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640. (1891) Impressions de théâtre. Cinquième série

Sa voix me faisait mal. […] Ma voix elle-même m’effraye comme un son étranger. […] Et tandis que le gros cheval blanc tournait autour de la piste, elle était d’abord la bergère qui entend les Voix sous l’arbre des fées. […] Et il faut entendre cette voix de gorge, cette voix aux éclats bizarres et aux notes innomées, cette voix qui… Mais, si cela ne vous fait rien, nous la définirons une autre fois. […] demande-t-elle d’une voix subitement altérée. — Je ne sais pas ; je ne l’ai jamais vue que le soir. — Elle est spirituelle ?

641. (1888) Portraits de maîtres

Les voix firent silence quand retentit le Chant. […] Bientôt la protestation taciturne de ses parents fut étouffée par la voix des alarmes retentissant sur le sol français comme l’avant-courrière de l’invasion. […] L’Allemagne par toutes ses voix a soutenu depuis un siècle le respect des choses humaines consacrées par l’histoire. […] Les Quatre jours d’Elciis, le Cercle des tyrans, la vision de Dante, y font presque seuls entendre la grande voix d’airain de l’épopée. Mais cette voix, si naturelle à Victor Hugo, avait encore vibré dans des œuvres de genres différents.

642. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Rebell, Hugues (1867-1905) »

Moréas est un des bons poètes de ce temps, et celui qui dans ses Chants de la Pluie et du Soleil fait surgir si splendidement nue de la mer féconde Vénus Anadiomène, celui-là est plus apte que quiconque à comprendre cet Hellène et à saisir les nuances de celui qui — s’il fut archaïque — ne se ferma pas entièrement aux voix naturelles de la vie et aux chants très modestes des pâtres près des sources jonchées d’asphodèle.

643. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Samain, Albert (1858-1900) »

Pierre Quillard Parmi les arbres d’un parc automnal que l’imminence de la mort pare d’une beauté touchante et solennelle, sur des eaux lentes parfumées au crépuscule de pâles roses et de violettes pales, près d’une seigneuriale demeure qui s’écroule au milieu des hautes herbes et atteste une existence dix fois séculaire par l’effondrement des majestueuses salles romanes et des étroits boudoirs, encore tendus de molles étoffes en lambeaux, là et point ailleurs, il faut se réciter d’une voix mêlait colique et fière les vers de M. 

644. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre premier. Beaux-arts. — Chapitre premier. Musique. — De l’influence du Christianisme dans la musique. »

C’est là qu’elle élève la voix vers le firmament, au milieu des concerts de la nature : la nature publie sans cesse les louanges du Créateur, et il n’y a rien de plus religieux que les cantiques que chantent, avec les vents, les chênes et les roseaux du désert.

645. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre premier. Beaux-arts. — Chapitre VI. Architecture. — Hôtel des Invalides. »

On en voit un exemple remarquable dans l’hôtel des Invalides et dans l’École militaire : on dirait que le premier a fait monter ses voûtes dans le ciel, à la voix du siècle religieux, et que le second s’est abaissé vers la terre, à la parole du siècle athée.

646. (1882) Hommes et dieux. Études d’histoire et de littérature

Dans la tragédie d’Euripide, Hippolyte, son favori le plus cher, entend sa voix sans voir son visage. […] A la douceur de sa plainte, vous diriez que la voix du cygne vient de s’éveiller en elle pour pleurer le mort : — « Hector ! […] Par instants, on croirait entendre la voix d’un Père du désert. […] On les voit rarement, on connaît à peine le son de leurs voix. […] La voix féminine du chanteur Farinelli pouvait seule calmer son délire.

