Mais tout est gâté par une continuelle préoccupation de l’applaudissement : vous croiriez qu’elle pose toujours pour son portrait devant le biographe. » Voilà le défaut saisi et marqué par un peintre sarcastique. […] Cependant, ci-devant nobles et émigrées rentrées comme elles étaient, ces dames ne peuvent éviter l’arrestation : elle a lieu par ordre du Comité de sûreté générale, le 22 janvier 1794, après examen et saisie de leurs papiers.
non ; cette histoire des dernières années de la monarchie est sue depuis longtemps, et bien sue : il suffisait, pour l’embrasser et la saisir dans sa vraie suite et sa teneur, d’avoir l’esprit juste, appliqué, le cœur droit, de savoir choisir et démêler entre les divers témoignages et de ne se laisser entraîner à rien d’extrême, même en fait de pitié. […] Mais dans l’habitude de la vie et de la conversation, on saisit avec plaisir chez elle ce jet facile et courant, une parole vive, aisée, des plus naturelles, et même spirituelle.
Pas un instant d’intervalle, pas une ligne d’interstice, pas une maille brisée dans ce réseau : tout s’y prend, tout y reste, le gros, le médiocre, et jusqu’au plus menu ; tout est saisi à la fois ou tour à tour, et comparaît à la surface. […] Austère, scrupuleux en morale, dépourvu d’une jeunesse entraînante, dévoré d’une sensibilité vague qu’il désespérait de fixer sur un choix enchanté, désireux avant tout de s’asseoir dans une existence indépendante et rurale, M. de Sénancour se laissa dire, et se crut délicatement engagé : on peut saisir quelques traits de ces circonstances personnelles sous l’histoire de Fonsalbe, au tome second d’Oberman.
Dès lors, en un tel état de choses, tout ce qui est et sera un peu naturel et élevé, un peu simple et moral, un peu neuf par là même, a retrouvé de grandes chances de plaire, d’intéresser et presque de saisir. […] Et quasi cursores vitaï lampada tradunt, a dit l’antique poëte dans une magnifique image : c’est comme un flambeau qu’il faut recevoir et saisir, en entrant, — l’héritage de la vie ; quelques-uns l’ont pris comme un cierge, et beaucoup comme un cigare.
J’ai pensé qu’on en saisirait la cause profonde dans le tableau de cette singulière jeunesse et de ces premières années qui se dévoilaient soudainement à nous : de là mon analyse91. […] « Si le démon de la procrastination ne vous saisit pas, vous devriez bien me donner de vos nouvelles le plus vite que vous pourrez.
Tout cela est vu et saisi à la loupe. […] Nul exemple n’est capable de faire mieux saisir le côté quelque peu défectueux de l’école et de la manière que Bertrand adopta et poussa de plus en plus.
L’auteur a saisi, je crois, dans sa pièce, le point de vue sous lequel il faut présenter désormais la comédie : ce sont les vices pour ainsi dire négatifs, ceux qui se composent de la privation des qualités, qu’il faut maintenant attaquer au théâtre. […] L’inquiétude qui nous dévore finira par un sentiment vif et décidé, dont les grands écrivains doivent se saisir d’avance.
Réfractaire à la séduction de l’idéal chrétien, la hauteur de la vertu païenne le saisissait. […] Et d’abord on saisit deux défauts à cette méthode d’information.
Du reste, on peut très nettement saisir dans les variations de la langue la lutte de l’esprit national contre la pression étrangère qui menace parfois de l’étouffer. […] Il faut donc plonger au cœur des écrits de tout genre, pour y saisir le genre étranger qui a pu les vivifier ou les gâter ; après quoi, l’attention doit se porter sur les formes dont les écrivains ont revêtu leurs sentiments et leurs pensées.
L’industrie humaine saisit cet indice ; on frotta longtemps deux branches sèches l’une contre l’autre, la flamme en jaillit. […] Quand la Femme fut accomplie, les dieux s’étonnèrent de leur œuvre, ils n’avaient pas cru si bien faire. — « L’admiration les saisit dès qu’ils eurent vu cette belle calamité.
M. de Balzac, le célèbre romancier, a eu plus que personne son cortège de femmes, celles de trente ans en masse et d’au-delà, dont il a si bien saisi la faible et flattée infirmité secrète, toutes ces organisations nerveuses et fébriles qu’il a eu l’art de magnétiser. […] Elle veut saisir cette première impression au vif, et telle qu’elle ne fasse qu’un saut de l’esprit et du cœur sur le papier.
Elle avait le sentiment vif du ridicule, et elle saisissait les gens d’un trait et d’une seule image. […] On a fort abusé depuis du mot distingué ; nous le saisissons ici à son origine, ou du moins dans son acception la plus récente.
Lauzun saisissait et rendait à ravir les ridicules des gens. […] » Nous saisissons l’aveu, c’est la seule moralité que je veuille tirer ici.
Donnez un motif, un ressort de plus à ce sage, donnez-lui « la gloire, ce puissant mobile de toutes les grandes âmes », faites qu’il se la propose comme un but éclatant qui l’attire sans le troubler, et vous aurez Buffon lui-même, Buffon qui, pour peindre le plus noble idéal de l’homme, n’a eu qu’à en saisir les traits en lui. […] Seulement, il fallait l’attendre, le saisir à ses heures et savoir l’écouter.
Le livre de Bonald, introduit en France et expédié de Constance à Paris, fut en grande partie saisi et mis au pilon par ordre du gouvernement : il n’eut donc pas d’effet et fut alors comme non avenu53. […] Dans un chapitre intitulé « Des gens de lettres », il saisit très finement les qualités distinctives de cette nouvelle espèce, née ou développée seulement au xviiie siècle ; il dénonce les inconvénients d’un pareil corps vaguement introduit dans l’État et y devenant une puissance ; il essaie de la restreindre et d’assigner les termes dans lesquels il conviendrait, selon lui, de renfermer toute discussion littéraire, soit par rapport à la religion, soit par rapport aux mœurs.
Arrivé en province, à Moulins, il s’aperçoit aisément que la proscription ne l’y atteindra pas : il aurait même pu se montrer sans danger et reparaître, s’il n’y avait pas vu une espèce de bravade, et par conséquent un défaut de convenance : « Mais, ajoute-t-il, il faut être poli, même avec les révolutions. » On doit déjà saisir le ton de cet esprit fin, ironique, épigrammatique, et légèrement impertinent jusque dans les choses sérieuses : son mérite est de renfermer bien du bon sens et des vues justes sous cette forme-là. […] Par penchant et par habitude, il était encore plus homme de presse qu’il ne l’avait été de consultation et de cabinet : « Comme écrivain, disait-il, entre m’adresser au public ou à un souverain, fût-il dix fois plus élevé que la colonne de la place Vendôme, je n’hésiterai jamais à préférer le public ; c’est lui qui est notre véritable maître. » En laissant dans l’ombre les côtés faibles et ce qui n’est pas du domaine du souvenir, et à le considérer dans son ensemble et sa forme d’esprit, je le trouve ainsi défini par moi-même dans une note écrite il n’y a pas moins de quinze ans : Fiévée, publiciste, moraliste, observateur, écrivain froid, aiguisé et mordant, très distingué ; une Pauline de Meulan en homme (moins la valeur morale) ; sans fraîcheur d’imagination, mais avec une sorte de grâce quelquefois à force d’esprit fin ; — de ces hommes secondaires qui ont de l’influence, conseillers nés mêlés à bien des choses, à trop de choses, meilleurs que leur réputation, échappant au mal trop grand et à la corruption extrême par l’amour de l’indépendance, une certaine modération relative de désirs, et de la paresse ; — travaillant aux journaux plutôt par goût que par besoin, aimant à avoir action sur l’opinion, même sans qu’on le sache ; — Machiavels modérés, dignes de ce nom pourtant par leur vue froide, ferme et fine ; assez libéraux dans leurs résultats plutôt que généreux dans leurs principes ; — sentant à merveille la société moderne, l’éducation moderne par la société, non par les livres ; n’ayant rien des anciens, ni les études classiques, ni le goût de la forme, de la beauté dans le style, ni la morale grandiose, ni le souci de la gloire, rien de cela, mais l’entente des choses, la vue nette, précise, positive, l’observation sensée, utile et piquante, le tour d’idées spirituel et applicable ; non l’amour du vrai, mais une certaine justesse et un plaisir à voir les choses comme elles sont et à en faire part ; un coup d’œil prompt et sûr à saisir en toute conjoncture la mesure du possible ; une facilité désintéressée à entrer dans l’esprit d’une situation et à en indiquer les inconvénients et les ressources ; gens précieux, avec qui tout gouvernement devrait aimer causer ou correspondre pour entendre leur avis après ou avant chaque crise.
