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1004. (1868) Curiosités esthétiques « II. Salon de 1846 » pp. 77-198

En fait de moyens et procédés tirés des ouvrages eux-mêmes4, le public et l’artiste n’ont rien à apprendre ici. […] Du reste, ce n’est pas sans un vif plaisir que les purs enthousiastes d’Eugène Delacroix reliront un article du Constitutionnel de 1822, tiré du Salon de M.  […] Quant au ciel, il est bleu et blanc, chose étonnante chez Delacroix ; les nuages, délayés et tirés en sens divers comme une gaze qui se déchire, sont d’une grande légèreté ; et cette voûte d’azur, profonde et lumineuse, fuit à une prodigieuse hauteur. […] Cette année-ci, les tableaux de Delacroix sont l’Enlèvement de Rébecca, tiré d’Ivanhoé, les Adieux de Roméo et de Juliette, Marguerite à l’église, et un Lion, à l’aquarelle. […] Mme de Mirbel est le seul artiste qui sache se tirer d’affaire dans ce difficile problème du goût et de la vérité.

1005. (1909) Nos femmes de lettres pp. -238

Et ce n’est pas seulement, ce Matin normand, un frais tableau d’aube sur la mer, où ressuscitent à leur place les images qu’ordonna la Nature, c’est encore hommage ému d’une Française au sol natal d’où elle tira sa sève et sa vigueur. […] Je sais d’illustres Bretons qui en tirèrent argument pour exalter leur sol natal aux dépens du voisin, et poussèrent en plus d’une circonstance l’aveuglement filial jusqu’à se montrer iniques pour toute une catégorie de richesses naturelles qu’ils prétendaient rabaisser. C’est d’une parfaite correspondance entre sa nature et la réalité précise des choses vues que Mme Lucie Delarue tire ce premier élément de sincérité qui s’affirme en ses vers. […] Combien plus vive apparaîtra cette empreinte, combien plus marqué cet accent, si nous les rattachons au groupe central, qu’ils complètent sans doute, mais dont ils tirent également leur éclat. […] Comme un musicien, docile au génie du maître qu’il admire, plie les mouvements de son rythme au thème initial dont il tirera ses variations, ainsi notre jeune poétesse subordonne les accents de sa lyre à toutes les nuances que lui propose son modèle.

1006. (1856) À travers la critique. Figaro pp. 4-2

L’autel est garni de ses divinités, la porte du temple est tirée et verrouillée avec soin, et fussiez-vous un homme de génie, que, sans vouloir seulement l’entrebâiller, le grand prêtre du lieu vous répondrait brutalement de l’intérieur : « Passez votre chemin, mon paradis est fait !  […] Barroilhet, le baryton ridicule, et dont le profil maigre et tiré et la peau ont pris des tons de cire qui la font ressembler à une sainte de Ribeira, vous retrouverez trait pour trait la prima donna assise au balcon des Italiens, le soir de débuts de Cruvelli. […] Mais de tous les critiques, celui qui s’en est tiré avec le plus d’esprit et le plus de tact, c’est M.  […] Léon Gatayes, le plus débonnaire pourtant et le mieux élevé des critiques, non moins excédé que moi des trilles et des roucoulades de la partition, tire, en d’autres termes, exactement la même conclusion que Figaro. […] About : « Des mots tirés au hasard dans un bonnet d’Arlequin, des transitions de pain à cacheter et de colle à bouche…… » Son sac à la malice est vide, et il y fouille à chaque instant d’un air magistrat, comme s’il allait en tirer Géronte en personne. » Puisque tiré y a, je ne crois pas non plus que les deux phrases que je viens de citer soient venues toutes seules et sans le secours du forceps.

1007. (1927) Des romantiques à nous

L’autre, qui consiste à approvisionner de nouvelles parisiennes une revue anglaise et d’où il tire tout juste de quoi dîner. […] De la conjonction de cette pastorale métaphysique avec le sang répandu sur l’échafaud, il tire des effets de style, comme si l’une eût fait couler l’autre. […] C’étaient hommes de second ordre qui n’ont participé d’eux-mêmes ni aux conquêtes du savoir, ni aux créations de l’art d’où cette époque tire sa magnificence. […] Il est très frappant qu’ils aient tiré de ces sources un style à la hauteur des plus vastes entreprises. […] Un artiste que j’ai toujours entendu le démolir avec la dernière iniquité me disait : « Là, il faut tirer son chapeau.

1008. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Riposte à Taxile Delord » pp. 401-403

Jeune homme, qui vous destinez aux lettres et qui en attendez douceur et honneur, écoutez de la bouche de quelqu’un qui les connaît bien et qui les a pratiquées et aimées depuis près de cinquante ans, — écoutez et retenez en votre cœur ces conseils et cette moralité : Soyez appliqué dès votre tendre enfance aux livres et aux études ; passez votre tendre jeunesse dans l’etude encore et dans la mélancolie de rêves à demi-étouffés ; adonnez-vous dans la solitude à exprimer naïvement et hardiment ce que vous ressentez, et ambitionnez, au prix de votre douleur, de doter, s’il se peut, la poésie de votre pays de quelque veine intime, encore inexplorée ; — recherchez les plus nobles amitiés, et portez-y la bienveillance et la sincérité d’une âme ouverte et désireuse avant tout d’admirer ; versez dans la critique, émule et sœur de votre poésie, vos effusions, votre sympathie et le plus pur de votre substance ; louez, servez de votre parole, déjà écoutée, les talents nouveaux, d’abord si combattus, et ne commencez à vous retirer d’eux que du jour où eux-mêmes se retirent de la droite voie et manquent à leurs promesses ; restez alors modéré et réservé envers eux ; mettez une distance convenable, respectueuse, des années entières de réflexion et d’intervalle entre vos jeunes espérances et vos derniers regrets ; — variez sans cesse vos études, cultivez en tous sens votre intelligence, ne la cantonnez ni dans un parti, ni dans une école, ni dans une seule idée ; ouvrez-lui des jours sur tous les horizons ; portez-vous avec une sorte d’inquiétude amicale et généreuse vers tout ce qui est moins connu, vers tout ce qui mérite de l’être, et consacrez-y une curiosité exacte et en même temps émue ; — ayez de la conscience et du sérieux en tout ; évitez la vanterie et jusqu’à l’ombre du charlatanisme ; — devant les grands amours-propres tyranniques et dévorants qui croient que tout leur est dû, gardez constamment la seconde ligne : maintenez votre indépendance et votre humble dignité ; prêtez-vous pour un temps, s’il le faut, mais ne vous aliénez pas ; — n’approchez des personnages le plus en renom et le plus en crédit de votre temps, de ceux qui ont en main le pouvoir, qu’avec une modestie décente et digne ; acceptez peu, ne demandez rien ; tenez-vous à votre place, content d’observer ; mais payez quelquefois par les bonnes grâces de l’esprit ce que la fortune injuste vous a refusé de rendre sous une autre forme plus commode et moins délicate ; — voyez la société et ce qu’on appelle le monde pour en faire profiter les lettres ; cultivez les lettres en vue du monde, et en tâchant de leur donner le tour et l’agrément sans lequel elles ne vivent pas ; cédez parfois, si le cœur vous en dit, si une douce violence vous y oblige, à une complaisance aimable et de bon goût, jamais à l’intérêt ni au grossier trafic des amours-propres ; restez judicieux et clairvoyant jusque dans vos faiblesses, et si vous ne dites pas tout le vrai, n’écrivez jamais le faux ; — que la fatigue n’aille à aucun moment vous saisir ; ne vous croyez jamais arrivé ; à l’âge où d’autres se reposent, redoublez de courage et d’ardeur ; recommencez comme un débutant, courez une seconde et une troisième carrière, renouvelez-vous ; donnez au public, jour par jour, le résultat clair et manifeste de vos lectures, de vos comparaisons amassées, de vos jugements plus mûris et plus vrais ; faites que la vérité elle-même profite de la perte de vos illusions ; ne craignez pas de vous prodiguer ainsi et de livrer la mesure de votre force aux confrères du même métier qui savent le poids continu d’une œuvre fréquente, en apparence si légère… Et tout cela pour qu’approchant du terme, du but final où l’estime publique est la seule couronne, les jours où l’on parlera de vous avec le moins de passion et de haine, et où l’on se croira très clément et indulgent, dans une feuille tirée à des milliers d’exemplaires et qui s’adresse à tout un peuple de lecteurs qui ne vous ont pas lu, qui ne vous liront jamais, qui ne vous connaissent que de nom, vous serviez à défrayer les gaietés et, pour dire le mot, les gamineries d’un loustic libéral appelé Taxile Delord.

1009. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXVII » pp. 109-112

Les chevaux, effrayés des salves de canon qu’on tirait par honneur, et aussi du bruit des eaux de l’écluse, se sont emportés.

1010. (1874) Premiers lundis. Tome II « Sextus. Par Madame H. Allart. »

Tant de hautes facultés dissipées tour à tour dans un emploi mercenaire et dans d’indignes plaisirs, la confusion de tous les rangs et de toutes les conditions dans le même cercle d’intrigues sensuelles, cette familiarité délicate, ingénieuse encore dans sa licence, où vivent pêle-mêle, en confidents ou en rivaux, cardinal, prince, abbé, intendant, favori : c’était là un fonds de roman tout à fait hors des données vulgaires, et duquel, avec une âme sérieuse et tournée à l’histoire, on devait tirer de fortes leçons.

1011. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 100-104

Ce n'est pas qu'il ne soit né avec du talent : il est peu d'exemples d'une versification aussi énergique & aussi vigoureuse que la sienne ; mais sa verve ayant presque toujours choisi le vice pour sujet, son esprit doit en tirer peu de vanité : au contraire, son nom est devenu un opprobre aux yeux de quiconque conserve encore de la pudeur.

1012. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Préface » pp. -

Je refonds dans notre Journal le petit volume des Idées et sensations qui en étaient tirées, en les remettant à leur place et à leur date.

1013. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Autobiographie » pp. 169-176

Je refonds dans notre Journal le petit volume des Idées et Sensations qui en étaient tirées, en les remettant à leur place et à leur date.

1014. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Édouard Fleury »

On dirait des sceptiques de ce temps aux mœurs douces, qui ont l’horreur du sang et le dégoût de la fange, comme il sied à des naturels honnêtes et à des esprits cultivés, mais qui, ce sang montré dans sa vermeille couleur et cette fange dans son infamie, ont tout dit, à l’honneur de l’art et du style, et ne savent pas tirer de cette effroyable peinture, faite avec de véritables pourlècheries de pinceau, un enseignement ou une conclusion.

1015. (1914) Une année de critique

Émile Faguet tira de la veine inépuisable qu’il creuse sans trêve ni fatigue, trois ouvrages sur le citoyen de Genève. […] De la considération de l’ordre je tire la beauté de la vertu, et sa bonté de l’utilité commune. […] La nature, il y croit aussi, comme à la morale, comme à tout, mais à la façon de Rousseau « ce jean-fesse, dit le porte-parole d’Anatole France, qui prétendait tirer sa morale de la nature, et qui la tirait en réalité des principes de Calvin ». […] Marcel Boulenger a tiré un petit roman. […] Julien Benda excelle à tirer parti de la défaite.

1016. (1902) Le problème du style. Questions d’art, de littérature et de grammaire

Que de belles leçons de simplicité et de force il en eût tirées ! […] On ne voit pas qu’il en ait tiré grand chose de bon. […] Albalat en cite un passage, disant : « Buffon à tiré de beaux effets de la prose drapée et majestueuse. […] Michelet, je lis un document et j’en tire la moelle. […] Mais si l’on a quelque intelligence, on s’en tire, même sans gouvernail, même sans talent.

