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2184. (1885) Les étapes d’un naturaliste : impressions et critiques pp. -302

Ysabeau, ancien oratorien défroqué, possédait une instruction bien supérieure à celle de son collègue, mais emphatique comme tous les orateurs du temps, il était en outre pédant. […] Mme Lebreton qui, en dépit des premiers signes que la maturité esquissait sur son visage, conservait une sorte de jeunesse latente, qui avait l’esprit et l’intelligence dans une société qui ne connaissait que la méchanceté et la petitesse des intrigues, parut au garde général une sorte d’être supérieur, auquel son cœur n’osa rêver de s’élever. […] Invasion normande, francisation du royaume, culture du clergé normand si supérieur à l’ancien clergé national, rien ne put cependant tuer la langue et l’esprit saxons. […] Maxime du Camp qui, au minimum, a écrit un bon livre, ses Souvenirs, et, ce qui est d’un homme supérieur, l’a écrit depuis qu’il est académicien !

2185. (1890) La bataille littéraire. Troisième série (1883-1886) pp. 1-343

Elle se demandait ce qui pouvait rester, dans un affolement pareil, pour la vie de famille, pour l’intérieur, pour l’étude et pour la culture de l’esprit, les retraites de la pensée dans les régions supérieures, enfin pour l’intervalle entre la vie et la mort. […] Ses tristesses et ses révoltes s’exaltaient encore quand elle se disait qu’en France et au dehors on jugeait du ton et des mœurs de la société française sur l’échantillon de cette élite artificielle, mélangée et tapageuse, dont les fêtes, les aventures, les scandales, les toilettes faisaient chaque matin la joie des reporters et la jubilation railleuse du public. — À l’heure du siècle où nous sommes, et dans l’état des esprits en France, au moment où une sorte de jacquerie morale, en attendant mieux, déchaîne dans les foules populaires des appétits et des convoitises désormais sans frein, Mme de Vaudricourt, sans s’occuper autrement de politique, était atterrée de voir chez la partie la plus apparente des classes supérieures une si belle insouciance et une préoccupation si exclusive de se divertir. […] De ce qu’un gamin de Paris écarte par une plaisanterie des croyances dont la raison d’un Pascal ne réussit pas à se dégager, il ne faut cependant pas conclure que Gavroche est supérieur à Pascal.

2186. (1891) La bataille littéraire. Quatrième série (1887-1888) pp. 1-398

Les convenances n’existant pas pour moi, jamais je ne tiens compte du pacte mondain du public, parce que l’œuvre lui est supérieure et le dépasse. […] De guerre lasse et fort endolori, je m’apprêtais à prendre congé du très serviable bureaucrate qui s’était en vain mis en quatre pour me complaire, lorsque, tracé fort lisiblement en caractères majuscules sur l’une des pages de ces cahiers, le nom d’un officier supérieur que j’avais souvent entrevu sous l’empire à la tête des fières légions de Crimée et d’Italie me tira l’œil, et tout à coup, presque malgré moi, un cri s’exhala de ma gorge : « Il doit être couché là, le poète, à côté de ce soldat ! […] Voici, par exemple, un petit tableau bien vrai pour ceux qui savent ce que c’est qu’un ministère : Onze heures. — L’heure des audiences est le moment où les antichambres de chaque direction générale s’emplissent de visiteurs, depuis le sénateur ou le député, qui le prend de très haut avec l’huissier, et qui est reçu d’emblée au vu de sa carte, jusqu’au timide solliciteur, qui arrive le cœur palpitant, salue jusqu’à terre le, moindre garçon de bureau, écrit en tremblant son nom sur un carré de papier, s’assied sur l’extrême bord d’une banquette et attend nerveusement, tête nue, les mains croisées sur le bec de son parapluie, parfois pendant deux heures, son tour d’audience, toujours retardé par des visites privilégiées. — À chaque instant, du fond des couloirs, on entend des tintements de sonnettes : sonnerie impérieuse et brève du directeur général, sonnerie prolongée et agaçante du sous-directeur, sonnerie plus réservée du simple chef. — À chaque instant aussi, le corridor est traversé par le pas précipité des employés qu’on appelle chez un supérieur, ou par les pas traînants et appesantis des garçons de bureau qui vont transmettre un ordre pressé… Ceux qui ont souffert les douleurs de l’antichambre comprendront la vérité de ce croquis.

2187. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « Essai, sur les règnes, de Claude et de Néron. Livre premier. » pp. 15-203

Vous avez plus d’élévation dans l’esprit que vos frères ; à un talent supérieur pour les bonnes connaissances, vous réunissez une belle âme : vous pourriez être corrompu par l’excellence même de votre génie. […] Quand il entendait parler Attale contre les vices et les erreurs du genre humain, il le regardait comme un être d’un ordre supérieur. « Attale, ajoute Sénèque (Lettre XVIII) se disait roi, et je le trouvais plus qu’un roi, puisqu’il faisait comparaître les rois au tribunal de sa censure. […] Agrippine s’adresse au médecin Xénophon, homme supérieur, qui n’aurait pas été, je crois, fort émerveillé de la distinction subtile d’un fameux archiatre de nos jours entre l’assassinat positif et l’assassinat négatif, mais qui ne connaissait pas mieux que le facultatiste le péril auquel on s’expose en commençant un forfait et la récompense qu’on s’assure en le consommant. […] « La bonne intelligence où vécurent ces deux gouverneurs, dit Bayle, fait connaître qu’ils avaient un grand fonds de probité, et qu’ils songeaient principalement au bien public en élevant ce jeune prince, qui, sous de tels maîtres, serait devenu un empereur accompli, si une méchanceté supérieure de naturel n’avait rendu inutiles tous leurs soins », BAYLE, Dict. hist. et crit.