Car de ce qu’un homme de mérite se présente aux suffrages d’une compagnie savante et n’est point reçu une première fois, est-ce une raison à lui de saisir aussitôt la plume, d’écrire contre cette académie, contre les membres qui en font partie et dont quelques-uns, comme les Silvestre de Sacy et les Quatremère de Quincy, sont illustres ? […] Ce serment, comme celui de tous les gens possédés d’un démon, faillit être vain, et sa jolie Pétition à la Chambre des députés pour des villageois que l’on empêche de danser (juillet 1822) lui valut un nouveau procès : il en fut quitte pour la saisie de l’ouvrage.
répondit Rousseau, vous aurez la satisfaction d’en avoir six qui dépareront les six autres, car je défie que les copies que vous ferez faire approchent de l’exactitude et de la perfection des miennes. » — « Voyez-vous, reprit Grimm en riant, cette prétention de copiste qui le saisit déjà ? […] Je tâcherai de la bien saisir et de la rendre sensible aux lecteurs sur quelques points décisifs.
C’est s’arrêter à la superficie des choses que d’y voir seulement des effets à saisir et à rendre, de confondre la nature avec un musée, de lui préférer même au besoin un musée. « Vous me mépriseriez trop, dit encore Flaubert à George Sand, si je vous disais qu’en Suisse je m’embête à crever… Je ne suis pas l’homme de la nature et je ne comprends rien aux pays qui n’ont pas d’histoire. […] Il existe sans doute, au fond de tout individu comme de toute époque, un noyau de sensations vives et de sentiments spontanés qui lui est commun avec tous les autres individus et toutes les autres époques ; c’est le fonds de toute existence ; c’est le lieu et le moment où, en étant le plus soi-même, on se sent devenir autrui, où l’on saisit dans son propre cœur la pulsation profonde et immortelle de la vie.
Pas la moindre que l’on puisse saisir. […] A merveille, voilà le vrai Bossuet supérieurement saisi ; mais il y avait donc quelque chose de nouveau à dire, et le premier jugement était incomplet.
Cet aspect des choses, saisi par un esprit supérieur, est devenu pour lui l’univers tout entier. […] Nous ne pouvons connaître que des parcelles de vérité, nous ne pouvons former que des synthèses partielles ; lors même que nous nous élevons jusqu’au premier principe, nous ne saisissons pas le lien qui l’unit à tout le reste.
De Thou, fils de l’historien, ami de Cinq-Mars, fut saisi avec lui pour n’avoir pas révélé le traité, que d’ailleurs il avait désapprouvé154.
Sa collaboration devient d’autant plus difficile à saisir, qu’elle s’est fondue quelquefois dans des articles écrits avec Pierre Leroux, de telle sorte qu’on sent par moments les idées de l’un, le style de l’autre.
Mais lorsque l’opinion publique et la réputation populaire ont la première influence, l’ambition délaisse ce dont l’ambition n’a pas besoin, et l’esprit ne s’exerce point à saisir ce qui est fugitif quand il n’a point d’intérêt à le deviner.
Aussi Pascal, dont la vive imagination saisissait avec force tous les rapports et toutes les oppositions des idées, et qui excellait à les rendre sensibles par des rapports et des oppositions pareilles de mots, comparait les vaines antithèses faites pour arrondir les phrases aux fausses fenêtres qu’on peint sur les murs pour la symétrie.
Quand on lit ses lettres, on est saisi de cette sérénité imperturbable, de cette indifférence aux polémiques et aux passions du temps, de cette régularité laborieuse, de cet esprit d’ordre, qui permirent à Buffon de mener à bonne fin le grand ouvrage qu’il avait conçu.
Écrivain savant, il eût pu, par des histoires sur le cœur des femmes adultères, se saisir de la faveur publique, de l’argent, de la renommée.
» et bousculant l’huissier éberlué, elle force la consigne, s’ouvre accès dans la salle et se saisit du fauteuil.
Tâchons de bien saisir ce que veut l’heure présente.
Elles le saisissent, & le fustigent impitoyablement.
quel côté de choses n’a-t-il point saisi ?
L’accordée debout aussi, un bras passé mollement sous celui de son fiancé ; l’autre bras saisi par la mère qui est assise au-dessous.
Il est dans la vrai-semblance que le témoin oculaire de pareils évenemens, qu’il convient d’emploïer pour en faire le recit, ait été frappé d’un étonnement qui dure encore ; et il seroit ainsi contre la vrai-semblance qu’il se servit dans son recit des figures qu’un homme saisi, et qui ne songe point à être pathetique, ne trouve pas.
Maintenant que l’Église va en être saisie, personne ne peut toucher, pour la grandir, à une gloire catholique qu’elle est sur le point de parachever.
L’intelligence se trouve ainsi replacée dans sa cause génératrice, qu’il s’agirait alors de saisir en elle-même et de suivre dans son mouvement.
Sans prétendre retracer une vie si diverse et si fuyante, il y a eu devoir et plaisir pour nous à bien saisir du moins cette physionomie à laquelle s’attache un enchantement immortel, et qui, même sous ses voiles redoublés, nous venait sourire du fond de notre cadre austère. […] Marsillac saisit décidément le gouvernail de son cœur. […] Un exemple de si chaste et pieuse uniformité agit plus que tout sur cette imagination aisément saisie, sur cette âme à peine échouée et encore trempée du naufrage.
Aussi voyez avec quelle ardeur fébrile l’aristocratique Angleterre a saisi l’idée révolutionnaire de l’unité piémontaise en Italie. L’Angleterre saisit le fer chaud quand il s’agit de prendre une position si redoutable contre la France. […] Croyez-moi, voilà l’alliance du destin de l’Europe ; sachez la voir, sachez la saisir, et, au besoin, sachez la venger !
« Le conventionnel étendit la main et saisit le bras de l’évêque : « — Louis XVII ! […] Il s’exprime en démagogue saisi de la verve du terrorisme, et applaudissant aux fureurs de 1793 ; il s’exprime en ignorant socialiste, en déclamant charitablement contre l’impôt, en oubliant que l’impôt est le superflu du riche et le trésor du pauvre. […] Quel poète ne les a pas éprouvées toutes par la sympathique faculté de saisir tout ce que l’humanité souffre encore en lui ?
C’est à la fois sentiment et sensation, esprit et matière, et voilà pourquoi c’est la langue complète, la langue par excellence qui saisit l’homme par son humanité tout entière, idée pour l’esprit, sentiment pour l’âme, image pour l’imagination, et musique pour l’oreille ! […] J’essayais de comprendre les paroles qu’elle murmurait ainsi et qui venaient jusqu’à moi ; mais mon drogman arabe ne put les saisir ou les rendre. […] Ce spectacle nous saisit tellement d’abord que nous n’arrêtâmes nos regards sur aucun détail de la vallée ; mais quand le premier éblouissement fut passé et que notre œil put percer à travers la vapeur flottante du soir et des eaux, une scène d’une autre nature se déroula peu à peu devant nous.
L’œil saisit la forme animée de l’homme, la compare avec les objets ambiants et l’en différencie. […] En résumé, dans le premier acte, sauf ce mouvement de pitié qui l’a saisie, ses gestes et ses attitudes sont d’une douloureuse possédée : tantôt agitée et frissonnante, tantôt complètement raidie dans son immobilité. […] Quand elle voit que Parsifal échappe à son influence, étonnée, puis saisie par une admiration douloureuse, elle essaie de le retenir.
Ce qui borne ou détruit sa vie, il s’en délivre, Ce qui la lui conserve, il tâche à s’en saisir ; De là le grand combat, pourvoyeur du désir. […] En somme se résoudre aboutit à savoir Quelle secrète chaîne on suivra la dernière ; Toute l’indépendance expire à la lumière Puisqu’on saisit l’anneau sitôt qu’on l’a pu voir. […] Déjà dans la préface, mise en avant de la traduction du De Natura, nous avions pu saisir la même hésitation ; ici elle s’accentue davantage.
Ce chapeau, qui recule toujours au moment où on va le saisir, fait courir le personnage principal, lequel fait courir les autres qui s’accrochent à lui : tel, l’aimant entraîne à sa suite, par une attraction qui se transmet de proche en proche, les brins de limaille de fer suspendus les uns aux autres. […] C’est pourquoi l’idée ne serait pas venue de l’exagérer, de l’ériger en système, de créer un art pour elle, si le rire n’était un plaisir et si l’humanité ne saisissait au vol la moindre occasion de le faire naître. […] On saisit une métaphore, une phrase, un raisonnement, et on les retourne contre celui qui les fait ou qui pourrait les faire, de manière qu’il ait dit ce qu’il ne voulait pas dire et qu’il vienne lui-même, en quelque sorte, se faire prendre au piège du langage.