647. (1896) Écrivains étrangers. Première série

Il nous joua tous les passages importants de ses Maîtres Chanteurs, imitant toutes les voix. […] Et tandis qu’ils parlaient, nous entendions des voix, plus profondes, qui n’étaient à personne. […] Le monde, qui lui avait semblé jadis peuplé de dieux, à présent se peuplait pour lui de voix douloureuses qui l’appelaient. […] Prenant un ton de voix solennel et tragique, le ton de voix que prenait Disraeli dans les grandes circonstances, il lisait à M.  […] Au milieu de ce petit tumulte, résonnent par instants, les voix défraîchies de Hugo, de Lamartine et de George Sand.

648. (1828) Préface des Études françaises et étrangères pp. -

Mais l’ombre d’André Chénier ne devait être évoquée que par une voix toute poétique : M.  […] C’est le son de voix, c’est la physionomie, c’est le regard. […] Certains beaux vers sont plus difficiles à réciter que certains autres, mais qu’une voix habile vous les lise, et vous serez surpris d’y trouver des grâces et des effets que vous chercheriez en vain dans des vers en apparence plus mélodieux. […] Nous manifestons notre sentiment sur l’état actuel de la littérature et de la poésie en France, parce qu’il nous semble que la plus faible voix peut lancer quelques paroles utiles ; du reste, nous ne parlons que d’après notre profonde conviction, sans nous occuper du plus ou moins de succès des ouvrages que nous estimons, sans chercher à flatter l’opinion de la foule ni même à nous mettre en opposition avec elle.

649. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Poésies complètes de Théodore de Banville » pp. 69-85

fraîches fontaines Qui, douces à mes peines, Frémissiez autrefois     Rien qu’à ma voix ! […] Pour la première fois,     D’ouïr sa voix ; Où rêveuse, l’amie Doucement obéie, S’appuyant à mon bras,     Parlait tout bas ; Pensive et recueillie, Et d’une fleur cueillie Brisant le cœur discret,     D’un doigt distrait, À l’heure où, sous leurs voiles, Les tremblantes étoiles Brodent le ciel changeant De fleurs d’argent.

650. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Étude sur la vie et les écrits de l’abbé de Saint-Pierre, par M. Édouard Goumy. L’abbé de Saint-Pierre, sa vie et ses œuvres, par M. de Molinari. — II » pp. 261-274

Le bon abbé, dans cette condamnation où l’on ne voulut pas l’entendre, n’eut pour lui, au scrutin secret, qu’une seule voix, celle de Fontenelle. Le duc de La Force, un singulier académicien, eut le front de dire un jour à l’abbé, Fontenelle présent, que cette voix unique, cette boule blanche était la sienne.

651. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo, Les Chants du crépuscule (1835) »

non, tout cela n’est pas menteur ; c’est la voix de Dieu même qui parle par ces instruments magnifiques, où, pendant le saint moment, a disparu toute souillure. — Nous renvoyons bien vite le lecteur, excité par notre analyse, à ce grand morceau de poésie ; nous n’y voudrions retrancher ou corriger que deux endroits. […] L’autre endroit que je voudrais corriger est celui où l’auteur montre la cloche et l’âme chantant et sonnant à la voix du Seigneur, quelles que soient les souillures contractées ; le passage finit par ce vers : Chante, l’amour au cœur et le blasphème au front.

652. (1861) Cours familier de littérature. XI « Atlas Dufour, publié par Armand Le Chevalier. » pp. 489-512

qu’est-ce que le Japon, et quelle vaine manie d’expédition, sans possessions et sans intérêt, vous pousse à aller bouleverser à coup de boulets français ces fourmilières pacifiques et industrieuses, à la voix de quelques propagandistes agitateurs du monde, qui veulent imposer des mœurs européennes à des peuples qui vivent de dogmes asiatiques ? […] En un mot, la main d’un enfant, grâce à cet atlas mnémonique du monde, nous décrirait le cours du temps, et sa voix nous raconterait jusqu’à nos jours les destinées universelles de la terre ; vous auriez cherché à faire un simple géographe, et vous auriez fait un historien, un moraliste, un philosophe, un politique, un théologien universel, un homme enfin embrassant d’un coup d’œil toutes les faces de l’humanité.

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