1017. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome III pp. -

Tout ce qu’il a écrit est tiré de son fond. […] Rousseau, qui ne veut pas qu’on tire cette conséquence. […] Il a cru se tirer d’embarras, en s’étendant sur l’utilité & les agrémens de l’un & de l’autre. […] On est étonné du parti que ce maître tire des doigts. […] Courayer : elle tira de la misère une fille de Milton.

1018. (1908) Promenades philosophiques. Deuxième série

Ils avouent qu’ils sont incapables, ayant découvert le feu, de tirer de cette découverte ses conséquences logiques. […] Elles sont capitales, surtout pour l’avenir, car cette civilisation elle-même n’en a tiré que des effets rudimentaires. […] On n’en saurait tirer aucun enseignement valable. […] Andrew Lang en a tiré parti dans Myth, Ritual and Religion. […] Il nous dit : arrange-toi avec la vie de chaque jour, de manière à en tirer tous les plaisirs qu’elle contient.

1019. (1884) Les problèmes de l’esthétique contemporaine pp. -257

Les couleurs mêmes empruntent parfois quelque attrait à des associations d’idées tirées du tact. […] Reste un dernier argument, tiré des conditions morales que l’art a besoin de rencontrer pour éclore. […] Peint-il un cheval frappé par son maître (Melancholia), c’est d’abord une image nette, isolée, aux contours tranchés ; notre pitié s’attache uniquement à ce cheval au poitrail en sang qui « tire, traîne, geint, tire encore et s’arrête », tandis que le fouet tourbillonne sur son front. […] Voici quelques lignes tirées des poésies de MM.  […] D’un cerveau ainsi façonné les idées partent l’une après l’autre, comme les coups de feu de jeunes recrues qui ne savent pas tirer encore.

1020. (1892) Un Hollandais à Paris en 1891 pp. -305

Ils produisent leurs vers à petit pas comptés : ils ne les tirent pas d’une source pleine et abondante. […] ————— Ce conte n’a ni sens, ni morale, ni logique, et cependant on peut en tirer une vague sagesse, comme on pourrait en tirer de la vie de Paul Verlaine, qui, en somme, ressemble un peu à cette légende. […] Mais ce fut pourtant le poète chez lui qui tira l’avantage principal du mouvement. […] Regardez bien ceci. » Il tira d’un monceau de paperasses une enveloppe bourrée. « Devinez ce que c’est ? […] Sud ; mais pour un bourgeois qu’il est, il s’en tire encore assez bien, je trouve.

1021. (1888) Impressions de théâtre. Deuxième série

Comment se tirer de là ? […] J’en tire une réflexion pratique. […] Il s’en est tiré, si je puis dire, par un tour de passe-passe. […] En tête du cortège, Pierrot, en habit noir, vient de se tirer un coup de pistolet (pourquoi ? […] Entre ces premiers gagnants on a tiré une seconde loterie, voilà tout.

1022. (1896) Impressions de théâtre. Neuvième série

Maintenant, tire la langue comme un chien ! […] Et c’est pourquoi ce solennel crétin de Maréchal est demeuré si vivant, et aussi ce grand moqueur de marquis d’Auberive, qui tire de cette histoire une des morales qu’elle comporte, et pareillement ce philosophe bohème de Giboyer, qui en tire une autre. […] Il tire son épée ; Michel tire la sienne ; Je père et le fils ferraillent un moment ; puis le père tombe, frappé à mort… Constantin met le feu au bûcher ; on voit au loin, dans la montagne, s’allumer d’autres signaux, et on entend retentir le canon d’alarme. […] Et nous avons donc l’idée que le gaillard s’en tirera. […] Je me dis, tout naturellement : — Tirons notre sujet de la personne même de M. 

1023. (1888) La vie littéraire. Première série pp. 1-363

Je n’en tire pas vanité. […] Voilà l’horoscope que je tire. […] Carrel tira le premier. […] Je tire ces exemples du livre de M.  […] On ne vit point aux champs sans tirer sur la plume ou le poil.

1024. (1914) En lisant Molière. L’homme et son temps, l’écrivain et son œuvre pp. 1-315

Plus tard il fit connaissance avec la littérature italienne et en a tiré quelque profit. […] On sait que Psyché est tirée du roman de La Fontaine donné l’année précédente, roman que La Fontaine avait tiré lui-même d’Apulée. […] Mais c’est peut-être un peu subtiliser et j’en reviens à dire simplement que de la méthode de travail de Molière on ne peut tirer aucune conclusion sur ses tendances philosophiques. […] Mais est-ce une raison que leur peu d’équité Pour vouloir se tirer de leur société ? […] Une Célimène s’en tirerait avec aisance ; Elmire s’en tire approximativement, très difficultueusement et avec des mouvements tournants qui sont longs et gauches : « Je vous ai refusé, mais avec regret, avec un regret qui s’est marqué à ce que j’ai supplié Damis de ne rien dire.

1025. (1884) Cours de philosophie fait au Lycée de Sens en 1883-1884

L’idée d’unité ne nous vient pas du monde extérieur : nous la tirons donc de nous-mêmes. […] Ce ne peut donc être que de nous-mêmes que nous tirons l’idée de l’identité. […] La personne au contraire a pour qualité propre de tirer son action d’elle-même. […] Elle ajoute au passé, et pour cela tire ses matériaux d’elle-même. […] Mais la forme est tirée de lui-même, et cette forme est l’unité.

1026. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXVIII » pp. 113-116

A propos de cette sénilité fleurie, paterne et tout à fait romaine, voici quelques notes tirées de mon voyage à Rome : le discours de ce cardinal me les a tout à fait remises en mémoire comme très-exactes : notes d’un voyageur en 1839.

1027. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Sarah Bernhardt » pp. 14-18

Sarah Bernhardt Mais si les poètes, à l’instigation de Sarah Bernhardt, se sont trop vite adaptés aux mœurs du théâtre il n’en est pas moins vrai qu’ils ont reçu d’elle, une secousse salutaire et qu’elle les a tirés de la torpeur de leur Tour d’ivoire où ils s’enfermaient trop volontiers, en leur rappelant qu’il y avait autour d’eux des oreilles attentives à conquérir.

1028. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 260-264

De là il tire le sujet de ses Tableaux, toujours rendus avec le coloris qui leur convient.

1029. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Archiloque, et Lycambe. » pp. 7-11

Le Murtola, furieux pour quelques vers qu’avoir faits contre lui le cavalier Marin, l’attend dans une rue de Turin, & lui tire de près un coup de pistolet, chargé de cinq bales.

1030. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre V. Caractère du vrai Dieu. »

On voit ici la conception du grand dans son principe : le reste n’en est qu’une ombre, comme l’intelligence créée n’est qu’une faible émanation de l’intelligence créatrice ; comme la fiction, quand elle est belle, n’est encore que l’ombre de la vérité, et tire tout son mérite d’un fond de ressemblance. » 66.

1031. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — VII. La fausse fiancée »

» Le massa tira son sabre du fourreau et menaça la fausse griote de l’égorger sur le champ si elle ne chantait pas la véritable chanson.

1032. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Épilogue »

Après celui-là, la matière que l’on croyait divisible à l’infini ne se divisera plus… À moins pourtant que dans ce monde du devenir d’Hegel et du Ça ira des Sans-Culottes, il n’entre dans la caboche humaine l’idée — très digne d’elle — qu’à l’aide de l’éducation et de la science, on peut tirer de la fange de leur animalité les chiens et les singes et les faire entrer avec nous — et au même titre que nous, — dans l’immense et imbécile farandole du Suffrage universel !

1033. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « César Cantu »

Quand un livre qui a la prétention de raconter et d’expliquer les cent dernières années qui viennent de s’empreindre si profondément sur l’Europe ne renferme que les connaissances les plus superficielles, et les moins sûres encore dans leur superficialité, et, de plus, quand c’est l’inconséquence, non pas seulement d’une tête faible, mais d’un distrait, qui se sert de ces connaissances pour en tirer de ces jugements sans cesse contredits et abolis les uns par les autres, la Critique peut passer outre avec moins de dédain que de pitié.

1034. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « Préface »

Parmi les artistes qui, sous toute forme et dans toute œuvre, arrivent à ce degré de profondeur et d’intensité qui est plus que la vie et qui en constitue l’idéal, il y a ceux qui ont tiré à eux toute cette magnifique couverture du nom de poètes et qui l’ont gardé pour eux seuls.

1035. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE LONGUEVILLE » pp. 322-357

Ce fut probablement un peu avant ; elle l’eut l’année même de son mariage, et sa beauté s’en tira sans trop d’échec ; l’éclipse fut des plus passagères. « Pour ce qui regarde Mme de Longueville, dit Retz, la petite vérole lui avoit ôté la première fleur de sa beauté ; mais elle lui en avoit laissé presque tout l’éclat, et cet éclat, joint à sa qualité, à son esprit et à sa langueur qui avoit en elle un charme particulier, la rendoit une des plus aimables personnes de France. » M. de Grasse se croyait plus fidèle à son caractère d’évêque en lui écrivant, dès qu’elle fut rétablie : « Je loue Dieu de ce qu’il a conservé votre vie… Pour votre visage, un autre que moi se réjouira avec plus de bienséance qu’il n’est pas gâté. […] Un jour, à Moulins, au milieu d’une lecture de piété, « il se tira (c’est elle-même qui parle) comme un rideau de devant les yeux de mon esprit : tous les charmes de la vérité rassemblés sous un seul objet se présentèrent devant moi ; la foi, qui avoit demeuré comme morte et ensevelie sous mes passions, se renouvela ; je me trouvai comme une personne qui, après un long sommeil où elle a songé qu’elle étoit grande, heureuse, honorée et estimée de tout le monde, se réveille tout d’un coup, et se trouve chargée de chaînes, percée de plaies, abattue de langueur et renfermée dans une prison obscure. » Après dix mois de séjour à Moulins, elle fut rejointe par le duc de Longueville, qui l’emmena avec toutes sortes d’égards dans son gouvernement de Normandie. […] Or. comme au lieu d’un habitant en sus des 200,000, il y a en tout près de 800,000 habitants dans Paris, vous voyez bien qu’il faut qu’il y ait beaucoup de têtes égales en nombre de cheveux, quoique je ne les aie pas comptés. — Mme de Longueville ne put jamais comprendre que l’on pût faire une démonstration de cette égalité de cheveux, et soutint toujours que la seule voie de la démontrer était de les compter. » Ceci nous prouve que Mme de Longueville, qui avait tant de rapports en délicatesses et démangeaisons d’esprit avec Mme de Sablé, était bien différente d’elle en ce point ; Mme de Sablé aimait et suivait les dissertations, et en était bon juge ; mais Arnauld n’aurait pas eu l’idée de faire lire la Logique de Port-Royal à Mme de Longueville, pour la divertir et tirer d’elle un avis compétent. […] Depuis que ce portrait est écrit, il m’est tombé entre les mains une agréable pièce à l’appui, que je tire d’un manuscrit janséniste (Bibliothèque du Roi, supplém. franç. 1485) : caractère de madame de Longueville.