Ce cerveau de jeune sage, d’une étonnante réceptivité, d’une extrême finesse à saisir les rapports, les analogies, m’intéressait infiniment. […] Paul Adam, jugèrent que le moment était venu de saisir le monde par la voix des quotidiens de la nouvelle bonne nouvelle littéraire. […] Lemaître conclura à la liberté du rythme, quand, plus familiarisé avec le nouveau vers, il en saisira lui-même la musique, sans qu’on ait besoin de la lui expliquer théoriquement. […] Ceux qui savent, en leur âme, saisir l’étendue et la variété des phénomènes sont exempts d’orgueil ou de vanité. […] On cherche à faire saisir la nuance des âmes dont on parle, prochaines de celles des auditeurs, mais qui ont déjà vécu toute leur vie.
Elle ne peut donc franchir la borne que nous venons de poser, mais elle aspire à l’atteindre, elle aspire à se saisir, à s’étudier sous sa forme propre : tant qu’elle n’est pas parvenue jusque-là, son développement est incomplet. […] Mais la philosophie dégage la pensée de toute forme extérieure et finie, et elle la saisit dans son caractère le plus général, le plus abstrait, le plus adéquat à la pensée même. […] C’est quand nous aurons tous ces éléments, quand nous les aurons réduits, quand nous aurons saisi tous leurs rapports, que nous serons en possession des fondements de la raison et de son histoire. […] Voilà l’opposition mutuelle dans laquelle nous nous saisissons ; cette opposition est permanente dans la conscience, elle dure tant qu’il y a conscience. […] La philosophie de l’histoire devra saisir ces ressemblances.
Celle-là saisit l’homme, non plus violemment par l’appât du plaisir immédiat, mais par la séduction de la tendresse. […] Même, à proprement parler, dans cet univers où nous ne saisissons aucune essence, vivons-nous d’autre chose que de symboles ? […] Les analystes qui procèdent par le dehors saisissent merveilleusement les mœurs, l’allée et la venue, le pas et le port de l’animal humain. […] Nul n’a mieux saisi et rendu plus perceptible la minute même où ce contraste se découvre. […] Le secret résidait dans cette incapacité de plus en plus grande à saisir un objet réel.
Je ne sais pas si vous saisissez. […] Il a bien senti que d’un coup, par un coup de maître il saisissait, il étreignait, il dominait tout ce monde charnel, temporel et charnel, tout ce monde de la fécondité, de la perpétuité charnelle, de la race charnelle, et même, par là, même l’entrée, l’inscription, l’insertion de l’éternel dans le temporel, de l’éternel dans le charnel, de la vie éternelle dans la vie charnelle. […] On a commencé de saisir ce que c’est un peu que ce texte extraordinaire, Booz endormi, quand on a vu qu’il est essentiellement un ressaisissement. […] Par une secrète, par une ardente anticipation intérieure, par une secrète prise de possession antérieure de ses palmes, humble, chrétienne, secrète, mais si évidente, pour tous, pour lui-même, par une secrète prise de commandement antérieure, par une secrète saisie antérieure de sa future, de sa prochaine autorité de béatitude il parle, il prie déjà pour sa femme comme un martyr dans le ciel prie pour sa femme qui est restée sur terre. […] Dans ce Paris pourtant désert, (c’était au commencement des vacances et tout le monde était parti ou partait), de mille liens souples et fragiles, imbrisables, nous nous sentîmes saisi.
Ils se plaignaient qu’on ne pût le saisir et qu’il échappât toujours comme Protée. […] Comme il est saisi sur le vif, ce pantin royal ! […] Sortez-en quelques minutes et rentrez : l’odeur de renfermé vous saisit au nez et à la gorge. […] Et nous sommes saisis d’une sorte de terreur religieuse à l’instant où M. […] Il l’ouvre, Césarine profite de l’instant pour saisir le manuscrit qui lui vaudra deux millions.
Les premières craintes de l’accusation, la mine allongée des amis libéraux si hardis la veille, la saisie du pamphlet, le désespoir du libraire, père de sept enfants, la mise en jugement, le réquisitoire de M. le procureur du Roi, le plaidoyer piquant de M. […] d’après la saisie des Tablettes romaines, qui a eu lieu ce matin, croyez-vous que j’aurais pu esquisser avec ce détail la tragédie de la Mort de Henri IV, événement d’hier qui ne compte guère que deux cent quatorze ans de date ? […] Cette comédie de Lanfranc ou le Poète est romantique, par une autre raison bien meilleure que toutes celles que je viens d’exposer, mais, il faut l’avouer, bien autrement difficile à saisir, tellement difficile, que j’hésite presque à vous la dire. […] C’est qu’en dépit de la règle du monosyllabe, pas plus étonnante que tant d’autres, l’homme de génie aurait trouvé le secret d’accumuler dans sa pièce une richesse de pensées, une abondance de sentiments qui nous saisissent d’abord : la sottise de la règle lui aura fait sacrifier plusieurs répliques touchantes, plusieurs sentiments d’un effet sûr ; mais peu importe au succès de sa tragédie tant que la règle subsiste. […] Pour faire des drames romantiques (adaptés aux besoins de l’époque), il faut donc s’écarter beaucoup de la manière de Shakspeare, et par exemple ne pas tomber dans la tirade chez un peuple qui saisit tout à demi-mot et à ravir, tandis qu’il fallait expliquer les choses longuement et par beaucoup d’images fortes aux Anglais de l’an 1600.
Il peint l’homme au naturel, & jamais moraliste ne l’a mieux saisi. […] L’illustre auteur ne s’appesantit point sur les détails, & ne saisit que les branches fécondes de son sujet. […] Il creuse avec une rare sagacité jusqu’au fond du cœur humain ; il saisit les moindres nuances des passions, les petits ressorts des grands desseins, le manége sourd des Cours, & le véritable objet de leurs démarches. […] Villaret ; mais il est aussi moins verbeux, & il paroît avoir mieux saisi le plan de l’Abbé Velli. […] Cet abrégé est agréable par l’art de l’écrivain à répandre quelques fleurs sans affectation, par son talent à esquisser légérement les traits qui caractérisent les principaux personnages, par son exactitude à saisir tout ce qui peut faire connoître le génie, les mœurs & les usages des peuples, ainsi que les productions & les singularités des divers climats.
La Théorie du pouvoir avait été condamnée au pilon par le gouvernement directorial, qui avait fait saisir toute l’édition de cet ouvrage, envoyée de Constance à Paris. […] Qu’est-ce, au fond, que le type de Don Quichotte, si admirablement saisi par Cervantes ? […] Frayssinous, et saisissait l’occasion de lui imposer silence, et la prétention égoïste du despotisme qui veut tout exploiter à son profit. […] Quelques idées sur la rénovation du clergé en France firent naître les ombrages de la police impériale, qui saisit le livre. […] Le talent de M. de Lamartine n’était point le fruit de l’étude et du travail ; son intelligence avait quelque chose de vif et de spontané ; elle saisissait les idées plutôt qu’elle ne les approfondissait.
Leur intelligence se meut comme un être animé ; elle ne comprend que ce qu’elle a saisi, elle ne voit que ce qui est devant elle ; mais ce que cette intelligence a vu ainsi, elle en garde le souvenir fidèle, et ce qu’elle a saisi, sa main vigoureuse ne le laisse plus échapper. […] Ils s’attachent avec ardeur à chaque objet jusqu’à ce qu’ils aient saisi et surpris son âme, l’idée sur laquelle il repose. […] De là les délicates nuances de la vie politique et religieuse anglaise, qui sont si difficiles à saisir pour des yeux étrangers habitués aux couleurs tranchées. […] Taine, mais aller au-delà et saisir cet instinct universel dont l’instinct de race n’est qu’une première diminution et une première altération. […] Arrivé à Lyon il fut immédiatement saisi et conduit devant le gouverneur de la ville, le marquis de Saint-Chaumont, qui pour lors était aux vêpres.
Ces discours, comme je l’ai dit, n’ont pas pour but mon apologie ; c’est seulement une occasion que je saisis, pour faire sur la tragédie des réflexions qui m’instruisent moi-même, et qui en même-tems puissent être de quelque utilité pour les auteurs dramatiques, et de quelque agrément pour les lecteurs. […] L’amour effréné de Ladislas, le dedain généreux de Cassandre, et la fureur du prince, où se faisant illusion à lui-même, il croit ne plus voir qu’avec le dernier mépris ce qu’il adore plus que jamais ; tout cela saisit l’ame et ne laisse plus d’attention qu’aux grands mouvemens des acteurs. […] Qu’il y eût dans une piéce cinq ou six endroits susceptibles d’une plaisanterie, ou de quelqu’autre ridicule, je parirois hardiment pour sa chûte ; car, j’en demande pardon à la nation, elle est trop aisée à tirer du sérieux : il est vrai qu’elle saisit le ridicule avec une extrême finesse, mais en général, elle n’a ni l’équité ni la force de ne l’aprétier pas plus qu’il ne vaut. […] La critique a saisi avidement cette apparence de contradiction ; et faute d’intelligence, ou de bonne foi, elle m’en fait le reproche le plus amer. […] La réponse ne seroit pas valable, puisque la différence des lieux n’y est pas l’effet de la machine, mais souvent dans la dispute on n’a pas la force de céder à la raison, dès qu’on peut saisir un prétexte pour s’y dérober.
