances !
Les méchants propos de Versailles ne sont plus que des propos, et même en y faisant toute la part possible, en accordant un peu de vérité dans beaucoup de mensonge, les lignes et les traits essentiels de l’habile et hardi capitaine, ses belles parties de talent n’en sont pas entamées ; la gloire de Villars subsiste. […] Dès qu’on parle de Catinat, il y a à prendre garde : si le xviiie siècle, en le célébrant et en cherchant à préconiser en lui un de ses précurseurs, une des victimes du grand roi, a raisonné un peu à l’aveugle de ses talents militaires et les a exaltés académiquement, il ne faut pas tomber dans l’excès contraire ni trancher au détriment d’un homme qui eut ses jours brillants, dont l’expérience et la science étaient grandes, et dont le caractère moral soutenu, élevé, est devenu l’un des beaux exemplaires de la nature humaine. […] Sans compter les marques de satisfaction publique, la première fois qu’il reverra Villars, deux ou trois mois après, il lui dira ces belles paroles : Je suis autant Français que roi ; ce qui ternit la gloire de la nation m’est plus sensible que tout autre intérêt. […] Car nul cœur n’a senti plus au vif que Villars l’aiguillon de la louange, et nul aussi n’est plus affecté d’un reproche : Vous eûtes la bonté, écrit-il, de me mander que je m’étais fait maréchal de France la campagne précédente par de très grands services et de belles actions ; qu’il fallait songer à me faire connétable.
Son beau livre des Rapports de la Religion avec l’Ordre civil et politique, celui des Progrès de la Révolution, ses Lettres à l’Archevêque de Paris, ne détrompaient qu’imparfaitement, parce qu’il n’y avait que les personnes déjà au fait de l’homme qui les lussent avec réflexion et avidité. […] C’était à la campagne pendant les étés, chez un oncle qui avait une belle bibliothèque ; l’enfant s’y introduisait, enlevait les livres et les dévorait ; il ne se couchait qu’avec son volume. […] M. de La Mennais n’a fait qu’en ébaucher vigoureusement les grandes masses, et, comme ce n’est pas une perfection apparente qu’il cherche, il y a des côtés de ce beau livre qu’il n’achèvera jamais. […] Quant à ceux qui répètent que le style de M. de La Mennais manque d’onction, ils n’ont pas prononcé avec lui ces belles, ces humbles prières dont il interrompt par instants et confirme sa recherche ardente ; ils n’ont pas tenu compte de cette intime connaissance morale qui, sous l’austérité du précepte ou du blâme, décèle encore la tendresse secrète d’un cœur.
Faugère trouvait un portrait précieux, celui de Pascal, jeune et beau, dessiné au crayon rouge par la main fraternelle de Domat. […] On a beau dire après coup sur l’exactitude littéraire, il y avait ici une question de fidélité bien autrement grave et qui dominait tout, et cette fidélité fut respectée des premiers éditeurs. […] On peut le dire, le doute et la foi vivante, l’un passager, l’autre immuable, naquirent pour lui le même jour ; comme si Dieu, en laissant l’ennemi pratiquer des brèches dans les ouvrages extérieurs, avait voulu munir le cœur de la place d’un inexpugnable rempart. » Cette belle parole, qui exprime si bien un des mystères de la vie chrétienne intérieure, peut s’appliquer avec beaucoup de vraisemblance au vrai Pascal. […] Qu’arrive-t-il pourtant depuis qu’on s’est mis à faire le vestibule si spacieux et si beau ?
Rousseau a déclaré qu’il est bon, et le beau monde s’est jeté dans cette croyance avec toutes les exagérations de la mode et toute la sentimentalité des salons. […] À proprement parler, l’homme est fou, comme le corps est malade, par nature ; la santé de notre esprit, comme la santé de nos organes, n’est qu’une réussite fréquente et un bel accident. […] Ils ont beau la proclamer souveraine légitime, ils ne lui laissent jamais sur eux qu’une autorité passagère, et, sous son gouvernement nominal, ils sont les maîtres de la maison. […] On y verra tout le détail d’un de ces beaux rêves.