1036. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre II. Le public en France. »

Légèrement, hardiment, il marche sur les pas de ses philosophes ; détaché des choses, il peut se livrer aux idées, à peu près comme un jeune homme de famille qui, sortant du collège, saisit un principe, tire les conséquences, et se fait un système, sans s’embarrasser des applications494. […] Pour eux, ils sont architectes et ils ont des principes, à savoir la raison, la nature, les droits de l’homme, principes simples et féconds que chacun peut entendre et dont il suffit de tirer les conséquences pour substituer aux informes bâtisses du passé l’édifice admirable de l’avenir. — La tentation est grande pour des mécontents, peu dévots, épicuriens et philanthropes. […] Jamais l’aristocratie n’a été si digne du pouvoir qu’au moment où elle allait le perdre ; les privilégiés, tirés de leur désœuvrement, redevenaient des hommes publics, et, rendus à leur fonction, revenaient à leur devoir. […] Elle s’empare de tous les cœurs français, sape par le pied tout ce qui n’était fondé que sur les anciennes opinions et tire sa force d’elle-même. » Non seulement les privilégiés font les avances, mais ils les font sans effort ; ils parlent la même langue que les gens du Tiers, ils sont disciples des mêmes philosophes, ils semblent partir des mêmes principes.

1037. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre III. Le Petit Séminaire Saint-Nicolas du Chardonnet (1880) »

Rien de plus simple cependant, et il est bien probable que, si un incident extérieur n’était venu me tirer brusquement du milieu honnête, mais borné, où s’était passée mon enfance, j’aurais conservé toute ma vie la foi qui m’était apparue d’abord comme l’expression absolue de la vérité. […] Cette paroisse, qui tirait son nom du champ de chardons bien connu des étudiants de l’Université de Paris au moyen âge, était alors le centre d’un quartier riche, habité surtout par la magistrature. […] Ce qu’il était, c’était un éveilleur incomparable ; pour tirer de chacun de ses élèves la somme de ce qu’il pouvait donner, personne ne l’égalait. […] Du pauvre petit provincial le plus lourdement engagé dans sa gaine, il avait tiré un esprit ouvert et actif.

1038. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 novembre 1886. »

Ce qui reste d’une fusée d’artifice après qu’on l’a tirée. […] 76 Ce n’était pas une petite affaire, il faut l’avouer, même pour un auditoire préparé et tiré sur le volet, comme celui de Munich, d’entendre ainsi trois actes pendant lesquels il n’y a pas le plus petit intervalle ou repos pour applaudir ou respirer, où tout s’enchaîne et se tient si bien que l’oreille ne perçoit aucun point de soudure en cette symphonie ininterrompue au-dessus de laquelle les personnages déclament et chantent leur partie avec une intensité d’expression superbe et sans jamais se plus répéter qu’on ne ferait dans un drame sans musique. […] Cet élan des deux amants l’un vers l’autre, leur amour effréné, leurs ressouvenir, leur hymne à la nuit qui les rassemble, les lointains avertissements de Brangœne, enfin leur suprême abandon d’où nulle prudence humaine ne les peut tirer : autant d’épisodes du drame, autant de secrets mouvements de l’âme et du cœur que le musicien-poète a su traduire et condenser en une page où les motifs caractéristiques s’enchaînent et se superposent de la façon la plus merveilleuse, où des mélodies sans cesse renaissantes viennent fleurir à la surface de cet océan symphonique. […] Mais tous ces passages me paraissent surpassés par l’émouvant retour d’une phrase tirée de l’Arioso de Fédès : « Ta pauvre mère », etc., dite cette fois en sanglotant par le cor anglais, et planant au-dessus d’un susurrement mystérieux en trémolo des cordes au moment où, vers la fin du second acte, le futur Roi-Prophète s’échappe pour écouter à la porte de la chambrette de sa mère, qui « dans son sommeil murmure une prière pour le fils ingrat ; une perle, fut-elle enfouie dans un fumier, vaut bien la peine qu’on la mette en lumière !

1039. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre I. Du comique en général »

Il faudra qu’elle tire de son propre fonds, par une opération naturelle, l’occasion sans cesse renouvelée de se manifester extérieurement. […] Elle tire à elle, elle voudrait convertir à sa propre inertie et faire dégénérer en automatisme l’activité toujours en éveil de ce principe supérieur. […] Mais, si l’imitation des gestes est déjà risible par elle-même, elle le deviendra plus encore quand elle s’appliquera à les infléchir, sans les déformer, dans le sens de quelque opération mécanique, celle de scier du bois, par exemple, ou de frapper sur une enclume, ou de tirer infatigablement un cordon de sonnette imaginaire. […] Nous le faisions pressentir au début de ce travail : il serait chimérique de vouloir tirer tous les effets comiques d’une seule formule simple.

1040. (1870) La science et la conscience « Chapitre IV : La métaphysique »

Renouvier, n’a été qu’une conjuration contre la liberté et contre l’existence même. » Montrer d’abord, par une esquisse sommaire des principales conceptions métaphysiques, qu’entre toute spéculation de ce genre et les enseignements de la psychologie, il y a contradiction ; puis essayer d’établir que cette contradiction ne saurait, si l’on ne peut la résoudre, infirmer le témoignage de la conscience ; faire voir enfin le parti que toute spéculation philosophique peut tirer des lumières de cette conscience pour l’ordre de problèmes qu’elle poursuit : tel est le triple objet de notre recherche dans cette troisième et dernière étude. […] Kant ne se borne point à cet argument à priori tiré de l’incompétence de la conscience ; il soumet la question de la liberté à la décisive épreuve de la méthode antinomique, ainsi qu’il le fait pour toutes les questions de l’ordre métaphysique. […] La logique la plus simple ne dit-elle pas qu’une déduction rigoureuse ne vaut véritablement qu’autant que le principe d’où l’on tire la conséquence est absolument vrai ? […] Quant à l’argument tiré de la contradiction antinomique, il n’est pas, à notre sens, d’antinomie moins fondée que celle qui oppose ici la loi de la nature à la loi de la raison.

1041. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Froissart. — II. (Fin.) » pp. 98-121

Son mode de questionner et de s’enquérir ne se voit jamais mieux que quand il tient un héraut d’armes, un écuyer, un de ces hommes secondaires qui ont été agents dans une entreprise ; c’est alors qu’il ne les lâche pas qu’il n’ait tiré d’eux tout ce qu’ils savent. […] Il est religieux et dévot, quoique mondain et bon vivant ; il s’agenouille devant une croix qu’il rencontre, et récite des Pater et des Ave pour les morts ; il félicite les chevaliers qu’il célèbre, et tire sujet de louange pour eux que Dieu leur ait accordé pleine connaissance et entière repentance à l’heure de la mort. […] Je ne sais si cette pensée d’un rapprochement funèbre est venue à l’esprit de Froissart ; elle semble comme négligemment touchée dans les paroles qui concluent le récit, et, qu’il l’ait eue ou non, il met le lecteur à même d’achever et de tirer toute la réflexion morale.

1042. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Nouvelle correspondance inédite de M. de Tocqueville (suite et fin.) »

Après février 1848, Tocqueville attristé, mais non découragé, accepta franchement l’état de choses nouveau et essaya d’en tirer le meilleur parti possible : il était pour la république modérée. […] Je voudrais bien que tu m’aidasses à y voir plus clair… » Les sceptiques pourraient bien avoir raison : cette philosophie des faits, tirée à distance, avec tant d’effort, et qui varie au gré de chaque cerveau, ne prouve guère, après tout, que la force de tête et la puissance de réflexion de celui qui la trouve. […] Sous cette république passagère qui fut forcée de tirer en juin sur les plus gros de ses bataillons et qui répudia bientôt ses chefs modérés dans la personne de Cavaignac, qu’arriva-t-il durant ces longs et interminables mois de réaction ?

1043. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres inédites de F. de la Mennais (suite et fin.)  »

L’abbé Brelucque et l’abbé Perrot ne partagent point, etc. » Et il entre dans le détail des personnes, tout prompt d’ailleurs, selon sa coutume, à tirer des conclusions excessives : « Quiconque voudra faire interdire le genre humain, ne manquera pas de témoins qui déposeront de sa démence. » Et c’est l’homme qui tout à l’heure va soutenir théoriquement dans un gros livre la doctrine du sens commun universel ! […] Dieu veuille en tirer sa gloire ! […] Il y aurait bien d’autres détails intéressants à en tirer pour la biographie du grand écrivain.

1044. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [IV] »

Il est « le premier auteur, en aucun temps, qui ait tiré des campagnes des plus grands généraux les vrais principes de guerre et qui les ait exprimés en clair et intelligible langage. » C’est le témoignage que lui rendent à leur tour les généraux américains de la dernière guerre, les tacticiens sortis de l’École de West-Point53. […] Il fit tout jusqu’à la fin pour obtenir que Schwartzenberg renonçât à temps à sa fausse manœuvre : il faut reconnaître, si les récits sont exacts, qu’il mit autant d’obstination (et ce n’est pas peu dire) à le tirer de ce cul-de-sac que, lui, généralissime, en mettait à s’y enfoncer. […] Le baron Fain, dans son Manuscrit de 1813, a rapporté (tome II, p. 237) une anecdote tirée des papiers anglais, qui met Moreau et Jomini en présence dès le 16 tu soir, une historiette piquante, mais controuvée.

1045. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres mêlées de Saint-Évremond »

Puissent toutes les antiquités avoir leur chronologie aussi bien démêlée et tirée à clair156 ! […] L’esquisse rapide qu’il fait d’une tragédie d’Alexandre telle qu’il l’aurait souhaitée, d’un Porus doué d’une grandeur d’âme « qui nous fût plus étrangère » ; ce tableau qu’il conçoit d’un appareil de guerre tout extraordinaire, monstrueux et merveilleux, et qui, dans ces contrées nouvelles, au passage de ces fleuves inconnus, l’Hydaspe et l’Indus, épouvantait les Macédoniens eux-mêmes ; ces idées qu’il laisse entrevoir, si propres à élever l’imagination et à tirer le poëte des habitudes doucereuses, nous prouvent combien Saint-Évremond aurait eu peu à faire pour être un critique éclairé et avancé. […] L’indifférence ne lui serait plus possible à partir du xviiie  siècle ; on le tirerait à soi ; il ne pourrait plus rester aujourd’hui dans cet état de neutralité et d’abstention indolente.

1046. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamennais — L'abbé de Lamennais en 1832 »

Les plus vifs, les plus passionnés tirent de cette succession mobile une sorte de plaisir passager, enivrant, qui réduit sur eux l’impression de chaque idée nouvelle au charme d’une sensation ; ils s’éprennent et se détachent tour à tour, ils épousent presque un système nouveau comme Aristippe une courtisane, sachant qu’ils s’en lasseront bientôt : c’est une manière d’épicuréisme sensuel et raffiné de l’intelligence. […] Déjà, plus jeune, il s’était amusé souvent, par pur instinct de controverse, à présenter des objections qu’il tirait de Rousseau ou même du Dictionnaire philosophique, et il voulait quelquefois qu’on lui répondît par écrit. […] Ce serait bien pis, si je n’avais qu’un petit pamphlet de quatre cent quatre-vingts pages in-8° ; il n’y aurait pas moyen de se tirer d’affaire.