Esclave insoumis, il se redresse sous le joug ; poltron révolté, il ose menacer sa maîtresse ; il lève la main sur elle, et la saisit aux cheveux pour l’amener de force à lui ! […] Une nuit, sous les cimes neigeuses de Kidar-Kanta, dans une forêt élevée à dix mille pieds au-dessus du niveau de la mer, il est saisi de douleurs d’entrailles si atroces qu’il en a le délire. […] notre digne compatriote se sentit tellement blessé de ce manque de respect, que, transporté de colère, il saisit le drôle par sa longue queue tressée, et le précipita à bas de son cheval. […] Il a pour les chevaux une passion véritablement furieuse ; il a fait des guerres meurtrières pour saisir chez un voisin un cheval qu’on lui refusait. […] Le 7 décembre, il fut saisi de douleurs violentes qui annoncèrent sa fin.
Les écrivains se moquent quelquefois de cette bonne compagnie avant d’y être admis, mais il est bien rare qu’ils en saisissent le ton ; or, ce ton n’est autre chose que « l’art de ne blesser aucune bienséance ». […] Il me semble qu’on saisit nettement dans ce passage l’esprit et le sens de la correspondance de Bernis avec Voltaire, et que ce vœu principal rachète les concessions un peu risquées que le gracieux prélat a paru faire en d’autres endroits aux agaceries de son interlocuteur.
Duclos, qui est philosophe et qui méprise l’astrologie, dit en deux mots : « L’on prédit, suivant l’usage, beaucoup de choses vagues, et flatteuses pour le prince régnant. » Je n’ai pas grand regret à la suppression du détail de l’horoscope ; mais, comme Duclos appliquera presque partout cette méthode de suppression et retranchera les détails qui peignent le temps, il en résulte à la longue maigreur et sécheresse, tandis que l’abbé Le Grand, qui ne songe qu’à raconter fidèlement et non à peindre, se trouve présenter un récit qui a plus de corps et de substance, et qui est nourri de ces choses particulières que l’esprit aime à saisir. […] L’adroite Chausseraye saisit le moment et répondit au roi « qu’il était bien bon de se laisser tourmenter de la sorte à faire chose contre son gré, son sens, sa volonté ; que ces bons messieurs ne se souciaient que de leur affaire et point du tout de sa santé, aux dépens de laquelle ils voulaient l’amener à tout ce qu’ils désiraient ; qu’en sa place, content de ce qu’il avait fait, elle ne songerait qu’à vivre et à vivre en repos, les laisserait battre tant que bon leur semblerait, sans s’en mêler davantage ni en prendre un moment de souci, bien loin de s’agiter comme il faisait, d’en perdre son repos et d’altérer sa santé, comme il n’y paraissait que trop à son visage ; que, pour elle, elle n’entendait rien ni ne voulait entendre à toutes ces questions d’école ; qu’elle ne se souciait pas plus d’un des deux partis que de l’autre ; qu’elle n’était touchée que de sa vie, de sa tranquillité, de sa santé… ».
Ceux-ci, en effet, gens économes par nature, sont payés pour croire qu’on court après l’esprit quand on en a plus qu’eux : « Messieurs, lisez-moi, semblent-ils dire ; vous verrez un homme qui pense simplement, raisonnablement, qui va son grand chemin, qui ne pétille point : et voilà le bon esprit. » Selon Marivaux plaidant dans sa propre cause, « il y a un certain degré d’esprit et de lumières au-delà duquel vous n’êtes plus senti ; c’est même un désavantage qu’une si grande finesse de vue, car ce que vous en avez de plus que les autres se répand toujours sur tout ce que vous faites, embarrasse leur intelligence » ; on vous accuse d’être obscur par trop de subtilité ; et il conclut avec découragement, et en ayant l’air de consentir, par égard pour les lecteurs vulgaires, à ne plus être sagace qu’à demi : « Peignez la nature à un certain point, mais abstenez-vous de la saisir dans ce qu’elle a de trop caché ; sinon vous paraîtrez aller plus loin qu’elle, ou la manquer. » Tels étaient les ingénieux sophismes que le désir de se justifier suggérait à Marivaux, et sur lesquels il revient en vingt endroits. […] Marivaux a, sur les portraits, une théorie comme sur tout ; il est d’avis qu’on ne saurait jamais rendre en entier ce que sont les personnes : Du moins, cela ne me serait pas possible, nous dit-il par la bouche de Marianne ; je connais bien mieux les gens avec qui je vis que je ne les définirais ; il y a des choses en eux que je ne saisis point assez pour les dire, et que je n’aperçois que pour moi et non pas pour les autres… N’êtes-vous pas de même ?
Né à Montrejeau dans la Haute-Garonne, en 1773, d’une bonne famille bourgeoise à mœurs patriarcales, il avait dix-neuf ans, avait fait ses études au collège de Tarbes, et était destiné par ses parents à l’état ecclésiastique, lorsque, la société changeant subitement de face, la levée en masse le saisit. […] On saisit parfaitement dans le récit de Pelleport cette transformation presque soudaine, mais qui pourtant a ses degrés.
Je saisis à tout instant cette ficelle de son amour-propre dans ses jugements. […] Horace Vernet a saisi et rendu à merveille cette mesure, cette proportion des hommes et des combattants entre eux.
En arrivant à Tolède, la nouvelle reine fut reçue par don Carlos, et, à la vue de ce jeune prince déjà malade de la fièvre et tout exténué, cette jeune femme fut saisie d’un mouvement de compassion et de tendre pitié qui se peignit sur son visage et dans son regard : don Carlos le sentit, fut touché de son accueil, et « dès ce moment il conçut pour elle des sentiments de respect et de déférence qui ne se démentirent jamais depuis. » C’est à cette limite qu’il convient de s’arrêter, et rien de ce que les romanciers et poètes ont imaginé d’un sentiment mutuel entre la reine et son beau-fils n’a le moindre fondement ni même le moindre prétexte historique. […] On se saisit de ses armes qu’il avait toujours à son chevet.
Il n’y a pas de système absolu ; la défensive n’est bonne qu’autant qu’elle peut se convertir, à un moment donné, en offensive rapide, et l’un des plus grands talents d’un général est de savoir saisir à point l’initiative, même dans une lutte de pure défense. […] Il y eut pourtant bien de la peine et de la difficulté avant d’en pouvoir saisir l’occasion.
On lui a opposé, d’une part, qu’il disait des choses trop évidentes et qui étaient tout accordées, et de l’autre, qu’il en demandait d’impossibles, en croyant pouvoir saisir et dérober le secret du génie, et en voulant suppléer au sens indéfinissable du goût. […] Et pourtant je sens la force ou plutôt l’agrément des raisons qu’on m’oppose ; je le sens si bien, que je suis tenté parfois de m’y associer et de pousser aussi mon léger soupir ; tout en marchant vers l’avenir, je suis tout prêt cependant, pour peu que j’y songe, à faire, moi aussi, ma dernière complainte au passé en m’écriant : Où est-il le temps où, quand on lisait un livre, eût-on été soi-même un auteur et un homme du métier, on n’y mettait pas tant de raisonnements et de façons ; où l’impression de la lecture venait doucement vous prendre et vous saisir, comme au spectacle la pièce qu’on joue prend et intéresse l’amateur commodément assis dans sa stalle ; où on lisait Anciens et Modernes couché sur son lit de repos comme Horace pendant la canicule, ou étendu sur son sofa comme Gray, en se disant qu’on avait mieux que les joies du Paradis ou de l’Olympe ; le temps où l’on se promenait à l’ombre en lisant, comme ce respectable Hollandais qui ne concevait pas, disait-il, de plus grand bonheur ici-bas à l’âge de cinquante ans que de marcher lentement dans une belle campagne, un livre à la main, et en le fermant quelquefois, sans passion, sans désir, tout à la réflexion de la pensée ; le temps où, comme le Liseur de Meissonier, dans sa chambre solitaire, une après-midi de dimanche, près de la fenêtre ouverte qu’encadre le chèvrefeuille, on lisait un livre unique et chéri ?
Il y a dans les Mémoires de Malouet une phrase dont je ne saisis pas bien le sens : c’est lorsque, venant de parler des projets de M. de Bouille pour le rétablissement de l’autorité royale, il ajoute : « J’imaginai cependant de donner un successeur à Mirabeau ; et la reine, qui ne connaissait pas mon projet, quoique j’en eusse prévenu M. de Montmorin, eut un moment d’humeur contre moi, et dit publiquement à son jeu qu’elle ne concevait pas comment M. […] On l’avait fait imprimer à l’avance, et toute l’édition, à l’abri de la saisie, attendait chez Malouet le moment de s’envoler ; les initiés comptaient sur un immense succès d’opposition et de surprise.
