Byron n’y manque pas, et ajoute à toutes ces séductions la fantasmagorie de la scène, le décor oriental ou pittoresque ; les vieux châteaux des Alpes, les vagues de la Méditerranée, les soleils couchants de la Grèce, le tout en haut relief, avec des ombres marquées et des couleurs voyantes. […] C’est lui qui parle ici ; ses personnages ne sont que des paravents ; même la moitié du temps, il les écarte pour occuper la scène.
En quelque sorte il crée l’univers dans une partie de sa durée ; il provoque, en com-prenant les choses dans son intelligence, la représentation d’une scène du drame. […] Je ne pense pas qu’elles lui soient nécessaires pour se soutenir ; mais son émotion est si intime, si uniquement musicale qu’elle ne saurait comment composer d’elle-même son maintien extérieur et qu’elle accepte avec joie un visage tout fait, ainsi que les acteurs des tragédies grecques, n’accordant d’importance qu’à la substance même de leurs paroles, pour les prononcer sur la scène prenaient des masques. […] La musique de Debussy n’est plus que d’indication ; elle semble se retirer au second plan, se transformer peu à peu en un exquis mais sommaire décor, et laisser vide la scène. […] Les Scènes Polovtsiennes du Prince Igor, de Borodine Tout de suite je revois Fokine avec sa troupe d’archers. — Il n’est rien dans la musique qui ressemble à ces quelques pages de Borodine.
Cependant, de quelque jalousie d’état dont les peintres & les sculpteurs aient été dévorés en différens temps ; quelque rivalité qu’il y ait eu de peintre à peintre ou de sculpteur à sculpteur, jamais le public, à l’exception de la haine extrême de Michel Ange pour Raphaël, & de Le Brun pour Le Sueur, n’a vu, de leur part, des scènes trop vives. […] Toutes ces scènes éclatèrent dans le public. […] La ville de Beziers fut témoin d’une scène qui amusa tout le royaume. […] Il faut convenir qu’à cette scène près, donnée par les carmes de France, ils ne firent point parler d’eux, & qu’ils laissèrent ceux des pays-bas terminer la dispute qu’ils avoient commencée, satisfaits d’être eux-mêmes tranquilles spectateurs.
Les scènes où vont s’affronter Eugénie et son père en prennent un relief plus saisissant. […] Acceptons aussi que ces scènes, qui évoluent toutes dans la vie privée, soient présentées sur un ton si voisin d’être épique. […] Vous vous souvenez des vers de Musset : Pourquoi Manon Lescaut, dès la première scène, Est-elle si vivante et si vraiment humaine, Qu’il semble qu’on l’a vue et que c’est un portrait ? […] Ce don de la caricature révélatrice lui a servi à graver ces eaux-fortes de la vie politique, ou plutôt politicienne, qui s’appellent : Leurs Figures, les Scènes et doctrines du nationalisme, et surtout Dans le Cloaque.
Que de pareilles scènes soient infiniment regrettables, comme l’a dit M. le rapporteur, je le sais, — je le sais par expérience et pour y avoir passé moi-même (car j’ai eu aussi, dans mon temps, ma part de ces tempêtes scolaires) [mouvement] : mais le professeur n’a mérité aucun blâme.
Voltaire disait encore qu’il estimerait moins les Provinciales si elles avaient été écrites après les comédies de Molière : on comprendra ce jugement paradoxal, si l’on regarde avec quelle puissance expressive, quel sens du comique, et quel sûr instinct de la vie, sont dessinées les physionomies des personnages que Pascal introduit ; deux pères jésuites surtout, subtils et naïfs, celui dont l’ample figure occupe la scène de la 5e à la 10e lettre, et celui dont la vive esquisse illumine la 4e Provinciale.
Tous les illustres amants de l’antiquité occupaient la scène.
Les promiscuités de la nature étaient mises en scène par leurs mythes dont Bacchus sera désormais l’agent enthousiaste.
Votre toile, ô peintre des âmes, ce n’est pas cette feuille de papier que noircit votre plume, ce n’est pas cette scène de planches où marchent vos personnages, c’est l’âme du spectateur.