1047. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « M. MIGNET. » pp. 225-256

Les deux amis visaient à la capitale, et ils s’étaient dit que le premier qui y mettrait le pied tirerait à lui l’autre. […] Les résultats essentiels qui se tirent de ce mâle et simple récit sont passés dans le fond de leurs opinions et presque de leurs dogmes : cela fait partie de cet héritage commun sur lequel on vit et qu’on ne discute plus, et je doute fort qu’à mesure qu’on ira plus avant dans les voies modernes, et que par conséquent on trouvera plus simple et plus nécessaire ce qui s’est accompli, on en vienne jamais à remettre en cause les articles, même rigides, de ce jugement historique et à les casser. […] Et, en général, on voit M.Mignet s’appliquer constamment à tirer l’histoire de la région des doutes et des accidents, de la sphère du hasard, et viser à l’élever jusqu’à la certitude d’une science.

1048. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Racine — I »

Le poëte est déjà tellement habitué au tracas de Paris, qu’il se considère à Chevreuse comme en exil ; il y date ses lettres de Babylone ; il raconte qu’il va au cabaret deux ou trois fois le jour, payant à chacun son pourboire, et qu’une dame l’a pris pour un sergent ; puis il ajoute : « Je lis des vers, je tâche d’en faire ; je lis les aventures de l’Arioste, et je ne suis pas moi-même sans aventures. » Tous ses amis de Port-Royal, sa tante, ses maîtres, le voyant ainsi en pleine voie de perdition, s’entendirent pour l’en tirer. […] Madame de Maintenon le tira de son inaction vers 1688, en lui demandant une pièce pour Saint-Cyr : de là le réveil en sursaut de Racine, à l’âge de quarante-huit ans ; une nouvelle et immense carrière parcourue en deux pas : Esther pour son coup d’essai, Athalie pour son coup de maître. […] Je reprendrai le Racine chrétien au complet dans mon ouvrage sur Port-Royal ; en attendant, je me borne à en tirer les remarques que voici : « Quelle erreur nous avons soutenue autrefois !

1049. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « L’abbé Prévost »

La dernière guerre de Louis XIV tirait à sa fin ; les emplois à l’armée étaient devenus très-rares ; mais il avait l’espérance, commune à une infinité de jeunes gens, d’être avancé aux premières occasions ; et, comme lui-même il l’a dit par la suite en réponse à ceux qui calomniaient cette partie de sa vie, « il n’étoit pas si disgracié du côté de la naissance et de la fortune qu’il ne pût espérer de faire heureusement son chemin. » Las pourtant d’attendre, et la guerre d’ailleurs finissant, il retourna à La Flèche chez les pères jésuites, qui le reçurent avec toutes sortes de caresses ; il en fut séduit au point de s’engager presque définitivement dans l’Ordre ; il composa, en l’honneur de saint François Xavier, une ode qui ne s’est pas conservée. […] C’est l’inconsolable douleur de cette perte qui lui fait dire avec un accent de conviction naïve bien aussi pénétrant que nos obscurités fastueuses : « Si les pleurs et les soupirs ne peuvent porter le nom de plaisir, il est vrai néanmoins qu’ils ont une douceur infinie pour une personne mortellement affligée97. » Jeté par ce désespoir au sein de la religion, dans l’abbaye de…., où il séjourne trois ans, le marquis en est tiré, à force de violences obligeantes, par M. le duc de…, qui le conjure de servir de guide à son fils dans divers voyages. […] Ce n’est partout que peintures et sentiments, mais des peintures vraies et des sentiments naturels99. » Une ou deux fois Prévost fut appelé sur le terrain de la défense personnelle, et il s’en tira toujours avec dignité et mesure.

1050. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Discours préliminaire » pp. 25-70

Il me reste à parler de l’objection qu’on peut tirer des ouvrages où l’on a peint avec talent les mœurs condamnables. […] Dans la seconde, j’examinerai l’état des lumières et de la littérature en France, depuis la révolution ; et je me permettrai des conjectures sur ce qu’elles devraient être et sur ce qu’elles seront, si nous possédons un jour la morale et la liberté républicaine ; et fondant mes conjectures sur mes observations, je rappellerai ce que j’aurai remarqué dans la première Partie sur l’influence qu’ont exercée telle religion, tel gouvernement ou telles mœurs, et j’en tirerai quelques conséquences pour l’avenir que je suppose. […] Ce système est devenu odieux à quelques personnes, par les conséquences atroces qu’on en a tirées à quelques époques désastreuses de la révolution ; mais rien cependant n’a moins de rapport avec de telles conséquences que ce noble système.

1051. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIIe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis »

« Là il s’occupait du soin d’améliorer ses terres, dont il tirait un revenu considérable ; mais ses plus heureux moments étaient ceux qu’il consacrait à l’étude des lettres et de la philosophie, ou au commerce et à la conversation des savants. […] En effet, mon cher Laurent, quoique vous ayez donné des preuves d’un mérite et d’une vertu qui semblent à peine appartenir à la nature humaine ; quoiqu’il n’y ait point d’entreprise, si importante qu’elle soit, dont on ne puisse espérer de voir triompher cette prudence et ce courage que vous avez développés dès vos plus jeunes années ; et quoique les mouvements de l’ambition, et l’abondance de ces dons de la fortune qui ont si souvent corrompu des hommes dont les talents, l’expérience et les vertus donnaient les plus hautes espérances, n’aient jamais pu vous faire sortir des bornes de la justice et de la modération, vous pouvez néanmoins, pour vous-même et pour cet État dont les rênes vont bientôt vous être confiées, ou plutôt dont la prospérité repose déjà en grande partie sur vos soins, tirer de grands avantages de vos méditations solitaires ou des entretiens de vos amis sur l’origine et la nature de l’esprit humain : car il n’y a point d’homme qui soit en état de conduire avec succès les affaires publiques, s’il n’a commencé par se faire des habitudes vertueuses, et par enrichir son esprit des connaissances propres à lui faire distinguer avec certitude pour quel but il a été appelé à la vie, ce qu’il doit aux autres et ce qu’il se doit à lui-même. » Alors commença entre Laurent et Alberti une conversation dans laquelle ce dernier s’attache à montrer que, comme la raison est le caractère distinctif de l’homme, l’unique moyen pour lui d’atteindre à la perfection de sa nature, c’est de cultiver son esprit, en faisant entièrement abstraction des intérêts et des affaires purement mondaines. […] Cette circonstance singulière, comparée avec la preuve que l’on peut tirer d’une des épigrammes de Politien, nous autorise à croire que cette dame était la maîtresse de Julien, la belle Simonetta, dont nous avons déjà parlé.

1052. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre II. Littérature dramatique — Chapitre II. Le théâtre du quinzième siècle (1450-1550) »

L’Enfer est une large gueule de dragon, béante, d’où les démons, effroyables et grotesques, sortent en hurlant et gesticulant : des flammes s’en échappent : les damnés crient : il se fait dans les profondeurs invisibles un tapage effroyable ; les tambours et les tonnerres font rage, et l’on tire même le canon, pour les grands effets. […] Le principe générateur de la sottie pouvait être fécond : mais il eût fallu plus que le génie dramatique, il eût fallu le génie de la poésie symbolique et lyrique pour en tirer des chefs-d’œuvre. […] Si l’on songe que de ces 150 pièces, 61 nous sont connues par le recueil imprimé du British Muséum, et 72 par le manuscrit La Vallière, que les premières semblent s’être jouées dans la région lyonnaise, et les autres en Normandie, qu’enfin la plupart de ces pièces ne sont pas, dans leur forme conservée, antérieures au xvie siècle, on concevra qu’il n’y a guère d’induction à tirer, de l’ensemble des œuvres que nous avons, sur révolution du théâtre comique.

1053. (1868) Alexandre Pouchkine pp. 1-34

Un général Chichkova, à qui on attribue les proclamations éloquentes qui, en 1812, appelèrent le peuple russe à la défense de son territoire, était le principal avocat de l’idiome slavon ; et, de fait, il en tira parti habilement dans un pays où le patriotisme se confond avec l’attachement à la religion. […] Il faut se rappeler que Saint-Pétersbourg, qui tire ses modes de Paris, est toujours un peu arriéré, en sorte que le poème impie de Pouchkine trouva des lecteurs à une époque où pareil ouvrage eût paru en France du plus mauvais goût. […] Nul n’a su le secret de cette entrevue, mais un poète peut deviner, et je le pense, en tirer une belle scène.

1054. (1890) L’avenir de la science « XVIII »

L’inégalité est révoltante, quand on considère uniquement l’avantage personnel et égoïste que le supérieur tire de l’inférieur ; elle est naturelle et juste, si on la considère comme la loi fatale de la société, la condition au moins transitoire de sa perfection. […] Enfants qui croyez tirer en arrière le char de l’humanité, ne voyez-vous pas que c’est le char qui vous traîne ? […] Je n’admets pas comme rigoureuse la preuve de l’immortalité tirée de la nécessité où serait la justice divine de réparer, dans une vie ultérieure, les injustices que l’ordre général de l’univers entraîne ici-bas.

1055. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIII. La littérature et la morale » pp. 314-335

Il serait à souhaiter qu’à toute époque un représentant de tous les groupes intellectuels existant alors eût pris la peine de faire un travail analogue pour lui et les siens ; on aurait de la sorte une série de témoignages qui donneraient le droit d’embrasser une époque entière dans les conclusions qu’on tirerait sur l’origine de ses principales tendances. […] Quand d’Holbach et ses amis, au siècle dernier, devenant des fanatiques à rebours, voulurent imposer autour d’eux une sorte d’athéisme obligatoire, Duclos, le philosophe, qui n’était guère chrétien, s’écriait avec humeur : « Ils en diront tant, qu’ils me feront aller à la messe. » On raconte qu’un avare, voyant l’Harpagon de Molière souffler une chandelle inutile, laissa échapper ce cri de joie : « Voilà une leçon dont je profiterai. » Leçon d’avarice tirée d’une pièce contre l’avarice ! […] C’est pourquoi des Sociétés de tempérance n’ont pas hésité à faire jouer le drame tiré de L’Assommoir de M. 

1056. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — Y. — article » pp. 529-575

« On prétend, dit-il*, que les Articles Ame & Dieu sont des Traités de Matérialisme & d'Athéisme, quoique ces Articles soient tirés en entier des Ouvrages de MM. […] Quand il seroit vrai que les Articles qu'il défend auroient été tirés en entier de Clarke & Jacquelot, s'ensuivroit-il qu'ils ne favorisent pas le Matérialisme, qui y est si positivement énoncé ? […] Quels Philosophes n’auroient pas tiré vanité des grandes vérités qu’ils enseignoient ?

1057. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XV »

Il a, dans ses poches, des cornues qu’il tire, comme des gobelets à muscades, et à l’aide desquelles il expose toute sorte de théories sur les affinités de l’amour et les réactions chimiques du mariage. […] Ne pouvant tenir décemment la chandelle, ils la soufflent du moins et tirent le rideau. […] c’est comme si elle sautait dans un abîme, pour se tirer d’un fossé.

1058. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur de Malesherbes. » pp. 512-538

Rapprochant les doctrines politiques et philosophiques longtemps professées par ce grand homme de bien, des réformes sociales qui se sont réalisées depuis, il en a tiré des vues justes et neuves. […] On eût fait de ces observations une satire ingénieuse dans le goût d’Horace ; il se bornait à en tirer quelques principes d’équité et de bonne administration. […] Fréron, dans sa feuille de L’Année littéraire, voulut rendre compte de la comédie où il était outragé, et en tirer vengeance ; il était difficile de s’y opposer.