En me remettant à la lecture de Du Bellay et en reprenant de lui ce premier écrit par lequel il a ouvert, pour ainsi dire, l’ère de la Renaissance française, je me suis senti saisi d’un regret, et j’ai comme embrassé d’un seul regard la période tout entière, le stade littéraire où il entrait en courant, le flambeau à la main, stade glorieux, et qui, coupé, continué, accidenté et finalement développé pendant près de deux siècles et s’y déroulant avec bien de la variété et de la grandeur, n’a été véritablement clos et fermé que de nos jours. […] et Du Bellay rappelle cette parole de Molon de Rhodes qui, entendant déclamer Cicéron, en fut saisi de tristesse : « Il ne nous restait plus que la gloire de l’éloquence, et ce jeune homme va nous l’enlever !
Lamartine, vers le même temps, aima et lut sans doute beaucoup le Génie du Christianisme, René : si sa simplicité, ses instincts de goût sans labeur ne s’accommodaient qu’imparfaitement de quelques traits de ces ouvrages, son éducation religieuse, non moins que son anxiété intérieure, le disposait à en saisir les beautés sans nombre. […] Si, en effet, Lamartine resta tout à fait étranger au travail de style et d’art qui préoccupait alors quelques poëtes, il ne restait nullement insensible aux prodigieux résultats qu’il en admirait chez son jeune et constant ami, Victor Hugo ; son génie facile saisit à l’instant même plusieurs secrets que sa négligence avait ignorés jusque-là.
Eugène surtout (à qui nous devons bien, puisque nous l’avons nommé, ce triste et religieux souvenir), adolescent mélancolique, plus en proie à la lutte, plus obsédé et moins triomphant de la vision qui saisit toutes les âmes au seuil du génie et les penche, échevelées, à la limite du réel sur l’abîme de l’invisible, Eugène a exprimé dans le recueil cette pensée pénible, cet antagonisme désespéré, ce Duel du précipice ; la poésie soi-disant erse, qu’il a composée sous ce nom, est tout un symbole de sa lugubre destinée. […] Sa course lyrique, qui est bien loin d’être close, offre pourtant assez d’étendue pour qu’on en saisisse d’un seul regard le cycle harmonieux ; mais il n’est encore qu’au seuil de l’arène dramatique ; il y entre dans toute la maturité de son observation, il s’y pousse de toutes les puissances de son génie : l’avenir jugera.
Scribe n’en a saisi et reproduit les traits distinctifs tout en nuances, l’assortiment de positif, d’intrigue et de jouissance, l’industrialisme orné, élégant. […] Mais une fois pourtant, une seule fois, vous m’avez de vous-même saisi tout d’un coup et pressé bien tendrement la main : et c’était en loge au Gymnase, à la fin d’Une Faute.
Qu’on ouvre les livres du Père Garasse, ceux de Pierre Mathieu, si étrangement réhabilité de nos jours ; la pensée n’y va qu’à travers toutes sortes d’allusions érudites et sous une marqueterie de métaphores, toutes plus raffinées les unes que les autres, et qui ne permettent presque jamais de saisir le fil direct et simple. […] Ampère, qui reprend les choses dès l’origine et les embrasse dans tout leur cours selon chacune des branches de leur développement, a cet avantage de n’omettre aucune des influences et aucun des précédents que les autres critiques n’ont saisis jusqu’ici que par un heureux hasard de coup-d’œil ou de réminiscence, et comme à la volée.
On était donc à s’étendre asse complaisamment à l’article des sollicitations de Mme de Pontivy, quand Mme de Tencin, qui venait de la complimenter sur son redoublement de beauté, ajouta tout d’un coup, comme saisie d’une inspiration lumineuse : « Mais que ne voit-elle M. le Régent ? […] Il comprit qu’il avait manqué ; il se confessa coupable de n’avoir pas saisi à l’instant cette même impression.
Ainsi Ysengrin le loup ne songe nulle part à manger Belin le mouton, mais il se nourrit de tous les congénères de dam Belin qu’il peut saisir dans les champs et dans les pares. […] Comme on n’y saisit pas d’intention de faire vrai, on n’y trouve guère aussi trace d’observation : quand le trait est juste, c’est d’instinct, par une bonne fortune de l’œil et de la main.
Il n’a pas saisi non plus le lien plus délicat, mais non moins réel, du bucolique à l’épique. […] Cependant on saisit sa pensée à travers l’insuffisance de l’expression : il faut la vérité, et il faut la vraisemblance ; la vraisemblance, c’est la vérité rendue sensible par une forme d’art.
Par l’art seul, l’intelligence et la volonté saisissent leurs objets qui, partout ailleurs, leur échappent : dans l’art seulement, l’homme peut connaître et créer ; hors de l’art, il n’y a qu’illusion et impuissance. […] Zola : cinq ou six de ses romans sont des visions grandioses qui saisissent l’imagination.
A égale distance de la colère du satirique et de l’austérité du prédicateur, il se tient dans une sorte de sérénité aimable ; plus heureux d’avoir trouvé le trait vif, saisi le ridicule et créé l’expression qui le peint, qu’affecté de la tristesse de sa matière et du peu d’efficacité probable de la leçon. […] Comme notre auteur, après avoir affirmé nous doutons ; nous passons de la bonne opinion à la mauvaise ; la mélancolie nous saisit tout riants et tout raillants encore, la gaieté à peine envolée, le visage à peine rentré dans cette gravité un peu triste qui est notre air naturel.
Il faut pareillement lui rendre hommage de ce que les abstractions qu’il a recherchées, et les modalités qu’il a rendues, et les formes qu’il a saisies, aspirent à se maintenir homogéniques, et de graduation précise, et de précise corrélativité, et condescendent aux mérites des choses, à leurs besoins légitimes, comme à leurs caprices. […] Au contraire, tout en sentant qu’il devait moralement y perdre, mais pour la piquante saveur du geste qui devait en résulter, il se laissa aller si voluptueusement, devant les choses, à son goût de n’en saisir que le défaut, que ce fut miracle si, en en décrétant l’étrange et manifeste irrespectabilité, il lui resta encore assez de cœur pour en amuser seulement sa chère âme conciliatrice.
Contre ceux qui contrevenaient aux ordonnances étaient édictées les peines les plus sévères comportant pour les libraires la saisie des exemplaires mis en vente, l’amende, la prison, le pilori, les galères, entraînant pour les auteurs le bannissement, la Bastille, et même en certains cas la mort. […] Certains livres d’audacieuse théorie (par exemple La société mourante de Jean Grave) y ont été saisis voici quelques années à peine.
Pour saisir le jeu de ces mouvements qui se mêlent et s’entrecroisent, on est souvent obligé de sortir de l’époque qu’on étudie, de regarder ce qui l’a précédée et ce qui l’a suivie. […] Reproduire cette division traditionnelle peut être en pareille occurrence une façon de mieux faire saisir l’esprit du moment.
Nous saisissons ici Huet au plus vif instant de son premier état de cavalier. […] À propos des poésies latines ou françaises qu’échangent entre eux Huet et Ménage, on se plairait à saisir quelques saillies de jeunesse du futur prélat, quelque filet de verve gauloise et rabelaisienne.
Didot son Épître sur l’imprimerie, qu’on peut lire dans ses Poésies, et dans laquelle se trouvent quelques jolis vers descriptifs : Au lieu de fatiguer la plume vigilante, De consumer sans cesse une activité lente À reproduire en vain ces écrits fugitifs, Abattus dans leur vol par les ans destructifs ; Pour donner une forme, un essor aux pensées, Des signes voyageurs, sous des mains exercées, Vont saisir en courant leur place dans un mot ; Sur ce métal uni l’encre passe, et bientôt, Sortant multiplié de la presse rapide, Le discours parle aux yeux sur une feuille humide. […] Convalescent, une bonne pensée le saisit ; il partit pour Provins et alla demander l’hospitalité à Mme Guérard à la ferme de Saint-Martin.
On est tenté de se demander si c’est Mme de Lambert qui a été tout d’un coup saisie de la maladie de bel esprit à soixante ans, et si ce n’est pas plutôt lui qui a été pris d’un redoublement de sévérité et de scrupule. […] Son défaut le plus sensible à la longue est d’affecter continuellement l’analyse, d’aimer les phrases à plusieurs membres et à compartiments, qui forcent l’esprit à saisir des rapports complexes.
Il aborde, en finissant, la grande et nouvelle passion qui a produit la fièvre nationale et le délire dont la France a été saisie : c’est la passion philosophique, le fanatisme philosophique. […] Rivarol, qui depuis quelques mois était à Berlin, y fut saisi en avril 1801 d’une maladie qui l’emporta en peu de jours.