Le fameux passage des « pertes triomphantes à l’envi des victoires », des « quatre victoires sœurs, les plus belles que le soleil aye vu de ses yeux », est au chapitre des Cannibales : et les six ou sept pages les plus exquises que Montaigne ait écrites sur les anciens et sur la langue française, s’accrochent, Dieu sait comme, à une citation de Lucrèce, dans un chapitre intitulé Sur des Vers de Virgile, tout juste au milieu des plus scabreuses réflexions que Montaigne nous ait défilées. Nulle part il n’y a plus d’unité, une idée générale mieux suivie que dans les trois cents pages qui s’intitulent Apologie de Raimond Sebond : mais justement le sens de tous ces beaux discours est une absolue condamnation du dessein de ce théologien, et dans le détail le singulier défenseur donne à chaque moment des démentis à son client. […] Il a beau identifier volupté et vertu : il entend bien par vertu quelque chose de positif et de distinct, qui peut être volupté en lui, mais non pas forcément en tout autre. […] En fait de style, sa règle est déjà : rien n’est beau que le vrai : et c’est par la beauté des choses qu’il estime la beauté des mots.
Sa peinture de l’homme est juste, un peu banale ; c’est l’homme de Montaigne, de La Rochefoucauld et de Pascal : égoïste, léger, inconstant, toujours en deçà et au-delà du vrai, prenant pour raison sa fantaisie, son habitude et son intérêt, incapable d’un sentiment profond et durable, plus capable d’un grand effort d’un instant que d’une vertu moyenne et constante, allant aux belles actions par vanité, ou par fortune, soumis à la mode dans ses mœurs, dans ses idées comme dans son vêtement. […] Veut-il peindre un docteur, il nous montre l’homme « qui a un long manteau de soie ou de drap de Hollande, une ceinture large et placée haut sur l’estomac, le soulier de maroquin, la calotte de même, d’un beau grain, un collet bien fait et bien empesé, les cheveux arrangés et le teint vermeil » : ce costume, c’est le « caractère » ; un peintre qui ferait un portrait n’exprimerait pas autrement le moral. […] Son idéal, c’est un beau si naturel, si familier, si simple, que jamais il n’étonne en séduisant toujours : il est ravi du pittoresque et du pathétique de la poésie antique. […] Fénelon eut beau se défendre de toute intention satirique : spontanément, en suivant sa nature, il avait appris à son élève à haïr la politique de son aïeul ; et les principes de gouvernement dont il l’avait imbu, étaient justement le contraire de l’esprit qui animait Louis XIV.
Après ce beau début, ce ne furent plus à la Comédie-Française, à l’Odéon, à la Porte-Saint-Martin que leçons sur l’histoire de France : Dumas donna Christine, Charles VII chez ses grands vassaux ; enfin cette Tour de Nesle, la plus joyeusement fantastique évocation du moyen âge qu’on ait jamais faite. […] Aussi a-t-il beau dresser pédantesquement toute la bibliographie d’un sujet ; la couleur historique jure avec le thème poétique ; elle fait l’effet d’être plaquée ; elle s’écaille. […] Mais le style est solide dans son prosaïsme, la pensée concentrée, ramassée en couplets vigoureux, en vers d’une belle venue. […] On ne peut s’empêcher d’être dégoûté de voir tout acte de probité, de bonté, de dévouement, inévitablement payé en argent, d’une grosse dot ou d’un bel héritage.
On ne fera pas d’œuvres, ce sera une belle peine de moins, et l’on sera bien plus à l’aise pour pratiquer impunément le système D. […] Tout n’est pas dans le dénigrement, et, ce n’est pas se montrer un bien bel Aristarque que subordonner la critique, cette fonction si haute, à des rancunes athéistes, ou religieuses, au point de vue étroit d’une politique de secte. […] La mienne s’adresse à un critique avant tout artiste, averti, capable d’aimer et de sentir la beauté ( Beauté, mon beau souci ! […] Michel Puy Depuis quelques années, la presse, à l’exception des journaux à très gros tirage, fait à la littérature une assez belle place dans l’actualité.