1059. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Bussy-Rabutin. » pp. 360-383

Quand il était le plus faible en présence des ennemis, il n’y avait point de terrain d’où, par un ruisseau, par une ravine, par un bois, ou par une éminence, il ne sût tirer quelque avantage. […] Pour commenter en quelque sorte, et démontrer cette supériorité distinctive du talent de Turenne, qui consistait à tirer bon parti d’une affaire déjà compromise, et à la rétablir à force d’habileté de détail, de ténacité et de prudence, Bussy, dans ses Mémoires, se plaît à exposer en ce sens les opérations de la campagne de Flandre de 1656, pendant laquelle Turenne fit preuve de toutes ces qualités combinées qui caractérisent sa première manière militaire. […] « On a mille fois entendu vanter, disait-on de lui en son temps, la politesse de son esprit, la délicatesse des pensées, un noble enjouement, une naïveté fine, un tour toujours naturel et toujours nouveau, une certaine langue qui fait paraître toute autre langue barbare. » C’est beaucoup dire, et je dois avertir aussi que c’est d’une harangue d’académie que je tire ces louanges.

1060. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des romans — Préface des « Derniers Jours d’un condamné » (1832) »

Ce que voyant, l’homme se tranquillise, il met sa tête hors de son trou, et regarde de tous côtés ; il fait un pas, puis deux, comme je ne sais plus quelle souris de La Fontaine, puis il se hasarde à sortir tout à fait de dessous son échafaudage, puis il saute dessus, le raccommode, le restaure, le fourbit, le caresse, le fait jouer, le fait reluire, se remet à suifer la vieille mécanique rouillée que l’oisiveté détraquait ; tout à coup il se retourne, saisit au hasard par les cheveux dans la première prison venue un de ces infortunés qui comptaient sur la vie, le tire à lui, le dépouille, l’attache, le boucle, et voilà les exécutions qui recommencent. […] Arrivés là, il était huit heures du matin, à peine jour, il y avait une guillotine toute fraîche dressée et pour public quelque douzaine de petits garçons groupés sur les tas de pierres voisins autour de la machine inattendue ; vite, on a tiré l’homme du panier, et, sans lui donner le temps de respirer, furtivement, sournoisement, honteusement, on lui a escamoté sa tête. […] Dans le débat, il tire du côté de la guillotine, c’est son rôle, c’est son état.

1061. (1767) Sur l’harmonie des langues, et en particulier sur celle qu’on croit sentir dans les langues mortes

On pourrait encore le prouver par d’autres exemples, tirés de Cicéron même ; mais celui que nous venons de citer nous paraît plus que suffisant. […] Mais, dira-t-on, vous ne pouvez disconvenir au moins qu’un écrivain qui n’emploierait dans ses ouvrages que des phrases entières tirées des bons auteurs latins, n’écrivît bien en cette langue. […] En voici un exemple tiré des poésies de ce jésuite.

1062. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre III. De la nature du temps »

Cette analyse, qui n’a guère été tentée jusqu’à présent, nous révèle un fait dont pourrait d’ailleurs tirer parti la théorie de la Relativité. […] Au contraire, jamais vous ne tirerez du schéma de Minkowski l’idée d’un flux temporel. […] Et, à vrai dire, c’est par abstraction que nous distinguons des termes, par abstraction aussi des rapports : un continu fluent d’où nous tirons à la fois termes et rapports et qui est, en plus de tout cela, fluidité, voilà la seule donnée immédiate de l’expérience.

1063. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre premier. »

Les noms des animaux domestiques » ; et il traduit un peu longuement, mais noblement : « Cet oiseau domestique, dont le chant annonce le jour et qui n’a que son pailler pour théâtre de ses exploits. » Le docte traducteur oubliait qu’au siècle d’Auguste Horace conseillait de tirer du milieu commun le poëme original : Tantum de medio sumptis accedit honoris ! […] On y verrait ce même art, ou plutôt cette création spontanée, cette création par le verbe du génie, sans matière préexistante, qui tire de soi la grandeur que les choses n’ont pas, en même temps que, d’instinct et sans hausser la voix, elle s’égale par la parole à tout ce qui est sublime dans la nature, ou dans l’homme. […] Par là, si nous pressons les termes du parallèle, se découvrirait encore plus d’une ressemblance entre la politique du poëte thébain et celle que Bossuet a parfois tirée des Livres saints, non pour imposer aux peuples le pouvoir absolu, mais pour imposer au pouvoir une absolue justice.

1064. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Variétés littéraires, morales et historiques, par M. S. de Sacy, de l’Académie française. » pp. 179-194

On sourit en commençant à lire ; peu à peu la verve et la sincérité du narrateur nous gagnent, et l’on finit, au milieu de tant de soucis plus pressants, de tant d’intérêts du jour qui nous tirent et nous sollicitent, par se laisser aller de bonne foi, jusqu’à concevoir avec lui des doutes sur la parfaite convenance des deux portraits de Nestor et de Philoctète, placés à travers l’action et venant interrompre ou retarder le combat d’Adraste et de Phalante. […] Il estime que depuis le christianisme, l’homme reconnu infirme et malade, éclairé sur ses misères, a plus besoin de consolations, de secours divin ; qu’insulter à l’humanité depuis le christianisme, la railler ou la mépriser, si l’on ne va aussitôt jusqu’au remède, est chose plus grave qu’auparavant, et qui tire plus à conséquence.

1065. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Mélanges de critique religieuse, par M. Edmond Scherer » pp. 53-66

Il est érudit, il sait, beaucoup, il a beaucoup lu et dévoré ; mais tout cela est à une fin déterminée d’avance ; il tire à lui les textes et les détourne ; ses étymologies sont dérisoires et sentent le calembour. « Il a de l’érudition, il n’a point de science : on ferait une longue liste de ses bévues. » M.  […] On arrangera tout cela un jour après moi, on en tirera ce qu’on pourra ; je ne m’en charge pas, et je laisse ce soin aux autres.

1066. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Étude sur la vie et les écrits de l’abbé de Saint-Pierre, par M. Édouard Goumy. L’abbé de Saint-Pierre, sa vie et ses œuvres, par M. de Molinari. — I » pp. 246-260

Il était persuadé, comme Fontenelle, qu’avant Descartes on ne raisonnait presque point avec solidité ni avec justesse dans les matières qui n’étaient point du ressort de la géométrie : « Avant lui, le sens de la démonstration, le sens de la conséquence juste, ce sens qui met une si grande différence entre homme d’esprit et homme d’esprit, ce sens si précieux n’était presque point exercé ailleurs que dans la géométrie… Nous avions quantité d’orateurs et d’agréables discoureurs ; nous n’avions point de solides démontreurs. » Trop souvent on confondait la certitude qui vient de l’évidence véritable avec celle que l’on tirait des habitudes de l’éducation et des préjugés de l’enfance ou de l’opinion du grand nombre. […] » — Admirable vue, mais qui reste à l’état de vue chez La Bruyère et dont il ne tire aucun parti.

1067. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Bossuet. Œuvres complètes publiées d’après les imprimés et les manuscrits originaux, par M. Lachat »

— Enfin on a publié depuis lors (1856) les Mémoires mêmes, si souvent cités et invoqués, et le Journal tout entier de l’abbé Ledieu, ce secrétaire de Bossuet, dont le nom et le renom valent mieux que la personne, qui n’est pas l’exactitude ni la délicatesse même, mais qui aimait, somme toute, son évêque, qui l’admirait, et qui, ayant songé de bonne heure à tirer parti de son intimité pour écrire ce qu’il voyait et ce qu’il entendait, nous a rapporté bien des choses qui se ressentent du voisinage de la source, et que rien ne saurait suppléer. […] Mais à la première rencontre, on le sait, les deux amants se portèrent l’un vers l’autre, se tirèrent insensiblement à part dans l’embrasure d’une fenêtre, se parlèrent bas, pleurèrent, et, faisant une grande révérence aux graves témoins, matrones ou prélats fort ébahis et se regardant, ils passèrent dans une autre chambre : « Et il en advint Mme la duchesse d’Orléans, et ensuite M. le comte de Toulouse54. » C’est ce qu’on appelle vulgairement avoir un pied de nez.

1068. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. (suite.) »

Les vers sont précédés d’une explication en prose, d’un Récit, d’où j’ai tiré les citations précédentes. […] Sully Prudhomme ne paraît appartenir à aucune des écoles aujourd’hui distinctes et définies ; il aurait plutôt la noble ambition de les concilier, d’en tirer et de réunir en lui ce qu’elles ont de bon.

1069. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. Rodolphe Topffer »

Vinet, qui en saura tirer le miel savoureux et la salutaire amertume. […] Bernier le ton exact d’un ministre évangélique, l’auteur a, en quelques endroits, multiplié les termes familiers aux réformés, et qui ne les choquent pas comme étant tirés des vieilles traductions de la Bible qu’ils lisent journellement.

1070. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre VIII. De l’éloquence » pp. 563-585

Mais on voulait s’aider du fanatisme politique, et mêler dans quelques têtes ce que certains principes ont de vrai, avec les conséquences iniques et féroces que les passions savaient en tirer. […] Examinez tous les sujets de discussion parmi les hommes, tous les discours célèbres qui ont fait partie de ces discussions, et vous verrez que l’éloquence se fondait toujours sur ce qu’il y avait de vrai dans la question, et que le raisonnement seul la dénaturait, parce que le sentiment ne peut errer en lui-même, et que les conséquences que l’argumentation tire du sentiment sont les seules erreurs possibles.

1071. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre III. De la vanité. »

On tire très souvent vanité des qualités qu’on n’a pas ; on voit des hommes se glorifier des facultés spirituelles ou sensibles qui leur manquent. […] Comme elle fait haïr l’ascendant d’un homme, elle soutient les lois constitutionnelles, qui, au bout d’un temps très court, ramènent les hommes les plus puissants dans une condition privée ; elle appuie en général ce que veulent les lois, parce que c’est une autorité abstraite, dont tout le monde a sa part, et dont personne ne peut tirer de gloire.

1072. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Troisième partie. Disposition — Chapitre V. Subordination et proportion des parties. — Choix et succession des idées »

des effets imprévus, mais logiques, qui sont tirés du sujet et le développent. […] Pascal, dans ses Provinciales, voulant adoucir pour les gens du monde l’amertume de la théologie et en rendre agréable l’austérité, s’y est pris de telle sorte que, faisant une démonstration de l’injustice, des erreurs et des scandales de ses adversaires, il n’a rien dit qui ne serve à cette démonstration : il n’a point mis l’agrément dans son sujet, il l’en a tiré ; ce qui est ornement est aussi argument, et ce qui plaît, prouve.

1073. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Joséphin Soulary »

L’essentiel est que ces mots cherchés, et qui ne s’imposaient pas plutôt que d’autres, paraissent venus spontanément, ou que, s’ils semblent tirés d’un peu loin, ce défaut de naturel soit compensé par le plaisir que donne le sentiment de la difficulté vaincue, ou par quelque effet de rythme, d’harmonie, de sonorité. […] Et on lui tire ses ailerons, et bientôt « ils mesurent trois cœurs à l’aise » ; puis ils en tiennent douze, puis cent, et enfin toute l’humanité pourrait s’y blottir.

1074. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série «  Les femmes de France : poètes et prosateurs  »

Autres remarques, à l’aventure, et dont il ne vaudra toujours pas la peine de tirer les conséquences. […] On n’en pourrait tirer une conclusion que si les femmes dont il s’agit faisaient toutes métier d’écrivain ; mais (sauf, si vous voulez, Mmes de Graffigny, du Bocage et Riccoboni, qui sont négligeables), la femme de lettres proprement dite n’apparaît guère que de notre temps.