» Cette mystérieuse angoisse le poursuit sans relâche, tinte dans sa mémoire comme un glas, ou le saisit comme un frisson et c’est de même, comme hanté d’incessantes inquiétudes, l’âme malade, toujours émue de sentiments tristes, d’une tristesse à peine causée, que Heine en est venu à ne rendre dans les sujets les plus usuels de sa poésie, que la moitié de mélancolie qu’ils comportent presque tous. […] » « Oui, je suis revenu à Dieu. » et ailleurs, dans cette préface du Romancero qui est sa confession finale, comme l’enfant prodigue, après avoir gardé les pourceaux chez les Hegeltiens : « Le mal de la patrie céleste m’a saisi et m’a entraîné par monts et par vaux, à travers les sentiers les plus ardus de la dialectique.
L’étude, le goût acquis, la réflexion saisiront fort bien la place d’un vers spondaïque, l’habitude dictera le choix d’une expression, elle séchera des pleurs, elle laissera couler les larmes ; mais frapper mes yeux et mon oreille, porter à mon imagination, par le seul prestige des sons, le fracas d’un torrent qui se précipite, ses eaux gonflées, la plaine submergée, son mouvement majestueux et sa chûte dans un gouffre profond, cela ne se peut. […] On y discerne, on est frappé par un cavalier vu par le dos et par la croupe de son cheval blanc et vigoureux ; il porte un étendart qu’un fantassin, qui est à sa gauche, cherche à lui enlever avec la vie ; mais ce cavalier a saisi la garde de l’épée du fantassin, et va lui plonger la sienne dans la gorge.
S’il saisit l’idée russe, il comprendra les erreurs de notre peuple. […] Monsieur, j’ai eu une maîtresse juive qui s’appelait Morpurgo et qui est la propre nièce de Madame Bourget ; aussi, voyez-vous, nous sommes un peu parents. » (p. 67) Bourget se saisit alors des seins de métal et assomme Apollinaire, qui crie à l’aide : ses amis qui encerclaient le Lapin agile entrent, étendent Bourget à terre et, à l’invitation insistante d’Apollinaire, Cocteau place son pied sur la tête de Bourget.
ce soi-disant Destin pour les nations modernes aurait pu périr, comme une chose humaine, sous une main forte qui l’eût saisi et étreint comme Hercule étreignit les serpents de son berceau. […] Or, cet aveuglement de l’esprit et ce vice de la volonté n’étant point, quand la Révolution éclata, dans la masse du peuple, mais, comme l’a prouvé Cassagnac, uniquement dans ceux qui la menèrent et l’égarèrent, nous parler à fond de ces meneurs coupables, nous ouvrir leur âme, passer de l’homme public, exagéré par la perspective du théâtre, à l’homme privé, saisi dans la stricte rigueur de ses habitudes et de ses passions, dans ce terrible tous les jours de la vie qui nous en dit tant sur les hommes !
… Comment lui, dont les premiers chants furent des cris étouffés si poignants, et les peintures d’une réalité qui saisissait le cœur comme la vie même, comment ce Rembrandt du clair-obscur poétique qui s’annonçait alors, est-il devenu, la vie aidant, avec les expériences, ses blessures et les ombres sinistres qu’elle finit par jeter sur toutes choses, moins pénétrant, moins mordant, moins noir et or (la pointe d’or dans un fond noir), qu’en ces jeunes années où l’on est épris des roses lumières ? […] Si dans l’ombre et la paix leur cœur timide habite, Si le sillon pour eux est celui qu’on évite, Que guerres et périls s’en viennent les saisir, Ils ont chef Catinat, le héros sans désir !
A propos du lamentable massacre de la rue Transnonain, Daumier se montra vraiment grand artiste ; le dessin est devenu assez rare, car il fut saisi et détruit. […] Au lieu de saisir entièrement et d’emblée tout l’ensemble d’une figure ou d’un sujet, Henri Monnier procédait par un lent et successif examen des détails.
Quant à moi, j’y saisis l’expression la plus complète, la plus précise et la plus raffinée de cet état spécial a quelques-uns de nos jeunes artistes, que je qualifierais de terreur du réel ou d’onanisme mental. […] S’il parle de choses pratiques d’importance vulgaire, il saura employer de telles périphrases qu’il vous est impossible, après l’avoir quitté, de répéter un seul mot de son langage, d’une imprécision tellement esthétique, que l’homme le mieux doué ne pourrait en saisir le sens réel.
Des talents qui s’ignoraient dans l’oisiveté d’une vie stagnante furent saisis d’une ardeur inattendue. […] Laisse-moi regarder ton éclatante lumière ; et que mon âme, saisie d’un pur enthousiasme, soit digne de te contempler !
Les amis et les admirateurs de M. de Tocqueville, en le perdant, ont été saisis en effet d’une crainte : c’est qu’il ne fût pas assez dignement loué, et que sa renommée sérieuse ne resplendît point suffisamment.
Je faisais dès ce temps-là des vers, mais pour moi seul et sans m’en vanter : je saisis vite les choses neuves que j’entendais pour la première fois et qui, à l’instant, m’ouvrirent un jour sur le style et sur la facture du vers ; comme je m’occupais déjà de nos vieux poëtes du xvie siècle, j’étais tout préparé à faire des applications et à trouver moi-même des raisons à l’appui.
Qu’on essaie pourtant de traduire, et l’on sentira confusément qu’il y a, malgré la difficulté extrême de les saisir, bien des tours français répondant à ceux de l’historien latin, et que la traduction d’une phrase de Cicéron ou de Tite-Live, si elle est plus facile à commencer, est aussi plus difficile à finir.
Et nous nous disions : Si, au lieu d’une Vie de Napoléon Bonaparte, Walter Scott avait eu l’idée d’écrire un roman historique où ce personnage eût joué un rôle, s’il avait saisi cette occasion pour peindre des scènes de la Révolution française et pour montrer en action quelques-uns des caractères principaux qui s’y rencontrent, il eût fait un ouvrage plus intéressant à coup sûr que son histoire, mais également plein de vues fausses, de descriptions superficielles, et de portraits de fantaisie : et pourtant Walter Scott a eu sur cette période contemporaine autant et plus de renseignements que sur les époques d’Ivanhoë, de Quentin Dthrward, d’Élisabeth, de Cromwell et des Puritains.
Un moment, son désespoir est au comble ; l’ironie va le saisir, et, prenant l’existence pour l’amer sarcasme d’un maître jaloux, il est prêt à lui rendre mépris pour mépris, à le maudire et à le railler ; — ou bien, à d’autres instants, la défaillance le poussant à la mollesse, il se demande s’il n’est pas mieux de prolonger les voluptés jusqu’à la tombe et de se noyer l’âme sur des seins embaumés de roses.
Puis, quand il a tout énuméré, quand il a touché une à une toutes ces plaies du cœur, une pensée le saisit, une inquiétude le prend, qu’a ressentie quiconque est resté orphelin ici-bas ; il se demande si tous ces morts qui voient désormais la lumière se souviennent encore de nous.
Cela étant, les prolétaires, c’est-à-dire les non-propriétaires, la classe des ouvriers des villes et des paysans des campagnes, arrivent de droit à saisir le rôle laissé vacant par l’avancement de la bourgeoisie.
Mais il ne présente point la morale in abstracto : il la saisit dans la réalité qui la manifeste ou la contredit.
Une sorte d’aveuglement, habilement ménagé par la nature, vous présente l’existence comme une proie désirable, que vous aspirez à saisir.
Méditant ce petit traité littéraire et didactique, il était encore dans cette mystérieuse ivresse de la composition, instant bien court, où l’auteur, croyant saisir une idéale perfection qu’il n’atteindra pas, est intimement ravi de son ouvrage à faire ; il était, disons-nous, dans cette heure d’extase intérieure, où le travail est un délice, où la possession secrète de la muse semble bien plus douce que l’éclatante poursuite de la gloire, lorsqu’un de ses amis les plus sages est venu l’arracher brusquement à cette possession, à cette extase, à cette ivresse, en lui assurant que plusieurs hommes de lettres très hauts, très populaires et très puissants, trouvaient la dissertation qu’il préparait tout à fait méchante, insipide et fastidieuse ; que le douloureux apostolat de la critique dont ils se sont chargés dans diverses feuilles publiques, leur imposant le devoir pénible de poursuivre impitoyablement le monstre du romantisme et du mauvais goût, ils s’occupaient, dans le moment même, de rédiger pour certains journaux impartiaux et éclairés une critique consciencieuse, raisonnée et surtout piquante de la susdite dissertation future.
Mais tout ce peuple fut saisi de fraïeur dès qu’on eut étalé devant lui la robe sanglante dans laquelle Cesar avoit été massacré.
Ce que l’analyse ne sçauroit trouver, le sentiment le saisit d’abord.
Ce dernier étoit composé uniquement des gestes et des démonstrations de gens que le froid saisit.
