Cependant les choses diverses que, durant cette excursion, il avait senties ou observées, apprises ou devinées, cherchées ou trouvées, vues ou entrevues, il les avait déposées, chemin faisant, dans des lettres dont la formation toute naturelle et toute naïve doit être expliquée aux lecteurs. […] Quant à l’Allemagne, qui est à ses jeux la collaboratrice naturelle de la France, il croit, dans les considérations qui terminent le second de ces deux volumes, l’avoir appréciée justement et l’avoir vue telle qu’elle est.
Nul aperçu, nulle vue particulière à l’auteur n’y domine et n’y décide les conclusions de parti, qui ne s’y expriment pas, mais qui y soupirent. […] Ne pas perdre de vue l’époque où ceci a été écrit.
… Mais, s’il perd encore la partie, il faut au moins que la Critique, qui aime le talent partout où il est et qui doit le montrer aux autres, sous peine de n’être qu’une grande sotte à vue basse, il faut que la Critique dise bien haut que la carte était belle et qu’il n’y avait ni obstination, ni infatuation, ni même présomption à la jouer. […] Au vol de la mitraille, vous l’auriez vue, comme une troupe d’oies effarouchées, s’enfuir en poussant de grands cris et en injuriant les saints.
Il y a l’introduction vaillante du mysticisme chrétien dans l’histoire, en vue d’expliquer des faits trop grands pour être naturels. Avec les tendances du xixe siècle et le despotisme tracassier de sa raison, ceci est une audace, et cette audace, on ne l’avait pas vue se produire une seule fois, depuis cette tentative d’invasion sacerdotale, le Discours sur l’histoire universelle du sieur Bossuet.
Sans le mot enthousiaste de Mme de Staël dans son Allemagne, un autre mot plus grave et mieux, pesé de J. de Maistre dans ses Soirées de Saint-Pétersbourg, l’image de Joubert qui en fait un aigle avec des ailes de chauve-souris, et quelques lignes impertinentes de Chateaubriand dans ses Mémoires d’outre-tombe, qui donc, dans le monde du dix-neuvième siècle, connaîtrait de vue Saint-Martin, sinon les curieux qui lisent tout et qui se font des bibliothèques de folies ? […] Caro s’est bien gardé d’une vue si superficielle et si confiante.
Il y a des affirmations parfois, mais bien plus souvent des tendances qui sont comme une aurore d’idées, un peu brumeuse encore, il est vrai, mais à travers laquelle les philosophes, qui ont la vue bonne, voient très clair. […] Révolutionnaire, quoiqu’il dise pour s’en défendre, l’auteur de la Nature des Sociétés humaines a écrit « que les révolutions sont les suprêmes efforts du genre humain pour découvrir les vraies conditions de sa vie, pour les définir exactement et s’y soumettre » ; ce qui revient positivement à dire que toutes les ivrogneries de la colère doivent servir à clarifier la vue ; singulier collyre, il faut en convenir !
Or, de cette finesse de détail on ne peut séparer les aperçus, les nouveautés de vue, le piquant des observations et des rencontres. […] De Balzac comme de Shakespeare, comme de tous les artistes plus grands qu’eux, s’il y en avait, rien un jour pourrait ne rester, si ce n’est l’observation qui transperce tout, les cris de nature bravement rugis et qui trouvent toujours le même écho dans les cœurs semblables, et enfin les vues inattendues de l’esprit, incarnées en des mots qui les rendent plus spirituelles encore.
On encourt la même accusation d’incompétence, si l’on ne prend pas soin de dissimuler la joie de beauté qu’est susceptible d’éveiller la vue d’un de ces hardis et gigantesques ponts de fer suspendus au-dessus de l’abîme, décrivant une courbe d’un prodigieux élan. […] Originalité, beauté, également puissantes, tels sont les deux caractères dont la révélation vous saisit à première vue.
Il prétend que le droit des enfants de Dieu s’étendit à toutes les nations, sans faire attention au caractère inhospitalier des premiers peuples, ni à la division établie entre les Hébreux et les Gentils ; sans observer que les Hébreux ayant perdu de vue leur droit naturel dans la servitude d’Égypte, il fallut que Dieu lui-même le leur rappelât en leur donnant sa loi sur le mont Sinaï. […] Les Romains disaient aussi templa cœli, pour exprimer la région du ciel désigné par les augures pour prendre les auspices ; et par dérivation, templum signifia tout lieu découvert où la vue ne rencontre point d’obstacle ( neptunia templa , la mer dans Virgile). — Les anciens Germains, selon Tacite, adoraient leurs Dieux dans des lieux sacrés qu’il appelle lucos et nemora , ce qui indique sans doute des clairières dans l’épaisseur des bois.
On regarde pousser les jolies filles à vue d’œil, comme des asperges. […] Il faut cinq à six minutes pour gagner cette terrasse qui a vue sur la route. […] Il ne le perdit jamais de vue. […] c’est vous, mon cher ami, je ne vous reconnaissais pas ; vous savez, j’ai la vue si basse… Vous me demandiez ? […] Un sinistre changement à vue transforme ses bacchanales en sabbat.
C’est, ensuite, un manque de vues générales. […] La puissance de vue d’un Le Play, sa divination, sont remarquables. […] Comme tireur d’inductions, assembleur de vues d’avenir, il ne vaut rien : et ce qu’il a annoncé, ou ne s’est pas réalisé, ou s’est réalisé au rebours. […] Il est bien vrai qu’un grand nombre d’auteurs, doués ou se croyant doués pour les vues d’ensemble, y ont affiché des prétentions philosophiques. […] La stérilité, et donc l’extinction familiale française, étaient dans les vues de ce hideux messianique, véritable assassin de la famille de chez nous.
Car au point ; de vue militaire, les termes sont renversés. […] Je n’apporte ni une vue nouvelle sur la nature des êtres, ni une vue nouvelle sur la méthode des sciences ; j’apporte une exhortation à la vertu. […] La sévérité des gendarmes littéraires du Journal de l’Empire secondait ses vues. […] Nous l’avons vue prendre d’assaut la philosophie catholique et matérialiste ; nous allons la voir s’emparer de ce que les classiques se plaisaient à nommer le sceptre de la critique. […] Dumas contribua à créer le mélodrame ou drame à effet, mêlé de tableaux, de changements à vue, de splendeurs scéniques dont l’ancien théâtre n’avait jamais donné l’exemple ; mais sans style, sans aucune recherche ou qualité littéraire.
Mais la grande vue à saisir pour l’historien moderne, c’est le changement que le christianisme a opéré dans l’ordre social.