1075. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « (Chroniqueurs parisiens II) Henry Fouquier »

Fouquier est un homme qui aime la vie, et c’est justement à la mieux aimer, à tirer d’elle tout ce qu’elle contient, que lui sert sa tranquille raison. […] C’est proprement le don Juan de Namouna, tiré au clair.

1076. (1863) Molière et la comédie italienne « Textes et documents » pp. 353-376

La dernière scène du Vecchio geloso revient sur l’aventure dont Pantalon a été la victime, et en tire le dénouement par un moyen des plus singuliers et des plus hardis : « Pasqualina fuggendo da Gratiano il quai la vuole abbracciare, Burattino si pone in mezzo ; Pasqualina racconta come Gratiano gli ha tolto l’honore per forza ; Gratiano si scusa con dir’ d’esser stato tradito e che non puo parlare per all’hora, ma che ne fara vendetta. […] L’Impegno d’un acaso (les Engagements du hasard), tiré de la pièce de Calderon, Croire ce qu’on ne voit pas et ne pas croire ce qu’on voit, où Douville a pris le sujet des Fausses Vérités.

1077. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Les Confidences, par M. de Lamartine. (1 vol. in-8º.) » pp. 20-34

C’est lui qui, dans la fable du berger devenu ministre, a dit, pour nous expliquer comment le pauvre homme, brusquement jeté du milieu de son troupeau au gouvernail d’un État, s’en tire beaucoup mieux qu’on n’aurait pu croire : Il avait du bon sens, le reste vient ensuite. […] La seule conséquence que je veuille tirer de cette date récente, est toute littéraire ; elle porte sur un défaut qui affecte désormais la manière de M. de Lamartine, même à ses meilleurs moments.

1078. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Mémoires touchant la vie et les écrits de Mme de Sévigné, par M. le baron Walckenaer. (4 vol.) » pp. 49-62

La marquise de Courcelles, née Sidonia de Lenoncourt, d’une illustre famille de Lorraine, orpheline de bonne heure, fut élevée chez une tante abbesse, dans un couvent d’Orléans, et tirée de là à l’âge de moins de quatorze ans, par ordre de Louis XIV, pour être mariée comme riche héritière à Maulévrier, un des frères de Colbert. […] Je chante bien, sans beaucoup de méthode ; j’ai même assez de musique pour me tirer d’affaire avec les connaisseurs.

1079. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Chefs-d’œuvre de la littérature française (Collection Didot). Hamilton. » pp. 92-107

Il est vrai que lorsque Hamilton, à la fin du siècle de Louis XIV, racontait les premiers exploits de son chevalier sous Richelieu, il parlait déjà d’un autre siècle et de choses comme fabuleuses ; et cela tirait moins à conséquence. […] Son visage était des plus mignons ; mais c’était toujours le même visage : on eût dit qu’elle le tirait le matin d’un étui pour l’y remettre en se couchant, sans s’en être servie durant la journée.

1080. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre VI. Les localisations cérébrales »

Disons encore que parmi les objections dirigées contre la phrénologie, il en est quelques-unes qui ne nous paraissent pas suffisamment démonstratives, et que l’on pourrait écarter du débat : ce sont certaines objections à priori tirées de la philosophie, et qui n’ont pas suffisamment d’autorité dans un débat essentiellement physiologique et anatomique. […] Une dernière objection très grave contre la phrénologie, et même contre le principe des localisations cérébrales en général, se tire des vivisections, qui n’ont jamais permis de surprendre une faculté isolée des autres.

1081. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « De la tragédie chez les Anciens. » pp. 2-20

Bacchus ayant trouvé le secret de cultiver la vigne et d’en tirer le vin, l’enseigna à un certain Icarius, dans une contrée de l’Attique, qui prit depuis le nom d’Icarie. […] Il ne va pas se chicaner lui-même, et il se prête si naturellement à son erreur, pour peu que l’art la favorise, qu’il lui faudrait bien des réflexions pour s’en tirer : tant son impatience est ingénieuse à le séduire.

1082. (1854) Préface à Antoine Furetière, Le Roman bourgeois pp. 5-22

Les attaques qu’il dirige contre ses adversaires sont, il est vrai, plus mordantes, mais aussi moins scandaleuses, et à part le seul La Fontaine, qu’il accuse de tirer profit des galanteries de sa femme, il est rare qu’il les poursuive dans le secret de la vie privée. « Je n’ai fait, dit-il, aucun reproche à mes parties qui regardât les mœurs ; je ne les accuse pas d’être faussaires, adultères, ni malhonnêtes gens…5 », quoique (ajoute-t-il) ce ne soit pas faute de matière, ni de preuves. […] Au commencement de ce siècle, le mordant pamphlétaire de la Restauration, Courier, meurt obscurément d’un coup de fusil tiré par une main invisible.

1083. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXVI. La sœur Emmerich »

Dieu seul sait les efforts affreux de courage et d’abnégation que fit Brentano, pour tirer parfois ces deux malheureux rideaux et se pencher sur ce miraculeux lit de douleur où gisait la Visionnaire, pâmée sous la griffe de vautour de toutes les souffrances et la foudre de ses intuitions ! […] Et dans la Vie de Jésus, Jean le précurseur et Simon-Pierre, et Madeleine, et Hérode, et Hérodiade et Salomé, et Judas, un chef-d’œuvre que ce Judas qui s’enfonce dans l’horreur qu’il inspire, et Marie la silencieuse, cette sœur de Madeleine et de Marthe, et pour qui l’histoire devait s’appeler comme elle, et tant d’autres partout, plus tirés au jour par un seul trait ou par cent, car elle n’est pas sobre, la fille de l’Extase, — tant d’autres sur lesquels on trouve ce qui distingue la manière de voir de cette Voyante implacable, la particularité du détail !

1084. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XV. M. Dargaud » pp. 323-339

Pour l’avoir tirée mieux que de la mort, mais de l’incertitude de l’Histoire : pour avoir débrouillé cette mystérieuse quenouille de fée, à laquelle il y a du sang, et que cette reine d’Écosse semble porter à sa ceinture, ce qu’il a fallu de soins, d’études, de recherches, de voyages, d’efforts et de fatigues à M.  […] Pour ceux qui pensent autrement que lui, on le comprend, quoiqu’il valût mieux ne pas se taire, quoique la vérité, dite et déduite, vaille toujours mieux que le dédain ; mais pour ceux qui pensent comme l’auteur de l’Histoire de la Liberté religieuse, pour les hommes de la même confraternité politique et philosophique, qui n’ont pas encore parlé de cette histoire, plus intéressante à tous les points de vue que la plèbe de livres qu’ils ont l’habitude de vanter, il serait vraiment incompréhensible qu’ils se fussent tus ou qu’ils eussent dosé à l’auteur si chichement l’éloge, s’il n’y avait à cela une raison tirée de cette Histoire de la Liberté religieuse et que mon devoir de critique est, avant tout, de dégager.

1085. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Madame Récamier »

Madame Récamier I Souvenirs et Correspondance tirés des papiers de Madame Récamier [I-II]. […] … » III Souvenirs et Correspondance tirés des papiers de Madame Récamier [III-IV].

1086. (1915) La philosophie française « I »

C’est l’œuvre d’un physiologiste de génie qui s’interroge sur la méthode qu’il a suivie, et qui tire de sa propre expérience des règles générales d’expérimentation et de découverte. […] Vue géniale, dont il a tiré les conséquences sans s’amuser à des jeux dialectiques, sans bâtir un système.

1087. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXI » pp. 87-90

Ce génie, s’il se donnait la peine de naître, trouverait bien quelques difficultés sans doute à rajeunir les points de vue, à ressaisir avec nouveauté les grands caractères déjà tracés, à les offrir par des aspects à la fois reconnaissables et imprévus, à peindre sans copier, à tirer de tous nos petits ridicules assez peu gais une large veine de plaisanterie, et à convoquer toutes nos petites vanités maussades à un rire immense.

1088. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « APPENDICE. — M. SCRIBE, page 118. » pp. 494-496

Cela est d’un franc comique, et dont l’auteur a tiré tout le parti en le prolongeant.

1089. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires de mademoiselle Bertin sur la reine Marie-Antoinette »

Par exemple, le comte de Charolais s’amusait, comme on sait, par manière de passe-temps, à tirer sur les couvreurs pour les précipiter des toits : ce n’était là, selon elle, qu’un effet du sang qui fermentait avec violence ; ces moments passés, personne n’était d’une probité plus intacte.

1090. (1875) Premiers lundis. Tome III « Viollet-Le-Duc »

. — A propos de cette pièce, je me permettrai pourtant de proposer au texte une petite correction ; c’est à la seconde strophe, là où il est question de l’amoureux Ovide sucrant un baiser humide pour en tirer les douces fleurs.

1091. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Introduction »

Tout cela est encore histoire des lettres, et le serait strictement resté malgré les incursions médicales les plus avancées6, si les nouveaux savants, fiers du titre arrogé, n’en avaient immédiatement tiré les conclusions suivantes : « Aujourd’hui que le roman s’élargit et grandit, qu’il commence à être la grande forme sérieuse, passionnée, vivante de l’étude littéraire et de l’enquête sociale, qu’il devient par l’analyse et la recherche psychologique l’histoire morale contemporaine, aujourd’hui que le roman s’est imposé les études et les devoirs de la science, il peut en revendiquer les libertés et les franchises » 7, et treize ans plus tard, Edmond de Goncourt insistait encore : « Ces libertés et ces franchises, je viens seul, et une dernière fois peut-être, les réclamer hautement et bravement pour ce nouveau livre écrit dans le même sentiment de curiosité intellectuelle et de commisération pour, les misères humaines » 8.

1092. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XXII. L’affichage moderne » pp. 283-287

Tirée en bon bistre clair avec de légers rehauts, sur fond vert d’eau, elle évoque avec ses feuilles de vigne serrées, ses grappes nerveuses et sa fine champenoise légèrement équilibrée, une si fraîche vision d’ivresse qu’à la voir déjà vous tourne la tête.

1093. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre VII. Objections à l’étude scientifique d’une œuvre littéraire » pp. 81-83

Tout cela s’y trouve contenu et enveloppé : tout cela peut en être tiré.

1094. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 145-150

Un Auteur de son temps fit contre lui un Ouvrage intitulé la Rencontre des Muses, où il prétendoit que Desportes avoit tiré des Italiens tout ce qu’il y avoit de bon dans ses Poésies.

1095. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 190-194

Cet Ouvrage, entre les mains de M. de Voltaire, est devenu, malgré sa médiocrité, une mine féconde, dont il a su tirer un grand parti.

1096. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 309-314

C'est un premier fruit que je tire déjà de mon sincere repentir & de ma confession publique ; le second, c'est Monsieur, la bonne inspiration qu'à ce propos vous avez eu de m'adresser le Philosophisme.

1097. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre premier. Beaux-arts. — Chapitre III. Partie historique de la Peinture chez les Modernes. »

Bouchet, Grec d’origine, fut le premier architecte, Nicolas le premier sculpteur, et Cimabou le premier peintre, qui tirèrent le goût antique des ruines de Rome et de la Grèce.

1098. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre troisième. Histoire. — Chapitre III. Suite du précédent. — Seconde cause : les anciens ont épuisé tous les genres d’histoire, hors le genre chrétien. »

À cette première cause de l’infériorité de nos historiens, tirée du fond même des sujets, il en faut joindre une seconde, qui tient à la manière dont les anciens ont écrit l’histoire ; ils ont épuisé toutes les couleurs ; et si le christianisme n’avait pas fourni un caractère nouveau de réflexions et de pensées, l’histoire demeurerait à jamais fermée aux modernes.