Laissez, au contraire, le Pape, qui est le souverain pontife de la parole, saisir dans toute son étendue le gouvernement spirituel de la chrétienté ; que le prêtre soit en même temps citoyen de l’état et sujet du chef de l’Église ; et que le chrétien exerce ses droits politiques ou remplisse ses devoirs religieux, sans que ces deux sortes d’actes aient aucune liaison entre eux.
Ceux qui sont aptes de nature à recevoir le contrecoup de l’émotion voilée et contenue dans un livre, par un autre côté vibrant et sonore, saisiront bien le double accent de ce livre, et ils en seront touchés comme nous l’avons été.
Il faut qu’il renonce à prendre ce bel oiseau bleu des Nuits, encore plus farouche et plus difficile à saisir que le bel oiseau bleu des Jours.
« Il se demanda si la société humaine pouvait avoir le droit de faire également subir à ses membres, dans un cas son imprévoyance déraisonnable, et dans l’autre cas sa prévoyance impitoyable ; et de saisir à jamais un pauvre homme entre un défaut et un excès, défaut de travail, excès de châtiment ; « S’il n’était pas exorbitant que la société traitât ainsi précisément ses membres les plus mal dotés dans la répartition des biens que fait le hasard, et par conséquent les plus dignes de ménagements. […] Les flots déchirés et déchiquetés par le vent l’environnent hideusement, les roulis de l’abîme l’emportent, tous les haillons de l’eau s’agitent autour de sa tête, une populace de vagues crache sur lui, de confuses ouvertures le dévorent à demi ; chaque fois qu’il enfonce, il entrevoit des précipices pleins de nuit ; d’affreuses végétations inconnues le saisissent, lui nouent les pieds, le tirent à elles ; il sent qu’il devient abîme, il fait partie de l’écume, les flots se le jettent de l’un à l’autre, il boit l’amertume, l’océan lâche s’acharne à le noyer, l’énormité joue avec son agonie. […] On sentait dans la salle cette espèce de terreur religieuse qui saisit la foule lorsque quelque chose de grand s’accomplit.
Je désirais saisir le monde des phénomènes et des forces physiques dans leur connexité et leur influence mutuelles. […] Pour bien saisir la grandeur du Cosmos, il ne faut pas subordonner la partie sidérale, que Kant a appelée l’histoire naturelle du ciel, à la partie terrestre. […] « Les moyens propres à répandre l’étude de la nature consistent, comme nous l’avons dit déjà, dans trois formes particulières sous lesquelles se manifestent la pensée et l’imagination créatrice de l’homme : la description animée des scènes et des productions de la nature ; la peinture de paysage, du moment où elle a commencé à saisir la physionomie des végétaux, leur sauvage abondance, et le caractère individuel du sol qui les produit ; la culture plus répandue des plantes tropicales et les collections d’espèces exotiques dans les jardins et dans les serres.
Bossuet saisit fortement les deux ou trois aspects principaux de sujet, les deux ou trois difficultés importantes, les deux ou trois raisons capitales, et il va droit aux choses dont la décision emporte le reste. […] Il a saisi dans leur caractère, dans leur activité, un trait, un caractère, qui mettaient bien en lumière une vérité importante du dogme ou de la morale : et c’est sur cette vérité qu’il prêchait son panégyrique. […] Mais, malgré tout, les chapitres de la Grèce et de Borne sont remarquables : Bossuet a mis en lumière la force de quelques causes morales, amour de la patrie, respect de la loi ; il a saisi le rapport des faits à certaines institutions ou traditions ; il a expliqué la lente et sûre formation de la grandeur romaine par les qualités d’endurance et de discipline de la race, par l’organisation militaire, par l’esprit conservateur du sénat qui, dans la politique étrangère, met la continuité ; la moitié des Considérations de Montesquieu vient de Bossuet.
Nous pouvons saisir le résultat de l’effort romantique, nous qui aujourd’hui ne pouvons guère écrire même sur des idées, sur des matières de raisonnement, sans essayer de retenir ou de projeter dans nos mots nos sensations734. […] Ce n’est pas qu’il ne sache comprendre, regarder, raconter753 ; mais je tâche de saisir ici la disposition fondamentale de son âme. […] Mais des rythmes de chanson, très habilement choisis en vérité : des rythmes nets, vifs, qui saisissent l’oreille, que le vers impose presque à la simple lecture, par sa coupe précise et arrêtée.
Il y a eu un peuple d’aristocrates, un public tout entier composé de connaisseurs, une démocratie qui a saisi des nuances d’art tellement fines que nos raffinés les aperçoivent à peine. […] Le diable s’empara de lui à tel point qu’armé de couteaux, de pierres, de bâtons, de tout ce qu’il pouvait saisir, il poursuivait les gens qu’il voyait. […] Ils faisaient chauffer les écus dans un poêlon, puis les jetaient dans la rue, riant aux éclats des efforts de la canaille pour s’en saisir.
sa petite main porte distinctement les lignes mystérieuses, pronostic certain de la souveraineté : je les vois briller, ces lignes, légèrement entrelacées en réseau le long de ses doigts délicats, tandis qu’il les étend pour saisir avec avidité l’objet qu’il désire. […] Dans son enfance il voulut courir après le soleil, comme un enfant court après une boule pour la saisir ; il prit son élan, tomba, et sa chute le rendit difforme. […] » lui dit-il, « mon bras vient d’exaucer ton vœu ; ton éléphant favori, celui qui, dans les premiers ébats de son enfance, allongeait sa trompe adroite et délicate pour saisir autour de tes oreilles les fibres du lotus qui leur servaient de pendants parfumés, maintenant il défie le puissant monarque de la forêt !
Retrouver l’immuable dans le variable, l’unité dans la diversité, en un mot, la loi dans le fait, saisir les mêmes traits, les mêmes caractères dans cette variété d’actions, de pensées, d’institutions, de mœurs, de langues, que nous présentent les annales du monde, telle est l’idée fixe de Vico. […] Avec cette démocratie de plus en plus libérale et intelligente, toujours accessible, même dans les jours de crise, à l’action des sentiments et des idées, la dictature, nous en convenons, devient de plus en plus difficile à saisir et à manier. […] Le moraliste qui voit par quels moyens un roi comme Louis XI travaille à l’établissement de la monarchie et à la constitution de la patrie française ne peut être que saisi d’horreur et de dégoût.
En attendant, on saisit ses meubles, ses biens et tous ses revenus. […] L’homme, sentant son avantage, se précipita contre lui, et, avant qu’il l’eût joint, le second voleur, arrivant par derrière, l’avait déjà saisi à l’épaule et renversé. […] C’est œuvre de critique, non de poésie ; un poète trop habile à saisir de pareilles nuances pourrait avoir à payer cet avantage au prix de la grande inspiration. […] Jamais le vertige ne l’a saisi, jamais le brouillard n’a troublé sa vue. […] S’il ne saisit pas tout, si beaucoup de choses lui échappent, est-ce donc une infirmité particulière à son âge, et n’en sera-t-il pas de même toute sa vie ?
Il faut avoir vu la figure dans les attitudes, dans les impressions les plus diverses, en avoir saisi, par la pensée, le caractère, et, s’étant bien fixé ce caractère dans l’esprit, s’en faire comme un modèle invisible. […] L’imagination consiste à saisir, à exprimer des rapports, parfois Insaisissables, pour d’autres facultés, mais toujours vrais, profonds, éternels. […] Il saisit des nuances imperceptibles dans la forme extérieure que prennent les passions ; il entend la signification morale du moindre regard, de la moindre inflexion de la voix ou des traits du visage. […] Il faut que son esprit et son cœur aient été profondément saisis et remués ; il faut qu’il ait beaucoup senti, beaucoup agi, beaucoup vécu, pour être en état de révéler dans son œuvre les mystères de la vie. […] Il est contraire à l’essence de la prose de nous présenter les objets sous l’aspect qui saisit l’imagination.
De la main gauche, je saisis fortement le nez de l’animal, et je fléchis le museau en bas, de manière à le rapprocher du cou, afin de faire saillir la bosse occipitale externe par cette flexion de la tête, et rendre aussi grand que possible l’écartement occipito-atloïdien. […] Par cette incision étroite, pénétrant dans l’abdomen, j’introduis le doigt de la main gauche, et, en suivant la face intérieure du foie jusqu’au niveau de l’hiatus de Winslow, pour saisir le paquet des vaisseaux et nerfs biliaires entre le foie et le duodénum. […] Puis ouvrant le diaphragme en avant et du côté de l’appendice xiphoïde, je saisis avec les doigts la partie de la veine cave inférieure située dans le thorax, et j’en fais la ligature entre le foie et le cœur. […] Messieurs, Nous saisissons, à mesure qu’elles se présentent, toutes les occasions de vous rendre témoins des faits que nous vous avons annoncés ici. […] En physiologie, en effet, les phénomènes sont tellement complexes, et pour décider une question il faut avoir présents à l’esprit une telle masse de faits, que nous comprenons sans peine le trouble et l’hésitation qui saisissent l’esprit du public, quand on vient devant lui contester les faits les mieux établis par des raisonnements dont il ne saisit pas, au premier abord, le peu de valeur réelle.