2188. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Alexis Piron »

Gœthe, très au fait de cette partie de notre littérature, a dit, à ce propos, avec bien de la justesse : « Jamais Piron ne put démentir sa nature indisciplinée ; ses vives saillies, ses épigrammes mordantes, l’esprit et la gaîté qui toujours étaient à ses ordres, lui donnèrent une telle valeur aux yeux de ses contemporains qu’il put, sans paraître ridicule, se comparer à Voltaire, qui lui était pourtant si supérieur, et se poser, non pas seulement comme son adversaire, mais comme son rival. » Et les premiers traducteurs de Gœthe, renchérissant sur sa pensée et jaloux de la compléter, ajoutent assez spirituellement et par une image qu’il n’eût point démentie : « Comme il était le Voltaire du moment, on l’excusait de se mettre en parallèle avec le Voltaire des siècles.

2189. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre premier. — Une leçon sur la comédie. Essai d’un élève de William Schlegel » pp. 25-96

Mais si une petite cité voisine avait choisi pour elle les institutions parfaites de la République, et que sa conduite fut restée conforme à cet idéal supérieur, quels n’auraient pas été à son aspect les sentiments de ces philosophes étrangers qui voyageaient par toute la terre pour trouver un modèle de législation ?

2190. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins » pp. 185-304

« Quand j’aurai chanté en moi-même et pour quelques âmes musicales comme la mienne, qui évaporent ainsi le trop-plein de leur calice avant l’heure des grands soleils, je passerai ma plume rêveuse à d’autres plus jeunes et plus véritablement doués que moi ; je chercherai dans les événements passés ou contemporains un sujet d’histoire, le plus vaste, le plus philosophique, le plus dramatique, le plus tragique de tous les sujets que je pourrai trouver dans le temps, et j’écrirai en prose, plus solide et plus usuelle, cette histoire, dans le style qui se rapprochera le plus, selon mes forces, du style métallique, nerveux, profond, pittoresque, palpitant de sensibilité, plein de sens, éclatant d’images, palpable de relief, sobre mais chaud de couleurs, jamais déclamatoire et toujours pensé ; autant dire, si je le peux, dans le style de Tacite ; de Tacite, ce philosophe, ce poète, ce sculpteur, ce peintre, cet homme d’État des historiens, homme plus grand que l’homme, toujours au niveau de ce qu’il raconte, toujours supérieur à ce qu’il juge, porte-voix de la Providence qui n’affaiblit pas l’accent de la conscience dont il est l’organe, qui ne laisse aucune vertu au-dessus de son admiration, aucun forfait au-dessous de sa colère ; Tacite, le grand justicier du monde romain, qui supplée seul la vengeance des dieux, quand cette justice dort !

2191. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre III. Variétés vives de la parole intérieure »

L’imaginatif ne se croit jamais seul ; il promène avec lui ses enfants, ses amis, ses ennemis, ses supérieurs, tous ceux dont l’existence est liée à la sienne et peut l’émouvoir en joie ou en tristesse.

2192. (1925) Feux tournants. Nouveaux portraits contemporains

Une vue superficielle d’André Breton ne serait pas pour rassurer ; pourtant c’est une des figures les plus attrayantes de la génération en passe d’atteindre la trentaine, et d’une classe intellectuelle évidemment supérieure à celle de Goll et de Dermée, dont les manifestes surréalistes sont moins discutables que le sien. […] L’accès du primaire au secondaire, du secondaire au supérieur, il prit des mesures pour le faciliter.

2193. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre premier. Ce que devient l’esprit mal dépensé » pp. 1-92

Ce théatin était un bonhomme déjà fort âgé, très obéissant à son évêque, à ses supérieurs, qui, depuis vingt ans, était régent de philosophie et de théologie, sans avoir encouru la plus petite censure. […] » Il indique aussi, comme bien supérieures à la tragédie de Racine, les tragédies de Sophocle qui avaient laissé l’amour à la comédie, « comme une passion qui ne pouvait soutenir le sublimité et la grandeur du tragique ! 

2194. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre septième. Les altérations et transformations de la conscience et de la volonté — Chapitre deuxième. Troubles et désagrégations de la conscience. L’hypnotisme et les idées-forces »

Dessoir veut voir là une preuve de l’activité indépendante du moi souterrain s’exerçant sans que le moi supérieur le sache.

2195. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface de « Cromwell » (1827) »

C’est elle qui, s’unissant à tout ce qu’il y a de supérieur et de courageux dans les lettres, nous délivrera de deux fléaux : le classicisme caduc, et le faux romantisme, qui ose poindre aux pieds du vrai.

2196. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre I. La Restauration. »

Les parties supérieures de sa nature disparurent ; il n’en resta que l’animal sans frein ni guide, lancé par ses convoitises à travers la justice et la pudeur. […] Il a écrit la meilleure comédie, l’École de médisance ; le meilleur opéra, la Duègne (bien supérieur, selon moi, à ce pamphlet populacier, l’Opéra du Gueux) ; la meilleure farce, le Critique (elle n’est que trop bonne pour servir de petite pièce) ; la meilleure épître, le monologue sur Garrick.

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