1099. (1882) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Deuxième série pp. 1-334

Est-il besoin d’ajouter que Massillon a de beaucoup dépassé son maître, et tiré d’un original médiocre des copies qui ne sont pas très éloignées d’être des chefs-d’œuvre ? […] Aussi, dans un seul discours, épuise-t-il d’un coup tout ce qu’il peut tirer d’un texte. […] S’il n’est qu’un homme, il devient impossible de tirer de son appauvrissement et de son anéantissement, comme disent les orateurs chrétiens, la leçon d’humilité qu’on en tire, et c’est l’orgueil qui devient une vertu ; s’il n’est qu’un Dieu, il devient impossible de nous le proposer en exemple, et de le donner en imitation quotidienne à notre faiblesse ; il n’y a donc plus de morale chrétienne, ou il faut qu’il soit l’Homme-Dieu. […] S’il faut que je les fasse, vingt louis, peut-être plus, ne me tireront pas de là… Ah ! […] Quant à Bonamy, perdu dans la recherche des antiquités de la Gaule, il avait pour politique de tirer en longueur, de s’excuser sur son incompétence, et finalement de se dérober ; c’était un autre type de censeur.

1100. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre II. Le théâtre. » pp. 2-96

Le roi7 « s’exerce tous les jours à tirer, chanter, danser, lutter, jeter la barre, jouer du flageolet, de la flûte, de l’épinette, arranger des chansons, faire des ballades. » Il saute les fossés à la perche et manque une fois d’y périr. […] Comme au temps féodal, ils en appellent d’abord aux armes, et gardent l’habitude de se faire justice par eux-mêmes et sur-le-champ. « Jeudi dernier12, écrit Gilbert Talbot, comme milord Rytche allait à cheval dans la rue, un certain Wyndhans lui tira un coup de pistolet… Et le même jour, comme sir John Conway se promenait, M.  […] Peel, Lodge, Marlowe, Jonson, Shakspeare, Heywood sont acteurs ; la plupart des détails qu’on a sur leur compte sont tirés du journal d’Henslowe, un ancien prêteur sur gages, plus tard bailleur de fonds et imprésario, qui les fait travailler, leur accorde des avances, reçoit en nantissement leurs manuscrits ou leur garde-robe. […] Qui est-ce qui me tire en arrière ? […] J’ai des maisons, des bijoux et un pauvre reste de ducats ; sans doute cela vous donnera le moyen d’être charitables… » Puis, d’une voix stridente : « En vérité, monseigneur, vous feriez bien d’aller tirer vos pistolets contre les mouches : le jeu serait plus noble. » On la condamne à être enfermée dans une maison de repenties.

1101. (1933) De mon temps…

Lorrain y avait convié Mlle Nau qui avait tenu avec succès le rôle de la fille Elisa dans la pièce tirée du roman de Goncourt et qui, sur la demande de Lorrain, récita « la lettre d’Elisa » au petit pioupiou. […] Moréas, qui ne négligeait pas « sa gloire » et savait fort bien tirer parti des circonstances, avait demandé à Maurice Barrès et à moi de signer les invitations à ce banquet qu’il avait provoqué et organisé lui-même avec un certain sens pratique de la réclame qui s’alliait en lui, je me plais à le reconnaître, avec une haute et stricte conscience littéraire. […] Nul mieux que France ne savait tirer profit de ses lectures et il en assimilait la substance avec une ingéniosité diabolique. […] Ces visites, généralement intempestives, tantôt duraient trois minutes, tantôt se prolongeaient pendant trois heures, et Poictevin en sortait, toujours indécis, inquiet, tourmenté de scrupules qui, parfois, lui faisaient remonter l’escalier et tirer de nouveau la sonnette. […] Alors, de quelque carton il tirait un dessin ou une estampe ; d’une vitrine, un bronze ou un laque, un charmant brimborion ou une charmante babiole qu’il maniait de ses doigts précautionneux ou palpait de sa belle main nerveuse.

1102. (1863) Causeries parisiennes. Première série pp. -419

Pour mon compte, je n’en saurais tirer aucune conclusion. […] de dérailler, pour être tiré d’affaire par le Constitutionnel. […] C’est un autre qui l’a exploitée et qui s’est ruiné : tu en aurais tiré un excellent parti. […] que de gros lots tirés à la loterie des prospérités humaines ! […] Victor Hugo sont trop exceptionnels pour qu’on puisse tirer quelque conclusion de leur existence.

1103. (1923) Au service de la déesse

Jean Carrère tire de ce principe, ou d’un principe de ce genre, un corollaire extrêmement ingénieux. […] » Le même enseignement, les Grecs avaient à le tirer du père de l’Histoire. […] Je rompis mon épée pour m’en servir à creuser ; mais j’en tirais moins de secours que de mes mains. […] Les quenouilleuses achetaient la meilleure filasse tirée des lins rouis en Lys. […] On tirerait de son œuvre tout un manuel du parfait conservateur.

1104. (1880) Goethe et Diderot « Diderot »

Eh bien, Diderot est aussi cynique que Rousseau ; il l’est même davantage, car il est plus matérialiste que le sentimental inconséquent qui se prit dans la glu de ce déisme mou dont il n’était pas de force à se tirer ! […] Il ne montra jamais par un exemple le parti qu’on pouvait tirer d’une idée. […] Dix fois ailleurs, dans ses Salons, Diderot, devant une toile vide de par la pauvreté de la tête et la pauvreté de la main, tirait de sa tête, à lui, le tableau que l’artiste n’avait pas vu dans la sienne, l’idéeant, comme disait Bonald, quand il ne pouvait pas l’imager ! […] Ne le privons donc pas de la seule chose grande qui soit vraiment à lui, et qui le tire de la foule des esprits si profondément faux en tout de son siècle. […] Avertis par cette haine qui explique leur amour posthume pour Diderot, ils l’ont avisé, couché sous sa pierre de Sisyphe de l’Encyclopédie et sous l’amas de ses autres ouvrages, et ils l’ont tiré de là-dessous.

1105. (1910) Rousseau contre Molière

Mais est-ce une raison que leur peu d’équité Pour vouloir se tirer de leur société ? […] Faire ridiculement une chose bonne en soi, nous verrons que c’est de là que Molière tire le plus souvent son comique. […] Il y a grand parti à tirer contre Molière de ce qu’il a habillé la sagesse, la saine philosophie et la sainte religion des habits d’un grotesque. […] L’autre sur vos désirs vous fait régner en rois, L’un vous tire aux enfers et l’autre dans la gloire. […] Je préviens que presque toutes les déductions de Rousseau seront tirées du premier de ces deux principes et que le second ne mettra que quelques traces de lui dans l’argumentation.

1106. (1896) Écrivains étrangers. Première série

Woodberry, « de tirer un parti beaucoup plus fâcheux encore pour sa mémoire que celui qu’en a tiré Griswold ». […] Quel contraste avec la condition d’absolu désespoir où vous m’avez trouvé et dont vous m’avez tiré !  […] Et ainsi il tira des Brins d’herbe assez d’argent pour reprendre sa vie errante et libre sur les grands chemins de son pays. […] Les objections qu’il tire, contre le naturalisme, de ses conséquences pratiques, sont les mêmes qu’en tiraient déjà, au collège, nos professeurs de philosophie. […] Il était tenu de tirer un cordon, à des intervalles déterminés.

1107. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXII » pp. 286-290

Un ouvrage, à présent, c’est l’enfant de Ninon, Equivoque produit que chacun a pu faire, Dont, à la courte paille, il faut tirer le père.

1108. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXIX » pp. 316-320

Les ingénieurs étaient donc à l’œuvre ; on essayait de tracer à la moderne bande des novateurs dramatiques une route qui tournât les temples de Racine et de Corneille et qui n’en fût pas écrasée ; car les vieux critiques, logés dans ces temples, en faisaient des espèces de forteresses d’où ils tiraient sur les nouveaux venus et croyaient leur barrer le passage.

1109. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Louis XIV et le duc de Bourgogne, par M. Michelet. (suite et fin.) »

Mais a-t-on bien le droit vraiment de tirer de pareilles conséquences de l’inspection des lignes d’un visage, fût-on le physiognomoniste par excellence, fût-on Lavater en personne ?

1110. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Note. »

Or, nous le savons de Benjamin Constant lui-même ; voici un passage textuel tiré de son Carnet, que j’ai eu entre les mains, et que M. 

1111. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires de madame de Genlis sur le dix-huitième siècle et la Révolution française, depuis 1756 jusqu’à nos jours — II »

Le caractère de ces Mémoires est maintenant fixé pour nous ; il nous est bien prouvé qu’ils ne sont et ne peuvent être qu’une mystification : prenons-les donc pour ce qu’ils valent, et tirons-en ce qu’ils contiennent : il y a de la vérité partout ; quand un peu d’art l’a cachée, un peu d’art la dégage.

1112. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — A — Aubanel, Théodore (1829-1886) »

je n’ai pu parvenir en huit jours à la tirer au clair.

1113. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 527-532

De l’affaire la plus embrouillée, il sait tirer une proposition unique, qu’il développe avec une supériorité qui intéresse par la maniere, autant qu’elle instruit par le fond.

1114. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — J. — article » pp. 519-526

On disoit que, pour écrire ses Romans, elle s’étoit d’une plume tirée des ailes de l’Amour ; louange peut-être excessive, mais due au talent avec lequel elle a su peindre la puissance de ce Dieu.

1115. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 381-387

Ce Poëte a fait encore des Hymnes & des Cantates, qui prouvent que l’Ecriture Sainte, d’où elles sont tirées, n’a pas été mieux traitée que l’Iliade, & sont de nouveaux motifs pour nous confirmer dans l’idée que le génie de la Mothe n’étoit pas propre à la Poésie sublime.

1116. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Étienne Dolet, et François Floridus. » pp. 114-119

Des protecteurs le tirèrent de l’échafaud.

1117. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre premier. Vue générale des épopées chrétiennes. — Chapitre II. Vue générale des Poèmes où le merveilleux du Christianisme remplace la Mythologie. L’Enfer du Dante, la Jérusalem délivrée. »

Cette timidité l’a forcé d’user des petits ressorts de la magie, tandis qu’il pouvait tirer un parti immense du tombeau de Jésus-Christ qu’il nomme à peine, et d’une terre consacrée par tant de prodiges.

1118. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre XII. Suite du Guerrier. »

Les poètes modernes ont tiré une foule de traits nouveaux du caractère chevaleresque.

1119. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre VII. Des Saints. »

Il est certain que les poètes n’ont pas su tirer du merveilleux chrétien tout ce qu’il peut fournir aux Muses.

1120. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Vien » pp. 202-205

Le plus grand n’a pas plus de trois pieds de haut sur deux de large ; mais l’artiste a bien fait voir dans sa Sainte Genevieve du dernier Salon, son Icare qui est à l’Académie et d’autres morceaux, qu’il pouvait tenter de grandes compositions et s’en tirer avec succès.

1121. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 43, que le plaisir que nous avons au théatre n’est point produit par l’illusion » pp. 429-434

Le tableau d’Attila peint par Raphaël ne tire point son mérite de ce qu’il nous en impose assez pour nous séduire et pour nous faire croire que nous voïons véritablement saint Pierre et saint Paul en l’air, et menaçans l’épée à la main ce roi barbare entouré des troupes qu’il menoit saccager Rome.