Non que l’éloquence religieuse ne se soit enrichie de très beaux mouvements dans Massillon, et la philosophie morale de plus d’une maxime profonde dans Vauvenargues, mais on ne peut pas compter comme de véritables gains des écrits qui en font regretter de très supérieurs dans le même genre. […] Le Discours sur l’usage de la religion chez les Romains l’en approche ; les Lettres persanes l’en distraient sans l’en séparer, et dans les plus belles il semble déjà s’y essayer. […] Notre portrait n’y est pas beau ; c’est à qui ne veut pas s’y reconnaître. […] Les vérités nous ont défendus de la séduction des erreurs, et jusqu’au paradoxe de la vénalité des charges, que Montesquieu a eu le tort de défendre, ses belles idées sur la justice nous ont appris à le réfuter.
J’imagine, du reste, que l’étude scientifique et expérimentale de l’éducation des races sauvages deviendra un des plus beaux problèmes proposés à l’esprit européen, lorsque l’attention de l’Europe pourra un instant se détourner d’elle-même. […] Mais il s’agit de réaliser une forme plus ou moins belle de l’humanité ; pour cela, le sacrifice des individus est permis. […] Car le but de l’humanité n’est pas que les individus vivent à l’aise, mais que les formes belles et caractérisées soient représentées et que la perfection se fasse chair. […] Mais, tandis que cela sera impossible, il est important que la tradition de la belle vie humaine se maintienne dans l’élite.
C’est beau d’avoir des héros, mais c’est un grand luxe. […] Philippe II, le père, répond : C’est que, l’infant étant mort de sa belle mort, le cercueil préparé ne s’est point trouvé assez long, et l’on a dû couper la tête. […] Une question d’étiquette, une chasse, un gala, un grand lever, un cortège, le triomphe de Maximilien, la quantité de carrosses qu’avaient les dames suivant le roi au camp devant Mons, la nécessité d’avoir des vices conformes aux défauts de sa majesté, les horloges de Charles-Quint, les serrures de Louis XVI, le bouillon refusé par Louis XV à son sacre, annonce d’un bon roi ; et comme quoi le prince de Galles siège à la chambre des lords, non en qualité de prince de Galles, mais en qualité de duc de Cornouailles ; et comme quoi Auguste l’ivrogne a nommé sous-échanson de la couronne le prince Lubormirsky qui est staroste de Kasimirow ; et comme quoi Charles d’Espagne a donné le commandement de l’armée de Catalogne à Pimentel parce que les Pimentel ont la grandesse de Benavente depuis 1308 ; et comme quoi Frédéric de Brandebourg a octroyé un fief de quarante mille écus à un piqueur qui lui a fait tuer un beau cerf ; et comme quoi Louis Antoine, grand-maître de l’Ordre teutonique et prince palatin, mourut à Liège du déplaisir de n’avoir pu s’en faire élire évêque ; et comme quoi la princesse Borghèse, douairière de la Mirandole et de maison papale, épousa le prince de Cellamare, fils du duc de Giovenazzo ; et comme quoi mylord Seaton, qui est Montgomery, a suivi Jacques II en France ; et comme quoi l’empereur a ordonné au duc de Mantoue, qui est feudataire de l’Empire, de chasser de sa cour le marquis Amorati ; et comme quoi il y a toujours deux cardinaux Barberins vivants, etc., etc., tout cela est grosse affaire. […] Ascension définitive du bien, du juste et du beau au zénith de la civilisation.
Mignet s’écrie, en ne nous montrant que le beau côté et en revoyant tout à travers un prisme : Un esprit nouveau s’éleva de toutes parts. […] La recherche du vrai dans toutes les théories, le goût du beau sous toutes les formes, la jouissance du droit conquis par la raison publique et consacré par la loi commune, l’application rapide de toutes les découvertes utiles et l’échange des productions multipliées de l’univers, devinrent en philosophie, en littérature, en politique, en industrie, le travail, l’ambition, le partage de l’heureuse génération à laquelle appartenait M. […] Jouffroy pour les études philosophiques et pour l’observation intérieure, j’ai toujours cru qu’après son premier feu jeté, il eût été bon pour lui de se détourner de cette contemplation absolue et un peu stérile où il s’est consumé, et d’appliquer son beau talent à des matières qui l’eussent nourri et renouvelé.
Je rougis presque de hasarder ce doute littéraire à l’occasion d’une belle pensée morale. […] Elle n’était plus jeune, elle n’était plus belle, elle le disait sans doute, mais elle avait de beaux restes, elle le savait, elle en jouissait encore tout bas comme un vaincu généreux qui sait se faire respecter, même en se retirant.