Ainsi, dans La Légende des siècles, il y a des scènes d’une majestueuse simplicité et de l’expression la plus naïvement idéale, empruntées au monde de la Bible et de l’Évangile, la Conscience, Daniel dans la Fosse aux Lions, Booz, La Résurrection du Lazare, mais justement c’est par le Moyen Age que le poète est remonté à ces sources d’inspiration d’où est descendu l’esprit du Moyen Age sur la terre !
Voyez encore, sobre et serrée, mais d’un relief si net, la description de Venise ; et pour savoir comment Commynes fait le « tableau », la scène de Mademoiselle de Bourgogne au milieu du peuple de Gand qui veut faire mourir le chancelier Hugo net et le seigneur de Hambercourt. […] Mais il ne fait qu’en tracer le programme et il quitte vite la scène, transit delirando. […] Il y a même, relativement au scepticisme aperçu déjà, ou prévu, une scène grave et presque solennelle dans ce livre bouffon. Cependant que Panurge consulte Trouillogan dans une scène merveilleuse, imitée plus tard par Molière, et que Trouillogan lui répond : « Il se pourrait ; il y a apparence ; par aventure ; la chose est faisable, etc. », le vieux Gargantua, qui ne disait mot, « se lève » tout à coup et dit avec tristesse : « Loué soit le bon Dieu en toutes choses ! […] Son imagination, qui était magnifique dans le bouffon d’abord, et même aussi dans la conception de grandes scènes humaines ou naturelles, comme batailles et tempêtes, n’a pas laissé d’être un peu limitée par son bon sens.
Violentes l’une et l’autre, les deux scènes sont analogues. […] Le soir, dans sa loge, avant son entrée en scène, déjà maquillée, elle voit au miroir son visage, comme celui d’une étrangère aux yeux profonds, les paupières frottées d’une pâte violette. […] La mise en scène d’On ne badine pas avec l’amour est arrangée un peu comme une entrée de ballet. La symétrie que marque, tout au commencement, le double chœur qui accueille maître Blazius et dame Pluche, continue ; elle se prolonge de scène en scène, et dans le dialogue et dans le mouvement des personnages. […] À la scène effroyable du meurtre succède une admirable scène de sérénité pathétique : la mort de Jacques, « l’holocauste ».
Chamarrée de tendresse et d’admiration, je regardais cette pièce, et je la trouvais si belle, que mon attention a dû paraître un saisissement, dont je crois qu’on me saura fort bon gré. » Qui ne reconnaîtrait encore une femme, et la même, charmante et adorable, dans ces deux autres petites scènes, si bien enlevées ? […] Mme de Puisieux s’en est épanoui la rate ; Mademoiselle n’osait lever les yeux ; et moi, j’avais une mine… qui ne valait rien. » Cette vivacité sur un petit fait, cette passion excessive, cet acharnement, ces redoublements, ces reprises, pour développer avec un instinct oratoire, quoique dans un cadre si étroit, cet incident qui fait sa joie, tout cela révèle une femme ; en même temps que l’art de mettre en scène, et de conter, et de peindre, et de faire voir les choses, révèle particulièrement celle qui, entre toutes les femmes posséda au plus haut degré ces dons inimitables, cette magie de style ! […] qu’on fasse venir le coroner, même si la scène est en Danemark, comme dans Hamlet ! […] Pascal, sans doute, a rapporté cette pensée d’un cimetière : le bruit des pelletées tombant sur la bière lui était resté au cœur. » En effet, toute la scène des fossoyeurs, d’Hamlet, ne contient pas plus de mélancolie que ces trois lignes de Pascal. […] Le Titien, dans le repas des Pèlerins d’Emmaüs, met sous la table un chien en querelle avec un chat : détail réaliste, qui distrait l’esprit du sens de cette noble scène. — Rembrandt, plus sérieux et plus profond, a si grand’peur de le distraire, que dans le même sujet, sur la table bénie, si splendide par la lumière, il ne met rien.