1122. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Law »

Par suite de ses préoccupations d’économiste, sans doute, Cochut a voulu surtout tracer l’idée nette du système, et il l’a pris à part, l’isolant de tous les faits généraux et ne l’expliquant que par l’état où les prodigalités de Louis XIV avaient mis les finances et la monarchie ; et, pour parler la langue économique, il s’est très bien tiré de ce dix-huitième d’épingle historique.

1123. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Alcide Dusolier »

Le moraliste, que j’ai vu aussi dans ces Propos littéraires et pittoresques, où l’auteur tire les petits ridicules comme les bécassines, et en entretiendrait la cuisine du Nain Jaune s’il lui plaisait, le moraliste doublera parfaitement le peintre quand Dusolier voudra sérieusement être romancier et regarder dans les cœurs et dans le sien comme il sait regarder dans les choses extérieures, — les paysages de ses campagnes ou les êtres de son logis !

1124. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « L’abbé Noirot »

D’examen en examen et de négation en négation, ils en sont arrivés plus bas que le scepticisme, et ils ont précipité les peuples plus bas que leurs cœurs… Ingrate envers la science suprême d’où elle est sortie dans le monde chrétien, il n’y a plus que la théologie, méprisée par elle, qui puisse la tirer de l’abîme de nihilisme au fond duquel elle gît hébétée.

1125. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre troisième. Découverte du véritable Homère — Chapitre VI. Observations philologiques, qui serviront à la découverte de véritable Homère » pp. 274-277

La tradition veut qu’Homère ait été aveugle, et qu’il ait tiré de là son nom (c’était le sens d’Ὅμηρος dans le dialecte ionien).

1126. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre troisième. Découverte du véritable Homère — Appendice. Histoire raisonnée des poètes dramatiques et lyriques » pp. 284-285

Aussi a-t-on lieu de conjecturer que la tragédie a tiré son nom de ce genre de déguisement, plutôt que du bouc Τράγος, qu’on donnait en prix au vainqueur.

1127. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre I. Les origines. — Chapitre III. La nouvelle langue. » pp. 165-234

Et lui demanda pourquoi il l’avait tirée. […] Thomas, tu voudrais avoir notre travail tout pour rien. »  — Puis il recommence son sermon d’un ton véhément, criant plus haut à chaque parole, avec exemples tirés de Sénèque et des anciens. […] Aujourd’hui il étudie la machine compliquée du cœur, découvre les suites de l’éducation primitive ou de l’habitude dominante, et trouve la comédie de mœurs ; demain il ne prendra plaisir qu’aux événements curieux, aux gentilles allégories, aux dissertations amoureuses imitées des Français, aux doctes moralités tirées des anciens. […] C’est la douloureuse et violente vie du catholicisme exalté et de l’Italie haineuse qui apparaît chez Dante ; en sorte que de chacun d’eux on pourrait tirer une théorie de l’homme et du beau. […] On dirait, à les voir suer et peiner, qu’ils vont tirer de leur cœur et de leur raison quelque grande croyance originale ; et toute croyance leur est imposée d’avance.

1128. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxvie entretien. L’ami Fritz »

» le tira de son sommeil et lui fit venir les larmes aux yeux. […] Puis, quand vous saisissez derrière votre chaise, dans la cuvette, une autre bouteille et que vous la placez entre vos genoux pour en tirer le bouchon sans secousse, comme ils rient en pensant : « Qu’est-ce qui va venir à cette heure ?  […] — Oui, en route, et doucement, dit-il, doucement jusqu’à la porte de Hildebrandt. » Zimmer, alors, claquant du fouet, tira les rênes, et les chevaux repartirent au petit trot, pendant que le vieux postillon embouchait son cornet et faisait retentir l’air de ses fanfares. […] Enfin Hâan tira du troisième banc à gauche une femme haute de six pieds, noire de cheveux, avec un nez en bec d’aigle et des yeux perçants, laquelle se leva toute droite et sortit d’un air majestueux. […] Le vieux rebbe, au bout d’un instant, fourra la main dans la poche de sa longue capote jusqu’au coude, il en tira son mouchoir, se moucha comme si de rien n’était, et finalement, levant le mouchoir, il l’agita.

1129. (1899) Musiciens et philosophes pp. 3-371

Son observation est pénétrante, mais il ne parvient pas à en tirer les conclusions rigoureusement exactes. […] C’est de ce pouvoir de la musique que toute œuvre d’art à laquelle elle participe tire son accroissement d’effet. […] Mythes païens, légendes chrétiennes, du Nord, du Midi, de l’Est et de l’Ouest, on a tiré de l’oubli les plus folles affabulations du moyen âge mystique et romanesque. […] — Ô Dionysos divin, pourquoi me tires-tu les oreilles ? […] À première vue, il semblerait qu’il n’y eût pas grand-chose à tirer d’écrits où règnent tant de contradiction et de confusion.

1130. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome I

Il fallait une tête telle que celle de Corneille, pour tirer d’un sujet aussi ingrat tant de richesses dramatiques. […] Corneille, aveuglé par la passion de son art, admet tous les sujets tirés de l’Évangile et de la Bible, sans songer que la plupart sont impraticables, et qu’en les traitant on déshonore tout à la fois le théâtre et l’Écriture sainte. […] La comédie française doit l’honorer comme son patron ; il l’a tirée de la fange : avant lui les comédiens n’étaient que des bateleurs rebutés et méprisés partout : c’est lui qui a fait de la comédie un divertissement d’honnêtes gens. […] Ce sont quelques diamants qui brillent sur du fumier ; Corneille les a tirés de cette fange, comme autrefois Virgile tirait de l’or et des perles du fumier d’Ennius. […] Pour me tirer des pleurs, il faut que vous pleuriez.

1131. (1858) Cours familier de littérature. V « XXIXe entretien. La musique de Mozart » pp. 281-360

« Nous sommes tellement tourmentés, tirés en tous sens, que je ne sais pas qui l’emportera de ceux qui demandent. […] de revenu mensuel assuré2, une femme, sept enfants et ta grand’mère, pour supporter des frais de couches, de mort, de maladie, frais et dépenses qui, si tu veux y penser, te convaincront que non seulement je n’ai pas employé un kreutzer pour le moindre plaisir personnel, mais encore que, sans une grâce spéciale de Dieu, je n’aurais jamais pu, avec toutes mes spéculations et mes amères privations, m’en tirer et vivre sans faire de dettes ; et cependant je n’ai jamais eu de dettes qu’aujourd’hui. Je vous ai sacrifié à tous deux toutes mes heures, dans l’espoir que non seulement vous parviendriez à vous tirer honorablement d’affaire, mais encore que vous me procureriez une tranquille vieillesse, me permettant de rendre compte à Dieu de l’éducation de mes enfants, de songer au salut de mon âme sans autre souci, et d’attendre paisiblement la mort. Mais la Providence et la volonté de Dieu ont ordonné les choses de façon qu’il faut que de nouveau je me résigne à la dure nécessité de donner des leçons, et cela dans une ville où la peine est si mal payée qu’on ne peut en tirer de quoi s’entretenir soi et les siens ; et, malgré cela, il faut être content et s’exténuer à parler pour encaisser du moins quelque chose au bout du mois. […] On se laisse entraîner on ne sait comment, et on ne sait plus comment s’en tirer.

1132. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 octobre 1885. »

Mais non, il en tirait des drames mouvementés, rapides, heurtés ; ce qui est matière à drame, n’est point matière à opéra. […] Il n’est, ici, pas question d’imiter Wagner ; mais de profiter de son labeur, et de tirer de ses ouvrages, des doctrines, des théories applicables, en les modifiant, au génie particulier de chaque peuple. […] Alberich caresse familier Flosshilde, qui le repousse avec douceur, puis tendre le tire vers soi. […] Alberich effrayé se tire des bras de FIosshilde. […] l’allitération et le rhythme, d’une part, et, de l’autre, l’exacte littéralité ne peuvent guère être en même temps reproduits… Donc, hors quelques vers où les deux étaient possibles et quelques où l’allitération et le rhythme étaient à tout prix nécessaires, nous y renonçons. — quitte à tirer plus tard, moyennant des sacrifices de l’exactitude, une traduction rhythmique musicale de la traduction littérale, d’abord utile.

1133. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre quatrième. L’idée du temps, sa genèse et son action »

Il s’efforce de tirer à lui la proie qui va lui échapper : voilà le futur. […] C’est donc, en somme, des résidus laissés dans la conscience par la succession combinée avec l’intensité et la clarté, que se tire la représentation du temps : supposez que je regarde un phare tournant qui ramène à intervalles réguliers un feu blanc et un feu rouge ; au bout de plusieurs tours il y aura à la fois, dans un même état général de conscience, une image faible et indistincte du rouge à l’état évanouissant, une image vive et distincte du blanc, et une image faible du rouge à l’état naissant, c’est-à-dire trois degrés et trois espèces de représentations différemment orientées ; mais, pour avoir le sentiment même du temps, il faut agir, vouloir et mouvoir. […] L’idée de temps est extrêmement flottante quand elle n’est pas associée à celle de l’espace, où les relations sont plus fixes : c’est là la seule conclusion à tirer des considérations précédentes sur l’espace et le temps. […] Guyau lui-même a dit : « Le sens externe qui a le plus servi, après les sens internes, à tirer le temps de l’espace, à lui donner une dimension à part, c’est l’ouïe, précisément parce que l’ouïe ne localise que très vaguement dans l’espace, tandis qu’elle localise admirablement dans la durée. […] Mais la conséquence tirée par Kant est inattendue : — « On voit par-là, dit-il, que la représentation du temps est une intuition, puisque toutes ses relations peuvent être exprimées par une intuition extérieure. » La conclusion naturelle serait que le temps est une représentation expérimentale, non une intuition pure, puisque toutes ses relations ne peuvent être exprimées « que par une intuition extérieure », par des images parlant aux sens ou à l’imagination et empruntées à l’espace.

1134. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1890 » pp. 115-193

Adonc il arrivait, que le prince après avoir tiré, déposait le fusil qui lui avait servi sur un second fusil qui partait, et allait percer, sous la flottaison, le batelet le plus rapproché et la partie inférieure d’une dame qui était dedans. […] Le contre-amiral Layrle qui a fait autrefois une station de quatre ans au Japon, et qui vient d’y passer encore deux années, parlait du silence que gardaient les Japonais sur les événements politiques vis-à-vis des Européens, et il nous contait que le président du conseil et le ministre de la marine, avec lesquels il est lié, qu’il avait connus à son premier séjour très petits jeunes gens, très petits bonshommes, il ne pouvait en tirer que des monosyllabes et des exclamations sans signification, quand il les interrogeait. […] Puis il tire d’une commode, des cahiers, où il nous montre de nombreuses pages contenant l’historique de ces évocations, et nous montre enfin un tableau, représentant une femme aux mains lumineuses, qu’il dit être venue l’embrasser, et dont il a senti sur sa joue, ses lèvres, des lèvres pareilles à des lèvres de feu. […] Samedi 20 décembre Dîner donné par Gallimard, pour l’apparition de l’édition de Germinie Lacerteux, tirée à trois exemplaires. Causerie avec le peintre Carrière, qui me tire de sa poche, un petit calepin, où il me montre une liste de motifs parisiens qu’il veut peindre, et parmi lesquels, il y a une marche de la foule parisienne, cette ambulation particulière, que j’ai si souvent étudiée d’une chaise d’un café du boulevard, et dont il veut rendre les anneaux, semblables pour lui aux anneaux d’une chaîne.

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