Notre franciscain est saisi d’horreur à l’article autorité. […] Il est saisi de douleur, en voyant sa gloire poëtique, cette consolation imaginaire dans des malheurs trop réels, attaquée de tous côtés. […] Naudé fit présenter une requête au Châtelet, pour faire saisir & supprimer les exemplaires des livres de Quatremaires & de Valgrave. […] Quand ils virent son épitaphe, ils furent saisis d’étonnement & d’indignation. […] Il saisit cette occasion pour se distinguer ; il attisa le feu de la discorde ; enfin, en 1744, il publia deux volumes in-4°.
Ils se prononcent dans sa conscience, quand il saisit la plume, avec une irrésistible autorité. […] Vous y saisirez à plein le passage du réalisme physique au réalisme moral. […] C’est la perfection de l’art, et vous ne saisissez l’art nulle part, tant chaque mot est nécessaire d’une nécessité profonde, absolue. […] Je me souviens, comme si c’était hier, de l’après-midi où je commençai de lire ce livre, et de la révélation qui me saisit qu’un beau génie venait de naître. […] Nous saisissons ici un bienfait de la discipline apprise chez Taine.
Les voleurs revinrent comme de coutume, et celui des deux qui entra le premier, s’étant approché d’un de ces vases, fut saisi subitement par le piége. […] Pour dissiper le doute où cette vue le jeta, il imagina d’ordonner que le cadavre fût attaché à une muraille ; et, plaçant des gardes alentour, il leur enjoignit de saisir et de lui amener tous ceux qu’ils verraient pleurer ou témoigner quelque pitié à ce spectacle. […] Interrogé par elle comme les autres, il lui dit : « que ce qu’il avait fait de plus hardi et de plus criminel était d’avoir coupé la tête de son frère, pris à un piége tendu dans le trésor du roi ; et que ce qu’il avait fait de plus adroit était d’être parvenu à enlever le corps de ce frère, après avoir enivré les soldats chargés de le garder. » Lorsque la fille du roi entendit cet aveu, elle se jeta sur le jeune homme et crut l’avoir arrêté, mais comme elle n’avait saisi que le bras mort dont il s’était muni, il s’évada par la porte et parvint à s’enfuir. […] Quant aux deux généraux, voici ce qui se passa entre eux : lorsque Artybius, monté sur son cheval, se porta à la rencontre d’Onésilus, celui-ci, comme il en était convenu avec son écuyer, frappa le général des Perses ; mais, tandis que le cheval, se dressant, lançait ses pieds sur le bouclier d’Onésilus, le Carien saisit cet instant et coupe avec une faux, dont il était armé, les jarrets de l’animal, qui tombe et entraîne dans sa chute Artybius. » XIV Erato, ou livre sixième, commence ici par le récit d’une grande bataille navale que les Ioniens perdirent en combattant pour la cause de Darius, leur allié.
La valeur littéraire des événements est dans leurs conséquences psychologiques, morales, sociales, et ce sont ces conséquences qu’il s’agit de saisir. […] La croix de Saint-André dessinée par Carmen avec un couteau sur la joue d’une camarade de la manufacture n’est pas un incident vulgaire, choisi au hasard pour amener une nouvelle rencontre des deux personnages ; il permet de saisir immédiatement le fond de sauvagerie du caractère de Carmen ; c’est de la psychologie en action. […] Voir de près, de tout près même, est assurément la meilleure condition pour saisir les détails dans leur plus rigoureuse précision, mais cela être aussi un excellent peut moyen de borner sa vue à ces seuls détails : ils grandiront de toute l’attention qui leur sera prêtée, et leur relation avec l’ensemble pourra en être altérée d’autant. Pour bien saisir les proportions des différentes parties d’un tout, le plus sûr est encore de regarder à une certaine distance, la netteté de quelques détails dût-elle en souffrir.
Mais à côté de cette ressemblance définie et perçue qui consiste dans la communauté d’un élément saisi et dégagé par l’esprit, il y a une ressemblance vague et en quelque sorte objective, répandue sur la surface des images elles-mêmes, et qui pourrait agir comme une cause physique d’attraction réciproque 18. […] Or c’est un fait d’observation courante que l’impuissance du malade, en pareil cas, à saisir ce qu’on pourrait appeler le mouvement des lettres quand il essaie de les copier. […] Je puis saisir une mélodie, en suivre le dessin, la fixer même dans ma mémoire, et ne pas savoir la chanter. […] Notons en effet que ce souvenir est, par hypothèse, chose inerte et passive, incapable par conséquent de saisir sous des différences extérieures une similitude interne.
Aimez-vous les bulles de savon, qui s’irisent si joliment au soleil et qui crèvent sous le doigt dès qu’on veut les saisir ? […] Il faut un petit effort pour en saisir l’unité ; mais l’occasion est bonne pour tâcher de définir le poète. […] Elle sait choisir le détail qui saisit, le trait qui enfonce. […] Il sent et saisit leur âme, leur donne une expression humaine, dussent elles paraître fantastiques et irréelles. […] Faguet serait-il trop simpliste pour saisir ce double mouvement si facile à constater ?
Son zèle à servir nos braves soldats atteints du typhus faillit lui devenir funeste ; saisi lui-même par le fléau, il fut près de payer de sa vie son humanité, et Metz qui avait été témoin de ce dévouement du jeune professeur s’en est ressouvenu toujours : cette noble cité était devenue pour Armand Paulin une seconde patrie ; ses amis de Metz sont restés fidèles jusqu’à la fin à cet enfant, adoptif, à ce cœur généreux dont ils avaient vu le premier élan.
Il y a toujours sans doute beaucoup de tendresse et de douce intimité dans les lettres du philosophe à sa maîtresse ; mais la passion éclatante, épurée, et par moments sublime, a disparu dans une causerie plus molle, plus patiente, plus désintéressée ; les nouvelles, les anecdotes, les conversations sur toutes choses, s’y trouvent comme auparavant ; une analyse ingénieuse et profonde du cœur y saisit toujours et y amuse ; mais la verve de l’esprit supplée fréquemment à la flamme attiédie de la passion ; un gracieux commérage, si l’on peut parler ainsi, occupe et remplit les heures de l’absence ; on s’aime, on se le dit encore, on ne sera jamais las de se le dire ; mais par malheur les cinquante ans sont là qui avertissent désagréablement le lecteur et le désenchantent sur le compte des amants ; les amants eux-mêmes ne peuvent oublier ces fâcheux cinquante ans qui leur font l’absence moins douloureuse, la fidélité moins méritoire, et qui introduisent forcément dans l’expression de leurs sentiments les plus délicats, je ne sais quelle préoccupation sensuelle qui les ramène à la terre et les arrache aux divines extases de l’âme où s’égare et plane en toute confiance la prodigue jeunesse.
J’arrivai, mais à peine eus-je effleuré les bords Qu’un frisson douloureux me saisit tout le corps, J’étais en face de mon âme.
C’était la Préface du Saint-Paulin (1680), où Charles Perrault saisissait l’Art poétique par son point faible, par l’étroite théorie du merveilleux païen.
Curieux de se renseigner et de saisir un point d’appui, il court partout où l’on récite des vers.
Le parallele qui nous a paru le mieux saisi & le plus abrégé, est celui de M. l’Abbé d’Olivet.
C’est à la prédominance peut-être d’une telle accélération qu’il faut attribuer ces états intermédiaires qu’en tout ordre de phénomènes nous ne parvenons pas à saisir.
On l’eût couvert de honte, si l’on avoit profité de leurs divisions intestines ; mais Balzac ne voulut jamais saisir ce moyen de vengeance.
C’est dans ces écrits périodiques que Desfontaines a paru aux yeux de ses partisans l’Aristarque de nos jours : c’étoit à leur gré un critique judicieux, qui avoit le tact sûr, avec un talent singulier pour saisir les beautés & les endroits foibles d’un ouvrage ; pour les présenter au public dans leur vrai point de vue, pour les lui présenter d’une manière élégante & enjouée ; un observateur qui mettoit de l’intérêt dans les moindres choses, qui sçavoit l’art d’amuser & d’instruire, de fondre habilement, dans l’occasion, toute cette érudition qu’il avoit puisée dans les meilleurs écrivains anciens & modernes.
ton autre moitié te réclame. » En parlant ainsi, ta douce main saisit la mienne : je cédai ; et depuis ce temps j’ai connu combien la grâce est surpassée par une mâle beauté, et par la sagesse qui seule est véritablement belle.
une attention docile qui vous permet tout au plus de saisir quelques détails et de vous approprier de vagues réminiscences.