Il avait des facultés naturelles très remarquable pour la poésie et le bel esprit : « C’était, a dit de lui l’exact et honnête abbé de Marolles, l’un des plus beaux naturels du monde pour la poésie, et de qui les bons sentiments de l’âme égalaient la gaieté de l’humeur. » Tallemant lui reproche une outrecuidance et une habitude de vanterie qui est un des caractères de la littérature de ce temps-là ; mais Saint-Amant ne paraît point avoir poussé ce défaut aussi loin qu’un Scudéry, et il n’en resta pas moins avant tout un bon vivant. […] que mes yeux sont contents De voir ces bois qui se trouvèrent À la nativité du temps, Et que tous les siècles révèrent, Être encore aussi beaux et verts Qu’aux premiers jours de l’univers ! […] Puis s’adressant pour finir à Bernières, à qui il dédie son ode : Tu vois dans cette poésie Pleine de licence et d’ardeur Ces beaux rayons de la splendeur Qui m’éclaire la fantaisie : Tantôt chagrin, tantôt joyeux, Selon que la fureur m’enflamme Et que l’objet s’offre à mes yeux, Les propos me naissent en l’âme, Sans contraindre la liberté Du démon qui m’a transporté.
Le duc de Bourgogne l’admira si fort qu’il en traduisit de beaux morceaux et les fit lire à Louis XIV, qui là-dessus reprit en gré l’abbé négociateur, depuis quelque temps tombé en disgrâce. […] « Il y avait longtemps qu’il travaillait en secret à connaître les maux de ce beau royaume et les remèdes qui les pouvaient guérir, lorsqu’il ne vit plus rien entre le trône et lui que ce qui restait de vie à un aïeul plus que septuagénaire. […] honneur au chimérique et décevant Fénelon, trop agréable au contraire, et qui se fait trop beau jeu dans son idéale Salente !
C’est là un beau défaut, convenons-en, au milieu des vices du xviiie siècle. […] Son cœur seul put être rapporté en France, Le major du régiment de Champagne, M. de Vignolles, appelé par le mourant, et qui avait reçu ses derniers soupirs, écrivait du camp près de Cologne, le 28 juin 1758 : « Nous venons de perdre le meilleur sujet du royaume et la plus belle âme ; il était doué de trop de vertus pour vivre dans un siècle aussi corrompu. […] Qu’il nous apparaisse de loin tel qu’il fut, qu’il demeure à nos yeux comme une belle image.
Après cette sublimité de vertu, qui fait trouver dans sa propre conscience le motif et le but de sa conduite, le plus beau des principes qui puisse mouvoir notre âme est l’amour de la gloire. […] Le digne et sincère amant de la gloire propose un beau traité au genre humain ; il lui dit : « Je consacrerai mes talents à vous servir ; ma passion dominante m’excitera sans cesse à faire jouir un plus grand nombre d’hommes des résultats heureux de mes efforts ; le pays, le peuple qui m’est inconnu aura des droits aux fruits de mes veilles ; tout ce qui pense est en relation avec moi ; et dégagé de la puissance environnante des sentiments individuels, c’est à l’étendue seule de mes bienfaits que je mesurerai mon bonheur ; pour prix de ce dévouement, je ne vous demande que de le célébrer, chargez la renommée d’acquitter votre reconnaissance. […] Les plus grandes découvertes ont été faites dans la retraite de l’homme savant, et les plus belles actions, inspirées par les mouvements spontanés de l’âme, se rencontrent souvent dans l’histoire d’une vie inconnue ; c’est donc seulement dans son rapport avec celui qui l’éprouve, qu’il faut considérer la passion de la gloire.
L’influence de l’Académie sur les lettres ne peut être qu’exécrable, eût-elle les meilleures intentions, et ce n’est pas le cas, car loin de chercher le beau, elle cherche le moral, qui est peut-être son contraire. […] J’ai toujours un peu de chagrin lorsqu’un bel écrivain a la petite faiblesse de désirer s’agréger à cette assemblée de sous-préfets, et quand c’est un ami je le lui dis franchement. […] Rosny aîné Il ne semble pas que l’Académie française soit en décadence : elle compte quelques-uns des plus beaux noms de la littérature.